Commission d'enquête chargée d'identifier les facteurs qui ont conduit à la chute de la part de l'industrie dans le PIB de la France et de définir les moyens à mettre en œuvre pour relocaliser l'industrie et notamment celle du médicamenT
Jeudi 28 octobre 2021
La séance est ouverte à dix-sept heures.
(Présidence de M. Guillaume Kasbarian, président de la commission)
La commission d'enquête procède à l'audition de M. Édouard Martin, ancien délégué syndical CFDT d'ArcelorMittal Florange, ancien député européen (Alliance progressiste des socialistes et démocrates), président de l'association Bâtir le renouveau industriel sur la démocratie et le génie écologique (BRIDGE).
Nous concluons cette session d'auditions en recevant M. Édouard Martin.
Tout le monde se souvient de votre action lorsque vous avez incarné la lutte contre l'arrêt des hauts-fourneaux. Par la suite, vous avez été élu député européen en 2014 au titre du parti socialiste européen.
Depuis la fin de votre mandat en 2019, vous avez pris la tête de l'association Bâtir le renouveau industriel sur la démocratie et le génie écologique (BRIDGE).
Je vous remercie de nous déclarer tout autre intérêt public ou privé de nature à influencer vos déclarations.
Je vous rappelle que l'article 6 de l'ordonnance du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires impose aux personnes auditionnées par une commission d'enquête de prêter le serment de dire la vérité, toute la vérité, rien que la vérité. Je vous invite donc à lever la main droite et à dire : « Je le jure ».
M. Édouard Martin prête serment.
Comme vous l'avez évoqué, nous avons pris la tête de la contestation de la fermeture des hauts-fourneaux de Florange en 2011. Force est de constater que sept ans après, les faits nous donnent raison.
Il est vrai qu'en 2011, à la suite de la crise de 2008, la demande européenne d'acier avait baissé. L'Europe doit néanmoins cesser d'être « l'idiot du village monde ».
À l'heure où je vous parle, l'Europe a définitivement réduit sa production de 40 millions de tonnes. Dans le même temps, l'Europe importe 27 millions de tonnes d'acier chaque année, produites dans des conditions déplorables et déloyales. Tout le monde sait en effet que les entreprises chinoises sont très largement subventionnées, y compris la Commission européenne.
À la différence de l'Europe, la Chine a une stratégie industrielle. Elle veut accroître au maximum sa part de marché mondial et elle s'en donne les moyens. Aujourd'hui, les matières premières et les produits transformés nous arrivent à des prix défiant toute concurrence.
Par ailleurs, ces produits ne sont pas soumis aux mêmes contraintes environnementales que les entreprises industrielles européennes. Même si les grands émetteurs européens de gaz à effet de serre reçoivent des droits à polluer gratuits pour maintenir leur compétitivité face à la concurrence déloyale de la Chine, ces quotas s'éteindront à horizon 2030.
La question est donc de savoir comment maintenir une industrie en France si nos concurrents ne respectent pas les mêmes critères que nous.
Alors que le prix de la tonne de dioxyde de carbone (CO2) a bondi et devrait progresser encore, comment inciter les entreprises les plus énergivores et celles qui émettent le plus de gaz à effet de serre à investir massivement pour parvenir à une industrie décarbonée à horizon 2050 ?
Par ailleurs, le prix du CO2 est aussi un enjeu majeur de maintien de la compétitivité mondiale. Si nous ne parvenons pas à imposer les mêmes règles à nos concurrents, dans moins de dix ans nous n'aurons plus d'industrie.
Avant de réindustrialiser la France, il faut commencer par arrêter la désindustrialisation. Malheureusement, les événements récents ne nous rassurent pas. Notre industrie est toujours en danger, notamment dans l'aluminium.
Outre le prix du CO2, l'industrie est également sensible aux prix de l'énergie. Tous les pays européens qui ont une forte tradition industrielle en sont conscients. Or au moment où je vous parle, ces prix s'envolent et provoquent des arrêts d'usines dans des aciéries (en Espagne et au Luxembourg notamment).
J'attire également votre attention sur le discours que nous tenions en 2011, lorsque nous essayions de maintenir l'activité des hauts-fourneaux de Florange.
En France, nous avons de lois qui protègent notre patrimoine culturel et notre patrimoine historique. Je pars du principe qu'une partie de l'industrie devrait relever du même principe. Il faudrait une loi de sauvegarde du patrimoine industriel.
Beaucoup ont ri de cette idée. Mais qui aurait cru qu'un jour nous manquerions de masques ? Personne.
Je pars du principe qu'il faut imaginer l'inimaginable. Je propose de réaliser un état des lieux de tous les secteurs économiques et industriels qui nous sont indispensables et de décider que quoi qu'il arrive ils font partie de notre patrimoine industriel. L'acier, le cuivre, l'aluminium, en font partie.
Je préconise aussi une autre voie pour l'Europe et pour la France. Il s'agit de faire de nos déchets les matières premières et les richesses de demain. C'est ce que j'avais déjà proposé dans un rapport élaboré lorsque j'étais député européen.
Il faut savoir qu'en France, les déchets du titane sont collectés et envoyés aux États-Unis. Ils y sont fondus pour fabriquer des pièces à forte valeur ajoutée vendues entre autres sur le marché européen. Pourquoi ne pas réutiliser ces déchets en France et en Europe ?
Il faut renforcer et muscler les filières de collecte de nos déchets, notamment les déchets industriels, pour qu'ils soient nos matières premières de demain. Ce serait d'autant plus intéressant que certains matériaux sont recyclables quasiment à l'infini.
Enfin, je donnerai l'exemple des ferrailles. C'est un marché mondial dont les principaux acheteurs sont les Chinois. Or, les Italiens sont les principaux collecteurs de ferraille et l'envoient en Chine.
Il faut sortir d'un cercle vicieux et entrer dans un cercle vertueux. Il ne s'agit pas de dire à nos partenaires économiques que nous refusons leurs produits, mais nous devons leur demander de respecter nos règles économiques, sociales et environnementales.
Merci pour ce propos introductif. Je vous poserai une question que nous avons posée à de nombreuses reprises lors des auditions : quelle importance accordez-vous aux différents facteurs qui sont souvent cités pour expliquer le recul de l'industrie en France ?
Lorsque j'ai commencé dans la sidérurgie en 1981, ce sont les fonds publics qui ont modernisé l'outil de production. Il y avait un manque d'investissement, un manque d'anticipation. Cela n'a pas été sans dégâts, il y a eu beaucoup de fermetures d'installations et de suppressions d'emplois qui ont coûté extrêmement cher à l'État français.
Ensuite, à partir de 1995 lorsque la sidérurgie a été privatisée, nous n'avons pas réussi à trouver des actionnaires stables s'inscrivant dans la durée. Cela a permis à Mittal de racheter Arcelor.
Lorsque vous regardez l'industrie allemande, les Länder sont souvent actionnaires d'entreprises stratégiques. Et quand la situation économique se dégrade, au lieu de licencier, les Allemands recourent au chômage partiel et investissent massivement dans l'outil de production. Ils profitent des périodes de moindre activité pour moderniser l'outil et mieux former leur personnel, afin d'être plus compétitifs en sortie de crise. C'est ce que beaucoup d'industriels français ne font pas.
Lorsqu'une entreprise allemande fait des bénéfices, elle en réinvestit en moyenne 80 % et en distribue 20 % aux actionnaires. En France, c'est l'inverse. Je pense que c'est l'une des causes du recul de notre industrie.
Comment est-il possible d'avoir un actionnariat stable lorsque la rentabilité est faible ?
Je pense qu'il existe des actionnaires publics (État, région, département) ou des investisseurs privés qui ont le sens du bien public, qui n'exigent pas forcément des rendements élevés.
Dans des industries comme les nôtres, des rendements de 15 % sont irréalistes. Quand vous dégagez déjà 3 ou 4 % de rendement, c'est correct.
Par ailleurs, je pense que nous devons identifier ce qui ressort de l'intérêt général et non des intérêts particuliers. Une entreprise multinationale n'a que faire des territoires. Ce qui lui importe, c'est le rendement. Est-ce vraiment compatible avec l'intérêt collectif ?
Je pense qu'il faut responsabiliser les salariés et leur donner la possibilité d'être actionnaires de leur entreprise. Il faut accroître l'actionnariat salarié.
Cette crise pourrait finalement avoir comme vertu de faire prendre conscience aux grands patrons de l'industrie qu'il n'est plus possible de marcher sur la tête. Nous avons plutôt intérêt à consolider les bases industrielles indispensables.
Il suffit de regarder la situation des semi-conducteurs pour s'en convaincre. De nombreuses entreprises de la filière automobile sont obligées d'arrêter leurs lignes de fabrication en raison de la pénurie qui frappe les semi-conducteurs.
Que se passerait-il si à la place des semi-conducteurs, la pénurie touchait des produits indispensables ? Que se passerait-il si nous n'étions plus livrés en pétrole ?
Il est donc important de conserver la maîtrise des activités industrielles indispensables au bon fonctionnement de notre pays.
Nous avons auditionné Louis Gallois il y a quelques semaines. Dans son rapport de 2012, il avait pointé un problème de faible participation des organisations syndicales ou en tout cas de la représentation des salariés. Qu'en pensez-vous, à la lumière de vos expériences ?
Lorsqu'Arcelor a été créé par la fusion de trois entreprises, des administrateurs salariés étaient présents au conseil d'administration et disposaient d'un droit de vote. Même s'ils étaient peu nombreux, ils pouvaient faire entendre la voix des travailleurs. Lorsque Mittal est arrivé, il a supprimé les trois postes d'administrateurs salariés.
Plus récemment en France, il y a eu la loi n° 2015-994 du 17 août 2015 relative au dialogue social et à l'emploi, dite « loi Rebsamen », contre lesquelles je suis très fâché. Elles ont retiré du pouvoir aux représentants du personnel dans les comités sociaux et économiques (CSE), et notamment le droit à une information consultation sur les résultats de l'entreprise. Le droit de recourir à un expert a été fortement diminué.
Si certains pensent que l'économie de l'industrie est réservée à une caste et que les représentants du personnel ne savent que manifester, ils se trompent. Les entreprises dirigées par un décideur tout-puissant appartiennent au passé. Aujourd'hui, il faut intégrer l'ensemble des parties prenantes dans les décisions, y compris les représentants du personnel.
L'actionnaire majoritaire ne peut décider contre l'ensemble des autres parties prenantes que sont les travailleurs, les organisations non gouvernementales, le territoire, la ville, l'État.
Il faut renforcer le dialogue social mais aussi mieux prendre en compte la parole des représentants du personnel.
Merci. Vous avez été député européen et vous avez une bienveillance vis-à-vis de l'Europe. Pensez-vous que le cadre de l'Union européenne a contribué à la désindustrialisation française ? Que conviendrait-il de modifier le cas échéant ?
Je reste pro-européen malgré les carences et les failles de l'Europe. Il faut moderniser et améliorer le fonctionnement européen.
Oui, l'Europe a une part de responsabilité. Mais elle n'est pas la seule.
Le premier choc pétrolier a provoqué les premières grosses restructurations de l'acier. La France a été le pays européen dans lequel les réductions de capacités de production ont été les plus importantes.
Depuis trente ans, les travailleurs de l'acier entendent le même discours. L'acier, c'est dépassé. Laissons-le aux Chinois qui sont moins chers.
Si vous partez du principe que tout ce qui est trop cher en France doit être produit dans des pays à bas coûts, il faut tout délocaliser en Chine. Là-bas, tout est moins cher.
J'ose espérer que ce n'est pas la société que veulent construire l'Europe et la France.
N'oubliez pas que la Chine a une stratégie industrielle. Elle veut gagner des parts du marché mondial. Elle veut nous assécher et ne nous fera aucun cadeau, dans tous les secteurs industriels.
Lorsque nous n'aurons plus d'industrie, lorsque nous l'aurons délocalisée et que les Chinois seront les maîtres du monde, croyez-vous que l'acier restera aussi peu cher ? Ce sera comme le pétrole aux mains de l'Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP). L'acier deviendra cher, le cuivre deviendra cher, tous les produits manufacturés deviendront chers.
Personnellement, je n'ai pas envie que le modèle chionis domine le monde.
Pensez-vous que la France devrait créer un grand ministère de l'industrie et de la recherche pour éviter cette dépendance asiatique que vous évoquez ? Est-ce qu'il faudrait un rôle plus important pour le haut-commissariat au plan ?
L'industrie a été la grande oubliée de ces quarante dernières années. Les gouvernements successifs quels qu'ils soient n'ont plus de stratégie industrielle. Leur seule stratégie, c'est de laisser faire le marché.
Je suis favorable à un grand ministère de l'industrie et de la recherche, mais avec quels moyens ?
Il faut aussi revoir nos modes de décision et de choix. Il faut que l'ensemble des parties prenantes d'un secteur ou d'un territoire se réunissent et s'accordent, même si la décision finale revient à l'État. Il faut que chaque citoyen qui le souhaite puisse être un acteur de la vie économique et industrielle de son territoire.
Un ministre, malgré toute son intelligence et ses collaborateurs, ne peut pas tout faire. S'il y a un grand ministère, il faut qu'il soit représenté sur l'ensemble du territoire et qu'il fonctionne en intégrant les chefs d'entreprise, les organisations syndicales, les ONG et les citoyens.
La loi n° 2014-384 du 29 mars 2014, dite « loi Florange », vise à reconquérir l'économie réelle. Elle impose la recherche obligatoire d'un repreneur pour les entreprises de plus de mille salariés et l'octroi d'un droit de vote double aux actionnaires de long terme. Que pensez-vous de la mise en œuvre de cette loi ?
Nous sommes assez fiers d'être à l'origine de cette loi.
Nous savions qu'en période de pré-campagne électorale, tous les candidats se rendraient à Florange comme on se rend à Lourdes. Par conséquent, nous avons réfléchi à des propositions à soumettre aux candidats pour protéger le patrimoine industriel.
Cette loi a le mérite d'exister, même si elle est en retrait par rapport à ce que nous aurions souhaité. Elle a quand même permis de sauver quelques entreprises, l'entreprise KME, à Givet, par exemple. 200 salariés y travaillent grâce à cette loi. Cette loi a également été utilisée chez FerroGlobe pour imposer la recherche d'un repreneur.
Cependant, cette loi ne va pas suffisamment loin. Elle ne concerne que les entreprises de plus de 1 000 salariés, qui sont de moins en moins nombreuses.
Il faudrait peut-être remplacer ce critère d'effectifs par un critère de chiffre d'affaires et un autre d'intérêt pour le territoire. Il y a ainsi une entreprise multinationale qui opère dans l'industrie du silicium et qui veut fermer ses deux sites français parce qu'elle souffre de la concurrence chinoise. Or pour fabriquer des panneaux photovoltaïques, il nous faut du silicium. Allons-nous laisser FerroGlobe fermer ces usines alors que nous avons besoin de silicium ?
Heureusement, ces deux sites réunissent plus de 1 000 salariés et sont soumis à la loi Florange.
Je n'en veux pas aux Chinois mais je suis atterré. En Europe, des règles strictes sur la concurrence existent. Les États ne peuvent subventionner des entreprises sous peine d'être taxés de concurrence déloyale. Or, les Chinois ne respectent pas ces règles, tout le monde le sait. Nous ne luttons pas à armes égales, c'est ce que je dénonce.
Je peux comprendre qu'un actionnaire souhaite se désengager. Mais il faut interdire le démantèlement des sites et chercher des repreneurs.
Malheureusement dans beaucoup de cas, l'actionnaire majoritaire qui ferme un site ne veut surtout pas de repreneur car s'il y a un repreneur, ce sera un concurrent.
Ce ne doit cependant pas être notre préoccupation. Ce qui importe, c'est si la reprise du site est positive pour notre pays, si elle sert l'intérêt général. C'est ce que la loi devrait rechercher.
Nous nous heurtons comme sur le médicament à une question quasi-existentielle : comment déterminer ce qui est essentiel ou stratégique ? Et accessoirement, qui le détermine ?
Je pense que nous pourrions faire un état des lieux avec l'ensemble des parties prenantes de l'économie française, et notamment avec le Conseil économique social et environnemental (CESE). Je pense que les élus locaux et les chefs d'entreprise devraient également y participer, ainsi que les ONG. Ce serait un Grenelle de l'industrie qui s'efforcerait de tirer les enseignements de la pandémie que nous avons connue.
Le climat actuel est détestable. Cet état des lieux serait l'occasion d'un dialogue rénové et de débats fructueux. Les décisions qui en découleraient seraient d'autant plus légitimes.
Donnons la parole aux citoyens et aux acteurs de l'économie, et faisons-leur confiance. Laissons-les réfléchir à ce qui est important pour la France et comment nous pouvons enclencher une nouvelle industrialisation et relocaliser certaines productions.
Selon vous, comment maintenir l'industrialisation dans le cadre de la transition énergétique et la lutte contre le dérèglement climatique ? A priori, réindustrialiser signifie quand même une plus grande consommation énergétique, notamment dans les secteurs que vous évoquez et que vous représentez encore aujourd'hui.
C'est effectivement un sujet complexe. Je signalerai quand même que les dirigeants de l'automobile allemande et le syndicat IG Metall discutent depuis maintenant six ans de la transition énergétique. Nous savons tous que le secteur automobile sera très fortement impacté.
En France, rien n'a encore été engagé. Je ne dis pas que les discussions sont inexistantes, mais elles sont d'une ampleur bien moindre.
Il faut anticiper. Il faut que dans les secteurs dont nous savons qu'ils seront très fortement impactés, des discussions s'engagent entre partenaires sociaux pour trouver des alternatives.
Si nous n'anticipons pas, ce sera douloureux. Il y aura de la casse sociale, comme lors de la crise de la sidérurgie dans les années 1970 et 1980.
En revanche, si nous anticipons, nous pouvons imaginer les nouvelles technologies, les nouveaux métiers, et les nouveaux besoins de demain. Nous parlons beaucoup de la transition écologique mais quels seront les nouveaux métiers ?
L'important, ce n'est pas tant que les créations d'emplois dépassent les destructions. Il faut créer des emplois là où ils sont supprimés. Si vous détruisez des emplois à Stuttgart, les personnes concernées n'auront que faire que des emplois en nombre équivalent soient créés à Bordeaux. C'est pour cela qu'il est important qu'il y ait des discussions et du dialogue.
La sobriété énergétique devra aussi être recherchée grâce au développement de l'économie circulaire. Les matières premières indispensables, notamment dans le secteur de l'automobile, sont en effet très coûteuses à extraire en termes d'énergie. Il faut savoir que le secteur minier, qu'il s'agisse du charbon ou d'autres ressources, représente 10 % de la consommation mondiale d'énergie. Or, les mêmes matières premières recyclées à travers une collecte organisée permettent d'économiser entre 40 % et 90 % d'énergie.
Concernant les véhicules électriques, la question des batteries sera cruciale. Un accord entre la France et l'Allemagne semble se dessiner sur la production mais aucune réflexion n'a en revanche été engagée sur le recyclage de ces batteries.
C'est pourquoi nous préconisons une écoconception de chaque produit. Avant d'imaginer un produit, il faut réfléchir à son recyclage. L'ensemble de la filière doit être pensé avant la naissance du produit.
Ce ne sont que quelques pistes, sans aucune prétention d'exhaustivité. Elles nous semblent à privilégier, encore une fois avec la participation des parties prenantes.
Merci pour votre intervention. Je laisse la conclusion de cette audition à Monsieur le rapporteur.
Nous n'avons pas encore évoqué le manque d'attractivité de l'industrie, qui a pourtant été mentionnée à de nombreuses reprises lors des auditions précédentes.
L'industrie n'attire pas les jeunes, elle n'attire pas les jeunes diplômés. Comment pourrions-nous réhabiliter l'industrie aux yeux de notre jeunesse ?
C'est une vaste question, à laquelle je n'ai pas de réponse.
Je partage la même inquiétude d'autant plus qu'à titre personnel, je suis rentré dans la sidérurgie à dix-huit ans.
J'y suis rentré par accident et j'y suis resté trente-quatre ans par passion. J'ai découvert un monde que j'ignorais et que j'ai aimé. L'industrie souffre parfois d'une image dégradée alors qu'elle s'est modernisée en profondeur.
Je n'ai pas la solution mais je pense qu'il faut poursuivre les efforts pour faire découvrir l'industrie aux jeunes via des journées portes ouvertes et le développement de l'apprentissage. Il faut aussi faire connaître les métiers de l'industrie, parfois bien éloignés des représentations.
L'industrie offre des métiers valorisants et de réelles perspectives de carrière. En outre, les salaires y sont souvent plus élevés qu'ailleurs. Je pense qu'il faut mieux valoriser les métiers de l'industrie.
Il me semble que les communes et les élus locaux ont aussi un rôle à jouer dans la promotion de l'industrie et de ses métiers.
Vous avez évoqué à plusieurs reprises la question du carbone et des émissions de gaz à effet de serre, y compris dans la compétition internationale. Pensez-vous qu'il faille instaurer un mécanisme d'ajustement carbone aux frontières de l'Europe ?
Plus que jamais. Je défends cette idée depuis dix ans. L'avantage du mécanisme d'ajustement est que contrairement à la taxe carbone, sa mise en place ne nécessite pas un accord unanime.
Nous souhaitons par ailleurs que les sommes récoltées grâce à ce mécanisme d'ajustement servent à financer l'investissement dans la transition énergétique et écologique des industries indispensables.
Merci beaucoup pour votre éclairage et vos réponses. Je vous propose éventuellement de les compléter par des éléments écrits si vous le souhaitez, que nous intégrerons à nos travaux.
L'audition s'achève à dix-huit heures.
Membres présents ou excusés
Commission d'enquête chargée d'identifier les facteurs qui ont conduit à la chute de la part de l'industrie dans le PIB de la France et de définir les moyens à mettre en œuvre pour relocaliser l'industrie et notamment celle du médicament
Réunion du jeudi 28 octobre 2021 à 17 heures
Présents. - M. Jean-Noël Barrot, M. Philippe Berta, M. Guillaume Kasbarian, M. Luc Lamirault, M. Gérard Leseul
Excusés. - M. Bertrand Bouyx, Mme Véronique Louwagie, M. Jacques Marilossian