Commission d'enquête relative à l'état des lieux, la déontologie, les pratiques et les doctrines de maintien de l'ordre

Réunion du mercredi 7 octobre 2020 à 15h15

Résumé de la réunion

Les mots clés de cette réunion

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La réunion

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La séance est ouverte à 15 heures 20.

Présidence de M. Jean-Michel Fauvergue, président.

La Commission d'enquête entend en audition le Général de brigade Louis-Mathieu Gaspari, secrétaire général du Conseil de la fonction militaire de la gendarmerie (CFMG), et des membres de son groupe de liaison.

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Nous recevons les représentants institutionnels des gendarmes : le général Gaspari, secrétaire général du conseil de la fonction militaire de la gendarmerie, et onze membres de son groupe de liaison.

L'article 6 de l'ordonnance du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires impose aux personnes auditionnées de prêter serment de dire la vérité, toute la vérité, rien que la vérité.

(Le général de brigade Louis-Mathieu Gaspari et les membres de son groupe de liaison prêtent serment.)

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Louis-Mathieu Gaspari, général de brigade, secrétaire général du conseil de la fonction militaire de la gendarmerie (CFMG)

Votre invitation traduit l'intérêt que vous portez au modèle de concertation et de dialogue social que la Gendarmerie – force armée selon la loi du 3 août 2009 – fait vivre dans ses rangs depuis trente ans, dans le respect de son statut militaire et de ses valeurs.

Notre groupe de liaison est composé de onze officiers et sous-officiers de gendarmerie élus au sein de notre instance nationale de concertation, le conseil de la fonction militaire de la gendarmerie (CFMG). Il porte donc la voix des 100 000 gendarmes qui l'ont élu.

Ces onze gendarmes servent tous dans des unités opérationnelles, et sont donc quotidiennement confrontés à la réalité du terrain. Ils répondent régulièrement aux sollicitations des plus hautes autorités de l'État lorsqu'elles souhaitent connaître l'avis du corps social de la gendarmerie sur les conditions de vie, l'organisation du travail ou l'exercice du métier militaire. Ils se sont récemment prêtés à cet exercice avec l'inspection générale de l'administration au sujet de l'équipement des forces de sécurité intérieure en caméras individuelles. Au mois de juillet, ils ont également répondu aux questions de la Cour des comptes sur le bilan du rattachement de la gendarmerie au ministère de l'Intérieur. La semaine dernière, ils ont été auditionnés par la mission d'information de l'Assemblée nationale relative à la mise en œuvre du dispositif d'amende forfaitaire délictuelle pour usage de produits stupéfiants. Enfin, le 21 septembre, ils ont échangé avec le ministre de l'Intérieur.

Dans la gendarmerie nationale, les missions de maintien de l'ordre, en métropole et dans les outre-mer, sont accomplies par la gendarmerie mobile. Forte de 14 000 militaires répartis au sein de cent neuf escadrons, la gendarmerie mobile agit sur la totalité du spectre « paix, crise, guerre ». Nos escadrons sont engagés aux côtés des militaires relevant du ministère des armées sur les théâtres d'opérations extérieures, comme ce fut le cas en Afghanistan, au Kosovo ou en Côte d'Ivoire. La robustesse et la rusticité de nos escadrons leur permettent d'être engagés dans les outre-mer, notamment dans les missions de lutte contre l'orpaillage illégal en Guyane.

Depuis 2017, la gendarmerie mobile est confrontée à un engagement sans précédent : ouragan Irma, « zone à défendre » de Notre-Dame-des-Landes, manifestations des Gilets jaunes, mouvements sociaux survenus lors de la réforme des retraites, et lutte contre la covid-19. La gendarmerie mobile est extrêmement sollicitée, avec un niveau d'emploi de soixante-seize escadrons par jour. Au premier semestre 2020, lors de certains pics, cent cinq des cent neuf escadrons étaient engagés sur le terrain. Les gendarmes mobiles effectuent en moyenne cent soixante-quinze jours de déplacement par an.

Votre commission d'enquête aborde les questions de déontologie. Selon M. Christian Vigouroux, référent déontologue du ministère de l'Intérieur, la déontologie est « l'art de se poser les questions avant qu'il ne soit trop tard ». Le monopole de la violence légitime par les forces de l'ordre est indissociable du respect des règles déontologiques.

Lors de la gestion du mouvement des Gilets jaunes et des manifestations liées à la réforme des retraites, peu de signalements et de plaintes pour usage injustifié ou disproportionné de la force ont été adressés à l'inspection générale de la gendarmerie nationale (IGGN). Ceci s'explique par le respect de la doctrine et un usage strictement nécessaire de la force, garanti par la formation et par l'encadrement du maintien de l'ordre.

Notre formation insiste sur le respect du cadre légal, l'éthique et la déontologie, et la recherche permanente du plus bas niveau possible d'emploi de la force. La hiérarchie constitue la colonne vertébrale de nos escadrons ; elle veille en permanence à l'adaptation de leur posture vis-à-vis de l'adversaire, à la gradation des moyens, au respect du cadre légal, à la discipline de feu ainsi qu'à la bonne application des principes éthiques et déontologiques.

Les opérations de maintien de l'ordre se caractérisent aujourd'hui par la violence inouïe de certains manifestants, qui se joignent aux cortèges uniquement pour en découdre avec les forces de l'ordre et casser tout ce qu'ils peuvent. Je pense notamment aux blacks blocs ou aux images du boxeur assénant des coups à un gendarme mobile sur la passerelle Senghor, à Paris, en janvier 2019. Ces images restent gravées dans la mémoire collective des gendarmes mobiles, tant le déchaînement de violence a été extrême, comme en atteste le nombre grandissant de gendarmes blessés lors d'opération de maintien de l'ordre. Ces accès de violence contre les forces de l'ordre et les mises en cause injustifiées dont celles-ci font l'objet deviennent difficiles à supporter.

Aujourd'hui, tous les journalistes et les manifestants sortent leurs téléphones portables pour filmer les forces de l'ordre lors des manifestations. Seuls les gendarmes et les policiers ne peuvent pas filmer : l'utilisation des drones leur a été interdite, et l'usage des images des caméras-piétons dont ils seront dotés à l'été 2021 requiert un dispositif juridique adapté.

Le schéma national du maintien de l'ordre (SNMO), publié le 16 septembre dernier, fixe un nouveau cadre commun à l'exercice du maintien de l'ordre. Ce document érige en priorité la plus grande mobilité des forces pour mettre fin aux exactions et interpeller les auteurs de violences. Il renforce également la communication avec les manifestants grâce à la mise en place de dispositifs de liaison et d'information. Le SNMO reprend bien d'autres avancées déjà en vigueur au sein de la gendarmerie nationale : les exercices avec les journalistes, la police judiciaire de l'avant ou la mise en place de superviseurs auprès des lanceurs de balles de défense. Il prévoit aussi des nouveautés : les sommations sont modernisées pour devenir plus explicites. Le SNMO est donc de nature à améliorer la manière dont le maintien de l'ordre va s'effectuer à l'avenir en métropole ou dans les outre-mer.

Au début de ma carrière, j'ai eu la chance de servir au sein d'un escadron de gendarmerie mobile à Nantes. Je vous assure que la gendarmerie mobile constitue un formidable outil à la main du Gouvernement, permettant de toujours concilier la liberté de manifester et la préservation de l'ordre public. Un escadron de gendarmerie mobile est une unité parfaitement encadrée, disciplinée et formée. Avec le calme des vieilles troupes professionnelles, son usage de la force pour le maintien de l'ordre est toujours encadré et parfaitement mesuré.

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Cette commission d'enquête s'intéresse à la déontologie et aux méthodes du maintien de l'ordre en raison de l'altération du lien de confiance entre les forces de l'ordre et la population, cause de préoccupation au sein de mon groupe politique.

Les manifestations, de plus en plus nombreuses et violentes, ont donné lieu à des dysfonctionnements. Les circonstances récentes – catastrophes naturelles, terrorisme et manifestations violentes – ont mis à rude épreuve nos forces de l'ordre, de gendarmerie et de police.

Dans un rapport publié en 2018, le Sénat a fait état d'un malaise au sein des forces de l'ordre. Ce malaise, qui était profond dans la Gendarmerie, s'y est atténué, lui permettant d'affronter plus sereinement les moments difficiles. En revanche, il est plus important aujourd'hui parmi les policiers.

Les nouveaux profils des personnes présentes dans les manifestations ont-ils eu des répercussions sur le métier des escadrons de gendarmerie mobile ?

Les incidents survenus lors des manifestations sont parfois attribués à la non-spécialisation de certaines unités intervenant dans le maintien de l'ordre. À votre avis, les modalités de recrutement des unités spécialisées dans le maintien de l'ordre sont-elles satisfaisantes, et pourraient-elles être révisées ?

En raison de leur surcharge de travail, beaucoup de militaires n'ont plus le temps de remplir leurs obligations de formation continue. Est-ce un problème, et comment y remédier ?

Vous avez évoqué le nouveau schéma national du maintien de l'ordre. Avez-vous été correctement associés à son élaboration ? De nombreux représentants syndicaux ont estimé que ce n'était pas le cas pour eux.

Enfin, quelle appréciation avez-vous du travail de l'inspection générale de la gendarmerie nationale ? Quelles suites sont apportées aux réclamations ?

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Patrick Beccegato, adjudant

Au cours des trente-cinq ans que j'ai passés au sein d'un escadron de gendarmerie mobile, l'évolution a été permanente. Nous sommes obligés de nous adapter : il y a trente ans, les manifestants étaient des sidérurgistes, des mineurs ou des agriculteurs ; c'était totalement différent. L'évolution a aussi concerné le matériel et les véhicules.

Le maintien de l'ordre ne peut se prévoir sur papier, nous devons nous adapter en permanence car une manifestation que nous pensions calme peut basculer très vite. Cette évolution permanente impose une instruction, qui est assurée.

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Frédéric le Louette, adjudant

Depuis plusieurs mois, nous sommes très engagés pour le maintien de l'ordre. La vie de l'unité en est affectée, mais aussi les familles, qui ont du mal à voir partir si fréquemment leur compagnon ou leur compagne sur des opérations de maintien de l'ordre bien plus dures qu'il y a vingt ans. En gendarmerie, nous disposons d'une force mobile spécialisée dans le maintien de l'ordre et parfaitement formée. Nous tenons à ce que les unités non spécialisées ne soient engagées qu'en cas de nécessité.

La formation est essentielle, mais nous avons des difficultés à la maintenir. Notre centre de formation national de Saint-Astier est très performant, mais nous ne parvenons pas à y envoyer régulièrement nos unités. Nous parvenions à le faire en moyenne tous les trois ans ; ce délai a augmenté, et quelques rares unités n'ont pas été recyclées depuis cinq ans. Le mouvement des Gilets jaunes a eu un impact très fort, et la covid-19 a imposé une réduction du volume des formations : le centre de Saint-Astier a réduit de six à quatre escadrons les effectifs de chaque stage.

Cette formation doit être maintenue, mais cela se fait au prix des capacités de récupération du personnel. Actuellement, l'unique marge de manœuvre pour maintenir la formation est la limitation des repos et des permissions, tant le niveau d'engagement est élevé. Nous sommes à soixante-seize unités engagées par jour, contre soixante-cinq au maximum il y a trois ou quatre ans.

La Gendarmerie n'a pas été associée à la construction du nouveau schéma national du maintien de l'ordre.

L'inspection générale de la gendarmerie fait un travail formidable, et difficile. Les gendarmes n'ont pas peur d'être contrôlés. Notre profession est très contrôlée et cela ne nous pose aucun problème. En revanche, nous voulons aussi avoir les moyens de nous défendre. Il n'y a pas de raison pour que les forces de l'ordre soient les seules à ne pas pouvoir filmer lors des manifestations. Nous aussi, nous voulons pouvoir nous défendre en filmant, nous n'avons rien à cacher.

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Vous revendiquez le droit de filmer vos interventions, et demandez l'égalité de traitement. Vous semble-t-il imaginable de filmer dès le départ tout type de mission ? Est-ce souhaitable ? Comment traiterait-on ces images lors d'incidents ?

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Patrick Beccegato, adjudant

Le drone va devenir un outil essentiel pour les missions de maintien de l'ordre. Il s'agit moins de filmer que de savoir où se trouvent les manifestants. En pleine forêt, en milieu rural, comme à Notre-Dame-des-Landes, le drone est très important.

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Le cadre légal doit évoluer, mais les drones sont déjà utilisés. Ils sont essentiels pour évaluer les déplacements, et ce sujet est abordé dans le SNMO. Que souhaitez-vous concernant les captations d'images en vol réalisées par des drones ou des hélicoptères ?

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Frédéric le Louette, adjudant

Il ne faut pas filmer toutes les missions de façon indiscriminée, mais filmer les événements. En matière de maintien de l'ordre, il faut filmer la foule, les adversaires, les moments importants. Et les images ne doivent pas être transportées à 200 kilomètres, il faut qu'elles arrivent à celui qui est en charge de la manœuvre, car c'est lui qui saura comment avancer, comment faire réagir face à une foule sans la provoquer. Ces images doivent servir le mouvement des forces.

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Sébastien Baudoux, colonel

Les images, qu'elles proviennent de drones ou de caméras, sont utilisées comme élément de preuve, pour établir la vérité. Nous sommes limités par le cadre législatif, nous souhaitons qu'un cadre spécifique définisse ce que les forces de sécurité peuvent filmer, de manière plus large qu'actuellement.

Les drones peuvent filmer, mais aussi communiquer, transporter. Notre centre d'entraînement de Saint-Astier, véritable laboratoire, emploie déjà trois drones. Nous pourrions utiliser ces ressources pour réfléchir aux possibilités d'utilisation des drones au-delà de l'enregistrement d'images.

Concernant l'utilisation des images, nos adversaires sont très mobiles, et les journalistes très présents. Il suffit d'avoir un téléphone et d'écrire « presse » sur son casque pour être considéré comme journaliste, mais lorsque nous procédons à des contrôles, les personnes n'ont pas toujours de carte de presse. L'adversaire ne respecte pas toujours les règles. Nous souhaiterions donc, quand c'est nécessaire, pouvoir utiliser ces images pour rétablir la vérité et montrer l'action des forces de l'ordre. Nous n'avons rien à cacher.

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Les journalistes ne sont pas nécessairement vos adversaires.

Il existe une ambiguïté relative au plaquage ventral et aux techniques d'étranglement. Il est parfois dit que cela n'existe pas dans la gendarmerie, et parfois que ce n'est pas recommandé, mais pratiqué cependant.

Par ailleurs, pouvez-vous, dans le cadre du maintien de l'ordre, effectuer des contrôles d'identité ? Le Défenseur des droits avait parlé de contrôles délocalisés. Qu'en pensez-vous ?

Dans la police, lorsque des agents ont vécu des scènes très difficiles ou traumatisantes, il est possible de procéder à un débriefing pour les aider à « « digérer » les événements. Une telle procédure existe-t-elle dans la gendarmerie ? Est-elle efficace ?

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Érick Verfaillie, adjudant-chef

Je travaille dans la gendarmerie depuis près de vingt-cinq ans, j'ai été gendarme mobile, formé à Saint-Astier. Jamais, bien que je sois rugbyman, on ne m'a appris à plaquer un manifestant ou à l'étrangler. Ces techniques ne sont pas enseignées.

Effectivement, les adversaires évoluent, et deviennent plus violents. Mais le matériel peut évoluer, les stratégies peuvent être modifiées, un triptyque est respecté depuis toujours : respecter la loi, protéger les gendarmes et protéger l'adversaire – qui n'est pas un ennemi mais un citoyen avec des droits. Quelle que soit l'évolution, nous évitons de mettre en place des techniques qui risquent de blesser la personne à maîtriser.

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Raoul Burdet, adjudant-chef

Je confirme les propos de mon camarade. D'ailleurs, à la page 124 de l'édition 2020 du mémento de l'intervention professionnelle, il est précisé que la technique d'immobilisation par le contrôle sur l'épaule est exercée sans pression thoracique. S'il y a un amené au sol – c'est le terme employé – c'est pour éviter que l'individu puisse être dangereux.

Je tiens à vous rassurer sur le terme d'adversaire : ce n'est certainement pas un ennemi. Les journalistes font partie de la conception de manœuvre, et nous les invitons régulièrement au centre national de formation de maintien de l'ordre pour participer aux manœuvres. Nous souhaitons qu'ils soient à nos côtés, qu'ils ne soient pas mis en danger, pour exercer leur métier comme ils l'entendent.

Le débriefing, dans le jargon militaire, est appelé RETEX, abréviation de « retour d'expérience ». Un premier RETEX est réalisé au niveau de l'unité, et un autre, centralisé à Saint-Astier, s'attache à la doctrine de maintien de l'ordre. L'ensemble de ces RETEX permet de faire évoluer la formation continue pour nous maintenir à jour en fonction de l'évolution des procédés rencontrés lors des manifestations.

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Louis-Mathieu Gaspari, général de brigade

En cas d'engagement difficile dans des conditions extrêmes, des psychologues peuvent apporter un soutien aux victimes de syndromes traumatiques. Les escadrons qui se sont rendus en Haïti suite au grave tremblement de terre en sont revenus déstabilisés, et ils ont reçu l'assistance psychologique nécessaire.

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Il existe une confusion sur le terme de plaquage. Il ne s'agit pas d'un plaquage rugbystique : le plaquage ventral, en cas d'interpellation, consiste à plaquer quelqu'un au sol après l'y avoir amené. Ce type de plaquage est clairement défini aux pages 140 et 150 de votre mémento, et il est aussi employé par la police. Je le précise car certains députés, certainement par méconnaissance, comparent les techniques de la police et de la gendarmerie, mais ce n'est pas notre rôle.

Une divergence entre les techniques de la police et de la gendarmerie existe en revanche à propos de l'étranglement. Les gendarmes ont cessé de l'employer pour le remplacer par les clés de bras, tandis que la police l'utilise encore, bien que son usage soit en discussion.

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Monsieur Le Louette, vous dites qu'il faut éviter d'enregistrer l'activité des gendarmes sans discernement. Faut-il laisser l'opérateur choisir le moment où il déclenche l'enregistrement ? Ne risquez-vous pas de prêter le flanc à la critique ?

Lors des derniers événements, une infirmière s'est prétendue victime, mais en analysant les images, il est apparu qu'elle était surtout adversaire. Ne serait-il donc pas préférable de faire fonctionner la vidéo en continu, avec peut-être une résolution un peu moins élevée, pour permettre le stockage de données ?

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Frédéric le Louette, adjudant

Le problème est aussi technique. Les opérations de maintien de l'ordre peuvent durer très longtemps : à Notre-Dame-des-Landes, les gendarmes faisaient des vacations de dix-neuf heures par jour. Techniquement, une caméra ne peut pas fonctionner aussi longtemps.

Par ailleurs, il n'y a pas de raison de s'inquiéter du déclenchement, puisque le déclenchement va protéger le gendarme. Et la personne visée ne sera pas seule à pouvoir déclencher sa caméra, tous ses camarades autour pourront aussi utiliser ce dispositif.

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Ce n'était pas une question piège, je souhaite au contraire éviter que l'on vous reproche de ne pas déclencher la caméra. Je comprends les contraintes, il est très compliqué de filmer pendant dix-neuf heures. Peut-être serait-il envisageable d'avoir plusieurs cartes mémoires ?

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Frédéric le Louette, adjudant

Je suis attaché au déclenchement dans l'action car il permet une liberté pendant les phases de maintien de l'ordre. Lors de certaines phases calmes, le gendarme peut reculer, se mettre à l'abri, ne serait-ce que pour satisfaire un besoin naturel, ou manger. On ne peut filmer le gendarme en permanence, sinon il n'aurait plus de vie privée ! (Sourires.) Il faut distinguer les phases de maintien de l'ordre proprement dit, de travail, et d'autres pour lesquelles l'enregistrement serait plutôt gênant.

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La bonne formation de nos gendarmes est à la base du maintien de l'ordre. Or le recyclage ne peut pas toujours être effectué. Comment améliorer cela ?

Les techniques de formation continue sont-elles adaptées à l'évolution des personnes que vous rencontrez dans les manifestations, comme les blacks blocs ?

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Grégory Rivière, maréchal des logis-chef

La seule solution aux difficultés de formation est une augmentation des effectifs. Depuis 2015, nous sommes constamment sur le terrain. Plusieurs escadrons ont été supprimés et nous ne pouvons plus suivre le rythme de recyclage pour maintenir la condition des militaires. Notre situation n'est pas adaptée aux crises actuelles.

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Raoul Burdet, adjudant-chef

Il y a également un problème d'engagement. Les années 2019 et 2020 ont été particulières et ont connu un taux d'engagement exceptionnel. Néanmoins, des habitudes ont été prises. Le donneur d'ordre – le préfet – demande parfois le déploiement de moyens nombreux lors de scénarios éloignés d'une situation de crise. Alléger le nombre d'escadrons engagés permettrait de donner un peu de souffle.

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Frédéric le Louette, adjudant

En gendarmerie, nous avons un gros avantage car nous avons un centre national de formation. Tous les gendarmes mobiles apprennent les mêmes techniques en temps réel. La formation est dispensée à Saint-Astier, mais aussi au sein des unités, de manière continue.

La formation est adaptée car elle se fait un temps réel, mais aussi parce qu'en gendarmerie nous n'avons pas de filière de formation : les formateurs de Saint-Astier sont des experts du maintien de l'ordre, pas des experts de la formation ayant appris le maintien de l'ordre.

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Patrick Beccegato, adjudant

À l'issue des opérations de maintien de l'ordre, tous les RETEX sont envoyés à Saint-Astier, où les techniques sont évaluées afin de les faire évoluer.

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Érick Verfaillie, adjudant-chef

Saint-Astier est un centre de formation, mais c'est surtout un centre d'évaluation. Tous les escadrons y sont mis en situation, et le centre évalue s'ils sont aptes à être déployés. Cela permet de ne pas remettre sur le terrain une unité qui ne maîtriserait pas toutes les techniques nécessaires.

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Louis-Mathieu Gaspari, général de brigade

En décembre 2018, lors de la crise des Gilets jaunes, lorsque Paris a été mis à feu et à sang, le centre national d'entraînement des forces a envoyé des cadres de l'école dans les escadrons à la manœuvre sur les Champs-Élysées. Ils ont ainsi pu voir à quoi ressemblait l'engagement sur le terrain.

En rentrant à Saint-Astier, ils ont immédiatement étudié et analysé les postures des adversaires, pour les intégrer au parcours de formation des escadrons. Des scénarios conformes à la réalité des engagements ont immédiatement été mis sur pied.

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Grégory Rivière, maréchal des logis-chef

Nous vous invitons à venir voir sur place, à Saint-Astier, comment les choses se passent. Je pense que vous serez surpris par la réalité des mises en situation.

Depuis 2015, l'effet d'engagement a des conséquences sur la formation. Nous sommes également confrontés au papy-boom et les effectifs ont été renouvelés de manière importante. Ces formations sont donc indispensables dans cette période critique.

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Raoul Burdet, adjudant-chef

La formation est essentielle, mais elle n'est pas l'unique paramètre pour s'adapter aux conditions nouvelles. Nous avons également besoin de moyens de mobilité modernes. Nos rames d'Irisbus sont obsolètes, les remplacer est une condition essentielle à notre mobilité en zone de manifestation.

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Nous connaissons tous le niveau de mobilisation que le maintien de l'ordre vous a imposé. Un gendarme efficace est un gendarme heureux dans sa famille. Quel est l'état des familles face à votre mobilisation et à cette violence croissante ?

L'une des missions de cette commission d'enquête est de réfléchir à la doctrine et donc, probablement, de faire des propositions concrètes pour envisager des évolutions législatives. Que souhaiteriez-vous pouvoir filmer et comment ? Il semble difficile de filmer en permanence. Ne serait-il pas envisageable d'utiliser une technique comparable à celle des enregistreurs de vols dans les avions ? La boîte noire fonctionne les vingt dernières minutes, puis s'efface automatiquement sauf consigne contraire.

Il faut non seulement maintenir ou rétablir l'ordre, mais aussi assurer la judiciarisation. Il est bien d'empêcher les casseurs de casser, mais il est essentiel de les présenter ensuite à un magistrat. Que pourrait-on faire pour améliorer cette judiciarisation ?

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Patrick Beccegato, adjudant

Dans la gendarmerie, la famille est un point délicat. Désormais, dans l'escadron, les personnels sont très jeunes, même l'encadrement a rajeuni. Les gendarmes de cette nouvelle génération vivent souvent déjà en couple. Ils sont pleins de bonne volonté, mais la cadence et les nombreux déplacements les conduisent à partir assez vite en gendarmerie départementale. Ils peuvent formuler cette demande après trois ou quatre ans d'ancienneté. De plus en plus souvent, les compagnes des gendarmes de nos escadrons les quittent. À la fin d'une carrière de gendarme, on peut dire que c'est à l'épouse que revient la médaille !

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Patrick Boussemaere, major

Filmer une manifestation violente permet de montrer l'envers du décor. Souvent, les images proviennent de la presse ou des manifestants. La captation permet d'avoir la vision des forces de l'ordre et d'apporter des images à la justice afin de matérialiser les faits. Les magistrats ont aussi besoin de ces images pour poursuivre des individus.

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Sébastien Baudoux, colonel

Nous n'avons aucun état d'âme avec les images de la presse. Nous l'invitons régulièrement à Saint-Astier afin qu'elle puisse comprendre la manœuvre sans s'exposer à des dangers. En revanche, nous avons des adversaires qui, parfois, filment de petites séquences dont il est possible, hors contexte, de faire ce que l'on veut. Nous souhaitons pouvoir filmer toute notre action pour être en mesure d'expliquer les faits et si besoin rétablir la vérité. Nous pouvons le faire avec l'IGGN, mais pour cela nous avons besoin de pouvoir filmer.

Nous devons filmer pour expliquer notre manœuvre, mais aussi pour anticiper et manœuvrer. Toutes ces images ont vocation à être stockées, voire retransmises. C'est sur ces points que nous sommes bloqués. Il me semble pourtant logique que le donneur d'ordre – la préfecture, le commandement de groupement ou le chef de troupe – puisse accéder aux images pour voir ce qu'il se passe, anticiper et adapter ses directives, lorsque par exemple un groupe de black blocs s'isole pour préparer quelque chose.

Il faut faire évoluer la législation afin d'être en mesure de filmer en vol, stocker ces images puis les transmettre à ceux qui ont à en connaître. Concernant la judiciarisation, vous pouvez faire les plus belles interpellations, mais si vous ne disposez pas d'élément de preuve, le juge ne pourra pas prononcer de sanction. L'image est un élément de preuve.

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Érick Verfaillie, adjudant-chef

L'image est primordiale pour la gendarmerie. Nous parlons beaucoup des Gilets jaunes et des blacks blocs, mais il ne faut pas oublier le maintien de l'ordre réalisé dans les outre-mer. Plus de la moitié des tirs à l'encontre des gendarmes se font en outre-mer. Dans la banlieue de Nouméa, les caméras de surveillance sont très rares. Pour la gendarmerie mobile, transporter des moyens tels que des drones ou des caméras est primordial.

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Raoul Burdet, adjudant-chef

La gendarmerie intervient en milieu arboré mais aussi en milieu urbain. Le préfet de police, lors de son audition, a fait part de ses difficultés avec les caméras fixes. En effet, lorsque les arbres sont feuillus, les images des caméras apportent peu d'éléments. Dans ces situations, des images alternatives ou des drones seraient pertinents.

Il n'existe pas de solution unique, c'est un ensemble. Les images des caméras-piétons sont indispensables pour la sécurité des interventions et éventuellement pour la recherche de preuves en matière de judiciarisation. Confronter les images est toujours une bonne chose.

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Contrairement à vos collègues de la police nationale, le cadre réglementaire ne vous permet pas d'utiliser des caméras, qui pourraient être utiles pour d'éventuelles suites pénales, pour apporter des preuves en cas de polémique, mais aussi pour éviter des manipulations. Pour quelle raison les gendarmes, aujourd'hui, ne peuvent-ils pas déployer des caméras ? Existe-t-il une opposition de principe ? Est-elle culturelle et liée à votre statut de militaire ? Est-elle technique ou bien la mise en œuvre est-elle difficile ? S'agit-il d'un blocage législatif ou idéologique ?

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Grégory Rivière, maréchal des logis-chef

Le problème est budgétaire et technique. La police a acheté des caméras, mais elles ont connu des difficultés d'enregistrement et de fiabilité.

L'utilisation des drones n'a pas été autorisée par le Conseil d'État, car à Paris, un drone ne vole pas à dix centimètres du sol. De sa hauteur, il peut voir des personnes dans leur cadre privé. Mais les drones sont utilisés pour protéger les biens de ces personnes : il faut relativiser.

Si la violence en outre-mer était davantage médiatisée, on estimerait que même dans les départements les plus violents de la métropole, le niveau est faible. Si BFM allait travailler outre-mer, ses journalistes seraient surpris.

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Louis-Mathieu Gaspari, général de brigade

Notre cadre juridique et réglementaire est identique à celui de la police nationale. En revanche, lorsque nous filmons avec une caméra-piéton, nous n'avons pas le droit de transférer les images vers un poste maître qui pourrait analyser les images et les retransmettre à d'autres unités pour interpeller les fauteurs de troubles. Il faut y remédier pour que les caméras-piéton aient une efficacité optimale.

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Il ne s'agit donc pas d'un problème juridique, mais de moyens budgétaires. Nous avions suivi les difficultés de la police nationale à installer les caméras-piétons : problèmes techniques, problèmes de sauvegarde, et ainsi de suite.

Sur les sujets très concrets que vous avez évoqués, nous pouvons faire évoluer le droit. Je ne comprends pas ce qui interdit qu'un gendarme mobile en intervention transmette les images de sa caméra à son commandement. J'espère que la commission pourra trouver le bon outil pour faire évoluer cette situation.

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La décision du Conseil d'État a été rendue à propos de la surveillance du confinement à Paris ; il interdit que les caméras soient utilisées pour identifier les contrevenants. Aujourd'hui, il manque un cadre législatif spécifique pour les captations d'images aériennes, mais aussi pour les caméras personnelles. Dans le secteur police, en zone urbaine, il est possible de s'appuyer sur le réseau de caméras de surveillance, plus dense.

Dans le schéma national du maintien de l'ordre, le renouvellement des Irisbus a été annoncé, ainsi que le recrutement de deux cent quinze CRS et de trois cents gendarmes mobiles, ce qui équivaut peu ou prou à trois escadrons. Cela vous paraît-il suffisant ?

Enfin, y a-t-il des femmes chez les gendarmes mobiles ?

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Frédéric le Louette, adjudant

Il y a désormais des femmes en escadron de gendarmerie mobile, et tout se passe très bien. Tous les escadrons ne sont pas encore féminisés, mais ce devrait être le cas d'ici deux ou trois ans.

Concernant les effectifs, il faut être prudents : les trois cents recrutements sont programmés pour les années 2021 et 2022. En 2021, cent quarante recrutements sont prévus, ce qui est très faible : cela équivaut à un recrutement par unité. Dans le même temps, une place de sous-officier serait supprimée et remplacée par un membre du corps de soutien administratif. Ces recrutements ne permettront donc pas d'améliorer notre présence sur le terrain.

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Le schéma national du maintien de l'ordre prévoit d'améliorer les relations entre les forces de l'ordre et les manifestants grâce à une mission de liaison. Pensez-vous que cela pourrait améliorer la situation sur le terrain ?

La gendarmerie joue un rôle très important dans les outre-mer, mais il ne faut pas faire de généralités. Les gendarmes sont très bien intégrés dans la population et les choses ne sont pas pires qu'ailleurs. Les difficultés apparaissent lorsqu'une unité est projetée en cas de problèmes, sur un terrain inconnu. En revanche, au quotidien, je n'ai pas l'impression que la relation soit difficile entre les gendarmes et les Ultramarins.

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Grégory Rivière, maréchal des logis-chef

Il n'y a pas de souci d'adaptation outre-mer. Le problème est le degré de violence lors de certaines manifestations. Tous les territoires ne sont pas concernés, mais ils sont nombreux à l'être. La violence en outre-mer est plus importante qu'en métropole. On stigmatise l'action des gendarmes mobiles en métropole ; nous invitons à porter une attention accrue aux conditions d'intervention en outre-mer. Mais il n'y a pas de problèmes avec les gendarmes outre-mer.

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Frédéric le Louette, adjudant

Il ne faut pas stigmatiser l'outre-mer, les projections des escadrons de gendarmerie mobile pendant trois mois se déroulent très bien. La difficulté tient au territoire à couvrir, beaucoup plus vaste, imposant un maintien de l'ordre plus dispersé qu'en centre-ville. Les techniques sont différentes, mais nos escadrons sont formés pour agir en milieu rural et urbain.

Les escadrons sont très bien intégrés dans l'effectif outre-mer puisque les escadrons projetés représentent parfois jusqu'à 40 % des effectifs engagés. Les difficultés particulières rencontrées pour le maintien de l'ordre outre-mer tiennent peut-être à la différence de niveau de vie. Les difficultés naturelles de la population sont plus importantes.

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L'intérêt de disposer d'un enregistrement est de ne pas avoir à s'interroger sur le moment de son déclenchement. C'est en effet a posteriori, lorsqu'il y a eu des problèmes, que l'on peut en avoir besoin. Un stockage suivi d'un effacement automatique si rien n'est arrivé pourrait être une solution. Un enregistrement déclenché sans intervention me semble avoir plus d'intérêt.

La technique de l'étranglement a été au cœur de l'actualité récente. J'ai rencontré vos collègues en circonscription, à Grenoble. Ils m'ont expliqué qu'il existait une « zone interdite » en haut du corps. Pourriez-vous revenir sur ce point ?

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Érick Verfaillie, adjudant-chef

Effectivement, la tête, le cou et le tronc sont des zones rouges, car il existe un risque létal pour la personne si nous agissons dessus. Mais même en évitant la colonne vertébrale, lorsqu'une personne se débat, des accidents peuvent arriver. Ces trois points sont sanctuarisés car nous savons que nous n'avons pas la possibilité de maîtriser la pression, et que nous risquons de briser une vertèbre.

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Raoul Burdet, adjudant-chef

Les RETEX permettent également d'apporter des solutions aux difficultés des gendarmes. Par exemple, une pression sur l'omoplate peut dévier et toucher des parties sensibles. Nous avons donc modifié les doctrines d'emploi afin d'éviter que le problème ne se reproduise. On sanctuarise donc la sécurité du citoyen, en espèce celle de l'adversaire.

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Merci de votre réponse, il est essentiel de faire connaître cette notion de sanctuarisation, et de risque.

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Frédéric le Louette, adjudant

Le gendarme n'agit jamais seul, mais en binôme voire en trinôme, notamment lors des interventions sur les individus violents. Cela permet de gagner du temps, de favoriser la protection des personnels et de l'individu contrôlé, mais aussi d'agir plus sereinement.

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Sébastien Baudoux, colonel

Concernant les contrôles d'identité, les douaniers peuvent faire ouvrir et visiter les coffres des véhicules, n'importe où et n'importe quand. Les gendarmes ont besoin d'une réquisition motivée du procureur pour le faire. La législation pourrait évoluer et autoriser toutes les forces de l'ordre à le faire. Cela permettrait de vérifier que les coffres des voitures ne contiennent pas d'objets susceptibles d'être utilisés pour commettre des actes violents.

J'ai été instructeur à Saint-Astier, et nous avons anticipé depuis longtemps l'évolution des méthodes d'interpellation. Nous travaillons avec des clés d'immobilisation – des blocages articulaires – plutôt que des pressions.

Autrefois, les manifestants connaissaient nos codes. Lorsque nous disions « Obéissance à la loi. Dispersez-vous » ou « Première sommation : on va faire usage de la force », les agriculteurs ou les marins pêcheurs savaient de quoi nous parlions. Aujourd'hui, nous avons en face de nous un public moins aguerri. Il ne connaît pas nos méthodes.

Le schéma national du maintien de l'ordre permet de discuter et d'échanger avec les organisateurs ou les participants. Nous pourrons aussi le faire à distance avec des panneaux à messages variables. Mais pour échanger, encore faut-il identifier nos interlocuteurs afin de pouvoir leur dire « attention, ça va trop loin », « attention à l'arrière de la manifestation il y a eu deux magasins cassés, on va être obligé de vous stopper ou de vous détourner ». Malheureusement, lors des dernières manifestations, nous n'avions pas d'organisateur identifié comme c'est le cas dans les manifestations syndicales.

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Le schéma national du maintien de l'ordre prévoit également la possibilité de prévenir par SMS les personnes situées aux alentours.

Je vous remercie d'avoir répondu à nos questions.

La séance est levée à 16 heures 30.

Membres présents ou excusés

Présents. - Mme Valérie Bazin-Malgras, M. Jean-Michel Fauvergue, Mme Camille Galliard-Minier, M. Jérôme Lambert, Mme George Pau-Langevin, M. Thierry Solère, M. Jean-Louis Thiériot, Mme Laurence Vanceunebrock

Excusés. - Mme Aude Bono-Vandorme, M. Didier Le Gac, M. Christophe Naegelen