Délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation

Réunion du jeudi 19 novembre 2020 à 9h00

Résumé de la réunion

Les mots clés de cette réunion

  • aéroport
  • ferroviaire
Répartition par groupes du travail de cette réunion de commission

  PS et divers gauche    En Marche    MoDem  

La réunion

Source

La réunion débute à 9 heures.

Présidence de M. Jean-René Cazeneuve, président

Les débats sont accessibles sur le portail vidéo du site de l'Assemblée nationale à l'adresse suivante :

http://assnat.fr/B9xFZT

La Délégation procède à l'audition de M. Jean-Baptiste DJEBBARI, Ministre délégué auprès de la ministre de la Transition écologique, chargé des Transports.

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Nous avons le plaisir d'auditionner ce matin M. Jean-Baptiste Djebbari, ministre délégué auprès de la ministre de la transition écologique, chargé des transports.

Monsieur le ministre, les sujets ne manquent pas. Outre la mobilité dans les territoires et la relance de l'activité, notre délégation s'intéresse au suivi de l'application du projet de loi d'orientation des mobilités (LOM), dont elle s'était saisie pour avis, notamment aux trains d'équilibre du territoire (TET).

Un chapitre du plan de relance, dont une partie importante concerne la territorialisation, est consacré aux infrastructures, aux mobilités vertes et à l'aménagement des réseaux cyclables. Les lignes de desserte fine du territoire, dénommées petites lignes par abus de langage, nous intéressent tout particulièrement. La mobilité est également déterminante pour l'accès au travail.

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Jean-Baptiste Djebbari, ministre délégué auprès de la ministre de la transition écologique, chargé des transports

Le moment est particulier. Le premier confinement avait été marqué par une forte réduction de l'offre de transport. Après le déconfinement et le redémarrage progressif du secteur au cours des mois de juin, juillet et août, le bilan du mois de septembre a été inférieur aux prévisions. Ainsi, au moment même où, sous votre influence M. le Président, les pertes fiscales et de recettes tarifaires des collectivités commençaient à être compensées, le décrochage s'est stabilisé dans le secteur des transports en commun – je le signale car le sujet doit être considéré avec une grande attention, en lien avec l'ensemble des territoires. La fréquentation atteint, hors période de confinement, 60 % à 65 % de ce qu'elle était l'an passé à la même époque, en raison d'un report sur la voiture et sur les mobilités douces, la marche et le vélo. Si la tendance se confirmait, il faudrait la regarder avec lucidité car elle remettrait en cause le modèle économique des transports en commun. Sous l'effet du confinement, leur fréquentation dans les grandes métropoles, notamment dans la région parisienne, s'établit à 47 % du niveau habituel. La fréquentation moyenne du réseau RATP est de 35 %, avec, le matin, des pointes à 55 %. Concernant le TGV, la SNCF a réduit son offre à 30 %, la fréquentation s'établissant à environ 10 % de la fréquentation habituelle, en sorte que les trains sont remplis à 30 ou 40 %.

Quelles sont nos trois grandes priorités ?

La première, et c'est l'un des enjeux de la LOM, est l'investissement dans les transports du quotidien. Vous vous rappelez que 75 % des dispositions du texte étaient d'application directe. S'agissant des 25 % restants, environ 40 % des dispositions concernées ont fait l'objet de textes d'application réglementaires ; notre objectif est de porter ce taux à 60 % début janvier, le retard étant principalement dû au contexte sanitaire. Certaines dispositions à la main des territoires sont plébiscitées. Ainsi, onze agglomérations ou villes vont créer des zones à faibles émissions (ZFE) d'ici à la fin de l'année. Nous devrons effectuer, dans le cadre projet de loi « 3D », un travail collectif sur le pouvoir de police des métropoles, afin d'être en mesure de vérifier leur effectivité. Les voies réservées ont également connu un grand succès lors du premier déconfinement. Quant à l'expérimentation de l'arrêt à la demande, elle a été utile et importante du point de vue de la sécurité.

La deuxième priorité est la sécurisation des investissements clés pour nos territoires. Le budget quinquennal 2018-2022 se montait à 13,4 milliards d'euros. Nous avons choisi de financer des priorités nouvelles. J'y reviendrai lorsque j'évoquerai le plan de relance, mais le Parlement nous a déjà permis d'assurer l'avenir de plus de mille des neuf mille kilomètres de lignes de desserte fine du territoire, grâce à la signature de contrats partenariaux avec trois régions : Centre-Val de Loire, Grand Est et PACA. D'autres régions en sont au stade de la négociation finale. Ce partenariat important et précis offre une visibilité à l'horizon de dix ans alors qu'auparavant, on pratiquait souvent la politique du pansement, c'est-à-dire qu'on régénérait en urgence les plateformes, dont la vitesse ou la circulation restaient souvent limitées, sans apporter de solution structurelle. Un autre sujet important est celui des canaux, que nous traitons avec Voies navigables de France (VNF). Dans la LOM, nous avions déjà amélioré substantiellement le budget de régénération. Une réflexion est en cours avec VNF pour dupliquer ce que nous avons fait pour les petites lignes ferroviaires et aboutir, pour la plaisance et le fret, à des dispositifs partenariaux et responsables susceptibles de redonner des perspectives à ce secteur. Enfin, nous avons financé des investissements clés comme le canal Seine-Nord et la liaison ferroviaire Lyon-Turin, également concernés par le plan de relance.

La troisième priorité concerne la transition écologique et industrielle. Nous profitons du moment actuel pour mettre en œuvre plus rapidement plusieurs stratégies, notamment la stratégie nationale pour le développement de l'hydrogène. Les collectivités peuvent d'ores et déjà répondre à deux appels à projets, l'un pour créer des écosystèmes territoriaux, l'autre pour créer de nouvelles briques et démonstrateurs technologiques. Ainsi, quatre régions sont déjà candidates pour expérimenter le train à hydrogène : Grand Est, la Bourgogne-Franche-Comté, l'Occitanie et Auvergne-Rhône-Alpes.

Nous avons décidé d'agir résolument en faveur du déploiement des bornes électriques, notamment sur les réseaux routiers, concédés et non concédés. Le ministère vise l'objectif de 100 000 bornes installées fin 2021. Un premier rendez-vous avec les Français est fixé à l'été prochain, dans des conditions sanitaires que nous espérons mieux maîtrisées ; il s'agit de résoudre, sur les grands axes, le problème de l'itinérance et de susciter la confiance du consommateur en assurant la présence d'un nombre de bornes suffisant pour qu'aucun conducteur ne soit pas perdu entre deux points de recharge. À la faveur du plan automobile, les ventes de véhicules électriques et de véhicules hybrides rechargeables ont connu un fort redémarrage. Pour la première fois, nous serons sur la trajectoire des 100 000 véhicules électriques vendus d'ici à la fin de l'année. Je crois pouvoir dire que le cycle vertueux consistant à consolider l'industrie automobile française et à doter le consommateur des moyens d'acquérir ce type de véhicules, y compris sur le marché de l'occasion, est bien lancé.

Dans le projet de budget pour 2021, outre les priorités que je viens de rappeler, nous avons choisi de mettre l'accent sur le transport ferroviaire, notamment le fret, en mobilisant plus de 170 millions d'euros supplémentaires pour soutenir les opérateurs grâce à la baisse des péages et pour augmenter les concours à SNCF Réseau afin de répondre aux besoins des trafics TET et TER.

Un rendez-vous est prévu au début de l'année prochaine pour faire le point sur la connectivité par voie aérienne. En effet, vous le savez, la crise sanitaire s'accompagne d'une crise profonde du transport aérien et le groupe Air France, dont l'empreinte est forte dans les territoires, est en cours de restructuration. Dans ce cadre global, nous avons cartographié les lignes maintenues, les lignes reprises par la filiale d'Air France, Transavia, et celles reprises par d'autres opérateurs, et nous avons étudié la manière dont la connectivité se renforçait, à moyen et long terme, avec le ferroviaire. Nous aurons début janvier un échange sur ce sujet avec des élus auquel je serai ravi de vous convier, monsieur le président.

Le plan de relance concerne massivement le secteur des transports, à hauteur de 11,5 milliards d'euros, soit un peu plus de 10 % des 100 milliards prévus. Un bloc important de presque 5 milliards est consacré au ferroviaire et vise, en plus de ce que je viens d'indiquer, à engager des actions concrètes pour le fret en lançant trois autoroutes ferroviaires : entre Calais et Sète, entre Cherbourg et Bayonne et autour de l'axe Perpignan-Rungis, prolongé, au sud, jusqu'à Barcelone et, au nord, jusqu'aux ports d'Anvers et de Dunkerque. Après m'être rendu chez nos voisins limitrophes, je crois pouvoir dire que le moment politique est propice : nous avons, en la matière, une capacité d'agir inédite, grâce à la priorité donnée au fret ferroviaire par la nouvelle Commission.

D'ici à 2022, nous relancerons deux lignes de trains de nuit : Pais-Nice et Paris-Tarbes-Hendaye. Le plan déjà cité en faveur des petites lignes est financé pour partie, pour les deux prochaines années, dans le cadre du plan de relance.

Nous mobilisons 1,2 milliard d'euros en faveur des mobilités du quotidien, dont 700 millions pour la région Île-de-France et 500 millions pour le reste du territoire, afin de financer des projets emblématiques, en Île-de-France et en région. Je pense à la troisième ligne de métro à Toulouse et aux études de lignes RER à Lille, Bordeaux et Strasbourg, qui sont très attendues. Par ailleurs, l'effort de conversion du parc automobile représente 2,7 milliards d'euros, en incluant les aides à l'installation et les bonus écologiques pour l'achat de véhicules propres.

Un plan de désenclavement par la route, à hauteur de 500 millions d'euros, est destiné aux ruralités.

Quant aux quelque 400 millions d'euros prévus pour la filière portuaire maritime et fluviale, ils concernent des actions largement lancées, qu'il s'agisse de l'électrification des quais ou de la création de points d'avitaillement au gaz naturel liquéfié (GNL). La compagnie maritime d'affrètement-compagnie générale maritime (CMA-CGL) a fait naviguer son premier porte-conteneurs au GNL la semaine dernière.

Je conclurai en évoquant le secteur du transport aérien. Je présidais hier la réunion des ministres des transports des quatre pays européens représentés au capital d'Airbus. La Grande-Bretagne, la France, l'Allemagne et l'Espagne ont affirmé leur unité et leur volonté politique de réaliser la transition écologique et industrielle, en s'orientant vers le développement des avions hybrides électriques ou fonctionnant aux biocarburants et en réalisant le saut technologique vers l'avion zéro carbone grâce à la stratégie de l'hydrogène, qui est la voie empruntée par les acteurs industriels et confortée par les acteurs publics.

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Le Gouvernement prévoit, dans le cadre du plan de relance, une dotation de 175 millions d'euros pour le développement du transport fluvial. En 2019, ce mode de transport bas carbone a permis l'acheminement de 56,3 millions de tonnes de marchandises. Les infrastructures fluviales représentent un véritable potentiel de développement durable pour nos territoires. J'en suis d'autant plus convaincue que le seul port de l'Isère, celui de Vienne-Sud Salaise/Sablons, se trouve dans ma circonscription. Pourriez-vous préciser le contenu des appels à projets qui seront lancés pour redynamiser le secteur fluvial ?

Le secteur aérien, quant à lui, est très perturbé. Le prévisionnel d'activité de l'aéroport de Grenoble-Alpes-Isère, par exemple, est fortement affecté par la baisse du nombre de touristes attendus dans les stations de ski. Pourriez-vous nous apporter des précisions sur le report des échéances de remboursement des avances prévues dans le troisième projet de loi de finances rectificative (PLFR3) ?

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En tant qu'élus, les membres de notre délégation sont fortement attachés à l'aménagement du territoire. Les aéroports ont grandement participé au désenclavement de nos régions depuis les années 1970, mais les avions non rentables ne décollent déjà plus et les aéroports risquent de fermer les uns après les autres. En Bretagne, par exemple, il n'en restera plus que deux : celui de Brest et celui de Rennes ou de Nantes. Tous les petits aéroports, comme ceux de Quimper et de Lorient, desservant des villes importantes, risquent de fermer. À la veille de ce qui s'annonce comme un véritable big bang territorial, comment envisagez-vous d'accompagner les élus locaux ? Ce que les écologistes ont souhaité, la crise va le réaliser.

À plus court terme, comment accompagner les chambres de commerce, exsangues, qui subissent de plein fouet le déficit des aéroports et ne perçoivent plus de taxes ? Elles ont recours à des prêts garantis par l'État (PGE), mais on ignore si elles pourront les rembourser.

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La date de livraison des rames de la ligne de train d'équilibre du territoire Paris-Clermont, prévue au dernier trimestre 2023 ou au premier trimestre 2024 reste-t-elle valable ? Le montant de la remise à niveau des infrastructures était estimé à 800 millions d'euros, mais il manquait 170 millions d'euros, qui devaient être apportés par le plan de relance. Ces 800 millions sont-ils sécurisés ?

Lors de votre venue récente dans le Puy-de-Dôme, vous avez évoqué la création d'un groupe de travail consacré à la modernisation. Pourriez-vous nous fournir des précisions sur le calendrier de ce groupe de travail et sur celui du comité de suivi 2023, que vous avez installé lors de votre visite ?

Enfin, les études relatives à la LGV – qu'à titre personnel, je n'appelle pas de mes vœux, pour des raisons financières et environnementales – se poursuivent-elles ou sont-elles arrêtées ?

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La mobilité étant un sujet important pour les Pyrénées-Orientales , département très éloigné de Paris, que de nombreux élus considèrent comme enclavé, je souhaite vous interroger sur l'avenir de l'aéroport de Perpignan. Le vol Perpignan-Paris est un des plus chers, avec la liaison avec la Corse, en sorte qu'il n'est pas suffisamment rentable.

Vous avez évoqué la création d'autoroutes ferroviaires, notamment à partir d'un axe Perpignan-Rungis. Pourriez-vous compléter notre information sur ce point ? Les parlementaires pourraient-ils participer à un groupe de travail sur ce sujet ?

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Jean-Baptiste Djebbari, ministre délégué chargé des transports

Le modèle économique des aéroports et leur capacité à résister à la crise dépendront de la reprise du trafic. En effet, sans trafic, pas de redevances ni de taxes, donc pas de rentrées fiscales et tarifaires pour les aéroports. Ceux-ci bénéficient des dispositifs de droit commun et nous avons instauré un moratoire portant sur 300 millions d'euros d'avances remboursables, qui a bénéficié à 89 aéroports, dont ceux qui ont été cités.

L'Europe est saisie par la deuxième vague de manière très intense. Le 8 décembre, est prévu un conseil informel des ministres des transports au cours duquel doit être évoquée l'harmonisation des mesures sanitaires, notamment les tests rapides. Pour restaurer la confiance et la fluidité des déplacements, il nous faut en effet créer un cadre harmonisé – qu'il s'agisse de la période de quatorzaine, devenue septaine dans la plupart des pays, ou des tests rapides au départ et à l'arrivée – qui permette de relancer le plus possible le trafic dans des conditions de sécurité sanitaire satisfaisantes.

Le plan de restructuration d'Air France vise à solidifier les hubs de Paris et de Lyon et à encourager la reprise par Transavia – c'est le cas à Perpignan – ou par d'autres opérateurs régionaux de lignes opérées par la compagnie historique. Au cours de l'été, la compagnie Chalair et Regourd aviation se sont déjà portés candidats à la reprise de certaines lignes. En bas du spectre, les lignes d'aménagement du territoire subventionnées par l'État ont vocation à perdurer. Je cite toujours l'exemple d'Aurillac, mais le grand Massif central est emblématique à cet égard, avec Limoges et Brive notamment. Le désenclavement de ces territoires étant peu assuré par le train et, pour Aurillac, par la route, le maintien de ces lignes est une condition, sinon de leur survie, du moins du maintien de leur attractivité.

Les territoires où sont implantés de nombreux aéroports dont quelques-uns sont en difficulté sont, pour nous, un sujet de préoccupation, mais les solutions ne sont pas entre nos mains. Vous avez cité la Bretagne, mais certaines autres grandes régions comptent dix ou onze aéroports à vocation généraliste, dont certains sont en concurrence. J'ai toujours plaidé pour que les présidents de région se saisissent de cette question et différencient les vocations des aéroports dans le cadre, par exemple, des schémas régionaux d'aménagement, de développement durable et d'égalité des territoires (SRADDET). Les aéroports régionaux les plus fragiles sont particulièrement touchés par la crise, notamment ceux qui bénéficiaient d'une manne liée au tourisme, en particulier britannique. Pour les territoires concernés, nous le verrons lors de la réunion du conseil ministériel pour le développement et l'innovation dans les transports que j'animerai début janvier sur le thème de la collectivité de la desserte, un travail important reste à faire. Des décisions doivent être prises par les élus concernés, notamment au plan régional.

Les 175 millions d'euros consacrés au transport fluvial permettront de financer, sur deux ans, 160 projets de travaux concernant les petites écluses et les grands gabarits – nous vous transmettrons prochainement la liste des projets retenus. L'enveloppe globale destinée à l'activité portuaire, au transport fluvial et au transport maritime s'élève à 400 millions d'euros. L'attractivité de cette filière est un grand sujet français. Le renforcement de l'Axe Seine autour du Havre, de Rouen et de Paris représente une opportunité. Nous devons effectuer un important travail avec les ports pour qu'ils rattrapent le retard pris en matière de numérisation et d'interconnexion avec le réseau ferroviaire.

Du reste, les autoroutes ferroviaires que j'ai évoquées sont toutes des connexions de port à port. Le moment politique est propice pour agir en faveur de ces infrastructures qui sont le parent pauvre de la mobilité, en raison d'un sous-investissement chronique et, parfois, d'un manque de travail collectif. S'agissant de l'autoroute ferroviaire Perpignan-Rungis, je me suis d'abord assuré auprès de mes homologues européens qu'il était possible, au plan opérationnel et politique, de la prolonger, au sud, vers Barcelone et, au nord, vers les ports de Dunkerque et d'Anvers. Nous lancerons également un premier appel à projets, d'ici à deux semaines, pour le service transitoire et un second en vue de régénérer intégralement et d'augmenter considérablement la capacité du terminal de Rungis. La SEMMARIS est chargée de cette opération, placée sous l'égide du préfet du Val-de-Marne, qui devrait être réalisée d'ici deux ans à deux ans et demi.

La liaison Paris-Clermont représente un enjeu comparable à celui de la ligne Paris-Orléans-Limoges-Toulouse. Le délai de livraison des douze rames est confirmé pour la fin du troisième trimestre 2023. J'ai visité l'usine CAF de Bagnères-de-Bigorre qui va construire les 28 rames des deux lignes concernées. Le calendrier industriel est respecté et le rythme de production est peu touché par la crise. Nous avons prévu les investissements nécessaires au raccordement de l'usine de CAF à Tarbes par voie ferroviaire, la voie de fret étant impraticable pour des raisons de sécurité. Je confirme également le volume de 800 millions d'euros pour la régénération de la voie, sachant que l'État en finance les deux tiers, comme je l'ai annoncé à l'occasion de ma venue.

Concernant le groupe de travail sur la modernisation, nous livrerons une restitution formelle des premiers travaux au printemps 2021.

Quant à la LGV, les études préliminaires sont toujours en cours, mais l'horizon de réalisation est assez lointain.

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Dans la région paloise, nous avions presque dix vols par jour avant la crise et l'on peut se demander si Air France ne va pas utiliser celle-ci comme un prétexte. En tout état de cause, nous espérons retrouver, grâce au vaccin, un rythme normal de rotations ; il y va de l'aménagement de notre territoire.

Prévoyez-vous de nouvelles formules de trains de nuit ? Est-il envisageable que la « Palombe bleue », par exemple, que j'empruntais il y a vingt-cinq ans pour me rendre à Paris, reprenne du service ?

Par ailleurs, ne doit-on pas réviser nos modèles de transports en commun – je pense en particulier aux grands projets d'infrastructure, tels que le Grand Paris – pour s'adapter à l'évolution des modes de déplacement liée au développement du télétravail et à l'accroissement du nombre des voitures électriques mises sur le marché ?

À ce propos, utilisateur depuis plusieurs années d'une voiture électrique, je rencontre fréquemment des difficultés pour en recharger les batteries. Il m'est ainsi impossible d'effectuer le trajet Pau-Paris, les bornes de recharge situées dans les stations-service étant hors-service. S'il est indispensable d'installer des bornes collectives, ne faudrait-il pas également aider les particuliers à s'équiper de bornes électriques et à en installer notamment dans les copropriétés ?

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Monsieur le ministre, vous avez mentionné les travaux en cours de réalisation sur les canaux et les ports fluviaux. Nous sommes insuffisamment impliqués, en tant qu'élus, dans ces dossiers, alors que le fleuve est un atout majeur de notre territoire et que cette filière est de nature à contribuer au développement économique.

Par ailleurs, la compétitivité et l'attractivité d'un port maritime dépendent de sa capacité à se projeter au plus loin de ses bases, c'est-à-dire à irriguer son arrière-pays, ce qui ne peut se faire que par le mode massifié. Or la saturation du sud de Lyon risque de faire obstacle au développement de la desserte de l'hinterland des ports du sud si le contournement ferroviaire de l'agglomération lyonnaise pour sa partie sud (CFAL Sud) n'est pas réalisé, ce que laisse craindre la concentration des travaux sur le CFAL Nord.

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Députée de l'Isère, je relève que la liaison Lyon-Grenoble nous est présentée comme une possibilité… pour 2050 ! Or, j'entends parler du raccourcissement du délai de desserte entre Lyon et Grenoble depuis 40 ans. Le réseau ferroviaire est certes long et cher à construire, mais il peut inciter nos compatriotes à renoncer parfois à utiliser leur voiture individuelle. Pouvez-vous nous apporter des précisions sur ce projet ferroviaire ?

Quant à la desserte Lyon-Turin, si les nouvelles sont plutôt encourageantes, la construction des accès reste à réaliser. Avez-vous des précisions sur les projets des différents partenaires en la matière ?

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Monsieur le ministre, je souscris à votre propos introductif. Dans le cadre du PLFR3 et du PLFR4, l'État a consenti un effort de 2,5 milliards en faveur des autorités organisatrices de la mobilité (AOM) d'Île-de-France et de province, sous la forme de compensations et d'avances. L'effort est considérable, mais se posera dès l'an prochain la question du changement de business model. On peut en effet s'attendre à un décrochage des transports en commun lié au télétravail et à l'utilisation du vélo, tandis que le produit du versement mobilité risque de baisser à cause de l'augmentation du chômage. Envisagez-vous donc une clause de revoyure avec les AOM afin de prévoir un autre soutien de l'État ou bien celles-ci doivent-elles se restructurer et s'adapter à la nouvelle donne ?

Le plan de soutien à la filière aéronautique représente une part importante du plan de relance. Mais, dans les territoires, nous nous inquiétons de sa traduction pour les sous-traitants de niveau 2 et de niveau 3. En effet, de grosses PME de 20, 50 ou 100 salariés, qui ont vu leurs commandes s'arrêter et ont subi des pressions supplémentaires de la part de leurs gros donneurs d'ordres, n'en ressentent pas toujours les effets.

Tout député digne de ce nom a un projet d'infrastructure à défendre et je ne fais pas exception. Les travaux de mise à deux fois deux voies de la RN 124 entre Toulouse et Auch, soit un tronçon de 70 kilomètres, sont en cours depuis 50 ans ; ils avancent d'un kilomètre par an ! En l'occurrence, je suis avant tout soucieux de l'utilisation de l'agent public. On sait en effet qu'un chantier routier qui avance à ce rythme coûte deux à trois fois plus cher à l'État. Ne pourrait-on pas décider, au plan politique, de lancer moins de projets en parallèle et de les réaliser beaucoup plus rapidement ?

Enfin, l'interconnexion des transports est un bel exemple de collaboration et de continuum des collectivités territoriales avec l'État. Nous sommes en relation permanente avec les élus et les associations d'élus. Parmi les projets que vous soutenez, qu'ils soient issus de la LOM ou du plan de relance, regrettez-vous que certains ne soient pas réalisés assez vite parce que les collectivités territoriales ont mis du temps à s'en emparer ?

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Jean-Baptiste Djebbari, ministre délégué chargé des transports

Après le quasi-arrêt des vols domestiques, l'évolution du transport aérien dépendra de la capacité de sécuriser le protocole sanitaire, lequel ne sera, selon moi, suffisamment robuste que lorsqu'on aura découvert un traitement ou un vaccin. À cet égard, la communication autour des onze vaccins dons les essais cliniques sur l'homme sont en cours est regardée prudemment mais positivement par le secteur des transports. Le premier trimestre de 2021 sera également un moment de vérité pour les transports en commun – j'y reviendrai.

S'agissant des trains de nuit, nous projetons de rouvrir la « Palombe bleue » afin d'assurer la liaison Paris-Tarbes via Toulouse et de desservir Pau et Hendaye en saison. Nous avons observé attentivement ce qui se fait en Europe, notamment en Autriche, où le modèle économique, qui repose parfois sur trois classes, vise à la fois des clientèles à haute contribution désireuses de voyager différemment et des petits budgets, notamment les jeunes. Nous attendons un rapport à ce sujet. Dans le même temps, nous agissons pour la rénovation des rames et engageons des discussions avec nos partenaires européens et avec notre homologue russe, afin de mutualiser des acquisitions ou opérations de trains, ressources rares en Europe.

Nous appréhendons la situation au jour le jour : même les périodes de confinement ne se ressemblent pas puisque certaines activités, arrêtées lors du confinement strict, sont actuellement maintenues. Cependant, nous observons qu'environ 30 % des habitués des transports en commun ont cessé de les emprunter parce qu'ils télétravaillent, parce qu'ils utilisent d'autres modes de déplacement – la marche et le vélo dans les grandes aires urbaines – ou parce qu'ils préfèrent se « réfugier » dans leur voiture, considérée comme un havre de paix.

Quand un traitement ou un vaccin sera disponible, nous pourrons mesurer l'effet réel et durable du télétravail et celui d'une éventuelle « démétropolisation » puisque, pour la première fois depuis de nombreuses décennies, on observe une augmentation du prix de l'immobilier dans la grande couronne. Les modèles étant remis en question, je peine à me faire une doctrine sur le sujet, mais je ne crois pas que la recomposition actuelle remette en cause les travaux du Grand Paris. Ceux de la ligne 15 et de la ligne 16 notamment, qui contribuent à la revitalisation de certains territoires et à la réduction des inégalités territoriales, conservent toute leur pertinence. Mais le modèle économique des transports en commun connaîtra un moment de vérité. Afin de nous éclairer sur ce point, je vais confier une mission à Philippe Duron, afin qu'il appréhende plus finement le sujet et nous fasse éventuellement des propositions sur le financement à long terme des transports en commun, dont nous aurons à débattre ultérieurement. Dans l'immédiat, les investissements ne sont pas remis en cause – nous en accélérons même certains dans le cadre du plan de relance –, mais il faut être intellectuellement prêt à appréhender, le cas échéant, la mutation des modèles et à nous y adapter.

La question des bornes électriques est un peu celle de la poule et de l'œuf : faut-il d'abord développer les véhicules ou commencer par assurer l'équipement de notre pays en bornes ? Il faut faire les deux, comme nous avons essayé de le faire, en nous appuyant sur la crise. Le plan de rebond du secteur de l'automobile a en effet été un succès, marqué par une importante augmentation de l'achat de véhicules plus propres, en particulier électriques. Et nous avons le projet de porter le nombre de bornes de 36 000 à 100 000 en 2021. Le ministère des transports fait porter l'effort sur les grands réseaux routiers concédés et non concédés. La réflexion se poursuit en ce qui concerne l'habitat collectif, le domicile et le lieu de travail. Des dispositifs transversaux tels que la prise en charge à hauteur de 75 % du coût de raccordement donnent une dynamique et une visibilité aux acteurs de la filière, notamment les énergéticiens. Nous menons par ailleurs une action résolue sur la rénovation des bornes existantes afin d'augmenter les puissances disponibles.

En matière de transport fluvial et de transport maritime, je souscris, madame Michel, à ce qui a été dit concernant l'association des élus. Nous vous transmettrons toutes les informations dont nous disposons et celles que nous avons demandées à VNF. L'effort porte sur les canaux et les ports fluviaux. Quant aux ports maritimes, au-delà de ce qui a été dit sur le CFAL Sud – pour lequel a été créé un comité de pilotage placé sous l'égide du préfet et qui renvoie à des investissements de la décennie précédente ainsi qu'à la priorisation des travaux pour la desserte Lyon-Turin –, ils comportent des enjeux de souveraineté, puisqu'ils sont soumis à la concurrence internationale et que les terminaux sont parfois exploités par des opérateurs extra-européens. Par ailleurs, un grand nombre de projets industriels relatifs à l'hydrogène se fixent dans des emprises portuaires, et c'est très bien ainsi : c'est une opportunité pour renforcer l'attractivité des territoires. Par ailleurs, le lien avec le ferroviaire est insuffisamment exploité ; l'enjeu de l'engagement massif du plan de relance en faveur de ce secteur réside dans la mise en œuvre d'interactions, mouvement auquel participent les autoroutes ferroviaires citées précédemment.

Madame Kamowski, la liaison Lyon-Turin bénéficie de 200 millions d'euros dans le cadre du plan de relance. Le chantier avance bien. Sur le plan géopolitique, le projet est stabilisé – je le dis eu égard aux paroles qui ont pu être prononcées par nos amis italiens lorsque la précédente coalition était au pouvoir. Les accès sont la principale question de la future décennie ; elle est pilotée localement par le préfet. Quant à la desserte Lyon-Grenoble, vous avez raison de dire que la voie est saturée. La désaturation du nœud ferroviaire lyonnais est à l'étude et des investissements ont été programmés en priorité pour la ligne Saint-Fons-Grenay – nous pourrons vous fournir toutes les informations.

Monsieur le président, je vous remercie de l'action que vous avez menée dans le cadre des PLFR3 et PLRF4. Nous nous sommes en effet inspirés de vos travaux pour concevoir la partie relative aux compensations et celle consacrée aux avances remboursables, en nous efforçant, au fil du temps, de corriger certaines imperfections. S'agissant du modèle économique des transports en commun, j'ai évoqué la mission confiée à Philippe Duron.

Le secteur aéronautique est largement piloté par notre ministère, puisque nous gérons les crédits du Conseil pour la recherche aéronautique civile (CORAC) consacrés à l'avion du futur. Nous avons ainsi mobilisé 1,5 milliard d'euros pour dynamiser la recherche en matière d'avion hybride et, demain, d'avion à hydrogène. J'ai présidé hier la réunion des ministres des transports rassemblant les quatre pays européens représentés au capital d'Airbus : la Grande-Bretagne, l'Espagne, la France et l'Allemagne. D'évidence, leur alignement politique et le très fort investissement croisé entre ces pays et l'Europe assurent un « ruissellement » vers la filière de sous-traitance de niveaux 2 et 3 et la préservation des compétences rares de ce secteur, souvent imbriquées avec celles requises dans le domaine de la défense. Le contexte politique, la grande motivation et la mobilisation des acteurs politiques et industriels me permettent d'espérer que, passé le moment le plus dur de la crise, nous serons en mesure de rebondir fortement.

Concernant le tronçon de la RN 124 Toulouse-Auch, nous avons bouclé, dans le cadre du plan de relance, le financement de la déviation de Gimont. Sous l'égide du préfet, nous aurons des discussions sur la liaison Gimont-L'Isle-Jourdain en vue du démarrage des travaux dès le début de 2023. Mais votre question renvoie plus largement, vous l'avez dit, à une réflexion sur l'avancée par petits pas et sur la manière dont on pourrait mieux solliciter structurellement la filière.

Après avoir échangé récemment avec des acteurs des travaux publics, je vais vous livrer ma conviction, qui n'est pas encore un projet politique – nous pourrons y travailler ensemble si vous le souhaitez. Depuis le début du quinquennat, nous avons réussi à traiter des thématiques telles que le sous-investissement ou la transition industrielle et écologique, mais nous n'avons pas assez fait pour les travaux publics, question éminemment territoriale. Je proposerai donc aux acteurs de ce secteur de réfléchir à quatre grands sujets.

Les deux premiers sont, d'une part, la formation et l'attractivité et, d'autre part, la technologie applicable aux travaux routiers. Alors que nous développons des procédés prometteurs à même de maintenir une forme d'excellence, nous sommes un peu en recul par rapport à 2012 : nous étions alors les premiers dans ce domaine. Il faut donc relancer une dynamique politique concernant la technologique, facteur d'influence et de rayonnement.

Troisième sujet clé : la conciliation de la performance environnementale et de la réduction des délais. Aujourd'hui, pour n'importe quel projet de grande infrastructure, les délais de décision et de mise en œuvre sont de sept à dix ans, ce qui est beaucoup trop long. Le projet finit par être déconnecté du moment politique de la décision. Ainsi, il arrive que des projets, parfois financés et qui faisaient consensus, ne soient plus adaptés aux besoins et créent des dissensus politiques locaux.

Le dernier sujet, sur lequel nous reviendrons lors de la discussion de la loi « 3D », est celui de l'exploitation des réseaux, qui sont tous plus ou moins duaux. Je pense, par exemple, dans le domaine ferroviaire, au couple ligne à grande vitesse et réseau secondaire. En l'espèce, le problème est en partie résolu par le contrat conclu avec les régions sur les petites lignes ferroviaires. Mais se posera à moyen terme la question de la dualité du réseau routier. Des contrats de concession arrivent en effet à échéance entre 2032 et 2036 et, s'agissant du réseau routier non concédé, nous devons mener une réflexion sur la réconciliation des grands réseaux – en envisageant éventuellement des concessions multimodales entre le routier et le ferroviaire – et sur les processus d'exploitation, de délégation, en lien avec les régions et les départements.

Ce secteur, qui n'a pas été traité depuis le début de ce quinquennat, doit fait l'objet, me semble-t-il, d'un travail politique plus précis, en lien avec les acteurs de la fédération nationale des travaux publics. C'est ce que je leur proposerai au printemps prochain, en vue, le cas échéant, d'engager les réformes politiques nécessaires.

Enfin, monsieur le président, je réponds à votre dernière question sur l'action des collectivités. J'ai évoqué la vocation différenciée des aéroports. La crise mettra en lumière la nécessité, pour ajuster les modèles, d'agir en complémentarité, à la limite des frontières interrégionales ou, au contraire, de différencier la vocation des aéroports pour en spécialiser certains dans le fret, d'autres dans l'activité touristique, d'autres encore dans les activités de hub. Une telle action préserverait l'unité des territoires au sens large et renforcerait le modèle économique de chacun des aéroports régionaux. Par ailleurs, se pose la question de la compétence mobilité, pour laquelle une dynamique reste à trouver afin d'exploiter pleinement la LOM.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Merci, monsieur le ministre, pour ces informations. Nous travaillons parallèlement sur la loi « 3D » et ces thèmes feront l'objet de toute notre attention.

La réunion s'est achevée à 10 heures 05.

Membres présents ou excusés

Présents. – M. Stéphane Baudu, M. Jean-René Cazeneuve, Mme Yolaine de Courson, Mme Stella Dupont, Mme Laurence Gayte, Mme Catherine Kamowski, M. Didier Le Gac, Mme Monique Limon, M. Jean Paul Mattei, Mme Monica Michel, Mme Christine Pires Beaune.