Commission des affaires économiques

Réunion du mercredi 14 octobre 2020 à 15h00

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La réunion

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La commission a examiné, pour avis, sur le rapport de M. Cédric Villani, les crédits de la mission « Recherche et enseignement supérieur ».

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Mes chers collègues, nous poursuivons l'examen des avis budgétaires sur les missions de la seconde partie du projet de loi de finances pour 2021.

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L'actualité nous offre une bonne introduction à notre débat sur les grands projets de recherche et la place de la France : le 7 octobre, l'Académie royale des sciences de Suède a décidé d'attribuer le prix Nobel de chimie à deux femmes – une Française, Mme Emmanuelle Charpentier, et une Américaine, Mme Jennifer Doudna – pour la mise au point d'une technique révolutionnaire d'édition génomique dont nous continuerons à entendre parler longtemps.

Ce brillant succès, si nous devons nous en féliciter, dissimule toutefois deux réalités moins plaisantes. La première, à laquelle je suis sensible en tant qu'ancien chercheur, est la place encore très minoritaire qu'occupent les femmes dans la profession. Je l'ai encore constaté au cours de mes travaux préparatoires pour la rédaction du présent avis : sur les treize organismes, entreprises ou administrations auditionnés, douze étaient représentés par des hommes. Il y a là une situation dont nous ne saurions évidemment nous satisfaire.

La seconde tient au caractère très international du parcours de Mme Charpentier : elle est passée par les États-Unis, la Suède et l'Allemagne – elle dirige une unité de l'Institut Max‑Planck à Berlin – et n'est pas revenue en France depuis son doctorat, en 1995. L'international, c'est parfait quand on choisit de partir, et c'est même indispensable dans le secteur de la recherche. Mais quand le départ est lié, comme c'est le cas de Mme Charpentier, à l'incapacité de notre pays de fournir des conditions de recherche adéquates, de la flexibilité, des moyens et l'accueil au sein d'une équipe, cela s'appelle la fuite des cerveaux. Ce n'est pas bon et il faudra y remédier.

Force est de reconnaître que le projet de loi de programmation pluriannuelle de la recherche (LPPR), adopté par notre assemblée le 23 septembre, a eu le grand mérite de mettre au jour les difficultés rencontrées par nos unités de recherche, même les plus prestigieuses, qui favorisent la fuite des cerveaux. Or, on le sait, la recherche conditionne en grande partie l'avenir d'un pays. Si les économies de certains pays, comme le Japon, la Corée du Sud ou l'Allemagne, restent hautement compétitives, c'est en partie lié à l'intensité de leurs efforts de recherche, se traduisant par un niveau de dépenses intérieures de recherche et développement supérieur à 3 % de la richesse – notre propre ratio stagne, depuis 2014, aux alentours de 2,2 %. On ne peut que se féliciter qu'avec la LPPR, beaucoup d'argent sera injecté dans le système dans les années à venir.

Je vous parlerai, dans le cadre de cet avis budgétaire, des grands organismes de recherche, en particulier ceux qui sont financés par le programme 172. Ses crédits, qui s'élèvent à 7 milliards d'euros environ, sont répartis entre le Centre national de la recherche scientifique (CNRS), l'Agence nationale de la recherche (ANR), l'Institut national de recherche pour l'agriculture, l'alimentation et l'environnement (INRAE), le Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA), l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (INSERM) et quelques autres organismes. On ne saurait dissocier l'examen de ce programme de celui du programme 150 « Formations supérieures et recherche universitaire », doté de 13,9 milliards, dont une partie abonde de fait les projets des grands organismes de recherche. J'évoquerai également le programme 193 « Recherche spatiale » et une partie du programme 190, pour IFP-énergies nouvelles (IFPEN).

Deux éléments d'ordre structurel caractérisent le budget des grands organismes de recherche. Premièrement, tout est enchevêtré. Par construction, en France, il y a les grands organismes et les universités, mais la plupart des laboratoires de recherche sont mixtes, associant, par exemple, un ou plusieurs grands organismes et un établissement universitaire. Deuxièmement, les budgets sont très contraints en raison du poids des ressources humaines, ce qui explique la difficulté à les faire évoluer. Par ailleurs, ces dernières années, ces budgets ont été en souffrance, car les moyens accordés ne correspondaient pas aux ambitions affichées.

Tous les organismes en question joueront un rôle majeur dans les grandes transitions dans lesquelles notre pays est engagé : la transition énergétique – avec, en particulier, l'hydrogène, qui revêt une importance particulière et est mis à l'honneur dans le plan de relance ; la transition agro-écologique, dont il a été longuement question ces dernières semaines, et dans laquelle l'INRAe jouera un rôle important ; la transition spatiale, domaine où se produisent en ce moment de grands chambardements technologiques, médiatiques et économiques, où la France a traditionnellement une expertise et une position importantes – là encore, les organismes de recherche joueront un rôle fondamental.

En vérité, le projet de loi de finances pour 2021 me semble assez paradoxal. À première vue, les crédits alloués aux principaux programmes de recherche progressent : 133 millions d'euros supplémentaires en autorisations d'engagement (AE) et 67 millions en crédits de paiement (CP) par rapport à 2020. Le programme 172, en particulier, qui est le cœur de la mission, affiche une progression de 355 millions d'euros en AE et de 222 millions en CP, ce qui est en parfaite cohérence avec les orientations du projet de loi de programmation.

Il convient de noter, en particulier, un relèvement considérable des moyens de l'ANR, qui permettra d'avoir des taux d'acceptation des projets plus importants : ils passeront à 18 %, puis à 23 %, enfin à 30 %. Les préciputs augmenteront, eux aussi, ce qui abondera l'ensemble de la recherche française.

Toutefois, au-delà de l'ANR, l'éventail des situations est plus large. La dotation du CNRS s'accroît dans une proportion satisfaisante. C'est moins vrai pour les autres organismes : les crédits de l'Institut de recherche en informatique et en automatique (INRIA), de l'INSERM et de l'INRAe stagnent, alors que la situation des uns et des autres appelle, pour des raisons diverses, à accroître l'ambition. Dans le cas de l'INSERM, on pense bien sûr à la pression qui s'exerce dans le cadre de la crise du Covid-19. Pour INRIA, il y a le plan visant à développer les start-ups et l'interface entre numérique et entreprises. S'agissant de l'INRAe, qui résulte de la fusion réussie entre l'Institut national de la recherche agronomique (INRA) et l'Institut national de recherche en sciences et technologies pour l'environnement et l'agriculture (IRSTEA), de grands espoirs reposent sur lui dans le domaine de l'agro-écologie.

Les autorités de tutelle ont tendance à attendre la conclusion des contrats d'objectifs et de moyens avant de réévaluer les dotations. Cette démarche risque de mettre ces organismes en difficulté. Elle traduit surtout, selon moi, un manque d'ambition contraire à l'état d'esprit qui a présidé aux travaux d'élaboration de la LPPR.

J'en viens à la recherche spatiale. Les crédits du programme 193 connaissent une forte baisse, qui s'explique pour l'essentiel par un retour à la normale de la contribution française à l'Agence spatiale européenne. En effet, la France avait du retard à rattraper, ce qui s'est traduit par un gonflement des crédits pendant quelques années. La diminution est également liée à des mesures de périmètre : une partie des dépenses du Centre national d'études spatiales (CNES) sont désormais financées par la nouvelle mission « Plan de relance », examinée hier par notre commission. Le choix opéré par le Gouvernement d'intégrer à cette mission temporaire des dépenses qui auraient pu être retracées dans leurs programmes d'origine nuit beaucoup, selon moi, à la lisibilité des documents budgétaires, et donc à la qualité du travail parlementaire.

Sur le fond, l'entretien organisé avec le président du CNES a été l'occasion d'évoquer plusieurs motifs d'inquiétude s'agissant de la politique spatiale française. La filière a été durement affectée par les effets de la crise sanitaire : comme vous le savez, la Guyane a été très touchée, ce qui a entraîné la fermeture pendant deux mois du centre spatial, contrairement à d'autres bases de lancement dans le monde. Le chantier du pas de tir a été, lui aussi, interrompu, avant de reprendre selon un rythme dégradé. Les projets de certains clients ont également été retardés.

Le retard pris dans l'achèvement du projet Ariane 6 intervient alors que l'économie de l'espace est en pleine recomposition, avec l'affirmation de nouveaux acteurs privés – SpaceX, mais aussi Amazon – et la montée en puissance de segments de marché à haute valeur ajoutée, en particulier les satellites et les applications, et la part grandissante des start-ups. Une nouvelle économie se met en place, dans laquelle la France doit s'engager. L'an dernier, l'Europe a réagi en affichant sa volonté d'intensifier ses efforts, avec une contribution financière atteignant un niveau sans précédent, de l'ordre de 14,5 milliards d'euros au cours des prochaines années. Dans cet ensemble, il est important que la France continue à jouer un rôle prééminent, de façon à ce que l'Europe ne s'efface pas d'un marché stratégique en termes de souveraineté – je pense en particulier aux lanceurs, qui deviennent réutilisables, ou encore à certaines évolutions d'internet en lien avec l'espace, par exemple les prévisions météo. Ce sont des enjeux majeurs dont, soit dit en passant, notre commission devrait continuer à se saisir.

Parmi les trois domaines de recherche stratégiques que j'évoquais tout à l'heure, celui de l'énergie a fait l'objet d'une attention particulière dans mon rapport. L'annonce par le Gouvernement, en septembre dernier, d'une stratégie nationale pour le développement de l'hydrogène décarboné, et l'inscription des mesures correspondantes dans le plan de relance illustrent la prise de conscience que notre pays devra, pour faire face à la transition énergétique, mobiliser des ressources lui permettant de s'extraire définitivement de sa dépendance aux énergies fossiles. Il convient de se féliciter sans ambages de l'ambition affichée par le plan de relance : en matière d'hydrogène, il représente un changement complet d'ordre de grandeur.

L'hydrogène, plus précisément la molécule de dihydrogène (H2), n'est pas tant une source d'énergie qu'un vecteur : une fois qu'il a été isolé, il peut être transporté et servir à alimenter toute une série mécanismes – on parle d'hydrogène vert, gris, bleu, etc. L'hydrogène peut être produit de manière carbonée ou décarbonée, selon la nature de l'énergie utilisée : photovoltaïque, éolien ou encore hydraulique. L'hydrogène est obtenu par électrolyse de l'eau ou par l'usage de chaleurs très importantes, en association avec certains processus dans les réacteurs nucléaires.

Les usages potentiels de l'hydrogène sont considérables. Nous avons été impressionnés par tout ce qui nous a été présenté dans le cadre de la préparation du rapport : injection dans les canalisations de gaz urbain, usage industriel sous forme d'acide formique ou d'ammoniac, conversion en électricité ou encore carburant de substitution. Airbus évoque même un avion à propulsion hydrogène à l'horizon 2035 – je le signale tout en sachant que le débat sur les mobilités légères a avancé plus vite que celui sur les mobilités lourdes.

Il convient de noter l'expertise particulière de la France dans le domaine de l'électrolyse à haute température, s'appuyant, d'une part, sur le secteur nucléaire et, d'autre part, sur le grand savoir-faire du CEA et du CNRS. Il y a là un avantage comparatif que la France se doit d'exploiter. Cette question est d'ailleurs indépendante de la position que l'on peut avoir sur l'avenir du nucléaire.

Il convient donc de saluer l'ambition de la nouvelle stratégie nationale en matière d'hydrogène. Du reste, les moyens financiers annoncés pour 2021 et 2022 sont sans commune mesure avec ce qui s'était produit lors du lancement du premier plan hydrogène, en 2018. L'année 2020 est vraiment, de ce point de vue, une année zéro.

Compte tenu de cette ambition, il est paradoxal que le projet de loi de finances pour 2021 en vienne à pénaliser – sans le vouloir, sans doute – l'un des organismes publics de recherche les plus en pointe dans le domaine de l'hydrogène, à savoir IFPEN. Certes, sa dotation est stable – 122 millions d'euros –, mais c'est d'autant plus injuste que le secteur est en pleine expansion, que le plan de relance participe au développement et que l'établissement a opéré depuis plusieurs années une réorientation de ses activités de recherche en direction de la transition écologique et de la mobilité durable. Surtout, le mode de financement d'IFPEN fait la part belle à des ressources propres issues de portefeuilles de brevets et de dividendes de filiales, qui sont en forte baisse du fait de la crise du Covid-19. Cette diminution est estimée par les représentants d'IFPEN à près de 10 millions d'euros sur les deux ans que devrait durer la crise. C'est considérable pour un établissement dont le budget s'élève à 280 millions d'euros. Cela le place objectivement dans une situation de grande fragilité. Voilà pourquoi je vous propose dès à présent de procéder, par voie d'amendement, à une réallocation de moyens correspondant à la baisse de ressources qu'il devrait subir. Il s'agit d'opérer un transfert du programme 172 vers le programme 190. Pour remédier aux autres insuffisances que je décrivais tout à l'heure, en revanche, il faudrait davantage de moyens que ceux qui figurent dans le périmètre de la mission dont j'ai la charge.

Vous l'aurez compris, selon moi, les points forts de ce projet de budget ne suffisent pas à en compenser les insuffisances. C'est pourquoi j'émets un avis défavorable à l'adoption des crédits de la mission. Cela ne signifie pas que tout est à jeter, au contraire : il y a des points forts, que je salue, concernant l'ANR, le CNRS et la stratégie hydrogène. Mais, en regard, il y a les points faibles que j'ai indiqués, à savoir le manque d'ambition pour l'INSERM, l'INRAe et INRIA, la situation de détresse d'IFPEN et le défaut de lisibilité globale du budget.

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L'examen de cet avis budgétaire sur la mission « Recherche et enseignement supérieur » et les grands organismes de recherche se déroule dans un contexte particulier : nous avons adopté il y a quelques semaines à peine le projet de loi de programmation de la recherche pour les années 2021 à 2030. Je salue, au nom du groupe MoDem, cette programmation pluriannuelle des crédits en faveur de la recherche publique. Cette démarche est indispensable : le secteur de la recherche a absolument besoin de visibilité pour prospérer et demeurer attractif.

Nous ne pouvons donc qu'approuver les investissements historiques qui sont mobilisés : 25 milliards d'euros sur les dix prochaines années au profit des organismes de recherche, des universités et des établissements, dont 435 millions d'euros dès 2021. Pour la première fois, le budget annuel de la recherche publique atteindra 20 milliards en 2030, soit 5 milliards de plus qu'actuellement. Ces investissements historiques nous permettront d'abord et avant tout de mettre enfin la France en conformité avec ses engagements européens : alors que, en vertu de la stratégie de Lisbonne, la part du produit intérieur brut (PIB) dédiée à la recherche et développement doit atteindre 3 %, la France continue à stagner à 2,2 %, bien loin de son potentiel.

Au-delà du rattrapage budgétaire, notre groupe demande que la hausse du budget consacré à la recherche permette de conforter le rang de la France dans la recherche européenne et mondiale et de mieux faire face aux défis scientifiques de notre siècle, qui sont nombreux : du risque sanitaire à la transition agricole, en passant par l'intelligence artificielle, l'observation spatiale ou encore la lutte contre le changement climatique, la science doit nous aider à innover.

Telle est la conviction de notre groupe, notamment en matière de transition écologique et agricole. Nous défendons de longue date le principe « pas d'interdiction sans solution ». Or, si nous voulons transformer en profondeur nos modes de vie et de production, il faut non pas interdire complètement les pratiques les plus nocives, mais accompagner l'ensemble des filières vers des solutions plus durables et vertueuses. Pour ce faire, il est indispensable de mieux diffuser et de faire rayonner la recherche dans l'économie et dans la société, mais surtout dans nos politiques publiques. En effet, comme on l'a constaté de nouveau ces dernières semaines, nous avons indéniablement besoin de la science pour éclairer nos débats et nos décisions. L'investissement dans la science et la recherche permettra à terme aux agriculteurs de réduire l'utilisation des produits phytosanitaires et phytopharmaceutiques, et à tous les citoyens d'avoir accès à une alimentation plus saine, sûre, équilibrée et durable, avec beaucoup moins de sel nitrité et d'autres additifs.

Je me permets d'appeler votre attention sur l'enjeu majeur que constitue le financement de l'innovation et du transfert de technologies dans le secteur agroalimentaire, évoqué durant les États généraux de l'alimentation. La subvention prévue pour l'Association de coordination technique agricole et l'Association de coordination technique pour l'industrie agroalimentaire reste à un niveau relativement faible : 700 000 euros. Ce financement leur permet tout juste de remplir leur rôle de tête de réseau des organismes de développement et d'assurer leur mission d'intérêt général. C'est un point crucial si nous souhaitons que la recherche technologique alimentaire soit accessible à tous, y compris les TPE et PME, plutôt que de rester réservée aux grands groupes, qui seuls disposent des moyens financiers nécessaires pour internaliser leur capacité de recherche et développement.

Le plan d'investissement permettra aussi d'optimiser l'aménagement du territoire et la gestion des forêts grâce à l'observation spatiale, avec les programmes phares que sont Copernicus et Galileo.

Mon groupe votera donc en faveur de ces orientations budgétaires.

Je souhaite vous interroger, Monsieur le rapporteur pour avis, sur plusieurs aspects de la mission.

Bientôt un an après la création de l'INRAe, quel est le premier bilan de la fusion de l'INRA et de l'IRSTEA, et quelles sont les perspectives de cet établissement pour 2021 ?

Dans le secteur de l'agroalimentaire, quelles sont les pistes pour renforcer l'excellence et l'indépendance de la recherche appliquée effectuée dans les instituts et centres techniques ?

En matière de recherche spatiale, comment le CNES entend-il développer de nouvelles applications utiles pour la mise en œuvre de nos politiques publiques, notamment pour l'agriculture et la forêt ?

Plus largement, comment ce budget prévoit-il de faire en sorte que les politiques publiques soient mieux éclairées par la recherche fondamentale ?

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Avant d'évoquer spécifiquement les grands organismes de recherche, je vais m'autoriser quelques digressions sur notre système de recherche et sur la loi de programmation pluriannuelle de la recherche, en discussion au Parlement.

Tout d'abord, force est de constater que l'effort de recherche est largement insuffisant : avec 2,16 % du PIB consacré à la recherche, la France est encore loin d'atteindre l'objectif de 3 % fixé au niveau communautaire. Si le groupe Libertés et Territoires salue l'effort budgétaire annoncé dans le projet de loi de programmation, il regrette néanmoins que la montée en charge soit insuffisante et surtout étalée sur trois quinquennats.

Nous craignons également que l'effort en faveur de la revalorisation des carrières soit insuffisant pour aligner les rémunérations des chercheurs français sur celles de leurs homologues européens.

Enfin, le choix de privilégier le financement par appels à projets ne nous semble pas compatible avec l'objectif que nous devrions viser, à savoir un investissement dans le temps long, déconnecté des agendas politiques.

Pour en venir aux dotations des programmes 172 et 193, elles reflètent, selon moi, les orientations du projet de loi de programmation de la recherche : la progression est mesurée et insuffisante.

S'agissant plus spécifiquement des grands organismes de recherche, je tiens à saluer l'augmentation des moyens alloués à certains établissements chargés de distribuer des crédits – je pense à l'ANR et au CNRS.

Je suis moins enthousiaste concernant les dotations de l'INRAE et d'IFPEN, qui sont les organismes en pointe dans la transition écologique. Alors que nous avons longuement débattu, à l'occasion du projet de loi relatif aux conditions de mise sur le marché de certains produits phytopharmaceutiques en cas de danger sanitaire, de la nécessité d'accompagner la recherche de solutions alternatives aux néonicotinoïdes et plus globalement aux pesticides, il est inquiétant que cette priorité ne se traduise pas concrètement dans les crédits de la mission. Il est urgent d'accélérer la recherche dans ce domaine. Je pense, par exemple, à la lutte intégrée, qui combine plusieurs techniques : la lutte biologique, c'est-à-dire la diversification des cultures, et la lutte physique, par application sur les cultures d'une couche protectrice – paraffine, argile, etc. Ces enjeux nous imposent de revoir les méthodes de recherche : il convient de favoriser le partage de connaissances plutôt que le travail en silos.

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La fusion de l'INRA et de l'IRSTEA a été exemplaire. Les coûts annoncés ont été tenus et la réduction de 10 % des effectifs globaux bien gérée. Les consultations internes, organisées autour de la définition d'une perspective à un horizon de dix ans, ont permis de déployer une nouvelle vision pour la suite. L'organisme est ainsi doté d'un programme pertinent. On ne peut que saluer l'action menée par les directions de l'INRA et l'IRSTEA, qui ont très bien collaboré pour atteindre l'objectif.

L'INRAe va se consacrer à des questions majeures, pour lesquelles les attentes sont très importantes, telle la transition agro-écologique, dont nous entendrons de nouveau parler tout à l'heure. Sa collaboration avec d'autres organismes, par exemple le CNRS et INRIA, sera renforcée. L'utilisation des données, notamment à travers les techniques de fouille utilisant l'intelligence artificielle, y compris pour les prévisions météorologiques – on rejoint là les enjeux spatiaux que j'évoquais tout à l'heure –, va jouer un rôle important.

Nous devrions donc renforcer la dotation de cet organisme. Cela permettrait à la fois de le récompenser et de faire en sorte qu'il réponde aux grandes attentes qu'il suscite. Si je comprends que le Gouvernement attende le contrat d'objectifs et de moyens pour réévaluer sa participation, je considère, pour ma part, que les auditions menées ont été particulièrement satisfaisantes.

En ce qui concerne le CNES, la recherche spatiale est un domaine qui évolue de manière extrêmement rapide. Notre commission devrait d'ailleurs s'en saisir spécifiquement, comme je le disais tout à l'heure. On assiste à un chambardement complet, avec l'apparition de nouvelles technologies – je pense en particulier aux lanceurs réutilisables. Certes, Ariane 6 n'en utilisera pas, mais ce sera le cas pour le programme Prometheus. De nouveaux modèles économiques sont également en train d'émerger, avec une grande variété d'applications, bien supérieure à ce que l'on a connu jusqu'à présent. Les géants américains se positionnent dans ce secteur, avec des patrons emblématiques tels que MM. Elon Musk, Jeff Bezos ou, dans une moindre mesure, Mark Zuckerberg.

Le retentissement médiatique des programmes spatiaux a, lui aussi, changé : aux États-Unis, en particulier, ils ont été mis en valeur d'une manière phénoménale. À une époque, en France, la recherche spatiale faisait l'objet d'une grande fierté, ce qui se traduisait aussi sur le plan médiatique ; désormais, elle est fortement minimisée par rapport à ce que l'on observe de l'autre côté de l'Atlantique. En tant que Français et Européens, nous ne saurions nous satisfaire de cet état de fait. Il est très important de ne pas perdre pied, que ce soit dans le domaine des lanceurs, dans celui des satellites ou encore dans celui des diverses applications utilisant la fouille de données. Certes, cela relève des organismes de recherche, mais les choses se jouent aussi du côté de la Banque publique d'investissement (Bpifrance), de l'accompagnement de nos start-ups ou encore du crédit d'impôt recherche : il faut créer un écosystème favorable.

Pour l'instant, les échos que nous avons eus en la matière sont plutôt inquiétants – je le dis sans ambages. Il va falloir, dans les années qui viennent, prendre très au sérieux cet état de fait. L'Europe a pris la mesure de l'urgence : le budget de l'Agence spatiale européenne, tel qu'il se profile, est en progression importante. L'Allemagne est en train de prendre le leadership. Certes, nous devons nous réjouir que l'Europe se développe, mais, historiquement, c'est la France qui a été le pilier et le moteur le plus important de l'Agence spatiale européenne. Il serait bon que nous voyons cela comme un défi important, une source d'émulation pour que nous continuions à occuper cette place importante qui correspond tellement bien à notre histoire.

Pour finir, je ferai quelques brefs commentaires sur ce qu'a dit M. Olivier Falorni s'agissant de la LPPR, même si ce n'est pas l'objet de notre réunion. En termes de masses budgétaires, le gros de l'effort portera sur l'ANR et la revalorisation des carrières, mais l'instauration de nouvelles règles permettra d'abonder l'ensemble de la recherche. D'une part, les taux d'acceptation vont augmenter de façon importante – en tout cas c'est ce qui est prévu –ce qui veut dire que les chercheurs perdront moins de temps avec les candidatures multiples et que les financements seront plus importants, ce qui évitera de devoir chercher des ressources complémentaires. D'autre part, le préciput va augmenter, ce qui est également très important. Le terme désigne, je le rappelle, la part de financement découlant des contrats avec l'ANR qui rejaillit directement sur les établissements et les équipes de recherche. Les discussions avec le ministère autour du dispositif n'ont pas encore fixé le pourcentage, mais il devrait atteindre, à terme, 30 % à 40 %. Il conviendra d'être particulièrement vigilant sur ce point. Le groupe de travail auquel je participais, dans le cadre des travaux préliminaires autour du projet de loi, avait d'ailleurs abordé la question.

Il n'en demeure pas moins que je suis en phase avec ce qu'a dit M. Olivier Falorni : il y a une sorte de paradoxe entre, d'un côté, l'importante montée en gamme de l'ensemble des moyens de la recherche et, de l'autre, la relative stagnation des budgets, en dehors de ceux de l'ANR et du CNRS. Les sommes allouées à des organismes tels que l'INRAe, l'INSERM, IFPEN et INRIA méritent d'être corrigées au vu des évolutions qu'ils connaissent.

La commission en vient à l'examen des amendements.

Article 33 et état B

La commission est saisie de l'amendement II-CE9 du rapporteur pour avis.

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L'objet de cet amendement est de réaffecter 9,3 millions d'euros du budget de l'ANR vers celui d'IFPEN – les transferts de crédits par voie d'amendement ne sont possibles qu'au sein d'une même mission, d'un programme vers un autre. Le montant du transfert proposé correspond, d'une part, au fait que le budget de l'ANR est un peu plus élevé que ce qui avait été annoncé, et, d'autre part, au niveau du déficit qui nous a été annoncé pour IFPEN, en lien avec la crise : 10 millions d'euros environ sur deux ans. Il me paraissait naturel de lui affecter cette somme sur une même année. D'abord, cela permet de prendre un peu d'avance et de lui éviter de se retrouver dans la détresse : c'est le seul des organismes couverts par la mission qui nous semble dans cette situation – il est même proche d'un plan social. Ensuite, une petite progression de son budget serait en phase avec la grande ambition affichée par le plan hydrogène.

La commission rejette l'amendement.

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Je réitère mon avis défavorable à l'adoption des crédits de la mission. Il y a certes des points forts dans ce budget – concernant le CNRS, l'ANR et le plan hydrogène –, mais aussi des points faibles : défaut de lisibilité, manque d'ambition s'agissant d'INRIA, de l'INRAe et de l'INSERM, sans oublier la situation critique d'IFPEN, à laquelle il sera absolument indispensable de revenir dans le cadre du PLF.

La commission émet un avis favorable à l' adoption des crédits de la mission « Recherche et enseignement supérieur ».

La commission a examiné pour avis, sur le rapport de M. Jean-Bernard Sempastous, les crédits de la mission « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales ».

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Il y a un an, au salon international de l'agriculture, le Président de la République rappelait : « Nous avons un devoir de protection vis-à-vis de toutes celles et ceux qui nous nourrissent. C'est aujourd'hui leur engagement qui garantit notre souveraineté alimentaire ». Nous avons encore pu le mesurer lors de la crise sanitaire qui a contraint notre pays à se réorganiser entièrement.

Dans ce temps suspendu, notre agriculture, déjà fragile, a été particulièrement affectée, mais elle a su aussi s'adapter pour permettre aux consommateurs de se fournir directement dans les fermes, pour faire face au manque de main-d'œuvre saisonnière, pour s'ajuster à la reconfiguration du marché. Il faut saluer l'entraide intelligente des acteurs du monde agricole face à la crise. Les chambres d'agriculture, les syndicats, les abattoirs et les transformateurs, les filières, les associations, les commerces de proximité, les services de l'État, les agriculteurs, tous se sont mobilisés et soutenus. C'est un bel exemple de solidarité à la française. J'observe également l'intérêt prononcé des citoyens pour les produits locaux, qui est un signe de leur attachement à leur territoire, mais aussi de leur souci de bien-être en privilégiant les circuits courts.

Nous vivons un moment unique pour relancer notre agriculture et remédier à certains de ses handicaps.

Protéger nos agriculteurs, c'est un objectif que nous partageons tous ici et qui est au cœur de notre engagement depuis 2017. Cette année, nous pouvons nous féliciter d'avancées notables : le maintien à hauteur de 62,4 milliards d'euros du budget de la politique agricole commune (PAC), pour lequel notre ministre s'est battu ; l'affectation de 1,2 milliard d'euros au volet « Transition agricole » du plan de relance pour renforcer la souveraineté alimentaire, accélérer la transition agroécologique et adapter l'agriculture et la forêt au changement climatique.

Cette année, avec 2,9 milliards d'euros en AE et en CP, la mission « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales » du projet de loi de finances (PLF) pour 2021 affiche sa constance au service d'une agriculture durable économiquement et respectueuse de l'environnement. Il se caractérise par trois objectifs : soutenir le revenu des agriculteurs et la transformation de l'agriculture vers l'agroécologie, y compris grâce aux contreparties nationales aux aides de la PAC ; assurer la sécurité de nos aliments par le maintien de niveaux élevés de surveillance, de prévention et de notre capacité à gérer efficacement les crises ; préparer l'avenir par l'innovation et la formation de nos jeunes.

Le programme 149 « Compétitivité et durabilité de l'agriculture, de l'agroalimentaire, de la forêt, de la pêche et de l'aquaculture » soutient financièrement les filières. Il intervient en synergie avec les fonds européens pour favoriser la compétitivité des exploitations et des entreprises. Après une hausse de 8,8 % l'an dernier, les AE de ce programme diminuent de 4,8 % en 2021. Cela est lié au triplement des crédits accordés aux mesures agroenvironnementales et climatiques (MAEC), qui demeurent à un niveau élevé.

Quelques évolutions notables sont à noter.

Les crédits du fonds pour les industries agroalimentaires sont en augmentation, afin de financer un programme d'accompagnement de petites et moyennes entreprises (PME).

Le fonds Avenir Bio est stable, à 8 millions d'euros ; l'objectif est d'atteindre 15 % de la surface convertie en agriculture biologique d'ici à 2022. Le budget de ce fonds a doublé depuis 2018.

Le montant alloué aux stages à l'installation est revalorisé de 600 000 euros pour inciter au renouvellement des générations.

Le budget de l'action n° 25 « Protection sociale » est en hausse de 10 millions d'euros, grâce à l'exonération des charges patronales pour l'emploi de travailleurs occasionnels et de demandeurs d'emploi (TO-DE), prolongée jusqu'au 1er janvier 2023.

L'action n° 26 « Gestion durable de la forêt et développement de la filière bois », affectée au financement du programme national la forêt et du bois, du Centre national de la propriété forestière, de la restauration des terrains de montagne et des missions d'intérêt général confiées à l'Office national des forêts, est en hausse de 3,5 % en AE et de 2,2 % en CP.

L'action n° 27 « Moyens de mise en œuvre des politiques publiques et gestion des interventions » augmente de 3,6 % pour la mise en œuvre des politiques nationales et communautaires en faveur des entreprises agroalimentaires et agricoles, la provision pour aléas qui couvre majoritairement les potentiels refus d'apurement communautaire, et les aides éventuelles pour faire face à des crises climatiques ou économiques au niveau communautaire.

Le programme 206 « Sécurité et qualité sanitaires de l'alimentation », en hausse de 30 millions d'euros, affiche 599,3 millions d'euros en AE et 598,1 millions d'euros en CP. Cette augmentation de 5 % porte sur les crédits affectés à la gestion des maladies animales, en lien avec la tuberculose bovine, et à la refonte de la base de données nationale de l'identification pour une meilleure traçabilité des animaux vivants ; les contrôles officiels des conditions sanitaires de production, d'importation et de commercialisation des aliments d'origine animale bénéficient d'une augmentation de 2 millions d'euros en réponse aux besoins constatés sur le terrain ; 500 000 euros sont affectés au lancement d'une plateforme internet destinée à la centralisation statistique des données sur les produits durables et de qualité en restauration collective, nécessaire pour satisfaire aux obligations introduites par la loi n° 2018-938 du 30 octobre 2018 pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous (ÉGALIM).

Le programme 215 « Conduite et pilotage des politiques de l'agriculture », consacré à la mise en œuvre déconcentrée des politiques soutenues par le ministère et aux moyens de fonctionnement de l'administration centrale, est en hausse.

Le compte d'affectation spéciale « Développement agricole et rural » (CASDAR) est alimenté par le produit de la taxe sur le chiffre d'affaires des exploitants agricoles. En l'état actuel, le montant des engagements est ajusté tout au long de l'année à due concurrence des recettes réellement encaissées. Mais la baisse du plafond des crédits s'établit à 126 millions d'euros, contre 136 millions d'euros l'an dernier. À l'heure où l'innovation et la technique doivent être encouragées pour favoriser de meilleures performances économiques et environnementales, je propose de rehausser le plafond des recettes estimatives du CASDAR afin qu'un éventuel dépassement de ces 126 millions d'euros, comme estimé par les chambres d'agriculture, ne constitue pas un frein. Je vous proposerai un amendement sur ce sujet.

Le développement et la demande croissante d'une agriculture de proximité, notamment pendant la crise – drive à la ferme, marchés, associations pour le maintien d'une agriculture paysanne (AMAP) –, m'ont poussé à étudier le phénomène de l'agriculture urbaine, qui prend de l'ampleur dans les villes. Effet de mode ou projets prometteurs ? Élu d'une circonscription rurale, je pense que ces projets sont aussi bien transposables dans des petites villes. Du reste, la ville tendant à s'étaler, cette forme de production n'a-t-elle pas une vocation naturelle à suivre demain le même mouvement ?

L'agriculture urbaine est définie par l'Agence de la transition écologique (ADEME) comme « tout acte maîtrisant le cycle végétal ou animal dans un but de production alimentaire ayant lieu en zone urbaine ». Elle peut s'établir sur des surfaces bien différentes – friches, sols, toits, murs, sous-sol – et être soutenue par des acteurs aussi divers que des bailleurs sociaux, la SNCF, des municipalités, etc. C'est un phénomène qui remonte au XIXe siècle ; en 1845, on comptait 1 800 maraîchers autour de Paris. L'Association française d'agriculture urbaine professionnelle recense 600 sites exploités sur une surface de 80 hectares répartis en micro-sites. On manque de données au niveau national.

L'agriculture urbaine est intéressante en ce qu'elle exacerbe les multifonctionnalités de l'agriculture. Sa fonction nourricière est réelle. Les productions peuvent être très diverses : maraîchage sur les murs, en milieu fermé pour les champignons ou les endives, sur les toits pour les ruches, les légumes et les fruits.

Sa fonction environnementale est forte. Des études ont montré les effets de ce type d'agriculture sur la régulation thermique des villes. Elle contribue à la réhabilitation des sols pollués par des projets hors-sol ou de dépollution des sols, à la reconstruction de la biodiversité, à la lutte contre la pollution atmosphérique et contre la pollution sonore par la végétalisation, à une gestion améliorée de l'eau par la rétention de l'eau de pluie, et au recyclage des déchets.

Elle peut être aussi un facteur de cohésion sociale. Dans des quartiers délaissés, l'activité d'agriculture urbaine permet de reconnecter les habitants entre eux, de proposer des chantiers d'insertion, d'attirer des nouveaux publics et de favoriser le mélange des générations et des classes sociales.

Elle aide à la reconnexion des gens avec la nature et répond à un besoin social de verdissement, à la végétalisation et l'embellissement urbain. Elle constitue une solution pour réhabiliter des friches urbaines et leur redonner un usage.

De surcroît, elle a aussi une fonction pédagogique. Grâce à l'établissement de partenariats avec les écoles, elle favorise l'éveil des jeunes aux techniques agricoles.

L'agriculture urbaine est inégalement répartie dans les territoires, car elle dépend des initiatives prises au niveau local par les agglomérations, les collectivités, les chambres d'agriculture, l'Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU), la Caisse des dépôts et consignations (CDC). Les collectivités territoriales jouent un vrai rôle dans l'accompagnement des projets, notamment lorsqu'elles maîtrisent du foncier et qu'elles acceptent de devenir le support de cette activité.

Les porteurs de projets dans cette agriculture d'un nouveau type ont besoin d'être soutenus sur trois aspects : l'accession aux sites ; l'adaptation juridique à l'activité agricole exercée en cœur de ville, notamment au regard du bail et de la flexibilité du droit ; la clarification et la généralisation des aides. Dans le plan de relance, 30 millions d'euros sont affectés en AE et 15 millions d'euros en CP pour favoriser le développement de jardins partagés.

Nous découvrons sans cesse des caractéristiques nouvelles de l'agriculture, profondément utiles à l'environnement. Le développement des pratiques agro-écologiques et les budgets qui lui sont alloués capitalisent sur ces atouts. L'agriculture a de l'avenir, partout au bénéfice de tous – l'agriculture urbaine en est un exemple éloquent. Il faut croire en son potentiel, en l'accompagnant vers l'amélioration de ses pratiques et en lui donnant tous les outils pour un avenir jeune, innovant, ambitieux. Les défis sont nombreux, du changement climatique aux menaces des espèces invasives qui nous imposent parfois de faire des choix difficiles alors que nous devons modifier nos pratiques pour lutter contre les dégâts qu'elles occasionnent.

Plus modeste que celui de l'an dernier, qui avait connu une hausse significative, le PLF 2021 s'inscrit pourtant dans la continuité des efforts de la majorité pour accompagner notre agriculture, l'aider à faire face aux imprévus, mais aussi prendre le tournant d'une production toujours plus vertueuse et adaptée aux nouvelles demandes des consommateurs. Ce budget est aussi marqué par sa parfaite adéquation avec les autres soutiens financiers européens et le plan de relance.

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L'examen des crédits de la mission « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales » nous donne l'occasion de rendre hommage aux agriculteurs, aux filières qui ont tenu le choc durant la première vague épidémique et le confinement, permettant aux Françaises et aux Français de se nourrir avec des produits sains et durables. Ces femmes et ces hommes sont essentiels à la nation ; ils ont tenu debout dans la difficulté et l'épreuve, manifestant leur engagement à chaque instant.

Notre agriculture est à un tournant en ce qu'elle est le centre d'une transformation profonde à la fois d'une filière économique et d'une forme d'organisation de notre société et de nos territoires, de nos choix d'alimentation, parfois de choix de crise, voire d'après-crise. Il nous faut construire pour aujourd'hui et demain ce changement profond, construire ensemble les transitions en évitant les débats manichéens, en remettant du sens, de la nuance, de la réflexion et du temps.

Nous abordons l'année 2021 avec conviction et vigilance, du fait de la situation, mais aussi avec confiance parce que nous connaissons celles et ceux qui font l'agriculture. C'est la troisième année de l'application de la loi ÉGALIM et de ses véritables bienfaits sur notre agriculture et notre alimentation. Le budget 2021 tient les engagements de l'ensemble du Gouvernement, du ministre de l'agriculture et de l'alimentation dans l'objectif d'une transition agro-écologique qui prévoit ainsi 494 millions d'euros d'AE et 510 millions d'euros de CP au titre des contreparties nationales de mesures inscrites dans la PAC. Le budget pour 2021 maintient également la compétitivité de nos filières agricoles et agroalimentaires en conservant les avantages du TO-DE (travailleurs occasionnels demandeurs d'emploi), la dotation aux jeunes agriculteurs qui est en hausse depuis l'année dernière, les indemnités compensatoires des handicaps naturels (ICHN) si nécessaires dans bon nombre de nos territoires, enfin les budgets destinés aux chambres d'agriculture pour construire les projets des territoires ruraux, des décisions justes pour réaffirmer notre solidarité avec la ferme France.

C'est aussi un budget de soutien qui prépare l'avenir par l'innovation et la formation de nos jeunes. Ainsi, les crédits alloués à l'enseignement agricole augmentent de 14 millions d'euros afin de promouvoir et rénover l'enseignement technique pour mieux coller à notre ambition commune d'une transition agro-écologique rapide. Je veux, là aussi, rendre hommage à toute la communauté éducative de l'enseignement agricole.

Le budget pour 2021 se situe dans la parfaite lignée ambitieuse des lois de finances de 2018, 2019, 2020. Sa principale caractéristique est d'être un budget qui tient, qui maintient et qui soutient. Puisqu'il est cohérent avec nos objectifs et ceux définis par le Président de la République, le groupe La République en Marche le votera.

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Nous sommes tous d'accord sur la résilience dont a fait preuve la chaîne alimentaire française tout au long de la crise sanitaire et de la période de confinement. Les efforts et le courage de l'ensemble des acteurs de l'amont à l'aval doivent être salués ; ils ont permis aux Français de redécouvrir le rôle majeur que jouent les agriculteurs dans la production d'une alimentation saine, locale et diversifiée.

Ce qui a marché, c'est la proximité des productions et la polyvalence des outils de transformation. Ce qui a moins bien marché, c'est l'hyper spécialisation des unités de transformation qui ne permet pas de passer d'une production massive destinée à l'export à une production en direction des grandes surfaces de proximité. Le ministère de l'agriculture doit en tirer les enseignements. Ce budget doit permettre de valoriser les atouts de nos territoires à travers une agriculture de proximité, notamment les circuits courts. Il faut aussi insister sur l'instauration d'outils de transformation de taille adaptée, répartis sur tout le territoire.

Toutefois, nous ne pourrons atteindre la souveraineté alimentaire qu'en envoyant des signaux positifs à nos filières. Notre agriculture subit, à l'échelle européenne et internationale, des écarts de coûts de production liés notamment au coût de la main-d'œuvre, particulièrement dans les cultures spécialisées en fruits et légumes. Non seulement elle souffre de difficultés pour recruter la main-d'œuvre saisonnière, mais elle doit user de pédagogie pour faire accepter aux consommateurs les prix plus élevés des produits français par rapport à ceux d'importation. Sur ces produits-là, nous sommes très loin de l'autosuffisance, et c'est un enjeu majeur en matière de politique agricole. C'est la raison pour laquelle nous ne pouvons que nous réjouir de la reconduction du dispositif TO-DE pour l'année 2021. La prorogation de cette exonération apparaît essentielle pour les secteurs employeurs de main-d'œuvre saisonnière où le coût du travail est un enjeu important de compétitivité. Il serait bon d'envisager la pérennisation de ce dispositif plutôt que de l'évoquer chaque année : pour se développer, une filière a besoin de visibilité.

Un autre sujet tient particulièrement à cœur du groupe MoDem: le soutien à la filière bois. Durant l'examen du projet de loi d'accélération et de simplification de l'action publique, nous nous sommes très fortement investis dans la lutte contre l'extrême morcellement de la propriété forestière. Nous avons obtenu que soit pérennisée l'expérimentation permettant aux gestionnaires forestiers d'accéder au cadastre numérique pour identifier facilement les propriétaires et leur proposer une gestion commune. Cette lutte passe également par des dispositifs fiscaux incitatifs. Pourriez-vous nous détailler, Monsieur le rapporteur pour avis, les crédits alloués au Fonds stratégique de la forêt et du bois ? Il est indispensable que ce fonds continue d'être largement abondé, car il permet d'accompagner le développement de la filière. Pourriez-vous également nous détailler les choix qui ont été retenus quant au dispositif d'encouragement fiscal à l'investissement en forêt, dit DEFI forêt ? Cette mesure qui cible les contribuables réalisant des investissements forestiers, particulièrement simple dans sa mise en œuvre, a été prolongée jusqu'au 31 décembre 2020. Quel dispositif la remplacera ?

Enfin, nous savons bien que la politique agricole de la France et l'action du ministère sont très liées à la réforme de la PAC. Depuis le début de la législature, j'appelle de mes vœux la constitution d'un groupe transversal de parlementaires pour suivre l'évolution des négociations. Des sujets importants sont en effet sur la table. Nous devons saisir cette opportunité pour faire avancer des demandes importantes, aussi bien pour la pérennité économique de notre agriculture que pour sa transformation écologique. À cet égard, j'ai rappelé ici même, il y a quelques jours, qu'il convenait de saisir des opportunités réglementaires pour réhabiliter la haie bocagère à laquelle je crois beaucoup pour la diversité dans nos campagnes. Quel est votre avis sur la future PAC ?

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J'annonce d'emblée que je voterai, au nom du groupe UDI et indépendants, les crédits de cette mission, non sans avoir appelé l'attention sur quelques sujets qui me tiennent à cœur.

Tout d'abord, je vous encourage à poursuivre la trajectoire engagée lors des États généraux de l'alimentation sous la houlette de notre collègue Stéphane Travert, avec en ligne de mire l'amélioration du revenu de nos agriculteurs, par un meilleur partage de la richesse créée par l'ensemble des acteurs. Lors de la discussion dans l'hémicycle, nous avions obtenu, contre le retrait d'un amendement que j'avais déposé avec M. Grégory Besson-Moreau et d'autres députés, l'engagement du ministre M. Didier Guillaume que des moyens humains seraient attribués au médiateur des relations commerciales agricoles. Qu'en est-il ?

S'agissant, ensuite, de la transition écologique, il faut à tout prix que les quelques millions d'euros supplémentaires annoncés par le ministre de l'agriculture en matière de recherche pour mettre fin à l'usage des néonicotinoïdes en France se traduisent concrètement dans le budget. Je n'oublie pas non plus l'annonce du Président de la République de la fin du glyphosate en 2021. Cette année-là, un plan stratégique de réduction drastique de l'usage du glyphosate devra entrer en application, en ayant en tête malgré tout son utilisation notamment dans l'agriculture de conservation des sols.

La France est l'un des pays européens les plus en avance en matière de sécurité sanitaire alimentaire, de prophylaxie et de prévention dans les troupeaux. Le travail effectué par les groupements de défense sanitaire doit faire l'objet d'une attention particulière du ministère de l'agriculture, parce que la prophylaxie dans les élevages est très précieuse à l'heure où l'élevage intensif est encore très présent dans notre pays.

En matière d'installation, il faut former les futurs agriculteurs à l'agroécologie.

Le plan protéique doit naturellement être français, mais l'autosuffisance en protéines d'origine végétale est une stratégie qui doit être développée au niveau européen.

Quant à la question de l'intensification d'un plan forêt, elle doit se déployer à l'échelon national mais aussi européen parce que la qualité de l'air ne s'arrête pas aux frontières du pays.

S'agissant du TO-DE, la perspective de 2023 est intéressante et montre que le Gouvernement a pris en considération la stabilité que requiert cette thématique de l'agriculture.

Nous aurons l'occasion d'aborder bien d'autres sujets dans l'hémicycle, comme celui des chambres d'agriculture.

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Les crédits que nous examinons aujourd'hui ne constituent qu'une petite partie des moyens alloués à notre politique agricole – la majorité échappe à notre contrôle puisqu'ils sont déterminés au niveau européen par le budget de la PAC. Nous sommes soulagés que les pays membres soient enfin parvenus à un accord sur le prochain cadre financier, et que la France ait limité la baisse du budget consacré à l'agriculture. Néanmoins, je ne perds pas de vue que le maintien du budget en valeur faciale n'est que de façade, puisqu'il risque de se traduire concrètement par une baisse des moyens totaux sous l'effet de l'inflation. Celle-ci pourrait avoir des conséquences graves pour nos agriculteurs qui souffrent déjà de rémunérations insuffisantes, d'autant que les aides du premier pilier, qui constituent un filet de sécurité du revenu des exploitants agricoles, diminueront de 1 milliard d'euros, passant de 52 à 51 milliards.

Les crédits de la mission « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales » bénéficient d'une légère hausse, mais celle-ci ne permet pas de compenser la baisse importante de 10 % subie en 2019. In fine, le budget reste loin de son niveau de 2018, et il est, à nos yeux, insuffisant pour en dresser les priorités du secteur.

En particulier, la mission n'est pas à la hauteur s'agissant de l'accompagnement à la transition écologique. À l'heure où nos agriculteurs font face à des exigences de qualité, de respect de la biodiversité, de réduction de leur impact environnemental, il est nécessaire de leur apporter un réel soutien. De même, les crédits alloués à la recherche appliquée et l'innovation en agriculture, je l'ai dit lors de l'examen de la mission « Recherche et enseignement supérieur », nous semblent amplement insuffisants, notamment au regard de la nécessité de réduire notre dépendance aux pesticides.

Ce budget comporte deux points positifs qui constituent une amélioration par rapport au budget que nous avons précédemment discuté. Le premier est la reconduction jusqu'en 2022 de l'exonération de charges patronales pour les saisonniers agricoles, plébiscitée par les filières recourant massivement au travail saisonnier, comme la viticulture, l'horticulture, les fruits et légumes. Cette exonération devait s'achever au 1er janvier 2021 et, au vu des difficultés de cette filière, la reconduction nous semble de bon sens.

Deuxième point positif, nous nous réjouissons qu'il n'y ait pas de nouvelle tentative de réintroduire pour 2021 de changements dans le plafond de la taxe additionnelle sur le foncier non bâti affectée au réseau des chambres d'agriculture.

Reste le regret, comme l'année dernière, que la loi ÉGALIM, dont l'ambition était de rééquilibrer les relations commerciales entre agriculteurs, distributeurs et industriels, reste à ce jour sans effet. Les quatre grandes centrales d'achat continuent d'imposer leurs conditions et contournent largement les dispositifs en vigueur, la valeur ajoutée est toujours aussi mal partagée et la variable d'ajustement des prix reste trop souvent le producteur lui-même.

Néanmoins, compte tenu des éléments que j'ai soulignés précédemment, nous voterons les crédits de la mission « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales ».

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Au nom du groupe Agir ensemble, je salue le travail effectué par notre rapporteur pour avis et indique d'emblée que nous voterons les crédits du ministère de l'agriculture et de l'alimentation.

Dans ce budget, deux programmes sont très importants. Le programme 149 « Compétitivité et durabilité de l'agriculture, de l'agroalimentaire, de la forêt, de la pêche et de l'aquaculture » concerne le back office des divers métiers liés à l'agriculture et à l'alimentation. Je note que les crédits affectés aux mesures agroenvironnementales et climatiques (MAEC) et à l'agriculture biologique sont en baisse. J'aimerais connaître le point de vue du rapporteur pour avis sur ce sujet, de même que sur la baisse des crédits concernant la pêche.

En revanche, je salue l'augmentation des crédits alloués à la forêt qui sont, pour une grande partie, consacrés à accompagner le changement climatique. Il faut probablement les mettre en perspective avec les investissements qui seront faits dans le cadre du plan de relance.

La reconduction du dispositif TO-DE est une bonne nouvelle. On peut effectivement imaginer de prolonger, voire de pérenniser cet outil indispensable dans un contexte de concurrence intra-européenne, sur lequel je reviendrai tout à l'heure.

Avec le programme 206 « Sécurité et qualité sanitaires de l'alimentation », on est dans le front office. C'est la politique la plus visible qui s'adresse directement aux consommateurs. C'est aussi celle où l'on retrouve généralement les polémiques et les amalgames. En matière de sécurité sanitaire des animaux, par exemple, des efforts importants sont faits en matière d'identification, mais, dans l'opinion publique, on entend plus souvent parler de maltraitance que de bien-être animal. Le programme couvre aussi la difficile question des pesticides, avec la sortie du glyphosate et la dérogation à l'interdiction des néonicotinoïdes pour lutter contre la jaunisse de la betterave. À cet égard, j'aurai quelques questions à poser au ministre, en séance publique, sur cette politique extrêmement importante.

Monsieur le rapporteur pour avis, je soutiendrai l'amendement que vous avez souhaité déposer pour conforter la ligne budgétaire du CASDAR. J'indique toutefois qu'une mission d'information parlementaire a été lancée sur le financement des chambres d'agriculture. Ses conclusions nous donneront peut-être une perspective de plus long terme sur ce sujet.

M. Stéphane Travert a parlé de budget de crise, voire de post-crise. J'ajouterai une troisième catégorie, celle de pré-crise puisque nous savons maintenant que le Brexit laissera des traces dans le paysage économique français, même si nous ignorons comment. En tout cas, l'agriculture ne sera pas épargnée. Je rappelle simplement qu'il faudra porter une attention particulière à la filière laitière et à celle de la volaille, qui sont en première ligne.

Par ailleurs, la question de la rémunération des agriculteurs posée dans la loi ÉGALIM reste à préciser.

Enfin, j'attends des précisions en qui concerne la PAC quant aux outils qui permettront de valoriser l'effort des agriculteurs en matière de séquestration du carbone.

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Beaucoup de choses ont été dites avec lesquelles je suis d'accord. Aussi, je me contenterai de faire trois remarques.

D'abord, on voit bien le lien qu'il y a entre la mission précédente et celle que nous sommes en train d'examiner, dans la mesure où nous devons accompagner l'ensemble des acteurs dans une transition agro-écologique, pour lesquels la bonne échelle doit être européenne. La semaine dernière, le directeur général de Danone, M. Faber, a évoqué devant nous les travaux de l'Institut de développement durable et des relations internationales (IDDRI), think tank qui propose un scénario de transition sur dix ans à l'échelle de l'Europe, Ten years for agriculture, avec une diminution drastique des pesticides, la généralisation de bonnes pratiques à la fois pour l'agriculture et pour l'élevage. On a le sentiment que ce domaine mériterait une impulsion encore bien plus grande, à l'échelle nationale mais aussi européenne, dans le cadre de la révision de la politique agricole commune.

Ensuite, la crise du Covid-19 a mis en lumière la question des circuits courts et de notre rapport à ces circuits. Dans ma circonscription, par exemple, sur le plateau de Saclay, grande région d'agriculture et d'innovation, on a observé, pendant la crise, un quasi-doublement de la demande dans les circuits courts. En revanche, une fois la crise passée, la demande a chuté, un comportement de prudence a prévalu et certains exploitants se sont retrouvés en grande difficulté. Cela montre qu'il y a des enjeux de recherche par rapport à la production, par rapport aux modèles économiques et au comportement des consommateurs et de la société. Tous ces sujets de recherche méritent une forte interface entre monde agricole et monde universitaire et innovation. Là encore, sur le plateau de Saclay, j'ai pu voir la création de petits outils bien trop modestes par rapport à l'enjeu. Toutefois, c'est typiquement le genre de choses que l'on a envie de développer en France, grand pays de recherche et d'agriculture.

Enfin, l'agriculture urbaine non seulement a un intérêt pour la santé et le développement des circuits courts, mais elle est aussi un facteur de reconstruction des liens sociaux, comme on a pu le constater à Detroit ou à Pittsburgh, aux États-Unis, anciennes grandes villes industrielles qui se sont écroulées avant de connaître une renaissance grâce, entre autres, à l'agriculture urbaine. Or ces actions se heurtent dans le même temps à certaines difficultés ou limitations. Ainsi, on voit bien que dans un territoire aussi dense que la région parisienne, elle ne pourra jamais satisfaire qu'une toute petite fraction des besoins. En outre, les degrés d'engagement sont très variables : certaines personnes vont être très actives, alors que d'autres examineront le mouvement avec perplexité, voire comme une gêne. Il y aurait une enquête de type sociologique ou urbanistique à mener en parallèle. Qu'en pensez-vous ?

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Si je tiens à saluer l'accroissement des moyens accordés aux jeunes agriculteurs, j'aimerais savoir quels outils d'aide à l'installation sont prévus.

Le premier levier susceptible de favoriser l'installation de jeunes agriculteurs et le renouvellement des générations de professionnels, c'est la garantie qu'ils pourront vivre décemment de leur métier. Or il reste un travail important à accomplir pour réussir l'application de la loi ÉGALIM et atteindre cet objectif fondamental qui est d'assurer un revenu aux agriculteurs dans les différentes filières.

Par ailleurs, il n'y aura pas de renouvellement des générations si les exploitations restent inaccessibles du fait de leurs dimensions industrielles et de l'importance des capitaux à engager pour les reprendre. Il faut, au contraire, des exploitations à taille humaine, compatibles avec l'agroécologie et la transition écologique.

Je voterai néanmoins, comme le reste du groupe LaREM, en faveur de l'adoption des crédits de la mission.

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Monsieur Turquois, je partage votre engagement en faveur des circuits courts et d'outils d'une taille adaptée aux territoires. Les difficultés de main-d'œuvre sont une réalité ; par le passé, il n'était déjà pas simple de trouver la main-d'œuvre nécessaire pour faire les récoltes, mais depuis le confinement, c'est encore pire, car les gens ont peur de se retrouver au contact d'autres personnes. C'est notamment le cas pour la récolte du haricot tarbais dans ma circonscription.

Pour ce qui concerne la filière bois, l'action n° 26 représente 14,5 % du budget du programme 149, à raison de 249 millions d'euros en autorisations d'engagement et de 251 millions d'euros en crédits de paiement, soit une hausse de respectivement 3,5 % et 2,2 %. Cette action sert à financer le programme national de la forêt et du bois à hauteur de 25,4 millions d'euros en AE et 22,8 millions d'euros en CP, en hausse afin de financer les mesures contre les scolytes, insectes xylophages de l'ordre des coléoptères. Quant aux crédits consacrés au Centre national de la propriété forestière, ceux servant à la restauration des terrains de montagne et ceux finançant les missions d'intérêt général confiées à l'Office national des forêts sont, comme je l'ai dit tout à l'heure, en légère hausse. Le DEFI forêt est un dispositif fiscal qui n'entre pas dans le champ de cette mission – on vous transmettra les informations à ce sujet ultérieurement.

S'agissant de la réforme de la PAC, j'ai pris bonne note de ce que vous aviez dit ; le cadre financier a été validé et l'enveloppe sera maintenue à 62,4 milliards d'euros, à l'issue d'un travail de longue haleine mené par le ministre et nos collègues députés européens.

J'ai pris bonne note aussi de votre remarque, Monsieur Benoit, concernant les moyens humains attribués au médiateur des relations commerciales agricoles ; je me souviens fort bien de cet amendement et de la discussion à laquelle il avait donné lieu, mais je n'ai aucun élément nouveau à vous apporter à ce sujet. Je me renseignerai auprès du ministère et vous ferai transmettre les informations.

Je vous donne acte, Monsieur Falorni, de ce que les crédits que nous examinons aujourd'hui ne représentent qu'une petite partie du budget de la politique agricole et qu'ils sont en légère hausse. Vous avez raison, l'accompagnement de la transition écologique et la recherche appliquée, dont nous avons parlé tout à l'heure avec M. Cédric Villani, sont des sujets extrêmement importants. Si leurs crédits restent stables, je me permets toutefois de vous faire noter qu'il est prévu, dans le plan de relance, 134 millions d'euros pour la transition écologique, sans compter tout ce qui concerne l'agroéquipement.

Les crédits affectés aux mesures agroenvironnementales et climatiques ayant augmenté l'an dernier de 260 %, il est logique qu'ils soient stabilisés cette année, Monsieur Herth. Je précise que les opérations se font pour une durée de cinq ans. Pour ce qui concerne la reconduction du TO-DE, il serait en effet souhaitable que le dispositif ne soit pas remis en question chaque année. Le budget du programme 206, « Sécurité et qualité sanitaires de l'alimentation », est en hausse de 5 %, soit 30 millions d'euros. C'est une politique qui bénéficie d'une grande visibilité et à laquelle le monde extra-agricole est particulièrement attentif : il convient par conséquent d'y consacrer des moyens suffisants.

Merci, cher Cédric Villani, d'avoir évoqué l'agriculture urbaine, sujet sur lequel j'ai beaucoup travaillé. J'ai procédé à des auditions en visioconférence à Paris et à Bordeaux, faute de pouvoir me déplacer en France. Vous avez raison : c'est une question qui, loin d'être marginale, est très intéressante, notamment du point de vue sociologique. Ce sont deux mondes qui se rencontrent. Je l'ai vu notamment à Bordeaux, avec, d'un côté, la chambre d'agriculture, de l'autre, des porteurs de projets, qui, pour beaucoup, qui ne viennent pas du monde agricole mais qui ont de brillantes idées et font bouger les choses ; même si les projets en question ne peuvent pas, sauf exception, être étendus au monde rural, ils jouent le rôle de catalyseurs. Ce sont des gens passionnants, motivés, souvent jeunes, que je vous engage à rencontrer, si vous en avez la possibilité ; ils ont un niveau d'études parfois assez élevé et font, en choisissant cette profession, un choix de vie, apportant de la vitalité dans les lieux où ils s'installent. Le petit focus que j'ai fait a été très apprécié par eux, notamment parce que cela leur a permis de se rencontrer et de prendre contact avec les sociétés d'aménagement foncier et d'établissement rural (SAFER) en vue d'obtenir des financements ; certains en ont même profité pour organiser des tables rondes et des journées d'étude. C'est très positif.

Le monde agricole a besoin de tous les acteurs, Monsieur Daniel. On sait les difficultés que rencontrent aujourd'hui les jeunes pour s'installer, et il importe d'utiliser tous les outils disponibles pour les y aider. Les chambres d'agriculture ne ménagent pas leurs efforts, mais il reste des freins ; nous avons à cœur de les lever, grâce à des moyens financiers, mais aussi par un accompagnement général, de la formation et en agissant sur le foncier.

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Je rappelle que nous avions organisé une fort intéressante table ronde sur l'agriculture urbaine, au salon international de l'agriculture, l'an passé. Dans ce domaine – M. Villani y a fait allusion – des expériences très intéressantes sont menées dans ma circonscription.

La commission en vient à l'examen des amendements.

Article 33 et état B

La commission est saisie de l'amendement II-CE2 du rapporteur pour avis.

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Le compte d'affectation spéciale développement agricole et rural finance l'orientation des structures chargées du conseil des agriculteurs vers le développement et la diffusion de systèmes de production innovants et performants, et permet de renforcer les liens entre recherche et innovation dans une logique de performance agro-écologique. Le présent amendement vise à l'abonder de 10 millions d'euros, afin de revenir à l'enveloppe de l'année dernière, soit 136 millions d'euros.

Je précise que mon opinion sera peut-être amenée à évoluer au fil de la discussion budgétaire, car la diminution relative de l'enveloppe attribuée au CASDAR est à rapporter aux crédits mobilisés par l'État en matière de recherche, en particulier dans le cadre du plan de relance. Ainsi le ministère de l'agriculture et de l'alimentation a-t-il décidé de renforcer les moyens qu'il consacre à la recherche et à l'innovation, par l'intermédiaire du plan national de recherche et innovation pour trouver des solutions alternatives aux néonicotinoïdes opérationnelles contre la jaunisse de la betterave sucrière, à hauteur de 5 millions d'euros. La stratégie nationale sur les protéines végétales, dotée de 100 millions d'euros, comporte un volet important consacré à l'innovation. Quant au quatrième programme d'investissements d'avenir, qui mobilisera 11 milliards d'euros d'ici à 2022, il contribuera à plusieurs titres aux activités des organismes de recherche, d'innovation et de transfert dans le secteur agroalimentaire.

Il s'agit en quelque sorte d'un amendement d'appel.

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Le Conseil général de l'alimentation, de l'agriculture et des espaces ruraux (CGAAER) a engagé, le 13 février 2020, une évaluation des actions financées par le CASDAR et des scénarios d'évolution possibles. Il devait en présenter les conclusions en avril 2020, mais la crise sanitaire a interrompu ses travaux. Nous devrions néanmoins disposer d'informations complémentaires d'ici à la fin de l'année. C'est pourquoi le groupe LaREM appelle à voter contre cet amendement – même s'il en comprend l'intention, qui est tout à fait louable.

La commission rejette l'amendement.

Suivant l'avis du rapporteur pour avis, elle donne un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales ».

La commission a examiné pour avis, sur le rapport de Mme Typhanie Degois, les crédits de la mission « Investissements d'avenir ».

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La prochaine loi de finances sera, à bien des égards, hors norme et les investissements d'avenir en sont une illustration intéressante. Pour tirer les leçons de la crise sanitaire, soutenir la relance et préparer notre pays aux enjeux de demain, un quatrième programme d'investissements d'avenir (PIA4) a été présenté par le Premier ministre, le 3 septembre dernier. Je commencerai par vous présenter les principales caractéristiques de la mission « Investissements d'avenir », qui intègre ce nouveau programme, avant d'aborder trois domaines technologiques qui me semblent stratégiques pour la France, puisqu'ils sont cruciaux pour notre souveraineté et que nous y avons des intérêts économiques : l'intelligence artificielle, la microélectronique et la blockchain.

La mission « Investissements d'avenir » est le véhicule budgétaire du PIA3, doté de 10,3 milliards d'euros intégralement engagés en 2017. Il se décline sous la forme de trois programmes séquencés de l'amont vers l'aval du processus d'innovation : le programme 421, « Soutien des progrès de l'enseignement supérieur et de la recherche », doté de 380 millions d'euros en crédits de paiement (CP) pour 2021 ; le programme 422, « Valorisation de la recherche », qui fait le pont entre la recherche et l'industrialisation et qui est doté de 660 millions d'euros de CP pour 2021, contre 620 millions d'euros en 2020 ; le programme 423, « Accélération de la modernisation des entreprises », doté de 874 millions d'euros en CP, contre un peu plus de 1 milliard d'euros l'année précédente. Le rythme de décaissement des crédits du PIA3 restera soutenu en 2021, à hauteur de 1,9 milliard d'euros en CP. À la fin de l'année 2020, les 10,3 milliards d'euros d'autorisations d'engagement (AE) du PIA3 auront été couverts par 4,7 milliards d'euros de crédits de paiement ; un montant de 5,6 milliards d'euros de crédits de paiement restera donc à ouvrir sur les exercices 2021 et suivants.

Le PIA4 sera pleinement intégré dans la mission « Investissements d'avenir » sous la forme de deux nouveaux programmes budgétaires, dotés de 20 milliards d'euros sur cinq ans, dont 11 milliards seront rattachés au plan de relance. Il permettra de concrétiser notre volonté de renforcer notre souveraineté technologique.

Le premier volet du PIA4, dit « dirigé », se trouve dans le programme 424, « Financement des investissements stratégiques », et vise à financer, pour un montant total de 12,5 milliards d'euros sur cinq ans, des investissements exceptionnels dans l'ensemble du continuum de l'innovation afin d'accompagner les transformations économiques et sociétales de notre pays et d'augmenter son potentiel d'innovation. Pour 2021, l'intégralité des autorisations de ce premier programme est engagée et 1,5 milliard d'euros sont prévus en crédits de paiement.

Le second volet du PIA4, dit « structurel », correspondant au programme 425, a pour objectif de garantir un financement pérenne et prévisible aux écosystèmes d'enseignement supérieur de recherche et d'innovation mis en place dans le cadre des précédents programmes d'investissements d'avenir. Ce volet est doté de 7,5 milliards d'euros sur cinq ans et comprend notamment les aides à l'innovation de Bpifrance. Pour 2021, 4 milliards d'euros d'autorisations sont engagés et 562 millions d'euros sont prévus en crédits de paiement.

En tenant compte de l'intégration du PIA4, la mission « Investissements d'avenir » voit donc ses crédits presque doubler par rapport à l'année dernière, avec 3,9 milliards d'euros de crédits de paiement pour l'année 2021. Nous ne pouvons que nous en réjouir.

J'en viens maintenant à mon focus sur les trois secteurs stratégiques.

L'intelligence artificielle est une technologie transversale ayant vocation à se déployer dans tous les secteurs de notre économie, notamment la mobilité, la santé et l'agriculture. Elle assurera des gains importants de productivité et de compétitivité aux entreprises qui sauront s'en saisir et va révolutionner l'ensemble des services. À la suite du rapport de notre collègue Cédric Villani, la France s'est dotée en 2018 d'une stratégie nationale de recherche en intelligence artificielle, qui a notamment conduit à la création de quatre instituts interdisciplinaires d'intelligence artificielle, à Paris, Grenoble, Nice et Toulouse.

À la lumière des auditions que j'ai conduites, le bilan de la France dans ce domaine apparaît bon : les investissements d'avenir ont permis à notre pays de commencer à rattraper le retard accumulé durant ces dernières décennies, de renforcer notre visibilité dans ce secteur ultra-compétitif, de soutenir sa valorisation, enfin de faciliter l'accès des deeptech à des financements tant publics que privés en France. C'est au total près de 1,5 milliard d'euros qui sera consacré à l'intelligence artificielle pendant le quinquennat. Notre pays compte désormais six groupes parmi les quatorze premiers investisseurs en intelligence artificielle en Europe, ainsi que 80 entreprises de taille intermédiaire (ETI) et plus de 500 start-ups spécialisées dans ce domaine.

Il n'en demeure pas moins que nous conservons quelques faiblesses, auxquelles nous ne pourrons remédier que grâce à une stratégie sur le long terme. Je pense en particulier au niveau insuffisant de la rémunération de nos chercheurs, à la complexité administrative parfois excessive pour trouver des financements, au faible niveau de digitalisation de nos TPE-PME, qui ralentit leur mise à niveau technologique, ou encore à l'absence de champions français, et même européens, dans le secteur de l'hébergement dans le cloud, essentiel pour l'intelligence artificielle. Vous trouverez dans le rapport une vingtaine de propositions visant à lever ces difficultés. J'encourage notamment les pouvoirs publics à soutenir davantage deux secteurs qui me semblent stratégiques pour la France : d'une part, l'intelligence artificielle embarquée, qui concerne l'internet des objets, la voiture autonome ou encore les plateformes décisionnelles ; d'autre part, le traitement automatique du langage naturel, qui offrira toutes sortes d'usages dans les prochaines années.

La microélectronique, secteur au chiffre d'affaires de 4 milliards d'euros en France, concerne la production de composants électroniques de haute technologie, comme les puces, indispensables à l'utilisation de tout produit électronique, notamment le téléphone mobile. Les différentes auditions que j'ai menées m'ont conduite à conclure que le soutien apporté par les investissements d'avenir à la microélectronique était satisfaisant et s'inscrivait dans un temps assez long, assurant à ce secteur extrêmement concurrentiel la visibilité qui lui est indispensable. Les crédits du plan Nano 2017 ont d'ores et déjà été intégralement décaissés. Le plan Nano 2022, qui comprend, au titre des investissements d'avenir, pour 368 millions d'euros de subventions et 200 millions d'euros de prêts, devrait voir sa mise en œuvre s'accélérer en 2021 et 2022. En matière d'emplois, au titre de l'année 2019, les travaux de Nano 2022 ont mobilisé près de 1 849 personnes et suscité depuis deux ans la création de 230 emplois en moyenne parmi les chefs de file et au Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA). Ces acteurs ont déposé 287 brevets en 2018 et 315 en 2019, et rédigé plus de 300 publications scientifiques. Les seuls sujets de préoccupation concernent la définition de la notion de première industrialisation dans le cadre européen, qui apparaît encore trop restreinte, et la nécessité d'anticiper d'ores et déjà le prochain plan Nano 2027.

La blockchain est une technologie beaucoup plus récente, donc moins mature, mais au fort potentiel économique. Force est de constater qu'aucun dispositif spécifique n'est prévu pour ce secteur dans le cadre des investissements d'avenir. Les seules actions de soutien passent par les outils de droit commun de Bpifrance, pour un montant total assez faible, de l'ordre de 5,5 millions d'euros en 2019, et pour un nombre de projets inférieurs à cent.

Tout en étant consciente de l'état actuel de structuration de l'offre et de la demande dans ce secteur, je crois qu'il nous faut accroître notre soutien pour ne pas manquer les occasions qui vont se présenter à nous. C'est pourquoi j'invite les pouvoirs publics à renforcer les financements attribués à la technologie de la blockchain, notamment dans le cadre des investissements d'avenir.

Plus en amont encore, au cours des auditions, les acteurs ont régulièrement évoqué les enjeux stratégiques de l'informatique quantique et de la filière optique-photonique – je vous invite à lire la partie du rapport consacrée au sujet.

En conclusion, je me prononce en faveur de l'adoption des crédits de la mission « Investissements d'avenir ».

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Notre pays traverse une crise sanitaire inédite, devenue aussi économique et sociale. Le programme d'investissements d'avenir est appelé à jouer un rôle majeur d'accompagnement de la relance économique. Au nom du groupe MoDem, je salue la présentation du quatrième programme d'investissements d'avenir, qui a pour vocation d'amplifier l'effort d'innovation engagé depuis le début du quinquennat. Ce PIA4 permettra d'accélérer la reprise de l'activité, en cohérence avec le plan de relance, et d'atteindre nos objectifs en matière d'innovation technologique et numérique.

Ces trois dernières années, le financement des investissements d'avenir s'est inscrit dans une logique de longue durée, l'objectif étant à la fois d'augmenter le potentiel de croissance de l'économie et d'accélérer la transition écologique. Le bilan des PIA est positif. Les crédits alloués aux PIA1 et 2 ont massivement bénéficié à l'enseignement supérieur et à l'innovation, tandis que le PIA3 s'est consacré à la valorisation de la recherche. Il est aujourd'hui urgent d'investir massivement dans les secteurs d'avenir pour renforcer l'organisation socio-économique du pays.

Le montant du PIA4 représente le double des deux précédents, soit 20 milliards d'euros, destinés à stimuler l'investissement et l'innovation. Nous sommes favorables à l'adoption du budget de la présente mission.

Je souhaiterais toutefois appeler l'attention des collègues sur le nécessaire soutien à la jeunesse, principale victime de la crise sanitaire. Dans le contexte économique actuel, beaucoup d'entreprises sont frileuses à l'idée d'embaucher de nouvelles personnes, notamment des jeunes. On ne le répétera jamais assez : aucune génération ne doit être sacrifiée. Si je comprends la nécessité d'investir massivement dans l'innovation, je considère que l'on doit conserver dans le PIA4 les mêmes objectifs en matière de jeunesse que dans le PIA3, ce dernier étant en partie voué au renforcement de l'accompagnement pédagogique en vue de favoriser l'insertion professionnelle des étudiants. Cet accompagnement est devenu encore plus nécessaire dans le contexte actuel. Si nous souhaitons que les jeunes puissent décrocher leurs premières expériences professionnelles, nous devons continuer à favoriser les filières technologiques et numériques d'avenir.

Comment faire pour donner la priorité aux projets d'investissements qui favorisent la jeunesse dans le PIA4 ? Les entreprises technologiques innovantes sont des leviers pour valoriser notre jeunesse. Nous devons viser des projets qui abordent toutes les problématiques : éducation, formation, culture, sport, santé, citoyenneté… avec, pour priorité, l'accès des jeunes à l'emploi.

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La rapporteure pour avis a mis l'accent sur des points extrêmement importants. Sa proposition d'investir plus particulièrement dans tout ce qui se rapporte au langage devrait être soutenue à l'échelon européen, vu le nombre de traductions nécessaires pour travailler sur le moindre texte.

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Le soutien à la jeunesse est en effet primordial, personne ne dira le contraire. Il faut préserver notre jeunesse et l'encourager à entreprendre.

Les investissements d'avenir portent surtout sur les technologies. En revanche, le plan de relance prévoit une enveloppe de plus de milliards d'euros pour des actions à destination des jeunes et de formation.

J'ai rencontré plusieurs jeunes qui avaient créé leur entreprise au sortir de leurs études. Il faut les inciter en ce sens. Bpifrance propose de nouveaux financements pour aider les jeunes entreprises à se développer et à grandir – on pourra vous en soumettre des exemples, Monsieur Corceiro.

Le traitement du langage naturel est un enjeu important. Dans ce domaine, les Chinois et les Américains sont très en avance sur nous, notamment parce que l'on dispose de trop peu de données d'entraînement en français. Le projet PIAF, qui trouve son origine dans le rapport de M. Villani, n'est pas encore assez nourri en la matière. L'une de mes propositions consiste précisément à disposer de corpus de données d'entraînement plus fournis afin que les centres de recherche et les entreprises puissent innover dans cette technologie primordiale pour l'avenir.

Suivant l'avis de la rapporteure pour avis, la commission donne un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Investissements d'avenir ».