Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Réunion du mercredi 15 mai 2019 à 16h15

Résumé de la réunion

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La réunion

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Présidence

La commission procède à un échange de vues informel avec M. Benoît Coeuré, membre du directoire de la Banque centrale européenne.

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Cette audition est extrêmement importante. Benoît Coeuré est membre du directoire de la Banque centrale européenne (BCE) et je le remercie d'avoir bien voulu répondre à notre invitation. L'ordre du jour ne mentionne pas une « audition » mais un « échange de vues », pour éviter toute confusion avec les pratiques des institutions européennes. Il s'agit bien d'un échange de vues. Le dernier avait eu lieu le 13 mai 2015, ce qui commence à dater. Je pense qu'il y a beaucoup de sujets d'actualité et qu'il est intéressant de connaître la vision de la BCE sur la situation actuelle en Europe en termes financiers.

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Benoît Coeuré, membre du directoire de la Banque centrale européenne (BCE)

Je vous remercie de m'avoir invité aujourd'hui. C'est un plaisir pour moi de pouvoir m'entretenir avec vous de façon informelle. Dans l'ordre juridique européen, la BCE est auditionnée par le Parlement européen, en tant qu'institution communautaire, ce qui n'exclut pas la possibilité d'échanges avec les parlements nationaux, ce qui est d'ailleurs assez récent, ce qui date de l'arrivée de Mario Draghi. Avant 2012, la BCE n'avait pas d'échange avec les parlements nationaux, ce qui semblait dommage, autant pour vous que pour nous. Nous essayons de le faire de manière parcimonieuse parce qu'il est difficile de nous rendre disponible en permanence dans dix-neuf pays. Comme le Président l'a dit, je suis déjà venu dans cette commission et Mario Draghi avait eu un échange avec les commissions des affaires économiques, des finances et des affaires étrangères. Je suis très heureux de revenir parmi vous et de pouvoir répondre à vos questions.

J'ai prévu une intervention en trois parties : la conjoncture et les perspectives économiques de la zone euro, notre politique monétaire et les perspectives de réforme de la zone euro.

En 2018, l'économie de la zone euro a crû de 1,9 %, contre 2,4 % l'année précédente. D'après notre analyse, ce ralentissement s'explique principalement par l'affaiblissement des échanges commerciaux – la source est d'abord mondiale – mais aussi par plusieurs phénomènes transitoires, tant mondiaux que nationaux, dans certains pays, tels la transition aux normes diesel en Allemagne qui a causé des perturbations dans la production industrielle allemande ou encore des facteurs politiques dans certains autres pays. Le principal facteur de ralentissement est le ralentissement des échanges mondiaux, un ralentissement en partie normal et attendu, parce que les échanges avaient été particulièrement dynamiques jusqu'en 2018, en 2017 en particulier. Le ralentissement attendu a été amplifié par l'incertitude et l'anxiété liées aux discussions commerciales, notamment entre les États-Unis et la Chine. Cette anxiété demeure ; nous pourrons en reparler.

Les facteurs nationaux particuliers que j'ai évoqués semblent désormais s'estomper, mais l'incertitude mondiale demeure et continue à peser sur l'activité dans la zone euro. De plus, la persistance d'incertitudes liées aux évolutions géopolitiques, la menace protectionniste, qui a un impact sur les échanges mondiaux et sur l'investissement, les vulnérabilités sur les marchés émergents pèsent sur le climat économique et expliquent que le ralentissement de la croissance se prolonge cette année.

Nous constatons cependant un certain nombre de bonnes nouvelles. Le niveau d'utilisation des capacités de production demeure élevé dans la zone euro et le taux de chômage continue de baisser. En mars, il était à 7,7 %, soit le niveau le plus faible depuis septembre 2008. Cette baisse ne s'est pas interrompue avec le ralentissement de l'activité. Les créations d'emplois et l'augmentation des salaires continuent de soutenir la capacité de résistance de l'économie de la zone euro. Les bons fondamentaux, s'agissant du marché du travail, ont permis à la zone euro de bien résister à ce choc mondial.

Les dernières projections des services de la BCE pour la zone euro, publiées en mars, prévoient une hausse du PIB de 1,1 % en 2019, de 1,6 % en 2020 et de 1,5 % en 2021. Nous prévoyons une nouvelle accélération à la fin 2019, puis en 2020 et 2021. Toutefois, dans cette projection, les risques à la baisse dominent, notamment pour des raisons géopolitiques et commerciales.

Quant à l'inflation, la hausse annuelle de l'indice des prix à la consommation harmonisé, dans la zone euro, était de 1,7 % en avril. L'inflation sous-jacente reste globalement modérée, mais la poursuite de l'expansion, les tensions sur les marchés du travail et la hausse des salaires consolident le renforcement des tensions sur les prix, ce qui permet d'anticiper une inflation de 1,2 % en 2019, de 1,5 % en 2020 et de 1,6 % en 2021. L'inflation revient très lentement à l'objectif de la BCE, qui est une inflation inférieure à 2 % mais proche de 2 %. L'inflation moyenne annuelle ne serait que de 1,6 % en 2021.

Dans ce contexte, que fait la BCE ? Lors de notre dernière réunion monétaire, le 10 avril – le prochaine se tiendra le 6 juin à Vilnius, en Lituanie – le Conseil des gouverneurs de la BCE a confirmé qu'un degré élevé de soutien monétaire demeurait nécessaire pour préserver les conditions de financement de l'économie européenne et pour que l'inflation reste sur une trajectoire la menant à des taux inférieurs à 2 % mais proches de 2 %. Le soutien monétaire reste élevé. Nous continuons donc de prévoir que les taux d'intérêt directeurs de la BCE resteront à leurs niveaux actuels, au moins jusqu'à fin 2019 et aussi longtemps que nécessaire, pour assurer cette convergence de l'inflation.

Nous poursuivons le réinvestissement de notre portefeuille d'actifs. Vous vous souvenez que nous avons mené une politique dite d'assouplissement quantitatif. Nous avons donc constitué un portefeuille très important, principalement d'obligations d'État. Nous avons stoppé l'augmentation de ce portefeuille à la fin 2018, mais nous maintenons sa taille. Lorsque les obligations arrivent à échéance, nous les réinvestissons pour maintenir la taille de notre bilan constante. Cela représente une vingtaine de milliards d'euros par mois de réinvestissement, ce qui n'est pas négligeable. Nous maintenons donc une présence active sur les marchés obligataires européens. Ces réinvestissements se poursuivront au-delà de la date à laquelle nous relèverons les taux directeurs et aussi longtemps que nécessaire.

Pour maintenir des conditions favorables de financement de l'économie, pour assurer la transmission de la politique monétaire et soutenir l'accès au financement, notamment des petites et moyennes entreprises, sur l'ensemble de la zone euro, nous avons décidé de mener une nouvelle série d'opérations trimestrielles de refinancement à plus long terme ciblées, appelées, dans le jargon monétaire, targeted longer-term refinancing operations (TLTRO). Ces opérations de refinancement des banques sont conditionnées au fait que les banques prêtent à l'économie réelle, soit aux ménages, soit aux entreprises de la zone euro, dans des conditions que nous vérifions et auditons. Nous avons déjà eu deux cycles de prêts de cette nature. Il a été décidé d'avoir un troisième cycle, qui aura lieu de septembre 2019 à mars 2021. Il nous reste encore à préciser les conditions exactes, notamment de taux d'intérêt sur ces prêts.

Une communication de la BCE donne des indications sur la trajectoire future des taux d'intérêt, ce que l'on appelle la forward guidance. Ces indications sur l'action de la BCE précisent l'orientation future de la politique monétaire. Le réinvestissement de notre portefeuille obligataire et cette nouvelle série de financements ciblés de l'économie européenne contribuent, de notre point de vue, à assurer un niveau significatif de relance monétaire, celui qui est nécessaire pour que l'inflation puisse revenir proche des 2 %. Néanmoins, nous nous tenons prêts à ajuster ce dispositif en tant que de besoin, afin que l'inflation continue, de manière durable, à se rapprocher des 2 %.

Les effets de l'ensemble de ces mesures ont été très tangibles et importants. Les taux d'intérêt, appliqués aux entreprises et aux ménages de la zone euro, ont à la fois convergé à la baisse et entre pays. Ils se situent à des points bas, dans une perspective de très long terme, surtout comparés aux années 2012-2014 qui montraient une divergence très forte des conditions de financement entre la France et l'Allemagne d'une part, l'Espagne, l'Italie et les pays du sud de la zone euro d'autre part. Ces taux ont convergé à nouveau. Nous assurons un taux de financement des entreprises et des ménages, donc de l'investissement et de la consommation, qui est à un plus bas historique et qui concerne désormais l'ensemble de la zone euro. Les encours de crédits bancaires sont nettement repartis à la hausse depuis début 2014, ce qui a soutenu l'investissement et l'emploi.

Selon les chiffres publiés ce matin par Eurostat, depuis la fin 2014, soit juste avant le lancement par la BCE de cette politique d'assouplissement quantitatif, le nombre d'emplois, dans la zone euro, a augmenté de 9,2 millions, la hausse étant même de 10,8 millions depuis le point bas enregistré pendant la crise.

Il nous semble toutefois que beaucoup reste à faire pour parachever l'Union économique et monétaire et améliorer le fonctionnement de la zone euro. Pour que l'effet de nos mesures de politique monétaire puisse se faire sentir pleinement, il faut que les autres pans de la politique économique soutiennent aussi la croissance, notamment la croissance à plus long terme pour laquelle la politique monétaire ne peut pas grand-chose, et renforcent également la résilience aux chocs de la zone euro, dont nous avons constaté la faiblesse en 2010 et 2012.

Comment la BCE envisage cette réforme de la zone euro ? Avec plusieurs lignes de défense et priorités successives. La première ligne de défense est d'avoir de bonnes politiques budgétaires et économiques à l'échelle nationale – vous en êtes certainement convaincus – qui améliorent la capacité de résistance de chaque économie participant à l'euro et qui renforcent la productivité. Nous avons connu un phénomène de décélération de l'activité, après le pic de 2017, entraîné par le commerce mondial. Nous constatons un surajustement en raison de l'incertitude, des risques de guerre commerciale et de certains facteurs dans certains pays, mais nous ne faisons que converger vers le taux de croissance de long terme de la zone euro qui n'est pas très élevé. Si l'on ne se satisfait pas des taux de croissance actuels, il faut atteindre un taux de croissance plus élevé de la productivité dans la zone euro, ce qui ne peut se faire que par des réformes dans les différentes économies. La BCE n'a pas pour mission de faire des recommandations détaillées à chaque pays. Nous nous référons aux recommandations par pays que fait la Commission européenne et qu'elle publiera le mois prochain.

En ce qui concerne les finances publiques, l'orientation budgétaire est légèrement expansionniste au sein de l'ensemble de la zone euro. Des stabilisateurs automatiques jouent leur rôle dans la plupart des pays. Ce sont des facteurs de soutien à l'activité économique. Nous considérons néanmoins que les États, qui ont des marges de manoeuvre budgétaires, doivent s'en servir, non pas spécialement pour soutenir la zone euro, mais pour soutenir leur propre économie et préparer l'avenir de long terme de leurs économies, notamment en termes d'investissement. À l'inverse, les pays qui n'ont pas de marges de manoeuvre budgétaires, notamment les pays dont la dette publique est élevée, dont la France fait partie, doivent continuer à reconstituer des marges de manoeuvre budgétaires. Il ne s'agit pas d'une posture morale ou idéologique, mais nous croyons en l'efficacité de la politique budgétaire. Lorsque la zone euro sera frappée par la prochaine crise, la prochaine récession, nous voulons être sûrs que la politique budgétaire pourra réagir dans chacun des pays, notamment pour éviter que le poids de l'ajustement porte uniquement sur la politique monétaire et sur la BCE. Le message n'est pas entièrement désintéressé. Nous croyons en l'efficacité de la politique budgétaire, mais il faut que les marges de manoeuvre existent. Or malheureusement, dans de nombreux pays, elles n'existent pas du fait du niveau de la dette. Par ailleurs, tous les pays, quel que soit leur niveau d'endettement, peuvent améliorer la structure, la qualité des dépenses publiques pour mieux soutenir la croissance de long terme. Nous pourrons y revenir si vous le souhaitez.

Au-delà du niveau national, je termine par ce qui peut être fait en termes collectifs, au sein de la zone euro dans son ensemble. Beaucoup d'avancées concrètes ont eu lieu au cours des dernières années. Le Mécanisme européen de stabilité (MES) est une protection maintenant très importante, qui a été utilisée dans un certain nombre de pays. Comme vous le savez, une négociation a lieu actuellement entre les gouvernements de la zone euro pour réformer le MES, pour lui donner de nouveaux instruments qui amélioreront sa capacité à protéger les États membres. C'est un développement positif. Néanmoins, en tant qu'institution communautaire, nous pensons qu'il ne faut pas perdre de vue l'objectif de transformer à terme le MES en une institution communautaire qui serait responsable devant le Parlement européen. Elle ne l'est pas aujourd'hui, puisque cette institution est entièrement intergouvernementale.

La création de l'Union bancaire a également fortement amélioré la capacité de résistance du secteur financier de la zone euro, avec un certain nombre d'autres mesures comme la directive sur le redressement des banques et la résolution des crises bancaires. Nous avons maintenant des dispositifs qui permettent de lutter contre les crises bancaires d'une manière plus rapide, plus juste et plus équitable qu'auparavant en termes de partage du coût. Les banques européennes sont par ailleurs plus solides. Les banques qui sont directement supervisées par la BCE sont bien capitalisées. Fin 2018, le ratio de fonds propres de catégorie 1 des banques directement supervisées était de 14,3 %, alors qu'il était de 11,3 fin 2014. La capitalisation de la solvabilité des banques de la zone euro a connu une amélioration continue. Les banques de la zone euro ont aussi fortement réduit leur ratio de prêts non performants, ce qui pesait sur leur capacité à prêter à l'économie. Sachant que la zone euro s'appuie très largement sur le crédit bancaire pour financer son activité et sa croissance, il est très important d'avoir un secteur bancaire sain. Nous constatons de réels progrès. Je rappelle que ces progrès ont été rendus possibles par dix ans de réformes mondiales de la réglementation financière, que l'Europe a appliquées, depuis la crise de 2008-2009. Ce sont des réformes importantes qu'il ne faut pas remettre en question. Au regard des cycles réglementaires, une fois que l'on a régulé, la tentation est toujours de déréguler. Or la dérégulation provoquera la crise suivante. Il ne faut pas se faire d'illusions.

Alors, que pouvons-nous faire de plus ? Nous pouvons encore renforcer la capacité du secteur financier de la zone euro à contribuer à la stabilisation de l'économie. Pour ce faire, il faut une meilleure intégration financière dans la zone euro. Cet avantage compétitif majeur de la zone euro n'est pas aujourd'hui pleinement exploité. Le degré d'intégration financière de la zone euro s'est inversé pendant la crise financière. Un processus d'intégration a perduré entre 1999 et 2007-2008, avant un retour en arrière très net. Le redémarrage se fait très progressivement et il existe encore des facteurs de fragmentation financière dans la zone euro. Le lien entre les banques de la zone euro et les États où sont établis leurs maisons-mères reste très fort. Le lien entre le crédit des banques et le crédit des États reste très fort.

Contrairement aux États-Unis, qui sont une référence possible pour le fonctionnement de l'Union monétaire, les flux de capitaux, les investissements transfrontières ne sont pas un amortisseur utile en cas de choc économique. Le circuit du crédit et de l'épargne reste très national et les investissements transfrontières ne contribuent pas à absorber les chocs qui toucheraient tel ou tel État de la zone euro, alors que dans le cadre des États américains, il joue un rôle majeur pour assurer la stabilisation. Ce qui est fait selon ces mécanismes de marché est autant de moins à faire avec un mécanisme public, comme une capacité budgétaire unique ou un système de transfert budgétaire. Plus la stabilisation à travers les marchés est forte, moins l'union budgétaire est nécessaire. Nos marchés de capitaux ne sont toujours pas réellement intégrés et ne permettent pas d'orienter de manière efficace l'épargne des ménages européens, là où elle est la plus utile à la croissance, ce qui suppose également des investissements transfrontières. J'ajoute que le manque d'intégration des marchés de la zone euro est aussi un obstacle à l'utilisation de l'euro comme monnaie internationale. Les marchés en euros étant moins profonds, moins liquides que les marchés américains, les investisseurs internationaux se tournent moins naturellement vers l'euro que vers le dollar. Nous pourrons en reparler aussi. Quand le Brexit arrivera, il accentuera encore le besoin d'intégrer les marchés de capitaux de l'Union européenne, dans la mesure où le rôle de la City, comme plaque tournante de l'épargne européenne, va probablement diminuer. Il convient d'avoir des marchés de capitaux, dans l'Union européenne et dans la zone euro, qui soient autonomes.

Deuxièmement, il faut un cadre budgétaire qui remplisse son objectif : à la fois maintenir des finances publiques soutenables, des niveaux de dette raisonnables, et permettre la stabilisation budgétaire lorsqu'elle est nécessaire. Nous pensons malheureusement que cette fonction n'est pas remplie. Les niveaux de dette sont tellement élevés que la stabilisation budgétaire est devenue très difficile. La zone euro se trouvera très démunie en cas de nouvelle crise ou de nouvelle récession, parce qu'une composante-clef de l'ajustement, qui est la politique budgétaire, sera difficile à utiliser compte tenu des niveaux d'endettement. Il faut également des règles budgétaires qui soient simples, crédibles et acceptées politiquement, ce qui n'est malheureusement pas le cas aujourd'hui. Il faut donc mener une réflexion sur la règle budgétaire européenne, qui aiderait les pays participant à la zone euro à constituer ces marges de manoeuvre budgétaires qu'ils pourraient utiliser en période de retournement économique.

Il faut aussi mener une réflexion sur la capacité budgétaire au sein de la zone euro. Comme vous le savez, sur la base de la déclaration franco-allemande de Meseberg, se discute actuellement un instrument budgétaire pour la zone euro. Il s'agit d'un instrument budgétaire pour la compétitivité et la convergence. En clair, il ne servira pas à la stabilisation économique, ce qui ne veut pas dire qu'il n'est pas utile. La convergence est très importante dans la zone euro. Cet instrument est le germe d'une discussion utile sur la capacité budgétaire de la zone euro, mais si nous voulons qu'il ait aussi un rôle de stabilisation, il faut qu'il évolue au-delà de ce qui est discuté aujourd'hui.

Enfin, si la création d'un actif financier sûr, d'un marché de titres commun à la zone euro est faite d'une manière qui maintient les incitations à avoir de bonnes politiques budgétaires nationales, il aurait des retombées positives pour notre politique monétaire, soutiendrait le rôle international de l'euro et participerait à parachever l'Union économique et monétaire.

Pour conclure, l'euro fête son vingtième anniversaire. Les eurobaromètres montrent que l'euro bénéficie d'un large soutien dans la zone euro. Trois personnes sur quatre, dans la zone euro, sont favorables à la monnaie unique et ce chiffre augmente. Les Européens ont donc confiance dans l'euro. Ils ont confiance dans l'engagement de la BCE à maintenir la stabilité des prix, mais pour préserver cette confiance et pour concrétiser la promesse qui a été faite, lorsque l'euro a été créé, qu'il soit synonyme de prospérité et de possibilités nouvelles, il faut maintenir les efforts pour renforcer l'architecture de la zone euro, tant au sein de chaque État participant qu'au sein de l'ensemble de la zone. Dans notre diagnostic, de nombreuses faiblesses qui expliquent la crise de la zone euro et qui expliquent pourquoi elle a été si longue sont toujours présentes.

Pour élargir cette discussion, dans un contexte mondial qui est hautement incertain, finir de bâtir l'architecture de la zone euro est également nécessaire pour que l'Europe puisse remplir ses autres objectifs. Les Européens ne pourront ni renforcer leurs coopérations en matière de sécurité et de défense, ni s'exprimer d'une seule voix sur les questions internationales, ni parachever le marché unique, s'ils sont régulièrement confrontés à des crises économiques dont ils sont largement responsables. Une zone euro dynamique, pérenne et stable aidera à rediriger le capital politique là où il est le plus utile. Il revient évidemment au Parlement européen et aux parlements nationaux de donner à ce processus sa pertinence et sa légitimité. C'est pourquoi je me réjouis de cette discussion. Merci de votre attention.

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Merci beaucoup pour ce tour d'horizon très complet.

Je souhaiterais poser trois questions avant de passer la parole au rapporteur général.

La politique de la BCE aboutit à des taux très faibles et de façon durable, depuis un certain temps maintenant. Par ailleurs, le niveau de dette est élevé, ce qui semble assez naturel dans ces conditions. Est-ce que cette situation ne fragilise pas le tissu bancaire que nous devons par ailleurs tenter de consolider ? Les banques ont beaucoup de difficultés à fonctionner avec des niveaux de taux aussi faibles. Cette situation conduit également à bien d'autres conséquences. Les taux négatifs que nous pouvons parfois même observer n'ont aucun sens économique. Ils ne sont en tout cas pas intuitifs. Quel regard portez-vous sur cette politique de taux ? Quelles opportunités apporte-t-elle ? Quels sont aussi les risques qu'elle entraîne ?

Mon deuxième point concerne le rôle international de l'euro qui est, me semble-t-il, un sujet très important. Est-ce un enjeu pour la BCE ? Je le pense. Comment tenter de développer ce rôle international de l'euro ? L'euro est la deuxième monnaie dans les échanges internationaux, mais il ne progresse pas ; d'autres monnaies entrent en jeu dans ces échanges internationaux. Quelle peut être une politique de plus long terme sur ce rôle international de l'euro ?

Enfin, quel regard portez-vous sur les politiques des autres banques centrales ? Je pense à la Chine et aux États-Unis.

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Je suis très heureux de cet échange. Le président Éric Woerth a instauré ce cycle de consultations des membres des institutions européennes, de préférence francophones, puisque nous sommes en France et qu'il est toujours difficile de parler une autre langue. Je crois que ces échanges sont très intéressants, notamment en cette période électorale pour l'Union européenne, où l'on entend parfois des propos très étonnants. J'ai entendu la tête de liste d'un parti, pourtant connu et intégré au niveau européen, parler d'absence totale de politique de l'Union européenne en matière de lutte contre la fraude. J'étais assez surpris d'entendre cette déclaration. Je crois qu'il est heureux d'avoir de tels débats qui sont utiles à un moment où les mutations politiques et technologiques sont extrêmement importantes.

Ma première interrogation rejoint celle qui vient d'être émise par le président. Face au ralentissement de la croissance en zone euro, aux craintes de récession, y compris en Allemagne, la BCE va-t-elle poursuivre cette politique très accommodante de taux, avec des taux de refinancement à 0 %, des facilités de dépôt à moins de 0,4 % et des taux de prêt marginal à 0,25 % ? Au contraire, la BCE s'inscrit-elle déjà dans la compensation des effets secondaires des taux négatifs ? Est-il toujours justifié pour vous, à l'heure actuelle, de maintenir une inflation, en zone euro, inférieure mais proche de 2 % ?

Vous avez toujours maintenu votre programme de refinancement à long terme, dix ans après la crise financière. Le système financier n'est-il pas parfaitement assaini, pour que le maintien de cette politique soit justifié ?

Vous avez parlé du Brexit. J'aimerais savoir comment vous vous êtes préparés à un Brexit sans accord.

De manière plus générale, au-delà de la déclaration de Meseberg, où en est-on, en termes techniques, sur l'approfondissement de l'union monétaire et notamment la transformation du Mécanisme européen de stabilité en Fonds monétaire européen ? Enfin, sur un sujet très ponctuel, quel est l'avenir des green bonds ?

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Les élections prochaines sont fortement marquées par un prisme écologique important. Dans le meilleur des cas, pour ce qui est de la liste majoritaire, nos leviers seront des leviers budgétaires normatifs. Avec sa politique monétaire, comment la BCE peut-elle s'impliquer dans la lutte contre le changement climatique ? Quels sont les outils et les leviers dont elle peut disposer ?

Ensuite, que pensez-vous des objectifs qui vous sont assignés aujourd'hui ? Les 2 % sont-ils toujours d'actualité ou pas ? Que pensez-vous de l'objectif de plein emploi de la Réserve fédérale américaine ? Pourrait-il s'appliquer aux objectifs de la BCE ? Enfin, est-ce qu'un objectif de transition écologique ou de changement climatique pourrait être inséré parmi les objectifs de la BCE ?

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M. Coeuré, vous avez évoqué la possibilité pour la BCE d'ajuster sa politique afin d'assurer une maîtrise de l'inflation. Pouvez-vous nous préciser quels seraient les instruments utilisés ? Deuxièmement, une controverse se manifeste depuis quelques jours sur le fait que les achats de titres d'entreprises opérés par la BCE ne seraient pas suffisamment respectueux de l'aspect environnemental. L'Institut Veblen avait notamment évoqué ce sujet. Pouvez-vous nous apporter des précisions sur les évolutions futures ?

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Il apparaît, dans les statistiques des dernières années, qu'au sein de l'Union européenne, la cohésion est-ouest, qui est pour l'essentiel une cohésion zone euronon zone euro, a très bien fonctionné, mais que la cohésion nord-sud, c'est-à-dire une cohésion interne à la zone euro, a beaucoup moins bien fonctionné. Qu'est-ce qui manque, notamment dans la relation franco-allemande ? Faudrait-il simplement prendre des mesures d'assainissement structurel au sud ? Y a-t-il tout de même des problèmes de transferts financiers ? De quelle nature ?

Concernant la discipline budgétaire, l'Allemagne était le bon élève, la France le mauvais élève et nous avons le sentiment aujourd'hui que tout le monde suit plutôt le mauvais élève. Au sein de l'Europe du Sud, le Portugal a assez profondément modifié son attitude. En Espagne, avec la confirmation du pouvoir du PSOE, la tendance est du même ordre. En Italie, nous voyons ce qu'il en est. Cette situation ne marque-t-elle pas une difficulté d'acceptation idéologique de la discipline ?

Ma troisième question concerne le rôle de monnaie internationale. N'existe-il pas une difficulté fondamentale pour l'euro à devenir un moyen de paiement international, alors que l'Europe est excédentaire commercialement ? Les États-Unis sont déficitaires, ce qui fait que le dollar est répandu partout. Les Européens ne le sont pas. Il est peut-être difficile de faire de l'euro cet instrument de paiement international. Au-delà de cette question, pourriez-vous nous éclairer sur ce qui pourrait être fait pour échapper au bras de fer américain en termes d'interdiction de commercialiser vers des pays qui n'appliqueraient pas des décisions unilatéralement prises par les États-Unis ? Les instruments mis en oeuvre au sein de l'Union européenne paraissent extrêmement inopérants actuellement.

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Depuis 2014, la politique monétaire repose essentiellement sur des mesures dites non conventionnelles, des programmes d'achats d'actifs et des opérations ciblées de refinancement à long terme notamment. Il semble que notre économie n'est pas prête à voir la fin de ces mesures non conventionnelles. Dès lors, nous avons deux possibilités : soit considérer désormais que ces mesures sont conventionnelles, soit les arrêter progressivement. Je souhaiterais avoir votre opinion en la matière.

Par ailleurs, vous avez récemment indiqué, monsieur Coeuré – je vous cite –, que les banques centrales elles-mêmes peuvent jouer un rôle de soutien dans l'atténuation des risques associés au changement climatique, tout en restant dans les limites de leur mandat. Personnellement, cette assertion me ravit car je considère en effet que les banques centrales peuvent et doivent être un acteur majeur de la lutte contre le réchauffement climatique. Selon une étude récente de l'Institut Veblen que vient de citer mon collègue, la BCE investirait – je parle au conditionnel – plus de 110 milliards dans des secteurs polluants. Je pense par exemple aux industries très intensives en énergie, au secteur automobile, au secteur d'extraction des énergies fossiles. Quelles actions mener la BCE compte-t-elle mener dans la lutte contre le réchauffement climatique ? Les propositions de cette étude trouvent-elles grâce à vos yeux ?

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J'avais deux questions, mais celle concernant l'écologie vient juste d'être posée. Que comptez-vous faire pour que cet argent puisse bénéficier à l'écologie ?

Par ailleurs, ces sept dernières années, plus de 4 000 milliards ont été injectés par la BCE et manifestement, cet argent ne s'est pas retrouvé dans l'économie réelle, puisque la croissance ralentit fortement et que l'inflation n'atteint pas 2 %. Pouvons-nous savoir où sont partis ces 4 000 milliards ?

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Monsieur Coeuré, je souhaiterais d'abord souligner le problème démocratique que nous pose la BCE et qui est illustré par notre échange ici puisque le dernier échange de vues informel date de 2015, comme l'a rappelé le président. Ce manque d'échanges est gênant concernant un organisme qui détermine la politique monétaire et les conditions d'accès au crédit. C'est la raison pour laquelle nous souhaiterions que la BCE soit placée au minimum sous le contrôle du Parlement européen, au regard de son importance sur l'emploi et sur l'économie.

Ma seconde question concerne les conditions du crédit. Vous avez parlé de 20 milliards d'euros par mois et des opérations de refinancement des bilans des banques à long terme. Les banques sont largement soutenues par la politique monétaire de la BCE. Vous dites d'ailleurs que le secteur bancaire est sain. Cependant, ce qui a été l'objet d'une question que j'ai posée cet après-midi au ministre de l'économie, les banques, en France, ne sont absolument pas présentes pour participer à la reprise des entreprises. Des entreprises souhaitent investir dans l'économie réelle, en investissant dans l'industrie par exemple, ce qui est le cas d'Ascoval avec British Steel. Les banques ne sont pas présentes dans le tour de table, à tel point que les repreneurs sont obligés de faire appel à des fonds d'investissement qui prêtent à des taux allant de 10 à 20 %. C'est une réalité car les banques ne prêtent pas, en tout cas sur ces sujets. J'en viens donc à ma question sur les conditions que la BCE devrait exiger pour soutenir les banques. Si elles reçoivent des refinancements de la part de la BCE, il faudrait que ces banques s'engagent à soutenir l'économie réelle, l'industrie, à participer au financement de nos services publics et à soutenir la transition écologique. C'est au minimum ce qu'il faudrait faire dans la période actuelle.

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Monsieur Coeuré, partagez-vous les craintes de grands banquiers quant au risque élevé de déclenchement d'une nouvelle crise financière liée à un niveau d'endettement croissant qui dépasse désormais le niveau qui avait été atteint en 2007, juste avant le déclenchement de la crise ? Si vous partagez cette inquiétude, quelles mesures la BCE pourrait-elle prendre afin d'essayer de réduire ce risque ? Par ailleurs, pourriez-vous nous indiquer quel est le montant de la dette de l'État français détenu par la BCE ? Que représente-t-il dans l'ensemble du stock ? Des chiffres circulent selon lesquels la BCE détiendrait 20 à 25 % de la dette de l'État français. Enfin, quelle appréciation portez-vous sur la situation et les perspectives budgétaires de la France ?

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Monsieur Coeuré, outre le fait que nous puissions nous satisfaire de recevoir aujourd'hui le probable prochain président de la BCE, je tenais à vous remercier pour cette présentation et cette brève introduction que vous venez de nous dresser.

Ma question porte sur le taux de change effectif de la zone euro et son impact sur la balance commerciale de ses États membres. C'est aussi et présentement l'ancien salarié frontalier, travaillant au sein d'une salle des marchés d'une banque française installée au Luxembourg, qui vous pose la question. Dans une note de mars 2017, relative à la sur- et à la sous-évaluation du taux de change en zone euro, le CEPII relevait que certains pays, notamment l'Allemagne, la Finlande ou l'Autriche, bénéficiaient d'externalités positives en matière de compétitivitéprix, à l'aide d'une sous-évaluation de l'euro par rapport à leur activité économique. Parallèlement, ce taux de change de l'euro apparaissait surévalué pour d'autres pays, notamment la France, à hauteur de 10 %, nuisant de fait à la compétitivité de son commerce extérieur.

Ceci étant posé, pourriez-vous nous exposer la nature des mesures que la BCE prend à ce sujet ? Êtes-vous d'accord avec les propositions du Conseil d'analyse économique, qui recommande, dans une note de 2014, de faire varier le taux de change de l'euro, selon l'écart de production et la possibilité de ses membres dans le cycle économique. Enfin, soutenez-vous l'avis d'économistes, à l'instar du prix Nobel Joseph Stiglitz, sur l'élargissement du mandat de la BCE à un soutien de la croissance et du plein emploi de l'activité économique et non plus prioritairement à la stabilité des prix ?

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Monsieur Coeuré, la hausse des cours du pétrole observée ces derniers mois rogne le pouvoir d'achat de ceux qui ont besoin de se déplacer quotidiennement en voiture. Les prix de l'essence sans plomb ont atteint, la semaine dernière, un plus haut niveau historique depuis 2013, à 1,58 euro le litre en moyenne en France. Alors qu'en 2013, la vigueur de l'euro par rapport au dollar permettait de compenser les effets d'un baril à 100 dollars sur les prix à la pompe, l'effet de la hausse des cours actuels est d'autant plus fort sur le portefeuille des consommateurs que le dollar s'approche de la parité avec l'euro, suite aux relèvements successifs des taux directeurs de la banque centrale américaine. Quelle place la hausse des prix du pétrole occupe-t-elle actuellement dans les décisions de politique monétaire de la BCE ? Par exemple, si l'inflation venait à excéder 2 % avec la hausse des cours du pétrole, malgré une inflation sous-jacente toujours aux alentours de 0,5 %, la BCE prendrait-elle la décision de relever ses taux ?

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Merci, monsieur Coeuré de nous faire partager votre vision et les enjeux dans le cadre de la conjoncture actuelle européenne.

Pouvons-nous durablement encore imaginer des taux directeurs à un tel niveau ? Si oui, quelles en seront les conséquences à terme ? Inévitablement, le système bancaire français est aujourd'hui fragilisé par ce faible taux de rentabilité. Le système bancaire allemand peut-il le supporter durablement ? Quelle est votre vision aujourd'hui sur la crise du système bancaire allemand ?

Par ailleurs, puisque nous sommes au sein de la commission des finances en France, nous savons qu'aujourd'hui, environ quatorze pays ne respectent pas le niveau des 60 % d'endettement par rapport à leur PIB. Quel regard portez-vous sur le niveau de la dette française et son besoin constant et croissant de refinancement ?

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J'ai une question qui est plutôt liée à l'actualité En 2017, trente-quatre banques centrales et les superviseurs se sont réunis pour créer un réseau qui a pour objectif de superviser le verdissement du système financier. Ce réseau a été rejoint par la BCE. En avril dernier, nous avons eu accès au premier rapport qui mettait en évidence des actions très concrètes. Pourriez-vous revenir rapidement sur les actions menées par la BCE pour agir contre ce risque financier lié au climat, mais aussi peut-être pour assurer la transition vers une économie à faible émission ?

J'évoquerai un autre sujet qui est totalement lié. J'aimerais avoir votre position sur la mise en place d'une décote écologique dans le cadre des rachats d'actifs, sur le modèle de la décote prudentielle. Ce sujet est proposé dans le rapport du mois de mars, avec un alignement de la politique monétaire sur les objectifs climatiques de l'Union. Cela vous paraît-il envisageable et soutenable ?

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Merci, monsieur Coeuré, de venir nous rencontrer. Je pense qu'il est en effet impératif que nous échangions de façon régulière, annuelle. Je remarque que vous êtes une institution communautaire, mais la Commission également, et nous avons l'habitude de recevoir des commissaires. Ce n'est pas mutuellement exclusif. Nous sommes donc ravis de vous recevoir.

Vous avez parlé de la déclaration de Meseberg. Une proposition allemande avait été ajoutée à la dernière minute à cette déclaration sur une surassurance chômage, en lieu d'outil de stabilisation, qui pourrait avoir des modalités différentes de transfert ou de prêt. J'aimerais savoir le regard que porte la BCE sur cette idée de surassurance chômage.

Ma deuxième question concerne votre regard sur la dette italienne, à la fois privée et publique et sur la capacité du MES à jouer pleinement son rôle en cas de crise en Italie qui déstabiliserait la zone euro.

Enfin, je partage entièrement ce que vous avez dit sur la nécessité de parachever l'Union bancaire, mais je remarque qu'après avoir dit que l'Union bancaire avait beaucoup aidé, vous avez fait une liste de certains maux qui suggèrent qu'elle n'est pas achevée, par exemple la séparation entre dette souveraine et dette privée. Je remarque que tout le monde veut achever cette Union bancaire, mais que l'on n'y arrive jamais, à la fois en termes d'alignement réglementaire et en termes de garantie des dépôts. Quels sont, selon vous, les grands éléments les plus importants pour l'achever ?

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Tout dépend du sens du terme « achever »...

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Trois ou quatre questions de mes collègues ont concerné le climat. Cette question est de plus en plus prégnante. Il est beaucoup question du fléchage de vos investissements et à l'inverse, il est noté qu'une bonne partie de vos investissements actuels vont vers des activités qui ne sont pas favorables au climat, dans les secteurs traditionnels des grands investissements internationaux d'extraction et de distribution d'énergies fossiles, le secteur automobile industriel, intensif en énergie et producteur d'électricité. Quelle est votre réflexion ? Vous faites des investissements vers les secteurs de la transition écologique, mais certains secteurs, aujourd'hui, ne sont pas favorables. De la même façon, lorsqu'on raisonne, en France, sur l'investissement dans la transition écologique, on réfléchit aussi aux niches anti-écologiques. Cette même question se pose. Comment approchez-vous l'éventuelle création d'une banque européenne du climat, au milieu de l'ensemble des organismes financiers ?

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Benoît Coeuré, membre du directoire de la Banque centrale européenne (BCE)

Merci pour toutes ces questions. Je vais essayer de les rassembler par grande thématique et le président me rappellera à l'ordre si j'ai oublié certaines questions. Je note notamment trois grandes thématiques. Une thématique liée à la politique monétaire, à la continuation des taux bas et à leur impact sur le système bancaire. Une thématique liée au climat et à la transition énergétique. Enfin, d'autres questions liées notamment au rôle international de l'euro et au Brexit.

S'agissant de la responsabilité démocratique de la BCE, celle-ci est responsable devant le Parlement européen. Le président de la BCE se rend quatre à cinq fois par an devant la commission des affaires économiques et monétaires du Parlement européen où il est auditionné très longuement. Il s'y rend aussi d'ailleurs en tant que président du Conseil européen du risque systémique, sur les sujets liés à la stabilité financière. Il s'agit d'une autre audition par la même commission. Nous recevons chaque mois des dizaines de questions de parlementaires européens. Mon collègue, à mes côtés aujourd'hui, est chargé d'y répondre. Nous avons donc une relation très intense avec le Parlement européen et nous comptons bien qu'elle se poursuive dans la prochaine législature européenne.

Les traités ne font pas obligation à la BCE d'échanger avec les parlements nationaux. Néanmoins, nous avons considéré, assez tardivement certes, depuis 2012, que cet échange était nécessaire. Il y a dix-neuf États dans la zone euro. Nous ne pouvons donc pas échanger tous les deux mois avec les commissions des finances de ces États. Néanmoins, si le président veut bien m'inviter plus souvent, je serai ravi de vous rencontrer plus régulièrement parce que je réponds aux invitations. Nous sommes prêts à le faire, mais dans les traités, c'est devant le Parlement européen que la BCE est responsable.

Pour répondre sur le fond, concernant la politique monétaire, l'ensemble du dispositif actuel, c'est-à-dire les taux bas et les mesures non conventionnelles, va encore durer longtemps, parce qu'il faut du temps pour que l'inflation se stabilise de manière durable autour de 2 %. La zone euro a connu une crise d'une violence historique à partir de 2010 et il nous a fallu longtemps pour trouver les solutions, y compris dans le domaine financier et dans le domaine bancaire, ce qui rejoint le débat sur le renforcement institutionnel de la zone euro. Je considère que la reprise a été beaucoup plus lente dans la zone euro qu'aux États-Unis parce que nous avons mis plus de temps à imposer aux banques de rétablir leurs comptes, à faire des tests de résistance des banques (stress tests) et à imposer aux banques de rétablir leur ratio de capitaux, ce que les autorités américaines ont fait beaucoup plus tôt. Les banques européennes ont mis plus longtemps à assainir leurs comptes et à être à nouveau en situation de prêter à l'économie. Cette crise a été accrue par des mécanismes d'amplification très violents au niveau local, en Grèce et dans une moindre mesure au Portugal, en Irlande, etc. Il faut réparer tout cela aujourd'hui et nous sortons d'une crise qui a été très violente, ce qui prend du temps. Par ailleurs, l'inflation est basse partout dans le monde, indépendamment de la zone euro. Des raisons technologiques, liées à la mondialisation, font que l'inflation est faible partout. Tout cela prend du temps. Nous sommes dans une perspective de normalisation, mais elle prend beaucoup de temps parce que la perspective de retour vers 2 % n'est pas n'est pas immédiate. Néanmoins, nous sommes dans une perspective de normalisation. D'ailleurs, nous avons fait un premier pas en décembre, en arrêtant nos achats nets d'actifs, en arrêtant d'augmenter la taille de nos achats d'actifs. C'est un premier pas vers cette normalisation.

Il se trouve qu'entre-temps, l'économie européenne a rechuté, principalement pour des raisons internationales, ce qui nous écarte de cette trajectoire. Nous étions dans une perspective où l'écart de production dans la zone euro, soit la différence entre le niveau de l'activité et son niveau de long terme, était proche de zéro. Nous pensions qu'il deviendrait devenir positif et contribuerait à augmenter les prix et l'inflation. Or le ralentissement mondial nous a ramenés sous le seuil de zéro. La normalisation prend donc du retard, lié à la conjoncture mondiale, mais nous sommes toujours dans cette perspective.

Qu'est-ce qui est conventionnel et non conventionnel ? Je n'en sais rien. Le taux d'intérêt est un instrument conventionnel. Est-ce que le taux négatif est un instrument non conventionnel ? Sans doute pour les citoyens et les épargnants, parce qu'il sort des schémas financiers auxquels nous sommes habitués. Les marchés financiers n'ont eu aucune difficulté à s'adapter aux taux négatifs. Les achats d'actifs sont un instrument non conventionnel dans le sens où il n'a vocation à être utilisé que dans des circonstances extraordinaires, mais il est maintenant installé dans notre boîte à outils. L'instrument des achats d'actifs a été validé par la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE). Vous savez que l'État allemand a été attaqué devant la Cour constitutionnelle allemande, qui a déféré le dossier à la CJUE. Celle-ci a jugé que les achats d'actifs étaient un instrument légitime de la politique monétaire dans les traités. Cet instrument est donc désormais intégré de manière permanente dans notre boîte à outils. Il se trouve que nous sommes plutôt aujourd'hui dans une perspective de normalisation et donc à terme d'arrêt de ces achats d'actifs, si la conjoncture s'y prête, mais l'instrument sera toujours présent en cas de nouvelle crise à l'avenir, même si nous n'avons pas vocation à l'utiliser en permanence.

Faut-il changer notre mandat ? Je suis le dernier à pouvoir répondre à cette question : il ne me revient pas de changer mon propre mandat, car cela ne serait pas conforme au fonctionnement d'une démocratie. Les traités existent, ils sont proposés par la Commission et décidés par le Parlement. Vous avez donc plus d'avis que moi en la matière. En tant qu'exécutant, dans le respect des traités, je constate que donner aujourd'hui à la BCE un mandat de plein emploi ne changerait probablement rien à ce qu'elle fait. Tous les instruments dont j'ai fait la liste visent à soutenir la consommation, l'activité et l'emploi, seul moyen de revenir à une inflation à 2 %. Ils ont d'ailleurs eu jusqu'à aujourd'hui un impact plus visible sur le chômage et l'emploi dans la zone euro que sur l'inflation. Depuis que nous avons commencé notre politique d'assouplissement quantitatif, nous avons connu une baisse très significative du taux de chômage dans la zone euro et plus de 10 millions de créations d'emplois. L'impact a donc été très fort sur l'emploi dans la zone euro et beaucoup plus lent, jusqu'à présent, sur l'inflation, ce qui est un certain paradoxe, alors que nous avons un mandat de stabilité des prix et non pas un mandat de plein emploi. Il n'y a pas de contradiction. Si nous voulons atteindre les 2 %, il faut des créations d'emplois. Aujourd'hui, changer le mandat de la BCE ne changerait pas grand-chose. Dans certains cas, un changement de mandat nous conduirait à prendre des décisions différentes, mais pas actuellement.

Concernant l'impact sur les banques, il est évident qu'un environnement de taux d'intérêt très faibles et de courbe des taux d'intérêt plate n'est pas bon pour l'intermédiation bancaire. Le métier des banques est d'emprunter à court terme et de prêter à long terme. Une courbe des taux plate n'est donc pas bonne pour elles. La reconfiguration actuelle des taux est mauvaise pour la marge d'intérêt des banques, c'est-à-dire la différence entre le taux d'intérêt auquel elles empruntent et le taux d'intérêt auquel elles prêtent.

Pourquoi les taux d'intérêt sont-ils à 0 aujourd'hui ? Ce taux est nécessaire pour stimuler l'activité et l'inflation. Par ailleurs, l'ensemble des taux d'intérêt, dans tous les pays développés, ont baissé parce que la productivité et la démographie ralentissent et donc le rendement du capital est bas. Nous fixons le taux d'intérêt au niveau nécessaire pour stimuler l'activité et l'emploi par rapport à un référentiel, à un taux d'intérêt neutre qui assurerait le plein emploi et une inflation à 2 %. Les économistes disent que ce taux d'intérêt neutre a fortement baissé au cours des dix, vingt ou trente dernières années parce que la productivité et la démographie ralentissent, ce qui est vrai tant aux États-Unis qu'au sein de la zone euro. Je comprends que cette réponse ne soit pas très satisfaisante à court terme, mais à long terme, la meilleure manière de retrouver des taux d'intérêt élevés qui soient favorables à l'intermédiation financière est de stimuler la productivité du capital et peut-être de stimuler la démographie, ce qui est un autre débat. Cela permettra à la croissance d'être durablement plus élevée et aux taux d'intérêt de s'établir à nouveau à un niveau plus élevé. La tendance générale séculaire de baisse des taux d'intérêt n'est pas liée à la politique monétaire. Elle est liée au fonctionnement de nos économies et au fait que nos économies tendanciellement ralentissent parce que la productivité s'épuise.

Que pouvons-nous faire pour les banques ? Le mandat de la BCE est monétaire, il n'est pas de soutenir les profits des banques. Nous analysons cette question à travers un prisme monétaire. Si la baisse de la profitabilité des banques devient un problème pour la transmission de la politique monétaire, c'est-à-dire pour la capacité des banques à prêter à l'économie et à stimuler l'économie, elle peut alors devenir un problème pour nous. Aujourd'hui, nous ne considérons pas que ce soit le cas, notamment parce que les taux d'intérêt bas, en particulier les taux d'intérêt négatifs, n'est pas le principal facteur qui pèse sur la profitabilité des banques. Les banques de la zone euro ont un problème de profitabilité principalement parce qu'elles ont des bases de coûts trop élevées par rapport à leurs concurrents à l'international et parce qu'elles ont des portefeuilles d'actifs hérités de la crise, de manière différente dans les différents pays, mais de manière très lourde dans certains pays. Ces prêts non performants les rendent non profitables et les empêchent de prêter. Par ailleurs, les évolutions technologiques dans l'industrie bancaire et la concurrence d'acteurs non bancaires créent une situation de concurrence très intense en Europe. Nous avons trop de banques en Europe ; la consolidation bancaire a été insuffisante. La réponse principale serait que les banques européennes réduisent leurs coûts et que se produise un mouvement de consolidation. Il ne revient pas à la BCE d'en décider, mais à l'industrie. Il faudrait également que les banques s'adaptent aux évolutions technologiques pour diminuer leurs coûts et mieux servir leurs clients. Le taux négatif ne représente quasiment rien dans ce paysage. Comme vous l'avez dit, monsieur le président, le taux négatif représente moins 40 points de base par an sur l'ensemble du secteur bancaire européen, ce qui fait 7,5 milliards d'euros par an sur l'ensemble des profits du secteur bancaire de la zone euro.

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Le taux d'intérêt est en principe le coeur de leur profit. Une banque prête de l'argent. Il est très étonnant que le taux d'intérêt soit marginal. Dès lors, je ne sais pas de quoi vivent les établissements bancaires.

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Benoît Coeuré, membre du directoire de la Banque centrale européenne (BCE)

Considérez le scénario contrefactuel où nous n'aurions pas obtenu de taux négatifs ni baissé les taux d'intérêt. Les banques auraient certainement des taux d'intérêt plus élevés, mais elles n'auraient pas de clients, parce que leurs clients auraient fait faillite. C'est la différence entre l'équilibre général et l'équilibre partiel. Les banques voient évidemment la perte de marges d'intérêt que représente le niveau des taux d'intérêt, mais elles ne veulent pas dire que cette politique monétaire a permis la reprise des volumes des encours de crédits dans la zone euro, notamment dans le sud de la zone euro où ces crédits étaient totalement à l'arrêt en 2014-2015. Si nous ne l'avions pas fait, elles auraient des taux d'intérêt plus élevés, mais sur des encours de crédits qui seraient nuls, ce qui ne serait pas bon pour elles non plus. Nous conseillons aux banques de travailler leurs bases de coûts et d'être patientes. Les taux d'intérêt ont vocation à augmenter, mais dans un processus très long, parce que la conjoncture n'est pas bonne et que l'inflation est encore éloignée des 2 %. Dans l'attente, nous soutenons l'économie de la zone euro et nous permettons à leurs clients de rester solvables, ce qui est important pour elles.

Plusieurs questions ont porté sur le changement climatique. C'est un sujet très important qui est d'ailleurs inscrit dans les traités et que la BCE ne peut pas ignorer. Il revêt pour nous plusieurs dimensions complémentaires. L'impact du changement climatique sur la stabilité financière intéresse tous les régulateurs, mais également les banques centrales, au niveau mondial. Le Conseil de stabilité financière, le FSB, y travaille. Le réseau pour le verdissement du secteur financier y travaille également et nous aussi au sein de la BCE. J'en profite d'ailleurs pour rendre hommage à la Banque de France et à la Banque des Pays-Bas, qui animent et pilotent ce réseau. C'est un sujet sur lequel nous travaillons à la BCE. La prochaine revue de stabilité financière qui sortira aux alentours du 1er juin, comporte un chapitre entier sur le sujet, notamment sur la vulnérabilité du système bancaire européen au changement climatique. Ce sujet est important pour nous, en tant que régulateur et en tant que contrôleur bancaire. Le mécanisme de supervision unique, le contrôle bancaire au sein de la BCE, accorde de plus en plus d'importance à ce risque climatique pour les banques que nous contrôlons. C'est le premier volet qui concerne la stabilité financière.

Un deuxième volet est lié aux portefeuilles non monétaires de la BCE. Nous gérons des fonds de pension, nous avons des fonds propres et nous investissons. Ces portefeuilles ne sont pas monétaires. La même logique s'applique pour tout investissement. L'ensemble des banques centrales de l'Eurosystème et la BCE elle-même ont une réflexion sur la manière d'appliquer des critères. Cela se fait de manière assez différente selon les pays, ce qui induit sans doute une problématique de convergence, mais nous avons tous une réflexion sur la manière d'appliquer des critères environnementaux, sociaux et de gouvernance ou d'investissement socialement responsable, des critères de soutenabilité à ces investissements. S'agissant de nos fonds de pension par exemple, nous demandons à nos gestionnaires d'appliquer des critères de gestion éthique et soutenable, lorsqu'ils participent aux assemblées générales, etc. Il faut sans doute avoir une approche cohérente au sein de l'Eurosystème, mais ce processus est déjà en cours.

Ensuite, il y a les portefeuilles monétaires qui sont le coeur de vos questions. Nous avons commencé à étudier le sujet, mais avec beaucoup de précaution. Nous avons en effet, dans le traité, un mandat qui est clair, qui est la stabilité des prix. Certains d'entre vous veulent peut-être le changer, mais nous opérons dans le cadre du mandat que nous donnent les traités. Notre objectif prioritaire est la stabilité des prix. Sous réserve de cet objectif, nous soutenons les politiques de la Communauté. Nous voulons donc être sûrs que nos différentes actions dans ce domaine n'affecteront pas notre capacité à assurer notre mandat de stabilité des prix, ce qui demande une étude relativement fine. Nous avons lancé cette réflexion ; nous ne sommes ni sourds ni aveugles à ce débat. Nous y réfléchissons, mais avec un point de départ qui est le mandat de stabilité des prix.

J'en profite d'ailleurs pour faire une réflexion qui a trait à l'économie politique et qui n'est pas strictement juridique, si vous me le permettez. Plus vous demandez à la BCE de faire des choses différentes, plus vous politisez la BCE. Nous avons été créés, dans les traités, comme étant une institution indépendante et technique. Outre notre responsabilité devant le Parlement européen et devant les citoyens de la zone euro, la contrepartie de cette indépendance est aussi que notre mandat soit étroit, ce qui nous permet de rendre compte de notre action. Parce que la BCE a ce pouvoir toujours assez fascinant de créer de la monnaie, on nous demande de faire des tas de choses. Plus vous nous demandez de faire des choses et plus il sera difficile pour nous de le faire, parce que nous devrons établir des priorités entre des objectifs différents et pouvoir en rendre compte aux citoyens. Or établir des priorités entre des objectifs différents correspond à la définition de la politique. Vous le faites tous et cela est fait par des gouvernements qui sont responsables devant des parlements. Au sein du Conseil des gouverneurs de la BCE, nous ne sommes pas équipés pour le faire. Ne nous demandez pas de dire s'il est plus important de pénaliser les entreprises qui ont une empreinte carbone trop élevée, de pénaliser les entreprises qui vendent des armes ou de pénaliser les entreprises qui emploient des enfants dans les pays en développement. Les trois objectifs paraissent louables, mais comment y répondre dans le détail ? La question devient très rapidement politique. La BCE n'est pas une institution politique. Nous ne sommes pas sourds à cette discussion et nous y réfléchissons, mais nous devons le faire d'une manière qui est d'une part compatible avec notre mandat monétaire et qui d'autre part ne conduise pas à une politisation excessive de la BCE.

Je donne un exemple. L'essentiel de notre portefeuille n'est pas composé des obligations d'entreprises dont vous parlez, mais des obligations d'État qui représentent 90 % des titres que nous détenons. Est-ce que nous devons décider de ne pas détenir de titres de tel ou tel État de la zone euro parce que nous n'aimons pas sa politique énergétique, parce qu'il a trop de centrales à charbon ou trop peu d'aides pour les énergies renouvelables ? La réponse a priori apparaît clairement négative.

Il faut que cette discussion reste gérable par un Conseil des gouverneurs, composé de de technocrates indépendants. Si elle devient trop politique, la question doit être traitée par les enceintes politiques. D'ailleurs aujourd'hui, cette politique de taux zéro dont nous pouvons déplorer l'impact sur les banques est aussi une politique qui permet d'investir. Elle permet à tous les États de la zone euro, à leurs institutions publiques, à leurs banques de développement, à la Banque européenne d'investissement, d'emprunter à des taux très bas, à très long terme, pour la transition énergétique et pour le changement climatique. La BCE fournit des conditions financières et ensuite, les États peuvent disposer et faire ce qui convient à leurs priorités politiques. Si leur priorité politique est le changement climatique, les États peuvent décider de demander à la BEI de faire plus dans le domaine climatique et elle pourra le faire parce que les taux d'intérêt sont à zérp et parce que nous achetons toujours des obligations de la BEI. De manière indirecte, à travers la politique monétaire, la BCE crée un environnement qui est très favorable aux investissements de long terme. Il revient ensuite aux États de s'en saisir.

D'ailleurs, nous avons communiqué en la matière, mais cette politique reste insuffisamment connue. Dans le cadre de notre politique actuelle, nous sommes neutres par rapport à la structure du marché tel qu'il est, ce qui nous conduit à acheter des titres d'entreprises dont l'empreinte carbone n'est pas bonne, mais pour les mêmes raisons, nous avons acheté aussi beaucoup de green bonds. Nous détenons environ 20 % de l'ensemble des green bonds qui ont été émis dans la zone euro. C'est la conséquence mécanique de nos critères d'investissement, qui sont neutres par rapport à la structure de marché. Cela nous conduit déjà à détenir 20 à 25 % des green bonds émis, aussi bien par les entreprises que par les États ou les banques de développement de la zone euro. Laissez-nous un peu de temps pour entrer dans le détail et regarder ce qui est possible. Nous pourrons en reparler ensuite. Nous ne sommes pas sourds à cette réflexion, mais nous le ferons dans un cadre qui doit être conforme aux traités.

Le dernier bloc de questions concernait le rôle international de l'euro et la convergence.

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J'ai posé une question sur la convergence nord–sudest–ouest, en vous demandant ce qu'il manque.

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Benoît Coeuré, membre du directoire de la Banque centrale européenne (BCE)

Pour nous, le sujet est très important. J'ai dit d'ailleurs que ce budget de la zone euro, tel qu'il est discuté par les gouvernements actuellement, qui est d'un champ assez étroit de la convergence et de la compétitivité, est utile parce qu'il manque de la convergence dans la zone euro. Une convergence assez remarquable des taux de croissance a été réalisée, une convergence conjoncturelle. Les taux de croissance de la valeur ajoutée par secteur et par pays, au sein de la zone euro, connaissent une dispersion la plus faible historiquement, avant même la création de l'euro. L'ensemble de la zone euro, y compris le sud, a bénéficié de cette dynamique de reprise en termes de taux de croissance, mais en partant de niveaux qui ne sont pas bons. Il demeure donc un énorme problème de niveau de développement et de divergence du niveau de PIB par habitant dans la zone euro. C'est, d'une certaine manière, un échec de la zone euro, mais cette situation renvoie à des instruments communautaires qui ne sont pas spécifiquement des instruments euro, qui sont aussi les fonds structurels et le fonds de cohésion, utilisés à l'est, mais aussi au sud. Il est difficile d'aborder cette problématique dans le cadre exclusif de la zone euro, parce qu'elle renvoie à des instruments de l'Union européenne à vingt-sept. Je partage néanmoins le diagnostic.

S'agissant du rôle international de l'euro, la Commission européenne a lancé une large réflexion en la matière. Un rapport sur le rôle international de l'euro sortira mi-juin et fera le point très en détail sur le sujet, y compris d'ailleurs sur l'importance de l'euro selon les différents critères. Pour résumer, le rôle international de l'euro a initialement augmenté après la création de l'euro, mais a ensuite régressé après la crise financière. Cette situation renvoie, selon nous, à un problème de confiance dans le fonctionnement de la zone euro, que notre discussion illustre, mais aussi à un problème d'intégration des marchés financiers de la zone euro. En termes de politique économique, nous faisons cette recommandation principale : si nous voulons que l'euro joue un rôle international, il faut des marchés de capitaux plus intégrés dans la zone euro et il faut sans doute, à terme, un actif unique libellé en euros, l'équivalent des bons du Trésor américain, qui soit un véhicule d'investissement pour les investisseurs internationaux, ce qui n'existe pas aujourd'hui. Les marchés obligataires de la zone euro étant fragmentés, dès que la zone euro est touchée par un choc, comme en 2010, tout diverge. Les taux d'intérêt se mettent à diverger au sein de la zone euro. Les taux libellés en euros ne jouent pas un rôle de valeur refuge en cas de crise, pour les investisseurs internationaux, rôle que jouent les obligations libellées en dollars et même en yens. L'union des marchés de capitaux est aussi une réponse essentielle au rôle international de l'euro.

Monsieur le président, vous avez posé la question des sanctions américaines. La BCE n'a pas de compétence dans ce domaine. À titre personnel, au vu de mon expérience professionnelle antérieure, au ministère français des finances, je pense qu'il ne sert à rien de se plaindre des sanctions américaines. Les Américains sont un État souverain et sont libres de leur législation. Le sujet n'est pas seulement monétaire ; il est lié aussi à l'activité des entreprises européennes aux États-Unis. Autrement dit, le rôle international de l'euro n'est pas la solution magique pour échapper à l'extraterritorialité des sanctions américaines. Une entreprise qui violerait les sanctions américaines ne pourrait plus être active aux États-Unis, indépendamment de l'aspect monétaire, et probablement dans de nombreux autres pays. Selon moi, à titre personnel, la solution n'est pas de critiquer les États-Unis qui, de toute façon, agiront comme ils le veulent, de manière souveraine. La solution est de construire un dispositif comparable, c'est-à-dire d'avoir une capacité juridique et judiciaire, au niveau européen, pour faire respecter le droit européen et sanctionner les entreprises qui ne respectent pas les sanctions européennes. Aujourd'hui, ces dispositifs se trouvent au niveau national. Il y a un procureur européen, mais son rôle est assez limité. Il est chargé d'enquêter sur les détournements d'argent dans les procédures communautaires. Si l'Europe veut affirmer sa souveraineté dans ce domaine, il faut l'équivalent d'un procureur financier européen qui serait compétent en la matière. Je m'exprime à titre personnel.

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Pourriez-vous répondre à l'une de mes trois questions, soit sur la surassurance chômage, la dette italienne et le MES ou l'Union bancaire ?

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Je reformule ma question sur les 4 000 milliards d'investissements et leurs retombées en matière économique dans l'économie réelle.

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Benoît Coeuré, membre du directoire de la Banque centrale européenne (BCE)

Ces 4 000 milliards ne sont pas de l'argent que la BCE donne, mais qu'elle prête, soit sous forme de prêts, en général à court terme et de temps en temps à très long terme, soit sous forme d'achats d'actifs, qui sont des achats d'obligations et qui ont une durée de vie finie. Lorsque l'obligation arrive à échéance, elle est remboursée. L'argent revient toujours à la BCE. Il n'y a jamais de transfert définitif d'argent. La BCE n'apporte pas de subventions ou de dons. Elle injecte toujours une liquidité pour une durée limitée. Celle-ci peut être relativement longue lorsqu'il s'agit d'une obligation, mais elle est toujours limitée. La BCE ne fait jamais de dons.

Ensuite, vous demandez où va l'argent. Il revient chez nous. L'argent prêté par la BCE est prêté à des banques de la zone euro, qui s'en servent ensuite pour leurs différentes activités. Il ne reste pas nécessairement dans les banques auxquelles nous avons prêté. Dans l'ensemble du système bancaire de la zone euro, l'argent reste dans la zone euro. En fin de compte, l'argent revient et est déposé sur la facilité de dépôt de la BCE. D'ailleurs, l'actif de la BCE est nécessairement égal au passif de la BCE. L'ensemble des prêts consentis par la BCE des actifs achetés par la BCE se retrouvent sous forme de dépôts sur lesquels nous prélevons un taux négatif. Au terme de cette circulation monétaire, le profit pour la BCE est un profit pour le contribuable européen, puisqu'il est redistribué aux contribuables européens.

Le fait d'avoir desserré la contrainte de liquidité des banques leur permet de prêter aux entreprises et aux ménages de la zone euro. L'argent crée une capacité de prêts des banques. Les encours de prêts bancaires aux entreprises et aux ménages de la zone euro étaient en contraction au lancement de la politique d'assouplissement quantitatif et ils sont maintenant en expansion. Cet argent sert à financer la consommation et l'investissement de la zone euro et donc les créations d'emplois dans la zone euro. Cette création monétaire a permis de relancer la dynamique économique dans la zone euro, mais l'argent lui-même revient dans notre bilan et nous y prélevons un taux négatif. Un effet indirect est visible et quantifiable sur l'activité économique.

Je ne vous répondrai pas sur la dette italienne. Nous ne faisons pas de scénario d'anticipation sur ce qui peut se passer dans tel ou tel pays. Le mécanisme européen de stabilité, sous sa forme précédente du Fonds européen de stabilité financier, a montré son utilité en Grèce, à Chypre, en Espagne pour le secteur bancaire, et au Portugal. Il a une efficacité prouvée. Une discussion est en cours pour lui adjoindre de nouveaux instruments de prêts de précaution, dont dispose le Fonds monétaire international mais qui n'existent pas en Europe. Ils permettront de prêter à des pays qui sont en bonne santé économique, pour les mettre à l'abri de mécanismes de spéculation ou de contagion sur les marchés financiers. Une discussion est également en cours pour que le mécanisme de stabilité puisse renforcer les capacités du fonds de résolution des banques de la zone euro, notamment au cas où une grande banque de la zone euro aurait des difficultés. Cet argent n'est d'ailleurs pas budgétaire. Le MES pourrait prêter au Fonds de résolution unique (FRU). Ensuite, le FRU devrait rembourser au MES en prélevant une contribution sur le secteur bancaire européen. L'idée n'est pas que le contribuable européen paie pour les banques, mais plutôt de pouvoir assurer la liquidité temporairement en cas de crise. Je pense qu'avec ces mécanismes, le MES sera nettement renforcé.

Concernant l'Union bancaire, vous avez raison : nous estimons que l'Union bancaire est inachevée et au milieu du gué. Un travail a été fortement souhaité par le mécanisme de supervision unique, notamment par Mme Nouy, lorsqu'elle était présidente du Conseil de supervision. Il consiste à finir d'harmoniser la supervision bancaire dans les différents pays de la zone euro. La BCE est le contrôleur bancaire unique dans la zone euro, mais une partie des décisions que nous prenons en tant que contrôleur bancaire sont prises en droit national. Cette situation est très originale juridiquement. Une institution communautaire prend des décisions en droit national parce qu'une partie du droit bancaire reste nationale, ce qui n'est pas un problème en soi. La difficulté est qu'il est différent d'un pays à l'autre. Il est donc nécessaire de mener un travail d'harmonisation des options et des discrétions, c'est-à-dire des différences nationales en matière de supervision. Une partie peut être faite, à l'échelon réglementaire, par la BCE elle-même, ce qu'elle fait, mais une partie est législative. Une partie a été faite dans le « paquet » bancaire qui a été adopté il y a quelques semaines, mais il reste un besoin d'harmonisation du droit bancaire dans la zone euro.

Une harmonisation du droit non bancaire est également nécessaire, ce qui est beaucoup plus difficile. La mobilisation du collatéral dans la zone euro par exemple renvoie généralement au droit des faillites, au droit commercial et au code civil dans les différents États de la zone euro. Cette harmonisation est très difficile parce que les traductions juridiques sont très différentes et ne relèvent d'ailleurs pas des ministres des finances, mais des ministres de la justice, ce qui ajoute une complexité à ce processus. Cette harmonisation est certainement souhaitable si nous voulons harmoniser le fonctionnement des banques de la zone euro. Au-delà de cette harmonisation, la BCE a toujours soutenu le projet d'assurance des dépôts unique dans la zone euro, qui est dans les limbes politiques. Il faut demander aux ministres des finances de la zone euro de quelle manière débloquer ce projet politiquement, mais nous continuons à le soutenir.

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Vous n'avez répondu à aucune de mes trois questions. Quels sont selon vous les risques, pour la BCE, d'une nouvelle crise financière ? Vous l'avez très rapidement évoqué dans votre propos liminaire. Quelle est la part de la dette publique française détenue par la BCE ? Enfin, la troisième question concernait l'appréciation sur la convergence budgétaire, s'agissant de la France.

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Benoît Coeuré, membre du directoire de la Banque centrale européenne (BCE)

Pour les mêmes raisons que celles évoquées tout à l'heure, je ne répondrai pas en détail à la troisième question. La surveillance budgétaire est du rôle de la Commission européenne et non pas de la BCE. Nous ne faisons que constater le fait que la dette française a connu une accélération très importante au cours des dix dernières années et la place maintenant dans un groupe avec l'Italie et la Belgique, plutôt qu'avec l'Allemagne et l'Espagne. La France est dans le groupe des États européens qui ont une dette élevée, ce qui justifie la poursuite des efforts d'assainissement budgétaire, dans l'objectif de recréer également des capacités d'intervention budgétaire, si besoin était. Il revient ensuite à la Commission européenne de se prononcer sur la manière de le faire dans le cadre du pacte de stabilité.

L'encours de la dette française détenu par la BCE est disponible sur notre site Internet. Il est environ de 420 milliards d'euros, ce qui représente environ 20 % du stock de dette publique française, éligible selon nos critères.

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Il s'agit uniquement de la dette de l'État. Vous n'achetez ni la dette sociale ni la dette des collectivités territoriales.

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Benoît Coeuré, membre du directoire de la Banque centrale européenne (BCE)

La dette de la Caisse d'amortissement de la dette sociale est éligible aussi, mais l'essentiel de la dette, dans le cas de la France, est la dette d'État. La BCE peut acheter de la dette des collectivités locales, mais avec certains critères de notation. Honnêtement, je n'ai pas la réponse pour le portefeuille exact de la BCE s'agissant de la France, mais elle détient 20 % de la dette de l'État.

Pour ce qui est de la prochaine crise financière, je suis banquier central et suis donc payé pour m'inquiéter. Oui, il y a des risques de crise financière. Comme je l'ai dit tout à l'heure, nous pensons que le secteur bancaire est beaucoup plus solide aujourd'hui qu'il ne l'était en 2007-2008, parce que les niveaux de fonds propres des banques sont sans comparaison avec ceux précédant la crise de 2007-2008, ainsi que les niveaux de liquidité. En revanche, nous constatons un développement continu de l'intermédiation non bancaire. Le Conseil de stabilité financière, au niveau mondial, a décidé qu'on ne parlerait plus de shadow banking, mais de non-bank financial intermediation. On ne parle plus de banque de l'ombre, mais d'intermédiation financière non bancaire, ce qui ne veut pas dire que les risques soient moindres. Le changement sémantique ne change pas grand-chose à la réalité.

Notre rapport de stabilité financière donne des statistiques assez précises sur les fonds d'investissement et les fonds monétaires, qui jouent maintenant un rôle important dans le financement de la zone euro, notamment en achetant des obligations émises par les entreprises, mais également par les États. Dans ce domaine, je ne sous-estime pas les progrès qui ont été faits au niveau législatif européen, avec de nouveaux textes sur les fonds monétaires, sur les fonds d'investissement, etc. qui ont considérablement durci les critères prudentiels sur ces activités. C'est important. Le sujet est également suivi par le Conseil européen de stabilité financière. Cependant, nous n'avons pas les mêmes instruments prudentiels et notamment macro-prudentiels. Le secteur bancaire dispose d'un large dispositif dit macro-prudentiel qui permet de resserrer le crédit bancaire en cas de crédits excessifs. Ce dispositif a été activé dans de nombreux pays de la zone euro, y compris en France, où le Haut Conseil de stabilité financière s'est penché sur la question, s'agissant du crédit aux grandes entreprises, qui est jugé excessif. Des instruments macro-prudentiels permettent de compenser l'impact des taux bas.

Nous avons des taux bas pour des raisons monétaires, pour une période très longue. Nous sommes conscients du fait que cela crée des risques de survalorisation des prix d'actifs, de comportements plus risqués ou de prêts à des entreprises qui ne sont pas performantes. Cela baisse les critères de rendement des entreprises auxquelles on prête. Les économistes parlent de banques et d'entreprise zombies. Je n'utiliserai pas des termes aussi extrêmes, mais lorsque les taux sont bas, beaucoup de projets se retrouvent finançables, ce qui crée des risques. Nous le faisons pour des raisons monétaires et nous avons de bonnes raisons de le faire, mais il faut, dans certains cas, des mesures de compensation pour limiter les risques de stabilité financière. Dans le dispositif européen, ces mesures sont essentiellement nationales. Elles sont prises par les conseils macro-prudentiels nationaux, en France par le Haut Conseil de stabilité financière, qui est présidé par le ministre, sur le fondement d'instruments nationaux. Ce dispositif est satisfaisant, mais il n'existe que dans le secteur bancaire et n'existe pas pour l'intermédiation non bancaire. La BCE a toujours agi au niveau international pour que soit reconnu le besoin d'instruments prudentiels et macro-prudentiels dans le domaine de l'intermédiation non bancaire et nous continuerons à agir dans ce sens.

Membres présents ou excusés

Réunion du mercredi 15 mai à 16 heures 15

Présents. – M. Saïd Ahamada, M. Éric Alauzet, M. Jean-Louis Bourlanges, Mme Émilie Cariou, M. Charles de Courson, Mme Marie-Christine Dalloz, Mme Dominique David, M. Benjamin Dirx, Mme Sarah El Haïry, M. Joël Giraud, Mme Olivia Gregoire, Mme Nadia Hai, M. Patrick Hetzel, M. Alexandre Holroyd, M. Christophe Jerretie, M. Michel Lauzzana, Mme Patricia Lemoine, Mme Lise Magnier, M. Jean-Paul Mattei, Mme Cendra Motin, Mme Catherine Osson, M. Xavier Paluszkiewicz, M. Hervé Pellois, Mme Bénédicte Peyrol, Mme Christine Pires Beaune, M. Fabien Roussel, Mme Sabine Rubin, M. Laurent Saint-Martin, M. Éric Woerth

Excusés. – M. François André, Mme Émilie Bonnivard, M. M'jid El Guerrab, M. Daniel Labaronne, M. Marc Le Fur, Mme Véronique Louwagie, M. Benoit Potterie, Mme Valérie Rabault, M. Olivier Serva, M. Philippe Vigier

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