Commission d'enquête sur la lutte contre l'orpaillage illégal en guyane

Réunion du mercredi 24 mars 2021 à 17h00

Résumé de la réunion

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La réunion

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COMMISSION D'ENQUÊTE SUR LA LUTTE CONTRE L'ORPAILLAGE ILLÉGAL EN GUYANE

Mercredi 24 mars 2021

La séance est ouverte à dix-sept heures.

(Présidence de M. Bruno Duvergé, vice-président de la commission d'enquête)

La commission d'enquête sur la lutte contre l'orpaillage illégal en Guyane procède à l'audition de Mme Nathalie Barbe, directrice des relations institutionnelles et de l'Outre-Mer de l'Office national des forêts (ONF).

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Je tiens d'abord à excuser notre président, M. Lénaïck Adam, qui est retenu à un endroit où les communications ne sont pas possibles.

L'article 6 de l'ordonnance du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires impose aux personnes auditionnées par une commission d'enquête de prêter le serment de dire la vérité, toute la vérité, rien que la vérité. Je vous invite donc à lever la main droite et à dire : « Je le jure ».

(Mme Nathalie Barbe prête serment.)

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Merci, madame la directrice, d'avoir accepté de répondre à notre invitation. Vous connaissez certainement les externalités négatives, d'ordre sanitaire, environnemental et économique, de l'orpaillage illégal. Vous connaissez également les moyens déployés par l'État sur le territoire de la Guyane depuis de très nombreuses décennies pour mettre un terme à cette pratique. Le caractère impitoyable de cette lutte nous conduit aujourd'hui légitimement à nous interroger sur la pertinence de ces moyens mis en œuvre. Dans le parc amazonien de Guyane, notamment, toute action est impossible : même cueillir une feuille d'arbre suppose une autorisation. Or, le nombre de sites d'orpaillage illégal augmente sans cesse dans cette partie du territoire.

En recoupant vos réponses avec celles que nous aurons obtenues au cours de ces auditions, nous chercherons à soumettre au gouvernement un ensemble de propositions pour mettre un terme à cette situation.

Pouvez-vous nous présenter les missions et l'expertise de l'ONF en matière de surveillance de l'orpaillage illégal, et leur impact sur l'environnement ? De quels moyens financiers et techniques dispose l'ONF pour exercer ces missions et combien de ses agents sont aujourd'hui déployés sur le territoire de Guyane ?

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Nathalie Barbe, directrice des relations institutionnelles et de l'Outre-Mer de l'Office national des forêts (ONF)

Je commencerai par rappeler l'ensemble des missions de l'ONF en Guyane.

La première est de développer la filière de la forêt et du bois, au sein de laquelle de multiples emplois peuvent être créés. Le programme régional de la forêt et du bois approuvé l'année dernière par le ministre en charge des forêts fixe comme objectif de multiplier par trois le volume exploité par cette filière en Guyane d'ici dix ans.

La deuxième mission de l'ONF porte sur l'aménagement du domaine permanent forestier (DPF), auquel le régime forestier s'applique exclusivement. Il s'agit d'une exploitation à faible impact, au sein de laquelle seuls cinq arbres par hectare peuvent être coupés. Il faut au préalable avoir inventorié la ressource, et avoir créé des pistes permettant d'aller chercher ces cinq grumes. Dans ce cadre, l'ONF, qui est certifié PEFC (Programme de reconnaissance des certifications forestières), doit donc suivre l'exploitation forestière et contrôler et fournir des décharges d'exploitation aux exploitants des bois. Pour répondre à cet égard aux objectifs de contractualisation que l'ONF signe avec la filière, il doit connaître la ressource très diverse du DPF.

La troisième mission de l'ONF porte sur la biodiversité. Il gère trois réserves naturelles nationales, une réserve biologique et deux réserves intégrales. Il doit participer à leur protection et faire connaître la forêt aux Guyanais et son potentiel.

Dans le cadre du régime forestier, l'ONF doit enfin gérer le patrimoine foncier, ce qui recouvre l'instruction des éventuelles mutations foncières, la gestion des demandes d'autorisation d'exploiter, et, puisque ce patrimoine foncier constitue une ressource rare, l'émission d'appels à projets pour mettre en concurrence les candidats qui souhaitent l'exploiter.

C'est à l'ONF également que revient de fournir les conventions d'occupation temporaire, que ce soit pour des activités de loisirs comme l'installation de carbets, à des activités minières ou à toute autre activité commerciale. Les agents de l'ONF sont à cet égard assermentés, et ainsi habilités à rechercher et constater des infractions au titre du code forestier, du code de l'environnement et du code pénal. Ils ne le sont pas encore au titre du code minier, mais peuvent intervenir sur les activités d'orpaillage au titre de leurs conséquences sur l'environnement, ou de leurs infractions en matière de défrichement, d'occupation illégale, etc.

Les activités minières relèvent également de la mission de gestion du patrimoine foncier de l'ONF dans la mesure où elles font l'objet d'autorisations d'exploiter (AEX) ou de type minier. 5 agents de l'ONF sont à cet égard spécialisés dans la lutte contre les activités d'orpaillage illégal.

Au total, l'ONF dispose en Guyane de 82 salariés, dont 4 CDD. Ils se répartissent comme suit :

– 16 fonctions support (travaillant en ressources humaines, systèmes d'information, ou sur les questions financières) ;

– 3 commerciaux travaillant sur les activités concurrentielles ;

– 9 agents affectés aux missions d'intérêt général confiées par le ministère de l'agriculture, le ministère de la transition écologique ou le ministère de l'outre-mer, en matière de surveillance du foncier ou de suivi des activités d'orpaillage légal et illégal et des occupations illégales ;

– 27 agents affectés au régime forestier, ce qui inclut la surveillance du foncier, l'élaboration et la mise en œuvre des aménagements forestiers, la vente de bois et les conventions d'occupation temporaire ;

–12 volontaires de service civique (VSC), dont 11 travaillant sur le régime forestier et 1 sur les mines ;

– 15 ouvriers forestiers.

Sur les 8 millions d'hectares de la forêt guyanaise, 2 millions sont occupés par le parc national amazonien, et l'ONF gère les 6 millions d'hectares restants, dont 2,4 millions relevant du DPF, sur lequel s'applique le régime forestier.

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Compte tenu de l'ampleur de la mission qui est affectée à l'ONF, et des remontées qui vous parviennent du terrain, considérez-vous que le nombre d'agents dont vous disposez est suffisant ?

Pourriez-vous également présenter le système d'alerte et de suivi mis au point par l'ONF, et qui intègre l'analyse périodique des images satellites ? Est-il utile et efficace ?

Pouvez-vous nous présenter l'Observatoire de l'activité minière ; l'évaluation menée dans le cadre du projet REDD+ sur le plateau des Guyanes concernant l'évolution de l'impact des activités d'orpaillage sur le couvert forestier et sur les cours d'eau ; et le projet des Nouragues Obs'Eau (NOE) ?

La loi climat actuellement discutée à l'Assemblée nationale renforce les prérogatives judiciaires des agents commissionnés et assermentés de l'ONF, mais aussi de l'Office français de la biodiversité (OFB), afin de leur permettre (comme l'avait déjà fait la loi pour l'égalité réelle en outre-mer en 2017 pour les agents du parc amazonien) de participer plus activement à la lutte contre l'orpaillage illégal. Au regard des baisses d'effectif annoncées dans la loi de finances pour 2021, comment l'ONF fera-t-il pour gérer ces nouvelles prérogatives sans moyens financiers et humains supplémentaires ?

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Nathalie Barbe, directrice des relations institutionnelles et de l'Outre-Mer de l'Office national des forêts (ONF)

Les 5 agents de l'ONF spécialisés dans la lutte contre l'orpaillage illégal travaillent à partir de photographies satellitaires prises par Sentinel, etc. pour identifier par télédétection les anomalies susceptibles d'apparaître en photo-interprétation par rapport à l'image d'un couvert forestier normal de forêt tropicale. Ces anomalies sont alors croisées avec les cartes BRGM et la topographie pour exclure les anomalies liées à la géographie naturelle, et constituer un faisceau d'indices manifestant une situation anormale. Ces données pré-analysées par l'ONF sont ensuite envoyées aux acteurs de la lutte contre l'orpaillage illégal : armée, gendarmerie, police administrative générale (PAG) ou police de l'air et des frontières. L'État-major de lutte contre l'orpaillage et la pêche illicites (EMOPI), qui coordonne ces acteurs, en désigne alors certains pour contrôler sur le terrain la présence d'orpaillages illégaux dans les zones identifiées. Le retour de cette opération de terrain est enfin adressé à l'ONF comme aux autres acteurs.

En tant que prescripteur dans le cadre des AEX, l'ONF organise aussi 25 missions héliportées par an de contrôle des orpaillages légaux. Ces déplacements par hélicoptère sont alors l'occasion de repérer également d'autres zones anormales, susceptibles elles aussi de manifester la présence d'orpaillages illégaux.

Je ne suis en poste que depuis six mois, et je ne connais pas le nombre exact des orpailleurs illégaux dans le parc amazonien, mais je pense qu'ils sont considérablement plus nombreux que les agents de l'ONF. C'est pourquoi j'ai voulu commencer par rappeler que, dans le cadre de la loi, les missions de ces agents se restreignent à l'application du régime forestier : ils veillent à ce que du bois ne soit pas coupé illégalement, à ce que les forêts ne soient pas défrichées, etc. Ce n'est qu'en complément de ces missions régaliennes qu'ils interviennent également sur l'orpaillage.

L'impact de l'orpaillage illégal sur les forêts tient au fait que les orpailleurs utilisent du mercure, et le larguent dans le milieu naturel, tout comme ils placent en suspension un certain nombre de matières dans les cours d'eau, qu'ils polluent et détruisent par là même, en impactant les bassins versants. Par ailleurs, ces occupations illégales supposent un déboisement sans autorisation qui affecte le peuplement forestier, et elles posent des problèmes de sécurité publique.

Dans le cadre de sa mission d'intérêt général pour le compte des différents ministères, l'ONF doit donc fournir à la préfecture un bilan annuel des activités d'orpaillage, légales ou illégales, qu'il a constatées, et de leurs conséquences sur les écosystèmes.

En revanche, je ne connais pas les projets REDD+ et NOE que vous avez évoqués. Je pourrai revenir vers vous après m'être renseignée.

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Par rapport aux pratiques en France hexagonale, ne prévoir que 82 agents pour couvrir l'ensemble du territoire de Guyane semblait déjà très insuffisant. Or, le projet de loi de finances (PLF) 2021 prévoit une baisse des effectifs, malgré la nécessité d'accroître la surveillance en quantité comme en qualité.

Des difficultés et des inquiétudes liées au nombre insuffisant des agents qui sont mis à votre disposition en Guyane vous remontent-elles du terrain ?

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Nathalie Barbe, directrice des relations institutionnelles et de l'Outre-Mer de l'Office national des forêts (ONF)

Même si nous touchons un financement pour suivre les activités d'orpaillage dans le cadre de notre mission d'intérêt général de surveillance du patrimoine foncier, notre cœur de métier porte sur l'application du régime forestier sur les 2,4 millions d'hectares du DPF : c'est donc à son aménagement, à l'alimentation de la filière bois et à l'accueil du public que vont nos priorités.

C'est pour faire appliquer le régime forestier en Guyane que le directeur général de l'ONF a fixé en objectif prioritaire d'y accroître les effectifs de l'ONF malgré la baisse de 95 équivalents temps plein (soit – 1,2 % des effectifs totaux de l'ONF) annoncée dans la loi de finances. Simultanément, l'exploitation du bois est censée tripler en dix ans, pour passer de 70 000 à 270 000 mètres cubes, ce qui suppose de la part de l'ONF un travail plus important d'inventaire de la ressource et de création de pistes.

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Depuis la métropole, la forêt guyanaise apparaît comme une véritable ressource économique. Se rendre sur place permet toutefois de mesurer toute la complexité que présente son exploitation, ne serait-ce qu'en raison du nombre d'essences qui y sont présentes, et qui dépasse sans doute largement le nombre des essences présentes en métropole.

Pour autant, 5 grumes à l'hectare doivent être exploitées, et un objectif ambitieux de multiplication par trois du volume de cette exploitation a été fixé. Comment pensez-vous atteindre cet objectif, avec des effectifs constants ? Comptez-vous sur une amélioration des méthodes, etc. ?

La question de l'orpaillage en Guyane constitue avant tout une question économique, et il est important de connaître l'environnement économique dans lequel elle s'inscrit.

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Nathalie Barbe, directrice des relations institutionnelles et de l'Outre-Mer de l'Office national des forêts (ONF)

1 800 espèces d'arbres (au sens botanique) ont en effet été identifiées en Guyane, représentant 500 essences, dont 90 exploitables. L'objectif des agents de terrain de l'ONF est donc de repérer, au sein des 2,4 millions d'hectares du DPF, l'ensemble des grumes relevant de ces 90 essences qui présentent un intérêt en termes de valorisation du bois. Une fois cet inventaire réalisé, il faut tenir compte de l'exploitation à faible impact sur laquelle la France s'est engagée dans le cadre de la certification PEFC, avec donc une contrainte de ne couper que 5 arbres par hectare au maximum. Il est très important enfin de disposer des moyens financiers pour créer les pistes qui permettront d'aller chercher ces grumes.

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Quelles sont ces essences exploitables de la forêt guyanaise ? J'imagine qu'elles ne sont pas destinées à servir de bois de chauffage : sont-elles destinées à la construction, ou à l'ameublement, etc. ? Exploitez-vous également le potentiel de la forêt en pharmacopée ?

Les 5 grumes coupées à l'hectare font-elles ensuite l'objet d'une politique de replantation, ou cette replantation est-elle inutile au regard de la vitesse de renouvellement de la forêt en Guyane ?

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Nathalie Barbe, directrice des relations institutionnelles et de l'Outre-Mer de l'Office national des forêts (ONF)

Je pourrai vous fournir la liste des 90 essences exploitables en forêt guyanaise si vous le souhaitez. Elles n'ont rien de commun avec les essences exploitées en métropole.

Une centrale à biomasse existe à Kourou, et d'autres centrales de ce type sont prévues pour accroître la souveraineté énergétique de la Guyane. Une partie du bois extrait de la forêt est donc destiné à créer de l'énergie, mais l'essentiel du bois exploité en Guyane est constitué de bois d'œuvre.

J'ai eu la chance de suivre six semaines de formation en Guyane, et on m'y a par exemple expliqué qu'afin de limiter le taux d'hygrométrie dans les habitats, des lames de bois sont généralement insérées dans les fenêtres pour assurer un flux d'air permanent : cet usage constitue un débouché typique pour la filière bois.

Les bois très colorés, comme l'amarante, sont aussi utilisés pour l'ameublement.

Dans le cadre de sa mission d'aménagement du DPF, l'ONF établit également un plan de gestion à dix ou quinze ans, au sein duquel il recense les types d'arbres présents dans les différentes parcelles du DPF. Chaque grume exploitable doit ainsi être géoréférencée.

Dans un écosystème tropical, lorsque 5 grumes par hectare sont coupées, les arbres situés sous la strate herbacée accèdent de nouveau à la lumière et recommencent ainsi rapidement à progresser. Les plans d'aménagement sont précisément prévus pour que les prélèvements ne dépassent pas ce que la nature est capable de produire à nouveau.

Par ailleurs, le Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement (CIRAD) a mené des expérimentations de plantations de teck, etc., en Guyane, afin d'examiner leurs capacités à répondre aux besoins des filières d'exploitation.

Un travail considérable a également été réalisé pour valoriser le « bois létal » issu de la création de pistes dans la forêt, soit sous forme de bois d'œuvre, soit sous forme de biomasse.

Un autre projet consiste à utiliser les bois inondés par la création du barrage Triton.

L'ONF n'intervient pas en pharmacopée. Le CIRAD intervient peut-être quant à lui auprès des populations qui utilisent traditionnellement les plantes de la forêt en pharmacopée, afin d'exclure des aménagements l'exploitation de certaines essences du fait des propriétés de leurs graines et fruits.

L'ONF éditait jusqu'à présent un guide des essences guyanaises en partenariat avec le CIRAD et l'École nationale du génie rural, des eaux et des forêts (ENGREF), mais il ne le pourra plus désormais, faute de moyens financiers suffisants.

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L'ouverture de pistes pour aller chercher des grumes peut-elle également faciliter l'accès à la forêt aux orpailleurs illégaux ?

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Nathalie Barbe, directrice des relations institutionnelles et de l'Outre-Mer de l'Office national des forêts (ONF)

Je ne peux pas le nier. Il existe 1 200 kilomètres de pistes en Guyane, dont 600 circulables, et 40 supplémentaires sont créées chaque année. Les orpailleurs illégaux n'ont cependant pas nécessairement intérêt à emprunter ces pistes, trop visibles. Ils connaissent généralement très bien le territoire et savent s'y déplacer sans utiliser ces pistes, mais ils peuvent néanmoins le faire. De même, ces pistes créent des zones de lisière pour le gibier, et des discussions sont en cours à cet égard avec les chasseurs.

Contrairement au parc amazonien peut-être, le DPF n'est cependant pas « sous cloche », et sa ressource bois doit pouvoir être exploitée, dans le respect des plans d'aménagement, etc. La forêt couvre 90 % du territoire de Guyane, et il n'est donc pas possible d'interdire son exploitation économique, sauf à laisser les populations locales sans ressource pour vivre. Pour générer du PIB et des emplois, il est donc indispensable de créer des pistes, tout en veillant à leur impact.

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A l'inverse, ces pistes peuvent aussi faciliter l'intervention de la gendarmerie ou de l'armée au sein de la forêt.

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Nathalie Barbe, directrice des relations institutionnelles et de l'Outre-Mer de l'Office national des forêts (ONF)

Oui. Un calcul du coût et du bénéfice est donc chaque fois nécessaire.

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Quel impact de l'orpaillage illégal sur la forêt les agents de l'ONF constatent-ils ?

Je m'interroge sur la multitude des acteurs censés lutter contre l'orpaillage illégal, entre la gendarmerie, l'armée, le parc, la préfecture, l'ONF en partie, etc. Des réunions régulières sont-elles organisées entre ces acteurs pour mettre en place des stratégies communes ? Le rôle de chacun n'est pas clair pour moi. Comment parvenez-vous à coordonner vos actions ?

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Nathalie Barbe, directrice des relations institutionnelles et de l'Outre-Mer de l'Office national des forêts (ONF)

L'impact majeur de l'orpaillage illégal sur l'écosystème tient au déversement de mercure et d'autres matières en suspension dans les cours d'eau. Il entraîne également des défrichements pour aménager des installations.

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Suivez-vous de près les effets du mercure sur la forêt à long terme ?

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Nathalie Barbe, directrice des relations institutionnelles et de l'Outre-Mer de l'Office national des forêts (ONF)

Le mercure présente principalement des risques pour la santé des hommes. Le tissu hydraulique est tel qu'en étant déversé dans un cours d'eau il se diffuse partout. Lors de la formation que j'ai suivie à l'ENGREF, on m'a appris que le taux de mercure présent dans les cheveux des populations vivant en pleine forêt augmentait. Il faudrait interroger l'INSERM ou l'ARS locale à ce sujet (si elle existe), car ces questions ne relèvent pas des compétences de l'ONF.

La création de l'EMOPI avait précisément pour objectif de coordonner la lutte contre l'orpaillage illégal. Compte tenu de son faible effectif, l'ONF se contente d'identifier des zones où la présence d'orpaillage illégal peut être soupçonnée. Sur la base de ces indices et de ceux qu'apportent les autres acteurs, par exemple les gendarmes grâce à leur connaissance du terrain, l'EMOPI définit ensuite une stratégie semestrielle d'interventions à mener sur le terrain.

L'ONF peut quant à elle réaliser des missions héliportées dans le cadre de son suivi des activités autorisées à exploiter, pour vérifier que le cahier des charges annexé à l'autorisation d'exploiter est respecté, et alerter le détenteur de cette autorisation dans le cas contraire, afin qu'il procède aux corrections nécessaires.

Les acteurs de cette lutte sont en effet nombreux, mais ils sont tous utiles sur un territoire de 8 millions d'hectares.

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Nous avons compris que le contexte budgétaire restreint ne facilitait pas le déploiement de moyens supplémentaires pour cette lutte. D'après l'expérience que vous en avez, comment serait-il possible de la rendre plus efficace, en coordination avec l'ensemble des forces de terrain ? Je souhaiterais connaître votre point de vue à cet égard, même si cette question ne relève pas nécessairement de vos compétences.

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Nathalie Barbe, directrice des relations institutionnelles et de l'Outre-Mer de l'Office national des forêts (ONF)

Elle relève en effet de la compétence de l'EMOPI. Avec peu de moyens pour détecter des clandestins qui se cachent sur une telle surface, il faut à mon avis investir considérablement en moyens de télédétection et d'analyse d'image satellitaire. Jusqu'à présent, l'ONF recourait à des volontaires du service civil. Cette ressource a été internalisée depuis un peu plus d'un an, pour pérenniser cette compétence au sein de l'ONF.

La question de l'utilité de la télédétection d'image satellitaire se pose également au regard des progrès de la recherche. Il est très difficile en effet de distinguer sur cette seule base les défrichements destinés à creuser des puits d'orpaillage illégal de défrichements d'exploitation agricole. Nous travaillons donc sur l'automatisation possible des traitements d'image par l'intelligence artificielle, qui progresse très rapidement. Je ne sais pas à quelle échéance les résultats de cette recherche pourront être obtenus, mais c'est selon moi dans ce domaine que les investissements doivent être orientés pour accroître notre capacité à utiliser les images satellitaires. Des opérations ciblées pourront alors être déclenchées sur la base, non plus de simples faisceaux d'indices, mais de véritables certitudes.

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Merci, madame Barbe, d'avoir bien voulu répondre à nos questions. Nous sommes preneurs des précisions supplémentaires que vous avez proposé d'apporter à la commission d'enquête au cours de cette audition.

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Nathalie Barbe, directrice des relations institutionnelles et de l'Outre-Mer de l'Office national des forêts (ONF)

Merci de vous intéresser à la forêt en Guyane, qui doit être protégée, même si elle constitue aussi un levier de développement.

J'adresserai au secrétariat de la commission mes réponses complémentaires concernant les projets REDD+ et NOE, ainsi que la liste des 90 essences exploitables du DPF.

Merci pour votre écoute, et d'avoir pensé à l'ONF. Il est toujours très intéressant pour nous de savoir comment les parlementaires perçoivent ces enjeux.

La réunion s'achève à dix-huit heures.