Commission des affaires économiques

Réunion du jeudi 11 juin 2020 à 15h00

Résumé de la réunion

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  • CGT
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La réunion

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La commission des affaires économiques a auditionné M. Philippe Martinez, secrétaire général de la Confédération générale du travail (CGT).

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Nous avons reçu ce matin le président du groupe Renault, et nous recevons cet après-midi l'un des illustres salariés de Renault, puisque cela fait 38 ans que vous êtes salarié de ce groupe. Mais vous êtes évidemment ici pour vos fonctions de secrétaire général de la CGT.

Cette audition s'inscrit dans le cadre des réflexions que nous menons à la fois sur le la reprise et le plan de relance pour faire face à crise économique et sociale qui accompagne et qui va sans doute survivre à la crise sanitaire.

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Philippe Martinez, secrétaire général de la CGT

Avant de parler de l'avenir, il faut regarder dans le rétroviseur. Les problèmes que nous rencontrons durant cette crise en matière économique et sociale, et ceux que nous allons rencontrer existaient déjà auparavant. Il faut veiller à ce que certaines entreprises ne se servent pas du prétexte de la crise sanitaire, qui est réelle, pour accélérer des projets qui étaient dans les tiroirs. On a beaucoup parlé de Renault, mais les problèmes de Renault ne sont pas liés à la crise du Covid-19 : ils existaient déjà avant. Dans le secteur du commerce, beaucoup d'enseignes connaissaient des problèmes avant la crise, qui n'a fait que les accélérer.

Tous les secteurs d'activité n'ont pas subi cette crise sanitaire de la même façon, et certains ont même gagné beaucoup d'argent durant la crise. Dans l'industrie agroalimentaire, avec 50 % de salariés présents, la production atteint 95 % de son niveau habituel. Malgré des effectifs réduits, la productivité a augmenté, et les conditions de travail se sont donc dégradées.

Tous les secteurs n'ont pas été touchés de la même façon. Les secteurs les plus touchés sont ceux de la restauration et de l'hôtellerie, dont l'activité était nulle, alors que l'activité de la finance et des banques tournait pratiquement à 100 %. Méfions-nous des moyennes, elles cachent parfois de grandes disparités. Malgré une chute importante des ventes d'automobiles, les ventes de Porsche se sont accrues de 25 % pendant la crise sanitaire.

À l'avenir, certains secteurs vont continuer à être fortement perturbés, et nous discutons avec le Gouvernement de la nécessité de maintenir le chômage partiel pour un certain nombre de salariés. Il faudrait par exemple conserver les mesures de chômage partiel pour des secteurs tels que la culture ou l'animation en matière de sport.

Pour la reprise économique, des mesures doivent être prises, et il faut faire en sorte que toutes les aides soient conditionnées au maintien de l'emploi : il ne faut pas que l'argent public serve à détruire l'emploi.

Le troisième aspect, c'est qu'il ne faut pas être sur la défensive. Il faut évidemment défendre l'emploi et défendre l'activité, mais n'est-ce pas l'occasion, y compris moralement, de lancer de grands projets ? La CGT dispose de quelques dossiers d'entreprises qui ne demandent qu'à redémarrer si l'État les soutient. C'est le cas, entre autres, d'une papeterie qui recycle le papier journal. Cette très vieille industrie est tournée vers l'avenir et elle conjugue industrie et environnement.

Il est nécessaire de réfléchir sur le secteur de l'automobile, qui a besoin d'une intervention publique. Cela permettrait à Renault par exemple de produire à nouveau des véhicules en France. Actuellement, les modèles d'entrée de gamme de Renault ne sont pas fabriqués en France, alors que l'usine turque de Renault a un taux d'engagement de 130 %.

Une intervention de l'État est nécessaire dans plusieurs secteurs. Elle doit favoriser les relocalisations en France. La CGT porte chez Renault un projet de fabrication d'un petit véhicule électrique à moins de 10 000 €. Chez Airbus, avant la crise, il y avait dix ans de carnets de commande. J'ai cru comprendre qu'il y a 10 % de commandes en moins ; il reste donc neuf ans de carnets de commandes. Il est nécessaire d'examiner cette situation, sachant que ce genre de problématiques peut toucher le textile ou d'autres industries.

Il faut utiliser les investissements publics en France pour développer des emplois. Les investissements en France sont publics à hauteur de 40 %. Ils pourraient servir à accélérer la rénovation des logements. Un tel projet intéresse le bâtiment mais aussi d'autres activités industrielles.

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Permettez-moi de vous féliciter d'avoir publié avec d'autres syndicats une tribune favorable à la proposition du Président Emmanuel Macron et de la Chancelière Angela Merkel qui prônent une relance européenne via un endettement européen commun de 500 milliards d'euros (Md€) - montant réévalué à 750 Md€ dans la proposition de la Commission européenne.

Nous partageons beaucoup de points dans ce que vous venez de dire, par exemple la réconciliation entre industrie et écologie, la rénovation thermique ou le côté offensif et volontariste de la politique industrielle.

Je souhaitais vous interroger sur la croissance des emplois industriels. La France a recréé des emplois industriels en 2017, 2018 et 2019, et ce n'était pas arrivé depuis l'an 2000. Ces résultats n'ont pas été obtenus en décuplant les taxes, mais en rendant notre pays attractif. Or, dans une note du 4 juin 2020, intitulée Financer le progrès social, c'est possible, vous préconisez d'augmenter l'impôt sur le revenu, l'imposition des entreprises, et les taxes sur les bénéfices, alors que la France était devenue en 2019 la première destination des investissements étrangers. Pensez-vous que ce coup de massue fiscal peut nous permettre de rester un des pays les plus attractifs d'Europe ? Pensez-vous que c'est en taxant plus que l'on peut créer plus d'emplois industriels ? Je pense que sur ce point, nous pouvons avoir une vision divergente.

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Quand je vous entends, j'ai le sentiment qu'il y a un décalage entre la tête et la base au sein de la CGT. Sur le terrain, la CGT est assez présente et active, et rarement constructive. Pourquoi est-il si difficile de changer quoi que ce soit avec la CGT ? Même quand c'est avantageux pour les salariés, ces derniers préfèrent le statu quo. Ils préfèrent garder les avantages acquis, plutôt que de les échanger pour d'autres avantages pourtant plus intéressants pour eux et pour leur entreprise. Pourquoi ce conservatisme et cette frilosité ? Par ailleurs, que pensez-vous de la proposition de « booster » l'intéressement qui est portée par le Modem ?

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Monsieur Martinez, nous sommes nombreux à le dire et le souhaiter : la crise est peut-être une opportunité pour se remettre en question et se doter d'une économie tournée davantage vers le progrès social et environnemental. Sur un autre plan, les services publics ont montré leur résilience dans la crise. Je pense à la santé, à l'énergie et aux services à la personne, etc., et à tous ceux qui ont permis d'assurer la continuité du service et de l'économie de notre pays.

Cela m'amène à vous parler de la question de l'hôpital, que vous n'avez pas évoquée dans votre introduction. Avez-vous estimé les besoins de l'hôpital en matière financière de valorisation, mais aussi en moyens humains qu'il faut y consacrer ?

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Vous avez parlé de Renault tout à l'heure ; je vais vous parler de Renault Sandouville, où M. Laurent Berger, secrétaire général de la CFDT, a dit que la CGT était irresponsable, car suite à l'action de cette dernière, les salariés vont perdre une semaine de congé. Un accord aurait été trouvé entre Force ouvrière (FO) et la Confédération française de l'encadrement et Confédération générale des cadres (CFE-CGC) pour une troisième semaine, avec une embauche de 250 intérimaires. La CGT est souvent accusée de ne pas tenir compte de l'activité économique et d'être irresponsable. Que pouvez-vous répondre à cela ?

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Avant la crise du coronavirus, dans une interview d'octobre 2019, vous avez insisté sur l'existence d'un dialogue poussé entre votre syndicat et les organisations non gouvernementales (ONG) sur les questions environnementales. Vous disiez aussi qu'il n'y a pas de justice sociale sans justice écologique, et nous tenons à saluer cette position.

La crise du coronavirus a mis bien des sujets au centre de l'actualité. Il y avait bien sûr ces questions sanitaires tragiques, des questions sociales qui se sont réinvitées de façon très forte, avec des inégalités crûment mises en lumière, mais aussi des questions telles que la politique industrielle, la relocalisation, la nécessité du développement et du redéveloppement de politiques industrielles en France et en Europe dans différents secteurs, ainsi que les questions écologiques, bien sûr. Dans ces périodes de grands redémarrages, il est indispensable d'inscrire dès le départ des règles écologiques vertueuses pour faire face à ce que les scientifiques s'accordent à considérer comme la plus grande menace à laquelle l'humanité doit faire face : le dérèglement climatique, l'effondrement de la biodiversité, la crise des déchets, la crise des matières premières, etc.

Quelle est l'évolution de la politique de la CGT dans ce domaine ? Comment allez‑vous renforcer le dialogue que vous évoquiez ? Quelles politiques de discussion entre sciences, écologie, économie et société voyez-vous ? Que pensez-vous de l'initiative de la convention citoyenne pour le climat ? Avez-vous envisagé de nouvelles façons d'aborder vos luttes et vos discussions avec les institutions ?

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Il y a urgence à déconfiner la démocratie et à permettre aux organisations syndicales d'exercer leurs droits fondamentaux à l'expression et même à manifestation le cas échéant. Pour corriger ce que j'ai entendu avant, je peux attester que sur le terrain, l'intelligence ouvrière, l'intelligence syndicale, a permis, dans mon territoire, de faire face aux fonds d'investissement prédateurs.

Les libéraux — et ils sont nombreux dans cette commission — envisagent la relance économique à travers le prisme de l'offre et de la compétitivité, qui se traduisent souvent par des allégements d'impôts pour ceux qui ont déjà beaucoup d'argent. J'aimerais vous entendre, Monsieur le secrétaire général, sur les propositions que vous formulez en vue d'une relance de l'économie.

Par ailleurs, l'hôpital est malade. Si l'hôpital n'était pas aussi abîmé, peut-être aurions-nous été plus protégés. Quelles sont les propositions de la CGT sur l'impérieuse nécessité de construire un État qui prend soin, qui protège et qui donne les moyens à son hôpital.

Sur le plan local, la Chapelle Darblay est vraiment la démonstration que les salariés ont des alternatives à proposer pour réconcilier l'industrie, le développement durable, « la lutte des classes et la fonte des glaces ». Pouvez-vous nous en dire un peu plus sur l'urgence qu'il y a à soutenir les salariés de la papeterie de la Chapelle Darblay ?

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Philippe Martinez, secrétaire général de la CGT

Mon avant-propos économique portait sur les questions industrielles, mais je vais vous répondre au sujet des services publics et de l'hôpital.

Concernant la fiscalité des entreprises, je ne vais pas énumérer les nombreuses aides dont ces dernières bénéficient depuis longtemps. J'ai insisté sur la nécessité de contrôler ces aides. Les élus du personnel dans les entreprises réclament de la transparence sur l'utilisation de ces aides mais ils n'ont jamais de réponse. Ces aides servent souvent à augmenter la productivité et à réduire les effectifs. Renault va toucher cinq milliards d'euros d'aides publiques, mais le président de Renault a annoncé 4 500 suppressions d'emplois. Il ne s'agit pas de licenciements secs, mais de 4 500 personnes en moins. Depuis dix ans, Renault a supprimé 23 500 emplois, malgré les aides publiques et une participation de l'État à son capital. En 2019, Renault a versé un milliard d'euros à ses actionnaires, soit plus de 20 % du montant de l'aide qui va lui être octroyée. Ces aides publiques à fonds perdu permettent de délocaliser, pour aller profiter des conditions de travail et des conditions législatives dans des pays tels que la Turquie, le Brésil, l'Iran, l'Inde, etc.

Le modèle social français a été beaucoup décrié mais cette période si particulière a montré qu'un modèle social basé sur la solidarité, et non sur la charité, c'est une donnée importante. Pour préserver ce modèle, les salariés comme les employeurs doivent payer des cotisations sociales. Or, en matière d'exonérations de cotisations sociales, l'État a beaucoup fait pour les entreprises, qui versent des dividendes conséquents à leurs actionnaires.

J'ai l'habitude d'entendre dire, et une certaine presse s'en fait le relais, que lorsqu'il y a un problème en France, voire dans le monde, c'est de la faute de la CGT, qui est par ailleurs taxée de conservatisme. C'est un point de vue. Pour ma part, j'écoute toujours les salariés, et il n'existe pas de problème entre la base et le sommet de la CGT. Je comprends les salariés, y compris quand ils sont confrontés à des choix difficiles dans leur entreprise. Et quand on est au sommet, on propose des alternatives.

Concernant l'intéressement, c'est une solution, mais cela ne doit en aucun cas remplacer un salaire digne et décent qui permet de vivre et sur lequel on paie des cotisations. D'ailleurs, les plus grands gagnants des accords d'intéressement sont bien souvent les employeurs.

La troisième question concernait l'enjeu des services publics et de l'hôpital, et cette question est essentielle. Certains ont découvert pendant la crise que des lits et même des hôpitaux sont fermés, et que les soignants sont mécontents… Toutefois ces problèmes ne sont pas nouveaux. Désormais, il faut des réponses concrètes aux demandes des personnels soignants. Or, on leur parle à nouveau de réduction des dépenses, de fermetures de lits, de réductions d'effectifs, etc., alors qu'une nouvelle politique de santé est nécessaire, la vraie question étant de savoir si la santé dans un pays est une dépense ou un investissement.

Il faut arrêter tous les plans de fermetures d'hôpitaux et de suppressions de lits. Il faut revoir, y compris dans les territoires, la notion d'hôpital de proximité. Il faut revoir la politique d'emploi et les effectifs de l'hôpital public. Les besoins sont chiffrés à 100 000 emplois, et il faut y ajouter les besoins des établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) et de tout le secteur médico-social. L'objectif du Ségur de la santé ne doit pas être d'évoquer les problèmes, mais de les résoudre. La colère gronde, et les soignants ont l'impression que l'on s'est moqué d'eux.

À Sandouville, un accord du groupe Renault a été signé par toutes les parties, sauf la CGT, au début de la crise sanitaire. Il y était proposé aux salariés de rendre leurs congés pour le maintien de l'emploi. Cet accord révèle une volonté de faire passer la reprise d'activité avant la préservation de la santé des salariés. Ce qui s'est passé à Sandouville comme dans une autre usine du côté de Metz, c'est que les directions ont décidé unilatéralement des mesures sanitaires à prendre pour protéger les salariés, sans discussion.

Ce qui montre que la CGT est ouverte, Monsieur Villani, c'est qu'elle travaille depuis dix mois avec Attac et Greenpeace. Depuis, le petit groupe s'est élargi, et nous avons récemment formalisé un texte qui s'intitule Plan de sortie de crise, qui a été adopté par 19 organisations du monde associatif, des ONG et des syndicats, avec leurs différences parfois importantes. La CGT a fait preuve d'esprit d'ouverture en privilégiant ce qui rassemble, plutôt que de discuter de ce qui oppose. Cette démarche commune est intéressante dans la situation que connaît notre pays, et nous allons la poursuivre, parce que la question est de savoir comment conjuguer l'urgence sociale et l'urgence climatique.

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Monsieur le secrétaire général, je veux vous interroger sur votre conception du dialogue social. Pouvez-vous m'expliquer éventuellement les conseils ou les consignes que vous donnez à vos représentants sur le terrain ? Dans quelle mesure pensez-vous que l'intimidation est un mode d'échange ? Dans quelle mesure pensez-vous que ces méthodes peuvent contribuer à être entendu et écouté ? Et puisque le monde d'après est un concept à la mode, à quoi ressemblera le dialogue social réinventé par la CGT ?

Sur mon territoire limougeaud, il est des pratiques que j'ai particulièrement peu goûtées ces derniers mois. Me hurler dessus, aller même jusqu'à l'intimidation physique, empêcher des réunions publiques n'a pas pour effet de m'impressionner. Je suis de la race de ceux qui ne cèderont jamais face à ces pratiques et ces modes de fonctionnement. Ce message passé, ma question sur le dialogue social demeure.

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J'aimerais avoir une précision sur la position de la CGT sur deux combats qui portent sur la gouvernance des entreprises. Nous sommes partisans de créer des commissions de codétermination pour les salariés comme partie constituante de l'entreprise, et sur ce point, nous avons eu avec vous un dialogue qui a toujours été fécond, mais il y a peut-être une difficulté à préciser la doctrine qui peut être la vôtre.

Le deuxième sujet est celui du partage du travail. Ne faudrait-il pas réorganiser un partage non seulement des richesses, mais également du travail dans notre société, pour que nous en ayons tous ? Quelles sont les réflexions et les prospectives de la CGT à ce sujet ?

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Je voudrais apporter une précision au sujet de votre propos liminaire. Contrairement à ce que vous avez pu dire, les ventes de Porsche sont en baisse depuis le début de l'année, et la baisse atteint 20 % au mois de mai 2020. Pour un spécialiste du secteur automobile, c'est dommage de ne pas vérifier vos sources ou de relayer de fausses informations.

Vous parlez beaucoup de la transition écologique mais il est temps de passer aux actes. Pouvez-vous prendre aujourd'hui trois engagements à ce sujet : interdire les feux de pneus, de palettes ou d'autres produits de la part des militants de votre syndicat, interdire la création d'autocollants qui polluent le mobilier urbain de nos villes, et qui n'ont aucun intérêt pour vos revendications, publier chaque année le bilan carbone de la CGT et mettre en place un plan pluriannuel pour atteindre la neutralité carbone ? N'attendez pas une loi pour être exemplaire et transparent !

Par ailleurs, comme vous le savez, on parle en ce moment d'une baisse des impôts de production, que les entreprises doivent payer avant même qu'un euro de chiffre d'affaires ait été réalisé. Ces impôts représentent 3 % du PIB en France, 1,5 % en moyenne dans l'Union européenne, et seulement 0,5 % en Allemagne. Seriez-vous favorable à cette baisse des impôts de production ?

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Je trouve que les collègues de La République en Marche (LaREM) sont très agressifs, et qu'ils le sont beaucoup moins lorsque nous auditionnons le Mouvement des entreprises de France (MEDEF) et les patrons du CAC 40. Je participe à cette commission, et il y a rarement autant d'agressivité.

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Je souhaite connaître la position de la CGT sur le devenir de la filière nucléaire. Je suis député de Flamanville, et je partage avec les organisations syndicales sur place, dont la CGT, la volonté de maintenir un outil et une filière nucléaire qui s'inscrivent dans le mix énergétique. Au niveau local, les organisations syndicales portent cette ligne avec bon nombre d'élus du Cotentin, mais je ressens une évolution de la ligne de la direction de la CGT, et j'aurais souhaité vous entendre sur ce sujet.

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Pendant la crise, nous avons vu que les femmes ont été en première ligne. Les métiers très féminisés ont assuré des rôles sociaux essentiels qui ont permis à la France de faire face à la pandémie. Pourtant, les femmes occupent encore trop souvent des métiers parfois précaires et assez peu reconnus. Pouvez-vous me dire, Monsieur le secrétaire général, ce que la CGT va proposer pour revaloriser socialement et économiquement les métiers féminisés ? Seriez-vous prêt à travailler à une refonte globale de la cotation des métiers et des compétences, pour une vraie équité salariale entre les hommes et les femmes ? Que penseriez-vous de conditionner les aides publiques aux entreprises en fonction de la note de l'index des égalités femmes-hommes ?

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Vous avez formulé un plan de sortie de crise qui s'intitule Plus jamais ça, et vous avez signé une tribune sur la transition écologique au niveau européen. Je tenais à saluer votre engouement naissant pour l'accélération écologique. Mais vous savez comme moi que certains secteurs ou entreprises ne sont pas suffisamment préparés à cette accélération écologique. Pouvez-vous m'expliquer le fait qu'un syndicat comme le vôtre n'ait pas eu une parole publique plus forte pour éviter à ces mêmes entreprises d'être aujourd'hui au pied du mur de la réalité environnementale, sociale et économique ?

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Vous avez parlé de Renault. Déjà au siècle dernier, les économistes soulignaient que Renault souffrait d'un handicap, qui était son positionnement dans le marché sur l'entrée de gamme. Pouvez-vous nous donner la vision stratégique à long terme de la CGT dans une économie de marché, qui permettrait de conserver l'industrie automobile, de la moderniser, de la rendre plus compétitive, et d'éviter les délocalisations ?

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Je viens d'apprendre l'accident de voiture et le décès de Yann Augras, qui était délégué CGT dans l'ex- entreprise GM&S Je voulais en informer Monsieur Martinez, et je voulais avoir une pensée pour lui, parce que c'était quelqu'un de bien, d'honnête et de sincère, et il était tout investi pour son entreprise. J'adresse mes sincères condoléances à ses proches.

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Philippe Martinez, secrétaire général de la CGT

Je le connaissais depuis très longtemps. Je vais essayer de reprendre mes esprits.

Je voudrais redire à Mme Beaudouin-Hubiere ce que j'ai eu l'occasion de dire à plusieurs reprises : ma conception du syndicalisme, c'est de convaincre, mais pas en bousculant, en insultant ou en molestant. Je suis pour le débat démocratique. Il y a des formes d'action où on brûle des pneus ou des palettes. Je ne suis pas sûr que c'est ce qui pollue le plus la planète. Attaquons-nous d'abord à ce qui se passe dans la forêt amazonienne. Je tenais à le redire devant vous : la CGT et moi condamnons régulièrement ce genre de pratiques.

À propos de dialogue social, les politiques ont une légitimité électorale, mais les organisations syndicales ont aussi une légitimité que leur donnent les salariés. Il est nécessaire de faire évoluer la démocratie sociale, et cela renforcera le dialogue social, dont nous sommes partisans, à condition que les règles du jeu évoluent. À titre d'exemple, c'est toujours le MEDEF qui propose des textes, les négociations ont toujours lieu au MEDEF, et en fin de compte, les organisations syndicales ne peuvent se positionner — en ajoutant des virgules ou des points virgule — que sur un texte émanant du patronat. Dans le cadre d'un dialogue social et d'une véritable démocratie sociale, nous proposons que l'on puisse discuter d'un texte présenté par des organisations syndicales.

Il y avait une question sur le partage du travail. Le sens de l'Histoire, c'est de travailler moins, et la CGT revendique que la référence hebdomadaire du temps de travail soit de 32 heures. Pour l'instant, il est inimaginable d'ouvrir une négociation sur les 32 heures, parce que c'est le patronat qui impose les règles et les conditions du dialogue social, ainsi que les sujets à évoquer. Dans le dialogue social, le Gouvernement ne doit pas avoir de parti pris. Lors de la négociation sur l'assurance chômage, par exemple, nous avons été confrontés à un Gouvernement qui a voulu imposer le résultat qu'il voulait obtenir à la fin. C'est une conception du dialogue social, mais ce n'est pas celle de la CGT : on ne nous impose pas une réponse obligatoire avant que la négociation ait commencé.

Dans le domaine nucléaire, la CGT est très démocratique. Quand la CGT discute avec Greenpeace, des militants CGT ont les cheveux qui se dressent sur la tête. Je n'ai pas caché que le nucléaire est un sujet de discorde ou de différence fondamentale avec Greenpeace. Pour l'instant, l'énergie nucléaire reste une énergie propre, mais elle pose un certain nombre de questions, et il est nécessaire d'intensifier la recherche. À Flamanville, les problèmes de l'EPR ne sont pas liés à la qualité des salariés, mais bien à des politiques de l'entreprise (sous-traitance excessive, externalisations, etc.).

Ce que la CGT propose, c'est que la part du nucléaire dans la production d'énergie diminue, non pas en fermant des centrales, mais en augmentant la part du renouvelable, de ce que l'on appelle le mix énergétique.

Nous arrivons à la question plus qu'essentielle de la place des femmes dans le travail et hors du travail. Dans toutes les entreprises, il faut faire en sorte qu'à qualification égale le salaire soit égal, ce qui n'est pas encore le cas, et que les métiers très féminins aient les mêmes niveaux de qualification et de reconnaissance de qualifications que les métiers très masculins. Il faut donc qu'à qualification égale et à diplôme égal, le niveau des rémunérations soit le même. Et vous nous avez donné une très bonne idée sur la nécessité de conditionner des aides au respect non pas de l'index du Gouvernement, parce que nous le critiquons et le contestons, mais au respect d'un index fiable.

J'ai dit qu'en 2019, Renault a versé un milliard d'euros de dividendes. Quelques mois après, ce sont les citoyens qui vont lui donner cinq milliards pour licencier 4 500 personnes. Avec ce projet de suppressions d'emploi, l'action Renault a augmenté de 5 %. C'est le monde d'avant, celui des licenciements boursiers. Si c'est le modèle d'économie de marché que vous proposez, je ne partage pas votre point de vue. En revanche, si l'on réduit les marges sur les ventes d'automobiles pour favoriser le volume et favoriser l'emploi, cela fait moins d'argent pour les actionnaires, mais plus d'argent pour l'emploi, pour la recherche, pour l'évolution des voitures. Cette conception de l'économie de marché, nous l'acceptons, mais ce n'est pas la conception qu'expriment vos propos. À quoi sert l'entreprise ? À qui ? Au service de qui ? Ce sont de vraies questions, et je pense qu'il faut se les poser.

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Je pense que vous avez traité tous les sujets. Nous avons eu une bonne discussion et tout le monde a pu s'exprimer.