Publié le 5 juillet 2018 par : M. Ruffin, Mme Autain, M. Bernalicis, M. Coquerel, M. Corbière, Mme Fiat, M. Lachaud, M. Larive, M. Mélenchon, Mme Obono, Mme Panot, M. Prud'homme, M. Quatennens, M. Ratenon, Mme Ressiguier, Mme Rubin, Mme Taurine.
Supprimer cet article.
Par cet amendement nous proposons de supprimer cet article 3 qui, en restreignant considérablement le droit d’amendement, contrevient à la fois à un des principes les plus fondamentaux de toute démocratie ainsi qu’au mouvement historique de démocratisation progressive (et relative) de la Ve République.
Nous souhaitons par ailleurs un même succès à cet amendement en séance publique, puisqu’il a d’ores et déjà été adopté par la Commission des Lois, qui est donc tenue d’y apporter un avis favorable.
Selon les professeurs de droit constitutionnel Pierre Avril et Jean Gicquel, “le droit d’amendement est devenu la forme principale de l’initiative parlementaire depuis que l’immense majorité des lois a pour origine des projets déposés par le gouvernement. La contribution propre des assemblées à la production législative s’analyse désormais par les modifications qu’elles apportent à des textes dont elles n’ont pas l’initiative…”. Ainsi, comme le disait le 8 mars dernier à propos du projet gouvernemental le professeur de droit constitutionnel Dominique Rousseau, “restreindre le droit d’amendement, c’est grave. (...) Le droit d’amendement est en effet le corollaire du droit d’initiative parlementaire. Les parlementaires ont le droit de déposer des amendements, c’est inhérent à la fonction de député. (...) il y a déjà, dans la Constitution, dans la loi organique, dans le règlement de l’Assemblée, un encadrement très strict des amendements. Le gouvernement a donc tous les moyens déjà en sa possession pour éviter les usages abusifs du droit d’amendement. Je le redis, cette disposition est inutile.”
Par ailleurs, et au-delà du fait que cette disposition va à l’encontre des principes démocratiques les plus élémentaires, cette disposition est l’illustration de fait que ce projet de loi s’inscrit à rebours de la trajectoire historique de démocratisation du régime profondément anti-populaire qu’est la Ve République.
En effet, sur les 24 révisions constitutionnelles qu’a connu la Ve République, l’immense majorité d’entre elles avaient pour objectif explicite l’atténuation de la prédominance du pouvoir exécutif sur le législatif. En réduisant le droit d’amendement à la portion congrue, votre objectif ne peut qu’être de le neutraliser et par voie de conséquence de neutraliser l’opposition. Le Premier ministre a été on ne peut plus explicite lorsqu’il a déclaré que l’objectif de cette réforme était un retour aux origines de la Ve République.
Cependant, même si les rédacteurs de la Constitution du 4 octobre 1958 avaient pour but affiché l’édiction d’un régime clairement favorable à l’exécutif, jamais il n’a été question de faire du Parlement une chambre d’enregistrement de la volonté gouvernementale par la limitation du droit d’amendement. Ainsi, par cette disposition, et a fortiori par votre réforme toute entière, c’est moins un retour aux sources de la Ve République qu’un retour à l’avant 1870 auquel vous procédez.
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