Mission d'information sur l'incendie d'un site industriel à rouen

Réunion du jeudi 12 décembre 2019 à 9h30

Résumé de la réunion

Les mots clés de cette réunion

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  • attractivité
  • commerçant
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  • lubrizol
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La réunion

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La séance est ouverte à neuf heures trente.

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Nous poursuivons, ce matin, notre cycle d'auditions en recevant les acteurs économiques du territoire. Je voudrais d'abord, en mon nom mais aussi au nom du rapporteur, les remercier de leur présence. C'est un double signal, à la fois un attachement aux territoires où ils agissent, mais aussi aux travaux de notre mission. J'imagine les difficultés qui ont été les leurs pour nous rejoindre. Je crois qu'il était important que nous puissions vous entendre aujourd'hui.

Pour ce faire, je me permettrai d'être bref et de vous poser trois questions assez simples. La première concerne l'impact économique : l'avez-vous mesuré, identifié, décrit ? La deuxième concerne l'indemnisation. Un dispositif a été mis en place, est-il à la hauteur de l'estimation que vous avez pu faire des impacts économiques et financiers ? Comment cela fonctionne-t-il concrètement ? La troisième question concerne l'attractivité. L'idée d'un fonds en faveur de l'attractivité du territoire a été évoquée par la direction de l'exploitant Lubrizol, mais pas seulement, également lors d'une dernière réunion en préfecture en présence du Premier ministre.

C'est vrai que nous pouvons considérer que le territoire a subi toute forme de préjudices et notamment un préjudice d'image évident. Comment imaginez-vous l'utilisation possible d'un fonds d'attractivité ? Avez-vous des propositions à faire pour rebondir après l'évènement que nous avons vécu ? Nous voyons ce qu'il s'est passé à Toulouse après la catastrophe d'AZF, où la communauté économique, les acteurs du territoire ont su rebondir. En la matière, avez-vous déjà, vous-même, un certain nombre de propositions à nous faire ?

Je vais maintenant céder la parole à notre rapporteur, Damien Adam, et ensuite à notre collègue Agnès Firmin Le Bodo.

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Merci d'être présents avec nous ce matin. Permettez-moi, en guise d'introduction, de remercier l'engagement des commerçants et des artisans au sein de la Métropole de Rouen et bien au-delà, parce que vous participez à l'attractivité, à l'embellissement et à l'activité économique de notre territoire. C'est extrêmement important et nous devons sans cesse le rappeler.

Comme M. le président l'a indiqué, il serait intéressant que vous puissiez dresser un état des lieux tenant compte de l'impact de l'incendie de Lubrizol sur l'activité des artisans et des commerçants, avec évidemment cette problématique qui consiste à essayer d'exclure dans les pertes de chiffre d'affaires, la situation de 2018 en fin d'année, où il y avait déjà eu des impacts du mouvement Gilets jaunes. Il faudrait peut-être remonter aux trois dernières années pour voir quelle est la baisse réelle d'activité pour les différents commerçants et artisans.

J'ai aussi une question plus spécifique sur l'impact de l'accident pour la CCI (Chambre de commerce et d'industrie). Il me semble que vous avez réalisé un sondage express et un questionnaire sur les préjudices, au début du mois d'octobre, qu'en est-il selon vous ?

Sur l'indemnisation mise en place par Lubrizol avec un accompagnement de l'État, j'avais cru comprendre que pour certains commerçants, les plafonds qui étaient donnés sur les montants remboursés pouvaient poser des problèmes sur certaines catégories de commerces. Est-ce toujours le cas ? Pourriez-vous nous indiquer, si vous le connaissez, le nombre de dossiers qui ont déjà été remontés auprès des services de l'État et du fonds spécifique ainsi que le nombre de personnes qui ont déjà été indemnisées ?

J'aimerais vous demander comment vous évaluez le rôle de l'État dans la gestion de la crise, pour vous accompagner, notamment celui de la Direccte (direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi) ?

Nous savons que les commerçants ont l'oreille des populations. Quel regard les populations portent-elles sur cette gestion de crise ?

Enfin, pour les mesures à prendre, qu'attendez-vous de l'État ou encore de la Région sur l'aspect de la relance de l'attractivité de Rouen ? Qu'ont-ils déjà fait et qu'attendez-vous encore d'eux ?

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Je vous propose de répondre chacun à votre tour aux questions et d'adresser le message que vous souhaitez transmettre, en vous présentant, pour permettre de vous identifier et de savoir quelle organisation vous représentez.

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Christophe Doré, président de la Chambre des métiers et de l'artisanat de Seine-Maritime

Merci de nous auditionner par rapport à cette affaire qui a fortement impacté les Rouennais et au-delà de Rouen.

En tant que président départemental de la Seine-Maritime, je ne peux pas avoir un prisme « rouenno-rouennais ». Nous sommes sur les 112 communes touchées par cette problématique puisqu'il s'avère qu'au-delà de Rouen, nous avons aussi eu un impact assez important sur le Pays de Bray, pour les professionnels de l'alimentaire, autour de problématiques de livraison. Le monde agricole a été fortement impacté avec une interdiction de vendre ses produits durant de longues semaines.

Vous avez posé plusieurs questions.

L'impact économique dans le monde artisanal a surtout été marqué les premiers jours. Les entreprises ont ensuite vite rebondi et les consommateurs se sont adaptés.

Nous subissons un double effet. Nous avions déjà une problématique l'année dernière à la même époque, nous avons recommencé avec l'affaire Lubrizol.

Cela commence aujourd'hui à devenir très difficile pour les trésoreries des entreprises artisanales. C'est pourquoi nous avons engagé une démarche commune, avec mes collègues de la Chambre d'agriculture.

Je remercie d'ailleurs Vincent Laudat, président de la CCI Rouen Métropole ici présent, car nous avons mutualisé les outils. En effet, nous avons utilisé les outils de la CCI, puisqu'ils étaient parfaitement appropriés à nos ressortissants et nous avons travaillé ensemble pour que cette démarche soit la plus pertinente possible pour les artisans. Aujourd'hui, nous sentons une montée des réactions, depuis deux semaines, nous sommes à 150 appels par semaine. Les gens réagissent maintenant. En ce moment, les artisans viennent prendre des renseignements, s'informer sur cette plateforme, poser des questions. Bien sûr, nous travaillons avec nos collègues de la CCI puisque ce sont eux qui gèrent cette plateforme. Néanmoins, nous sentons bien qu'il y a eu un effet violent au départ et que, les choses avançant, il y a peut-être des besoins en termes de trésorerie et de nettoyage qui pourraient être indemnisés.

Je tiens à souligner le rôle de la Direccte et de la préfecture. Ils m'appelaient régulièrement, nous avons été en contact quotidien durant cette période de crise. L'État a été présent à nos côtés, nous a tenus informés, avec une grande transparence. Je l'ai déjà dit en comité de transparence et de dialogue, mais c'est ce qui nous a permis d'avancer sur les dossiers.

Quant aux indemnisations, je laisserai plutôt Vincent Laudat s'exprimer sur ce point, parce cela concerne quand même de petites voire très petites entreprises. Aujourd'hui, le cadre mis en place rentre en grande partie sur les problématiques des entreprises artisanales.

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Clarice Tarlevé, secrétaire générale de la Chambre des métiers et de l'artisanat de Seine-Maritime

Je vais vous donner quelques chiffres en complément de ce que nous a présenté le président Doré. Sur les 112 communes concernées par le nuage, nous avons 4 544 entreprises artisanales, dont 2 091 sur Rouen en particulier.

Les entreprises qui sont les plus impactées, pour le secteur artisanal, sont les entreprises de l'alimentaire (vente à emporter sur l'alimentaire), les entreprises de services (coiffure, esthétique, taxis...), les entreprises du bâtiment et les entreprises de sous-traitance du secteur agricole puisque les activités agricoles ont été suspendues pendant les semaines qui ont suivi l'incendie ; toutes les entreprises qui font de la prestation de services de maintenance ont donc eu une baisse d'activité sensible, et enfin toutes les entreprises qui font de la transformation de produits agricoles, notamment sur les circuits courts.

Pour répondre à l'une de vos questions, nous avons aujourd'hui 374 entreprises qui ont déposé un dossier auprès d'Exetech, cabinet chargé par Lubrizol de gérer et d'instruire les demandes d'indemnisation. Comme le disait le président, nous avons fortement communiqué et nous avons constitué un transfert d'information depuis l'origine puisque dès la nuit même, nous étions contactés par le préfet pour savoir ce que nous devions faire au niveau de la chambre de métiers.

Les entreprises ont eu beaucoup d'informations sur ce qu'elles avaient à faire pour pouvoir être indemnisées. C'est vrai qu'au début, nous en avons eu peu, mais nous en avons de plus en plus. L'information circule. Nous avons donc de la demande d'information sur des indemnisations par rapport à une baisse d'activité mais également sur le nettoyage, sur le fameux nuage, avec des galettes qui se sont déposées sur les exploitations et sur les entreprises.

Nous avons fait une demande, au niveau de la Chambre de métiers, pour que soient également instruits les dossiers d'entreprises qui ne sont pas immatriculées sous ce fameux nuage, mais qui ont été néanmoins impactées parce qu'étant ambulantes et exerçant leur activité sur le territoire, notamment pour les taxis, on peut très bien être taxi et venir chercher une personne à la gare de Rouen sans y être immatriculé. La demande doit être instruite différemment, mais elle sera a priori prise en considération.

La baisse réelle est difficile à quantifier, c'est encore en cours. Toutes les entreprises n'auront pas recours à une demande d'indemnisation. Les 4 500 entreprises potentielles ne formuleront pas toutes de demandes.

Je ne sais pas si l'indemnisation sera à la hauteur.

Il va falloir un peu de temps pour mesurer les impacts économiques et financiers.

L'État et la Direccte ont été très présents, nous les avons rencontrés plusieurs fois. Je pense qu'ils ont appuyé auprès de Lubrizol pour que l'entreprise soit la plus active possible dans les indemnisations.

Nous avons désormais un gros travail à faire sur l'attractivité de notre territoire. Rouen, bien entendu, mais pas seulement. Nous devons commencer par casser le bashing et la désinformation qui ont noyé et qui noient encore les médias au sujet de Rouen et de son image. Nous avons une vraie problématique sur les produits alimentaires. Je crois que la suspicion est encore très grande, y compris sur les produits qui n'ont pas du tout été impactés, qui ont notamment été produits avant l'incendie. Par exemple, plus personne ne veut acheter de miel normand alors qu'il a été produit au printemps ou pendant l'été et qu'il n'est donc pas du tout concerné par la pollution !

Il faut revaloriser l'image du commerce, comme le disait le président, nos entreprises ont fortement été impactées par les Gilets jaunes en Normandie, notamment à Rouen. Une deuxième crise aujourd'hui pourrait vraiment être fatale.

Il y a sans doute un gros travail à faire sur l'attractivité, sur l'appétence autour de nos produits alimentaires et peut-être une dynamique à redonner sur la création d'entreprises, autour de Rouen et de la Normandie.

Voilà ce que je peux vous dire pour le moment, mais nous allons continuer à réfléchir sur ce que nous devons faire pour demain.

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Fabrice Antoncic, président de l'association Vitrines de Rouen

Pour compléter tout ce qui a pu être dit, je vais revenir sur le démarrage de l'événement et la difficulté pour nous, commerçants, de gérer cette crise. Nous avons un peu manqué de retours et d'informations au début de la crise. Nous nous sommes retrouvés un petit peu bloqués, sans informations pour pouvoir la gérer, sur du court terme, du moyen terme et du long terme.

Pour le court terme, au niveau du commerce alimentaire, nous ne savions pas si nous pouvions continuer à vendre, notamment dans des lieux très proches de l'événement, sur les quais, dans le centre-ville de Rouen. Nous avons eu de vraies difficultés pour savoir si nous devions continuer à vendre nos produits et à faire venir nos équipes et nos clients dans nos commerces. Nous avons donc certainement manqué de méthode d'information pour pouvoir travailler conjointement avec les services de l'État qui ont été présents dans le dispositif, mais peut-être de manière désorganisée vis-à-vis des commerces, dans les premiers temps.

Les pertes d'activité ou d'impact ont été fortes sur les premiers jours, autour de 50 % les quatre premiers jours, 30 % la semaine qui a suivi et environ 15 % pour les jours d'après, pour arriver à être quasiment à l'équilibre sur le mois de novembre. Nous avons vraiment perdu quelque chose en termes d'activité et d'attractivité alors que nous étions plutôt bien repartis, nous étions sur une tendance positive et nous sommes passés sur un chiffre d'affaires avec une tendance négative, avec des impacts différents en fonction des commerces et des lieux.

Tous les commerces autour des quais ont été beaucoup plus impactés et cela a duré beaucoup plus longtemps. Les odeurs ont été présentes pendant longtemps, ce qui a empêché tous les commerces, notamment alimentaires, de fonctionner normalement.

Je vais revenir sur la partie indemnisation qui a été prise en charge du 26 septembre au 5 octobre. Nous avions, dès le début, souhaité que cette période ne soit pas arrêtée à ces dates-là. La méthode mise en place pour la partie indemnisation a été calquée sur ce qui avait été fait pour le G7 de Biarritz et partait donc d'un système anticipé, puisque le G7 était organisé et prévu. La mise en place de ce support administratif était positive mais réducteur par rapport aux besoins réels. Je pense qu'il couvrait, comme nous l'avions demandé, 80 % de l'ensemble des commerçants et artisans, mais les 20 % d'exception n'entraient pas dans ce cadre. Aujourd'hui, sur cette partie-là, nous restons encore dans la difficulté de faire avancer les dossiers. Il y a une volonté commune des chambres, de l'État, de Lubrizol, d'Exetech, d'avancer mais il y a une difficulté à maîtriser l'exception. Comme ce sont des règles qui ont été figées, c'est assez compliqué d'avoir des réponses par rapport à des dossiers d'exception. Il y a beaucoup d'allers-retours et nous restons, après plusieurs semaines, sans validation de ces dossiers.

Nous rencontrons donc une vraie difficulté par rapport à la prise en compte de l'indemnisation à date, sur les dossiers qui sortent du cadre de l'ordinaire et qui vont au-delà du 5 octobre. C'est pour moi une date qui ne correspondait pas à notre besoin d'origine.

Une reprise se fait malgré tout sur la fin de l'année, avec des tendances qui reviennent à l'équilibre, de manière générale, en fonction des commerces. C'est plutôt positif, mais nous allons avoir besoin de relancer l'attractivité. Je laisserai mon collègue en parler après.

Les services de l'État ont été présents. Je pense qu'il y a une volonté commune d'avoir fait les choses correctement. Il faut que nous travaillions encore plus collectivement dans les mois à venir, pour arriver à redorer le blason de la Ville et de la Normandie, avec de vraies actions et de vrais évènements, à la hauteur du sinistre. La Ville répond toujours présente quand nous faisons des évènements, que ce soit la Fête du Ventre, des braderies ou autres. Je pense qu'il faut que nous arrivions à faire un évènement de grande ampleur pour pouvoir donner la possibilité de s'exprimer de la meilleure manière possible.

Sur la partie regard client, je pense aussi que cela va mieux. Depuis décembre, nos clients et les habitants se plongent un peu plus dans les Fêtes de fin d'année, malgré les difficultés passagères que nous rencontrons en ce moment. Il y a plutôt de l'optimisme sur cette fin d'année, nous revenons dans une période qui a été compliquée pour nous l'année dernière, notamment sur les deux derniers week-ends, où nous avions été marqués par les évènements des Gilets jaunes. Nous allons rentrer dans une phase difficilement comparable, mais nous sommes plutôt confiants sur la suite des évènements.

Sur la partie attractivité et avenir, je vais laisser Matthieu prendre la parole.

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Matthieu de Lombard de Montchalin, président des Vitrines de Rouen depuis la création de l'association

Fabrice Antoncic est le président des vitrines de Rouen, mais je l'étais au moment de l'accident, il se trouve que notre passation de pouvoir était en cours. Nous avons un peu géré la crise tous les deux.

Je ne vais pas revenir sur ce que Fabrice vient de dire et ce que M. Doré a également dit. Je voudrais juste dire qu'il y a eu beaucoup de réactivité, notamment dans les indemnisations. Il faut maintenant traiter tout ce qui ne rentrait pas dans le cadre, avec de la souplesse, parce que c'est le cas des entreprises les plus importantes, donc avec des enjeux sociaux qui sont particulièrement forts, dans un contexte où nous avions déjà beaucoup souffert les mois précédents, à cause des gilets jaunes et l'année précédente, à cause des travaux en centre-ville de Rouen.

Sur une année difficile, nous avons rajouté un élément extraordinaire qui a vraiment compliqué la tâche.

Aujourd'hui, tout le monde reconnaît la bonne volonté de tous les acteurs dans les indemnisations. Maintenant que nous avons établi un cadre pratique pour 80 % des commerces, il faut éventuellement se remettre autour de la table, éventuellement rediscuter, puisque le gouvernement et le premier ministre lui-même avaient dit à la préfecture qu'ils veilleraient à ce que tout le monde soit indemnisé. Pour que ceci soit possible, il faut maintenant se remettre autour de la table pour les dossiers les plus complexes et probablement revoir si nous pouvons bouger à la marge le cadre qui est trop rigide. Je rappelle que le cadre ne prend en compte que les entreprises qui font moins d'un million d'euros de chiffre d'affaires, ce qui représente beaucoup d'entreprises mais il y en a qui font plus d'un million d'euros de chiffre d'affaires par an.

Je voudrais effectivement plus vous parler de l'avenir.

Ce qui est très important et je suis persuadé que votre mission va pouvoir porter ce message, c'est que cet engagement à reparler de l'attractivité et à relancer des campagnes d'attractivité pour Rouen, doit être commun à tous les acteurs du territoire. Nous savons que chacun a son service de communication, ses propres règles de communication, son journal, son graphiste... tout le monde a envie de communiquer en faveur de Rouen. Là, nous devons nous adresser, non pas aux Rouennais, qui sont tout à fait au courant de la situation et de l'amélioration de la situation, mais au reste du pays, voire à des consommateurs qui viennent de l'Europe entière, si nous parlons des touristes.

Nous avons besoin de frapper plus fort et pour cela, sachant que nous n'aurons pas de moyens démesurés, il va falloir impérativement communiquer ensemble. Je pense que la première chose à faire est que le fonds choisisse une agence de communication ou même de stratégie en communication, dont le métier est la communication de crise et la communication de crise de territoire, je suis persuadé que cela existe, et que nous définissions ensemble la stratégie de communication pour la Métropole, avec cet objectif de regagner en attractivité, et ensuite, chacune des institutions doit mettre à disposition sur ce thème, ses outils de communication. Pour l'un, cela sera ses outils internet, pour l'autre son journal, pour le troisième, les espaces publicitaires qu'il est capable ou qu'il a envie d'acheter dans tel ou tel média... Mais il faut que nous ayons un seul message, un message qui soit puissant et bien élaboré. Nous n'allons de toute façon pas faire cela au mois de décembre, il faut le faire au début de l'année prochaine, mais en tout cas, je pense que la première mesure concrète serait de dire : « Réunissons les acteurs autour de la table, prenons des professionnels qui vont être capables de construire la communication autour d'une image ». Les atouts de Rouen et de la Normandie n'ont pas disparu avec la catastrophe.

Il faut le faire le plus professionnellement possible, je pense que cela va être très important vis-à-vis des Rouennais et de la population.

M. le rapporteur posait la question de la réaction des clients. Nous avons évidemment toute la palette des réactions, de gens qui sont indifférents à des gens qui sont encore très angoissés et très actifs, et il ne m'appartient pas de juger les positionnements des uns et des autres. Cependant, je pense que nous devons avoir trois messages. Le premier message est de dire que nous avons pris conscience de ce qu'il s'est passé et que nous allons agir pour que si jamais un jour, un accident se reproduit, les choses aillent mieux, dans la façon de prévenir les habitants. C'est valable pour Rouen, mais cela le serait n'importe où. Il y a malheureusement des sites Seveso dans beaucoup de villes de France et même dans beaucoup de villes d'Europe. Des accidents, il y en aura d'autres.

Aujourd'hui, je pense que ce à quoi nous n'étions pas préparés, c'est par exemple de savoir comment avertir la population et comment lui dire quoi faire. Nous sommes des chefs d'entreprise, j'ai une équipe de 35 personnes.

Quand l'accident s'est déclaré, j'ai entendu à la radio, sur France Bleu, que le préfet disait : « Réduisez vos déplacements à ce qui est nécessaire ». Le fait de dire à ses salariés de venir travailler est-il nécessaire ? Comment voulez-vous juger cela ?

D'autre part, nous voyons bien que les mesures ont été établies il y a 20 ou 30 ans. J'ai beaucoup de respect pour la radio locale qui a d'ailleurs joué un rôle très important. Mais quand il y a une « Vigilance orage », nous recevons tous des SMS, nous ne savons pas trop de qui ni comment mais nous recevons des SMS en disant : « Attention, vous êtes en vigilance orange ». Nous pensons qu'il faut aller vers ce genre de choses. Je pense que le premier message vis-à-vis de la population doit être le suivant : « Regardez, nous avons tenu compte de ce qu'il s'est passé et nous mettons en place des mesures concrètes pour qu'en cas de nouvel accident, ici ou ailleurs, nous soyons plus en mesure de vous prévenir et de vous dire quoi faire ».

La deuxième chose, c'est la transparence. Ce n'est pas le monde économique qui réclame la transparence, mais il y a besoin de transparence. Dans notre société moderne, nous ne pouvons pas cacher les choses. Vous ne pouvez pas refaire le coup du nuage de Tchernobyl. Quarante ans après, cela ne marche pas ! Il y a 50 000 personnes qui vont pouvoir expertiser de leur côté. Je pense que la transparence joue beaucoup.

Puis il y a la confiance qui peut aussi se rebâtir autour d'une campagne vraiment importante qui va viser la France entière, voire une partie de l'Europe, pour dire que Rouen a des atouts. Cela passe par des éléments très concrets d'animation du centre-ville, mais aussi par la mise en avant de tout ce que Rouen a su développer.

J'ai envie de porter aujourd'hui un message d'espoir, plutôt positif, qui consiste à dire que nous n'avons pas perdu nos atouts, tout ce que tout le monde nous a reconnu au moment de l'Armada par exemple, tous les travaux qui ont été faits dans le centre-ville, tout ce qui constitue la force de l'histoire du patrimoine et de la dynamique rouennaise n'a pas disparu.

La seule chose est qu'il faut très clairement que nous nous mettions tous ensemble maintenant pour parler.

Je ne suis pas étonné que les difficultés des commerçants et des artisans se fassent sentir maintenant, il y a un décalage lié à la trésorerie. Il y a deux mois, nous avons eu des problèmes de chiffre d'affaires et aujourd'hui nous payons nos fournisseurs. C'est au moment où nous payons les fournisseurs que nous nous rendons compte qu'il manque du chiffre d'affaires au départ. Il ne faut donc surtout pas fermer trop tôt les robinets de l'indemnisation ou les dispositifs et faire preuve de souplesse, sinon, nous aurons l'impression que nous avons loupé quelque chose, alors que, globalement, nous pouvons dire qu'après un démarrage lent, ce mécanisme-là est assez vertueux.

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Vincent Laudat, président de la Chambre de commerce et d'industrie (CCI) Rouen Métropole

Je vais articuler mon intervention en trois parties : notre action, notre analyse et notre ambition.

Je voulais faire un point introductif sur les CCI, juste pour rappeler que la réforme et le choix du gouvernement et de l'Assemblée nationale de continuer la casse du réseau des CCI en France est une preuve d'un manque de connaissance de notre action et du lien que nous avons avec les chefs d'entreprise de nos villes et de nos campagnes. La CCI Rouen Métropole, issue de la réunion de trois Chambres de commerce, Dieppe, Rouen et Elbeuf rassemble 100 chefs d'entreprise bénévoles et investis dans chacun des bassins d'emploi.

Il n'y a que très peu d'instances de notre République où siègent les chefs d'entreprise. Être le corps intermédiaire bienveillant et constructif avec l'État, pendant les crises des Gilets jaunes et de Lubrizol est indispensable.

En tant qu'établissement public, nous accompagnons le tissu des entreprises dans leurs mutations économiques, législatives et techniques.

Pour commencer, rappelons le poids de Lubrizol dans l'économie normande : 2 200 emplois directs et indirects, 420 millions de retombées économiques et 75 millions de fiscalité locale.

Quelle a été notre action depuis le 26 septembre 2019 ? Nous avons, dès le lendemain, mis en place une cellule pour accompagner, en synergie avec la chambre des métiers, les entreprises impactées par l'incendie avec en baseline de nos publications : « Vous avez subi des préjudices, nous vous donnons la parole ». Nous avons mis en place ce fameux sondage express, pour lequel 232 entreprises ont répondu à ce jour. Le site de la CCI s'est fait aussi le lien pour 60 communiqués de presse et notes de préconisations. La CCI a présenté les dispositifs de l'État dans le cadre de l'accompagnement des entreprises en difficulté, l'activité partielle, les aides fiscales et sociales.

Nous participons aux réunions du comité de transparence et de dialogue. Par deux fonds, les Fonds LZ1 et LZ2, Lubrizol a choisi de dédommager les exploitants agricoles, les petites et moyennes entreprises (PME) et les commerçants. Nous avons accompagné la société Exetech, mandatée par Lubrizol, dans la prise en compte de tous ces préjudices : entreprises dans le périmètre des 500 mètres, entreprises en bord de Seine, entreprises dans les 112 communes et ainsi dimensionné les aides.

Les élus et les collaborateurs ont participé à 25 réunions, je suis intervenu huit fois dans la presse, nous avons organisé plusieurs réunions d'information à la CCI, avec les services de l'État et les deux industriels, Lubrizol et Normandie Logistique.

Nous avons fédéré les cinq CCI normandes, les syndicats patronaux, les branches professionnelles de la chimie et de la métallurgie pour rappeler le rôle crucial de notre industrie et l'obligation que nous avions de rouvrir le site de Lubrizol.

Nous avons, avec la Région, la CCI et la Chambre de métiers et de l'artisanat (CMA), décidé d'assouplir les conditions d'accès au dispositif garantie d'emprunt, mis à disposition des entreprises, soit 150 000 euros cautionnés par la Région, pour 30 à 70 %.

Nous avons rencontré des salariés de Lubrizol et relayé l'action de l'intersyndicale à l'attention du ministère du travail, souhaitant reprendre progressivement l'activité en toute sécurité, notamment l'unité de mélange.

Nous avons alerté les services de l'État de la récurrence des vols et des dégradations dans notre agglomération, vols de métaux et de carburant, qui ont été relayés par les dossiers de plainte auprès du préfet.

Nous avons également signalé la présence d'une aire de Gens du voyage en plein milieu de sites Seveso.

Nous avons engagé une action d'intervention à l'intention des sous-traitants de Lubrizol, en leur donnant un accès gratuit à nos rendez-vous d'affaires et en leur permettant de profiter de l'action de notre cluster « Écosystème client 4.0 », avec une mise en relation avec vingt donneurs d'ordres locaux. Dix entreprises sur trente ont répondu. Ce dispositif a été mis en place en concert avec le service achats de Lubrizol.

Nous avons organisé une réunion d'information le 8 octobre, spécifique pour les entreprises dans le périmètre des 500 mètres, pour les accompagner dans leur relocalisation et redémarrage. Les services administratifs de l'entreprise Triadis ont même été accueillis dans nos locaux, deux jours après l'incendie et y sont encore aujourd'hui.

Nous avons fait le lien entre ces entreprises du périmètre des 500 mètres et l'État, par rapport aux interdictions d'accéder à leur site et par rapport au flou sur les reprises possibles de travail : accidents du travail, position de la Direccte et de la Caisse d'assurance retraite et santé au travail (CARSAT), demande de mise en accident du travail préventif des salariés considérés comme une reconnaissance par l'employeur, de sa responsabilité.

Nous nous sommes également interrogés sur le type d'analyses nécessaires dans la zone des 500 mètres.

Nous avons participé aux interventions des ministres et du premier ministre à la préfecture.

Quelle est maintenant notre analyse ?

Je ne me permettrais pas de vous faire des préconisations, mais je souhaite partager notre réflexion sur ce sinistre en six points.

Il faut veiller à ne pas alourdir la législation déjà en place, mais à faire en sorte qu'elle soit mieux respectée, harmonisée et adaptée. Lubrizol relève de la catégorie Seveso seuil haut tandis que Normandie Logistique constitue une ICPE (installation classée pour la protection de l'environnement). Ils stockaient les mêmes produits mais étaient pourtant soumis à un régime différent. Ce n'est pas le lieu de stockage qui doit déterminer la dangerosité du produit mais sa nature.

Il est nécessaire de mutualiser pour améliorer la sécurité des sites Seveso. Nous avons 80 sites Seveso sur l'axe Seine. Les pompiers n'avaient pas suffisamment de mousse pour éteindre un site Seveso. À la CCI, nous gérons l'aéroport de Rouen et nous avons fourni de la mousse, au moment de ce sinistre. Pour améliorer cette sécurité, chaque site n'aura pas les moyens d'avoir son propre centre d'intervention. Pourquoi ne pas développer un centre d'intervention spécifique et mutualisé Seveso « seuil haut », pour regrouper des équipes formées, du matériel, des équipements et des produits adaptés ?

Une étude est nécessaire pour dimensionner, déterminer leur nombre par rapport au risque. Un financement par rapport au type de « seuil Seveso » peut être étudié. Toujours dans le domaine de la sécurité, l'utilisation de caméras avec une vision 360 degrés n'est pour l'instant pas autorisée. Alors comment reprocher à un industriel de ne pouvoir identifier un incendie avec un risque ayant une origine extérieure à son site de production ? Établir une règle sur la surveillance intérieure et extérieure de sites Seveso est primordial, avec une partie pour l'industriel et une autre pour les services de l'État ou la collectivité.

Parlons maintenant de la communication et de l'information du public. Clairement, la sirène n'est plus un moyen adapté pour prévenir la population. Fuir, rester, se confiner, personne ne savait ce qu'il fallait faire. Il faut déterminer un périmètre autour de chaque site Seveso dans lequel tous les habitants recevront annuellement une formation obligatoire dispensée soit par des médecins, des communes, des centres de formation, du e-learning ou les CCI.

Il faut recréer du lien entre ces sites et les habitants, redéployer les Journées de l'Industrie que nous faisions, faire des exercices d'intervention grandeur nature. Nous en avons parlé : SMS, radio, boîtiers spécifiques, il faut plancher sur d'autres moyens modernes d'alerte.

Il faut également mettre fin à la possibilité de réduire les périmètres non constructibles autour des sites Seveso, être attentif à certains équipements et certains projets. Je rappellerai la présence d'une aire du voyage en plein milieu du site Seveso. L'éco-quartier Flaubert devait accueillir 15 000 habitants dans les dix prochaines années, à quelques centaines de mètres de sites Seveso.

Il faut aussi avoir une prise en compte de l'« effet domino » entre sites Seveso. Nous devons engager, avec la population, une réflexion sur l'aménagement de notre territoire. Nos villes ne sont pas uniquement des lieux de consommation, d'habitation et de loisirs. Nous devons y conserver des ateliers et des métiers.

Nous devons aussi développer des liens entre les entreprises classées Seveso. À la CCI, nous lançons un Club « Risques industriels, chimiques et technologiques », à l'attention des entreprises Seveso, pour travailler et mutualiser sur la réglementation, les bonnes pratiques, la sécurité, la sous-traitance, la communication avec la filière France Chimie. Nous avons donc écrit hier au directeur général de la préfecture de Rouen qui a une écoute favorable à ce projet.

Pendant cette crise, les réseaux sociaux ont agi comme un poison. Le dernier tweet est considéré comme donnant la vérité, vérité fondée sur une photographie truquée ou sur une fausse information. Dans cette crise, ce média des réseaux sociaux a complètement été abandonné aux mains des « anti-tout » ; « anti-tout » ce qu'il se passe et surtout « anti-tout » dans leurs écrans. Il est urgent de légiférer sur l'usage et l'identité des intervenants dans les réseaux sociaux. Nous intervenons tous aujourd'hui à visage découvert. Vous connaissez mon identité et nous partageons une politesse réciproque. Il est urgent de rétablir les mêmes règles pour les échanges numériques.

En conclusion, dans un contexte où la sensibilité est encore forte et où la réflexion commence à prendre sa place, nous avons vécu et perçu un choc dans la population, un choc émotionnel et psychologique. Les dirigeants d'entreprise agissent avec le souci du sort de leurs équipes, de l'intégrité physique et de la santé de leurs salariés et de toutes les personnes qui vivent en proximité. Nous souhaitons que notre pays reste un territoire industriel et attractif, que nous restions en capacité d'accueillir les industries en toute sécurité dans nos populations, avec une empreinte environnementale la plus faible possible par rapport à nos connaissances scientifiques actuelles.

Les énergies solaires, éoliennes, nucléaires, donc décarbonées seront électriques. Elles seront stockées dans des batteries ou transformées en hydrogène dédié aux piles à combustible. Les sites de production de batteries ou d'hydrogène seront des sites Seveso seuil haut. Dans cette transition énergétique et donc dans la compétitivité de notre prix, dans les choix et arbitrages que nous devons faire aujourd'hui, nous ne pouvons pas nous passer de cette dimension industrielle. Nous devons maîtriser, intégrer et vivre avec ces risques technologiques.

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Alexandre Wahl, directeur général de l'Agence de développement pour la Normandie

Je vais intervenir en dernier et je vais forcément avoir un peu de redondance par rapport aux différents propos qui ont été tenus.

Je voudrais tout d'abord insister sur l'importance de la vocation industrielle de la Normandie. Je pense que c'est l'un des points essentiels. Au-delà de Rouen, qui a évidemment été touché à travers ce cas Lubrizol, l'industrie en Normandie, c'est 20 % de la valeur ajoutée, cinq points au-dessus de la moyenne nationale. C'est à peu près la même chose du point de vue de l'emploi, soit 16 % de l'emploi en Normandie et cinq points au-dessus de la moyenne nationale.

C'est vraiment un fait important, avec en Normandie, 80 sites Seveso dont 49 « seuil haut ». Dans ces seuils hauts ou sites Seveso, vous en avez un certain nombre qui sont effectivement dans la région rouennaise.

Quand nous nous recentrons sur Rouen, les quelques personnes rouennaises que nous avons pu rencontrer suite à cet incendie Lubrizol se sont découvert être des habitants dans un environnement industriel. Je me souviens d'une personne avec qui j'échangeais qui m'a dit : « j'habite à 500 mètres de Lubrizol et j'avais oublié qu'il y avait un « seuil haut » Seveso ici, et finalement on vit très bien avec un « seuil haut » Seveso, jusqu'à l'arrivée d'un incendie ». La plupart des Rouennais sont finalement dans ce cas-là puisque l'histoire de la Métropole de Rouen en matière industrielle est une histoire qui date du milieu du XIXè siècle. Il y a toujours eu de l'industrie à Rouen, avec évidemment une industrie qui est en transition et au-delà de Rouen, c'est toute la Vallée de Seine.

Je reviendrai après sur les détails des indemnisations mais les décisions qui ont été prises encore récemment, notamment avec la tenue du CODERST (conseil départemental de l'environnement et des risques sanitaires et technologiques) hier et les préconisations de la DREAL (direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement), sont plutôt positives dans le sens où une non-réouverture aurait été un signal catastrophique pour l'ensemble de l'économie de la Vallée de Seine. Cela aurait signifié tout simplement que lorsqu'il y a un problème de nature industrielle, un incendie, il n'y a pas de soutien de cette activité industrielle à Rouen, bien sûr, mais sur toute la Vallée de Seine. Le signal qui aurait été envoyé à l'ensemble des industries lourdes qui sont sur la vallée de Seine aurait été le suivant : « Si jamais vous avez un ennui un jour, ne comptez pas sur nous pour vous soutenir ». Cela signifie aussi que tout investissement, toute extension ou tout investissement et création auraient été problématiques, parce que vu de Paris et de partout ailleurs dans le monde, cette chose-là est presque perçue comme un test.

Nous avons rencontré des têtes de réseau, comme nous les appelons : le patron du groupe Normandie logistique et Eric Schnur, le patron « mondial » de Lubrizol. Au-delà de ses propres intérêts business de la reprise d'activité qui était liée à un écoulement des stocks de l'ensemble de ses clients au bout de six semaines, d'où l'importance de cette reprise, même partielle, qui est pour lui un signal à donner à ses clients. Cette reprise de Lubrizol est un signal plutôt positif pour l'ensemble de ces activités en Vallée de Seine.

Concernant les soutiens qui peuvent être apportés aux différentes entités impactées par cette catastrophe, vous avez deux types d'impacts : un impact court terme et un impact long terme. L'impact court terme, c'est ce dont on vient de parler : les commerçants, le fonds d'indemnisation qui a été mis en place par Lubrizol, les agriculteurs qui ont été impactés. La Région a pratiquement sans justificatif octroyé une avance sur indemnisation de 10 000 euros. Nous avons inscrit un chiffre de l'ordre de cinq millions d'euros sur nos budgets pour cette avance.

L'autre élément, Vincent Laudat en a parlé, c'est la dimension garantie. Cette dimension garantie se retrouve à travers la SIAGI (Société interprofessionnelle artisanale de garantie d'investissements) et à travers le fonds régional de garantie que nous avons mis en place avec la BPI (Banque publique d'investissement).

Le dernier élément, c'est notre dispositif ARME (Anticipation, Redressement, Mutations Économiques) mis en place l'année dernière, suite aux évènements des Gilets jaunes. Vous disiez effectivement que nous payons les fournisseurs deux mois après et que c'est à ce moment-là que nous nous apercevons qu'il y a des problèmes de trésorerie. C'est également à ce moment-là que nous avons besoin d'un soutien important, tant en matière de garanties si nous voulons faire un bridge de trésorerie auprès des banques qui ne sont pas toujours prêtes à financer. La trésorerie est toujours très compliquée à financer. ARME permet de faire une avance sous forme de prêt à taux 0, avec un décalage de remboursement de quelques années.

C'est un point important et nous avons bien vu un pic au plus fort des gilets jaunes, en décembre.

Voilà pour les impacts à court terme.

Les impacts à long terme auraient été un mauvais signal à l'ensemble de l'activité industrielle, si jamais il y avait eu des difficultés concernant une reprise d'activité de Lubrizol. Ce signal disant que l'industrie n'est peut-être pas la bienvenue sur la Vallée de Seine, sachant que c'est quand même le coeur de l'activité industrielle, ce sont 2 200 emplois uniquement sur Lubrizol, Nous oublions aussi de dire que Lubrizol est le premier exportateur de Normandie, et qu'à ce titre, il y a toute une activité autour de son activité d'exportation, au-delà de son activité de production.

L'autre impact important est évidemment au niveau de l'attractivité. Ce que nous avons pu voir à la télévision ou sur les réseaux sociaux, c'est que tout le storytelling pendant ou post Lubrizol avait été complètement confisqué par les chaînes d'info en continu. Ce storytelling, c'étaient des Rouennais qui osaient à peine sortir de chez eux pour emmener leurs enfants à l'école, des Rouennais qui étaient calfeutrés chez eux en mettant du mastic autour des fenêtres pour être sûrs de ne pas être asphyxiés. On donnait finalement l'image d'un Rouen sous les bombes. Nous n'avons pas pu nous réapproprier notre propre storytelling.

Différentes propositions consistent à essayer de réenchanter Rouen, c'est bien dommage, juste l'année d'après l'Armada. Personne n'a cité l'Armada mais c'est quand même un point essentiel. L'Armada a été un énorme succès, Rouen progressait dans son image de très forte attractivité au niveau international, au-delà de cette dimension industrielle et la catastrophe Lubrizol se produit !

Comment pouvons-nous donc retrouver cette image de dynamisme et d'attractivité au-delà d'une attractivité touristique ?

Nous y avions réfléchi, je ne sais pas si la Région vous avait contacté sur ces sujets-là. Vous avez évoqué la Fête du Ventre, nous avions réfléchi sur différents éléments. Un des premiers éléments était de faire une énorme fête des voisins, à l'échelle rouennaise, pour montrer que les Rouennais sont dehors et vivent bien ensemble et que tout ce qui peut être confisqué comme storytelling à l'extérieur n'existe pas. Nous voulions montrer que les Rouennais sortent et surtout faire un lien avec la gastronomie puisque nous avons vu de quelle façon les choses ont été impactées au niveau de la gastronomie. La saison ne s'y prête pas tellement, en décembre et c'était peut-être un petit peu tôt puisqu'il y avait une peur qui existait. Quelqu'un pour qui je travaille a dit : « La parole publique et politique n'est plus crédible ».

Nous avons pourtant vu que les services de l'État ont tout fait, peut-être avec quelques maladresses par moments, en matière de transparence, mais cela ne suffit pas, parce que la parole publique est devenue maintenant non crédible.

Il faut essayer de voir de quelle façon, en attendant que la psychose liée à la pollution et justifiée par moments puisse être évacuée, nous pouvons faire en sorte que les Rouennais se réapproprient leur propre ville. Il s'agit du « vivre ensemble ». Il faut aussi que les Rouennais puissent réfléchir sur la part de l'industrie et la place de l'industrie dans leur propre ville pour la resituer sur un axe plutôt Vallée de Seine. Certaines des initiatives citées par Vincent sont plutôt bonnes car elles essaient de faire de cette catastrophe une opportunité.

Comment cet endroit, avec autant de sites Seveso, y compris « seuil haut », pourrait-il devenir le signe tant national, voire international dans le domaine du risque industriel ? Au Havre, ils ont fait quelque chose comme cela avec une association qui s'appelle Synerzip-LH et qui se focalise sur tout ce qui est risques industriels. Il faudrait en faire quelque chose d'un peu académique, avec une réflexion citoyenne sur le sujet.

Il s'agirait de préciser aux Rouennais qu'une grosse part du PIB de la Métropole provient de cela, que l'industrie est aussi une industrie en transition et qu'elle a complètement vocation à devenir une industrie durable à terme.

Certaines industries sont plus en retard que d'autres évidemment, mais en tout cas, c'est l'objectif. D'ailleurs on les y oblige de plus en plus, à travers une réglementation de plus en plus importante. Après, il y a ce que l'on projette vers l'extérieur, ce qui est plus compliqué. Je ne sais pas si la catastrophe de Lubrizol a eu un impact de niveau européen. Peut-être que vu de Rouen, nous en avons l'impression mais est-ce que cela a eu un vrai impact, je ne sais pas... Je n'ai pas de réponse à ma question parce que je n'ai pas regardé cela en détail, mais il faut voir comment nous pouvons projeter une image différente s'il y a eu un impact au niveau européen.

Je crois que le Premier ministre ou le Président de la République, lors de leur venue à Rouen, avaient évoqué la possibilité de faire venir des grandes rencontres internationales à Rouen pour essayer d'avoir une image moins liée à Lubrizol.

D'autres sujets avaient aussi été abordés comme celui de la capitale culturelle européenne. Cela avait été un vrai sujet avec une dimension peut-être de théâtre de rue, quelque chose qui fasse revivre Rouen en matière d'image vis-à-vis de l'extérieur, autrement qu'à travers cette catastrophe de Lubrizol. Mais il n'y a pas de solution miracle. Cela ne pourra se faire qu'ensemble.

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Je voudrais simplement quelques précisions qui appellent sans doute des réponses brèves. La première concerne les indemnisations, y a-t-il un plafond pour chacun des commerçants et les artisans et si tel est le cas, quel est le niveau de ce plafond ?

Vous avez évoqué tout à l'heure, M. le président des Vitrines de Rouen, la Fête du Ventre, sans doute aussi la Parade de Noël. Ces évènements qui viennent de se dérouler ont-ils connu une fréquentation plus faible qu'habituellement ou est-ce que vous avez plutôt le sentiment que tout cela n'a pas n'a pas été percuté par l'évènement que nous évoquons ?

Vous avez évoqué les uns comme les autres, notamment le président de la CCI, mais aussi la chambre de métiers et de l'artisanat, la question du rebond, d'une communication ensemble. C'est vrai aussi pour les Vitrines de Rouen. Avez-vous été en contact, d'une façon ou une autre, avec les acteurs économiques de Toulouse qui ont vécu un enjeu de rebond important ? Avez-vous aussi essayé de voir ailleurs comment ils ont abordé ce genre de questions ? Sans aller à Toulouse, nous parlions de la culture du risque au Havre. C'est une proposition que vous avez faite, Vincent Laudat, en ce qui concerne l'association des exploitants de sites Seveso. Le fait de travailler ensemble, même avant d'arriver au Havre, il y a le secteur de Port-Jérôme, où il y a un travail en commun entre industriels, mais aussi vers la population, en termes d'attitude et de comportement à avoir lorsque l'on est confronté à un accident industriel.

J'ai une dernière question concernant l'attractivité. Vous avez, les uns et les autres, dit des choses qui paraissent essentielles : le fait de communiquer ensemble, avec un message fort, sans attendre trop longtemps. Je voudrais rebondir sur ce que disait Vincent Laudat, sur, si j'ai bien compris, une forme d'« Airbus de la batterie », en quelque sorte, en tout cas d'ambitions que pourrait avoir le territoire de se situer très vite sur une ambition industrielle tournée vers l'avenir. J'ai cru comprendre que l'Europe avait octroyé des fonds répartis entre différents pays. Pensez-vous que nous pourrions collectivement porter un dossier de cette nature qui serait positif pour l'avenir, indépendamment des éléments que vous avez cités les uns et les autres ?

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J'ai une question sur le plafond des indemnisations. Je vais faire un parallèle avec Le Havre, où les travaux du tramway continuent. Il y avait eu des plafonds et nous savons bien que parfois les plafonds ne correspondent pas tout à fait à la réalité de la perte du chiffre d'affaires et de l'activité. Je pense que dans ce cas-là, il y a des mesures d'urgence mais peut-être aussi des mesures à plus long terme parce que redonner des signaux d'attractivité et redonner envie de venir à Rouen est quelque chose d'important mais c'est aussi un travail de long terme.

Il y a quelques mesures d'urgence mais aussi des mesures à plus long terme. J'imagine que vous y travaillez collectivement.

Pour rebondir sur ce que vous avez un peu tous dit, quel est selon vous le meilleur acteur qui pourrait porter ce message commun ? Parce qu'il va falloir le désigner.

Est-ce la Chambre de commerce, l'Agence de développement, ni l'un ni l'autre mais quelqu'un de complètement extérieur choisi collectivement par vous ? Je crois assez au message partagé, parce qu'il a un poids.

Monsieur le président de la Chambre de commerce, vous avez dit beaucoup de choses. L'intérêt de ce genre de mission, c'est bien sûr d'accompagner, d'aider, de comprendre pour essayer de prendre des mesures pour les autres. Je crois que vous avez chacun dit que la culture du risque n'existe pas en France et qu'il va bien falloir que l'on apprenne à avoir cette culture, parce que nous ne savons pas comment réagir, parce que nous n'avons pas fait évoluer les moyens en pensant que cela n'arriverait jamais. Mais quand cela arrive, c'est trop tard. La culture du risque est une chose sur laquelle nous allons aussi devoir travailler collectivement, pas à l'échelle de notre territoire, mais bien à celle de la France et peut-être même parfois à celle de l'Europe, parce que je pense que Lubrizol ne s'est pas arrêté aux portes de la France.

En ce qui concerne la mutualisation des moyens, j'ai écrit en ce sens au préfet. Je l'ai déjà dit lors d'une autre audition, mais j'ai eu l'occasion d'aller sur un remorqueur où l'on m'a expliqué leur intervention. Cette question de mutualisation des moyens est intéressante. Il faut d'abord faire un état des lieux, parce que beaucoup d'entreprises possèdent des moyens que personne ne connaît. Mais nous allons beaucoup plus loin que ça, sur ce sujet, le colonel des pompiers me faisait remarquer qu'en cas de mutualisation des moyens, le responsable est le SDIS (service départemental d'incendie et de secours).

Nous avons mis en lumière plusieurs sujets sur lesquels nous devrons collectivement travailler pour apporter des réponses qui, nous l'espérons, ne serviront jamais, mais pour que nous puissions mettre en commun des moyens publics et privés pour être capables de réagir et pour peut-être investir dans des choses dont on espère qu'elles ne serviront pas. Ne pas avoir la bonne bouche d'égout au bon endroit, ne pas avoir assez de..., cela paraît assez hallucinant et nous revenons à notre problématique de culture du risque.

Nous ne savons pas prendre en charge cette culture du risque.

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Je me permets, pour commencer mon propos, un aparté sur le fameux « Airbus de la batterie », puisque cela fait des mois que je me bats personnellement pour qu'effectivement la Normandie puisse bénéficier de cette innovation technologique et puisse avoir une usine de batteries. Vous savez que le ministre de l'économie et des finances, M. Bruno Le Maire, a milité au niveau européen pour que l'Union européenne accepte que des subventions d'État puissent intervenir pour monter une filière de batteries.

La première pierre d'un démonstrateur va être posée en janvier 2020, en région Nouvelle Aquitaine, avec Saft, qui appartient à Total, comme donneur d'ordre pour générer ce démonstrateur. Une usine doit être installée en France, d'ici 2020-2021. La Région Normandie se porte volontaire, je sais aussi que France Chimie-Normandie porte ce projet et cela fait des mois que je les soutiens dans cette initiative. Je pense que c'est cohérent avec l'image de la Normandie, qui est très présente sur le secteur automobile, avec évidemment Renault Cléon, mais également Alpine à Dieppe, et encore d'autres usines chez des équipementiers.

J'ai également quelques questions à vous poser.

Concernant l'attractivité, je pense qu'il ne faut pas attendre 2028 et l'éventuelle désignation de Rouen comme « Capitale européenne de la culture » pour agir sur l'attractivité parce que potentiellement, nous serons déjà morts d'ici là. Je pense qu'il faut aller beaucoup plus vite et j'ai la même question que notre collègue Mme Firmin Le Bodo : quel doit être le chef de file de cette volonté d'agir pour l'attractivité de Rouen en essayant d'avoir un timing sur l'année 2020 ? Est-ce que vous savez ou non, si la Métropole de Rouen a déjà commencé à lancer le sujet, à essayer de réunir les acteurs autour de la table pour réfléchir sur ce sujet-là, également en lien avec d'autres personnes et d'autres acteurs économiques et publics pour subventionner cette initiative et faire en sorte que nous puissions y arriver ?

Sur les centres incendie mutualisés que vous proposiez M. Laudat, vous savez déjà que les acteurs industriels peuvent abonder les moyens des SDIS pour faire en sorte que les équipements qui sont achetés par le SDIS correspondent bien à l'ensemble des usages des usines sur notre territoire. Nous avons notamment l'exemple d'une usine où le SDIS avait prévu d'acheter des échelles, qu'une entreprise a financées de sa poche pour que l'échelle soit beaucoup plus grande, pour permettre de répondre à ces problématiques-là. Nous avons un certain nombre d'émulseurs de mousse sur le territoire, vous indiquiez qu'il y en avait un sur l'aéroport de Rouen -Vallée de Seine. Il en existe aussi quelques-uns au Havre, sur Exxon Mobil notamment.

En fait, est-il vraiment nécessaire de racheter les choses ou, en cas de situation d'urgence, suffit-il simplement que le SDIS puisse mobiliser ces moyens qui sont issus du privé à destination de ces situations, sachant que dans les faits, c'est ce qu'il s'est passé sur Lubrizol, puisqu'il y a eu des moyens publics qui sont venus d'autres départements pour accompagner les forces du SDIS 76 ainsi que des moyens privés pour faire en sorte que nous puissions répondre à cette problématique-là.

Qui dit centre incendie mutualisé à la charge du privé, dit forcément charge supplémentaire pour une entreprise. En tant que CCI, soutenez-vous cette initiative, sachant que cela peut peut-être faire un peu doublon par rapport à ce qui existe déjà et qui peut simplement être mutualisé ?

M. de Montchalin indiquait qu'il faudrait, dans cette deuxième partie d'indemnisations, pouvoir traiter ce qui ne rentrait pas dans le cadre. Est-ce que ce sont des discussions que vous avez déjà eues avec Lubrizol, avec Exetech ou avec la préfecture, pour qu'il y ait une espèce de voiture-balai pour essayer de récupérer tous les dossiers qui sont un peu en déshérence parce qu'en dehors du cadre, à ce stade ?

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Il nous reste quelques minutes pour répondre brièvement aux différentes questions.

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Christophe Doré, président de la Chambre des métiers et de l'artisanat de Seine-Maritime

Pour les indemnités au niveau de l'artisanat, il faut tout d'abord rappeler que lors de la toute première réunion, Lubrizol n'avait même pas imaginé qu'il pourrait traiter une multitude de petits dossiers. Sauf que pour nous, c'était la priorité. Je peux le dire une nouvelle fois, le secrétaire général de la préfecture est monté au créneau en disant : « Non ! Les artisans doivent être indemnisés, même pour des petits montants ». Cela a été très bien fait mais au départ, pour Lubrizol, c'était un peu inimaginable, parce que cela allait faire un grand nombre de dossiers.

Une note me dit qu'au 27 novembre, nous étions sur un montant moyen de 1 750 euros. Cela peut paraître faible, néanmoins quand vous êtes une entreprise artisanale de petite taille, vous avez parfois un ou deux collaborateurs. Je crois que nous sommes sur des moyennes de 800 euros maximum par jour.

Pour l'artisanat, nous rentrons pour le moment dans les enveloppes. Je pense que c'est beaucoup plus compliqué pour mes collègues à côté.

Je voudrais juste revenir sur l'attractivité sur le territoire. Je le dis et je le répète, l'impact a été fort bien sûr, il est inconcevable que nous n'ayons pas ce regard privilégié sur Rouen mais il faut aussi que nous élargissions ce regard en termes d'attractivité. Pourquoi ? Parce que j'ai aussi eu des retours de mon collègue de Forges-les-Eaux, où ils ont fortement senti l'impact sur l'attractivité touristique. Il faut que nous élargissions un peu le panorama.

Quant aux acteurs, je pense que ce sont des acteurs de la proximité, des acteurs rouennais comme la Métropole, la Chambre des métiers et la CCI. Nous sommes les acteurs qui peuvent accompagner cette attractivité.

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Fabrice Antoncic, président de l'association Vitrines de Rouen

Le plafond d'indemnisation était fixé à 8 000 euros maximum par commerce, ce qui répond certainement, comme le président Doré l'a évoqué, à la situation de 80 % des commerçants. Pour les 20 autres % qui sont dans des situations différentes, jusqu'à 50 salariés, les besoins d'indemnisation sont plus importants et l'indemnisation a bloqué en termes de timing et de suivi. Il n'y a pas de volonté de blocage des dossiers mais il n'y a pas de méthode. Je pense qu'une réunion, comme pouvait le dire Matthieu de Montchalin tout à l'heure, pour faire avancer ces dossiers de « queue de peloton », devrait passer en priorité, puisque finalement, ce sont les enjeux les plus graves et les plus importants. Ce sont les enjeux des emplois. Je rappelle que le commerce à Rouen, ce sont 10 000 emplois directs ou indirects et qu'il y a déjà eu pas mal d'emplois perdus sur les premiers jours, notamment tous les contrats de renfort que nous pouvons avoir suivant les activités.

Les quais ont été très impactés avec des commerces qui ont pu perdre jusqu'à 200 000 euros sur les premières semaines de leur activité, nous sommes aujourd'hui encore en attente sur la manière de les indemniser puisque le seuil de 8 000 euros est largement dépassé quand vous avez 30, 40, 50 personnes à payer. Vous avez une indemnisation maximum pour le nettoyage de 500 euros, ce qui fait finalement très peu et vous devez avoir justifié votre facture. A un moment où vous n'avez pas la trésorerie et où vous êtes plutôt en train de faire un devis, parce que vous avez soit du nettoyage soit des changements de stores. Cela correspond souvent à des enveloppes qui sont supérieures à ce montant.

Nous avons aujourd'hui une vraie problématique autour de l'avancement des dossiers les plus urgents et les plus importants.

Sur la partie évènements comme la Parade ou la Fête du Ventre, les habitants et les clients ont répondu présent. Aujourd'hui, il n'y a pas eu de baisse d'activité et je pense que cela a servi à redonner envie de venir. Dès que nous faisons des événements de grande ampleur, nous sommes capables d'attirer du monde sur la partie rouennaise.

Un évènement qui pourrait être majeur et qui aurait une vue internationale serait une vraie Fête Jeanne d'Arc, qui pourrait s'organiser sur toute la Normandie. Au départ de Dieppe, il y a des choses à faire. Nous pourrions rayonner, elle est connue dans le monde entier. Je pense qu'il faudrait que tous les acteurs concernés puissent se mettre autour de la table pour organiser quelque chose à hauteur de cet évènement.

Au niveau des aides, je crois que Toulouse, pendant les gilets jaunes, avait organisé la possibilité d'avoir des indemnisations, mais aussi des possibilités de prêts ou d'accompagnement qui avaient été organisées avec BPI et avec les banques. Là aussi, il serait bien de passer des messages aux banques ou aux instituts financiers, pour nous aider dans cette période. C'est aujourd'hui l'inverse qui se passe car ils ne peuvent pas supporter les entreprises quand il n'y a pas de trésorerie puisque ce serait de l'abus d'accompagnement, ils ont aussi des contraintes.

Je pense qu'il faudrait pouvoir donner des possibilités d'aller vite dans les dossiers de dédommagement, notamment sur la partie exceptionnelle pour rassurer et donner une meilleure visibilité dans les semaines et les mois à venir.

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Matthieu de Lombard de Montchalin, président des Vitrines de Rouen depuis la création de l'association

Je voudrais dire que nous avons la chance que Lubrizol soit un intervenant de bonne foi, responsable et solvable.

Je pense que votre mission devrait se poser la question de savoir ce qui se serait passé si ce n'était pas le cas. Nous pouvons imaginer qu'une usine Seveso « seuil haut » qui connaît le même type d'incident ne soit pas la filiale d'un groupe mondial avec des ressources importantes. La question de l'indemnisation par les assurances se pose alors de nouveau, parce que c'est quand même cela le plus logique. C'est quand même ce que ce qui est le plus simple, c'est-à-dire que les assureurs savent indemniser à hauteur d'un préjudice, ils ont des règles, ils ont des gens qui savent le faire. Je pense qu'il faudrait se reposer la question de la catastrophe technologique. Nous sommes face à quelque chose qui peut se reproduire, qui s'est déjà produit plusieurs fois et la logique de notre société est que ce soit le système de l'assurance qui prenne en charge. Évidemment, il y a des coûts et il faudra bien que quelqu'un paie, mais un assureur sait se retourner contre celui qui a commis une faute ou, en tout cas, qui est à l'origine d'un sinistre et il sait éventuellement faire appel à des fonds de solidarité nationale.

Je pense que le travail de la préfecture n'est pas de faire des règles d'indemnisation. Nous compliquons finalement les choses alors qu'il y a des gens dont c'est le métier et qui savent le faire.

Sur tout ce qui concerne l'attractivité, c'est évidemment la métropole qui me semble être l'acteur le plus rassembleur puisque tout le monde travaille déjà avec la métropole. J'entends ce que dit M. Doré, c'est-à-dire qu'il faut probablement aller plus loin qu'uniquement Rouen, mais la Métropole couvre un périmètre qui est plus large que Rouen et elle est capable de travailler avec la Région.

En ce qui concerne les aides et les prêts, et notamment ce qui a été fait à Toulouse pendant les gilets jaunes, je pense que la Région met en place des fonds qui, généralement, ne sont pas utilisés. Aucun commerçant ne sait comment faire appel aux fonds de la Région pour la trésorerie. En revanche, si la Région disait à BPI France : « Je mets à votre disposition un fonds de cinq millions d'euros que vous pouvez utiliser pour de la garantie bancaire court terme » alors BPI France, qui a donné délégation aux banques pour utiliser des fonds, pourrait permettre à chaque banque d'une entreprise de prêter à son entreprise, celle qu'elle connaît, celle à qui elle a l'habitude de faire confiance et de prêter des fonds supplémentaires ou en tout cas de garantir ces fonds. Là encore, nous ne recréons pas une nouvelle commission, un nouveau dossier, un nouveau système. Nous sommes dans le fonctionnement normal de l'économie avec une collectivité qui dit, à un moment donné : « Je viens garantir un risque supplémentaire, mais je permets aux acteurs habituels du système de faire leur métier ».

Je pense que chaque fois que nous faisons cela, nous facilitons la vie de tout le monde parce qu'un commerçant sait parler à son banquier mais ne sait pas remplir un dossier administratif.

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Vincent Laudat, président de la Chambre de commerce et d'industrie (CCI) Rouen Métropole

Je voulais juste rappeler, qu'au moment de l'incendie, 8 000 fûts ont brûlé au niveau de Lubrizol et Normandie Logistique. 55 % étaient sur le site de Lubrizol, 45 % sur le site de Normandie Logistique. En effet, l'idée de l'assurance est une idée pertinente. La seule chose, c'est qu'il faut que l'enquête puisse déterminer un responsable et qu'après les assurances indemnisent. Imaginez que Lubrizol et Normandie Logistique soient victimes d'un acte de malveillance extérieure, c'est bien ce que M. le préfet a demandé pour la réouverture de Lubrizol, c'est que dans le plan de prévention des risques, Lubrizol puisse prendre en compte un incendie d'origine extérieure. C'est encore un dossier à travailler par rapport à l'indemnisation. En effet, Normandie Logistique n'a pas les moyens de Lubrizol pour pouvoir assumer et c'est un dédommagement qui a été engagé par Lubrizol.

Toulouse a rebondi par rapport à Airbus, par rapport à l'aéronautique, je suis donc en effet à fond derrière le projet d'« Airbus des batteries et de filière des batteries ». Nous avons lancé il y a quinze jours avec la métallurgie, une filière de batteries. C'est un projet structurant pour l'avenir. Sachant aussi que nous avons un parc nucléaire important qui est utilisé en journée pour l'industrie mais très peu utilisé de nuit. Il pourrait être utilisé pour faire de l'hydrogène pour les piles à combustible.

La Normandie est une terre d'énergie, gardons cela avec de nouvelles énergies.

Je pense que la culture du risque doit être travaillée avec les habitants par rapport aux sites industriels, mais aussi par rapport aux pompiers. Il serait important de faire visiter des sites industriels mais aussi que nos habitants se rendent compte qu'en face, nous avons mis les moyens de protection en organisant des visites au sein de casernes de pompiers qui sont en ordre de marche pour des catastrophes technologiques de cette nature.

Je souscris à la proposition de Matthieu de Montchalin concernant le rôle central de la métropole. Il est important de faire disparaître rapidement sur les réseaux les images négatives de Rouen. Il est important que nous réussissions collectivement cette période de Noël et que nous travaillions en commun sur l'attractivité pour notre métropole et l'axe Seine.

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Alexandre Wahl, directeur général de l'Agence de développement pour la Normandie

Concernant les prêts, nous nous adressons aux têtes de réseau des CCI et CMA. Il y a deux principaux éléments. Le premier est la garantie, vous en avez parlé, cela se passe à travers la SIAGI, que nous avons « redotée » d'un montant substantiel et qui est à la main finalement des têtes de réseau représentant ces artisans commerçants que sont notamment les Chambres de métiers. Cette orientation et ces demandes, puisque vous êtes en contact direct avec vos adhérents affiliés, doivent se faire de cette façon-là. Nous ne pouvons pas avoir une information individuelle, nous sommes obligés de passer à travers les têtes de réseau.

Le prêt TPE croissance a été remodifié à notre demande et est opéré par BPI. C'est un prêt sur Internet, trois liasses fiscales où l'on dit pourquoi on a besoin de ces 50 000 euros. Il est vrai que nous avons du mal à faire accepter à BPI que ces prêts soient aussi pour des entreprises de moins de trois salariés, parce que de leur point de vue, c'est plus risqué, mais cela existe.

Nous avons effectivement un petit trou dans la raquette au niveau des prêts, mais nous avons ce qu'il faut au niveau des garanties entre ce que propose la SIAGI et ce que propose ARME, même si c'est peut-être un peu plus compliqué pour les artisans commerçants de s'adresser directement à la Région.

Un dernier point sur les batteries. Nous étions hier matin avec M. Senard, le président de l'Alliance et avec Hervé Morin, pour évoquer ces sujets. Celui des aides européennes, en tout cas des aides d'État débloquées par l'Europe à hauteur de plusieurs milliards, dont nous ne savons pas encore exactement quelle sera la part française et si, sur cette part française, il y a de la place pour plusieurs projets, sachant que celui qui est porté très fort par le ministre Le Maire est celui qui concerne Saft principalement, à cheval sur le Rhin, et sachant aussi qu'une usine expérimentale a déjà été montée en Nouvelle Aquitaine, du fait de la présence forte de Total dans cette région.

Avec M. Senard, nous envisageons d'abord de savoir quelle est la part de ces subventions européennes qui pourraient alimenter un autre projet que cet Airbus franco-allemand, puisqu'on parle d'Airbus, c'est franco-allemand, même si les Britanniques et d'autres pays sont impliqués dedans, mais les Britanniques ne vont plus tellement avoir droit au chapitre sur ce sujet ! La question est de savoir si des partenaires naturels de Renault tels que LG, le groupe coréen, sont susceptibles, à travers une co-entreprise, de pouvoir s'installer en Normandie, à Rouen Métropole ou ailleurs, sachant que Sandouville est aussi un très bon lieu en matière d'implantation. Renault est de toute façon un peu présent dans la région.

L'autre élément est de savoir vers quelle technologie se tourner. Vous savez que pour les batteries, il y a la troisième génération, celle du lithium-ion, mais il y a aussi cette quatrième génération sur laquelle nous pourrions avoir un vrai avantage compétitif, sachant que nous sommes déjà très, très, très, très loin derrière les Asiatiques concernant les batteries lithium-ion et que nous ne pourrons jamais rattraper notre retard sur le sujet. Nous ne serons que des assembleurs, en tout cas sur ces batteries de troisième génération.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Merci, cela pourra inspirer une autre mission d'information, vous avez déjà quasiment écrit une introduction.

Nous allons vous remercier de votre présence et surtout de votre contribution. N'hésitez pas si vous avez, d'ici la fin de notre mission, des éléments ou des propositions à nous transmettre.

L'audition s'achève à dix heures cinquante.

Membres présents ou excusés

Mission d'information sur l'incendie d'un site industriel à Rouen

Réunion du jeudi 12 décembre 2019 à 9 h 30

Présents. - M. Damien Adam, M. Christophe Bouillon

Excusé. - M. Pierre Cordier