Audition, en audioconférence, de M. Éric Chevallier, directeur du Centre de crise et de soutien du ministère de l'Europe et des affaires étrangères, et de M. Axel Cruau, coordonnateur de la task force coronavirus
La séance est ouverte à 15 heures.
Mes chers collègues, je suis heureuse de vous entendre et d'être avec vous dans ce moment de crise. Il est très important que nous continuions de travailler, d'assumer nos missions et surtout de maintenir le lien entre nous. Nous vivons une crise absolument inédite : aujourd'hui sanitaire, avec cette terrible pandémie, elle sera demain économique et sociale, et posera des questions de fond sur lesquelles nous reviendrons lors de prochaines réunions.
Aujourd'hui, c'est de l'urgence que nous traitons, en France, en Europe et dans le monde. Cette crise risque de toucher les plus fragiles – nous le voyons dans nos établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes. Il faut vraiment que la solidarité s'exprime, même si nous nous inquiétons de la voir absente à l'échelle internationale et européenne. Je suis particulièrement préoccupée par le cas de l'Afrique : la solidarité ne devra pas seulement y prendre la forme d'une aide financière, il faudra la compléter par des moyens en personnel et en matériel et sans doute prévoir la création d'un couloir humanitaire. Enfin, cette épidémie rajoutera une crise à celles que connaissent déjà les zones de guerre et les zones déstabilisées dans le monde : c'est dire à quel point elle nécessite une mobilisation totale.
Je suis très d'heureuse d'accueillir Éric Chevallier, directeur du centre de crise et de soutien du ministère de l'Europe et des affaires étrangères, accompagné d'Axel Cruau, coordinateur de la « task force coronavirus ». Je vous remercie vivement tous les deux, messieurs, au nom de toute la commission, de nous accorder ce moment de votre temps si précieux, alors que vous vous consacrez à la solidarité nationale vingt-quatre heures sur vingt-quatre.
Nous allons vous faire part de notre perspective sur la pandémie de Covid-19 et sur ce que nous essayons de faire. Axel Cruau, qui anime la « task force coronavirus », va vous expliquer la dynamique de l'épidémie et certaines de ses conséquences géostratégiques et économiques. Je compléterai son intervention en décrivant son impact sur les crises existantes au travers de deux exemples : la zone Syrie-Irak et le Sahel. Nous passerons enfin à ce qui nous occupe le plus actuellement, à savoir la situation de nos compatriotes à l'étranger.
Un point pour commencer sur l'épidémie : nous en sommes aujourd'hui à plus de 400 000 cas et plus de 18 000 décès dans plus de cent soixante-dix États et territoires. Ce qui malheureusement est le plus intéressant, c'est la cinétique de cette épidémie. Selon le directeur général de l'Organisation mondiale de la santé (OMS), il a fallu soixante-sept jours pour atteindre 100 000 cas, onze jours pour atteindre 200 000 cas et quatre seulement pour atteindre 300 000 cas… Nous sommes dans une phase d'accélération mondiale. Si la situation en Chine s'améliore, c'est-à-dire qu'il n'y a pratiquement plus de cas domestiques mais uniquement des cas réimportés – le Hubei et bientôt sa capitale, Wuhan, vont lever leurs mesures de confinement –, ce n'est absolument pas le cas dans d'autres régions. Comme vous le savez, l'Europe est devenue l'épicentre de l'épidémie : hier matin, nous étions à plus de 180 000 cas en Europe et plus de 10 000 morts.
L'ensemble des pays adoptent des mesures prophylactiques similaires pour combattre l'épidémie, comme la fermeture des frontières ou le passage en confinement. L'Inde ayant décidé hier de confiner sa population, pratiquement un tiers de l'humanité est désormais en confinement, soit près de 3 milliards de personnes. Les mesures sont de plus en plus dures dans un certain nombre de pays pour tenter d'assécher l'épidémie.
Il y a bien sûr des inquiétudes sur l'état de l'économie. Certaines zones ont réagi pour tenter de faire face : une bonne nouvelle est arrivée dans la nuit avec l'accord aux États-Unis entre démocrates et républicains sur un paquet d'aides qui, initialement, devait être de 1 000 milliards de dollars et qui approcherait en fait les 2 000 milliards de dollars. Les aides iront tant aux petites et aux grandes entreprises qu'aux personnes, au système de santé, etc. Les bourses ont du reste commencé à saluer ce mouvement : Wall Street était en hausse hier avant même l'annonce de l'accord ; le Nikkei enregistrait ce matin un rebond de plus de 8 %.
La coordination internationale doit se poursuivre. Une réunion du G7 a eu lieu hier ; il y aura bientôt une réunion du G20. Du côté européen, les réactions sont malheureusement insuffisantes : la réunion de l'Eurogroupe hier n'a pas donné lieu à un accord ; on peut espérer que la réunion du Conseil européen permettra de fixer une ligne commune.
Nous partageons vos inquiétudes concernant les grandes zones du monde, en particulier sur l'Afrique ; nous y reviendrons tout à l'heure.
Du côté du ministère des affaires étrangères, nous nous adaptons au jour le jour et heure par heure à la situation, avec une immense mobilisation du Centre de crise et de soutien, ainsi que de l'ensemble des services en interministériel, au service de nos communautés françaises et de la continuité de notre réaction diplomatique. Nous faisons le maximum pour traiter l'ensemble des situations personnelles et répondre aux inquiétudes. À ce sujet, la task force a désigné une personne spécifiquement chargée de prendre en compte tous les cas particuliers que vous-mêmes faites remonter, afin de fluidifier au maximum le processus.
Au-delà, même si nous sommes actuellement au coeur de la tragédie, il faut commencer à préparer la sortie de crise : comme en Chine, nous aurons vraisemblablement une problématique de sortie du confinement : il faudra impérativement éviter l'importation de nouveaux cas, qui prolongerait l'épidémie. L'État y travaille sous l'égide du secrétariat général de la défense et de la sécurité nationale, mais cela exige un effort collectif d'anticipation : nous devons réfléchir aux jours d'après, c'est-à-dire à tout ce qui pourrait changer dans notre vie économique et sociale, et à toutes les conséquences qui pourraient en découler sur le plan national comme sur le plan géopolitique. Une réflexion est en cours au ministère des affaires étrangères ; elle doit être commune à l'ensemble des ministères et le Parlement aura un rôle à jouer en ce domaine : sa réflexion sur les leçons que nous devrions tirer de cette crise nous serait très précieuse.
L'épidémie est en train de compliquer considérablement la situation dans un certain nombre de crises déjà très actives dans le monde. Ainsi, en Syrie et en Irak, le risque de diffusion du Covid-19 dans les zones du Nord-Ouest syrien, où sont massés plusieurs millions de Syriens dans des conditions extraordinairement difficiles sur le plan humanitaire, rendrait la situation potentiellement encore pire. À la demande du ministre, le centre de crise a d'ailleurs décidé de participer à l'effort mené par l'OMS et les organisations non gouvernementales (ONG) pour mettre en place un programme dédié au Covid-19. Dans le Nord-Est syrien, l'essentiel de l'aide, et singulièrement l'aide française, transitait jusqu'à présent par un point de passage situé tout au nord de la frontière entre le Kurdistan irakien et la Syrie, fermé depuis hier ; nous avons alerté lundi les ONG françaises encore en mesure de travailler sur place, et qui apportaient une aide absolument déterminante, en les pressant de repasser très vite du côté du Kurdistan irakien. Même si elles conservent du personnel local, qui peut continuer à mener certaines activités, cela porte directement atteinte à leur capacité à porter assistance à la population. C'est dans ce contexte très compliqué que l'enveloppe financière spéciale de 50 millions d'euros décidée par le Président de la République en faveur de la Syrie intégrera en 2020 une dimension Covid-19.
L'Afrique est évidemment le continent qui nous préoccupe le plus : si le nombre de cas recensés est pour l'heure le plus faible de tous les continents, il est évident que cela est très largement lié à la capacité de diagnostic. L'épidémie arrive progressivement, avec un pays qui semble malheureusement particulièrement frappé dans la zone : le Burkina Faso, qui n'avait vraiment pas besoin de cela, compte tenu de ce qu'il se passe dans le Sahel. La situation, déjà extrêmement préoccupante, devient très problématique : plusieurs de ses dirigeants ont été testés positifs au Covid-19, certains ont même déjà succombé.
Ces deux exemples, mais j'aurais pu les multiplier, montrent qu'il ne faut pas se contenter de se concentrer sur la question, certes majeure, de la situation de nos ressortissants à l'étranger : il faut bien comprendre que tout cela a un impact plus large et ajoute souvent de la crise à la crise.
Pour ce qui concerne nos ressortissants, il faut distinguer deux situations bien différentes : celle des ressortissants français qui étaient en voyage et celle de nos ressortissants résidents.
S'agissant des premiers, je rappelle tout d'abord, puisque la cellule de crise est chargée des conseils aux voyageurs, que nous avons, dès le 2 janvier 2020, c'est-à-dire très tôt dans le développement de cette épidémie, émis le premier conseil aux voyageurs faisant état de l'émergence d'une nouvelle pathologie infectieuse en Chine. Depuis, nous avons modifié à plus de cinq cents reprises nos conseils aux voyageurs pour tenir compte tant de l'évolution de l'épidémie que des mesures prises dans les pays pour y répondre, dont les restrictions de déplacement et le confinement. Dès fin février, de très nombreux pays commençant à prendre des mesures de restriction diverses et variées, nous avons émis un conseil générique à destination de l'ensemble des voyageurs français, publié en alerte de dernière minute, pour les inviter à différer dans toute la mesure du possible leurs voyages. Autant d'éléments qu'il ne faut pas oublier dans le contexte actuel.
Désormais, 173 pays, soit pratiquement tous les pays du monde, ont adopté des mesures restrictives, notamment à l'égard des ressortissants français ou des personnes quittant le territoire français. Du coup, environ 130 000 Français voyageant pour des raisons touristiques ou professionnelles se sont retrouvés la semaine dernière sans solution de retour, ou en tout cas avec des possibilités de retour fortement compromises. Le centre de crise a donc mis en place un dispositif dédié : nos équipes se relaient, à raison de trente agents par rotation, pour assurer jour et nuit une réponse téléphonique ; des dizaines de milliers d'appels ont été enregistrés. Les ambassades et les consulats se sont également mobilisés pour répondre à nos compatriotes et mis en place cellules de crise et permanence téléphonique.
Mais nous ne nous sommes pas contentés de collecter les préoccupations de Français et d'essayer de donner des informations : nous avons décidé, à la demande du ministre, de mobiliser tous les postes diplomatiques afin de faire remonter les besoins recensés pays par pays, parfois ville par ville. Ce bilan nous arrive de l'ensemble des pays du monde tous les jours à onze heures du matin ; ensuite, nous traitons les demandes, d'abord par des démarches diplomatiques pour obtenir des reports des mesures d'interruption des liaisons aériennes, ensuite en essayant de trouver des vecteurs aériens susceptibles de répondre aux besoins.
Nous avons donc mis en place un dispositif vingt-quatre heures sur vingt-quatre avec Air France, dont je tiens à souligner l'incroyable détermination et la relation parfaite qui s'est instaurée entre nous. Le pont ainsi établi avec Air France, mais aussi avec d'autres compagnies, nous permet de maintenir des capacités de liaisons ville par ville, pays par pays, en dépit du fait que les ressources humaines des compagnies aériennes sont considérablement contraintes par les effets du Covid-19 ; notre souci était de maintenir la capacité commerciale – c'était la priorité – tout en veillant à ce que les prix restent modérés. Nous continuons à appliquer cette stratégie et nous échangeons jour et nuit avec Air France pour procéder aux ajustements nécessaires.
Le deuxième mécanisme intervient quand les compagnies du groupe Air France ne sont pas en mesure de répondre aux besoins : nous avons décidé d'affréter des vols charters à destination de certains pays d'accès difficile, où ni Air France ni Transavia ne sont en mesure de maintenir des rotations. Nous l'avons fait également, en liaison avec le mécanisme européen qui permet, dans certains cas, de mutualiser les moyens.
Au total, sur les 130 000 personnes dont je parlais tout à l'heure, plus de 80 000 avaient pu revenir dans notre pays, essentiellement grâce aux mécanismes que je viens de décrire, même si certains voyageurs ont pu trouver par eux-mêmes quelques liaisons. Nous avons encore progressé depuis hier.
Ainsi, au Maroc, il y a dix jours, plus de 20 000 voyageurs français étaient bloqués du fait de l'interruption des liaisons aériennes. Le pont aérien que nous avons mis en place, grâce notamment à Air France et Transavia, a permis de tous les rapatrier en une semaine, par le biais de plus de cent quarante vols – alors que les autorités marocaines avaient initialement décidé l'arrêt de toutes les liaisons aériennes. Les interventions diplomatiques et politiques ont permis d'obtenir le report de cet arrêt : le ministre Jean-Yves Le Drian s'est entretenu quatre fois au téléphone avec son homologue marocain pour lui demander, pratiquement jour après jour, de décaler cette fermeture. En parallèle, nous travaillons avec Air France et Transavia pour débloquer des vols.
De même, un vol spécial en provenance des Philippines, avec quatre cent six passagers à son bord, est arrivé aujourd'hui à Paris – en l'espèce, Air France n'était pas en mesure d'assurer la liaison. Trois cent cinquante Français étaient bloqués dans l'île de Cebu et quelques-uns venaient de Manille.
Il y a deux jours, au Pérou alors que nos ressortissants étaient bloqués à Lima et que l'aéroport civil était totalement fermé, nous avons obtenu l'autorisation qu'un vol d'Air France se pose sur l'aéroport militaire de la capitale péruvienne, afin de pouvoir les embarquer.
En Afrique, nous avons obtenu que la ligne avec Dakar et celle avec Abidjan soient maintenues. En Tunisie, plus de 12 000 Français étaient bloqués ; pratiquement tous, à quelques dizaines près, ont été rapatriés en une semaine.
Je vous épargnerai la liste des près de cent pays dans lesquels nous avons mis en place ce type de dispositif. Bien entendu, nous comprenons l'impatience et la frustration de nos compatriotes qui n'ont pas encore pu en bénéficier. Reste que plus de 80 000 Français sur les 130 000 concernés ont tout de même rejoint notre pays en moins de dix jours. Nous ne nous en satisfaisons évidemment pas, puisqu'il reste encore des gens à l'étranger, mais ce n'est pas négligeable.
Je l'ai déjà dit à Axel Cruau : au-delà de la crise, notre responsabilité sera de réfléchir au jour d'après, même si nous sommes actuellement concentrés sur l'urgence. En outre, dans l'urgence, nous aurions besoin de solidarités européenne et mondiale, et elles ne sont pas au rendez-vous. Nous devons agir pour qu'elles le soient davantage.
J'ai reçu plusieurs appels à l'aide de nos compatriotes venant de l'Inde et de l'Angola : y a-t-il des difficultés particulières avec ces pays ?
Je tiens à transmettre les remerciements des Français et particulièrement des Normands rentrés chez eux à toutes les représentations diplomatiques qui, bien que surchargées, ont parfaitement géré la situation. S'agissant du coût des billets d'avion, les assurances ne pourraient-elles jouer un rôle ? Le ministère des affaires étrangères s'est-il penché sur la question afin d'aider nos compatriotes à financer ces retours ?
Enfin, certains Français travaillent et vivent sur les plateformes pétrolières, notamment pour Total. On leur a demandé de rester chez eux, mais précisément, ils n'ont pas de chez eux… Comment le ministère compte-t-il gérer ces expatriés un peu particuliers ?
À mon tour, je vous remercie pour l'énergie incroyable que vous mettez au service de nos concitoyens naufragés. Nous sommes effectivement nombreux, parlementaires ou élus locaux, à être sollicités par nos administrés concernant des cas individuels. Mais alors que votre charge de travail est déjà très importante, il est dangereux que vous soyez sollicités de toutes parts. Peut-être serait-il utile de mettre en place un dispositif plus efficace sur le modèle de ce que nous faisons déjà au sein de la majorité : un seul de nos collègues est en charge de la relation avec Bercy, un autre de celle avec le ministère des affaires sociales, etc. Cela permet de soulager les cabinets et évite le travail en silo.
Les outils de coordination doivent être agiles. Vous avez évoqué les mises à jour sur le site de conseils aux voyageurs du ministère. Mais les différents pays prennent sans cesse de nouvelles mesures, parfois du jour au lendemain. Quels outils pourraient vous être utiles dans ces circonstances ? Comment les ressources internes au ministère peuvent-elles les mettre au point le plus rapidement possible ?
Vous avez surtout parlé des voyageurs français, mais je vous alerte sur une deuxième vague, celle des Français qui travaillent à l'étranger. Alors que la France prolonge automatiquement les titres de séjour pour les ressortissants étrangers, certains pays ne font pas de même, et certains de nos ressortissants vont se retrouver du jour au lendemain sans travail, sans ressources et sans billet de retour. Avez-vous une idée de leur nombre ? Comment pourriez-vous techniquement les aider à revenir en France ? Enfin, même si cette question est sans doute plus du ressort de la direction des Français à l'étranger et de l'administration consulaire (DFAE), comment pouvons-nous leur venir en aide ?
Nous vivons cette crise et nous la traversons tous de manière très différente, mais l'anxiété et l'angoisse sont permanentes. Vous avez souligné les faiblesses du système de santé en Afrique subsaharienne. En début de semaine, le ministre des affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian, a indiqué qu'un paquet financier allait être mobilisé pour aider les pays les plus vulnérables, notamment en Afrique. Dans quel délai et comment cette chaîne de solidarité va-t-elle fonctionner, qu'en sera-t-il de la mise en oeuvre opérationnelle sur ce continent, déjà confronté à de nombreux enjeux : Les lacunes de son système de santé en premier lieu, mais également la survie de son économie locale, dont dépend celle de centaines de milliers de personnes ?
Je vous signale, mes chers collègues, que j'ai été approché par les collègues de la Sejm, le parlement polonais, intéressés par nos modalités de travail à distance : ils n'imaginaient pas que l'on pouvait travailler et délibérer ainsi.
Je m'associe aux félicitations adressées au centre de crise, qui associe très efficacement tous les parlementaires représentant les Français de l'étranger – députés comme sénateurs –, quelle que soit leur couleur politique, pour aider tous nos compatriotes en difficulté. Mes collègues ont raison : il faut trouver des mécanismes afin de n'encombrer ni les consulats ni le centre de crise.
Vous avez parlé de continuité de l'action diplomatique, je parlerai de la diplomatie d'influence : ce doit être une réalité dans tous les domaines – économiques, scientifiques, éducatifs, etc. Or les mesures prises en France ne s'appliquent pas intégralement à tous les statuts de la France à l'étranger. Nous devrons y réfléchir quand la crise sera finie.
Dans les jours ou les semaines à venir, nous allons devoir gérer une autre urgence : celle des Français de l'étranger qui feront face à des problèmes sanitaires dans des pays où ils ne sont pas correctement couverts. Comment l'envisagez-vous ? Dispose-t-on d'une carte des pays voisins de leur lieu de résidence où ils pourraient être correctement accueillis, sans que nous ayons à les rapatrier en France ? La réponse sera-t-elle graduée en fonction de la présence, ou non, de solutions dans leur pays de résidence ?
Nous sommes sollicités par des Français voyageant à l'étranger, qui souhaitent être rapatriés. Ils sont tous inquiets de la prolifération du virus et redoutent l'absence de réponse médicale dans certains pays, voire la pénurie de denrées alimentaires. J'ai recensé toutes ces sollicitations pour notre groupe et suis en relation avec le centre de crise du ministère des affaires étrangères, que je remercie, tout comme les personnels du ministère. Nous poursuivrons cette démarche, au fur et à mesure que nous parviennent les appels à l'aide.
Je souhaite évoquer le cas des ressortissants français bloqués dans l'État de New York, foyer d'infection majeure puisqu'il concentre 7 % des cas de coronavirus dans le monde : leur rapatriement ne devrait-il pas être prioritaire ?
Envisagez-vous de mobiliser les moyens aériens de l'État pour rapatrier nos ressortissants depuis les pays d'Amérique du Sud avec lesquels Air France n'a pas de liaison ?
Comme Jean François Mbaye, j'aurais voulu en savoir plus sur la mise en oeuvre du paquet financier : alors que le continent africain importe massivement les denrées qu'il consomme, les frontières se ferment progressivement et l'on craint la pénurie. La France compte-t-elle aider l'Afrique ?
80 000 de nos ressortissants sont rentrés. L'épicentre de l'épidémie se situe désormais en Europe et, selon l'OMS, ce sont bientôt les États-Unis qui pourraient le devenir. Il faut préparer dès maintenant les jours d'après le confinement : comment seront jugulés les risques de contamination par des cas importés après la levée des mesures restrictives ?
Enfin, comment s'articule l'action d'urgence du centre de crise avec ses missions traditionnelles, puisqu'il joue habituellement un rôle de stabilisation dans les zones touchées par des conflits ?
Je vous félicite pour le travail réalisé. Existe-t-il un réseau européen des centres de crise et, si oui, travaillez-vous ensemble pour gérer cette crise ?
Exploitez-vous le retour d'expérience de la Chine, tant sur le plan médical que sur la gestion post-confinement ? Que met-on en place pour aider les pays africains qui ont beaucoup moins de moyens ? Comment nous, parlementaires, pouvons-nous aider ?
Je m'intéresse essentiellement à l'Afrique : comment sont mobilisés les chefs d'îlot et les centres médico-sociaux (CMS) ? Les éléments français du Sénégal ou du Gabon vont-ils être sollicités ? En Angola, en une journée, ce ne sont plus 400, mais 1 000 personnes qui souhaitent être rapatriées car leurs familles commencent à s'inquiéter. J'ai bien peur que le chiffre de personnes intéressées soit rapidement multiplié par deux ou trois. Certaines familles nous font part de leurs inquiétudes : elles sont perçues comme des agents de propagation du virus et commencent donc à être brutalisées. Jusqu'alors bien logées et bien intégrées, elles deviennent victimes de discriminations. Que peut-on faire pour elles ?
Qu'en est-il des rapatriements depuis les pays dont les infrastructures de santé sont insuffisantes, voire inexistantes, notamment pour les Français déjà contaminés ? Ainsi, j'ai connaissance d'un cas dans un état grave au Kenya. Je sais que nous négocions avec le gouvernement kényan pour le transférer dans un autre hôpital, ce qu'il refuse pour le moment. Comment peut-on procéder ? A-t-on déjà connaissance de décès ? Si oui, comment les gérer ?
Pour commencer, permettez-moi d'évoquer à titre d'illustration le cas d'une étudiante en master 2 de politique internationale à Sciences Po Bordeaux, en stage au Sénégal. Dès le début de la crise, son établissement lui a demandé de rentrer en France. Après avoir pris contact avec votre centre de crise, sa mère, désemparée, habitante de Haute-Savoie, a contacté mon équipe afin de savoir si les vols depuis Dakar étaient maintenus et comment effectuer le trajet entre Paris et la Haute-Savoie, les trains étant quasiment tous annulés. Elle ne savait pas non plus quel motif de déplacement dérogatoire indiquer sur l'attestation. Si j'ai bien compris, les étudiants en échange ou en stage de longue durée à l'étranger sont invités à rester dans le pays d'accueil, sauf ceux en fin de parcours universitaire. Ces derniers doivent suivre le même protocole que les Français qui souhaitent rentrer en France. Mais comment pourra-t-on soigner ceux qui resteront ?
Se pose également le cas des Français non-résidents dans les départements et territoires d'outre-mer (DOM-TOM) qui souhaitent rentrer en métropole. Cela pourrait sembler plus simple puisqu'ils sont déjà en France. Mais, en Polynésie française par exemple, le Haut-Commissariat de la République impose à tous les non-résidents de quitter le territoire, tout en annulant la plupart des vols avant la fermeture de l'aéroport, prévue le 28 mars. Il reste deux ou trois places sur les vols maintenus, pour 500 personnes en attente. Le gouvernement polynésien renvoie vers le Haut-Commissariat, le Haut-Commissariat vers le ministère de l'Europe et des affaires étrangères ; ce dernier explique qu'en France, la question est du ressort du ministère de l'intérieur ; le ministère de l'intérieur renvoie vers le ministère des outre-mer, qui demande de rappeler le lendemain ! La situation ne semble du ressort de personne.
Pouvez-vous nous indiquer quel est le protocole applicable au retour de nos étudiants en métropole ?
Je remercie tous les fonctionnaires qui travaillent nuit et jour sur ce dossier, comme l'a rappelé un article paru dans Le Monde d'hier. Je vous parle depuis ma circonscription, au Maroc, d'où 20 000 Français ont pu partir. Mais qu'en est-il de l'Algérie où près de 2 000 personnes seraient encore bloquées ? Pourquoi a-t-on pu organiser cent quarante vols entre le Maroc et la France, mais seulement un par jour depuis une semaine avec l'Algérie ?
Au Maroc, beaucoup de gens me sollicitent. Pourtant, à croire les chiffres de l'ambassade, seulement quelques dizaines de Français seraient encore présents ; c'est donc qu'il doit y en avoir beaucoup plus. Cela me conduit à rebondir sur une question déjà posée : comment pouvons-nous nous positionner par rapport aux différents acteurs – élus consulaires, chefs d'îlot, consulats, ambassades, centre de crise, etc. ? Il manque un « point focal » coordonnateur qui recueillerait nos appels, afin d'éviter l'engorgement des consulats. En effet, de nombreux députés de métropole nous sollicitent pour aider des habitants de leur circonscription bloqués à l'étranger.
Dans son interview récente, M. le Drian a demandé aux Français qui se trouvent à l'étranger de rester confinés là où ils sont. Mais cela pose la question des moyens sanitaires locaux, cette seconde vague risquant de se transformer en crise sociale et humanitaire pour les personnes qu'il faudra rapatrier.
Enfin, certains de nos compatriotes vivant à l'étranger suivent un protocole de soins qui nécessite l'acheminement de médicaments depuis la France. Or les livraisons ne fonctionnent plus et les transporteurs sollicités – DHL, La Poste, Chronopost, etc. – ne sont pas en mesure de répondre aux besoins de ces malades chroniques. Comment faire ?
Je ne parlerai pas des sollicitations que j'ai reçues à titre personnel. Il faudrait communiquer le numéro du centre de crise à tous les parlementaires afin que chacun puisse prendre les choses en main et évoquer directement ses cas avec ce dernier, sans passer par la commission des affaires étrangères : en fait, chaque cas est particulier.
Je vous remercie pour cette suggestion. Vous avez raison, il faut que la communication soit directe.
Je remercie le réseau diplomatique et la commission pour l'organisation de cette audioconférence. Les Français qui sont rapatriés sont-ils testés avant de monter dans l'avion ou après leur retour en France, pour éviter tout risque de contagion ?
Dans ma circonscription, certaines familles de soldats partis au Sahel s'inquiètent : l'épidémie se répand rapidement au Burkina Faso ; comment va-t-on la gérer ?
Reconnaissons-le, l'Union européenne a totalement failli ; ce sont les pays qui ont des frontières qui ont évité une forte contagion – Singapour, Taïwan, la Russie. Ce sont aussi ceux qui ont réussi à maintenir une industrie locale, alors que nous manquons de tests et de masques du fait des délocalisations et que notre usine de production d'oxygène médical est en redressement judiciaire. Il nous faudra y réfléchir même si, pour l'heure, l'urgence est au rapatriement de tous les Français et aux soins de tous nos malades.
Je m'associe aux remerciements de mes collègues, pour l'aide que vous m'avez apportée dans le rapatriement des concitoyens de ma circonscription. Ma question sera iconoclaste, mais elle prolonge celle d'Anne Genetet. Je viens d'une région de la côte Atlantique, où l'exode des propriétaires de résidences secondaires venus s'y confiner a suscité bien des réactions. De la même façon, le retour de Français rapatriés de l'étranger suscite de l'inquiétude, sinon une forme de xénophobie : on craint les contaminations car ces Français arrivent parfois de zones fortement atteintes par le coronavirus. Le retour d'une personne partie en voyage touristique est une chose, mais le retour d'expatriés risque d'être mal perçus. Peut-être n'est-ce pas de votre ressort, mais a-t-on prévu un dispositif spécifique de communication ? Des zones de confinement spécifiques seront-elles aménagées pour ceux qui n'ont pas forcément de logement en France, afin qu'ils ne se déplacent pas sur tout le territoire pour retrouver leur famille ?
Je m'associe également aux remerciements. J'ai été alerté sur le cas d'un groupe de trente-cinq personnes bloquées à Sihanoukville au Cambodge, parmi lesquelles vingt-neuf ont été testées positives au Covid-19, dont deux sont dans un état critique – les autres n'ont pas développé de symptômes. Comment gérez-vous le rapatriement de personnes testées positives ne nécessitant pas de soins médicaux particuliers ? Les conditions sanitaires locales sont déplorables et elles craignent qu'en restant bloquées, leur état ne s'aggrave, sans issue possible.
Je tiens à féliciter le centre de crise du Quai d'Orsay pour son travail remarquable. Au-delà des membres de la commission des affaires étrangères, tous nos collègues devraient être informés de votre action. Après la crise, il conviendrait que vous veniez expliquer votre rôle à l'Assemblée nationale, car votre action exemplaire est relativement méconnue de nos compatriotes. On pourrait également envisager une émission télévisée ou un reportage dans le cadre du journal de vingt heures.
Ma question rejoint celle de M. M'jid El Guerrab. J'ai contacté notre consul en Algérie, sans avoir pu obtenir de réponse : comment se fait-il qu'autant de Français soient bloqués sans que l'on puisse assurer leur rapatriement comme au Maroc ?
Le retour d'expérience de la gestion de crise par Taïwan peut-il nous être utile ? Durant la crise, les immigrés continuent de venir sur notre continent. Avez-vous des relations avec le Centre européen de prévention et de contrôle des maladies ? Comment ces immigrés sont-ils pris en charge ?
Vous avez regretté, à juste titre, l'absence de réponse multilatérale. Nous attendons toujours la réponse du G20 et l'Eurogroupe n'a pas réussi à se mettre d'accord. Vous ne nous avez pas parlé d'ECHO, la direction générale pour la protection civile et les opérations d'aide humanitaire européennes de la Commission européenne. Travaillez-vous avec l'Union européenne à une réponse humanitaire dans l'urgence ?
Je vous salue depuis ma circonscription, en Espagne, où je réside. Je m'associe à l'hommage rendu au centre de crise et à tous ses agents. Avec les ambassades, comme certains d'entre vous, j'ai participé au retour de nos compatriotes – ce terme me semble plus approprié que celui de « rapatriement », largement diffusé et mal compris, ajoutant à la confusion et, parfois, au mécontentement des intéressés.
L'attitude de nos concitoyens vient parfois ajouter à la difficulté de gérer cette crise : si certains réagissent très bien et s'adaptent, sont coopératifs et reconnaissants, d'autres ont des comportements absolument exécrables comme j'ai pu le constater dans ma circonscription, au Portugal ou en Espagne, où il faut organiser le retour en France d'un très grand nombre d'entre eux. Certains considèrent que la France devrait prendre en charge leur retour alors qu'ils étaient en vacances et que les compagnies aériennes, Vueling par exemple, les ont remboursés ou ont délivré des avoirs. Ils ont refusé de monter dans les avions, qui sont repartis avec des taux de remplissage d'à peine 50 % – en tenant compte des barrières sanitaires !
Cela montre les limites de la générosité et de l'engagement des consulats, des ambassades et du centre de crise – en témoigne l'attitude de certains individus sur les réseaux sociaux. Je partage le constat de Michel Herbillon : les autorités diplomatiques se donnent sans compter, tout comme le centre de crise. Il faudra savoir leur rendre hommage : s'ils n'étaient pas aussi engagés, nos compatriotes seraient en droit de leur faire des reproches ; or ce n'est sincèrement pas le cas.
Pourrions-nous vous aider en améliorant notre coordination afin que nos questions ne vous parviennent pas de manière désordonnée ?
Comment coopérez-vous avec les autorités locales ? Je sais que certains aéroports ont été fermés et qu'il vous a été très compliqué de les faire rouvrir.
Une solution temporaire d'hébergement d'urgence a été mise à disposition des Français bloqués à l'étranger : le site internet www.sosuntoit.fr. Les autorités françaises comptent-elles compléter ce dispositif pour ceux dont le séjour se prolonge et qui éprouvent des difficultés pour subvenir à leurs besoins ?
Suite à l'appel au confinement de ceux qui peuvent rester sur place, lancé par le ministre, comment les autorités pourraient s'assurer de la sécurité des ressortissants lorsque les conditions sanitaires sont défaillantes, ou qu'ils ne bénéficient pas de la protection sociale dans les pays où ils se trouvent ?
Je précise que nous avons programmé une conférence téléphonique de travail vendredi avec la directrice des Français à l'étranger et de l'administration consulaire, Laurence Haguenauer. Nous pourrons entrer dans le détail de certains des mécanismes que vous allez nous présenter.
L'impressionnante mobilisation, jour et nuit, des agents de toutes catégories qui se déplacent pour participer à la cellule de crise sans ménager aucun effort, à Paris et dans nos ambassades, est à l'honneur du service public ; c'est à eux que vos remerciements et vos hommages reviennent.
La situation des personnes qui étaient en voyage à l'étranger doit être distinguée de celle des résidents, car ils n'ont pas de domicile dans les pays où ils se trouvent. Il est donc naturel de faciliter leur retour. Pour ce qui est de nos résidents à l'étranger, le ministre a expliqué que les mouvements de population facilitant la propagation du virus, il était préférable pour eux de se confiner pour l'instant. Cette situation ne va pas durer éternellement, mais c'est la logique actuelle.
La directrice des Français à l'étranger est directement concernée par la deuxième vague de rapatriements à laquelle faisait référence Anne Genetet. La situation des ressortissants n'est pas la même partout : dans certains pays, l'épidémie est moins développée qu'en France et le système de santé de qualité ; dans d'autres au contraire, le système de santé n'est pas optimal et l'épidémie peut être en progression rapide. Chaque situation doit être évaluée avec précision.
S'agissant du rapatriement en cours, je précise que le ministère des affaires étrangères n'est pas compétent pour les DOM-TOM. Ce n'est pas une manière de nous défausser de la question, mais l'organisation de l'État confie cette responsabilité à d'autres tandis que nous avons la charge des Français de l'étranger et des Français voyageant à l'étranger. Le ministère de l'intérieur et celui des DOM-TOM sont compétents sur le territoire national.
Les relations avec les autorités nationales occupent une bonne partie de nos journées et de nos nuits. Conformément à leurs prérogatives et leurs responsabilités, elles ont parfois pris des mesures de confinement, comme nous-mêmes l'avons fait, et des mesures de fermeture des aéroports et d'interruption des liaisons aériennes. Dans certains cas, le ministre en personne a contacté ses homologues pour demander le report de l'interruption des liaisons aériennes ; c'est ce qui a par exemple permis de rapatrier les 20 000 Français présents au Maroc et les 10 000 présents en Tunisie. Cette démarche a parfois été effectuée par les ambassades : Hélène Le Gal au Maroc ou Philippe Lalliot au Sénégal ont réalisé un travail éblouissant qui a permis le retour de nombreux Français ou le maintien des lignes aériennes. Mais il est injuste de ne citer qu'eux, de très nombreux ambassadeurs ont réagi de façon remarquable.
L'un d'entre vous a évoqué ce groupe de Français au Cambodge, que nous suivons avec attention. L'équipe médicale du centre de crise est composée de membres très compétents : l'un était responsable du centre médico-social de Bamako, un autre est urgentiste au SAMU, et le troisième est également très expérimenté. Cette équipe suit plusieurs cas : celui de ces gens bloqués au Cambodge, mais également un autre groupe en Égypte, incluant plusieurs cas positifs, confiné sur plusieurs bateaux à Louxor. Nous sommes également très attentifs à la situation, effectivement sérieuse, de notre compatriote au Kenya : une équipe médicale s'est portée auprès de lui et nous essayons de le faire revenir à Nairobi, où l'ambassade a obtenu qu'une place dans un hôpital de qualité lui soit réservée, en attendant, si sa condition le permet, de rejoindre un lit spécialisé à La Réunion.
Pour aider à la prise en charge dans les pays, depuis deux ou trois mois, nous avons établi des fiches réflexes avec les postes diplomatiques. Nous avons repéré en amont les structures de santé compétentes, identifié des équipes médicales, énuméré les mesures à mettre immédiatement en place, ce qui nous a permis d'expédier dans certains pays des kits de prise en charge du Covid-19. Nous essayons d'apporter notre soutien aux postes diplomatiques ; mais avec la multiplication des cas, les situations complexes seront toujours plus nombreuses dans les pays où le système de santé aura du mal à faire face.
Notre soutien s'adresse d'abord, mais pas uniquement, à l'Afrique. La direction générale de la mondialisation mène un travail important, en partenariat avec la direction de l'Union européenne, pour identifier les moyens qu'il est possible de mobiliser au niveau international et européen afin de venir en aide à ces pays.
À un niveau plus modeste, 15 à 20 % des programmes humanitaires que nous menons seront alloués à la réponse au Covid-19. La direction générale ECHO de la Commission européenne élabore une réponse humanitaire à la situation, à laquelle nous sommes associés, et au-delà de l'aide humanitaire, des actions de développement sont également identifiées.
Avec le Sénégal, nos échanges avec Air France ont permis de maintenir deux liaisons aériennes par semaine : les liens avec ce pays ne sont donc pas rompus en dépit des contraintes de ressources humaines considérables auxquelles Air France doit faire face. Les équipages en mesure de voler sont de moins en moins nombreux, mais ils font un travail formidable.
La situation en Algérie est très différente de celle du Maroc lors de cette première phase de rapatriement des voyageurs touristiques. Il n'y avait que quelques centaines de touristes en Algérie, comparé aux 20 000 présents au Maroc, l'effort était sans commune mesure. Air Algérie ayant malheureusement décidé d'interrompre ses liaisons aériennes, nous avons travaillé avec Air France afin de maintenir des vols vers Alger et Oran. Des vols spéciaux seront proposés pour les Français de passage encore présents en Algérie.
Nous avons également négocié pour qu'Air France maintienne la liaison avec la Côte d'Ivoire.
La situation à New-York a été évoquée ; pour l'instant, les liaisons avec les États-Unis, le Canada, l'Australie et la Nouvelle-Zélande sont maintenues : il est donc possible pour une personne qui s'y trouve de rentrer, à la différence des pays tels que la Jordanie, le Maroc ou le Pérou qui ont décidé de fermetures d'aéroports ou de suspension de lignes.
Dans le cadre de notre soutien au maintien des lignes aériennes commerciales, les compagnies du groupe Air France ont accepté de proposer des prix modérés en appliquant le système appelé rescue fare.
Dans les zones où Air France n'est pas en mesure d'assurer des liaisons – c'est le cas des Philippines et de nombreux pays d'Asie, mais aussi d'Haïti – nous affrétons des vols. Dans ces cas, nous demandons aux ressortissants français de signer un document par lequel ils s'engagent à rembourser une somme forfaitaire – inférieure au prix du marché et à celui du billet que nous payons pour tenir compte de la difficulté dans laquelle ils se trouvent.
À l'échelle européenne, le mécanisme européen de protection civile (MEPC) permet à chaque pays européen de faire bénéficier d'autres pays des vols qu'il affrète. Ainsi, l'Allemagne a activé le MEPC, ce qui a permis à soixante Français de revenir du Salvador ; et l'Espagne a proposé de rapatrier cinquante-cinq Français du Honduras. De notre côté, nous allons organiser un vol au départ de la Bolivie dans lequel nous offrirons des places à d'autres citoyens européens. Les contacts sont permanents avec mes homologues européens.
Les ressortissants non-résidents, qui n'ont plus de domicile en France, relèvent de la compétence du ministère des affaires sociales. La direction des Français à l'étranger pourra vous en dire davantage.
L'Angola fait effectivement partie des pays dans lesquels nous avons identifié des difficultés au cours des derniers jours ; nous allons essayer d'y remédier.
Concernant l'Inde, KLM, qui fait partie du groupe Air France, continue d'assurer des liaisons : sept vols ont été effectués cette semaine pour répondre aux demandes. Certains cas urgents avaient été identifiés par l'ambassade et les consulats, et 250 places à partir de trois villes indiennes avaient été réservées pour ces Français, qui sont rentrés ces derniers jours.
Nous sommes parfaitement conscients que tout n'est pas terminé et qu'il reste beaucoup à faire, mais sur les 130 000 Français bloqués la semaine dernière, plus de 80 000 sont rentrés et nous maintenons nos efforts. Peut-être 10 000 ou 20 000 compatriotes resteront-ils dans les pays avec lesquels les liaisons aériennes sont maintenues, fussent-elles réduites, et nous serons particulièrement vigilants en cas d'interruption de ces liaisons ou de fermeture des aéroports.
Merci beaucoup, monsieur Chevallier. Transmettez nos remerciements à chacun des membres du centre de crise, nous sommes fiers de ce qu'ils font, et nous leur sommes redevables.
Ils y seront très sensibles. Axel Cruau prend le relais.
Vous pouvez contacter la task force Coronavirus par courrier électronique : il serait effectivement très utile que vos demandes soient autant que possible groupées afin de ne pas surcharger la cellule de crise.
Les retours d'expérience de la Chine nous parviennent par notre ambassade, très mobilisée pour l'acquisition d'équipements de sécurité. Maintenant que l'épidémie se calme en Chine, nous pouvons dialoguer avec le ministère de la santé et les médecins chinois à propos des traitements et de la stratégie de sortie de crise. Nous étudions avec beaucoup d'attention leur utilisation d'applications sur smartphone. Nous n'avons pas l'intention de faire exactement la même chose, mais nous souhaitons voir quelles solutions techniques pourraient nous servir.
Qu'en est-il des voyageurs temporaires au Brésil, dont le retour était prévu dans deux ou trois mois, notamment les étudiants ? N'est-il pas dangereux pour eux de rester sur place, alors que l'épidémie s'y répand ?
Que se passe-t-il pour nos compatriotes à l'étranger qui ont besoin de traitements médicaux, et qui ne peuvent attendre plus d'un mois sans livraison de médicaments depuis la France ?
Des compatriotes travaillent au sein d'ONG partout dans le monde. Connaissez-vous les effectifs concernés, et en avez-vous rapatrié certains ?
Le Brésil fait l'objet d'une attention particulière en raison du nombre de Français qui s'y trouve. Nous souhaitons maintenir des vols afin de leur permettre de rentrer.
L'acheminement des médicaments pose un problème très difficile, car faute de vols, nous manquons de moyens pour les expédier. Dans certains pays, même la valise diplomatique n'est plus une solution.
Les équipes de personnel humanitaire doivent impérativement se rapprocher des ambassades pour que nous sachions où est chacun, et que nous puissions prendre les mesures en fonction de la situation dans chaque pays. Il n'y a pas de réponse générique, il faut être en lien avec les ambassades et les consulats.
Nous n'avons pas du tout envisagé cette situation pour l'instant, car nous nous sommes concentrés sur les Français en déplacement temporaire ; or le personnel des plateformes entre dans la catégorie des résidents. Leur situation particulière n'a pas été encore prise en compte, mais nous allons l'étudier.
Je ne peux pas répondre précisément à propos de Madagascar, je crois que des vols vers La Réunion sont proposés, mais cette information doit être confirmée.
Je reçois de plus en plus de propositions pour des médicaments chinois, des décoctions, des compléments alimentaires. Pouvons-nous les accepter ?
Il faudra étudier au cas par cas, mais honnêtement, je ne pense pas que ce soit la voie à privilégier. Chaque médicament requiert une autorisation de mise sur le marché et , il serait contre-productif d' ajouter cet effort compte de la charge de travail de tous. D'autant qu'il n'existe pour l'heure aucun traitement contre la maladie : donner de faux espoirs serait inapproprié.
En revanche, toutes les possibilités de dons ou d'achat d'équipement tel que des masques, des blouses, des gants, ou des appareils plus lourds comme des respirateurs répondent à un manque, et nous sommes très preneurs. La procédure d'autorisation est lourde et ralentit les choses, mais tout ce que nous pourrons trouver en Chine et ailleurs pour aider nos soignants est précieux. Je tiens d'ailleurs à remercier M. Buon Tan pour ce qu'il a déjà fait en la matière.
Les élus consulaires sont présents partout sur le terrain, ils sont très engagés. Leurs coordonnées sont fournies sur les sites des ambassades et ils sont tout à fait disposés à fournir des informations parfaitement fiables, ce qui évitera d'engorger les consulats.
Mme Lakrafi me fait savoir que les rotations sur les plateformes pétrolières viennent de s'effectuer : la question du retour des équipes se posera donc dans vingt-huit jours.
Monsieur Cruau, nous serons – malheureusement – amenés à rester en contact dans les jours et les semaines à venir, qui promettent d'être difficiles. Nous pensons à tous ceux qui oeuvrent au centre de crise du ministère des affaires étrangères, ainsi qu'à nos diplomates en poste. J'appelle régulièrement des ambassadeurs au nom de la commission des affaires étrangères pour faire le point avec eux sur les événements dans leur pays. Nous vous adressons nos vifs remerciements, ainsi qu'à toutes vos équipes.
La séance est levée à 16 heures 45.
Membres présents ou excusés
Présents. - M. Hervé Berville, M. Moetai Brotherson, M. Pierre Cabaré, Mme Samantha Cazebonne, Mme Mireille Clapot, M. Pierre Cordier, M. Alain David, MBernard Deflesselles, M. Nicolas Dupont-Aignan, M. M'jid El Guerrab, Mme Anne Genetet, M. Michel Herbillon, M. Bruno Joncour, M. Hubert Julien-Laferrière, M. Rodrigue Kokouendo, Mme Sonia Krimi, M. Mustapha Laabid, Mme Amélia Lakrafi, M. Jean-Paul Lecoq, Mme Martine Leguille-Balloy, Mme Marion Lenne, Mme Nicole Le Peih, Mme Brigitte Liso, M. Mounir Mahjoubi, M. Jacques Maire, M. Jean François Mbaye, M. Frédéric Petit, Mme Bérengère Poletti, M. Jean-François Portarrieu, M. Didier Quentin, M. Hugues Renson, M. François de Rugy, Mme Laetitia Saint-Paul, Mme Sira Sylla, M. Buon Tan, Mme Liliana Tanguy, Mme Valérie Thomas
Excusés. - Mme Ramlati Ali, Mme Aude Amadou, Mme Clémentine Autain, M. Frédéric Barbier, M. Yves Blein, M. Jean-Claude Bouchet, M. Jean-Louis Bourlanges, Mme Valérie Boyer, M. Pascal Brindeau, Mme Annie Chapelier, M. Jean-Michel Clément, M. Olivier Dassault, M. Christophe Di Pompeo, Mme Frédérique Dumas, Mme Laurence Dumont, M. Pierre-Henri Dumont, M. Michel Fanget, M. Éric Girardin, Mme Olga Givernet, M. Claude Goasguen, M. Philippe Gomès, M. Meyer Habib, M. Alexandre Holroyd, M. Christian Hutin, Mme Aina Kuric, M. Jérôme Lambert, M. Denis Masséglia, M. Jean-Luc Mélenchon, M. Christophe Naegelen, Mme Isabelle Rauch, M. Jean-Luc Reitzer, Mme Marielle de Sarnez, Mme Michèle Tabarot, M. Guy Teissier, Mme Nicole Trisse, M. Sylvain Waserman
Assistait également à la réunion. - M. Marc Le Fur