COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES
Mardi 22 septembre 2020 à 17 heures 15.
La séance est ouverte à 17 heures 15
La commission procède à l'audition, en application de l'article L. 1451-1 du code de la santé publique, de M. François Toujas, dont le renouvellement aux fonctions de président du conseil d'administration de l'Établissement français du sang est envisagé.
Monsieur Toujas, je vous souhaite la bienvenue. Par courrier en date du 21 juillet dernier, monsieur le Premier ministre a fait savoir à monsieur le président de l'Assemblée nationale qu'il souhaitait que notre commission, en application de l'article L. 1451-1 du code de la santé publique, procède à votre audition dans la perspective de votre renouvellement aux fonctions de président du conseil d'administration de l'Établissement français du sang (EFS). Cet établissement public administratif, créé par la loi du 1er juillet 1998 relative au renforcement de la veille sanitaire et du contrôle de la sécurité sanitaire des produits destinés à l'homme, a pour mission de gérer le service public transfusionnel.
Vous dresserez le bilan de votre action et tracerez des perspectives pour l'EFS. Les commissaires souhaiteront certainement savoir aussi quel a été l'impact de la crise sanitaire pour l'Établissement et comment vous l'y avez adapté.
, président du conseil d'administration de l'Établissement français du sang. C'est avec émotion et fierté que je me présente devant votre commission. Les huit années passées à la tête de l'EFS ont été denses, riches, exigeantes et surtout enthousiasmantes. L'Établissement n'a pas été épargné par les chocs externes que furent les attentats de 2015, 2016 et 2017, les crises régulières d'arboviroses dans les départements d'outre-mer et en métropole, la crise cyclonique aux Antilles en 2017 ; il ne l'est pas davantage par les conséquences de la pandémie de covid-19 dont nous souffrons encore. L'EFS a aussi dû faire face aux défis internes majeurs que posent la requalification du plasma SD en médicament ; l'importante variation des volumes de plasma à livrer ; la fragilisation du modèle économique due au changement de régime de TVA intervenu au début de l'année dernière.
En dépit de ces chocs, l'autosuffisance en produits sanguins labiles a été garantie chaque jour : jamais les équipes soignantes n'ont manqué de produits sanguins pour les malades, ce qui est la première condition de la sécurité transfusionnelle. Je tiens à remercier les magnifiques équipes de l'EFS qui réalisent ce travail quotidien.
De nombreuses mesures ont renforcé la sécurité de la chaîne transfusionnelle : la généralisation de la technique d'atténuation des pathogènes dans les plaquettes, qui a fait disparaître des accidents bactériens ; la modernisation de nos plateaux de qualification biologique des dons ; le renforcement du lien entre l'immuno-hématologie et la délivrance des produits sanguins aux équipes cliniques.
Les chantiers de transformation et d'innovation ont été nombreux : le regroupement des plateaux de qualification, passé de quatorze à quatre, a réduit leur coût de 15 % ; la collecte a été optimisée et modernisée ; surtout, possibilité a été donnée aux infirmières et aux infirmiers de mener l'entretien préalable au don, auparavant uniquement réalisé par les médecins. La réforme de la téléassistance médicale en collecte est enclenchée : nous sommes en train de développer les premières formations à ce sujet. Une base unique des donneurs de sang a été créée. La communication de l'EFS a été modernisée et digitalisée. L'Établissement public est plus intégré : les dix-huit établissements existants quand je suis arrivé ont été ramenés à treize et harmonisés. Un accord national sur le temps de travail a été signé en 2018 avec les organisations syndicales et le management est concentré sur ses missions.
Il restera, au cours du mandat à venir, à relever des défis majeurs et à poursuivre et approfondir certains chantiers.
D'abord, il est vital que l'EFS continue de participer au renforcement de la souveraineté sanitaire. Elle se mesure par différents facteurs. Elle suppose en premier lieu que notre pays dispose de tous les produits sanguins labiles dans le cadre du monopole de collecte et de distribution de ces produits. Un des enseignements essentiels de la pandémie de covid‑19 est que cette autosuffisance n'est jamais acquise : j'ai dû, vendredi dernier et hier encore, faire un appel national aux dons, notre stock de globules rouges étant inférieur de quelque 20 % à ce qu'il est habituellement. C'est que la crise a eu un fort impact sur nos capacités, étant donné la quasi-disparition des collectes dans les universités et dans les entreprises. Le sujet est grave : si depuis la création de l'EFS il y a vingt ans, lors de la réorganisation voulue par les pouvoirs publics à la suite au scandale du sang contaminé, l'autosuffisance en produits sanguins labiles a été constante, la crise sanitaire montre que cette autosuffisance n'est pas un acquis mais un défi quotidien que nous devons relever par la disponibilité des équipes et la protection des donneurs et des collaborateurs, pour assurer la continuité d'activité essentielle au service des malades.
Le renforcement de la souveraineté sanitaire nous impose aussi de mieux structurer et de mieux organiser, pour la solidifier, la filière du plasma pour fractionnement. C'est un réel sujet d'inquiétude. L'EFS collecte des produits sanguins labiles dans le cadre du monopole et du plasma pour fractionnement, utilisé comme matière première pour la fabrication de médicaments tels que les immunoglobulines par le Laboratoire français du fractionnement et des biotechnologies (LFB). La souveraineté sanitaire demande également que l'EFS continue de sécuriser très fortement certaines de ses fonctions support pour contrer les cyberattaques et les attaques à sa réputation. Certains de nos collègues étrangers ont subi, fortement, de telles attaques.
Le deuxième défi à relever, qui vous importe, je le sais, est le renforcement territorial des capacités de collecte et la modernisation de la collecte, service public ; c'est un axe central des efforts de l'EFS, car que serait une banque de sang sans collecte ? J'ai évoqué le lancement des entretiens pré-don par les infirmières et infirmiers ; j'indique qu'au quatrième trimestre de cette année commenceront les expérimentations de téléassistance médicale à la collecte. Mais nous devons aller beaucoup plus loin car l'enjeu est capital. On compte en France environ 1,7 million de donneurs actifs, ceux qui donnent du sang une fois par an, mais nous en perdons 10 % chaque année, soit 170 000, soit pour une cause médicale – un voyage les exclut du don – soit qu'ils atteignent l'âge limite du don, fixé à 70 ans. Nous devons donc beaucoup travailler sur l'engagement citoyen que représente le don du sang avec les associations et les bénévoles qui nous aident tous les jours à mieux organiser notre mission et que je salue. Il nous faut, évidemment, travailler sur la qualité des produits sanguins pour garantir la sécurité des receveurs, mais aussi sur la sécurité des donneurs, et pour cela améliorer leurs connaissances sur le don et leur capacité à auto-évaluer leur éligibilité au don. Cela passe notamment par le développement d'applications, ce que nous avons fait. Voilà pour la collecte et sa modernisation.
Le troisième axe de mon action sera de replacer l'Établissement dans la chaîne de soins en renforçant ses relations avec les établissements de santé, puisque sa mission est de collecter en fonction des besoins des médecins cliniciens pour les patients. L'EFS n'a pas pour seule activité la collecte, dont on parle beaucoup. Nous avons 160 sites de délivrance de produits sanguins en France et nous donnons des produits sanguins à plus de 1 500 établissements de santé. Ce maillage serré permet aux praticiens de l'EFS d'organiser avec leurs collègues cliniciens des hôpitaux le conseil transfusionnel qui conduit à la meilleure prise en charge possible des patients. Nous avons également commencé de procéder par échanges de données informatisées afin d'éviter les actes redondants et d'accroître la sécurité des receveurs et la qualité des produits ; cette pratique devra être développée.
L'EFS est aussi un établissement innovant en ce qu'il mène des travaux de recherche soutenus sur les types de produits sanguins, notamment des plaquettes de culture, et sur l'immunothérapie. L'Établissement a en ce domaine une place éminente : ses cinq plateformes de médicaments de thérapie innovante en font l'un des acteurs nationaux importants des bio-productions, les médicaments de demain.
Et puis, j'y ai fait allusion brièvement, l'Établissement, dont la situation financière est bancale, devra retrouver un modèle économique, chantier crucial. Le déséquilibre actuel tient à d'abord à l'inversion de l'évolution de la demande de produits sanguins labiles ; après une période de forte demande, nous constatons depuis 2012 la stabilité, sinon la réduction, de la demande de ces produits, et donc une baisse de recettes. Élément aussi préoccupant, la revalorisation tarifaire de ces produits a été faible, alors que nous devons continuer de financer l'augmentation de leurs coûts de production. Il nous faudra donc essayer de trouver l'efficience nécessaire. Je dis souvent, même si cette position est parfois soumise à critique en interne, notamment par les partenaires sociaux, que l'efficience, dans un établissement public tel que le nôtre, est aussi au cœur de l'éthique. Parce que nos produits sanguins sont des dons, nous devons nous astreindre à organiser le mieux possible la mobilisation de nos ressources. À l'EFS, l'efficience participe de l'éthique et gaspiller est impossible. Il est donc nécessaire d'analyser régulièrement les moyens dont nous disposons et les pistes d'économies.
Des économies, nous en avons réalisé, mais nous devons aussi continuer à renforcer notre outil de production, à investir en améliorant l'accueil des donneurs en ouvrant des Maisons du don et en achetant les matériaux nécessaires à la bonne marche de la chaîne transfusionnelle. Cela suppose de dégager entre 40 et 50 millions d'euros par an. Évidemment, le changement du régime de TVA qui a eu lieu il y a presque deux ans ne nous a pas aidés. Il avait pour conséquence potentielle un trou supplémentaire de 80 millions d'euros dans les finances de l'Établissement ; nous avons heureusement réglé une partie du problème, à hauteur de 40 millions d'euros, avec nos autorités de tutelle, que je remercie, après qu'il a été décidé que l'EFS ne serait pas assujetti à la taxe sur les salaires. Nous avons aussi défini un plan qui devrait nous permettre d'économiser 50 millions d'euros en quatre ou cinq ans.
J'appelle toutefois votre attention sur le fait que nous ne pourrons pas retrouver un équilibre de long terme si nous n'obtenons pas la revalorisation de la tarification soit des produits sanguins labiles et du plasma pour fractionnement que nous cédons, soit des actes d'immuno-hématologie.
Enfin, on ne peut, quand on parle de transfusion sanguine, oublier les valeurs essentielles qui doivent être celles d'un service public moderne. J'ai été très surpris, en m'entretenant avec des donneurs, de l'importance qu'ils accordent aux politiques durables : certains nous disent que nous utilisons trop de matières plastiques quand nous servons les collations ; la durabilité, que nous devrons mettre en œuvre, est un enjeu essentiel. Il nous faudra d'autre part continuer d'améliorer la transparence du fonctionnement de notre établissement. Les principes éthiques qui nous gouvernent nous obligent à la démocratie sanitaire associant les utilisateurs de produits sanguins, les associations de donneurs et les associations de patients. Nous avons à cette fin installé des comités nationaux d'échanges.
Si je suis très fier d'être président de l'EFS, c'est aussi parce que j'ai la conviction de promouvoir une solution viable dans d'autres pays. Je juge primordiale notre coopération avec nos amis libanais ou nord-américains et avec une grande partie des pays d'Afrique noire. L'organisation du don du sang dans notre pays est un exemple à suivre ailleurs : gage de citoyenneté et gage de sécurité, sa gestion nationale a pour effet que la qualité du produit sanguin est la même que l'on soit à Saint-Laurent-du-Maroni, à Nice, à Bordeaux ou à Lille. L'EFS assure l'égalité réelle des patients à qui ces produits sanguins sont nécessaires.
Des projets de révision des directives européennes sur le sang sont en cours. Il faudra faire valoir vigoureusement que notre modèle doit non seulement être défendu mais promu, parce qu'il peut aider d'autres pays.
Répondre à ces enjeux importants et difficiles à régler est enthousiasmant. Je suis déterminé et totalement engagé dans cette mission passionnante, d'intérêt capital pour la santé publique.
On perçoit, monsieur, votre attachement à l'EFS.
Je donnerai successivement la parole à M. Stéphane Viry, référent de notre commission pour l'Établissement, aux orateurs des groupes et à ceux des autres commissaires qui souhaitent s'exprimer.
Quelques observations, monsieur le président, pour donner suite à votre plaidoyer en faveur de l'établissement public que vous présidez depuis 2012.
La mission essentielle de l'EFS est d'assurer l'autosuffisance nationale en produits sanguins labiles, avec le souci permanent de sécurisation de la chaîne transfusionnelle d'une part, du respect des principes qui font notre fierté d'autre part. L'EFS est l'un des pivots du système de santé français ; son modèle éthique, fondé sur le bénévolat, l'anonymat, le non‑profit et le volontariat, nous est propre. Compte tenu de son positionnement central dans la chaîne de soin, l'Établissement doit avoir une relation de confiance avec les amicales locales de donneurs, avec les receveurs, avec les professionnels de santé et, bien sûr, avec les partenaires institutionnels.
Vous avez eu pour défi de moderniser un établissement dont les schémas de base, définis lors de sa création, il y a vingt ans, ont été assez rapidement frappés d'obsolescence. Il a donc fallu poser un diagnostic et établir une stratégie. Je le dirai sans tergiverser : nous avons eu depuis trois ans des rencontres régulières et je salue votre disponibilité et vos éclairages, qui m'ont permis d'exercer, dûment informé, la fonction de référent pour notre commission. Je vous remercie pour ce dialogue direct et j'indique dès maintenant être tout à fait favorable au renouvellement de votre mandat.
Il vous incombait de consolider, légitimer et moderniser l'EFS. Vous aviez pour priorités la collecte de demain ; l'équilibre financier de l'Établissement – et je salue votre volonté de rechercher l'efficience – ; son positionnement dans la filière du plasma sanguin en France, sujet éminemment compliqué compte tenu des coûts et de la concurrence internationale dont nous sommes l'objet ; la défense de notre modèle éthique, reposant sur le principe de la non-marchandisation du corps humain.
Je souscris volontiers à l'expression de souveraineté sanitaire que vous avez employée et à la définition que vous lui avez donnée. Je souhaite qu'au cours du nouveau mandat qui vous serait confié, vous veilliez particulièrement à la place de l'EFS dans la filière du plasma de fractionnement ; la France doit être plus compétitive, ce qui impliquera des décisions économiques. Je souhaite aussi que vous soyez très vigilant sur l'articulation opérationnelle de l'utilisation du sang, en développant les relations avec les centres hospitaliers et les agences régionales de santé pour ce qui concerne en particulier les dépôts de délivrance ; un problème se pose à Épinal à ce sujet.
Vous êtes transparents parce que vous êtes particulièrement suivis : rapport de la Cour des comptes, rapport de l'Inspection générale des affaires sociales, rapport d'un cabinet de consultants pour déterminer la force de votre modèle économique...
Très sensibles aux questions relatives au don de sang, nous avons, depuis trois ans, présenté des propositions de loi relatives à ces sujets, que la loi de bioéthique a également évoqués. Nous sommes vigilants et exigeants mais aussi confiants, étant donné la manière dont vous avez conduit l'EFS. Nous mesurons avec lucidité les défis qui se posent encore à vous et à votre conseil d'administration, et que vous avez rappelés. Le risque économique demeure, c'est une évidence, et le « rabot de Bercy » pouvant parfois avoir des conséquences malencontreuses, nous devrons savoir vous défendre, le cas échéant, qu'il s'agisse de l'avenir de la filière plasma ou de l'impact de l'éventuelle révision des directives européennes sur le modèle français de collecte.
À ce sujet, je sais vos réserves à l'idée d'abaisser à 17 ans l'âge auquel il est possible de donner son sang. Mais compte tenu de l'érosion de 10 % du nombre de donneurs chaque année, c'est là un sujet d'importance majeure pour les années à venir.
Le groupe La République en Marche fait siennes les observations de notre collègue Stéphane Viry. Assurer la sécurité de la chaîne transfusionnelle, la qualité des produits sanguins et l'autosuffisance, telles sont les missions de service public premières de l'EFS qui, au-delà de ses activités de collecte et de distribution des produits sanguins, approvisionne également le LFB en plasma et qui est un acteur reconnu dans les domaines de la recherche sur la thérapie cellulaire et l'activité thérapeutique.
Le 18 septembre dernier et ce matin encore, vous avez, monsieur le président, appelé à une mobilisation citoyenne pour le don du sang. Dix mille dons sont nécessaires chaque jour pour assurer la bonne gestion des stocks et répondre à la demande dans une période rendue difficile par la propagation de la covid‑19, mais ils ont baissé de 20 %, les dispositifs de lutte contre la pandémie entraînant la modification du comportement des donneurs. Quelles mesures préconisez-vous pour vous permettre d'assurer vos missions ? Comment votre organisation évoluera-t-elle ? Recentrerez-vous les missions déclinées en objectifs dans votre contrat d'objectifs et de performance pour la période 2020-2024 ? Quelles innovations comptez-vous adopter pour plus d'efficience, dans le respect de l'éthique qui fonde l'organisation des collectes et la gestion des flux ?
Le groupe Les Républicains vous a entendu souligner que les réserves françaises de sang sont au plus bas depuis dix ans et que la collecte est ralentie par la crise sanitaire alors que les besoins dans les hôpitaux sont au plus haut. Cette situation est très inquiétante. Nous traversons une crise sanitaire sans précédent et la collecte doit se poursuivre. Le don de sang est une problématique de santé publique majeure. Dix mille dons sont nécessaires chaque jour pour soigner plus d'un million de malades ou de grands brûlés. Or l'EFS accueille chaque année 1,7 million de donneurs, soit 4 % de la population en âge de donner. C'est d'autant moins suffisant que l'on enregistre une baisse de 10 % des dons en collectes mobiles depuis le début de l'épidémie, alors que toutes les précautions sont prises pour éviter les risques de transmission du coronavirus.
Mobiliser de nouveaux donneurs exige de rassurer sur les conditions du don, d'informer, par exemple sur le déroulement du don de moelle osseuse, de sensibiliser davantage la population à cette cause et aussi de donner une véritable reconnaissance aux donneurs. Dans le modèle français de don de sang, les bénévoles jouent un rôle essentiel par leur implication, leur altruisme, le temps qu'ils accordent à la sensibilisation et à la promotion du don ainsi qu'à l'organisation et à la tenue des collectes. À cela s'ajoutent la générosité des donneurs et une éthique partagée. Toutefois, certains territoires, notamment les petites communes rurales, peinent à recruter des bénévoles en dépit d'un nombre élevé de donneurs. Les bénévoles ont besoin de reconnaissance ; n'éloignons pas trop les centres de décision du terrain. Que préconisez-vous pour renforcer ces équipes et faire en sorte que les possibilités de donner son sang sont égales sur tout le territoire ?
Je vous remercie, au nom du groupe du Mouvement Démocrate et apparentés, pour cette intéressante présentation.
Dans mon territoire, où la Maison du don a été fermée, la possibilité de faire un don de sang est réduite à deux à quatre demi-journées. Cette situation s'explique par la pénurie de médecins. Comment, alors, rendre l'EFS plus attractif pour les médecins ? Si l'on n'y arrive pas, ne faudrait-il pas faire évoluer la présence médicale en développant le nombre d'infirmières de pratique avancée ?
Comment comptez-vous séduire de nouveaux donneurs ? Je me suis rendu compte, pour avoir une fille adolescente, que sa classe d'âge ne connaît pas le don de sang ; il y a vraiment quelque chose à faire à ce sujet.
Vous venez d'indiquer que vous devrez réaliser 50 millions d'euros d'économies ; ces économies auront-elles un impact sur la fourniture des poches de sang et des produits dérivés aux patients ?
Enfin, ayant récemment donné du sang, j'ai constaté la facilité des rendez-vous programmés. Pensez-vous généraliser au-delà des périodes de crise sanitaire cette pratique qui fait gagner beaucoup de temps ?
Le groupe UDI et Indépendants juge cette rencontre importante parce qu'elle nous donne aussi l'occasion de rendre hommage à toutes celles et à tous ceux qui, par un engagement personnel et citoyen, apportent la vie. 4 % seulement de la population qui peut donner son sang le fait, alors que 10 000 dons sont nécessaires chaque jour pour répondre à la demande. Aux côtés de l'EFS, des milliers d'associations s'affairent pour garantir le nécessaire maintien des principes de solidarité et de gratuité des dons du sang et assurer l'autosuffisance en produits sanguins de notre pays ; la Fédération française pour le don du sang bénévole compte plus de 750 000 adhérents et chacun, ici, peut témoigner du travail formidable qu'ils accomplissent partout en France. Actuellement, en raison de la crise sanitaire, les collectes se font sur rendez-vous. Les amicales de donneurs, tout en reconnaissant les avantages de cette méthode, se demandent comment réinventer leur rôle dans ce contexte, si la pratique se pérennise ; comment l'EFS les accompagnera-t-il dans cette mutation ?
Ma deuxième question concerne la détermination du groupe sanguin. Avant une intervention chirurgicale, deux prises de sang sont nécessaires à cette fin. Mais, à l'issue d'un deuxième don du sang, de plasma ou de plaquettes, l'EFS délivre au donneur une carte indiquant son groupe sanguin ; cette carte de donneur ne pourrait-elle avoir valeur probante ?
Pourriez-vous détailler l'impact possible de la révision à venir des directives européennes sur la collecte de sang ?
Enfin, peut-on travailler sur la collecte du sang des sujets transfusés ?
Je souhaite en préambule rappeler au nom du groupe Agir ensemble l'importance du don du sang, acte de solidarité et de générosité à encourager. Il faut faire connaître la nécessité de donner son sang : il en va de la bonne prise en charge des malades, quelque 500 000 personnes en moyenne recevant chaque année une transfusion sanguine. Donner son sang pour un inconnu, c'est aussi rappeler ce qui nous lie et cela contribue, modestement, à se sentir membres d'une même communauté. Le don de sang a pour spécificité, en France, d'être volontaire et bénévole. C'est ce qui fait sa richesse, mais aussi sa faiblesse en temps de crise sanitaire, on le constate en ce moment. Alors que le quart des collectes se fait dans les universités ou les entreprises, comment concilier le télétravail, qui pourrait se développer après la crise sanitaire, et une collecte efficace ? Ferez-vous de la plus grande mobilité des collectes une orientation stratégique ?
Lors de votre audition par le Sénat, en juillet dernier, vous avez fait état de vos préoccupations sur la santé financière de l'Établissement à la suite d'un changement de régime de TVA lié à la réglementation européenne. Cette modification a été compensée, dans la loi de finances pour 2019, par une exonération de taxe sur les salaires et par l'augmentation des tarifs de certains produits sanguins ; quelles sont les perspectives actuelles ?
Je m'exprime au nom du groupe La France insoumise pour vous interroger sur la situation à La Réunion, où la crise sanitaire a eu un fort impact sur la collecte. Le nombre de dons, qui n'avait pas beaucoup diminué en avril et en mai, connaît une baisse à retardement inquiétante ; avez-vous étudié la question ? Si cette décrue devait durer, par un effet de la crise sanitaire qui se prolonge, quelles solutions prendriez-vous pour éviter la pénurie de sang sur l'île ? Le problème est aggravé par le fait que l'EFS de La Réunion fournit des stocks de sang à Mayotte, où les collectes sont compliquées par le paludisme endémique. Des solutions ont-elles été prévues pour Mayotte au cas où les dons de sang continueraient de se raréfier à La Réunion ?
Lors de votre audition de 2017, vous aviez dressé un premier bilan de la transformation de l'Établissement et dessiné des priorités : introduire davantage de démocratie sanitaire ; garantir les équilibres financiers de l'EFS ; placer l'Établissement au cœur de la filière du plasma en France ; défendre, préserver et promouvoir le modèle français de non-marchandisation du corps humain. Quels objectifs sont atteints et quel chemin reste à parcourir ? Je salue l'action menée par tous vos collaborateurs qui se rendent sur le terrain et que nous rencontrons dans nos communes, grandes ou petites. Alors que la pandémie de covid‑19 nous fait nous interroger sur la souveraineté sanitaire de la France et sur les moyens de garantir notre autosuffisance en produits sanguins labiles, le don du sang, engagement citoyen, n'est pas anodin. Certaines collectivités locales font beaucoup pour faciliter et favoriser la collecte. Certaines entreprises permettent à leurs salariés de donner leur sang sur leur temps de travail ; faut-il modifier le code du travail pour généraliser cette possibilité ?
Quelles mesures prendre pour attirer plus de jeunes gens vers le don du sang ? Quel est votre avis sur l'abaissement à l'âge de 17 ans de la possibilité de donner son sang ?
Enfin, comment pourrions-nous vous aider, en plus, bien sûr, de donner notre sang, comme tous les élus de France devraient le faire pour montrer l'exemple ?
Vous avez évoqué la fragilisation du modèle économique de l'Établissement et pointé son déséquilibre financier ; une lourde mission vous attend donc au cours de votre troisième mandat. Dans ce contexte, comment développer l'innovation, moyen de répondre au défi de notre souveraineté sanitaire, et en particulier les bioproductions, aujourd'hui principalement fabriqués par des laboratoires privés ? Ainsi en est-il des lymphocytes T porteurs d'un récepteur antigénique chimérique, les CAR-T cells, dont une seule injection coûte plus de 300 000 euros à l'assurance maladie. Pour asseoir le modèle économique de l'EFS et limiter les dépenses d'assurance maladie pour ces biothérapies, peut‑on envisager que les cinq centres experts de l'Établissement engagent des collaborations avec des groupes coopérateurs au sein des centres hospitaliers universitaires ?
Le développement durable est un axe majeur du plan France Relance ; l'EFS compte‑t-il participer à certains appels à projets dans ce cadre ? Si oui, sur quels thèmes ?
Je vous remercie pour les mots que vous avez prononcés au sujet des donneurs, de leurs associations et des bénévoles. Mais, pour participer dans la mesure du possible aux assemblées et aux comités du département des Ardennes, très généreux en dons de sang, je dois vous dire que sur le terrain tout n'a pas été rose ces dernières années. Là comme ailleurs, les députés ont parfois pris des volées de bois vert au sujet de l'organisation nouvelle de la communication et des collations. Dans les comités locaux, le mécontentement affleure parfois. De plus, la crainte est évoquée que l'on en vienne à la rémunération du don. Alors que les media se focalisent sur le faible niveau des réserves de sang, je vous demande, monsieur le président, d'encourager les bénévoles ; sans eux, vous rencontrerez de grandes difficultés.
Donneuse de sang, j'ai apprécié l'organisation adoptée par l'EFS depuis l'apparition de la pandémie : inscription numérique, créneaux horaires de don précis communiqués par SMS, appels téléphoniques personnalisés... Ces bonnes pratiques seront-elles maintenues au-delà de la crise ?
D'autre part, le contrat d'objectifs et de performance 2020–2024 de l'Établissement prévoit une réorganisation de la collecte qui passe notamment par la réalisation d'un diagnostic territorial pour analyser les bonnes pratiques régionales. Pouvez-vous nous donner quelques exemples de ces bonnes pratiques ?
Je vous remercie, monsieur Viry, de votre engagement. Qu'un membre de la commission des affaires sociales suive l'EFS nous permet d'établir avec la représentation nationale une relation que je juge importante et intéressante, car elle permet d'élargir la manière dont l'Établissement, qui appartient aux Français, est vu.
Au cours des années passées, l'EFS a fait face à des événements très graves dont l'horreur des attentats ; en ces moments, la mobilisation des donneurs a fait qu'aucune victime n'a manqué de sang dans les milieux hospitaliers. Actuellement, la pandémie de covid‑19 est à l'origine d'une crise sanitaire exceptionnelle par son intensité et sa durée. L'EFS a eu à connaître des périodes successives. Pendant le confinement, l'Établissement a d'abord vu s'écrouler le nombre des dons. Cela m'a conduit à demander au directeur général de la santé de faire un appel aux dons. Il a été entendu, et cela a permis de faire revenir les donneurs assez rapidement, tout en essayant de garantir le maximum de sécurité sanitaire pour eux, les bénévoles et les salariés, comme il convenait.
C'est une chose positive qu'au cours de cette crise nous ayons pu continuer à organiser le don du sang en généralisant les rendez-vous, qui ont d'abord été un moyen de faire respecter les obligations de distanciation sociale par une gestion plus fluide et plus sereine d'importantes files d'attente de donneurs, notamment en région parisienne. Oui, nous réfléchissons à la généralisation du rendez-vous, mais à cette idée certaines associations s'interrogent sur ce que sera leur rôle futur. Nous travaillerons le sujet avec elles, et je ne pense pas que l'on doive en venir à une organisation de la collecte sur rendez-vous en tout temps et en tous lieux. Il faut conserver la capacité d'accueillir des donneurs venus sans rendez-vous, mais cela doit nous permettre d'engager avec la Fédération une réflexion sur le rôle de chacun et sa redéfinition. Les associations le savent : nous ne pouvons travailler sans elles, y compris à Charleville-Mézières où nous avons été extrêmement bien accueillis.
Pour en revenir à la situation de l'EFS, pendant une deuxième période, qui a duré quelques semaines, le niveau de nos réserves de sang a été très élevé, l'activité hospitalière ayant diminué de près d'un quart cependant que les donneurs revenaient en nombre. Mais à cette situation très favorable a succédé un écroulement à la sortie du confinement : l'importante reprise de l'activité hospitalière couplée à des dons en nombre moindre nous oblige à replanifier notre offre de collecte pour satisfaire les besoins. Nous nous y employons, et nous avons dû faire un appel aux dons insistant.
La pandémie nous conduit donc à nous interroger fortement sur notre capacité de collecte. L'EFS organise 40 000 collectes mobiles annuelles et dispose de 115 ou 120 sites fixes ; la collecte mobile recueille environ 80 % des produits sanguins. Si entre 20 et 25 % des 40 000 collectes mobiles ne peuvent plus être organisées parce qu'il n'y a plus de dons possibles dans les universités et les écoles et qu'ils sont devenus difficiles dans les entreprises, la situation se tend. C'est notamment le cas dans le nord de la France et c'est pourquoi j'ai demandé aux étudiants de se mobiliser en venant dans nos centres de collecte fixes.
Que pouvez-vous faire pour l'EFS ? Je tiens en premier lieu à remercier tous les élus qui, partout sur le territoire national, nous offrent des salles, favorisent l'action des associations et leur permettent d'accroître leur notoriété...
Nous pouvions les aider plus encore quand nous disposions de la réserve parlementaire, mais nous ne l'avons plus...
On a encore souvent en tête l'image bucolique du camion de collecte. En réalité, la collecte se fait plutôt, désormais, dans des salles municipales, ce qui permet d'améliorer l'offre de collecte. Continuer de bénéficier de cette aide importante nous permettra de continuer à fiabiliser l'offre de collecte, la pandémie ayant montré l'importance des sites fixes et la nécessité de renforcer leur fréquentation.
La filière du plasma pour fractionnement est un sujet à risque. En dix ans, la consommation d'immunoglobulines en France est passée de 5 à 9 tonnes. Elles sont produites à partir de plasma pour fractionnement, dont 80 % de la production mondiale est américaine. Sommes-nous capables, pour assurer la souveraineté sanitaire et donc les garanties apportées aux malades, de faire un effort national, ou peut-être européen, non pour supprimer un marché de médicaments mais pour parvenir au moins à une moindre dépendance en développant la collecte de plasma pour fractionnement ?
En 2013, l'EFS a collecté 600 000 litres de plasma de fractionnement, cédés au LFB ; nous lui en céderons environ 830 000 litres cette année. Nous pouvons collecter davantage, mais cela suppose d'abord une visibilité pluriannuelle de l'appareil de collecte à construire avec des bénévoles pour les inciter à un effort de long terme. Ensuite, cet effort doit être soutenable économiquement ; or, aujourd'hui, l'EFS cède le litre de plasma au LFB à un prix très inférieur au prix mondial. Si cette tarification perdure, une solution doit être trouvée qui permette le rééquilibrage financier nécessaire à l'Établissement pour développer une stratégie pluriannuelle sur ce sujet essentiel. Les problèmes de collecte qui se posent à nous se posent à l'ensemble de nos partenaires : les collecteurs privés de plasma pour fractionnement ont cessé de collecter pendant la crise épidémique, et cela signifie que la tension va croître sur le marché des immunoglobulines. Il faut garder cet élément de santé publique à l'esprit. On ne pourra résoudre le problème à moyen terme qu'en accroissant l'effort de collecte du plasma en France – plasma qui, je le rappelle, est un plasma éthique en ce qu'il n'est pas vendu. Notre pays a l'ardente obligation d'être moins dépendant du plasma nord-américain qu'il ne l'est pour l'instant. C'est un sujet dont nous devons traiter avec le ministre des solidarités et de la santé sûrement, avec le ministre chargé de l'économie également, et aussi avec la direction générale de la santé, puisqu'il est au croisement de l'économie et de la santé publique.
Vous m'avez interpellé sur le don du sang dans les petites communes. Les donneurs sont gens exigeants, et à chaque fois qu'une collecte est remise en cause dans une commune, on en entend parler avec force. Il va sans dire que la collecte étant locale, nous n'y arriverions pas sans associations et sans bénévoles. D'autre part, je suis comptable de la manière dont les deniers publics sont dépensés, ce qui me conduit à poursuivre le travail commencé avec certaines associations pour les aider à se regrouper. Ainsi, en Gironde, une grosse association qui couvre tout le sud du département fait des collectes importantes. Nous devons vérifier avec les associations que les collectes sont d'un volume suffisant.
Je sais que la réforme des subventions a provoqué le mécontentement de certaines associations. Dans certaines régions, les associations étaient historiquement chargées de la collation, pour partie rémunérée par l'EFS. Nous nous sommes attachés à harmoniser les subventions ; cela a eu des conséquences – comment dire – pas entièrement espérées pour certaines associations dont le financement a diminué. Je précise que le montant global des subventions de l'Établissement aux associations de donneurs de sang s'élève à 1 million d'euros environ. Je suis responsable, comme les associations concernées, de la bonne utilisation de cet argent public. Il importe de préciser que la réforme, qui a permis d'égaliser les versements, s'est faite sans baisse aucune du montant global alloué : c'est la répartition régionale des fonds qui a changé.
La situation outre-mer est difficile, vous le savez. L'EFS collecte dans tous les départements sauf en Guyane et à Mayotte, où les conditions épidémiologiques sont telles que l'on ne peut garantir la sécurité des produits sanguins que nous donnerions aux receveurs. Mais il n'y a pas d' a priori sur la collecte et il serait évidemment intéressant de pouvoir, un jour, collecter à nouveau en Guyane. C'est d'ailleurs pourquoi, à mi-janvier me semble-t-il, le directeur général de la santé a demandé à Santé publique France de réaliser des études épidémiologiques pour déterminer les conditions d'un retour aux dons dans ces départements.
Je suis très fier d'avoir favorisé l'effort de recherche publique de l'Établissement pendant la pandémie. Beaucoup d'études ont été menées. J'en citerai deux en particulier, dont vous avez peut-être entendu parler. La première a permis de déterminer la prévalence du virus à partir des échantillons de produits sanguins prélevés dans l'Est de la France et dans l'Oise, en comparant le taux de prévalence pour les donneurs de sang et pour le reste de la population. La seconde, qui porte sur la capacité du plasma convalescent à améliorer la prise en charge de la maladie, est toujours en cours. L'EFS est un établissement de recherche. Nous avons cinq plateformes de thérapies innovantes et nous savons produire des CAR-T cells, une thérapie génique. Parce que la prise en charge de certaines des CAR-T cells produites par l'EFS serait effectivement bien moins coûteuse pour l'assurance maladie que ne le sont les CAR-T cells vendues par les laboratoires pharmaceutiques, je suis très favorable à l'instauration de partenariats permettant une production renforcée et en tout cas moins dépendante de ces laboratoires. Deux autres domaines de recherche me paraissent importants, qui touchent aux nouvelles techniques de détection : l'immunothérapie – comment modifier une cellule pour combattre une maladie – et la médecine régénératrice, consistant à prélever des cellules-souches qui, après avoir été mises en culture, permettront de réparer un muscle ou un organe endommagé, un muscle cardiaque par exemple. Cette recherche de très haut niveau est très importante pour l'EFS.
La recherche de nouveaux donneurs est une de nos préoccupations permanentes. Vous l'avez certainement constaté, nous essayons de moderniser l'image de l'EFS, d'être plus présents sur les réseaux sociaux pour attirer des jeunes gens au sein des communautés de donneurs. Le don du sang a un sens pour les jeunes : 30 % des donneurs sont âgés de moins de 30 ans. Ils viennent en masse donner leur sang, mais il nous faut savoir les fidéliser.
L'idée d'autoriser le don de sang à partir de 17 ans ne m'agrée pas, c'est exact. Ancien professeur, je suis convaincu de l'importance de parler du don de sang aux adolescents, mais les conditions imposées aux mineurs me semblent difficilement compatibles avec le fait que l'âge de la majorité sexuelle est fixé à 15 ans. Je vois mal une jeune fille ou un jeune homme devoir demander une autorisation parentale pour faire ce don, ce qui impliquerait éventuellement d'apprendre à l'un de ses parents l'existence de sa vie sexuelle. La discordance entre âge de la majorité civile et âge de la majorité sexuelle me fait penser qu'il est sûrement préférable de ne pas retenir cette mesure.
4 % seulement de la population en âge de donner son sang le font. Nous nous attachons donc à mieux accueillir les donneurs et à leur faire passer un moment agréable ; vous le constaterez quand vous irez dans un de nos centres, comme vous le faites régulièrement, j'en suis sûr.
Pour ce qui est de nos perspectives financières, je le redis : nous devons continuer d'être efficients, mais il nous sera impossible de rééquilibrer durablement l'Établissement sans augmentation des tarifs des produits que nous cédons.
Qu'ai-je vraiment réussi et qu'ai-je moins bien réussi ? Tous les matins, à mon réveil, je consulte la « météo du sang », autrement dit l'état des stocks. On s'habitue à ce qu'il y ait toujours des stocks, et l'on voit aujourd'hui qu'en de certaines périodes ils peuvent être insuffisants. On ne peut donc jamais être content, parce que le travail n'est jamais terminé... Je suis assez fier pour l'Établissement des efforts que nous avons faits et je vous remercie de vos aimables propos pour les équipes ; ils me donnent à penser que l'EFS est peut-être plus connu et plus reconnu institutionnellement qu'il ne l'était. Je parcours le pays, je me suis rendu jusqu'à Charleville-Mézières où j'ai été très bien accueilli, je trouve la relation entre l'Établissement et les élus très bonne et très forte et j'y suis très sensible. Nous avons commencé à réorganiser la relation avec les donneurs, point important de notre action. Il nous faudra beaucoup d'énergie et de détermination pour parvenir au rééquilibrage économique. Pour le professeur d'économie que j'étais initialement, parler de renforcer l'organisation de l'EFS, c'est aussi lui trouver un modèle économique ; l'état des finances publiques étant celui que l'on sait, il y faudra une force de conviction importante. Je vous remercie du soutien que vous apportez à l'Établissement.
Sans associations, pas de collecte... J'aimerais donc revenir sur la réduction de la subvention pour les collations, passée, en Moselle, de 4,20 euros à 3 euros par personne. Or ces collations font la fierté des bénévoles et la performance des collectes. Dans nos territoires ruraux, la proportion de donneurs dans la population et le nombre de dons par habitant sont plus élevés que dans les métropoles. Les stocks sont en baisse en France, mais si, partout, le nombre de dons et leur fréquence étaient ceux de nos campagnes, une bonne partie du manque serait comblée. Ces bénévoles mobilisent leurs proches, se rendent dans les écoles, les collèges, les lycées pour sensibiliser les futurs donneurs, organisent des moments conviviaux ou des événements qui fédèrent et animent nos territoires et leur permettent en partie de s'autofinancer. Aussi, j'aimerais vraiment connaître les raisons qui ont conduit à réduire ce financement. Cet arbitrage a suscité énormément d'incompréhension, parce que le dispositif a toujours très bien fonctionné.
D'autre part, peut-être est-ce une évidence pour vous, mais j'aimerais vous entendre dire clairement que la rémunération du don de sang ne saurait être une option en France. On voit comment, dans certains centres commerciaux en Suisse, aux États-Unis ou ailleurs, la marchandisation d'éléments du corps humain, conduit malheureusement certains à mentir sur les déclarations préalables à un don qui devient un business assez malsain.
La collation était traditionnellement davantage prise en charge dans votre région qu'au niveau national. Cela a été remis en cause par une règle nationale. Je suis prêt à étudier avec les responsables régionaux comment améliorer les choses car j'ai tout intérêt à ce que les associations, maillon essentiel de l'accueil et de la fidélisation des donneurs, fonctionnement au mieux. Les réformes sont nécessaires, mais nous ne pouvons les faire sans avoir les associations avec nous. Il faut donc les aider à ce sujet. Je m'engage à reprendre contact avec vous et avec elles, et j'écouterai attentivement ce qui me sera dit.
Que la rémunération du don de sang doive demeurer prohibée en France est une telle évidence pour moi qu'est peut-être resté latent ce qui aurait dû être plus manifeste. Je redis donc de la manière la plus nette qu'il y a des secteurs de la vie dans lequel le marché ne peut pas être. Singulièrement quand il s'agit de don de sang, toute tentative ou toute volonté de transformer ce geste altruiste en transaction marchande doit être bannie. J'y vois deux raisons. La première est qu'il n'est pas éthique d'orchestrer une collecte rémunérée organisant un revenu. On voit ce que cela provoque dans certains pays : une catastrophe humaine. Je suis absolument contre le « business du sang » et il est à notre honneur de bannir cette pratique, comme le font d'autres. D'autre part, la marchandisation n'est pas efficace. Nous avons montré qu'à condition de mobiliser fortement les associations, nous pouvons prendre en charge les besoins des malades. Il existe deux autres systèmes de dons possibles : l'achat de sang et les dons intrafamiliaux ; mais quand le don intrafamilial concerne une personne atteinte d'une maladie du sang, la collecte régulière est impossible, ce qui contraint finalement à acheter du sang. Seuls les systèmes comparables au nôtre apportent le niveau de sécurité sanitaire nécessaire. C'est pourquoi notre modèle est observé très attentivement par des pays en développement et par des pays plus développés, attachés comme nous le sommes à la non‑marchandisation du corps humain, principe consubstantiel à l'EFS.
La séance est levée à dix-huit heures trente-cinq.
Présences en réunion
Réunion du mardi 22 septembre 2020 à 17 heures 15
Présents. - Mme Stéphanie Atger, M. Sébastien Chenu, M. Paul Christophe, Mme Christine Cloarec-Le Nabour, M. Marc Delatte, Mme Audrey Dufeu, Mme Perrine Goulet, Mme Charlotte Lecocq, M. Bernard Perrut, Mme Bénédicte Pételle, Mme Michèle Peyron, M. Alain Ramadier, M. Jean-Hugues Ratenon, Mme Valérie Six, M. Jean-Louis Touraine, Mme Isabelle Valentin, Mme Annie Vidal, Mme Corinne Vignon, M. Stéphane Viry
Excusés. - Mme Justine Benin, M. Guillaume Chiche, Mme Jeanine Dubié, Mme Claire Guion-Firmin, Mme Fadila Khattabi, M. Thomas Mesnier, M. Patrick Mignola, M. Jean-Philippe Nilor, Mme Nadia Ramassamy, Mme Mireille Robert, Mme Nicole Sanquer, Mme Hélène Vainqueur-Christophe, M. Boris Vallaud
Assistaient également à la réunion. - M. Pierre Cordier, M. Fabien Di Filippo