Commission d'enquête relative à l'état des lieux, la déontologie, les pratiques et les doctrines de maintien de l'ordre

Réunion du jeudi 3 décembre 2020 à 18h00

Résumé de la réunion

Les mots clés de cette réunion

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  • manifestation
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  • procureur

La réunion

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La séance est ouverte à 18 heures 05.

Présidence de M. Jean-Michel Fauvergue, président.

La Commission d'enquête entend en audition M. Éric Dupond-Moretti, garde des Sceaux, ministre de la Justice.

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Mes chers collègues, après l'intervention liminaire de M. le garde des Sceaux, notre échange se déroulera sous forme de questions et réponses. Cette audition est diffusée en direct sur le site de l'Assemblée nationale.

Avant de vous donner la parole pour une brève intervention liminaire, monsieur le garde des Sceaux, l'article 6 de l'ordonnance du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires imposant aux personnes auditionnées par une commission d'enquête de prêter le serment de dire la vérité, toute la vérité, rien que la vérité, je vous invite à lever la main droite et à dire : « Je le jure ».

(M. Éric Dupond-Moretti, garde des Sceaux, ministre de la Justice, prête serment.)

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éric Dupond-Moretti, garde des Sceaux, ministre de la Justice

Votre commission d'enquête porte sur l'état des lieux, la déontologie des pratiques et les doctrines de maintien de l'ordre en France. Je vous remercie de me permettre de m'exprimer sur ce sujet, particulièrement d'actualité. Notre société et notre époque traversent depuis de nombreuses années des crises de natures diverses qui s'expriment régulièrement par des manifestations, hélas théâtres d'affrontements d'une rare violence. Les forces de l'ordre sont souvent la cible de groupes très organisés et des dégradations de biens publics ou privés accompagnent régulièrement ces exactions.

C'est dans ce cadre que les services de police et de gendarmerie nationale sont fortement mobilisés pour des opérations de maintien de l'ordre qui relèvent de leur mission de police administrative. En effet, le maintien de l'ordre public n'est pas une prérogative du ministère de la Justice. Il n'en demeure pas moins que l'autorité judiciaire a une place importante dans ces dispositifs. Le ministère de la Justice est celui des libertés ; or, il convient de le rappeler, même si personne ne l'a oublié, la liberté de manifester est évidemment une garantie essentielle à notre démocratie, qu'il faut à tout prix protéger. C'est ce à quoi s'emploient les forces de l'ordre dans les dispositifs qu'elles déploient.

Malheureusement, comme vous, je constate que les manifestants ne peuvent plus participer à un défilé sur la voie publique sans que des violences ou des dégradations d'une extrême gravité ne s'y déroulent. Cette réalité met en péril la sécurité de ceux qui souhaitent exprimer légitimement et pacifiquement leurs convictions, ce qui est l'essence même de notre démocratie. Depuis quand un défilé du 1er mai – qui pouvait auparavant réunir des familles – ne s'est-il pas terminé en affrontements violents avec les forces de l'ordre ?

L'intervention de l'autorité judiciaire dans ces opérations de maintien de l'ordre doit aussi s'entendre dans ce contexte : à l'occasion de la commission d'infractions, bien sûr, pour faire identifier et interpeller leurs auteurs avant de les poursuivre devant les tribunaux quand les faits sont caractérisés, mais aussi par des contrôles préventifs, pour éviter que des personnes mal intentionnées n'intègrent les cortèges afin d'y semer le trouble. C'est pourquoi nous avons engagé un travail important pour assurer une meilleure prise en compte des impératifs judiciaires dans les opérations de maintien de l'ordre.

Plusieurs circulaires ont été diffusées par mon ministère ces dernières années dans cet objectif : la circulaire du 20 septembre 2016 relative à la lutte contre les infractions commises à l'occasion des manifestations et autres mouvements collectifs ; la circulaire du 9 avril 2018 relative au traitement judiciaire des infractions commises en lien avec l'opération d'évacuation de la zone d'aménagement différée (ZAD) de Notre-Dame-des-Landes ; les circulaires du 22 novembre et du 6 décembre 2018 relatives au traitement judiciaire des infractions commises en lien avec le mouvement de contestation dit des Gilets jaunes.

Je me réjouis que le schéma national du maintien de l'ordre (SNMO), établi très récemment par le ministère de l'Intérieur, prenne en compte cette dimension judiciaire, indispensable corollaire au maintien de l'ordre public. Il prévoit ainsi l'intégration plus formelle du dispositif judiciaire sous l'autorité du procureur de la République, afin d'accélérer le traitement judiciaire des auteurs de violence. Cette évolution vise à préserver le droit de manifester et la liberté d'aller et venir contre les troubles graves à l'ordre public et à assurer la sécurité de nos concitoyens. L'intervention de l'autorité judiciaire, gardienne des libertés individuelles, permet de veiller à la qualité des enquêtes menées à charge, et bien sûr à décharge, de garantir le respect de la procédure et d'assurer une sanction rapide et efficace en cas d'infractions avérées.

L'expérience a démontré qu'il était nécessaire de prévoir une meilleure association de l'autorité judiciaire dans la phase préalable de la manifestation, notamment par une association aux réunions préparatoires. Cette articulation permet d'anticiper la dimension judiciaire de l'événement, souvent délaissée au profit du maintien de l'ordre, et de mieux coordonner les actions. Le rôle du procureur de la République est à cet égard central. Sa présence au cours du dispositif permet notamment un contrôle plus rapide des motifs justifiant un possible placement en garde à vue, une vérification des charges en temps réel permettant d'optimiser la réponse pénale qui, bien sûr, doit être apportée.

Comme le ministère de la Justice l'a déjà rappelé à plusieurs reprises par voie de circulaire, les auteurs d'infractions dans le cadre de manifestations doivent faire l'objet d'une réponse pénale rapide et adaptée aux troubles causés à l'ordre public. Mais l'autorité judiciaire peut parfois intervenir avant que les infractions ne soient commises : c'est le cas pour les contrôles d'identité dit préventifs, qui visent à empêcher l'introduction de tout type d'objet pouvant être assimilés à des armes par destination.

Prévenir la commission de l'infraction est évidemment tout aussi important que de la traiter au mieux, si elle est finalement commise. Mais le procureur de la République n'est jamais tenu de délivrer les réquisitions sollicitées par les services de police ou de gendarmerie : il apprécie librement si les réquisitions de contrôle d'identité lui paraissent utiles, adaptées et proportionnées. D'ailleurs, la présence du procureur de la République sur les lieux de réalisation des contrôles d'identité, encouragée par mon ministère dès 2007 dans tous cadres, et non uniquement celui des manifestations, est de nature à garantir le respect des droits des personnes contrôlées et à s'assurer de l'absence de caractère discriminatoire du contrôle effectué.

En outre, ces réquisitions sont encadrées dans le temps et dans l'espace et ne peuvent jamais conduire à des contrôles généralisés, qui contreviendraient aux principes constitutionnels. Enfin, ce n'est que lors du constat d'infraction que les contrôles conduisent à des mesures privatives de liberté, par exemple lors de la découverte d'armes par destination ou de substances dangereuses, qui peuvent caractériser le délit de participation à un groupement en vue de la préparation de violences ou de destructions, quand cette découverte est associée à d'autres éléments objectifs.

Toutes les mesures prises à l'encontre de manifestants le sont en application d'un cadre légal strict, contrôlé par l'autorité judiciaire, qu'il s'agisse des retenues à la suite d'une vérification d'identité, ou des gardes à vue décidées par un officier de police judiciaire (OPJ) sous le contrôle du procureur.

Enfin, le SNMO rappelle les exigences de professionnalisme et d'exemplarité attendues lors de l'emploi de la force dans les manifestations : la force doit être absolument nécessaire, strictement proportionnée et graduée, avec des moyens adaptés. Il prévoit que chaque usage d'une arme de force intermédiaire est tracé. Une doctrine propre à l'emploi du lanceur de balles de défense (LBD) a été définie, avec la désignation systématique d'un superviseur pour chaque tireur. Ces évolutions répondent utilement aux procédures dont mon ministère a eu connaissance dans le cadre des remontées d'informations relatives à celles d'entre elles mettant en cause des forces de sécurité intérieure (FSI) lors des manifestations.

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Merci, monsieur le garde des Sceaux. Nous entendions surtout parler de la judiciarisation dans le domaine des techniques de maintien d'ordre et du maintien de l'ordre lui-même – c'est tout l'intérêt de votre présence. Depuis quelques années, elle s'est invitée dans le débat, et c'est heureux.

Lors de nos auditions, plusieurs représentants de mouvements respectables, comme Amnesty International ou la Ligue des droits de l'homme, se sont plaints de cette judiciarisation croissante. Certains sont même allés jusqu'à affirmer qu'elle allait à l'encontre de la protection du droit et de la liberté de manifester. Que pensez-vous de ces affirmations ?

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éric Dupond-Moretti, garde des Sceaux, ministre de la Justice

Je vous répondrai avec beaucoup de liberté : quand les membres d'Amnesty International ou de la Ligue des droits de l'homme manifestent, ce qui est leur droit le plus absolu, ils ne le font pas avec des poings américains, des marteaux, des barres de fer, des masques, des lunettes de piscine, tout matériel qui ne me semble pas indispensable place de la République.

On a aujourd'hui une conception de la liberté assez singulière. Comme citoyen, j'observe les manifestations ; parfois, on qualifie de fascisme le fait de demander à nos concitoyens de porter le masque. Des mots ont été dévoyés, dont celui de « liberté ». Les forces de l'ordre n'entravent jamais les manifestations. Elles visent à permettre que ces dernières se déroulent sans les violences que nous déplorons.

Je le redis avec une forme de nostalgie : j'ai le souvenir de manifestations du 1er mai, par exemple, où l'on pouvait tranquillement se promener avec sa famille. Si le droit de manifester est une liberté absolue, c'était aussi celle des commerçants d'ouvrir leur commerce le week-end dernier. La liberté, ce n'est pas le droit d'entraîner les autres à des exactions, ce n'est pas le droit d'exercer des violences, ce n'est pas le droit de jeter des pavés sur les policiers, ce n'est pas le droit de dégrader des vitrines ou des abribus. Quand certains arrivent dans une manifestation avec des marteaux, je me félicite que la judiciarisation préventive permette de les interpeller. S'ils ne l'avaient pas été, qu'auraient-ils fait de leurs marteaux ?

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Je vous remercie pour votre liberté de ton. J'espère que vous la garderez pour répondre à mes questions. Sans chercher à vous titiller, je me permets une petite réflexion sur le port des lunettes de piscine dans une manifestation : peut-être n'êtes-vous pas allé manifester depuis longtemps, mais pratiquement toutes les manifestations d'une certaine ampleur, à Paris en particulier, ont tendance à dégénérer, et pas seulement à la fin : alors que la foule est encore là de manière parfaitement légale, des incidents surviennent, auxquels on répond par des tirs de lacrymogène. J'ai les yeux fragiles ; si je devais participer à une manifestation, sans avoir l'intention de casser quoi que ce soit, j'aurais tendance, à titre purement préventif, à emporter une paire de lunettes de piscine pour ne pas pleurer comme une madeleine. Faut-il vraiment les mettre dans la même catégorie que les marteaux ? D'ailleurs, au cours des auditions, on nous a confirmé que ceux qui étaient pris avec des lunettes de piscine n'étaient jamais poursuivis.

Vous avez également rappelé que les forces de l'ordre étaient là pour empêcher les incidents. C'est effectivement leur rôle, mais force est de constater, et de le déplorer, que bien souvent, elles n'empêchent plus les manifestations de dégénérer. Comment parvenir à un meilleur traitement des situations de tension ?

Certaines manifestations, notamment celle du 1er décembre 2018, ont donné lieu à près d'un millier de gardes à vue. Vous n'étiez alors pas garde des Sceaux, mais pensez-vous que le dispositif des parquets est adapté ? Dans ce cas de figure, même s'ils ne procèdent pas aux gardes à vue, combien de parquetiers sont présents pour les contrôler ?

M. Rémy Heitz, procureur de la République de Paris, nous a confirmé qu'une note, dont la paternité de la rédaction reste à déterminer, avait été rédigée, incitant les magistrats du parquet à prolonger les gardes à vue des manifestants interpellés. Pour quelles raisons ? On peut se dire qu'en les maintenant au chaud, cela en fait un peu moins dans la rue qu'en les libérant au bout de quatre heures… Peut-être est-ce l'objectif recherché ? Une telle note ne pose-t-elle pas en soi problème au regard du respect des libertés, surtout quand la plupart des gardes à vue qui interviennent au cours des manifestations se traduisent par des libérations sans poursuites ? Ce dernier point peut également nous interpeller.

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éric Dupond-Moretti, garde des Sceaux, ministre de la Justice

Je veux bien vous concéder que la présence de lunettes de piscine dans un sac n'est peut-être pas un élément suffisant – d'où l'intérêt de l'intervention d'un magistrat. Le procureur analyse toujours les faits, à charge et à décharge : vous portez de temps en temps des lunettes de piscine parce que vous avez les yeux fragiles, mais vous n'avez pas en même temps un marteau scotché sur la poitrine, une barre de fer ou un poing américain… On a découvert des tonnes de ferraille dans le cadre des contrôles préventifs !

Vous me parlez d'améliorer le traitement. Je ne vous apprendrai rien en vous rappelant que je ne suis pas ministre de l'Intérieur, mais les contrôles préventifs, qui conduisent à l'interpellation de ces individus porteurs de tout un attirail – passons sur les lunettes de piscine –, améliorent singulièrement le traitement de l'événement, puisqu'ils n'iront pas casser au cours de la manif… L'idée centrale, c'est bien de préserver la liberté absolue de manifester tranquillement et de s'exprimer pacifiquement, ce qui est l'objectif de 99,99 % des manifestants. Et puis vous avez le reste, autrement dit les casseurs. Et ceux-là, il faut absolument qu'on les arrête.

Pour commencer, ce sont eux, d'une certaine façon, qui entravent les manifestants et mettent leur sécurité en danger. Extraordinaire paradoxe : il arrive que les manifestants manifestent contre la police, ce qui est leur droit de citoyens, pendant que les malheureux policiers sont obligés, c'est normal et c'est leur devoir, de protéger ceux qui viennent jusqu'à leur demander de se suicider ! Et on vient me dire que les libertés sont menacées dans ce pays ? Il y a peu de pays où on peut manifester ainsi et dire des choses pareilles aux policiers…

Bien sûr, il y a aussi des violences policières, qui ont été judiciarisées, et c'est normal. J'essaie d'être un homme nuancé et de bons sens. Je n'aime pas le manichéisme : ce n'est pas tout blanc ou tout noir. Il y a évidemment chez certains policiers des comportements qui ne sont pas républicains, mais cela ne permet pas de jeter l'anathème et l'opprobre sur toute la police, je pense que nous en serons d'accord.

Lorsque des exactions sont commises, le contrôle et le traitement préventifs ont tout leur intérêt. Les chiffres sont éloquents : à l'occasion des manifestations des Gilets jaunes, 3 393 gardes à vue ont été prononcées, pour 555 comparutions immédiates, 187 convocations par officier de police judiciaire (COPJ), 44 comparutions sur reconnaissance préalable de culpabilité (CRPC), 942 rappels à la loi par délégué du procureur, 79 enquêtes préliminaires, 36 informations judiciaires, 1 327 classements sans suite. À eux seuls, ces chiffres démontrent que le parquet analyse bien tous les éléments à charge et à décharge ; il est probable que, parmi les mille trois cent vingt-sept classements sans suite, il y a probablement quelqu'un qui se promenait avec des lunettes, qui n'avait pas le profil d'un casseur, mais juste les yeux fragiles… Mais cela, c'est le travail du parquet et c'est son honneur de le faire.

Vous m'interrogez sur une note interne qui a soulevé beaucoup de discussions. Le garde des Sceaux, vous le savez, ne peut rien demander aux procureurs, si ce n'est par voie de circulaire ; comme il s'agit d'une note interne, vous demanderez au procureur de la République, si vous souhaitez l'auditionner, en quoi elle consiste et pourquoi il l'a prise. C'est lui qui en est le responsable, pas le garde des Sceaux. Ce disant, je ne me mets pas à distance du procureur de la République : c'est à vous d'interroger les gens sur ce qu'ils ont pu faire et qui peut les engager. Cette note interne a été signée par le procureur de la République ; cela ne vient pas de la chancellerie.

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Nous l'avons fait. Je souhaitais juste savoir si vous approuviez cette pratique, mais vous pouvez vous dégager de toute responsabilité en indiquant que c'est celle du procureur…

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éric Dupond-Moretti, garde des Sceaux, ministre de la Justice

Je ne me dégage de rien. Vous savez bien que je ne peux pas donner d'ordres au procureur pour des raisons qui tiennent à la séparation des pouvoirs. Ce n'est pas un détail ! Je ne fuis pas votre question, je dis seulement que cela ne relève pas de ma responsabilité. Vous avez interrogé le procureur ; chacun doit répondre de ce qu'il a fait. Je ne peux rien vous dire d'autre. Et cela ne veut pas dire que je me désolidarise de cette note interne ; je redis seulement que je n'en suis pas à l'origine.

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Dans votre propos liminaire, vous avez évoqué la présence de groupes très organisés au sein des manifestations. S'ils sont très organisés, c'est qu'on les a identifiés. En conséquence, les services de police et de justice doivent avoir un regard sur eux s'ils ont commis des actes répréhensibles. Ont-ils fait l'objet d'enquêtes judiciaires, comme certains mouvements islamistes ou d'autres mouvements néfastes à la paix publique ? La justice ne peut-elle donc pas intervenir de manière préventive et les poursuivre ? On arrête de nombreux manifestants – vous avez cité les chiffres –, mais s'intéresse-t-on aussi à ceux qui organisent tout cela ?

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éric Dupond-Moretti, garde des Sceaux, ministre de la Justice

À ma connaissance, des enquêtes ont été lancées par le parquet de Paris et sont en cours. Elles visent les black blocs et un certain nombre d'autres groupes ultraviolents, notamment d'extrême droite. Je ne peux pas vous en dire plus.

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Je comprends tout à fait. Il est déjà bien de savoir que vous enquêtez sur ces groupes.

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éric Dupond-Moretti, garde des Sceaux, ministre de la Justice

Ne mélangeons pas les choses : de la même façon qu'une note interne du procureur n'est pas une circulaire du ministre, moi, je n'enquête sur rien.

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éric Dupond-Moretti, garde des Sceaux, ministre de la Justice

Je sais que des enquêtes sont en cours, rien de plus. J'en aurai connaissance, non pas en lisant les procès-verbaux, car ils ne remontent pas à la chancellerie, mais lors des remontées d'information, c'est-à-dire, certainement, quand elles auront abouti – ce que j'espère évidemment.

Je suppose que les groupes en question font aussi l'objet d'une surveillance par les services, mais c'est au ministre de l'Intérieur qu'il faut demander ce qu'il en est. En ce qui me concerne, je suis dans l'impossibilité de répondre à ces questions précises.

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Le nouveau schéma national du maintien de l'ordre prévoit que des magistrats peuvent être invités dans certains lieux de décision, à l'image des salles de commandement. Qu'en pensez-vous ? Nous avons interrogé quelques magistrats à ce propos : ils sont très sceptiques, pour ne rien vous cacher.

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éric Dupond-Moretti, garde des Sceaux, ministre de la Justice

La coopération entre la police et la justice est essentielle. Le fait que la justice soit présente permet d'abord, sur le terrain probatoire, d'établir un certain nombre de choses : quand le procureur a vu, il a vu… Je pense que le ministère de l'Intérieur est lui aussi demandeur de cette coopération. Et pour ma part, je souhaite l'intensifier, car je trouve qu'il est bon que police et justice travaillent aussi étroitement que possible l'une avec l'autre.

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Certaines associations, dont je n'ai pas besoin de donner le nom car nous les connaissons tous, déplorent justement la proximité entre les forces de l'ordre et le ministère public. Ne pensez-vous pas qu'il pourrait quand même être utile d'opérer une certaine distanciation, dans la mesure où, parfois, des violences sont commises par des membres des forces de l'ordre ? Heureusement, de tels faits sont assez rares, mais ils posent question à l'opinion, autant que les violences à l'encontre des policiers, lesquelles sont tout à fait inacceptables. Or la proximité entre les forces de l'ordre et le ministère public peut interroger. En tout cas, certaines associations défendent cette idée dans les médias. Quelles réflexions cela vous inspire-t-il ?

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Certaines associations ont effectivement évoqué une proximité de nature à nuire à la qualité des réponses immédiates apportées aux violences policières, notamment sur le plan judiciaire. Elles demandent donc une distanciation, tout en souhaitant aussi, bien évidemment, que les procureurs dirigent les enquêtes, ce qui me semble assez antinomique.

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éric Dupond-Moretti, garde des Sceaux, ministre de la Justice

Vous connaissez certainement ce très vieux slogan, qui nous avait tous amusés : « Police partout, justice nulle part ». Là, ce serait plutôt : « Police présente, et justice qui regarde ». En effet, de quoi s'agit-il ? Des magistrats du parquet vont se retrouver dans les salles de commandement. Cela leur permettra de comprendre les enjeux et les difficultés, mais il ne s'agit pas de cautionner quoi que ce soit. De quel droit leur ferait-on une sorte de procès a priori ? Au prétexte qu'ils sont tout près des policiers, ils feraient mal leur travail, ils abdiqueraient sur leurs principes, et cette forme de proximité deviendrait malsaine ? Ce n'est pas du tout ainsi que j'envisage les choses. Je pense même que cela offre davantage de garanties : quand le procureur a vu un certain nombre de choses, cela peut être plus intéressant sur le terrain probatoire qu'un procès-verbal.

D'ailleurs, ce que disent ces associations n'a pas de sens : dans l'enquête préliminaire, qui contrôle le travail de la police ? Le procureur. Est-ce qu'il viendrait à l'idée de certains de ces dénonciateurs professionnels de dire que, du fait de la proximité entre le parquet et la police, la justice ne contrôle pas le travail des OPJ ? Dire cela conduirait à l'effondrement de toute la procédure pénale s'agissant de l'enquête préliminaire. Pour moi, au contraire, la présence d'un magistrat, constitutionnellement garant de la liberté individuelle, c'est un plus, non un moins.

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Que pensez-vous du dépaysement systématique de l'instruction et du jugement des affaires mettant en cause des policiers ou des gendarmes, dans le but, sinon de renforcer, à tout le moins de ne pas mettre en cause l'impartialité et la neutralité des magistrats ? J'ai déjà une idée de votre réponse, mais je vous pose quand même la question…

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éric Dupond-Moretti, garde des Sceaux, ministre de la Justice

D'abord, le dépaysement n'est pas systématique : dans une petite juridiction, il est normal de dépayser, précisément pour ne pas prêter le flanc à la suspicion. Mais dans une grande juridiction, l'affaire n'est pas dépaysée, ce qui est tout aussi normal : c'est le juge naturel qui s'en occupe. Je vous ferai remarquer que, dans l'affaire de M. Zecler, ce producteur de musique qui a été tabassé dans des conditions scandaleuses, c'est le parquet de Paris qui a déféré les policiers et requis le placement en détention de deux d'entre eux, et ce sont des juges d'instruction parisiens qui ont ordonné leur placement en détention.

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Monsieur le garde des Sceaux, vous avez rappelé un certain nombre d'évidences concernant la procédure et le fonctionnement de la justice, en tout cas tel qu'il devrait être. Mais, vous l'aurez bien compris, au fur à mesure des auditions, qu'il y a parfois un hiatus entre ce qui devrait être et ce qui se passe sur le terrain.

Samedi dernier, par exemple, j'aurais bien aimé avoir des lunettes de piscine. J'étais place de la République, à Lille, dans une manifestation autorisée. La veille, à vingt-trois heures, la marche avait été interdite – ce qui pose d'ailleurs la question de la possibilité de recours : à Paris, il a été possible d'en former un, mais pas à Lille. Quoi qu'il en soit, je suis donc resté place de la République pendant toute la durée de la manifestation. Certains participants ont voulu se mettre en mouvement, car c'est pour cela qu'ils étaient venus. En définitive, je me suis retrouvé entouré de gaz lacrymogène. Heureusement, j'avais sur moi du sérum physiologique – j'en prends toujours, car le gaz lacrymogène, ce n'est pas très agréable.

Au regard du nouveau schéma national du maintien de l'ordre, prévoyez-vous d'envoyer aux procureurs une circulaire de politique pénale précisant la manière dont vous concevez le rôle de l'autorité judiciaire – en l'occurrence, plus précisément, celui du ministère public ? J'ai bien compris que vous ne pouviez pas donner d'ordre à Rémy Heitz, même s'il est placé sous votre autorité hiérarchique… Quoi qu'il en soit, va-t-on dire aux procureurs d'aller, non pas seulement dans les salles de commandement, qui ne reflètent qu'une partie de la réalité, mais sur le terrain ? Vont-ils contrôler les fouilles opérées par les policiers sur le fondement de l'article 78-2-2 du code de procédure pénale ? Prendront-ils le pouls des manifestations ? Bref, s'impliqueront-ils pleinement dans le nouveau schéma national du maintien de l'ordre ?

Et puis, vous pourriez aussi leur rappeler qu'on ne place pas une personne en garde à vue lorsqu'on n'a pas d'éléments contre elle – ce que vous venez d'ailleurs de nous dire. Il faut avoir un moyen de contrôler ce qui se passe. Le taux de classement sans suite très élevé s'explique certes par le fait que l'autorité judiciaire fait son travail – heureusement –, mais il montre aussi que la police a interpellé assez largement, et sur la base d'éléments peu probants. Certes l'autorité judiciaire fait son travail, mais entre-temps vous aurez été retenu jusqu'à vingt-quatre heures – pour ne pas dire plus : je pense à ce cameraman de France 3 qui a passé trente-six heures en garde à vue après la manifestation devant l'Assemblée nationale, il y a deux semaines.

Je comprends donc les principes que vous avez énoncés, et nous les partageons tous, mais la difficulté réside dans leur application : prévoyez-vous une circulaire d'application en la matière ?

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Lors de son audition devant notre commission, le préfet Lallement a souligné la difficulté d'organiser le travail des forces de l'ordre compte tenu du fait que, désormais, beaucoup de manifestations ne sont pas déclarées, contrairement à ce que prévoient les textes en vigueur. Considérez-vous vous aussi, monsieur le garde des Sceaux, que ce phénomène croissant représente une gêne pour la bonne organisation des services placés sous votre responsabilité ? Considérez-vous, à ce stade, qu'il est nécessaire de réviser le régime de déclaration des manifestations ?

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éric Dupond-Moretti, garde des Sceaux, ministre de la Justice

D'abord, répétons-le, manifester sans autorisation constitue une infraction – je précise que ce n'est pas le ministère de la Justice qui délivre les autorisations. En disant cela, je réponds partiellement à votre question, monsieur Questel, mais aussi à l'une de celles qui m'ont été posées par M. Bernalicis.

Par ailleurs, rappelons une chose toute simple : il est facile de regarder une manif à la télé, sur une chaîne d'info en continu, peu importe laquelle, mais il est plus compliqué d'être sur place. Je ne cherche pas à défendre obstinément les forces de l'ordre : quand elles commettent des infractions, elles doivent être sanctionnées. C'est clair, net et précis : l'uniforme républicain, la police républicaine, cela a un sens.

En effet, il y a parfois des interpellations et des gardes à vue. Je fais d'ailleurs remarquer à M. Bernalicis que c'est la police qui décide de la garde à vue, pas le parquet. Les chiffres que je vous ai donnés tout à l'heure me paraissent tout à fait éloquents. La justice fait ensuite le tri, si vous me permettez cette expression : 1 327 classements sans suite sur 3 393 gardes à vue. Le pourcentage des classements sans suite est donc extrêmement important. Cela veut dire que l'autorité judiciaire fait son travail.

Je ne veux pas défendre à tout prix la police, disais-je, mais il faut quand même se dire un certain nombre de choses : il y a parfois de la lassitude, de la fatigue, de la peur aussi du côté de la police. Pour le comprendre, il n'est qu'à voir certaines images. Voilà quand même des gens qui sont là pour protéger notre paix, notre liberté de manifester, et qui se prennent des pavés dans la figure… Ce contexte-là, il faut l'avoir à l'esprit quand on analyse la situation et qu'on disserte à ce propos. C'est toute la différence entre ceux qui sont au charbon et ceux qui sont tranquillement installés dans leurs fauteuils – dont je fais partie.

Disons les choses clairement : dans la confusion, au milieu de la foule et dans les gaz lacrymogènes, sans parler du reste, il peut évidemment arriver d'interpeller quelqu'un qui ne mérite pas de l'être. C'est là où l'intervention judiciaire est essentielle – à partir du poste de commandement, mais surtout quand le parquet fait son travail, c'est-à-dire veille au respect des règles qui sont les nôtres et qui nous honorent. Oui, monsieur Bernalicis, j'ai parlé de lunettes de piscine. Si les choses sont faites dans les règles, vous ne risquez pas d'être placé en garde à vue quand vous ne faites que porter des lunettes de piscine ; mais si, en plus, vous avez en votre possession un poing américain ou une barre de fer – ce que je ne saurais imaginer un seul instant de votre part –, il ne me choquerait pas que vous alliez en garde à vue.

On peut disserter des heures sur ce qu'il aurait fallu faire, sur ce que l'on aurait pu faire : il est tellement facile de réécrire l'histoire. Moi, je me mets, ne serait-ce que deux secondes, à la place de ces hommes et de ces femmes qui, alors qu'ils assurent notre liberté de manifester, sont pris à partie, insultés. Nous avons tous entendu des gens qui, protégés par les policiers, leur disaient : « Suicidez-vous ! ». Mais, de la même façon, monsieur Bernalicis, je ne suis pas très heureux quand un Gilet jaune est blessé : cela me touche infiniment. Ce que je souhaite, c'est que, dans nos débats, nous évitions de tomber dans le manichéisme : essayons de faire dans la nuance, d'envisager les choses comme elles doivent l'être. Il n'y a aucune place, dans cette question, pour l'idéologie.

Vous me demandez si je compte prendre une nouvelle circulaire pénale. J'ai déjà égrené toutes celles qui ont déjà été prises. Mais, comme je l'ai dit le jour de mon arrivée à la chancellerie, ma porte est ouverte à tous ceux qui veulent discuter – mais pas en versant dans le nihilisme, dans l'idéologie ou dans l'excès. Si vous avez un certain nombre de choses à me proposer en vue d'améliorer la situation, je vous le dis très ouvertement, je suis preneur. Mais il faut aussi voir ce qui se passe quand on est au cœur de la manif, quand ça tape, ça insulte, ça casse. Et on me permettra aussi d'avoir une pensée pour tous ces commerçants qui rêvaient de rouvrir leur magasin, de retrouver la liberté de commercer – car c'est aussi une liberté – et qui n'ont pas pu le faire à cause de la violence des manifestations. Tout cela est donc infiniment compliqué. Encore une fois, il n'y a aucune place ici pour le dogme.

J'espère vous avoir répondu. En tout cas, je l'ai fait le plus sincèrement possible.

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Je vous ai écouté avec beaucoup d'attention, même je suis l'audition depuis Tel-Aviv, grâce à mon iPhone, dans des conditions compliquées. Quoi qu'il en soit, ce débat est intéressant, car il y a de la bonne foi de tous les côtés.

En France, la détention administrative n'existe pas, contrairement à certains pays, dont Israël, qui y ont recours pour éviter certaines bombes à retardement. Que ce soit pour des islamistes, des terroristes, des militants d'extrême droite ou tout simplement pour des gens dont on sait qu'ils ont été dangereux et qu'ils peuvent encore l'être, êtes-vous favorable, à titre personnel, à un changement de la législation permettant d'utiliser chez nous la détention administrative ?

Dans certaines manifestations, en France, par exemple il y a deux semaines, à Montpellier, on lit sur des pancartes : « Non à l'israélisation de la France », ce que j'interprète comme signifiant : « Non à la judaïsation de la France », et l'on entend des appels au boycott, ce qui est interdit. Ces manifestations s'accompagnent de troubles à l'ordre public. Mais, le plus souvent, elles ne sont pas réprimées : ceux qui y participent restent en liberté, et défilent semaine après semaine dans la plus grande impunité. J'aimerais vous entendre sur ce point, monsieur le garde des Sceaux, même si je crois vous avoir rappelé certaines règles le 20 octobre, dont l'interdiction du boycott, en particulier celui qui vise les produits israéliens.

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éric Dupond-Moretti, garde des Sceaux, ministre de la Justice

Je viens de prendre une circulaire pour rappeler que tout appel au boycott motivé par l'antisémitisme doit faire l'objet de poursuites. Dans ce genre de manifestations, malheureusement, on entend tous les slogans du monde. J'ai même vu la tête du Président de la République sur une pique, ce qui a légitimement ému Robert Badinter, d'ailleurs.

Je dis que l'on dénature le mot « liberté », que ce soit en raison du confinement, du masque, ou que sais-je encore. On mélange tout. On voit des gens manifester librement – ce qui est heureux – pour expliquer qu'en France on vit sous une dictature. Et ils sont protégés par des policiers, dont c'est le boulot, parfois ingrat.

Face à des excès comme ceux que vous dénoncez, que voulez-vous que je vous dise ? Ils existent, et à chaque fois que l'on peut interpeller les individus exprimant cette haine, on le fait, et on les sanctionne. Vous savez que je suis intervenu pour lutter contre la haine en ligne, et je le ferai encore, notamment dans le cadre du projet de loi qui sera présenté bientôt au Parlement.

Je note, dans un message qui apparaît sur l'écran, que M. Bernalicis a écrit à tout le monde qu'il avait été « plutôt nuancé, pour une fois ». Cela prouve qu'il a de l'humour, et c'est très bien !

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Une dernière question, monsieur le garde des Sceaux, concernant les enquêtes de l'Inspection générale de la police nationale (IGPN) et de l'Inspection générale de la gendarmerie nationale (IGGN). Certes, ces organes ne dépendent pas du tout de vous, mais peut-être avez-vous, en tant que ministre, mais aussi en tant que citoyen, un avis sur les réformes de leur fonctionnement qui seraient envisagées par le Gouvernement ? On entend le ministre de l'Intérieur les évoquer.

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éric Dupond-Moretti, garde des Sceaux, ministre de la Justice

Mon avis est réservé, en ce sens que je sais seulement qu'une réforme est en cours, ou en tout cas envisagée par le ministère de l'Intérieur. Chacun va s'occuper des siens : j'envisage moi aussi d'ouvrir une réflexion sur la responsabilité des magistrats, et je viens de parler de la déontologie des avocats et des notaires. Si nos services sont consultés par le ministère de l'Intérieur, nous ferons entendre notre petite musique, mais, à ce stade, je n'ai rien à vous dire de particulier là-dessus. Je sais simplement qu'une réflexion est en cours. Cela prouve que l'on réfléchit, au ministère de l'Intérieur comme au ministère de la Justice, ce qui est plutôt rassurant…

(Sourires.)

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éric Dupond-Moretti, garde des Sceaux, ministre de la Justice

Je n'ai pas dit qu'on ne réfléchit à la chancellerie que depuis que j'y suis ! Je ne me permettrais pas de dire des choses pareilles, et vous ne me le pardonneriez pas.

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Merci beaucoup d'avoir pris de votre temps pour répondre à nos questions, monsieur le garde des Sceaux. Ce fut fort intéressant et agréable.

Mes chers collègues, à la semaine prochaine pour de nouvelles auditions.

La séance est levée à 19 heures.

Membres présents ou excusés

Présents. - M. Ugo Bernalicis, Mme Aude Bono-Vandorme, M. Jean-Michel Fauvergue, Mme Camille Galliard-Minier, M. Fabien Gouttefarde, M. Jérôme Lambert, M. Philippe Michel-Kleisbauer, M. Bruno Questel, Mme Cécile Rilhac, Mme Laurence Vanceunebrock

Excusés. - Mme Valérie Bazin-Malgras, Mme Brigitte Kuster, Mme Constance Le Grip

Assistait également à la réunion. - M. Meyer Habib