Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Réunion du mercredi 24 octobre 2018 à 9h00

Résumé de la réunion

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La réunion

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Présidence

La commission poursuit l'examen de la seconde partie du projet de loi de finances pour 2019 (n° 1255).

Elle examine d'abord les crédits de la mission Engagements financiers de l'État ainsi que l'article 77, rattaché (Mmes Bénédicte Peyrol et Dominique David, rapporteures spéciales).

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Les crédits de la mission Engagements financiers de l'État s'élèvent à 42,5 milliards d'euros en 2019, en augmentation de 0,7 milliard d'euros par rapport aux prévisions pour 2018.

À ce titre, il est à noter que le périmètre de la mission est modifié pour l'année 2019, avec la disparition du programme Majoration de rentes, conformément à l'article 142 de la loi de finances pour 2018. Celui-ci a en effet supprimé la prise en charge partielle par l'État des majorations de rentes viagères, à compter du 1er janvier 2018, avec un impact budgétaire en 2019. Cela représentait une dépense de 142 millions d'euros en 2018. Voici une mesure d'économie structurelle. Je sais que nous y sommes tous sensibles.

Les crédits de la mission Engagements financiers de l'État correspondent à 99 % aux dépenses relatives à la charge de la dette de l'État. Or, celles-ci sont en hausse de 864 millions d'euros par rapport à la loi de finances pour 2018. Elles devraient s'établir à 42,1 milliards d'euros en 2019, au lieu d'une prévision à 41,2 milliards d'euros en 2018.

Cela résulte, d'une part, de la normalisation des conditions de financement de l'État, avec une remontée progressive des prévisions de taux d'intérêt sur l'ensemble de la courbe des taux et une reprise de l'inflation – sur laquelle certains titres sont indexés – et, d'autre part, de l'augmentation de l'encours de la dette négociable de l'État, qui devrait s'établir à 1 845 milliards d'euros à la fin de l'année 2019, soit une progression de 84 milliards d'euros par rapport à la fin de l'année 2018, malgré les efforts de réduction des dépenses. Il s'agit d'une accélération de l'endettement de l'État, qui devrait progresser de 75 milliards d'euros en 2018.

En 2019, le besoin de financement serait en forte augmentation pour deux motifs principaux : un niveau élevé de déficit budgétaire, près de 98,7 milliards d'euros, lié au coût de la transformation du crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE) en allégements de cotisations sociales ; un niveau significatif d'amortissement de titres à moyen et long terme, à raison de 130,2 milliards d'euros.

Au total, le besoin de financement s'établirait à 227,6 milliards d'euros, soit un niveau plus atteint depuis 2010. Il serait financé par un niveau stable d'émissions de titres à moyen et long terme, nettes des rachats, et une augmentation des emprunts de court terme.

Ce niveau élevé de besoin de financement et d'accélération de l'endettement de l'État doit nous astreindre au redressement de nos finances publiques. Cela devient un enjeu d'autant plus crucial que les conditions de financement de l'État sortent d'une période exceptionnelle, où s'endetter pouvait parfois rapporter de l'argent, en raison des taux d'intérêt négatifs. Si cette situation a pu présenter quelques bienfaits, elle ne pouvait pas durer et avait un inconvénient majeur : celui de rendre insensible l'augmentation de la dette. Or, les taux moyens à l'émission des titres de dette de l'État à dix ans devraient se redresser pour atteindre 0,9 % en 2018 et 1,8 % en 2019, et les taux courts atteindre – 0,5 % en 2018 et 0 % en 2019. On sortirait ainsi de l'environnement de taux négatifs durant l'année 2019.

Les réformes à venir concernant l'assurance chômage, le régime des retraites, les produits de cessions d'actifs publics prévus par le projet de loi relatif à la croissance et à la transformation des entreprises et la déclinaison du programme « CAP 2022 » devront donc, dès l'année prochaine, nous permettre de diminuer notre déficit structurel et de réduire ainsi notre dette, conformément à nos engagements européens et à la loi de programmation des finances publiques (LPFP).

La mission Engagements financiers de l'État comprend également trois autres programmes dotés de crédits.

En premier lieu, le programme Appels en garantie de l'État, dont les crédits sont en augmentation de 21,1 millions d'euros par rapport aux prévisions de l'exercice 2018. Ils s'établissent à 125,3 millions d'euros au lieu de 104,1 millions d'euros en 2018. Cela résulte de deux actions, Soutien au domaine social, logement, santé et Développement international de l'économie française, qui devraient générer des appels en garantie supérieurs à ceux de l'année 2018.

À ce titre, le Gouvernement nous a communiqué le détail de l'encours des garanties octroyées par l'État couvertes par le présent programme, qui s'élève à 739 milliards d'euros en capital et à 20 milliards d'euros en intérêts. C'est un chiffre important qu'il faut avoir en tête. Cela résulte principalement de la garantie accordée aux épargnants pour les sommes déposées sur leurs livrets d'épargne réglementés ainsi que des dispositifs de prêts à l'accession sociale à la propriété et de prêts à taux zéro (PTZ), notamment le PTZ+ et l'éco-PTZ.

Nous nous félicitons, avec Dominique David, de la transmission de ce document, qui permet aux parlementaires de mieux suivre les garanties octroyées par l'État. À ce titre, je tiens à signaler que le rapport relatif aux garanties accordées en loi de finances, prévu à l'article 24 de la LPFP, n'a toujours pas été remis au Parlement. Le Gouvernement devait le transmettre avant le 1er juin dernier.

S'agissant du programme Épargne, la prime d'État associée aux prêts d'épargne logement et aux comptes d'épargne logement a été supprimée pour les contrats souscrits à compter du 1er janvier 2018. Il s'agit là encore d'une mesure structurelle de réduction de la dépense. Celle-ci était pleinement justifiée par le changement de nature de ces produits d'épargne, les épargnants se détournant massivement des prêts d'épargne logement, dont les taux sont devenus supérieurs aux taux de marché.

Enfin, le programme relatif au Fonds de soutien en faveur des collectivités ayant souscrit des emprunts structurés a atteint son rythme de croisière de décaissements. Les crédits de paiement (CP) ouverts pour l'exercice 2019 s'élèvent à 183,3 millions d'euros, complétés par 11,5 millions d'euros au titre des fonds de concours associés au présent programme. Cela représente un total de ressources de financement de 194,8 millions d'euros.

Les CP devraient s'élever à 207,2 millions d'euros en 2020 et en 2021. Ainsi, le niveau des CP serait stable sur la période et jusqu'à l'extinction du Fonds, soit en 2028.

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On constate que, malgré toutes les belles déclarations, cela ne va pas mieux. J'aimerais savoir quelle trajectoire on peut attendre en termes de progression des taux d'intérêt, car la dette de la France progresse. Vous apportez quelques explications.

Je note ainsi que le CICE va représenter 40 milliards d'euros d'exonérations de cotisations sociales aux entreprises en 2019, et ce sans contrepartie, ni écologique ni sociale. Est-ce bien raisonnable ? Le « retour sur investissement » que vous nous annonciez peine à arriver...

En outre, vous vendez les bijoux de famille : cession de La Française des jeux, d'Aéroports de Paris, d'Engie. Vous dites que c'est pour limiter l'augmentation de la dette, mais nous serons privés des retours que procuraient ces entreprises ou les participations de l'État.

Je ne peux m'empêcher de penser aux gros cadeaux fiscaux que vous savez consentis, par la suppression de l'impôt de solidarité sur la fortune et par la mise en place de la flat tax : est-il bien raisonnable, dans ce contexte, de donner encore plus à ceux qui ont beaucoup et d'entamer le pouvoir d'achat de ceux qui ont moins ? Une récente étude de l'Institut des politiques publiques a souligné que 20 % des ménages les plus modestes en France avaient vu leur pouvoir d'achat baisser au cours des deux dernières lois de finances.

Je pense que vous nous amenez dans le mur et je le regrette profondément. C'est pourquoi je voterai contre l'adoption de ces crédits.

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Permettez-moi une observation. Je note que le besoin de financement n'a jamais été aussi important depuis très longtemps. Je pense que, en dehors même du niveau de la dette et du poids de sa charge, c'est un élément très négatif, puisque ce besoin atteint 227 milliards d'euros. Vous l'avez souligné vous-même : c'est un montant important.

Ma question porte sur l'impact de la reprise de l'inflation, que vous avez cité comme facteur pesant sur la charge de la dette. Quelle est la part de la reprise de l'inflation dans l'augmentation actuelle et quel est son impact au niveau de la charge de la dette, en montant ou en pourcentage du produit intérieur brut ?

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Monsieur Dufrègne, concernant la remontée des taux d'intérêt, il me semble, au vu des auditions que nous avons pu mener avec ma collègue rapporteure spéciale, qu'elle ne sera que progressive. La prévision aujourd'hui faite par l'État est que les taux passeront en moyenne de 0,9 % à 1,8 % sur les titres émis par lui, ce qui nous semble une estimation assez prudente, pour ne pas dire très prudente.

On observe aujourd'hui, il faut le savoir, que les États-Unis adoptent une politique de remontée progressive des taux d'intérêt. La Banque centrale européenne (BCE) observe aussi ce qu'il se passe, en adoptant une démarche progressive. Il n'y a donc pas d'inquiétude à avoir. En tout cas, nous avons été plutôt rassurées dans le cadre de nos auditions. La prévision retenue nous semble prudente ; elle va nous permettre de contrôler cette charge de la dette.

Concernant les ventes de participations de l'État, je crois que nous examinerons tout à l'heure, avec Valérie Rabault, la mission qui les inclut.

Madame Louwagie, vous m'interrogez sur la part de titres qui sont indexés sur l'inflation. La proportion s'élève à peu près à 10 % des titres de l'État. Une augmentation da 1 point du taux d'inflation se traduit ainsi par une augmentation de 200 millions d'euros de la charge de la dette.

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On voit que le thermomètre affiche toujours des valeurs très élevées et que le patient est bien malade. Je voudrais parler des risques de requalification de certaines structures publiques. Il y a déjà eu une requalification de la dette de la SNCF. Y a-t-il d'autres risques identifiés et quel est le poids de ces risques à venir ?

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La reprise de la dette de la SNCF devrait avoir un impact en 2020 et en 2022, étant donné que c'est à ce moment-là qu'elle devrait être reprise. D'ici là, un alignement est en cours, car il y a aujourd'hui différents types d'émissions différents et, pour chacun d'eux, une gestion différente de la dette. D'ici à 2020, un alignement de la gestion de ces divers types de dettes sera réalisé.

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Permettez-moi une remarque : j'entends bien que vous avez auditionné toutes les structures françaises possibles au sujet de l'évolution des taux, mais avez-vous approché la BCE ? C'est elle, en effet, qui pilote l'évolution des taux en Europe.

Par ailleurs, vous dites que 1 point d'inflation en plus correspond à 200 millions d'euros en plus de charges de la dette. C'est vrai à l'échéance 2019, mais quelle est la perspective à dix ans ? Je pense qu'il y a un effet cumulatif.

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Certes, madame Dalloz, c'est bien la BCE qui dirige la politique monétaire. C'est bien pourquoi nous avons auditionné Mme Natacha Valla, qui en est la directrice adjointe, et qui nous a tenu les propos que je vous rapporte. J'évoquais devant elle la politique des États-Unis, qui amorcent aujourd'hui une remontée des taux, mais la BCE, m'a-t-elle rappelé, a fait des annonces publiques cet été, prévoyant une remontée très progressive des taux. Les auditions que nous avons menées ne sont donc pas uniquement des auditions des institutions françaises. Au niveau européen, je pense qu'on peut être rassuré, au moins en partie, pour l'avenir.

Sur l'inflation, le projet annuel de performances, à la page 33, vous apporte des précisions. En tenant compte d'un choc de taux d'inflation de 0,5 %, la charge supplémentaire cumulée de la dette s'établirait à plus de 2,2 milliards sur dix ans du fait des titres indexés.

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On spécule beaucoup sur question de savoir qui détient les titres de la dette publique française.

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La part de la détention de la dette par des non-résidents s'élève à 53,3 % à la mi-2018. Une grande partie – environ 60 % – des investisseurs non-résidents sont européens, dont 52 % sont issus de la zone euro. Le reste est détenu par des investisseurs asiatiques, pour 13 %, américains, pour 9 %, et par des organisations internationales pour 18 %.

Si nous ne disposons pas aujourd'hui de documents, c'est parce que l'Agence France Trésor dialogue avec des intermédiaires, lesquels dialoguent eux-mêmes avec des spécialistes en valeurs du Trésor qui conseillent les banques pour investir dans la dette française. Il ne nous est donc pas possible d'établir, individu par individu, ou institution par institution, qui détient la dette, mais les ordres de grandeur macro-économiques sont ceux que je viens de vous donner.

Suivant l'avis favorable de la rapporteure spéciale, la commission adopte les crédits de la mission Engagements financiers de l'État, non modifiés.

La commission examine ensuite les crédits de la mission Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales et du compte spécial Développement agricole et rural (M. Hervé Pellois, Mme Émilie Cariou et M. Michel Lauzzana, rapporteurs spéciaux).

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Le rapport spécial qu'Émilie Cariou et moi-même présentons concerne les programmes Économie et développement durable des entreprises agricoles, agroalimentaires et forestières et Conduite et pilotage des politiques de l'agriculture ainsi que le compte d'affectation spéciale Développement agricole et rural (CASDAR). Il porte également sur la pêche. En revanche, il ne porte pas sur le programme Sécurité et qualité sanitaires de l'alimentation, dont traitera Michel Lauzzana.

J'aborderai donc, en premier lieu, le montant et la ventilation des crédits sur lesquels le Parlement est appelé à se prononcer et, en second lieu, plusieurs points méritant une attention particulière.

Commençons par la programmation budgétaire pour 2019. Au titre de la mission – fonds de concours et attributions de produits compris –, le Gouvernement demande pour 2019 l'ouverture de 2,77 milliards d'euros en autorisations d'engagement (AE) et de 2,86 milliards d'euros en crédits de paiement (CP). On constate une baisse de 16,6 % par rapport à 2018, mais cette baisse est essentiellement optique : elle s'explique par le recalibrage de la provision pour aléas, qui passe de 300 à 200 millions d'euros, en raison d'une baisse anticipée de la facture liée aux refus d'apurement notifiés par la Commission européenne et par l'allocation de moindres dépenses aux mesures agro-environnementales et climatiques – le Fonds européen agricole pour le développement rural arrivant en fin de programmation – ainsi qu'aux aides à l'agriculture biologique – l'exécutif continuant à favoriser la conversion plutôt que le maintien en culture biologique. Enfin le projet de loi de financement de la sécurité sociale devait prévoir la suppression du dispositif « travailleurs occasionnels demandeurs d'emploi » agricoles (TO-DE), mais il sera finalement transformé.

À périmètre constant, donc, le budget est reconduit.

Pour le CASDAR, la demande d'autorisation s'élève à 136 millions d'euros en AE et en CP : le montant est repris à l'identique par rapport à 2018.

Ce budget appelle de notre part des commentaires positifs, mais aussi d'autres remarques plus vigilantes.

S'agissant des points que nous saluons, je citerai : l'annonce d'un retour à la normale du calendrier de versement des aides « PAC » par l'Agence de services et de paiement (ASP), même si nous resterons attentifs, car cette promesse a déjà été faite aux agriculteurs l'année passée, avant de ne pas être tenue en raison de difficultés informatiques et des nombreux critères très hétérogènes retenus par les régions ; l'augmentation de la redevance pour pollution diffuse et le doublement progressif des moyens du fonds de structuration « Avenir bio », qui passeront de 4 à 8 millions d'euros ; enfin, naturellement, la réforme de la fiscalité agricole, avec l'instauration de la déduction pour épargne de précaution et le recentrage de l'aide aux jeunes agriculteurs sur ceux dont les revenus sont les plus modestes.

Une dizaine de députés de toutes tendances ont été associés au groupe de travail qui a préparé cette révision de la fiscalité. Nous nous félicitons de son adoption en première lecture, mais je souhaite que d'autres amendements viennent améliorer, en nouvelle lecture, le sort des jeunes agriculteurs.

J'en viens à certains éléments qui suscitent notre interrogation et sur lesquels nous souhaiterions des réponses rapides et concrètes de la part du Gouvernement.

Certes, l'exonération de cotisations sociales patronales dans le cadre du dispositif TO-DE est reconduite sous d'autres modalités, mais qu'en est-il de l'avancement au 1er janvier 2019 de la réduction du coût du travail ? Cette mesure était présentée par le Premier ministre comme une compensation, certes partielle, de la fin pure du TO-DE. Or, le ministre de l'agriculture nous a fait savoir hier que cette suppression des charges jusqu'à 1,15 fois le SMIC permettrait une économie de 105 millions d'euros sur les 144 millions jusqu'à présent dévolus au TO-DE. Nous pensons qu'il ne faut pas renoncer à ce signal très attendu par un secteur fortement exposé à la concurrence internationale.

Alors que le volet agricole du grand plan d'investissement (GPI) repose moins sur des crédits dédiés que sur des outils tels que des garanties de prêt, on entend dire que le ministère envisage d'y affecter une part du reliquat de la provision pour aléas de 2018. Il y a au contraire urgence à la mobiliser pour aider les agriculteurs touchés par la sécheresse, dans plusieurs de nos régions, et par la peste porcine africaine, qui nous talonne puisqu'elle sévit aujourd'hui en Wallonie. L'Allemagne a débloqué 170 millions d'euros sur fonds fédéraux, complétés par les Länder, pour faciliter l'achat de fourrage. Les agriculteurs allemands se fournissent ainsi en France, réduisant les stocks et poussant les prix à la hausse.

Enfin, si la mise en place d'une option révocable pour le passage à l'impôt sur les sociétés correspond indéniablement à la levée d'un frein psychologique, ce mouvement ne sera pas synonyme de neutralité fiscale. Nous estimons donc crucial de tenir compte des autres taxations appliquées au moment du changement de régime et d'éviter les effets d'aubaine permis par l'alternance entre l'imposition à l'impôt sur les sociétés ou à l'impôt sur le revenu selon le montant des sommes en jeu.

Je ne voudrais pas terminer mon intervention sans parler de la pêche. Les pêcheurs ont trois préoccupations en ce moment : l'augmentation du prix du gazole ; la perspective du Brexit et la nécessité réaffirmée d'une négociation globale au niveau européen ; l'interdiction du rejet de poissons en mer à compter du 1er janvier prochain, enfin, qui se heurte à leur vive réticence car cette mesure est très difficile à mettre en oeuvre sur leurs bateaux et dans les ports, lesquels ne sont pas préparés à une telle évolution.

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Le programme 206 Sécurité alimentaire retrace, au sein de la mission Agriculture, les crédits consacrés à la qualité de l'alimentation. Il permet de conduire la prévention et la gestion des crises sanitaires, tout en veillant à la qualité de notre alimentation comme de nos exportations. Je ne voudrais pas oublier le sujet du bien-être animal et des politiques sanitaires régaliennes, telles que nous les retrouvons par exemple dans les plans « Ecoantibio 2 » et « Ecophyto 2+ ».

Sur le plan budgétaire, ce programme est doté de 536,8 millions d'euros en CP, soit une diminution de 15,3 millions d'euros cette année. Cette diminution s'explique cependant, d'une part, par le fait que le contentieux relatif aux retraites vétérinaires est en voie de règlement, et d'autre part, par la perspective du remboursement par l'Union européenne des dépenses engagées contre l'influenza aviaire, notamment pour le dédommagement des exploitants.

Puisque ce programme concerne la sécurité alimentaire, je voulais dire quelques mots sur Lactalis. J'étais vice-président de la commission d'enquête, et j'ai proposé une nouvelles répartition des compétences entre les différentes autorités en charge de la sécurité alimentaire, afin qu'il y ait, en cas de crise alimentaire, un chef de file unique, voire un seul service responsable. Les récents rebondissements de l'affaire Lactalis montrent qu'une adaptation de nos services de la sécurité alimentaire est nécessaire.

Je ne reviendrai pas sur l'étiquetage des produits alimentaires, puisque nous en avons déjà parlé, mais le Nutri-Score devrait être généralisé à tous les produits.

Je souhaite également évoquer l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail, qui a réussi à obtenir 40 équivalents temps plein (ETP) de plus en raison du recours accru à son expertise que le Brexit ne manquera pas de provoquer. C'est une bonne chose, et cette agence devrait d'ailleurs retenir davantage notre attention, car la sécurité alimentaire est un sujet auquel la population est de plus en plus sensible.

Enfin, j'ai relayé hier auprès du ministre les préoccupations exprimées par de petites entreprises et start-up de ma région, la Nouvelle-Aquitaine, qui est la plus grande région agricole de France. Selon ces entreprises, qui travaillent dans le biocontrôle, les procédures d'habilitation et d'homologation qui leur sont appliquées sont calquées sur celles des produits phytosanitaires ; ce sont donc des procédures lourdes, longues et coûteuses, auxquelles elles ont difficilement accès. Or, le développement du biocontrôle est une nécessité si nous voulons faire évoluer notre agriculture. Il faudrait donc que nous adaptions nos procédures en conséquence.

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Au cours de la discussion du projet de loi sur l'agriculture et l'alimentation, nous avions adopté un amendement qui demandait au ministère de l'agriculture de nous fournir les données des aides « PAC », département par département et pilier par pilier, de façon à connaître le détail des montants non versées et des retards. Avez-vous obtenu ces données ? Les présenterez-vous dans le rapport ?

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Vous avez évoqué, monsieur Pellois, les retards de paiement, en nous disant que la situation s'était améliorée mais que vous restiez vigilant. Je voudrais insister sur le fait que les retards persistent : même s'il y a eu effectivement une amélioration, c'est une situation dont je ne pense pas qu'on puisse se satisfaire. Nous entendons parler de problèmes informatiques depuis 2015, et il est indécent de continuer de délivrer le même message aux agriculteurs, quatre ans après ! Songez qu'il y a des aides au titre de 2017 qui ne sont toujours pas versées... Quelqu'un a-t-il l'intention de conduire une mission d'audit à l'ASP ?

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Je voulais revenir sur les contrôles sanitaires et phytosanitaires aux frontières. Dans Le Monde, il y a quelques jours, sont parus quelques éléments du rapport de M. Michel Lalande, préfet des Hauts-de-France, qui s'inquiète du faible niveau de mobilisation de l'État dans la perspective d'un Brexit « dur », qui nécessiterait, semble-t-il, de multiplier par cent le nombre d'agents dédiés.

Certes, il n'y a guère de raison que le saumon d'Écosse soit plus dangereux après le Brexit qu'avant, mais il ne faudrait pas que nous souffrions d'une crise sanitaire en raison de « trous dans la raquette ». Il faut au contraire s'en prémunir, principe de précaution oblige.

La filière pêche, en particulier, devra être encore plus soutenue et structurée. Notre collègue Paul Christophe s'était interrogé sur la pêche électrique, qui est soumise à un pilotage européen. Où en est-on sur cette question ?

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J'aimerais avoir davantage de précisions sur les moyens prévus en réponse à la sécheresse. Le rapporteur spécial a indiqué que d'autres pays vont plus vite que nous, notamment l'Allemagne, qui a déjà débloqué des moyens. Les agriculteurs allemands viennent acheter en France des fourrages dont nous ne disposerons donc plus par la suite, malgré les besoins.

Il y a aussi la méthanisation, qui pose une vraie question sur l'emploi des matières premières. J'aimerais que vous précisiez davantage les moyens prévus, là aussi, étant entendu que les procédures sont vraiment très longues et parfois contradictoires compte tenu des critères auxquels on doit répondre.

S'agissant des forêts, y a-t-il une surexploitation en France ? Les salariés de l'Office national des forêts (ONF) l'affirment. Vous savez qu'ils ont lancé une marche depuis les quatre coins du pays et qu'ils arriveront demain dans la forêt de Tronçais, dans l'Allier. Ils disent que l'on veut faire du chiffre avec le bois, ce qui conduirait à abattre des chênes beaucoup trop tôt.

Pour finir, je suis satisfait en ce qui concerne la fiscalité – je pense notamment au dispositif d'épargne de précaution qui a été créé : c'est une bonne mesure.

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On a traditionnellement beaucoup de mal à voir clair dans la mission budgétaire Agriculture à cause des fonds européens, qui viennent souvent en substitution des fonds nationaux. J'ai été rapporteur spécial de ce budget pendant une dizaine d'années : j'essayais alors de reconstituer les montants effectifs, c'est-à-dire la somme des crédits nationaux et européens. Les ministres successifs ont toujours eu tendance à nous expliquer que les crédits nationaux étaient en baisse, certes, mais que les fonds européens augmentaient. Or ils n'augmentent pas, puisqu'ils sont sous enveloppe. Pourriez-vous nous éclairer ?

L'axe 1 du programme 149 a notamment pour objectif de faire passer de 8 % à 15 % les superficies cultivées en agriculture biologique. L'indicateur figurant à la page 11 du « bleu » budgétaire montre qu'on est à 8 % selon les dernières estimations. Comment passera-t-on à 15 % d'ici à 2022 ? Pourriez-vous apporter quelques précisions sur les moyens prévus ? Comme on progresse d'à peu près 1 point par an, il faudrait arriver à doubler le rythme actuel.

Pour ce qui est du changement des pratiques, le programme 206 comporte un indicateur qui est la maîtrise de l'utilisation des pesticides et des antibiotiques. Dans le cadre du plan « Écophyto », l'objectif pour 2018 était de 77,4 millions de « doses unités de pesticides » vendues, mais on serait en réalité à 83,4 millions, c'est-à-dire très au-dessus de la cible. Il est prévu de redescendre à 73,4 millions dès 2019 puis à 66,4 millions en 2020 : comment va-t-on faire ? Ces objectifs sont-ils crédibles ?

En ce qui concerne les parts de marché, on constate un effondrement de notre balance commerciale dans le domaine agroalimentaire : elle est devenue déficitaire hors vins. Selon l'indicateur 1.2 qui figure à la page 20, on devrait remonter la pente, après avoir perdu 5 % de parts de marché en 2016 et 1,5 % en 2017. L'objectif pour 2018 était de gagner 1 %, mais on serait apparemment à 0 – cela ne correspond pas à ce qu'on me dit : la situation continuerait, en réalité, de se dégrader. La prévision pour 2019 est un gain de 0,3 %, tandis que la cible pour 2020 est de gagner 0,5 %. Pourriez-vous commenter un peu l'augmentation des moyens prévus pour les actions de promotion ?

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Le rapporteur spécial nous dit que le dispositif TO-DE a été reconduit sous une autre forme. Or le nouveau dispositif est totalement différent. Cela représente une perte importante pour le monde agricole sur le plan des travailleurs saisonniers.

Un mot aussi sur l'action 22, relative à la gestion des crises et des aléas de la production agricole : il est bon d'avoir une politique dans ce domaine, car chacun voit bien que notre agriculture subit de plus en plus d'événements climatiques, qui l'affectent beaucoup, mais les crédits de ce programme ne représentent que 0,3 % du total de notre politique agricole. Avec seulement 5,4 millions d'euros, il paraît difficile de considérer qu'il y aura de vrais moyens d'intervention.

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Je ne vais sans doute pas répondre de manière exhaustive à toutes les questions, mais je vais essayer d'apporter quelques éléments d'appréciation.

Le rapport sur la politique agricole commune (PAC) est paru hier, me semble-t-il, ce qui expliquerait que vous n'ayez pas pu en prendre connaissance pour le moment.

S'agissant de l'ASP, je peux vous dire que les montants dus au titre de l'année 2015 ont été totalement payés, que c'est également le cas pour 2016 en ce qui concerne les mesures agro-environnementales et climatiques (MAEC) et la filière « bio », et que les paiements pour 2017 auront lieu avant la fin de l'année. Nous avions dénoncé la situation l'année dernière, mais on ne peut pas dire qu'elle soit aujourd'hui défavorable : on a nettement progressé et il y aura un retour à la normale à la fin de l'année – comme c'est dans deux mois, on a une appréciation à peu près correcte de ce qui va se passer à ce moment-là. On ne peut donc plus parler de crise au niveau de l'ASP. Il y en a eu une, qui était sérieuse, et qui a été dénoncée par les ministres et par toute la profession, mais on ne peut pas faire comme si on était encore en situation de crise : cela ne correspond plus à la réalité. Nous considérons, après avoir reçu les organisations professionnelles et les représentants de l'ASP, que le sujet n'est plus aussi préoccupant que l'an dernier.

Dans le domaine de la pêche, le pilotage est européen, pour l'essentiel, en ce qui concerne les règles. Je ne vais pas revenir sur la pêche électrique ou celle à la coquille Saint-Jacques : il y a toujours des incidents entre pêcheurs, mais on essaie de trouver des solutions au sein de l'Union européenne.

Quant à la sécheresse, nous faisons les mêmes commentaires que vous sur la difficulté de trouver des fourrages.

On entend tout et son contraire à propos de la surexploitation des forêts. Certains affirment que l'on ne sait pas les exploiter, et d'autres qu'elles sont surexploitées. Je crois qu'il faut regarder la question de plus près. Il me semble qu'il n'y a pas de surexploitation, mais plutôt une augmentation de la part des forêts sur le territoire national.

L'ensemble des fonds destinés à l'agriculture sont retracés dans une annexe du rapport, qui reprend l'ensemble des données. Le ministre de l'agriculture a évoqué hier soir, devant la commission des affaires économiques, un total de 23 milliards d'euros consacrés à l'agriculture, dont plus de 9 milliards en provenance de l'Union européenne. Vous aurez tous les détails dans le rapport.

J'ai un peu la même appréciation que Charles de Courson à propos du bio. Compte tenu de la progression que nous avons connue jusqu'à présent, il y aura peut-être des difficultés pour arriver à 15 %. L'objectif était d'ailleurs plus faible au début de la législature. Néanmoins, on constate sur le terrain qu'il y a une accélération des conversions. On n'atteindra peut-être pas l'objectif qui a été fixé, mais ce serait déjà bien que 15 % des agriculteurs soient en bio ou en conversion.

Le plan « Écophyto » a été relancé, et vous savez que Dominique Potier y a consacré beaucoup d'énergie. Nous examinerons tout à l'heure un amendement qui vise à encourager les fermes du réseau « Démonstration, expérimentation et production de références sur les systèmes économes en phytosanitaires » (DEPHY).

Je n'ai peut-être pas utilisé une expression très heureuse au sujet du TO-DE. Il y aura une perte d'environ 30 millions d'euros, mais un certain nombre d'agriculteurs sortiront largement gagnants de la réforme des exonérations de charges, et l'on retrouvera progressivement un équilibre.

Quant aux montants affectés à la gestion des crises, il ne faut pas oublier les 200 millions d'euros mis en réserve : ils pourront alimenter les crédits dans ce domaine. On a toujours essayé de faire face aux crises et aux aléas, et on continuera de le faire l'année prochaine.

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Le plan « Écoantibio » fonctionne : nous sommes en très bonne voie en ce qui concerne l'objectif de réduction de 50 % des antibiotiques en 2021. Les résultats sont vraiment très encourageants. Ce n'est pas le cas, en revanche, pour le plan « Écophyto ». Il y a eu des difficultés et du retard, et vous savez que nous sommes passés à un deuxième plan – on en est même à un plan « Écophyto 2 + » qui devait être finalisé en octobre – mais nous pourrons en reparler avec le ministre en séance. Les objectifs que l'on s'était fixés dans le cadre d'« Écophyto » sont maintenus, mais il y a eu une révision des actions menées. Pour mémoire, on avait prévu de former les agriculteurs à une utilisation responsable des pesticides, de créer un réseau de fermes pilotes afin de mutualiser les bonnes pratiques, de mettre en ligne des bulletins de santé du végétal dans chaque région et de mettre en oeuvre un programme de contrôle de tous les pulvérisateurs utilisés pour l'application des produits phytosanitaires.

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Comme l'a dit M. Pellois, on entend tout et son contraire à propos de la forêt. On voit que les ressources françaises sont sous-exploitées quand on se compare à d'autres pays européens, mais on peut aussi déplorer une surexploitation dans certaines forêts. Cela montre l'absence de structuration réelle de la filière. C'est pourquoi le Gouvernement a présenté un plan interministériel qui concerne aussi bien l'amont que l'aval. Il faut redévelopper des filières, avoir une gestion responsable et durable des forêts tout en recréant des débouchés industriels.

Le montant de 0,3 % que Mme Dalloz a cité ne concerne que le dispositif « Agriculteurs en difficulté », dit « Agridiff », et le Fonds d'allégement des charges : il existe d'autres outils pour faire face aux crises qui sont logés dans d'autres cadres, et il y a également la provision pour aléas, qui n'est pas encore complètement consommée à ce stade – on peut faire face, grâce à cet outil, à d'autres crises qui se surajouteraient.

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Je voudrais faire une rectification au sujet du dispositif TO-DE. Avec le plafond d'exonération de 1,15 fois le SMIC qui a été négocié en début de semaine, la profession agricole n'est plus perdante, mais gagnante à hauteur de 34,2 millions d'euros. La suppression du TO-DE s'accompagnait initialement d'une perte de 70 millions, mais on n'en est plus là. Quelques filières resteront perdantes à l'intérieur de la profession, mais on arrive à l'équilibre pour la viticulture et à 3 millions d'euros de perte pour les cultures spécialisées, contre 52 millions d'euros au départ. On peut se féliciter de la bonne négociation qui a eu lieu.

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Je voudrais répondre aux interrogations de Charles de Courson sur notre balance commerciale et la diminution des parts de marché. Nous sommes confrontés à un double problème. Il y a d'abord la chute de la marge globale et de la compétitivité de nos industries agroalimentaires, notamment à cause de la guerre des prix menée par la grande distribution, qui a fait perdre un certain pourcentage de marge et qui a nui à la capacité d'innovation, pour se projeter à l'exportation, et à la capacité d'explorer de nouveaux marchés – les marges se réduisant, on se contente du strict minimum. Je ne sais pas comment présenter le second problème d'une manière politiquement correcte : un marché s'est ouvert en Chine, mais l'administration est insuffisamment réactive, ce qui fait qu'on subit des contingences administratives alors qu'on pourrait déjà exporter un certain nombre de produits agroalimentaires.

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En ce qui concerne le TO-DE, pouvez-vous nous dire précisément quelles seront les exonérations applicables ?

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L'évolution des parts de marché donne une mesure objective de notre perte de compétitivité. Jean-Baptiste Moreau a présenté un certain nombre d'éléments, mais il n'y a pas que des problèmes administratifs. Comme notre collègue l'a souligné lui-même, il existe aussi un véritable problème de perte de compétitivité dans notre industrie agroalimentaire. Or il n'y a plus d'agriculture sans elle. La question est de savoir ce qu'il faut faire, quels sont les moyens et si la politique menée est à la hauteur. Je rappelle que notre balance commerciale est devenue déficitaire pour les fruits et légumes, et que ça dépend des secteurs pour la viande. Il n'y a plus que dans la viticulture que l'on est excédentaire, mais on perd des parts de marché dans ce domaine, contrairement à ce que l'on entend dire, y compris dans le haut de gamme. Il faut savoir que le champagne ne représente aujourd'hui qu'à peine 9 % du marché mondial des vins effervescents : notre part de marché est en baisse face à la concurrence des vins espagnols et italiens. On pourrait aussi donner l'exemple du cognac, et beaucoup d'autres encore. Il ne faut pas croire que la filière viticole échappe à ces difficultés.

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Sans vouloir engager un débat sur ce sujet, je rappelle que l'on essaie, depuis plusieurs années, de rendre notre politique à l'export plus rationnelle à l'égard des pays cibles, en travaillant sur « l'organisation France », si je puis dire : cela se met en place progressivement. Tout le travail mené dans le cadre des interprofessions et des filières peut aussi permettre d'avoir des politiques à l'export plus efficaces. J'ajoute que les difficultés des industries agroalimentaires qui sont liées au niveau nettement plus élevé des charges de personnel en France sont en train de s'estomper. Il faut donc garder un certain optimisme. La politique qui est l'oeuvre n'est pas désordonnée : on est au contraire en train de rationaliser les choses dans le sens d'une plus grande efficacité.

La commission en vient à l'examen des amendements.

Article 39 et état B

La commission examine l'amendement II-CF294 de Mme Sabine Rubin.

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Nous vous proposons d'allouer des fonds supplémentaires à l'ONF, où il est désormais question de supprimer 300 postes chaque année pendant cinq ans. Il y a très certainement derrière cette évolution un objectif d'externalisation des services forestiers, voire de privatisation, une fois que l'on aura rendu l'ONF presque inefficace.

En ce qui concerne le climat et les émissions de gaz à effet de serre, pour lesquelles la France est très largement au-dessus des engagements qu'elle a souscrits dans le cadre des accords de Paris, le maintien d'écosystèmes et de forêts qui absorbent 15 % de nos émissions de gaz à effet de serre devrait évidemment constituer une urgence et un combat essentiel. Or l'ONF est affaibli.

Dernière observation, les forêts françaises occupent plus d'un tiers du territoire national mais ce secteur n'emploie que 440 000 personnes, alors qu'il représente 1,5 million d'emplois en Allemagne, dont la surface forestière est pourtant deux fois moindre que la nôtre. Ceux qui font sans cesse de l'Allemagne un modèle feraient bien de s'en inspirer en la matière, afin que l'on soit un peu plus à la hauteur quand il s'agit de préserver les forêts.

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Cet amendement vise à augmenter le financement de l'ONF, mais il y a une imprécision : le tableau du dispositif transférerait 188,851 millions d'euros à l'Office, quand l'exposé sommaire évoque un montant de 10 millions d'euros – je comprends que c'est en réalité ce que vous souhaitez.

Sur le fond, le Gouvernement ne demande pas à l'ONF de réaliser un effort disproportionné de maîtrise de ses effectifs : nous avons auditionné son directeur général, qui trouve la trajectoire faisable et même justifiée.

L'ONF n'est pas sans ressources : il bénéficie du produit de l'entretien et de l'exploitation des forêts publiques, ce qui représentait 324,10 millions d'euros en 2017, et il perçoit des subventions pour charges de service public, dont un versement compensateur qui s'élève à 140 millions d'euros, une dotation de 26 millions d'euros pour ses missions d'intérêt général, telles que la contention des dunes du littoral atlantique, et une contribution exceptionnelle de 12,5 millions d'euros.

Enfin, le nouveau plan d'action interministériel pour la forêt, qui a été lancé en septembre 2018, doit se traduire par des mesures plus ambitieuses au cours des prochaines années. Je peux vous assurer que nous suivrons de manière approfondie l'application de ce plan lors du prochain printemps de l'évaluation.

Pour toutes ces raisons, je propose de retirer l'amendement et de reprendre ce débat lorsque nous examinerons le projet de loi de règlement. À défaut, j'émettrai un avis défavorable.

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Il y a un vrai problème avec l'ONF : connaissez-vous beaucoup d'établissements publics à qui l'on confie gratuitement un bien appartenant à l'État et qui bénéficient de la totalité des revenus qui en résultent ? Les forêts domaniales sont la propriété de l'État, et celui-ci devrait les louer à l'ONF, comme il le ferait pour un opérateur normal. Aujourd'hui, l'ONF conserve l'ensemble des recettes provenant de ces forêts.

S'agissant des forêts communales, savez-vous que le taux de prélèvement a été porté à 13 % alors qu'il était de 7 % quand j'ai été élu député pour la première fois, il y a vingt-cinq ans ? Le coût est compris entre 4 et 5 % quand on fait gérer des forêts par des opérateurs privés. Un vrai problème de compétitivité se pose, et le directeur général de l'ONF en est parfaitement conscient. Les forêts communales ou intercommunales de l'Est et du Nord financent l'action de l'ONF dans les forêts du Sud, dont beaucoup ont peu de valeur – la gestion des maquis n'a pas de valeur économique.

Au lieu de l'amendement qui nous est proposé, je voudrais plutôt que l'on instaure de la clarté dans les comptes de l'ONF. J'avais demandé que ce soit fait quand j'étais le rapporteur spécial de ce budget, et il faudrait actualiser les chiffres. On devrait séparer ce qui concerne l'État et les collectivités territoriales. Est-il normal que l'on prélève 13 % sur les forêts du Nord et de l'Est pour financer le reste ? C'est de la solidarité « horizontale », comme on dit maintenant, et cela ne va pas.

Je signale qu'il y a aussi un débat sur un autre point : on a obligé en 2012 toutes forêts et tous les bois appartenant aux communes à se placer sous le régime forestier, alors qu'une partie y échappait. Là non plus, ce n'est pas normal.

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Merci pour ces observations, qui sont judicieuses.

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Je ne sais pas si elles le sont vraiment... Si je comprends bien, l'idée de notre collègue serait de louer les forêts à un opérateur public qui est chargé d'un travail de préservation : c'est un peu étonnant !

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Une telle mesure a du sens si l'on veut connaître la vérité des comptes.

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Je pense que l'on ne peut pas raisonner seulement en termes de rentabilité économique quand il s'agit des forêts : il y a aussi la rentabilité écologique. C'est ce qui justifie qu'il y ait un équilibre entre des forêts rapportant beaucoup et d'autres qui sont tout aussi essentielles du point de vue des gaz à effet de serre même si leur bois est économiquement moins rentable. Les arguments que l'on vient d'entendre ne sont pas du tout à la hauteur de l'urgence climatique.

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Éric Coquerel a raison sur le second point. J'avais d'ailleurs déposé, lorsque j'étais rapporteur spécial, un amendement visant à rendre les forêts éligibles au marché du carbone. Ce serait une véritable révolution intellectuelle. Je ne sais pas ce qu'en pensent les rapporteurs spéciaux.

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Ne pourraient-ils pas déposer un amendement en ce sens ?

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Vous pourrez le faire en vue de la séance publique.

La commission rejette l'amendement.

Elle est ensuite saisie de l'amendement II-CF303 de M. Éric Coquerel.

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L'adoption de cet amendement permettra d'augmenter de 10 millions d'euros le budget de l'Observatoire de la formation des prix et des marges. On a créé un système dans lequel le soin de fixer les indicateurs de coûts de production est laissé aux interprofessions alors qu'elles connaissent des rapports de force déséquilibrés, en fonction de la taille des exploitants et des secteurs. Ce n'est pas satisfaisant, et nous estimons qu'il n'est pas normal que l'Observatoire ne dispose que de 3 ETP : il faudrait lui permettre de jouer un rôle accru.

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Vous souhaitez renforcer le budget de cet observatoire, qui est placé auprès de FranceAgriMer : je comprends que la majoration serait de 10 millions d'euros, et non de 145,111 millions d'euros – c'est ce que prévoit en réalité votre amendement.

Sur la forme, on peut s'interroger sur la pertinence d'appeler « FranceAgriMer » le nouveau programme que vous proposez de créer alors que son objet est en réalité plus restreint – vous visez seulement l'Observatoire de la formation des prix et des marges.

Sur le fond, le débat relatif au rôle de cet observatoire a été tranché lorsque nous avons examiné le projet de loi pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous (EGALIM). Par ailleurs, l'observatoire peut s'appuyer sur les moyens des autres services de FranceAgriMer.

Dernière remarque, vous indiquez dans l'exposé sommaire de l'amendement que les interprofessions ne sont pas « en ordre de marche » : je vous invite à suivre attentivement les négociations commerciales qui se dérouleront en fin d'année, car elles répondront certainement à vos doutes. Je vous propose de retirer l'amendement afin d'attendre le résultat de ces négociations. À défaut, j'émettrais un avis défavorable.

La commission rejette l'amendement.

Elle examine ensuite l'amendement II-CF490 de la commission des affaires économiques.

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La loi EGALIM a créé des outils qui permettront d'assurer une meilleure rémunération des produits agricoles. Ce texte a également relevé de 10 % le seuil de revente à perte, ce qui augmentera les marges de l'aval des filières agricoles sans que la redistribution de la valeur aux producteurs soit pour autant garantie – c'est pourquoi cette mesure a été instaurée pour une durée expérimentale de deux ans.

Je vous propose de créer un fonds public-privé de transition agricole, appelé « Initiative pour la transition agroécologique », qui sera sécurisé économiquement par les distributeurs, les industries agroalimentaires et les collectivités locales via des engagements d'achats et une contractualisation sur le long terme. Ce fonds aura pour objectif d'offrir aux consommateurs des produits sains, de qualité et durables. De nombreux agriculteurs souhaitent s'engager dans la transition mais les risques et les freins sont nombreux – il existe des incertitudes sur les débouchés commerciaux, des difficultés techniques liées au changement des pratiques agricoles et des besoins de financement non couverts par l'offre bancaire actuelle.

Les besoins de financement des agriculteurs et de la première transformation afin de tenir les engagements pris par les filières à la suite des États généraux de l'alimentation s'élèvent à 4 milliards d'euros pour les cinq prochaines années. L'amendement II-CF490 permettrait de financer 15 % de ces besoins, soit 600 millions d'euros.

Un montant de 480 millions d'euros de financements privés pourrait ainsi être mobilisé dans le cadre d'une tranche dite « senior », la moins risquée, qui serait apportée par des institutions bancaires. Par ailleurs, 100 millions d'euros seraient mobilisés dans le cadre d'une tranche dite « junior », la plus exposée au risque, dont 30 millions seraient apportés par le budget de l'État et le reste par des investisseurs « à impact », c'est-à-dire à la recherche de bénéfices sociaux et environnementaux.

Un investissement en « première perte » de l'État permettrait de réduire le risque des investisseurs privés et, ainsi, de catalyser un cofinancement plus important. Un tel investissement de l'État, plus exposé au risque que le financement privé, réduirait le coût du financement total et permettrait d'adapter le niveau de risque et la durée des investissements aux besoins de la transition pour les agriculteurs participants. Le budget de l'État serait ainsi utilisé comme un levier de financement : si l'effet de levier est de 30 millions d'euros pour 600, cela signifie que chaque euro investi par l'État permettra d'obtenir un financement de 20 euros en provenance de fonds privés.

L'amendement prévoit, par ailleurs, 20 millions d'euros de crédits pour une assistance technique couvrant la structuration des projets, l'accompagnement individuel des agriculteurs ainsi que des démarches d'innovation et d'apprentissage collectif.

Pour conclure, je tiens à souligner que de nombreux groupes de la grande distribution et de l'industrie agroalimentaire sont prêts à s'engager dans une telle initiative.

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Par cet amendement, vous proposez de créer un fonds de transition agricole, auquel l'État apporterait un financement public maîtrisé à hauteur de 30 millions d'euros pour sécuriser la tranche la plus exposée au risque bancaire, et de 20 millions d'euros au titre d'une assistance technique. L'essentiel du financement restant serait apporté par des investisseurs privés, dont les banques. Le dispositif d'ensemble serait donc profitable à l'amont, aux transformateurs, mais aussi à l'aval, aux consommateurs et à la puissance publique.

Nous n'avons pas expertisé votre proposition, acceptée hier en commission des affaires économiques, et, dans la mesure où il existe déjà des outils, qu'il s'agisse du volet agricole du GPI ou de Bpifrance, il convient de vérifier si la création d'un nouveau fonds est réellement nécessaire. C'est pourquoi je vous suggère de retirer cet amendement et de le représenter en séance publique, afin qu'une discussion puisse s'engager avec le ministre – à défaut, j'émettrai un avis défavorable.

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Pour ce qui est du fonds de transition agricole dont cet amendement propose la création, il me semble qu'il pourrait être fait appel à d'autres sources de financement – je pense notamment à la grande distribution.

Nous avons fait des efforts de sincérisation du programme 206, sur lequel il est ici proposé de prélever 50 millions d'euros. Alors que ce programme était systématiquement négatif, nous l'avons remis à niveau, et il ne serait pas logique de revenir aujourd'hui en arrière en amputant les crédits dont il est doté. En termes de compétitivité et d'affichage, il est important pour notre exportation que nous fassions en sorte de maintenir une agriculture de qualité, dont la sécurité alimentaire constitue un aspect essentiel. L'avenir n'est pas à l'agriculture intensive, mais à une agriculture dont la qualité va constituer un marqueur fort : c'est à cette condition que nous préserverons nos exportations. À mon sens, ce n'est donc vraiment pas le moment de réduire le financement de la sécurité alimentaire, qu'il faudrait au contraire augmenter afin de répondre à la demande croissance des consommateurs.

En résumé, si je n'ai rien contre le fonds de transition agricole, je suis tout à fait opposé à ce qu'il soit financé par une réduction des crédits du programme 206, ce qui reviendrait à déshabiller Pierre pour habiller Paul.

La commission rejette l'amendement.

Elle examine ensuite l'amendement II-CF278 de Mme Sabine Rubin.

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Par cet amendement, nous souhaitons financer un programme de diversification du secteur agricole à La Réunion, de sorte que l'île ne soit plus tributaire de la culture de la canne à sucre, qui y occupe une place prépondérante.

La fin des quotas sucriers imposée par l'Union européenne fragilise en effet le secteur en renforçant la concurrence. Par ailleurs, la monoculture intensive n'est pas sans poser certains problèmes en termes d'épuisement des sols.

Afin d'y remédier, nous proposons un transfert de crédits de 10 millions d'euros vers un nouveau programme pour la diversification du secteur agricole à La Réunion.

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Vous souhaitez soutenir l'agriculture à La Réunion, notamment en facilitant sa diversification, alors que la canne à sucre y a un poids prépondérant. Si nous partageons cet objectif, deux limites apparaissent à la lecture de votre amendement.

Premièrement, le secteur de la canne à sucre n'est pas important uniquement à La Réunion. La filière représente ainsi respectivement 37 %, 16 % et 52 % de la surface agricole utile dans les départements de la Guadeloupe, de la Martinique et de La Réunion ; deuxièmement, la mission Agriculture, via l'Office pour le développement agricole des DOM et l'ASP, attribuera déjà plus de 124 millions d'euros d'aides à ce secteur en 2019, dont 20,4 millions d'euros au titre du programme européen d'options spécifiques à l'éloignement et à l'insularité. Ces aides soutiennent les exploitants connaissant des difficultés dans la filière canne à sucre et leur donnent de l'oxygène pour diversifier leur activité et se prémunir d'un retournement du marché sucrier. Je suis donc défavorable à cet amendement.

La commission rejette l'amendement.

Puis elle est saisie de l'amendement II-CF282 de Mme Sabine Rubin.

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La majorité a récemment refusé d'inscrire dans la loi l'interdiction du glyphosate fin 2020, au prétexte du respect du principe de libre-échange imposé par l'Union européenne. Or, si nous voulons réellement nous affranchir du glyphosate dans trois ans, encore faut-il que nous accompagnions les acteurs de cette transition. À cet effet, nous proposons un transfert de crédits de 10 millions d'euros vers un fonds de soutien aux paysans concernés.

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La transition agro-écologique est l'un des points d'intérêt majeurs que nous partageons en tant que rapporteurs spéciaux, comme nous l'avons déjà montré l'an passé, et l'abandon du glyphosate fait partie intégrante de cette transition. En revanche, votre amendement me semble poser quatre problèmes.

Premièrement, le glyphosate n'est pas le seul produit phytosanitaire dont la consommation doit être réduite. Or, le fonds dont vous proposez la création serait concentré sur le glyphosate – qui est certes le plus médiatisé.

Deuxièmement, le principe fondamental des MAEC, dans le cadre de la directive « Natura 2000 » et de la directive « eau », est justement de fournir un accompagnement contractuel aux exploitations agricoles dans leur transition écologique. En échange du respect d'un cahier des charges pendant cinq ans, le bénéficiaire perçoit une aide annuelle, dont le niveau est établi en fonction des surcoûts ou pertes de revenus engendrés par le choix d'un mode de production non conventionnel.

Troisièmement, il en va de même des aides à la conversion vers le bio.

Quatrièmement, enfin, la France s'est battue à l'échelle européenne pour l'abandon du glyphosate, dont interdiction aura bien lieu dans notre pays sous trois ans.

Pour l'ensemble de ces raisons, je suis défavorable à votre amendement.

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Vous venez de réaffirmer que le glyphosate serait interdit dans un délai de trois ans. Or, lors du débat parlementaire sur la loi EGALIM, nous avons bien entendu le ministre Travert évoquer un simple objectif, et non une certitude – mais nous serons les premiers à nous réjouir si vous nous prouvez, dans trois ans, que nous avions tort de nous montrer sceptiques.

Lors du même débat, il nous a souvent été dit qu'il n'était pas possible d'interdire le glyphosate immédiatement car, pour éviter de placer les paysans qui l'utilisent dans une situation économique difficile, il fallait un peu de temps pour mettre en place des dispositifs destinés à les aider dans cette transition. Je m'étonne donc que, quelques mois plus tard, on nous dise que tout est déjà prévu et financé – en tout état de cause, ce n'est pas ce que nous voyons sur le terrain.

Enfin, même si le glyphosate est aujourd'hui l'un des pesticides dont la dangerosité sanitaire est la plus avérée – ce qui est l'une des raisons expliquant que notre amendement vise spécifiquement ce produit –, rien n'empêche la majorité de proposer des amendements relatifs aux autres pesticides dont la consommation doit être réduite.

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Pour ma part, je soutiendrai cet amendement. On entend souvent dire que l'on ne pourra interdire l'usage du glyphosate que lorsque les agriculteurs pourront recourir à une autre molécule rendant les mêmes services – dont l'existence est hypothétique, et qui serait sans doute tout aussi nocive. En réalité, la sortie du glyphosate dépend surtout de notre capacité à mettre au point et à diffuser des méthodes de culture novatrices.

La commission rejette l'amendement.

Elle en vient à l'amendement II-CF284 de M. Éric Coquerel.

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En septembre 2017, le Gouvernement a décidé de supprimer les aides au maintien en agriculture biologique, qui avaient pour vocation d'aider les paysans à se maintenir en bio après la fin du versement des aides à la conversion. Contrairement au Gouvernement, qui semble considérer que seul le marché a son mot à dire en matière de transition écologique, nous pensons qu'il est normal d'aider au maintien des formes d'agriculture les plus respectueuses de l'environnement – mais aussi de favoriser, même si ce n'est pas l'objet de cet amendement, la production en circuit court et l'approvisionnement des cantines en produits bio.

Nous proposons donc un transfert de crédits de 10 millions d'euros vers un nouveau programme visant à financer une aide au maintien de l'agriculture biologique.

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L'amendement par lequel vous proposez la création d'une action spécifique chargée de financer le rétablissement des aides au maintien en agriculture biologique fait un raccourci : le Gouvernement n'a pas supprimé les aides au maintien, mais recentré en 2017 la part de l'État sur les aides à la conversion. Les conseils régionaux et les agences de l'eau conservent toute latitude pour poursuivre le versement des aides au maintien.

Par ailleurs, l'État respecte ses engagements antérieurs à 2017. Ainsi, un producteur bio ayant touché sa première année d'aide au maintien en 2017 percevra évidemment un cofinancement par l'État jusqu'en 2021.

Enfin, il existe une série d'autres aides pouvant concerner un exploitant bio, dont nous avons souvent discuté ces derniers jours. L'engagement du Gouvernement se trouve concrétisé dans le renforcement et la prorogation du crédit d'impôt versé aux entreprises agricoles dont 40 % au moins des recettes proviennent d'activités relevant du mode de production biologique.

L'ambition de votre amendement étant satisfaite, j'y suis défavorable.

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En tant que conseiller régional, je suis bien placé pour percevoir la contradiction qui existe en matière de politique du bio en France. D'un côté, on aide des paysans à se convertir ; de l'autre, on leur dit au bout de quelque temps que les aides au maintien sont supprimées. Le rapporteur spécial a fait valoir que les conseils régionaux conservaient toute latitude pour poursuivre le versement des aides au maintien : certes, mais ils disposent pour cela de moyens limités au sein d'un budget « agriculture » ayant vocation à mener différentes politiques – c'est le cas pour la région Provence-Alpes-Côte d'Azur, alors même que celle-ci a un fort potentiel agricole.

J'insiste sur le fait que la prolifération des parasites à laquelle on assiste actuellement, dans le contexte d'un changement climatique qui la favorise, rend la situation particulièrement délicate pour les agriculteurs qui, passés à un mode de production biologique, craignent de ne pas tenir économiquement et d'être obligés de revenir à la production conventionnelle. Dans le Vaucluse, le moucheron drosophila suzukii a fait chuter la production de cerises rouges et blanches de 40 % à 50 % ; je pourrais aussi vous parler de la bactérie xylella fastidiosa, qui décime de nombreux végétaux dans le sud de la France, de la cicadelle de la lavande, ou encore de la flavescence dorée qui ravage la vigne. Face à cette situation, nous devons mettre en place des moyens spécifiques en faveur du maintien des agriculteurs bio ; à défaut, les aides à la conversion n'auront servi à rien !

Dans un souci de logique et d'efficacité, je voterai donc en faveur de cet amendement.

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Il y aura de plus en plus d'exploitations en bio, ce dont je me félicite, mais encore faut-il qu'elles puissent se maintenir. Comme chacun le sait, le simple fait que des subventions ne soient pas versées en temps en et heure peut être à l'origine de graves difficultés pour les agriculteurs concernés.

Si les exploitations en bio se multiplient, il en sera logiquement de même pour les transmissions d'exploitations en bio. Or, chaque changement de propriétaire comporte le risque de voir le nouvel exploitant revenir à l'exploitation conventionnelle, ce qui serait un gâchis compte tenu des aides à la conversion perçues lors du passage au bio.

Il importe donc de faire en sorte à la fois que le maintien en bio ne soit pas compromis par des difficultés économiques et d'anticiper dès maintenant les difficultés qui risquent de se poser lors des futures transmissions d'exploitations en bio, afin que celles-ci ne soient pas l'occasion d'un retour au conventionnel.

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Au-delà des aides à l'installation, il est très important d'aider les paysans à se maintenir dans le mode d'exploitation bio. Nous avons déjà débattu l'année dernière de la suppression de l'aide au maintien, mais nous avions alors augmenté le crédit d'impôt pour le maintien en bio, le faisant passer de 2 500 euros à 3 500 euros – un effort que l'on peut estimer insuffisant, mais qui avait le mérite d'exister.

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Il y a une dizaine d'années, au sein d'un territoire que je connais bien, nous avions favorisé la conversion d'un certain nombre d'exploitations au bio. Aujourd'hui, avec l'extinction des aides au maintien, on assiste à un retour en arrière, c'est-à-dire vers le conventionnel, ce que nous devons faire en sorte d'éviter.

Par ailleurs, alors que la production bio nationale ne suffit pas à couvrir la constante augmentation de la demande, je veux rappeler – ayant été rapporteur spécial sur la sécurité sanitaire, je suis bien placé pour le faire – que les règles d'hygiène et de sécurité alimentaire sont bien plus strictes en France qu'elles ne le sont ailleurs.

Enfin, la transmission des exploitations en bio représente une problématique majeure, en ce qu'elle n'est parfois possible qu'au prix d'un regroupement.

Pour toutes ces raisons, je soutiens l'amendement de notre collègue Coquerel.

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Le rapporteur spécial a admis qu'il y avait eu en 2017 un recentrage des aides en faveur de la conversion, ce qui montre que la préoccupation exprimée par notre amendement est bien réelle. Comme M. Aubert, j'ai été conseiller régional, et je suis d'accord avec lui pour estimer qu'on ne peut laisser aux régions le soin de compenser ce que l'État ne fait plus – a fortiori quand elles ne bénéficient pas du transfert budgétaire correspondant. Franchement, je ne comprends pas comment la majorité, qui reconnaît la nécessité de favoriser la filière bio, pourrait ne pas prendre les mesures qui s'imposent pour aider au maintien des exploitations en bio – d'autant que cela ne nécessite pas de budgets très importants.

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En tant qu'élu d'un territoire rural, j'ai vu des agriculteurs passer au bio uniquement pour percevoir les aides à la conversion et valoriser les terres de leur exploitation, ce qui leur permet de les revendre plus cher au moment où ils partent à la retraite.

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Je conviens qu'il existe des disparités entre les régions, dont certaines soutiennent activement le maintien en bio alors que d'autres ne le font plus du tout – plus largement, cela dépend aussi du budget que chaque région consacre à l'agriculture. Cela dit, nous sommes très proches d'une réforme de la PAC qui, en l'état actuel, prévoit un certain « verdissement » de son premier pilier – celui relatif au soutien des marchés et des revenus agricoles par un système d'aides aux agriculteurs. Je ne sais pas si la France sera en mesure de soutenir cette orientation jusqu'au bout, mais j'ai bon espoir que, dans le cadre des négociations, nous puissions plaider en faveur des producteurs bio et, si tout va bien, obtenir la mise en oeuvre de dispositions d'un montant bien supérieur à celui de la mesure ici proposée.

La commission rejette l'amendement.

Elle est ensuite saisie de l'amendement II-CF267 de M. Éric Coquerel.

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Les programmes agricoles territoriaux (PAT) sont importants en ce qu'ils peuvent jouer un rôle crucial pour développer les circuits courts, réduire les émissions de gaz à effet de serre, soutenir les producteurs locaux et améliorer la qualité des repas dans la restauration collective. Cet amendement vise à faire en sorte que l'objectif de 200 PAT en 2019 et de 500 en 2020 soit atteint – ce qui semble mal engagé, puisque l'objectif pour 2018 a déjà été revu à la baisse : de 100 PAT, il a été ramené à 40 !

Si nous continuons ainsi, nous n'atteindrons jamais les objectifs initialement fixés. Il est donc impératif de débloquer un budget pour favoriser le développement des PAT et atteindre les objectifs prévus par la mission, comme le prévoit cet amendement.

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Votre amendement vise à faciliter le développement des PAT. Nous reconnaissons tout l'intérêt de ce dispositif, dont le potentiel a été nettement mis en avant par les États généraux de l'alimentation. Toutefois, votre amendement présente deux difficultés à nos yeux.

Premièrement, la réévaluation à la baisse – 40 contre 100 – du nombre de PAT atteints en 2018 est justifiée dans le projet annuel de performances de la mission Agriculture et, puisqu'il n'est pas possible d'infléchir ce résultat d'ici à la fin de l'année, nous vous invitons à évoquer à nouveau la question lors du débat qui se tiendra au prochain printemps et sera précisément consacré au projet de loi de règlement pour 2018. Deuxièmement, la loi EGALIM, adoptée en lecture définitive par l'Assemblée nationale le 2 octobre 2018, prévoit que le Gouvernement remettra en 2020 un rapport au Parlement sur l'évaluation des programmes agricoles territoriaux, ce qui permettra de faire toute la lumière à ce sujet.

Pour l'ensemble de ces raisons, notre avis est défavorable.

La commission rejette l'amendement.

Elle examine l'amendement II-CF268 de Mme Sabine Rubin.

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Alors que l'année dernière, le groupe La France insoumise avait multiplié les demandes de rapport, ce matin c'est plutôt la foire à 10 millions d'euros – c'est la septième fois que vous nous proposez une mesure de cet ordre !

Il est évident que nous partageons votre objectif de lutter contre l'obésité, notamment chez les enfants. Cependant, votre amendement pose plusieurs difficultés.

Premièrement, si certains produits alimentaires y contribuent, il ne faut pas oublier d'autres facteurs comme le manque d'activité physique, ou des déterminants métaboliques et génétiques.

Deuxièmement, vous proposez de créer un fonds pour compenser auprès des chaînes de télévision publiques la suppression des publicités sur les produits alimentaires favorisant l'obésité, mais il convient plutôt de procéder dans l'ordre, en commençant par étudier les modalités d'évolution de la publicité pour les produits que vous évoquez, sans nécessairement aller jusqu'à sa suppression, et avant de compenser éventuellement la perte de recettes des télévisions.

Troisièmement, enfin, votre amendement présente deux incohérences de fond, tenant d'une part à son montant, sans commune mesure avec le manque à gagner prévu, d'autre part à l'oubli des radios publiques, qui peuvent également être concernées.

J'émets donc un avis défavorable à cet amendement.

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L'année dernière, vous nous reprochiez de présenter trop d'amendements demandant des rapports ; cette année, vous trouvez que nous déposons trop d'amendements de crédits... Votre remarque sur ce point me paraît donc tout aussi illogique que désobligeante car, en tant que députés, il entre dans nos attributions de formuler des propositions.

Pour ce qui est des radios, nous n'avons sans doute fait que devancer l'intention de la majorité, puisque j'ai cru comprendre que le Gouvernement souhaitait ressusciter l'ORTF en fusionnant tous les moyens de radiodiffusion et de télédiffusion.

La commission rejette l'amendement.

Elle étudie ensuite l'amendement II-CF491 de la commission des affaires économiques.

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La loi EGALIM prévoit un renforcement des dispositions de l'article L. 631-24 du code rural et de la pêche maritime, dont le contrôle, aujourd'hui assuré exclusivement par les agents de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, est peu effectif.

L'article 3 de la même loi renvoie à un décret la liste des personnels chargés du contrôle. Or, s'il semble que l'intention du Gouvernement soit de désigner des agents de FranceAgriMer pour également assurer cette mission, les documents budgétaires montrent une baisse du schéma d'emplois de cet établissement de 29 ETP.

Le présent amendement vise donc à renforcer les moyens de FranceAgriMer afin de permettre des contrôles plus effectifs, notamment auprès de la grande distribution, où ils sont défaillants depuis de nombreuses années.

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Nous n'avons pas eu le temps de vérifier si FranceAgriMer avait bien prévu une augmentation de ses effectifs. Toutefois, compte tenu du coût de cet amendement, j'émets un avis favorable.

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Effectivement, les contrôles sont aujourd'hui un peu défaillants, et je regrette qu'il n'ait rien été prévu pour y remédier dans le cadre du projet de loi EGALIM, dont c'était justement la vocation.

La commission adopte l'amendement.

Elle examine l'amendement II-CF489 de la commission des affaires économiques.

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Cet amendement déposé par notre collègue Dominique Potier, et adopté en commission des affaires économiques, vise à renforcer le réseau des fermes expérimentales du réseau DEPHY, qui s'engagent dans la réduction de l'utilisation des produits phytosanitaires. En effet, les exploitations de ce type sont actuellement en nombre insuffisant pour montrer l'exemple aux autres exploitations agricoles en matière de réduction de l'utilisation des produits phytosanitaires, alors qu'elles obtiennent des résultats remarquables aussi bien sur le plan technique que sur le plan économique.

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L'amendement que vous défendez au nom de la commission des affaires économiques, saisie pour avis, a été initialement déposé par Dominique Potier, dont nous connaissons l'engagement en matière de transition agro-écologique. Il vise à faciliter, à hauteur de 450 000 euros, le financement des fermes expérimentales DEPHY, qui utilisent des moyens alternatifs aux pesticides. Ayant moi-même été invité sur le terrain à constater les progrès réalisés par ces établissements, je peux vous confirmer tout l'intérêt de cette démarche collective. J'ai été heureux de prendre part à la réunion de la commission des affaires économiques qui s'est tenue hier, lors de laquelle le ministre de l'agriculture s'est exprimé, et je partage l'objectif consistant à multiplier par dix le nombre des fermes DEPHY d'ici à 2021. Je suis donc favorable à cet amendement.

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Mes chers collègues, ne croyez-vous pas que le meilleur moyen d'encourager les agriculteurs qui se sont lancés dans le système DEPHY consisterait à leur rembourser, au moins partiellement, les taxes environnementales sur leurs produits phytosanitaires, dès lors qu'il est établi qu'ils respectent les engagements prescrits, c'est-à-dire sur production du document justifiant de leur certification annuelle ? Ce serait là une véritable mesure d'écologie incitative, plutôt que punitive, et qui viendrait justement encourager et récompenser ces professionnels engagés.

La commission adopte l'amendement.

Suivant l'avis favorable des rapporteurs spéciaux, elle adopte les crédits de la mission Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales, modifiés.

Article 41 et état D

Suivant l'avis favorable des rapporteurs spéciaux, la commission adopte les crédits du compte spécial Développement agricole et rural, non modifiés.

Enfin, la commission examine les crédits des comptes spéciaux Participations financières de l'État, Participation de la France au désendettement de la Grèce et Avances à divers services de l'État ou organismes gérant des services publics (Mme Valérie Rabault, rapporteure spéciale).

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La mission que nous abordons comporte les crédits de deux comptes d'affectation spéciale (CAS) et d'un compte de concours financiers, sur lesquels j'interviendrai successivement au cours des 5 minutes qui me sont imparties.

Nous avons eu un long débat l'an dernier sur le CAS Participations financières de l'État. Comme vous savez, chaque année nous sommes amenés à voter, à la fois en recettes et en dépenses prévisionnelles, des crédits au sujet desquels nous ne savons pas grand-chose. Ce n'est pas une pratique propre à cette majorité : il se trouve que l'État a, de longue date, pris l'habitude de ne pas donner d'informations aux marchés en amont sur les opérations qu'il peut être amené à effectuer sur ses participations. De ce fait, il ne fournit pas non plus d'informations à la représentation nationale, ce qui est tout même un peu gênant dans la mesure où nous sommes censés voter un niveau de recettes et un niveau de crédits.

Cela peut conduire à ce qu'un certain nombre de dérapages se produisent au fil de l'année, lorsque l'État décide de recapitaliser des entreprises dont il est actionnaire : les fonds correspondants sont alors prélevés sur le budget général de l'État, lorsque les opérations concernées n'ont pas été anticipées suffisamment tôt. Alors que nous votons généralement 5 milliards d'euros de recettes et 5 milliards d'euros de dépenses – c'est ce qui se produit chaque année, à de rares exceptions près – cette année, le Gouvernement a prévu de doubler ces montants en prévision des projets de privatisation prévus par le projet de loi relatif à la croissance et à la transformation des entreprises (PACTE) et concernant Aéroports de Paris et La Française des jeux.

Le produit de cession de ces entreprises a vocation à alimenter le Fonds pour l'innovation et l'industrie (FII), dont le rendement annuel devrait être de 250 millions d'euros par an selon le Gouvernement. Mon groupe ayant déjà eu l'occasion de faire savoir qu'il était opposé à ces privatisations, vous ne serez pas étonnés d'apprendre que j'ai l'intention de déposer un amendement visant à la suppression des crédits correspondants ; par ailleurs, j'émettrai un avis défavorable sur le vote des crédits de ce compte d'affectation spéciale.

Pour que les choses soient bien claires en termes de comptabilité, je rappelle que la cession d'actifs résultant d'une privatisation n'a pas d'effet sur le déficit public : elle ne l'améliore ni ne l'aggrave, dans la mesure où les recettes qui en résultent sont des recettes au sens de la comptabilité budgétaire, mais des opérations financières s'inscrivant dans la comptabilité nationale.

L'an dernier, nous avons eu un long débat avec le ministre au sujet du FII. À notre sens, il était possible d'amender la loi organique relative aux lois de finances (LOLF) de façon que les dividendes perçus par l'Agence des participations de l'État (APE) puissent lui revenir plutôt que de tomber dans le budget général, afin d'avoir une vraie politique de gestion.

À ce titre, je souhaite remercier le Gouvernement. En effet, l'an dernier, nous avions adopté l'article 178 de la loi de finances initiale pour 2018, qui prévoyait que le Gouvernement remettrait au Parlement, avant le 30 juin 2018, un rapport d'information sur la politique de dividendes de l'État actionnaire et sur l'opportunité de faire évoluer l'Agence des participations de l'État (APE) pour qu'elle puisse recevoir ces dividendes. J'ai reçu ce rapport quasiment en temps voulu, ce qui est assez rare pour être souligné, et je vais vous le diffuser, car il me paraît très intéressant, en ce qu'il pose les bonnes questions – en lisant entre les lignes, j'ai l'impression qu'une évolution de l'APE pourrait être favorable à la politique de gestion, mais que le Gouvernement ne souhaite pas faire évoluer le statut de l'APE.

Sur la période 2006-2017, on peut évaluer à 77,2 milliards d'euros l'amélioration du solde budgétaire de l'État permise par les dividendes et les opérations du CAS Participations financières de l'État. C'est un point important. Néanmoins, je rejoins la Cour des comptes lorsqu'elle recommande, dans un récent rapport, de faire évoluer le statut de l'APE de façon que celle-ci puisse recevoir les dividendes des titres qu'elle détient, le Parlement fixant alors le niveau de la participation de l'Agence au budget général de l'État.

Dans le rapport qui nous a été remis, le Gouvernement voit des avantages à une telle évolution, dans la mesure où il ne serait pas nécessaire de procéder, le cas échéant, à des abondements via le budget général. En revanche, il estime qu'un « tel mécanisme aurait conduit – durant la période 2006-2017 – à un accroissement du besoin de financement de l'État, compte tenu de la moindre trésorerie apportée par les dividendes au budget général ».

J'en viens au CAS Participation de la France au désendettement de la Grèce. Selon les accords européens, la Banque de France, qui perçoit des intérêts versés par la Grèce, est censée lui en rétrocéder une partie. Toutefois, cette dernière n'ayant pas respecté l'ensemble de ses engagements, il a été décidé de suspendre le dispositif, de sorte que la France a bénéficié d'une trésorerie supplémentaire de 1 milliard d'euros. Lors de sa réunion du 22 juin dernier, l'Eurogroupe a décidé de réactiver le dispositif de rétrocession des intérêts. L'an dernier, M. Bruno Le Maire nous avait indiqué – je vous invite à consulter le compte rendu de la réunion de la commission élargie – qu'une fois ce dispositif réactivé, nous reverserions le trop-perçu correspondant aux années 2015, 2016 et 2017. Or, il semble exclu, à ce stade, de rétrocéder les intérêts perçus au titre des années 2015 et 2016. Nous interrogerons donc, en séance publique, le ministre de l'économie et des finances sur ce sujet.

Le Mécanisme européen de stabilité (MES) n'a pas encore notifié la chronique actualisée des décaissements pour 2018 et 2019, mais il est probable que leurs montants seront supérieurs à ceux qui sont envisagés dans la chronique initiale, puisqu'ils intégreront une fraction des intérêts relatifs à l'année 2017. Cependant, si l'on s'en tient à la chronique actuelle, la Banque de France doit encore reverser à la Grèce, d'ici à 2025, la somme de 338 millions d'euros.

Je suis désolée de devoir émettre un avis défavorable sur le vote des crédits de ce compte d'affectation spéciale, puisque ceux-ci ne sont pas conformes aux annonces que le ministre de l'économie et des finances nous avait faites l'an dernier en commission élargie. Je suppose qu'il nous donnera davantage de précisions en séance publique.

Enfin, le compte de concours financiers Avances à divers services de l'État ou organismes gérant des services publics gère les avances accordées par l'État à des entités publiques sous statuts divers. Pour 2019, il est prévu, pour l'ensemble du compte, des recettes de 11,4 milliards et des dépenses de 11,3 milliards, soit un solde positif de 72,5 millions. Autrement dit, le montant des remboursements d'avances devrait être légèrement supérieur au montant des avances consenties, ce qui améliore d'autant le solde budgétaire de l'État.

Ce compte a permis le financement, sous la forme de prêts, du budget annexe Contrôle et exploitation aériens (BACEA). Or, selon la Cour des comptes, cette pratique est contraire à la LOLF. Elle a, certes, cessé en 2015, mais le « stock de dettes » demeure important. Depuis 2015, la dette du BACEA à l'égard de ce compte diminue d'environ 100 millions par an, passant de 1,2 milliard à moins de 729 millions en 2019.

Le financement d'un budget annexe par un compte spécial est une pratique critiquable. Pour cette raison, et uniquement pour cette raison, j'émettrai un avis défavorable sur le vote des crédits de ce compte de concours financiers.

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Madame Rabault, vous critiquez la privatisation des entreprises publiques que sont Aéroports de Paris (ADP) et La Française des jeux (FDJ), qui a été discutée dans le cadre de l'examen du projet de loi PACTE. Or, je tiens à souligner que cette décision n'est pas inédite puisque la loi du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques avait déjà permis le transfert au secteur privé des sociétés concessionnaires d'Aéroports de Lyon et Aéroport de Nice-Côte d'Azur.

Par ailleurs, vous indiquez que la décision de privatisation est infondée sur le plan économique et budgétaire. Je souhaiterais que vous clarifiiez votre positon à cet égard. Soit l'investissement dans ADP et FDJ est stratégique, soit il poursuit une visée économique et budgétaire. Un même investissement ne peut en effet poursuivre deux objectifs distincts. Si la visée économique et budgétaire prime, préconisez-vous que le rendement soit le premier facteur de décision de l'État dans ces prises de participations ? Dans une telle hypothèse, la gestion des participations de l'État serait plus dynamique et se rapprocherait de celle d'un hedge fund. Je ne suis pas certaine que ce soit souhaitable, et je pense que vous partagez cette position.

Si la logique stratégique prime, pourquoi vous opposez-vous au placement du produit de ces cessions dans un fonds placé auprès du Trésor ? Cette méthode de gestion avait en effet été retenue pour les programmes d'investissements d'avenir (PIA), dont les dotations étaient pour partie dites « non consommables » : seuls les intérêts produits par ces dotations financent les investissements d'avenir. Quelle distinction faites-vous entre les PIA et le FII, dont les modalités de financement sont très similaires ?

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Ma collègue du groupe majoritaire a raison de souligner que des opérations analogues ont été décidées en 2015. Je remarque, du reste, qu'Emmanuel Macron était alors ministre de l'économie ; ceci explique peut-être cela. En tout cas, il est regrettable qu'on l'ait laissé faire à l'époque, et ce précédent ne justifie aucunement ce qui est en train de se passer.

Toujours est-il que nous sommes à nouveau amenés à nous prononcer sans être informés du détail des cessions envisagées. On invoque la stratégie de l'État actionnaire, mais cet argument ne tient pas. Il n'est pas normal que le Parlement, en particulier la commission des finances de l'Assemblée nationale, ne puisse pas obtenir des informations aussi importantes. Il y a là un problème de démocratie. Au demeurant, comment peut-on invoquer des préoccupations stratégiques quand, lors des débats, Bruno Le Maire justifie cette opération en nous expliquant que les entreprises vendues pourraient s'écrouler à tout moment et que le futur acquéreur ne ferait donc pas forcément une bonne affaire. L'argument est un peu ubuesque pour qui souhaite persuader de futurs actionnaires d'acheter ses parts le plus cher possible.

Par ailleurs, sur le fond, je souscris aux propos de Mme la rapporteure spéciale. Mettons de côté le problème stratégique soulevé par la privatisation des frontières à travers la cession d'ADP, la question éthique posée par le fait de laisser au privé le soin de s'occuper des jeux de hasard alors qu'on connaît les problématiques associées à cette activité et le fait qu'Engie est l'héritier de GDF-Suez, dont Nicolas Sarkozy nous disait, lors de l'ouverture à la concurrence – comme Mme Borne aujourd'hui à propos de la SNCF –, que jamais elle ne serait privatisée. Cette privatisation est une mauvaise affaire, il faudra le dire et le répéter ! Le Gouvernement souhaite en effet placer cet argent dans un fonds d'investissement qui rapportera, espère-t-il, 250 millions d'euros par an, alors qu'en 2017, ADP a rapporté 173 millions d'euros, la FDJ 89 millions et Engie 550 millions. Cette mauvaise affaire s'explique par le fait qu'actuellement, les taux d'intérêt sont inférieurs aux dividendes des actions. Certes, M. Le Maire s'est lancé dans des calculs sur je ne sais combien d'années pour tenter de démontrer que la situation actuelle n'était pas si avantageuse que cela. Mais, pour le long terme, en tout cas pour l'an dernier, ces arguments ne sont pas valables.

Cette mauvaise affaire servira, une fois de plus, les actionnaires et le monde de la finance dont vous espérez qu'il sauvera, à terme, l'économie française. Tous les chiffres de cette année démontrent l'inverse.

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Une chose m'a troublé lorsque j'ai examiné le compte d'affectation spéciale Participations financières de l'État. Vous a-t-on éclairée, madame la rapporteure spéciale, sur l'origine des 10 milliards d'euros inscrits en recettes ? Je me demande à quelle part des trois cessions envisagées ils correspondent, puisque la somme de ces trois opérations sera très supérieure à 10 milliards. Par ailleurs, pourquoi a-t-on inscrit, en dépenses, seulement 8 milliards en opérations en capital et non 10 milliards, comme cela avait été annoncé ? Est-ce à dire qu'une seconde tranche de 2 milliards sera débloquée en 2020 ?

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Madame David, sachez que je me suis toujours prononcée contre les précédentes privatisations d'aéroports. Vous pouvez le vérifier : les votes sont publics. La loi dite « Macron », quant à elle, a été adoptée suivant la procédure de l'article 49, alinéa 3, de la Constitution et n'a donc pas été mise aux voix, mais j'ai toujours voté contre ceux de ses articles qui étaient relatifs à la privatisation des aéroports. Au moment de la cession de celui de Toulouse, je me suis rendue, en tant que rapporteure générale de la commission des finances, dans le bureau du ministre, Emmanuel Macron, pour procéder à un contrôle sur pièces et sur place. J'y suis restée trois heures et j'ai examiné le contrat de privatisation sous toutes ses coutures. Cela a renforcé ma conviction que la privatisation d'infrastructures était néfaste pour notre économie, dans la mesure où elle revient à donner à un actionnaire privé les clefs d'actifs stratégiques pour notre pays. Il ressort, du reste, d'une analyse du capital de 460 aéroports en Europe réalisée en 2016 par une agence européenne que, hormis au Royaume-Uni, l'ensemble de ces aéroports sont détenus par la puissance publique – la France se classe au deuxième rang.

J'estime que les privatisations réalisées précédemment ne sont pas efficientes. Prenons l'exemple de l'aéroport de Toulouse, où je me rends chaque semaine : je ne suis pas certaine que la compagnie Air France, actuellement reléguée au fond de l'aérogare, ait gagné à ce qui s'est passé.

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Je le confirme : il faut marcher longtemps pour atteindre le hall d'enregistrement.

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Tout à fait, et c'est ainsi depuis qu'un actionnaire chinois est à la tête de l'aéroport. Je rappelle, du reste, que M. Macron, ministre de l'économie – vous pouvez retrouver facilement ses propos dans le compte rendu des débats publié au Journal officiel –, avait reconnu que des bêtises – ce ne sont peut-être pas ses mots exacts – avaient été faites lors de la cession de l'aéroport de Toulouse et qu'il s'était donc efforcé, dans son projet de loi, de corriger les termes de la privatisation pour les aéroports de Nice et de Lyon. Je maintiens donc la position que j'ai défendue s'agissant de ces privatisations.

Ensuite, comment les participations de l'État doivent-elles être gérées ? L'an dernier, j'ai demandé à l'APE d'examiner chacune de ces participations et d'indiquer, ligne par ligne, pour chaque investissement, s'il est destiné à aider l'entreprise, s'il est stratégique en matière d'infrastructures ou s'il relève de politiques menées par l'État. Or, ADP a été classé dans la catégorie « infrastructures » : en l'espèce, la participation de l'État relève d'une politique publique. Il ne s'agit pas de rendement ou de gestion à la manière d'un hedge fund, mais de garder les clefs s'agissant d'investissements de long terme qui structurent l'ensemble de l'économie française.

Par ailleurs, comment finance-t-on le Fonds pour l'innovation de rupture à hauteur de 250 millions d'euros par an ? Les dividendes versés par les entreprises détenues par l'APE ont rapporté, en 2017, 5,4 milliards d'euros. Ne me dites qu'il n'est pas possible de prélever, chaque année, sur ces dividendes 250 millions pour financer l'innovation de rupture !

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Il faut tenir compte des cycles économiques.

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Certes, mais le montant des dividendes a toujours été supérieur à 250 millions. J'ai retracé, dans mon rapport, leur évolution : sur dix ans, avec les produits nets de cession, ils ont rapporté 77 milliards qui ont été reversés au budget général de l'État.

Quant au mode de fonctionnement du Fonds pour l'innovation de rupture, il est en effet identique à celui des PIA, puisque les dotations ne sont pas consommables et son financement est assuré par les intérêts, un taux d'intérêt fictif étant fixé. Pour ma part, je propose – et je note que le rapport du Gouvernement n'est pas totalement en désaccord avec moi sur ce point – que les dividendes reviennent à l'APE et que, chaque année, le Parlement détermine le montant que celle-ci verse au budget général de l'État. Au moins pourrions-nous avoir ainsi sur ce sujet un débat démocratique. Actuellement, ce débat n'existe pas, puisque nous votons des budgets les yeux fermés. Je comprends que l'État ne veuille pas donner d'informations aux marchés, mais nous pourrions décider, chaque année, ce qu'il advient des dividendes versés à l'APE : quelle est la part qui reste à celle-ci, celle qui est reversée au budget général de l'État et celle qui pourrait être consacrée au financement de l'innovation de rupture.

Monsieur Coquerel, je crois avoir indiqué quelle est ma position sur la privatisation des aéroports.

Monsieur de Courson, je me suis posé la même question que vous et je n'ai pas obtenu de réponse. On nous avait dit, en effet, que le produit des cessions, 10 milliards d'euros, contribuerait au désendettement de l'État via le rachat par un fonds des obligations assimilées au Trésor. Or, ce n'est pas 10 milliards, dont 8 milliards qui sont prévus en dotations de capital et 2 milliards d'euros pour le désendettement.

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Madame la rapporteure spéciale, votre intervention, que j'ai écoutée avec beaucoup d'intérêt, m'inspire deux observations.

En ce qui concerne les aéroports, je ferai d'abord une remarque de méthode. Je trouve très bien que l'on invoque les comparaisons internationales, mais il serait merveilleux de le faire systématiquement. En l'espèce, la comparaison vous intéresse car elle semble vous donner raison, mais tel n'est pas toujours le cas. Il me semble, monsieur le président, que la commission des finances devrait mener une réflexion sur ce sujet, notamment en matière de fiscalité et de compétitivité des entreprises.

J'ajouterai – cette position n'est pas forcément partagée par l'ensemble de mon groupe – qu'en la matière, la véritable réflexion doit porter, me semble-t-il, sur le périmètre d'intervention de l'État ou de l'action publique. Pour ma part, je ne suis pas convaincu que ce soit le rôle de celui-ci de gérer des galeries commerciales, des espaces hôteliers et l'accueil de clients, ou de s'occuper des jeux de grattage ! Nous devrions travailler au préalable – et c'est peut-être une erreur qu'a commise le Gouvernement dans le cadre du projet de loi PACTE – à la redéfinition du périmètre de l'action publique et de celui de l'État lui-même.

S'agissant des 5,4 milliards d'euros de dividendes perçus par l'État, j'avais compris – c'est, du reste, ce qu'a indiqué le ministre en séance publique – que l'on ne pouvait pas affecter les recettes de l'État. Si tel était le cas, je proposerais, en tant que rapporteur spécial pour le commerce extérieur, d'utiliser les 500 millions d'euros d'excédents annuels sur l'assurance-crédit pour permettre à l'assurance prospection de fonctionner... On ne peut pas décider d'affecter préalablement ces dividendes à telle ou telle dépense. Je rappelle que le déficit budgétaire est, cette année, de près de 100 milliards d'euros. Sur ce sujet, permettez-moi de vous le dire, le débat n'est pas clair.

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Je rappelle que nous avons demandé à la Cour des comptes, en application du 2° de l'article 58 de la LOLF, un rapport sur le bilan de la privatisation des aéroports, qui doit nous être remis très prochainement.

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En préambule, je tiens à préciser que je souscris aux remarques pertinentes de M. Forissier sur ADP. Je rappelle, à ce propos, que le transfert porte uniquement sur la gestion des infrastructures pour une durée limitée à soixante-dix ans, les missions régaliennes restant du ressort de l'État.

Madame Rabault, vous avez émis un avis défavorable sur le vote de ces missions. Ce faisant, vous renoncez à trois programmes essentiels : le programme 145, qui a pour mission de promouvoir et de gérer dans les meilleures conditions la politique de l'épargne et de favoriser ainsi l'accès des organismes de logement social à une ressource financière attractive ; le programme 114, qui regroupe les crédits destinés à couvrir un ensemble de dispositifs pour lesquels l'État a accordé sa garantie, dans les domaines notamment de l'agriculture, du logement, des exportations et des aides à l'industrie ; le programme 344, enfin, qui comprend le fonds de soutien relatif aux prêts et contrats financiers destinés à financer un fonds de soutien en faveur des collectivités territoriales...

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Ces programmes ne font pas partie de la mission que nous examinons.

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C'est exact. Au temps pour moi. Quoi qu'il en soit, vous justifiez votre avis défavorable par le fait que le ministre n'a pas tenu ses engagements sur le reversement à la Grèce des intérêts perçus au titre des années 2015 et 2016. Je rappelle qu'à cette époque, le Gouvernement n'était pas le même qu'aujourd'hui et que vous étiez rapporteure générale de la commission des finances.

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Vous avez indiqué en revanche que, s'agissant des intérêts perçus en 2017, le ministre avait tenu ses engagements.

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Quelle est la part de ces intérêts dans le budget sur lequel vous émettez un avis défavorable ?

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Il avait été convenu dans l'accord que, si la Grèce respectait les plans définis au niveau européen, les intérêts perçus par la France devraient lui être rétrocédés. Puisque tel n'a pas été le cas, la rétrocession des intérêts a été suspendue, de sorte que le solde budgétaire de la France a été augmenté de facto de 1 milliard d'euros. En juin 2018, l'Eurogroupe a reconnu que la Grèce avait rempli ses engagements et a décidé en conséquence que les intérêts perçus devaient lui être à nouveau rétrocédés. L'an dernier, Bruno Le Maire nous a indiqué, ici même, que, si l'Eurogroupe prenait une telle décision, la France l'appliquerait. Or, on apprend, à la lecture du projet de loi de finances, que le reversement ne concernera que les intérêts perçus au titre de l'année 2017, et non ceux perçus au titre de 2015 et de 2016. Nous interrogerons donc le ministre sur ce point en séance publique. Quant aux programmes que vous avez mentionnés, ils ne font pas partie de la mission Participations financières de l'État.

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Vous avez auditionné, me semble-t-il, le ministre dans le cadre de votre rapport. Doit-on comprendre qu'il n'est absolument pas question d'un rattrapage ultérieur concernant les années 2015 et 2016 ?

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Je ne fais que reprendre ce qui est écrit dans le « bleu » budgétaire qui nous a été remis. Nous n'avons pas auditionné le ministre, car il ne vous aura pas échappé qu'il était occupé à autre chose en séance publique.

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Je souhaite revenir sur la remarque de Mme la rapporteure spéciale concernant l'aéroport de Toulouse qui, il est vrai, n'est pas exempt de défauts. Mais, en la matière, il ne faut être ni manichéen ni dogmatique. J'habite exactement entre Toulouse et Bordeaux, de sorte que je fréquente leurs aéroports respectifs depuis plusieurs années. Or, je constate que, depuis sa privatisation, l'aéroport de Toulouse s'est développé de manière très importante tandis que celui de Bordeaux n'a pas évolué. Ce développement est un facteur d'attractivité majeur pour l'Occitanie ; c'est donc un bienfait de la privatisation.

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Je prends moi aussi l'avion, chaque semaine, et depuis bien longtemps, à l'aéroport de Toulouse. Sa privatisation est intervenue en 2016 ; tous les investissements avaient été réalisés auparavant, qu'il s'agisse de la création des deux parkings ou de la nouvelle aile de l'aérogare. Ne me dites donc pas qu'il s'est développé grâce à la privatisation ! Les seuls aménagements réalisés par le nouvel actionnaire concernent l'ouverture de boutiques, qui est en cours, et le déplacement du hall d'enregistrement d'Air France à l'autre bout de l'aérogare.

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Nous lirons avec intérêt le rapport de la Cour des comptes sur le bilan de la privatisation des aéroports.

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Madame la rapporteure spéciale, vous avez indiqué, dans votre exposé, que les 10 milliards d'euros issus des privatisations seraient consacrés, à hauteur de 2 milliards, au désendettement et, à hauteur de 8 milliards, à un fonds pour l'innovation. Pourtant, et c'est une anomalie, on réduira ainsi de 10 milliards la dette au sens maastrichtien, laquelle correspond en effet à la dette brute moins les dépôts en trésorerie. Ainsi, si vous vendez l'ensemble des actifs publics et que vous placez le produit de ces ventes sur un compte de trésorerie, vous donnerez l'illusion que la dette a baissé. Il ne s'agit, me direz-vous, que de 10 milliards sur une dette de près de 1 800 milliards, mais ce n'est pas du tout logique.

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C'est en effet l'application d'une règle européenne. Mais ne cédons pas à l'illusion.

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Je souhaiterais revenir rapidement sur la question de la privatisation des aéroports. Comme le disait M. Forissier, nous devons nous interroger sur les contours de l'action de l'État et de l'action publique en général. Partons d'un constat : en France, le nombre d'aéroports par habitant est deux fois supérieur à celui de l'Allemagne, du Royaume-Uni ou de l'Espagne. Ensuite, nous sommes tous d'accord sur le fait qu'un aéroport est souvent un outil de développement économique crucial. Or, actuellement, les principaux ingrédients de ce développement sont la présence de galeries commerciales et la création de lignes avec des partenaires qui ne sont plus exclusivement – ni même majoritairement, je suis désolé de le dire – Air France, mais plutôt Ryanair, par exemple. Pensez-vous sérieusement que l'État doive se mêler de création et de gestion de galeries commerciales, d'achat et de création de lignes ? Je n'en suis pas certain.

Il faut cependant se garder, comme le disait Michel Lauzzana, de tout jugement manichéen. De fait, vous avez partiellement raison, madame la rapporteure spéciale : lorsqu'on voit ce qui se fait à Toulouse, on ne peut pas être entièrement convaincu. Mais je ne suis pas certain que cela soit dû au fait que les actions sont détenues par un partenaire privé quel qu'il soit. En tout cas, nous attendons avec impatience le rapport de la Cour des comptes.

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Monsieur Forissier, je n'ai pas répondu à votre question sur la gestion des différents comptes d'affectation spéciale – nous avions eu, l'an dernier, un long débat sur ce sujet. Toute société de gestion qui gère des participations gère également les dividendes. L'APE, à cet égard, fait exception car elle gère des participations mais les dividendes lui échappent, puisqu'ils tombent directement dans le budget de l'État. Il en a été ainsi décidé dans la LOLF. Du reste, lorsque le compte d'affectation spéciale que l'APE gère est déficitaire, c'est le budget général de l'État qui remet au pot – ce fut le cas lorsqu'il a fallu recapitaliser Areva. Si elle peut garder une partie des dividendes, elle pourra anticiper davantage.

Nous avons donc proposé de modifier la LOLF pour faire évoluer le statut de l'APE et confier au Parlement le soin de déterminer, dans le cadre du PLF, la part de dividendes qu'elle conserve et celle qui est reversée au budget général, et, pourquoi pas, d'affecter les 250 millions nécessaires au financement des investissements de rupture.

En ce qui concerne les aéroports, je suis d'accord : il ne faut pas tirer de conclusions hâtives de ce qui se passe à Toulouse. C'est pourquoi, si la privatisation est votée, nous irons, avec le rapporteur spécial du Sénat, consulter à Bercy le cahier des charges puisque nous y sommes autorisés par l'article 57 de la LOLF. Bien entendu, nous respectons le secret des affaires mais, en la matière, nous ne lâcherons pas.

La commission en vient à l'examen des amendements.

Article 41 et état D

La commission est saisie de l'amendement II-CF323 de la rapporteure spéciale.

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Étant opposée au projet de privatisation d'ADP et de la FDJ, je propose, par cet amendement, de supprimer les crédits issus du produit de leur cession dévolus, d'une part, à la création du fonds pour l'innovation de rupture et, d'autre part, au désendettement de l'État et de ses établissements publics.

La commission rejette l'amendement.

Elle examine, en discussion commune, les amendements II-CF216 de M. Éric Coquerel, II-CF217 de Mme Sabine Rubin, II-CF281 de M. Éric Coquerel et II-CF285 de Mme Sabine Rubin.

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Les amendements II-CF216 et II-CF217 visent à ne pas privatiser ADP et à réinvestir dans le capital des aéroports qui ont été précédemment privatisés, pour les raisons qui ont déjà été évoquées.

D'un point de vue stratégique, les aéroports sont des frontières. Je m'étonne d'ailleurs de l'argument relatif aux galeries commerciales. Je rappelle qu'il est tout à fait possible de recourir à une délégation de service public pour cette activité, sans pour autant que les fonctions régaliennes des aéroports soient remises en question. On a bien vu que les effectifs de personnels ont été réduits pour des raisons bien comprises de rentabilité pour les actionnaires, ce qui est contraire à la notion de service public en ce qui concerne l'accueil et la sécurité des voyageurs.

Mme Rabault a fort bien rappelé que, ces dix dernières années, la rentabilité moyenne pour l'État a toujours excédé 250 millions d'euros. En ce qui concerne plus spécifiquement ADP, la rentabilité est bien supérieure à ce que peut rapporter le placement du produit de la vente dans un fonds dont le rendement sera fonction des taux d'intérêt.

Dans le même ordre d'idées, nous contestons la sortie progressive de l'État du capital d'Engie pour deux raisons. D'abord, chacun peut comprendre que c'est un secteur stratégique, surtout au regard des problématiques écologiques. Ensuite, depuis cette privatisation rampante, en tout cas depuis que l'État est devenu minoritaire, le prix du gaz n'a cessé d'augmenter : il a augmenté de 5,4 % au 1er novembre, un mois après la hausse de 3 % du 1er octobre, soit une augmentation totale de 16,4 % cette année. Nous considérons donc que la sortie progressive de l'État du capital d'Engie est contraire à l'intérêt des Français et à l'intérêt écologique. De surcroît, l'énergie ne devrait pas être considérée comme un bien comme les autres, mais comme un droit. Tel est l'objet de l'amendement II-CF281.

J'en viens à l'amendement II-CF285, ce qui me permettra de répondre à M. Forissier. Je ne vois pas pourquoi l'État ne pourrait pas faire des affaires, pourquoi il devrait venir au secours de tel ou tel secteur en difficulté, ni pourquoi il devrait, en revanche, vendre ses actions dès lors que ce secteur est rentable et laisser le secteur privé en profiter. Il est bon que l'État puisse bénéficier de cours d'actions supérieurs aux taux d'intérêt, ce qui est le cas pour la FDJ. Surtout, il est faux de penser que la question des jeux se résume au grattage. La question qui nous est posée est celle du contrôle des addictions et du risque de blanchiment d'argent lié à la question des jeux de hasard. J'en veux pour preuve les scandales qui ont éclaté dans certains pays européens. Ce secteur est trop sérieux pour qu'on le laisse aux mains du secteur privé.

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J'ai envie de dire que ce sont presque des amendements de repli par rapport à celui que j'ai proposé. Avis favorable.

La commission rejette successivement les amendements.

Puis elle en vient à l'amendement II-CF286 de Mme Sabine Rubin.

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Nous pouvons tous être d'accord pour dire que la société Safran agit dans un secteur hautement stratégique puisqu'elle est spécialisée dans la conception et la production de moteurs d'avions, d'hélicoptères et de fusées, d'équipements aéronautiques et de défense. Pour notre part, nous défendons l'idée d'une véritable politique française spatiale et sa réussite dans la redécouverte de l'espace. L'État doit rester majoritaire dans les entreprises qui travaillent dans des secteurs hautement techniques dans le domaine de l'armement.

Aujourd'hui, les parts de l'État dans le capital de Safran ne sont plus que de 14 %, ce qui nous semble beaucoup trop faible. C'est pourquoi cet amendement propose de commencer à racheter des parts dans l'entreprise Safran, afin que l'État y redevienne à terme majoritaire.

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À quoi cela sert-il de réaugmenter la participation de l'État dans Safran ? Cela ne rapportera pas un centime à l'entreprise. Vous allez seulement acheter en bourse pour 2 milliards d'actions. Safran est l'une des meilleures entreprises de l'aéronautique, c'est un bijou technologique, et son avenir dépend de ses capacités de recherche et d'innovation. Quant aux intérêts militaires stratégiques de l'État, ils se négocient sous forme de contrats. Si l'État vendait les 14 % qui lui restent, cela ne changerait rien du tout. J'ajoute que c'est une entreprise qui compte beaucoup de salariés actionnaires – entre 7 % et 8 %, Safran étant né de la fusion de la Société nationale d'étude et de construction de moteurs d'avions et d'une autre entreprise dans laquelle les salariés étaient presque majoritaires.

Si vous suggériez que l'État vende préférentiellement ses actions aux salariés pour renforcer leur participation, on pourrait en discuter. Mais ce que vous nous proposez là ne sert à rien.

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Nous sommes en désaccord avec Charles de Courson, mais ce n'est pas un scoop. Il y a des secteurs dans lesquels l'État doit être majoritaire, car c'est l'avenir de notre pays qui est en jeu.

Monsieur de Courson, il y a en France des industries d'armement où l'État est devenu plus que minoritaire. Vous ne savez peut-être pas que l'État ne fabrique plus aujourd'hui certaines armes, certaines munitions, et que ce sont des entreprises étrangères qui le font. Nous sommes donc là face à un problème de dépendance. Certains secteurs ne doivent pas être dévolus complètement à la question du marché. Vous me dites que Safran fonctionne très bien, mais nous considérons que l'État doit rester le principal actionnaire, si ce n'est nationaliser cette entreprise.

La commission rejette l'amendement.

Puis elle étudie l'amendement II-CF288 de M. Éric Coquerel.

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Dans la continuité d'un amendement que nous avions déposé l'an dernier, nous proposons de permettre à l'État de réinvestir dans les sociétés d'autoroutes, leur privatisation étant certainement le plus grand scandale de ces dernières années. C'est un scandale parce qu'il y a conflit d'intérêts entre les multinationales du béton qui sont souvent celles qui font les propres travaux qu'elles ont commandés sur ces autoroutes à leurs filiales. C'est un scandale parce que l'augmentation des tarifs des péages correspond globalement à l'augmentation de la rente des actionnaires. Il aurait été préférable que l'État puisse continuer à gérer ces hausses. C'est un scandale parce que la vente de ces autoroutes a été totalement sous-estimée par rapport à leurs finances. C'est un scandale, et j'aurais pu utiliser cet argument pour les amendements précédents, parce que le Préambule de notre Constitution de 1946 prévoit que des secteurs de fait qui sont monopolistiques – et c'est le cas des autoroutes – doivent rester liés à l'État et non privatisés. C'est pourquoi nous souhaitons que l'État rachète progressivement des parts dans les sociétés d'autoroutes.

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Le montant que vous proposez est clairement très inférieur à ce qui serait nécessaire, ce qui fait que l'objectif que vous visez ne serait pas atteint. Avis défavorable.

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Ma question s'adresse au rapporteur général. Notre commission a été très vigilante, sans pour autant malheureusement être suivie, tout au long de la précédente législature, sur la question des autoroutes. Nous avons demandé un rapport de la Cour de comptes, saisi l'Autorité de la concurrence et essayé à plusieurs reprises de revenir sur l'exonération de limitation de la déductibilité des intérêts. On remplace la déductibilité par un plafond calculé par rapport au bénéfice avant intérêts, impôts, dépréciation et amortissement – earnings before interest, taxes, depreciation, and amortization (EBITDA), aux termes de la directive européenne du même nom. Lors des débats en séance publique, la semaine dernière, le ministre a été très clair sur l'amendement que vous avez défendu créant une exonération de ce plafonnement au bénéfice des concessions. Il a indiqué que l'on étudierait, d'ici à l'examen de la seconde partie du projet de loi de finances, la question spécifique des sociétés d'autoroutes. Il ne faut donc pas oublier cet engagement du ministre.

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Effectivement, le ministre a pris un engagement très clair en séance. Il ne faut pas punir les autres types de concessions parce que l'on a « péché » sur les concessions autoroutières. Les collectivités qui ont des concessions ou autres n'ont pas à être les victimes collatérales d'une affaire qui n'est due qu'à la mauvaise gestion par les concessionnaires, comme on l'a déjà vu lors de la mission qui avait été conduite par notre ancien collègue Chanteguet et plusieurs autres députés sur l'éventuelle reprise de ces concessions qui avait eu lieu en 2015 et 2016.

À l'heure où je vous parle, je n'ai pas de solution à vous apporter sur ce point. Nous y reviendrons en nouvelle lecture, comme s'y est engagé le ministre. En tout cas, j'y veillerai personnellement.

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Je veux rebondir sur les propos de Gilles Carrez. Lorsqu'il était rapporteur général, c'est lui qui avait fait diligenter, contre l'avis du Gouvernement, une étude ad hoc sur la valorisation des autoroutes, ce qui a permis a minima que les autoroutes soient vendues par l'État à un prix plus élevé que ce qui figurait dans le projet de loi de finances. Je tiens à l'en remercier, parce que s'il n'avait pas été là, personne ne l'aurait fait. À cela s'est ajoutée, en 2013, l'exception faite pour le champagne – après l'adoption d'un amendement de M. de Courson... – et les autoroutes.

Vous dites tous que cette privatisation sous forme de concession comportait des erreurs. C'est bien pour cela que si la privatisation des aéroports se fait sous forme de concession, il faudra s'assurer que la même erreur ne se reproduise pas. La question de l'exonération sur les charges financières se pose exactement dans les mêmes termes. Certes, le ministre a pris des engagements. Mais cela ne nous empêchera pas de rendre une petite visite à Bercy pour voir le cahier des charges, comme nous y autorise l'article 57 de la LOLF.

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Monsieur Giraud, vous dites que l'État n'a pas su négocier lors de la privatisation en 2006. Je vous donnerai un exemple absolument inouï. L'essentiel des ressources apportées par les entreprises qui ont acheté les autoroutes à l'État a été financé par emprunt. Elles se sont donc énormément endettées. En 2006, les taux d'intérêt étaient de 5 % environ. Dans les contrats de concession des autoroutes, l'État n'a même pas négocié une clause de retour à meilleure fortune, ce qui fait que lorsque toutes les entreprises ont renégocié leurs emprunts à la baisse, à 2 % ou 3 %, cela ne s'est pas traduit par une diminution des tarifs. Au contraire, lorsque le Gouvernement a eu besoin de lancer des programmes supplémentaires – 2 ou 3 milliards d'euros avaient été négociés avec Bruxelles –, il a été obligé, compte tenu des contrats de concession, de prolonger les concessions alors qu'il y avait une rentabilité qu'ont démontrée la Cour des comptes puis l'Autorité de la concurrence. S'il y a bien un sujet sur lequel notre commission des finances doit être extrêmement vigilante, parce qu'il y a des groupes de pression très solides et très efficaces, c'est bien celui-là. Il faut que notre commission soit un contre-pouvoir.

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Comme l'a dit le rapporteur général, il est nécessaire de faire preuve d'une très grande vigilance.

En 2006, le directeur de cabinet du Premier ministre était l'actuel ministre de l'économie et des finances. Il pourrait donc être intéressant de l'auditionner sur ce sujet précis pour connaître son appréciation de l'évolution des choses.

J'ai le sentiment qu'il y a énormément de suspicion, même parmi mes amis, sur la question des autoroutes, et qu'on se dit qu'il y a là une manne qui nous a échappé et qu'il faut essayer de récupérer.

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C'est ce que je ressens. Et c'est ce qu'on entend aussi dans le débat public.

Je le répète, je ne suis pas persuadé que l'État doive reprendre les sociétés d'autoroutes et de construire des autoroutes. Monsieur Coquerel, je lis dans l'exposé sommaire de votre amendement que la privatisation ne s'est pas traduite par une amélioration des équipements et des investissements. Vous ne prenez donc jamais les autoroutes ! Pour ma part, je la prends toutes les semaines depuis trente ans et je peux vous dire que j'ai vu la différence. Quand on compare nos autoroutes aux réseaux d'autres pays, on peut dire que nous avons un bon niveau.

Notre commission ne pourrait-elle pas auditionner les responsables des sociétés d'autoroutes pour leur demander de rendre des comptes sur le contenu de leur mission, afin que l'on ait une vision complète et transparente ?

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Il faut tenter de purger autant que possible cette affaire, dix ou douze ans après. Nous examinerons cette question avec Gilles Carrez, et nous prendrons des initiatives dès la fin de la période budgétaire.

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Cela étonnera M. Coquerel si je lui dis que je partage largement ses propos. Pour ma part, j'ai combattu cette affaire, non par idéologie mais parce que le remboursement des dettes commençait à s'effondrer, qu'il y avait un cash-flow très important et que celui-ci servait à moderniser nos routes nationales. J'ai même voté la motion de censure avec François Bayrou, sous les applaudissements d'ailleurs d'un certain Nicolas Sarkozy – je raconte cela parce que c'est tout de même pittoresque. Un certain Bruno Le Maire était directeur de cabinet. Je signale au passage que les autoroutes n'ont pas été privatisées à proprement parler, mais concédées et que les concessions s'achèveront en 2023 ou 2024.

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Parce qu'on les a prolongées de dix ans en contrepartie d'investissements. Comme l'État n'a pas un sou, il a exigé qu'elles fassent des investissements sur des sections qui n'avaient aucun intérêt économique.

Il faudrait vérifier que la privatisation d'ADP ne comporte pas de clause d'iso-fiscalité.

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C'est ce qui a bien été dit lors du débat. De toute façon, il semble que nous serons un certain nombre à le vérifier.

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Si tous nos collègues en étaient d'accord, nous pourrions déposer un amendement visant à éviter que par l'effet des clauses d'iso-fiscalité les augmentations de fiscalité puissent être répercutées sur les clients.

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Je remercie M. de Courson pour son soutien. Je signale que les concessions ont été prolongées en 2015 et qu'il a fallu l'intervention d'un élu de Grenoble pour que l'État soit obligé de lever le secret sur les contrats, très certainement parce que leur contenu défavorisait tellement l'État que personne ne s'en était vanté.

Madame Rabault, vous êtes défavorable à cet amendement au motif que les sommes ne seraient pas suffisantes. Or vous savez très bien qu'on ne peut pas faire davantage qu'un transfert, du fait des règles budgétaires, ce que nous regrettons.

Je rappelle que l'année dernière nous avons voté à l'unanimité la création d'une mission d'information. J'espère donc que cette mission verra bientôt le jour.

La commission rejette l'amendement.

Contre l'avis de la rapporteure spéciale, la commission adopte les crédits du compte spécial Participations financières de l'État, non modifiés.

Après l'article 77

La commission examine l'amendement II-CF289 de M. Éric Coquerel.

La commission rejette l'amendement.

Contre l'avis de la rapporteure spéciale, la commission adopte successivement les crédits des compte spéciaux Participation de la France au désendettement de la Grèce et Avances à divers services de l'État ou organismes gérant des services publics, non modifiés.

Membres présents ou excusés

Réunion du mercredi 24 octobre 2018 à 9 heures

Présents. – M. Saïd Ahamada, M. Éric Alauzet, M. Julien Aubert, Mme Émilie Bonnivard, Mme Émilie Cariou, M. Gilles Carrez, M. Michel Castellani, M. Philippe Chassaing, M. Éric Coquerel, M. François Cornut-Gentille, M. Charles de Courson, Mme Marie-Christine Dalloz, M. Olivier Damaisin, Mme Dominique David, M. Benjamin Dirx, M. Jean-Paul Dufrègne, Mme Stella Dupont, M. M'jid El Guerrab, Mme Sarah El Haïry, M. Nicolas Forissier, M. Olivier Gaillard, M. Joël Giraud, Mme Perrine Goulet, M. Romain Grau, Mme Olivia Gregoire, Mme Nadia Hai, M. Patrick Hetzel, M. Christophe Jerretie, M. François Jolivet, M. Daniel Labaronne, Mme Valérie Lacroute, M. Mohamed Laqhila, M. Michel Lauzzana, M. Vincent Ledoux, Mme Véronique Louwagie, Mme Marie-Ange Magne, Mme Lise Magnier, M. Jean-Paul Mattei, Mme Amélie de Montchalin, Mme Cendra Motin, M. Jean-François Parigi, M. Hervé Pellois, Mme Bénédicte Peyrol, Mme Sylvia Pinel, Mme Valérie Rabault, M. Xavier Roseren, Mme Marie-Christine Verdier-Jouclas, M. Jean-Pierre Vigier, M. Philippe Vigier, M. Éric Woerth

Excusés. – M. Jean-Louis Bourlanges, M. Marc Le Fur, M. Olivier Serva, M. Benoit Simian

Assistaient également à la réunion. – M. Jean-Pierre Cubertafon, Mme Frédérique Meunier, M. Maxime Minot, M. Jean-Baptiste Moreau

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