La commission examine les conclusions de la mission d'information sur les différentes missions confiées par l'administration de l'État à des prestataires extérieurs (« outsourcing ») (Mme Cendra Motin, rapporteure).
En 2020, notre commission a créé une mission d'information relative aux différentes missions confiées par l'administration de l'État à des prestataires extérieurs ( outsourcing ). La crise sanitaire a suspendu les travaux de cette mission courant 2020, mais elle les a repris en 2021. Elle nous présente aujourd'hui ses conclusions. Cette mission a été présidée par Mme Véronique Louwagie et Mme Cendra Motin en a été la rapporteure. Je propose que nous les écoutions.
Nous avons lancé cette mission d'information relative aux différentes missions confiées par l'administration de l'État à des prestataires extérieurs en février 2020. Je souhaite ici en premier lieu remercier le président Éric Woerth, qui a été à l'initiative de sa création, tant ce sujet est fondamental. L'actualité nous l'a encore indiqué il y a quelques semaines. Je remercie également la rapporteure de la mission, Mme Cendra Motin, avec qui les échanges ont été riches durant tous nos travaux.
Les vingt-cinq auditions ont démarré finalement en en mars 2021. Compte tenu de la crise sanitaire, elles ont été décalées d'un an. Elles nous auront permis de tirer plusieurs enseignements, même si ces auditions n'épuisent pas le sujet de l'externalisation, loin de là. Je considère comme nécessaire l'approfondissement d'un certain nombre de points qui ont été soulevés. La commission d'enquête sur le recours à des cabinets de conseil au Sénat en constitue un exemple.
Parmi les enseignements tirés, nous avons dans un premier temps constaté que les informations à disposition du Parlement sur ce sujet sont encore très lacunaires. Quantitativement, le montant de 13 milliards d'euros d'achats de services en 2019, qui est connu, ne concerne que les ministères et pas les établissements publics. Qualitativement, nous ne savons pas si les tâches externalisées sont correctement menées et donnent satisfaction. Des indicateurs de performance devraient être introduits au sein des projets annuels de performance (PAP) et des rapports annuels de performance (RAP).
À mon sens, il revient à chaque rapporteur spécial d'évaluer l'externalisation pratiquée par les administrations qui relèvent du champ de sa mission. Malgré tout, nous savons que le recours à des prestataires privés par les administrations publiques n'est pas un phénomène nouveau. Il s'est même accéléré depuis une vingtaine d'années. Derrière le mot externalisation se cachent des réalités très différentes. Le recours à des prestataires de nettoyage, qui se sont progressivement substitués aux équipes internes, n'a pas grand-chose à voir avec l'intervention croissante des grandes entreprises du numérique, des cabinets de conseil ou de maîtrise d'ouvrage. Il s'agit de prismes très différents. C'est sur ces prestations intellectuelles à haute valeur ajoutée que doit se porter tout particulièrement notre vigilance aujourd'hui. Les administrations publiques sont-elles toujours en mesure de définir, de contrôler et d'évaluer l'action des prestataires extérieurs dont l'action influe directement sur la conception et la réalisation de nos politiques publiques ? C'est une vraie question.
Concernant certains projets de long terme, nous devons nous inquiéter lorsqu'une grande entreprise de services numériques estime n'être plus en mesure de maîtriser la portée d'un projet ou ses modalités opératoires. La mobilité des agents, la complexité des sujets en jeu, l'absence de transmission des compétences et des savoirs au sein des administrations peuvent l'expliquer, sans toutefois le justifier. Les échecs de l'externalisation, dont plusieurs d'entre eux ont été mis en lumière par la Cour des comptes, ont tous la même origine : la perte de maîtrise de la prestation extérieure par l'administration qui en bénéficie. L'administration se départit alors non seulement de sa mission de faire mais perd aussi sa capacité de faire faire. Elle se retrouve dans l'incapacité de formuler clairement ses attentes, de contrôler et d'évaluer les prestations et d'organiser la transition vers un autre mode de gestion. Tout cela conduit à l'apparition d'une forme de dépendance vis-à-vis du prestataire dont ce dernier se garderait bien. Les entreprises privées sont d'ailleurs les premières à réclamer davantage de contrôle et d'évaluation, une meilleure rédaction du cahier des charges et un engagement plus grand de leur client public dans la relation contractuelle.
La conservation des compétences constitue donc la priorité des priorités pour une externalisation réussie. Différents points soulignés par le rapport le montrent. Il est important de s'assurer de la capitalisation des savoirs et des compétences au sein de l'État par un meilleur partage des bonnes pratiques ; une mobilité des talents ; une meilleure conservation de l'historique des projets et la prévision du transfert des savoir-faire au terme d'une mission par l'inscription de clauses spécifiques dans les cahiers des charges. Mais il faut aussi et surtout disposer de profils de hauts niveaux en interne : des juristes, des ingénieurs, des spécialistes du numérique. Certes, il n'est pas toujours aisé de recruter, la sphère publique pouvant s'avérer faiblement attractive. Cependant, la stabilisation ou la diminution du nombre des fonctionnaires s'avèrent inutiles et improductives si elles sont contournées par le recours à des prestations extérieures non comptabilisées sous les plafonds d'emploi. D'autant que ces externalisations peuvent s'avérer plus coûteuses.
Il importe de demeurer pragmatique et rationnel en la matière. Nous votons chaque année les plafonds d'emplois. Assurons-nous qu'ils conduisent les responsables publics à faire le meilleur choix entre recrutement interne et recours à des acteurs extérieurs, tant du point de vue du coût que de la qualité des tâches à effectuer. Conserver des compétences, c'est enfin et surtout le seul moyen de s'interroger lucidement sur ce que la puissance publique doit faire et sur ce qu'elle peut confier à d'autres. En effet, si l'administration n'est plus en mesure de faire, alors la question ne peut même plus être posée. C'est un point que j'ai déjà eu l'occasion de développer ici : est-il normal que le ministère de la santé soit dans l'impossibilité d'organiser une chaîne logistique de vaccination sans le soutien de grands cabinets de conseil ? J'indique en passant, que l'un de ces grands cabinets étrangers ayant participé à la campagne vaccinale n'a pas jugé utile d'apporter les éléments permettant de nous rassurer concernant la protection des données publiques auxquelles il a accès. Quoi qu'il en soit, la conception et la réalisation d'une telle mission quasi régalienne — le recours au ministère des armées pour mettre en place une chaîne logistique avait d'ailleurs été évoqué — ne doivent pas échapper au giron de l'État. Ainsi, certaines tâches fondamentales ne peuvent pas être confiées à des prestataires privés parce qu'elles relèvent du cœur même de l'action de l'État. J'en suis profondément persuadée.
Enfin, le recours aux prestations extérieures se trouve parfois contraint par la complexité des normes et des procédures à respecter, notamment pour les collectivités territoriales, en particulier les plus petites d'entre elles, qui disposent de moins de moyens. Un réel choc de simplification doit permettre de diminuer le recours à des acteurs spécialisés.
Je souhaite à mon tour remercier M. le président Éric Woerth, qui est à l'origine de la création de cette mission d'information. Je remercie Mme Véronique Louwagie pour son suivi et son invitation à investiguer particulièrement les prestations de conseils, ainsi que les membres de la mission d'information pour leur investissement, leurs interrogations ainsi que leurs remarques. Je remercie également les personnes auditionnées pour le temps qu'elles ont consacré à cette mission malgré la crise sanitaire – nous avons fait le choix de ne pas les auditionner au plus fort de cette crise.
À l'issue de cette mission d'information, je dirais que l'externalisation n'est ni bonne ni mauvaise. La question qui se pose alors que les administrations publiques confient de façon croissante des missions à des prestataires extérieurs est celle de l'utilité de ces externalisations. Or, une prestation externalisée, si elle est bien réfléchie, bien menée, suivie et évaluée, peut être utile à tous, agents comme usagers. Cette règle s'applique, selon moi, également aux prestations des cabinets de conseil. Ce sujet a été mis en lumière et médiatisé dernièrement, à l'occasion de la crise sanitaire et du déploiement de la vaccination contre la Covid-19.
Commençons par définir l'externalisation. Les missions externalisées peuvent être des tâches à faible valeur ajoutée, comme le gardiennage ou le nettoyage de bâtiments, ou des opérations complexes et globales telles que la construction et la gestion d'une infrastructure publique (par exemple un stade ou des aménagements portuaires). Une tendance nette se dégage dans le temps et se vérifie dans l'ensemble des pays de l'OCDE : depuis les années 1990-2000, l'administration recourt de plus en plus à des prestataires pour externaliser des fonctions supports comme l'entretien de véhicules ou la restauration. Elle peut ainsi recentrer son action sur ce que j'appellerais son cœur de mission.
Apprécier l'ampleur de l'externalisation au sein des collectivités publiques n'est pas chose évidente. En effet, si la direction des achats de l'État (DAE) nous indique que les administrations centrales et déconcentrées ont consacré 13,17 milliards d'euros en achats de services, ce chiffre n'inclut pas les dépenses des établissements publics ni les achats liés à la défense et à la sécurité.
Nous nous réjouissons que la DAE et l'Observatoire économique de la commande publique travaillent à rendre les données plus exhaustives et à les proposer en open data. Notre première recommandation concerne ce sujet : les efforts visant à systématiser et à fiabiliser les remontées d'informations relatives au montant des marchés publics doivent être poursuivis.
Le facteur humain constitue le premier motif de recours à un prestataire extérieur. Il peut s'agir de faire appel à une expertise technique, de répondre à un surcroît d'activité ou à des difficultés de recrutement ou encore de libérer des effectifs pour des missions prioritaires. Le critère économique ne constitue qu'un motif secondaire bien qu'un consensus très large existe pour reconnaître les économies générées par, le transfert à des acteurs privés des fonctions supports à faible valeur ajoutée. Si cela ne doit pas être la seule raison pour y avoir recours, développer une analyse en coût complet d'une fonction que l'on peut externaliser permettrait d'aider à la décision. Dans le cadre des engagements du plan national des achats durables 2021-2025 et de la loi dite climat et résilience, je recommande donc de concevoir des modèles d'aide à la décision. Ces derniers permettront d'évaluer l'intérêt économique, social et environnemental du recours à un prestataire privé.
Pour les administrations publiques, l'enjeu est aujourd'hui de maîtriser le processus d'externalisation afin qu'il soit une réussite. Cela passe par l'adoption d'une démarche globale et le développement d'un regard interministériel sur l'externalisation. Les partages de bonnes pratiques existent mais ils sont cantonnés à l'acte d'achat. Or, si nous cherchons à approfondir la réflexion sur la conduite et le pilotage des externalisations, l'acte d'externaliser ne se résume pas à l'achat de prestations. Il apparaît donc souhaitable de renforcer ce pilotage interministériel en permettant un meilleur partage des bonnes pratiques et de chercher de nouvelles synergies. Cette démarche plus globale permettra par la même occasion de renforcer l'information du Parlement. En effet, nous ne disposons aujourd'hui que d'une information lacunaire sur le plan qualitatif et quantitatif. Pour enrichir cette information, je recommande de créer des indicateurs de performance relatifs à l'externalisation au sein des services de l'État, comme le permet la loi organique du 28 décembre 2021 relative à la modernisation de la gestion des finances publiques.
Des améliorations sont possibles tout au long du processus d'externalisation. Sa réussite se prépare dès l'achat de la prestation et dans sa phase de contractualisation. L'ensemble des acteurs s'accordent pour reconnaître une montée en compétence et la professionnalisation des acheteurs publics depuis plusieurs années. Cependant, des marges de progrès existent encore pour que ces derniers s'emparent pleinement des outils offerts par le code de la commande publique. La pratique du sourcing, qui consiste à sonder les entreprises sur leur capacité à répondre à des besoins et à développer une solution spécifique pour un éventuel client, n'est pas systématique. La réflexion pourrait aussi être plus poussée quant au choix du véhicule contractuel pour les projets d'ampleur. Par conséquent, j'estime nécessaire de renforcer les obligations d'évaluation préalable pour les projets d'infrastructure de grande ampleur.
Des évolutions du code de la commande publique pourraient également être envisagées. Certains acteurs publics comme privés plaident pour assouplir les conditions de recours à la négociation, ainsi que les conditions de modification d'un marché en cours d'exécution. Je recommande de simplifier les clauses de réexamen des contrats pour les rendre plus souples et mieux adaptées à tous les types de marchés.
La mutualisation des achats de prestations de services est peu développée, contrairement aux marchés de fournitures. Son développement au niveau ministériel et interministériel doit progresser. Il est aujourd'hui freiné par les inconvénients spécifiques liés à la mutualisation, en particulier par le manque d'adaptation aux besoins spécifiques de chaque administration. L'Union des groupements d'achats publics (UGAP) est un établissement public à caractère industriel et commercial (EPIC) qui joue le rôle de centrale d'achats généraliste. Elle exerce au bénéfice de l'État, des collectivités territoriales et du secteur hospitalier. Les services de l'État y recourent de façon croissante pour des prestations de service. Conscient des difficultés liées à la mutualisation, l'UGAP a engagé des actions destinées à renforcer le pilotage des enjeux de qualité de service, ce que je salue. Afin de poursuivre dans cette voie, l'établissement pourrait mettre en œuvre un plan d'amélioration des marchés portant sur la qualité de service, la relation client-fournisseur et les prix.
La réussite d'une externalisation dépend aussi beaucoup de la qualité de son suivi et de son évaluation. À cet égard, le rapport identifie plusieurs pistes pour s'en assurer. Afin de renforcer le contrôle des prestations et le pilotage des projets externalisés, il conviendrait de systématiser l'inscription d'indicateurs de performance qualitatifs et quantitatifs au sein des marchés publics. Parce que la rémunération à la performance ne peut pas se définir par la seule prévision d'une pénalité lorsque les objectifs ne sont pas atteints, je recommande de promouvoir les clauses de performance incitatives pour les prestataires et d'en intégrer un modèle dans le cahier des clauses administratives générales (CCAG).
Enfin, le rôle du contract manager, chef de projet chargé de piloter le processus de la rédaction du cahier des charges à l'évaluation, s'avère primordial. Cette fonction pourrait être mieux valorisée au sein de l'administration.
La conservation des compétences en interne représente un autre enjeu essentiel de l'externalisation, comme l'a souligné Mme Louwagie. Il en va de la souveraineté et de l'autonomie de notre administration. D'une part, le pilotage d'une prestation est impossible sans compétences. D'autre part, une trop grande asymétrie entre le prestataire et le client public conduit, à terme, à un déséquilibre de la relation contractuelle. À titre d'exemple, la direction interministérielle du numérique (DINUM) considère aujourd'hui qu'un taux d'externalisation en informatique supérieur à 70 % constitue un risque. La capacité à attirer de nouveaux talents en améliorant la mobilité interne et externe dans la gestion des ressources humaines est donc primordiale. J'attire votre attention sur l'intérêt d'instaurer des cibles plafonds indicatives pour l'externalisation des projets numériques et informatiques d'ampleur et d'adapter les modes de recrutement des talents et des expertises dans les métiers en forte tension.
Face à l'appauvrissement de la maîtrise d'ouvrage étatique constatée par plusieurs acteurs, la filière de la maîtrise d'ouvrage de projets d'intérêt public devrait être développée. Des espaces de réflexion pourraient émerger pour renforcer la professionnalisation de la filière. En outre, il s'agit de protéger l'autonomie de l'administration vis-à-vis des prestataires afin d'être en mesure de réintégrer la prestation si cela s'avère un jour pertinent. Il faut donc être en mesure de s'assurer de la réversibilité, grâce à la conservation de l'historique de la relation contractuelle et aux transferts de compétences. En fin de marché, des clauses de réversibilité garantissent un transfert des connaissances opérationnelles et techniques du prestataire vers l'administration. Elles devraient être systématiquement intégrées.
Passons maintenant au point spécifique du rapport portant sur les cabinets de conseil. Ils sont sollicités par les administrations pour diverses missions : l'organisation et l'accompagnement de la transformation des organisations ; l'expertise métier, juridique ou financière ; la gestion des ressources humaines ; la stratégie et le développement des systèmes d'information. Les administrations publiques y recourent de plus en plus fréquemment depuis plusieurs décennies. Un pic a été atteint à la fin des années 2000. Depuis 2017, nous observons une hausse des dépenses en prestations de conseil, qui s'explique par des projets de transformation de l'action de l'État et la révolution numérique. Toutefois, les montants dont nous parlons sont loin d'être excessifs. Le montant d'achats de prestations de conseil par le secteur public rapporté aux dépenses de personnel dans le secteur public en France, demeure l'un des plus faibles de l'Union européenne. Il est de 0,27 % en France contre 1,25 % en Allemagne et 1,47 % au Danemark.
L'action des cabinets de conseil est encore méconnue et fait l'objet de vives critiques. Il existerait une porosité entre haute fonction publique et cabinets privés. Les livrables remis aux administrations seraient stéréotypés et peu adaptés aux services publics. Autre critique, les cabinets de conseil serviraient de caution pour légitimer une décision. Le recours aux cabinets de conseil se révèle pourtant pertinent lorsque toutes les ressources internes ont déjà été mobilisées. Ce fut le cas pendant la crise sanitaire, au ministère de la solidarité et de la santé. De même, ces cabinets peuvent être utiles à la puissance publique, lorsqu'une expertise d'une grande technicité est requise ou qu'une capacité à réaliser des parangonnages est recherchée. Il ne s'agit donc pas de plaider pour plus ou moins de recours aux cabinets de conseil, mais de s'interroger sur les conditions à réunir pour disposer de prestations utiles et satisfaisantes au même titre que l'externalisation en général.
Il convient tout d'abord de souligner que ce type de prestations est encadré. La centralisation de l'achat public de prestations de conseil pour les administrations centrales par la direction interministérielle de la transformation publique (DITP), au travers d'accords-cadres appliqués depuis 2018, a permis de mieux définir les besoins et de sélectionner les prestataires les plus adaptés. Le principe du tourniquet, parfois contraignant pour les services prescripteurs, a par ailleurs permis de garantir une diversification dans le recours aux cabinets de conseil. Ce processus permet d'éviter certains biais liés à de trop grandes habitudes de travail en commun. Je salue à ce propos le renouvellement prévu de ces accords-cadres, qui arriveront à échéance à la fin de l'année 2022, tout comme réflexions à l'œuvre au sein de la direction interministérielle de la transformation publique pour améliorer le cadre déontologique de ces contrats ainsi que leur accessibilité à des cabinets de plus petite taille.
Au regard de l'expertise développée par la DITP sur le sujet, je recommande de renforcer son rôle de supervision du recours aux cabinets de conseil, en l'étendant au suivi de l'exécution. Je suggère également d'étendre le périmètre de l'accord-cadre à davantage de parties prenantes, dont les opérateurs de l'État.
Comme pour le cas général de l'externalisation, les bonnes pratiques sont à partager. Face aux grandes disparités dans le recours aux cabinets de conseil, certaines administrations, comme le ministère des armées, sont très bien rodées. Je recommande donc de systématiser les échanges entre les administrations pour un meilleur partage des bonnes pratiques.
Au cours de cette mission, nous avons constaté que les administrations ont encore une capacité limitée à piloter leur prestataire en équipe mixte. La constitution d'équipes mixtes permet pourtant un transfert des compétences et des méthodes du consultant vers l'agent public. Cela garantit l'autonomie de l'administration à l'issue de la prestation. Ainsi, en cas de besoin similaire, elle pourra y répondre sans aide extérieure. Ce fonctionnement vertueux est adopté par le ministère des armées et pourrait être étendu. Par conséquent, je recommande d'encourager la constitution d'équipes mixtes pour les prestations de conseil, sous le pilotage d'un responsable ministériel chargé d'aider les administrations à piloter le prestataire en équipe mixte.
Une prestation bien pilotée passe par une montée en compétence des équipes internes. En ce sens, la compréhension du mode projet et l'acquisition d'une culture de la transformation de l'action publique doivent irriguer l'action des hauts fonctionnaires. Plutôt que de considérer ce processus comme une colonisation du public par le privé, il s'agit pour l'administration de gagner en autonomie et en indépendance.
Comme évoqué auparavant, tous les ministères ne sont pas au même stade de maturité quant au suivi de la prestation. Ce constat se vérifie pour l'évaluation. Je pense que l'évaluation quantitative et qualitative des prestations pourrait être renforcée par la définition d'une méthodologie d'évaluation dépassant la stricte analyse des livrables. Elle permettrait de se prononcer sur l'impact et la réussite de la prestation.
Une fois la prestation de conseil délivrée, la question de la capitalisation des travaux se pose. La mutualisation des livrables au niveau interministériel pourrait permettre aux administrations de lutter contre l'amnésie organisationnelle. Elle favoriserait également une définition plus précise de l'expression de leur besoin, en anticipant les résultats de prestations, exception faite des livrables mettant en jeu des sujets de propriété intellectuelle et de confidentialité. Les cabinets de conseil se montrent d'ailleurs plus enclins à mettre en commun certains travaux que les ministères leur avaient confiés.
Une meilleure cartographie des compétences internes et interministérielles conduirait également à contrôler l'opportunité du recours aux cabinets. Par ailleurs, elle permettrait de s'assurer que des compétences même interministérielles soient sollicitées quand elles peuvent l'être. Je souligne donc l'intérêt d'instaurer des chartes relatives au recours et à l'utilisation des prestations de conseil au niveau ministériel et interministériel.
Le risque d'un conflit d'intérêts ne peut être nié. Rappelons tout d'abord que l'État peut trouver un intérêt à recruter d'anciens consultants. Ce n'est pas rare à la DITP. Ces recrutements sont bénéfiques et des équipes internes de conseils peuvent être ainsi constituées. Le cas où des fonctionnaires ou des hauts responsables font le chemin inverse est plus problématique. Il semble important de souligner que les lois de 2016 et 2019 relatives à la déontologie confient à la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP) un contrôle sur les cas de reconversion dans le secteur privé. Un contrôle est également opéré par la HATVP lors du retour dans l'administration d'une personne ayant œuvré dans le secteur privé (le « rétro-pantouflage »).
Enfin, je souhaite aborder le sujet de la protection des données et notamment de celles auxquelles ont accès les cabinets de conseil. Si la secrétaire générale du gouvernement rappelle que les obligations en matière de confidentialité, de protection des données et de protection intellectuelle ont été renforcées à l'occasion de la modification des cahiers des clauses administratives générales et techniques (CCAG) applicables aux marchés publics, je demeure convaincue qu'une vigilance accrue doit être portée à l'accès à des données stratégiques en matière de sécurité, de souveraineté économique ou relatives aux systèmes d'information de l'État.
En résumé, l'externalisation n'est ni bonne ni mauvaise. Elle peut constituer un outil au service de l'efficacité de l'action publique si sa mise en œuvre et son suivi font l'objet d'une réflexion et tant que l'administration demeure autonome dans sa prise de décision.
Je vous félicite pour cet excellent rapport, qui reflète un travail de fond, sans tabou ni fantasme. Il constitue incontestablement une réponse documentée et équilibrée à ceux qui agitent le chiffon rouge d'un supposé recul de l'État ou d'une perversion des administrations par le « grand capital », ne serait-ce parce qu'il relativise le poids de ces activités externalisées dans l'achat public. Il fallait donc dépassionner ce faux débat. Vous l'avez fait et je vous en remercie. Pour ma part, que la société civile conseille ou travaille aux côtés de et pour la sphère publique ne me choque pas. Parlementaires du groupe la République en marche et d'autres groupes, nous sommes nombreux à provenir de la société civile et du secteur privé. Je crois que nous avons démontré, ces cinq dernières années, que nous étions en capacité d'apporter un éclairage nouveau et pertinent dans la gestion des affaires publiques. Par ailleurs, – j'ai noté, Madame la rapporteure, ce que vous avez dit au sujet de la crise sanitaire – de nombreux exemples récents montrent que la contribution du secteur privé a fait gagner beaucoup de temps à l'État dans la lutte contre la pandémie. C'est absolument indéniable.
Mes interrogations portent sur le domaine de l'activité de conseil, qui cristallise les passions. Pouvez-vous nous préciser le poids réel de cette activité de conseil pour les ministères et les administrations publiques ? Quelles sont les activités pour lesquelles il vous paraît justifié d'avoir recours à un cabinet de conseil ? En d'autres termes, êtes-vous parvenus à identifier des critères, comme l'innovation, qui permettent d'encadrer ces appels d'offres ? Je voudrais avoir enfin votre regard sur les start-up d'État créées depuis quelques années, sur différents sujets nécessitant une forte capacité d'innovation et pour lesquels les réponses ont été pertinentes.
Je ne partage pas tout à fait la vision de l'oratrice précédente ni ce que je viens d'entendre. Madame Cendra Motin, vous nous avez indiqué que le critère économique ne constitue pas le premier critère de recours à l'externalisation. Je ne suis pas d'accord. Regardons autour de nous : à l'Assemblée nationale, nous avons de plus en plus recours à l'externalisation. Que nous soyons pour ou contre, le premier critère invoqué par le questeur et l'institution reste la maîtrise des coûts de personnel. Qu'on ne nous dise pas aujourd'hui que le critère économique n'est pas le premier critère pour l'externalisation. L'Assemblée nationale irait sinon dans le sens inverse de ce que vous venez de dire. Je préside la commission d'apurement et de vérifications des comptes de l'Assemblée nationale. À ce titre, je pense être légitime pour parler du budget de l'Assemblée.
Deuxièmement, Madame Motin, vous insistez sur la nécessité du recours à un pilotage interministériel. Pourtant, j'évoquerai à rebours l'exemple du système d'information du gouvernement (SIG). Rattaché au budget du Premier ministre, il comprend des effectifs importants. Il s'agit d'un domaine interministériel qui produit de la communication pour l'ensemble du Gouvernement. Pour autant, des instituts de sondage sont régulièrement sollicités, ce qui correspond à une externalisation C'est ainsi qu'au début de la crise sanitaire, les éléments de langage ont été pesés par ces instituts extérieurs à l'administration. Il faudra donc qu'on m'explique pourquoi il faudrait intégrer une dimension interministérielle au sujet de l'externalisation.
Enfin, vous avez évoqué la centrale d'achat de l'UGAP. Quelle place cet organisme occupe-t-il au regard de la mise en la concurrence et du droit des marchés publics ? Les collectivités locales y ont recours au détriment du code des marchés publics.
L'externalisation représente une décision importante pour une administration, car elle a un impact direct sur la qualité des services rendus et la production des biens à destination des usagers. Cependant, il est nécessaire que l'administration qui a recours à la sous-traitance ou à l'externalisation entretienne une relation privilégiée avec ses fournisseurs afin de conserver un certain contrôle sur ces activités. Le sujet est vaste et pose de nombreuses questions auxquelles vous avez essayé de répondre au travers de ce rapport Vous avez ainsi décrit, comme il fallait le faire, en quoi l'externalisation consiste, les différents acteurs de cette externalisation, ses obligations, les différents types d'externalisation ainsi que leurs avantages et inconvénients.
Aujourd'hui, avec la loi sur la réforme de la fonction publique et la création de la nouvelle direction des ressources humaines des cadres supérieurs de l'État, les administrations disposent d'un nouvel outil pour gérer la fonction ressources humaines, comme dans le secteur privé. C'est une nouvelle donne qui peut influencer à moyen et long terme toutes les stratégies qui consistaient à externaliser les services, notamment en faisant appel aux cabinets de conseil. Les administrations qui souhaitent internaliser certains services ont dorénavant cette possibilité grâce à cette réforme portée par Amélie de Montchalin.
Je salue la qualité des travaux de cette mission d'information, bien qu'il subsiste des questionnements. L'externalisation n'est en soi pas à proscrire. Dans de nombreuses situations, elle peut avoir du sens. Cependant, une grande vigilance s'impose, comme le souligne ce rapport. Ainsi, la recommandation n° 14 visant au renforcement du recours aux prestataires de conseil peut paraître paradoxale. Parmi les recommandations, les avancées suivantes sont notables : poser des limites quantitatives et qualitatives à ce qui peut être externalisé ; renforcer le pilotage des prestations ; instaurer des indicateurs de performance ; mutualiser les compétences pour s'assurer de l'opportunité du recours à un cabinet extérieur et simplifier le code de la commande publique.
Néanmoins, je souhaite attirer votre attention sur trois points.
Premièrement, l'externalisation ne doit pas conduire à un affaiblissement de l'État, en particulier dans des domaines stratégiques tel que la souveraineté économique ou les systèmes d'information. Outre la maîtrise du processus d'externalisation, l'administration doit conserver des savoirs et des savoir-faire.
Deuxièmement, le recours à des prestataires extérieurs est un moyen de contourner les plafonds d'emploi en diminution constante et les règles budgétaires. Or, dans ce rapport, la règle de la fongibilité asymétrique des crédits n'est évoquée qu'une seule fois. Pourtant, elle demeure fondamentale dans l'équation puisqu'elle prévoit que les crédits de personnel peuvent être fléchés vers d'autres postes de dépenses alors que l'inverse n'est pas possible.
Troisièmement, la stabilisation ou la diminution du nombre de fonctionnaires ne doit pas être l'alpha et l'oméga d'une politique. En effet, l'externalisation peut s'avérer plus onéreuse qu'un recrutement et masquer le manque de compétences internes. Le rapport évoque la nécessité d'attirer de nouveaux talents. Cela passe par un renforcement de l'attractivité des métiers de la fonction publique, donc des rémunérations. Par ailleurs, la constitution d'équipes mixtes, composées d'agents publics et de consultants, dans le cadre de prestations de conseil, représente une bonne piste pour favoriser le transfert de compétences et renforcer l'autonomie des administrations.
Le sujet de l'externalisation est complexe et peut aisément devenir polémique. Par conséquent, je remercie la présidente Véronique Louwagie et la rapporteure Cendra Motin pour l'effort de clarification entrepris avec ce rapport.
Il faut s'extraire du débat caricatural, stérile et idéologique qui consiste à être « pour » ou « contre » l'externalisation, en considérant que le privé ferait mieux que le public, ce que vous faites bien dans le rapport. Madame Cendra Motin, vous formulez dix-neuf recommandations. Vous vous êtes attardée sur les recommandations n° 4, 8 et 16, c'est-à-dire : renforcer l'évaluation de l'activité externalisée par des critères de performance ; encourager le pilotage interministériel ; simplifier les clauses de réexamen des contrats. Parmi ces recommandations, laquelle devrait être prioritairement mise en œuvre ?
Par ailleurs, vous citez, dans les difficultés rencontrées, le cas de l'informatique et du numérique : « Les administrations sont amenées à recourir à des prestataires extérieurs alors que les besoins auxquels il faut répondre s'inscrivent dans un horizon de plus ou moins long terme qui nécessite de la compétence au sein de l'institution. Faute de pouvoir recruter, les administrations externalisent de nombreuses tâches dans ces secteurs sous tension, parfois de façon contrainte. Il s'agit d'un enjeu majeur pour la puissance publique. » Pour y remédier, vous proposez des solutions, notamment en vue d'adapter les modes de recrutement. Pouvez-vous revenir en détail sur ces pistes de travail ? Pensez-vous que ces éléments seront suffisants ?
Madame Cendra Motin, je vais me concentrer sur la question des compétences de l'État, de son indépendance et de sa souveraineté. Quelque chose devrait vous choquer lorsque vous indiquez que l'État doit se concentrer sur son cœur de métier. Or, lorsque ce dernier externalise aujourd'hui sa stratégie vaccinale, il externalise l'élaboration et la mise en place d'une politique publique, c'est-à-dire son cœur de métier. Dans ce cas de figure, soit l'État dispose des capacités intellectuelles et matérielles pour réaliser cette tâche et l'externalisation ne se justifie pas en termes d'efficacité ou de coût budgétaire. Elle constitue alors simplement un projet politique pour rabougrir l'État et permettre à quelques grandes entreprises,, où le pantouflage de la haute fonction publique existe et contribue à une perte de compétences de l'État, d'en tirer profit . Soit l'État, ne dispose ni des capacités ni des ressources pour mettre en place ces politiques publiques, parce qu'il ne les a pas développées en interne ou parce que, précisément, il les a perdues en les externalisant. Tout cela pose un problème d'indépendance, de souveraineté et de sécurité. Ainsi, récemment, l'administration fiscale a signé un accord avec Google pour développer un algorithme visant à identifier les piscines non déclarées. Au-delà de l'utilisation des données de Google, il est question du développement d'un outil. Outre le fait de travailler avec une entreprise qui ne paie pas les impôts dont elle devrait s'acquitter, l'État se prive de développer des compétences propres qui touchent son cœur de métier, à savoir prélever l'impôt. Il devient dépendant d'une entreprise privée. Il se prive également de compétences qui lui permettraient de pouvoir évaluer le travail de Google. Que pensez-vous de cette situation ? Quel est votre avis sur la perte de compétences que peut induire l'externalisation ?
Madame Cendra Motin, votre rapport mentionne le critère d'efficacité pour justifier l'usage de l'externalisation et son intensification dans des formes diverses. Paradoxalement, il évoque également la difficulté d'évaluer l'externalisation ainsi que le rapport coût/bénéfice, preuve que son développement ces dernières années ne répond pas à un objectif politique ni ne présente une réelle efficacité.
Vous indiquez que l'État et les collectivités doivent se concentrer sur leur cœur de métier et externaliser les fonctions dites support. Rappelons que la frontière entre les deux n'est pas toujours si claire. Le bionettoyage dans les hôpitaux est l'un des principaux traitements permettant d'éviter les maladies nosocomiales. Il n'est donc pas annexe. Toutefois, il demeure systématiquement externalisé et sa qualité est très détériorée du fait des conditions de travail et du matériel utilisé par ces prestataires extérieurs. Ces fonctions sont externalisées, car elles s'avèrent ainsi moins onéreuses, ce qui permet le respect des normes de dépenses et des plafonds d'emplois. Les coûts sont souvent réduits en raison d'une précarité extrême et de conditions de travail particulièrement difficiles. Le nettoyage dans les hôpitaux le montre. L'externalisation de ces fonctions support conduit donc régulièrement à une dégradation de la qualité de l'emploi, tandis qu'elle pose la question de la responsabilité sociale de l'État. Quel est votre avis sur ce point ?
Les plafonds d'emploi ne constituent pas pour vous une contrainte mais plutôt une opportunité pour davantage d'efficacité et d'agilité. Je salue donc là, Madame la rapporteure, votre clairvoyance. Nous affirmons depuis des années que la loi organique relative aux lois de finances (LOLF)et son système de plafonds d'emplois réduisent les marges d'action de l'État. Je souhaiterais savoir où se trouve l'opportunité d'agilité lorsqu'une administration ou une collectivité voit ses plafonds et ses dotations se réduire d'année en année et qu'elle fait finalement le choix entre internalisation et externalisation avec une sorte de couteau budgétaire sous la gorge.
En premier lieu, je souhaite réagir à votre propos, Madame Dominique David. Vous indiquiez que vous êtes heureuse que la société civile intervienne et travaille dans la sphère publique, puisque vous êtes très nombreux sur les bancs de la majorité à en provenir. Je voulais vous dire que nous sommes plusieurs dans cette salle à ne pas à appartenir à la majorité et provenir de la société civile.
Concernant le critère économique, évoqué par plusieurs d'entre vous si ce n'est tous, il participe au choix et à la décision du recours à l'externalisation. Cependant, aujourd'hui, nous regrettons de ne disposer ni d'évaluations ni d'éléments permettant d'opérer un choix quant à l'externalisation. Nous le déplorons et nous l'avons constaté dans le cadre de nos auditions. Je ne suis ni favorable ni défavorable à l'externalisation. Ce qu'il faut, c'est qu'elle soit appropriée et que tous les éléments qui puissent participer au choix soient retenus. Or, pour décider de recourir ou non à une externalisation, il convient que les administrations disposent en interne des compétences techniques permettant de décider de faire ou de ne pas faire. C'est extrêmement important. Sans ces compétences techniques, il ne peut pas y avoir de bonne décision de prise. Il ne peut exister de suivi ni d'évaluation de la mission. La recommandation qui me semble la plus importante, bien développée par Madame la Rapporteure, consiste à disposer d'indicateurs afin que nous puissions, à l'Assemblée nationale dont le rôle est de contrôler l'action du Gouvernement, évaluer la place de l'externalisation.
Vous avez été plusieurs à le souligner : le fait de ne retenir que le plafond d'emplois, que nous évoquons pour chaque mission dans les lois de finances, pour décider d'externaliser ou non, peut s'avérer contre-productif en l'absence de données permettant d'évaluer la place de l'externalisation dans chaque mission. Dans certains cas, le coût du recours à l'externalisation peut être plus élevé qu'une évolution à la hausse des plafonds d'emplois.
Pour répondre à Madame David, les critères pour le choix du recours à l'externalisation dépendent des forces en présence, des compétences et des besoins.
Les start-up de l'État constituent, vous avez raison de le souligner, des viviers de compétences pour des métiers en tension. Elles permettent de disposer de ressources en interne voire de constituer des équipes mixtes.
Concernant le critère économique, je le redis : il ne constitue pas le premier motif de recours à l'externalisation. Toutefois, il existe un large consensus pour reconnaître que des économies sont générées par ces transferts des fonctions support à faible valeur ajoutée. L'Assemblée nationale constitue un exemple parmi d'autres. Pour répondre à Monsieur Bruneel, l'externalisation du ménage dans les parties communes d'un hôpital où le public est reçu diffère de celle du bionettoyage. À cet égard, les deux grands hôpitaux que nous avons auditionnés nous ont indiqué avoir internalisé le bionettoyage. Lorsqu'il s'agit du cœur de métier, il est effectivement important de garder le contrôle et d'internaliser. A contrario, afin de gagner en efficacité et budgétairement, lorsqu'une activité n'est pas de forte valeur ajoutée et ne relève pas du cœur de métier de l'administration, on peut envisager une externalisation. La difficulté majeure reste l'absence de comptabilité analytique dans les comptes publics. Il est difficile aujourd'hui de mesurer les gains réels effectués bien que le sentiment général soit celui d'une économie.
Pour répondre à la question de Madame Dalloz sur le pilotage interministériel, il n'y a pas de raison qu'un service interministériel ne puisse pas lui-même externaliser au besoin afin de recevoir aide et expertise de la part de professionnels Ce que doit permettre l'action interministérielle, c'est de ne pas procéder plusieurs fois à la même étude, au même sondage et d'en faire profiter tous les ministères.
Concernant l'UGAP, un rapport de Sophie Beaudouin-Hubière analyse en profondeur la question de l'achat public. Les collectivités locales sont unanimes à souligner l'utilité et la praticité de l'UGAP, notamment pour celles qui ne sont pas habituées aux procédures et ne souhaitent pas publier systématiquement leurs propres marchés Néanmoins, un travail de transparence des liens de l'UGAP avec les prestataires demeure à effectuer.
Concernant la question de Madame Rouaux, je précise que j'appelle de mes vœux le renforcement des contrats-cadres et non du recours aux prestations elles-mêmes. Ils encadrent précisément les prestations et l'action des ministères. Ils seront d'ailleurs renforcés à l'occasion du renouvellement de l'accord-cadre de la DITP.
Pour répondre à Madame Lemoine, je retiendrai la recommandation n°13, à savoir la réversibilité. Il importe qu'après avoir externalisé il soit possible d'internaliser une fois que les transferts de compétences ont été réalisés et que des équipes sont montées en puissance. Certains professionnels peuvent trouver dans le service public un intérêt et un sens à leur mission, même en acceptant de perdre en rémunération. Il faut pouvoir les accueillir. C'est notamment le cas à la DITP pour de nombreux agents provenant de la sphère privée qui, après leur mission en CDD au sein de cette direction interministérielle, décident de s'engager dans des ministères
Au cours de ma carrière, j'ai pratiqué l'externalisation. Cette dernière n'a jamais fonctionné lorsque le client ne disposait pas de la compétence. Nous pouvons tous nous rejoindre sur ce point : il est important de conserver des compétences en interne pour externaliser vertueusement lorsque c'est nécessaire.
Madame Marie-Christine Dalloz, dans le secteur privé comme dans le secteur public, il existe des activités d'externalisation, de sous-traitance et de conseil, pour des raisons de coût, mais également si une compétence fait défaut en interne ou en raison d'une surcharge de travail. Il n'y a pas que la question du coût, loin s'en faut.
Ce rapport est remarquablement équilibré tant dans son approche que dans ses conclusions.
Je vous félicite pour la qualité de ce travail. Je suis heureux que le sujet de l'externalisation soit abordé. L'économiste américain Ronald Coase a reçu le prix Nobel d'économie en 1991 pour ses travaux, portant sur les avantages comparatifs de l'internationalisation et de l'externalisation.
Au regard des personnes auditionnées, il aurait été intéressant d'introduire de l'analyse économique dans cette approche de l'externalisation au sein de l'administration publique.
En application de l'article 146 du Règlement de l'Assemblée nationale, la commission autorise la publication du rapport d'information.
Information relative à la commission
La commission a nommé M. Patrick Mignola, rapporteur sur la proposition de loi visant à mieux allier l'actionnariat salarié et la transmission d'entreprise (n° 4850).
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire
Réunion du mardi 18 janvier à 14 heures
Présents. - M. Éric Alauzet, M. Alain Bruneel, M. Jean-René Cazeneuve, Mme Marie-Christine Dalloz, Mme Dominique David, Mme Jennifer De Temmerman, M. Jean-Paul Dufrègne, Mme Stella Dupont, M. Daniel Labaronne, M. Mohamed Laqhila, M. Michel Lauzzana, Mme Marie Lebec, Mme Patricia Lemoine, Mme Véronique Louwagie, Mme Cendra Motin, M. Xavier Paluszkiewicz, Mme Christine Pires Beaune, M. Robin Reda, Mme Muriel Roques-Etienne, M. Xavier Roseren, Mme Claudia Rouaux
Excusés. - M. Damien Abad, Mme Anne-Laure Cattelot, Mme Frédérique Lardet, M. Marc Le Fur, Mme Valérie Rabault, M. Laurent Saint-Martin, M. Olivier Serva, M. Éric Woerth