Commission de la défense nationale et des forces armées

Réunion du mercredi 26 janvier 2022 à 11h10

Résumé de la réunion

Les mots clés de cette réunion

  • GIGN
  • gendarme
  • gendarmerie
  • militaire
  • renseignement

La réunion

Source

La séance est ouverte à onze heures dix.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Nous poursuivons cette matinée d'auditions sur la militarité de la gendarmerie en recevant M. le général de corps d'armée Hubert Bonneau, directeur des opérations et de l'emploi et M. le colonel Frédéric Labrunye, chef du pôle stratégie au cabinet du directeur général de la gendarmerie nationale (DGGN). Nous avons eu la joie d'auditionner le directeur général de la gendarmerie hier soir.

Général, colonel, c'est la première fois que nous vous recevons pour une audition au sein de la commission de la défense. Je vous remercie chaleureusement d'avoir accepté notre invitation. Général, vous avez entre autres commandé l'escadron parachutiste d'intervention de la gendarmerie nationale de 1995 à 1998 et le groupe d'intervention de la gendarmerie (GIGN) de 2014 à 2017. Vous avez aussi été directeur de la sécurité diplomatique au ministère de l'Europe et des Affaires étrangères de 2017 à 2020, avant d'être nommé à la tête de la direction des opérations et de l'emploi.

Cette direction a pour mission de proposer des réponses aux crises pour garantir sur l'ensemble du territoire de la République la défense des institutions et des intérêts nationaux, le respect des lois, le maintien de la paix et de l'ordre public, la protection des personnes, des biens et de l'environnement. Compétente sur 96 % du territoire, la gendarmerie doit faire face non seulement à des événements récurrents relevant de la vie ordinaire en temps de paix mais aussi à des situations extrêmes. Elle doit être capable d'agir rapidement, aussi bien pour des missions extérieures que sur le sol national en temps de guerre comme de paix. L'organisation militaire de la gendarmerie de même que sa composante blindée et ses moyens aériens lui octroient une capacité de projection rapide et une interopérabilité en situation de crise comme en opération extérieure (OPEX) avec les armées.

C'est pour comprendre la réalité des opérations, leur diversité et leurs évolutions que vous êtes auditionnés ce matin. Vous pourrez nous parler en outre de la création en 2021 d'un centre national des opérations (CNO), « miroir » régional des centres zonaux des opérations agrégeant les fonctions d'état-major telles que définies par la nomenclature de l'OTAN. Il serait intéressant que vous nous indiquiez ce qui a motivé ce changement d'organisation et comment fonctionne désormais votre service en cas de crise.

Pourriez-vous également évoquer le dispositif d'intervention augmenté de la gendarmerie (DIAG) qui vise à tracer et appréhender les forcenés ? Il me semble que ce dispositif est notamment utilisé dans les Cévennes, qui fait partie de ma région, l'Occitanie, mais aussi dans la Drôme. Pourriez-vous évoquer le rôle que la gendarmerie peut tenir dans le continuum compétition, contestation, affrontement ? Puisque vous avez commandé le GIGN, pourriez-vous aborder le rôle des forces d'intervention dans la gestion des crises et de l'interopérabilité des gendarmes avec les forces armées ? Quels sont le rôle et les modalités de fonctionnement des gendarmes spécialisés ? Comment la gendarmerie s'adapte-t-elle aux nouveaux enjeux, notamment grâce à une démarche capacitaire ?

Enfin, puisque le thème de la militarité de la gendarmerie est au cœur de notre réflexion, pourriez-vous nous dire en quoi elle constitue un moyen d'assurer une offre de sécurité évolutive et sur-mesure pour répondre aux nouveaux enjeux de sécurité, de contact, de défense du territoire dans une logique de redevabilité ?

Permalien
le général de corps d'armée Hubert Bonneau, directeur des opérations et de l'emploi

Concernant le continuum compétition, contestation, affrontement, il s'agit de la vision stratégique des armées, dans le contexte d'une définition des enjeux de puissance et d'analyse des fragilités et des faiblesses.

La compétition constitue le mode normal de l'expression de la puissance. Quels sont donc nos compétiteurs au niveau des forces de sécurité intérieure ? Il s'agit de toutes les personnes qui sont susceptibles de mener une action sur l'ordre public. L'enjeu pour nous est ici de définir les risques. À quel moment une personne se trouvant dans cet esprit de compétition bascule-t-elle dans la contestation ?

La contestation désigne ceux qui transgressent les règles pour faire valoir leurs propres intérêts. Il s'agit de personnes entrant dans la transgression des règles, les trafics, les contestations politiques violentes, les mouvements extrémistes. Notre enjeu est de bien connaître l'adversaire, de maîtriser les territoires, afin d'identifier les signaux faibles et de pouvoir réagir dans une capacité) conduire les opérations en réactivité.

Enfin, l'affrontement renvoie au moment du glissement. Lorsque la contestation persiste, un cycle d'actions violentes récurrentes accompagné du recours à des moyens illicites dans la durée peut s'observer. Ces actions peuvent entraîner une déstabilisation de l'État par des groupes extrémistes ou criminels. Nous devons alors être capables de nous engager dans la durée et de planifier des opérations sur le long terme, avec des moyens complémentaires.

Dans ce continuum, le rôle de la gendarmerie nationale consiste d'abord essentiellement à protéger la population et le territoire national. Pour faire face à ces défis, nous disposons de capacités d'anticipation, de réaction, de conduite et de planification. Ces termes militaires correspondent à l'essence même de ce que nous sommes. La complémentarité des différents échelons du commandement est également l'un de nos atouts. La subsidiarité d'initiative car l'intelligence doit être locale. Les capacités d'innovation et de développement de certains matériels nous aident aussi à faire face à ces situations.

En préambule, je voudrais rappeler le contexte dans lequel nous agissons. Dans notre action au quotidien, nous sommes confrontés à des menaces endogènes et exogènes sur le territoire national. La première d'entre elles est celle du terrorisme. Il s'agit d'une menace installée, qui peut s'exprimer de façon différente (des frappes isolées individuelles ou des actions plus conséquentes). La Coupe du monde de rugby de 2023 ou les Jeux olympiques de 2024 constituent à cet égard une formidable opportunité de passage à l'acte pour les terroristes. Cette menace est ancrée, permanente.

Une des menaces auxquelles nous faisons face a trait également à la fracturation de la société et à l'expression de plus en plus marquée des radicalités et des extrémismes violents. Dans le cadre de la crise des gilets jaunes, un certain décalage entre les territoires et les métropoles a pu s'observer. Une souffrance des territoires périphériques est apparue.

Depuis 2015, nous vivons au quotidien une forme d'enchaînement des crises perpétuelles, à la fois terroristes, sociales, sanitaires et une crise dans la crise. Dans ces crises, le recours à la violence s'exerce de plus en plus contre les gendarmes, mais aussi contre les représentants de l'État. Nous constatons également une montée des extrémismes, notamment dans la crise des gilets jaunes avec des atteintes graves aux infrastructures de l'État. Des attentats à répétition, des sabotages sur les antennes 4G ont eu lieu. Les radicalités sont en augmentation. Je parle souvent de « isme » et de « iste ». Le survivalisme, le complotisme, l'écoterrorisme apparaissent, montent en tension rapidement et entraînent une flambée des violences lors du passage à l'acte.

Il existe également des problématiques liées à des conflits communautaires sur le territoire national. L'expédition punitive de la communauté géorgienne à Dijon en 2020 a laissé un triste souvenir. Ces affrontements sont particulièrement violents.

Un autre sujet de menace concerne les atteintes à l'environnement, dans un contexte d'urgence écologique avec des liens possibles avec la santé publique.

L'implantation en France de mafias étrangères et de groupes criminels forme, quant à elle, une menace à la fois exogène et endogène. Je vous citerai quelques exemples, notamment autour de la criminalité russophone de type « vor v zakone », que l'on peut traduire par « les voleurs dans la loi ». Des communautés implantées organisent des trafics de basse intensité, des cambriolages à répétition, des fraudes, des trafics de cigarettes en générant beaucoup de profits, puis repartent, notamment vers la Géorgie. Ces groupes criminels sur des modèles de mafia sont aujourd'hui fortement implantés en France et en Europe. Il peut également s'agir de criminalités organisées par des ressortissants albanais, roumains, lettons. Je pense par exemple au trafic de moteurs de bateaux volés sur le littoral de la Manche Atlantique, qui se chiffre en centaines de millions d'euros. Des problématiques liées au narcotrafic sont également identifiées. Nous avons ces dernières années pu remonter grâce à une enquête dite Encrochat jusqu'à des groupes criminels qui agissent au niveau européen, et nous avons alors constaté leur emprise sur certains secteurs, notamment sur les territoires portuaires, pour l'introduction de stupéfiants sur le territoire européen.

À ces sujets, je voudrais ajouter deux défis.

Le premier est le défi migratoire. Le Royaume-Uni étant le pays de destination des migrants originaires du Pakistan, d'Afghanistan, d'Iran et de Syrie, le Nord de la France est voué à rester une zone d'attente, ce qui induit la consommation de ressources sécuritaires qui pourront faire défaut ailleurs. Néanmoins, le principal défi identifié tient à l'installation de criminalités organisées spécialisées dans le trafic d'êtres humains sur ces territoires. Le ministère de l'Intérieur a par conséquent pris la décision de créer un office dédié à ces problématiques.

Le second défi est structurel. Il est lié aux nouvelles technologies et au cyberespace. Dans ce territoire immatériel se développe une véritable criminalité, parfois organisée, autour des trafics de stupéfiants, d'êtres humains et d'armes. Ce qui se produit sur le territoire matériel se retrouve ainsi sur le territoire immatériel. Le cyberespace est aujourd'hui un lieu d'échange et de fourniture de tels moyens. C'est un lieu où on fournit des services aux groupes criminels.

Pour faire face à ces défis, la gendarmerie s'organise, en s'appuyant sur ses caractéristiques militaires. Il faut être capable de gérer des crises de haute et de basse intensité, parfois sur la durée. Cette gestion de crise s'articule autour de quatre principes, organisés « en boucle ». Pour bien gérer une crise, il faut ainsi l'anticiper, s'y préparer, être en mesure d'agir, puis tirer l'expérience de cette action.

L'anticipation renvoie à la stratégie, la vision, développée par la gendarmerie. Hier, notre directeur général a dû évoquer avec vous Gend 20.24 et ses différents piliers. Le premier consiste à offrir une meilleure protection à nos concitoyens, une offre de protection sur-mesure. Nous devons être présents partout, sur tous les territoires et augmenter les contacts et la proximité avec les élus et la population afin de permettre une meilleure compréhension des problèmes et des territoires physiques et numériques. L'anticipation nécessite de définir les besoins et un contrat opérationnel.

La préparation, elle, est essentiellement tournée vers le capacitaire, à la fois dans le domaine matériel et dans celui des hommes et des femmes qui contribuent à nos missions. Concernant les matériels, nous ne disposons pas au sein de la gendarmerie d'une direction générale de l'armement. Depuis l'année dernière, nous avons mis en place un pôle capacitaire au sein de la direction des opérations afin de nous doter d'une vision transverse de tous les besoins de la gendarmerie en matière capacitaire. Un pôle piloté par un général de division intègre des officiers de cohérence opérationnelle. Chacun pilote un domaine particulier, comme la mobilité, les drones, les hélicoptères, les fichiers ou les applications autour du numérique. Ces officiers de cohérence opérationnelle travaillent avec des directeurs de programmes répartis dans les sous-directions de la direction générale de la gendarmerie nationale (DGGN). Ce pôle stratégie capacitaire présente l'avantage de jouer le rôle d'agrégateur de tous les besoins. Lorsque nous faisons face à un besoin capacitaire, nous travaillons de manière transversale avec les différentes directions de la gendarmerie nationale – c'est-à-dire la direction des opérations, la direction des soutiens et des finances et la direction des personnels militaires – pour monter ces programmes. Ce mode très militaire nous permet d'avancer rapidement sur les sujets capacitaires. En moins d'une année, nous avons traité par exemple la problématique du renouvellement des blindés au sein de la gendarmerie nationale. De son côté, la préparation des femmes et des hommes relève de la formation, et de ce que l'on attend en termes de compétences pour les gendarmes qui serviront en Gendarmerie départementale, en Gendarmerie mobile. Sur cette formation, on doit définir des attendus, on doit se baser sur nos fondamentaux militaires. Pour faire face à ce que j'ai décrit, on prépare la densification du gendarme.

Vient ensuite l'action. Être performant dans l'action nécessite de disposer des bons outils, qui nous permettent d'être plus performants. Je reviendrai tout à l'heure sur le centre national des opérations qui est un outil qui nous permet de monter en puissance rapidement grâce à la concentration des moyens. L'action repose également sur l'entretien des compétences. Là aussi, la militarité présente des avantages, tels que la place du chef ou la robustesse. Dans l'action, nous mettons en avant notre capacité en tant que militaires à obéir aux ordres, la discipline, l'esprit de sacrifice, l'aguerrissement, mais aussi la capacité à manœuvrer à tous les échelons. Pour vous donner un exemple, une patrouille sur le terrain, qu'elle compte deux, trois ou quatre gendarmes, a toujours un chef, dont le rôle est de commander l'opération, de rendre compte et d'avoir les moyens qui s'agrègent. La capacité d'initiative et l'intelligence locale sont également importantes dans la phase d'action. Pour développer cette initiative locale, tous nos gendarmes doivent s'inscrire dans une relation de confiance vis-à-vis du système, de leur arme et de leur chef. C'est une caractéristique de l'état militaire.

Enfin, le quatrième item est le retour d'expérience. Il est souvent difficile à mettre en œuvre. Il suppose en effet de relever ce qui ne s'est pas très bien passé dans la gestion des opérations. Un chef doit être capable d'entendre les difficultés notées par un subordonné. Le retour d'expérience est donc marqué par la capacité à se faire confiance, à agir ensemble, ce qui est une volonté forte de notre directeur général, développée dans son plan stratégique.

Concernant les outils dont nous disposons aujourd'hui pour mieux traiter les crises, je reviendrai sur le centre national des opérations de la gendarmerie et ses déclinaisons locales. Une crise peut être nationale, régionale, zonale, départementale. À chaque échelon, nous mettons en place des centres de gestion de crise. Au niveau départemental, il s'agit des centres d'opérations et de renseignement de la gendarmerie (CORG). Au niveau zonal, nous développons les centres zonaux des opérations. Au niveau national, une supervision de l'ensemble des opérations de la gendarmerie est menée par un centre national des opérations.

La gendarmerie est donc une force armée traitant des menaces grâce à son organisation militaire. Nous avons réorganisé le dispositif CNO en tirant les conséquences de la succession de crises de nature, d'intensité et de durée variables que nous vivons depuis 2015. Autant de crises de qui se superposent, voire s'imbriquent. Le CNO a été construit sur le modèle du centre de planification et de conduite des opérations (CPCO). La déclinaison de ce modèle s'effectue au niveau zonal et au niveau départemental. Aujourd'hui, le CNO nous garantit une capacité à conduire les opérations de façon plus performante. Nous sommes organisés sur le modèle de l'OTAN avec des J, allant de J1 à J9, pour pouvoir instantanément générer des forces, les concentrer, les projeter, notamment en ce qui concerne les moyens rares, comme le GIGN, les blindés, les hélicoptères. Par exemple, l'an dernier, une crise relativement sévère est survenue à Blois. Le préfet y a fait appel à la gendarmerie pour renforcer le dispositif de police. En l'espace de deux heures, le CNO a permis de mobiliser plus de 250 gendarmes en mesure d'intervenir auprès de nos collègues policiers dans Blois, une force de Gendarmerie mobile avec une antenne du GIGN, des hélicoptères et des moyens complémentaires. Le CNO est aussi l'organe à la manœuvre au niveau national pour la gestion des TRAC. Le CNO est un démultiplicateur capable de générer des forces très rapidement, d'engager pour les préfets pour des gestions de crises.

Nous faisons également le lien avec le dispositif d'intervention augmentée de la Gendarmerie (DIAG), dispositif conceptualisé à la suite de l'affaire de Dijon. Pour traiter des crises de haute intensité qui impliquent des tirs d'armes à feu, la problématique est non seulement judiciaire, car il faut faire cesser l'infraction et arrêter les auteurs, mais il s'agit également de rétablir l'ordre. Nous avons mis en place un concept d'intervention comportant des escadrons de gendarmerie mobile d'alerte qui, à la demande des préfets, peuvent se projeter en urgence sur ce type de situation. Des moyens complémentaires sont agrégés à ces escadrons, tels que des hélicoptères avoir une vision en éclair du dispositif. Nous pouvons en outre agir sous blindage. 90 véhicules blindés de maintien de l'ordre de nouvelle génération arriveront en gendarmerie entre 2022 et 2024. Nous sommes en mesure de travailler avec des éléments spécialisés qui viennent compléter le dispositif, comme le GIGN. Nous sommes donc en mesure de mener des opérations de police judiciaire de l'avant, d'interpeller des individus, y compris qui utilisent de l'armement, mais également de rétablir tout de suite la situation. Un DIAG peut être aussi employé sous très court préavis pour faire face à des situations d'urgence, par exemple en outre-mer. Les DIAG ont été engagés lors des crises récentes aux Antilles, en Guadeloupe et en Martinique. Ils peuvent être engagés dans certains dispositifs importants de la Gendarmerie, tels que les TRAC. Les TRACS ont été engagés suite à des faits graves commis par des personnes survivalistes et en perte de repères, sur-armés, qui ont tué des personnes. Il a fallu mettre en place des dispositifs pour protéger les gendarmes et permettant d'avoir une action large et dans la profondeur. Cela comprend des hélicoptères, des blindés, des gendarmes mobiles pour le ratissage de zones et des experts du GIGN pour procéder aux interpellations Les concepts de ces opérations s'appuient réellement sur des caractéristiques militaires.

Je souhaitais également aborder le sujet du COMCyberGEND. Il désigne une manœuvre de la gendarmerie adaptée au cyberespace. Le commandement de la gendarmerie dans le cyberespace permet de structurer nos capacités pour faire face à toutes les menaces technologiques qui nous frappent aujourd'hui. Le directeur général rappelle souvent que la prochaine crise majeure sera numérique. On voit les impacts que cela pourrait avoir sur la coupe du monde de rugby de 2023 et sur les Jeux olympiques de 2024.

Enfin, je souhaitais aborder la rénovation amorcée l'an dernier de la chaîne d'intervention spécialisée de la gendarmerie. Le GIGN est aujourd'hui un GIGN de troisième génération. Il y a 40 ans, le GIGN regroupait 30 personnels à Maisons-Alfort. Le GIGN a ensuite connu une première évolution en 2007 avec le regroupement de toutes les unités d'intervention de la gendarmerie, l'escadron parachutiste d'intervention, le groupe de sécurité de la présidence de la république (GSPR). Le GIGN est devenu une unité capable de gérer les prises d'otage de masse en 2007. Il est alors passé à 400 personnels. Aujourd'hui, le GIGN englobe plus de 1 000 personnes, avec une base centrale à Satory et 14 antennes réparties sur le territoire métropolitain et ultramarin. Il y a une formation commune de tous les personnels avec des degrés divers de technicité, Satory étant le socle avec les plus grandes technicités (tirs, parachutistes, tirs, explosifs et moyens spéciaux). À présent, le GIGN est beaucoup plus impliqué dans les problématiques de gestion de crise de basse intensité, par exemple dans les DIAG, car nous faisons face à une société de plus en plus violente. Les gendarmes subissent parfois des tirs, et il faut des personnels particulièrement aguerris, capables d'agir sous protection et blindage, pour aider nos camarades sur le terrain à résoudre ces situations. Le GIGN, plus souple et plus agile, intervient donc sur un spectre beaucoup plus large que le très haut niveau de crise, dont il est toujours capable, et il est capable de s'intégrer parfaitement aux dispositifs territoriaux mis en place par la gendarmerie.

Permalien
le colonel Frédéric Labrunye, chef du pôle stratégie au cabinet du directeur général de la gendarmerie nationale (DGGN)

Je souhaiterais apporter des précisions sur un point essentiel de la réflexion et du travail que nous avons conduits dans le cadre du plan de transformation stratégique Gend 20.24. Nous avons largement évoqué l'approche par la manœuvre. Pour manœuvrer, il faut des troupes. Nous avons aussi parlé de capacités, c'est-à-dire de moyens et de savoir-faire, ainsi que des femmes et des hommes qui servent cet ensemble. Le deuxième pilier du plan de transformation stratégique Gend 20.24 est intitulé « Mieux progresser en s'engageant ensemble et en confiance ». Ce pilier est consacré uniquement à la problématique du gendarme. Le directeur des personnels militaires a abordé ce matin le statut, l'application de la directive européenne sur le temps de travail et les contentieux soulevés en la matière.

Notre réflexion s'appuie sur les notions de robustesse du gendarme, son fondement militaire et dans le contexte actuel sa capacité à faire face à un « durcissement » de sa mission. Il doit en effet surmonter plusieurs épreuves. La première est la banalisation. Être gendarme n'est pas un métier mais un état. Le gendarme doit accepter, voire revendiquer de n'être pas un agent public comme un autre, en écho avec les réflexions militaires sur la militarité. Il doit également surmonter le doute, parce qu'agir pour la protection des Français et de la Nation contre les menaces et le délitement du lien social se fait parfois aussi contre le gré même de la population. Le gendarme doit par conséquent être convaincu des raisons qui fondent son action et identifier un sens clair à ce qu'il entreprend. Il doit aussi surmonter les diverses insécurités attachées à sa mission, avec des risques physiques et psychologiques, mais également une éventuelle forme d'insécurité juridique. Il lui faut enfin surmonter les épreuves que lui impose son quotidien de gendarme, c'est-à-dire la confrontation à la souffrance et à la mort. Le gendarme est parfois comparé à un médecin généraliste de la société. En effet, il doit gérer un certain nombre d'injonctions contradictoires sans se départir de son sens de l'analyse et de sa réactivité pour pouvoir décider et agir.

Notre réflexion sur la robustesse et la densification du gendarme a beaucoup porté sur la force psychologique et morale, et l'endurance physique. Elle comporte également une forme de socle métaphysique, ce petit quelque chose auquel le gendarme est prêt à tout sacrifier. C'est la mission et la Nation mais également une forme d'éthique, de valeur du bien et du mal.

Nous avons construit un travail conceptuel et pratique autour d'un triptyque : le chef, le gendarme et le groupe. Cette réflexion s'est traduite de manière concrète, en matière de formation, de gestion RH et de chaîne de commandement. Une philosophie sous-tend ce triptyque : le chef doit maîtriser les fondamentaux de l'exercice du commandement militaire et représenter une autorité affirmée, affermie, exemplaire, mais aussi bienveillante, agile et éclairée. Le principe du commandement décrit par le général Bonneau suppose que, quelle que soit la taille de l'unité engagée, un chef soit toujours présent. Sans chef, le système ne fonctionne pas. Les chefs doivent être psychologiquement et professionnellement armés, par la formation des cadres, pour commander et décider dans toutes les situations, même les plus complexes et incertaines.

Ce triptyque s'est en outre traduit dans la formation de nos cadres mais aussi dans la publication de documents socles diffusés à l'ensemble de la gendarmerie. Le gendarme doit être conforté dans le « pourquoi » de son état de gendarme. Il doit faire preuve d'une forme d'aguerrissement moral pour consolider son éthique et sa résistance psychologique. Il doit également être consolidé dans le « comment » de son action, par un aguerrissement professionnel, clarifiant ce qui est attendu de lui. Un travail de fond est mené à ce sujet dans le cadre des formations initiales et continues, notamment en insistant sur les fondamentaux militaires, tel que les savoir-faire issus du combat, le rôle des chefs de contact, le renforcement du contrôle interne, l'éthique de l'action et la déontologie au quotidien.

Enfin, le travail sur le groupe repose sur le fait que l'intérêt collectif n'est pas la somme des intérêts individuels. La capacité collective d'un groupe, d'une unité militaire à faire face n'est pas la simple adjonction des capacités individuelles. Il y faut en réalité un liant, qui est l'engagement, l'esprit de corps, la cohésion, la fraternité d'armes. Ce liant est l'adhésion aux mêmes valeurs. La synthèse du chef et du gendarme aboutit à un groupe doté d'un cap, d'une volonté commune, qui est plus que la somme de ses individualités et qui doit pouvoir réussir sa mission même dans les circonstances les plus incertaines. Le travail sur ce point recouvre un retour à certaines traditions et à certains rites qui contribuent à la fortification de l'esprit de corps et de la cohésion des unités.

Fortifier un gendarme dans son état et sa vocation militaires, c'est consolider la gendarmerie comme force armée. La gendarmerie est une force armée parce que c'est une force humaine, avec un esprit où l'humain est au cœur du fonctionnement et de la mission, puisque la mission du gendarme est la protection des Français et des plus vulnérables. Être gendarme, c'est aimer les gens et aimer les aider. La gendarmerie, en tant que force armée, est aussi une force contenue : le gendarme maîtrise en toute circonstance l'emploi de la force légitime. Notre particularité dans le milieu militaire tient au fait que le gendarme ne détruit pas son ennemi. Il neutralise son adversaire en conservant le plus bas niveau de violence afin d'assurer le retour à la normale. Enfin, la gendarmerie est une force armée, parce qu'elle a une vocation de service du public, ce qui conduit à la réflexion sur l'exigence de redevabilité qu'a évoquée le général Bonneau. Nous devons des comptes aux Français et aux élus et nous devons leur demander également ce qu'ils attendent de la gendarmerie.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Général, colonel, merci pour ces propos liminaires qui nous ont précisé l'organisation générale, le rôle et le niveau d'efficience de la gendarmerie en matière d'anticipation, de protection et de traitement des menaces.

La politique de sécurité intérieure se pense et se déploie en tenant compte de l'interpénétration des enjeux de sécurité intérieure et de ceux fixés par le ministère des Armées. Le continuum de sécurité a donc vocation à mobiliser l'ensemble des forces de sécurité et de défense mises en avant par les ministères de la Défense et de l'Intérieur. Pouvez-vous préciser le rôle et la place de la gendarmerie au sein de ce continuum ?

L'avènement du numérique contribue à l'accélération de la circulation d'informations vraies et fausses, et augmente simultanément leur volume, leur portée et leur résonance. Des agresseurs potentiels disposent ainsi de la capacité à mobiliser rapidement la violence en paroles et en actes, et fragilisent la légitimité des différents acteurs de règlement d'une crise. La guerre de l'information s'est déployée dans le cyberespace en y trouvant un terreau particulièrement fertile. La défense face aux dangers nucléaires, radiologiques, biologiques, chimiques (NRBC) s'inscrit dans le triptyque compétition, contestation, affrontement. Comment la gendarmerie se prépare-t-elle du point de vue des dangers NRBC aux grands événements à venir, comme la coupe du monde de rugby ou les jeux olympiques de 2024 ?

Pouvez-vous également revenir sur les moyens humains et matériels déployés par la gendarmerie pour répondre aux nouveaux enjeux de défense dans le domaine du cyberespace et dans la lutte informatique d'influence ? La contestation passe en effet aussi par ces nouveaux canaux.

Je souhaite pour terminer remercier l'ensemble des gendarmes et des brigades de recherches et de terrain, et leur assurer de notre soutien, notamment de la part des élus qui ont subi des menaces ou des dégradations. Je remercie entre autres la brigade de l'Oise, notamment les brigades de Noyon, de Ribécourt, de Thourotte et de Compiègne pour leur soutien constant lors des événements qui nous touchent particulièrement.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je vous remercie pour la présentation précise de vos activités. Le groupe LR vous remercie pour votre engagement. Le tableau que vous nous brossez concernant les affrontements et la menace terroriste est bien sombre mais il correspond à une réalité que connaissent nos concitoyens. Ces menaces grandissantes demandent une adaptation permanente des moyens humains, techniques et, de plus en plus, technologiques. Dans le cadre des recrutements que vous effectuez, trouvez-vous des personnes qualifiées correspondant à vos attentes ? Formez-vous vous-mêmes les personnels afin qu'ils puissent faire face à ces menaces ? Les moyens qui vous sont alloués permettent-ils de répondre à vos attentes pour lutter efficacement contre ces fléaux ? Vous avez évoqué la coupe du monde de rugby et les Jeux olympiques, qui sont des événements internationaux. Travaillez-vous plus étroitement que par le passé avec les autres pays européens en matière d'information, pour faire face à ces risques et menaces dans la préparation de ces deux événements sportifs ?

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je salue à travers vous les gendarmes présents sur nos territoires, à proximité de nos concitoyens, dans les territoires ruraux notamment. Je précise que je suis élue d'un territoire urbain. La gendarmerie se trouve à côté de la ville dont je suis l'élue, Alfortville. Dans mon département, toutes les anciennes gendarmeries ont été rachetées à une époque où j'étais élue locale et nous les avons transformées pour donner lieu à un ensemble de dispositifs dans le cadre médico-social. Il est donc vrai que la gendarmerie est une proximité, une connaissance, même si je ne la croise pas dans mon action quotidienne.

Nous avons évoqué la cybersécurité et la cyberdéfense. Vous avez mentionné les tensions que nous rencontrons aujourd'hui au sein d'une société qui est devenue beaucoup plus violente. La désinformation est également un sujet important. Les élections présidentielles, comme l'a montré l'exemple des États-Unis, peuvent donner lieu à des attaques de pays étrangers, dont les conséquences peuvent être très graves pour la démocratie et l'expression du vote des citoyens. Je souhaitais donc connaître le travail mené autour de ces questions.

Concernant les implantations à l'échelle de notre territoire, vous êtes les premiers acteurs sollicités sur les violences faites aux femmes, sur les violences intrafamiliales et sur les féminicides. Je voulais saluer tout le travail de la gendarmerie sur ces questions, mais également savoir quelle formation et quel accompagnement psychique étaient proposés pour les gendarmes qui interviennent sur ces violences. Étant donné l'attente de la société sur ce sujet, il m'importait de connaître votre avis et le travail réalisé.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Merci pour vos interventions. Général, c'est votre première intervention en commission de la Défense, mais nous avons déjà échangé longuement, notamment dans le cadre de la mission d'information sur la résilience nationale à la fin de l'année dernière. Je retiens de cet entretien à la fois votre très grande franchise et votre hauteur de vue. Au risque de manquer d'humilité, je forme l'espoir que ces échanges puissent également vous être utiles si nous parvenons à vous pousser un peu dans vos retranchements.

Je me permets de vous communiquer une incompréhension de ma part. N'hésitez pas à être tranchant avec moi. Dans cette commission en particulier, nous sommes tous attachés à la militarité du gendarme. Vous reprenez aujourd'hui le triptyque du chef d'état-major : compétition, contestation, affrontement. À mon sens, ce triptyque n'est pas tant une méthode militaire comme la planification, le retour d'expérience, la liberté d'action, l'économie de moyens, ou la concentration des efforts. Bien entendu, ces méthodes et ces principes sont tout à fait pertinents pour la gendarmerie, qui a tout à fait raison de cultiver sa militarité.

Cependant, à mon sens, ce triptyque n'est pas un principe militaire. Il relève davantage d'une analyse géopolitique, qui pourrait d'ailleurs être aussi bien menée par des militaires ou des civils. Aujourd'hui, le chef d'état-major des Armées met ce sujet en avant, à raison, mais des chercheurs ou des diplomates qui réfléchissent aux questions géopolitiques pourraient également en parler. J'estime que la reprise de ce triptyque suscite une forme de confusion. Je pense qu'il convient d'éviter d'intégrer un concept géopolitique à des sujets de sécurité intérieure, comme si les individus, les groupes présents sur notre territoire avaient des comportements similaires à ceux des États étrangers. Des parallèles sont possibles mais la cible, le cadre d'utilisation de la force et les objectifs diffèrent.

Si ce triptyque est pertinent pour la gendarmerie, il l'est surtout pour examiner comment la gendarmerie nationale, dans le cadre du concept de défense globale, peut contribuer sur les territoires aux enjeux de défense globale. Il est certain que la gendarmerie joue un rôle particulier, par exemple, sur la prévention des ingérences extérieures. Toutefois, n'existe-t-il pas un risque de confusion à utiliser ce triptyque comme s'il s'agissait d'un principe militaire ?

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Merci pour votre présentation. M. Christophe Naegelen, député des Vosges, recommandait, pour pallier les carences en effectifs de la gendarmerie nationale, de porter les effectifs des escadrons de 15 à 20 gendarmes, sur les 109 escadrons que compte notre pays. Le budget pour 2022 fait apparaître une augmentation des effectifs de 185 ETP, sachant que ce chiffre englobe des gendarmes, des personnes administratives, et d'autres encore. Le compte n'y est donc pas.

Qui plus est, le rapport de Christophe Naegelen soulignait que dans les périodes de grandes tensions, d'affrontements, de violences comme pendant la crise des gilets jaunes, si la gendarmerie mobile avait été engagée outre-mer, elle n'aurait pas été en mesure de le faire. Si demain, nous connaissions de tels événements, n'aurions-nous pas rapidement besoin de réarmer nos escadrons et la gendarmerie, pour pouvoir y faire face ? Ne pas être capables de nous projeter en outre-mer sans induire un manque de couverture dans l'hexagone me paraît une situation objectivement dangereuse ou, en tout cas, insatisfaisante.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je vous remercie pour vos propos liminaires. Dans son bilan du rattachement de la gendarmerie au ministère de l'Intérieur, la Cour des Comptes recommande la création d'un service unique de renseignements au sein du ministère. J'estime pour ma part qu'il convient absolument d'éviter le transfert intégral au service central du renseignement territorial des effectifs et des moyens de la chaîne d'anticipation opérationnelle de la gendarmerie nationale. Renseignement et anticipation ne sont pas des fonctions autonomes. Tous deux visent à éclairer les chefs de la gendarmerie à tous les échelons de commandement, dans la conduite de leurs opérations, et à leur permettre d'anticiper et donc de neutraliser toute menace dans leur zone de responsabilité. Le recueil et l'exploitation du renseignement sont intimement liés à la prise de décision et à l'exercice des responsabilités opérationnelles. Mon général, qu'en pensez-vous ?

La Cour des Comptes évoque en outre la nécessité de rationaliser l'implantation territoriale des forces d'intervention de la police et de la gendarmerie. Si tout le monde ici partage l'idée que les forces de sécurité intérieures doivent s'organiser au mieux pour éviter le pire, il me paraît indispensable que le GIGN conserve toutes ses antennes territoriales. En tant qu'ancien commandant du GIGN, qu'en pensez-vous ?

Par ailleurs, je souhaiterais évoquer ce matin les territoires ultramarins, sujet auquel je me suis particulièrement intéressé dans mes rapports budgétaires. Je me suis rendu en Guyane en décembre 2020, alors que la situation sécuritaire y est particulièrement dégradée. La militarité de la gendarmerie est nécessairement un atout sur ce territoire, comme sur les autres territoires ultramarins, notamment à Mayotte. Ne faudrait-il pas renforcer les effectifs de la gendarmerie en outre-mer ? Ne faudrait-il pas accroître les moyens aéromobiles et fluviaux de la gendarmerie guyanaise ? Il me paraît aussi capital de créer une synergie entre la gendarmerie et l'armée de Terre en Guyane, s'agissant en particulier du transport de marchandises vers les casernes de gendarmerie les plus isolées.

Enfin, mon général, dans la mesure où vous avez passé quelques années de votre carrière au ministère de l'Europe et des Affaires étrangères, je souhaitais vous interroger sur le rôle de la diplomatie dans le règlement des questions sécuritaires à Mayotte et en Guyane.

Je terminerai en remerciant en tant que rapporteur les militaires et civils de votre direction qui m'ont accompagné dans mes travaux. Ils ont toujours fait preuve d'une réactivité remarquable pour répondre à mes interrogations. Il me paraissait donc important de les remercier publiquement.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je voudrais d'abord remercier nos deux intervenants. J'ai trouvé la présentation très intéressante et je me félicite de notre échange, qui nous apportera beaucoup sur notre connaissance de la gendarmerie dans son fonctionnement interne.

Je souhaitais revenir sur ce que vous appelez le retour d'expérience. En tant que député de la circonscription où a eu lieu le terrible drame de Saint-Just, je souhaitais vous interroger sur les conséquences qui ont pu en être tirées. Soyez d'ailleurs assuré de toute l'estime que la population et les élus ont pour nos gendarmes.

Au lendemain du drame, un « trou dans la raquette » en matière de surveillance a pu être évoqué. Vous avez mentionné dans votre propos liminaire la question des survivalistes, très présents sur les territoires ruraux. Malgré la connaissance du terrain et la proximité des gendarmes avec les habitants, ils peuvent parfois passer entre les mailles du filet.

J'ai également une question sur les stands de tir. Je suis conscient des questions de liberté individuelle soulevées par ce sujet mais ne pourrions-nous pas instaurer une forme de signalement des individus dont le comportement au stand de tir ou la « provenance » pourraient paraître suspects ?

Certains individus se sont dotés d'un arsenal que l'on a du mal à imaginer. Les connaissances dont on dispose sur le nombre de ces armes de guerre, leur nature, leur calibre et sur les stocks de munitions sont-elles suffisantes ? À Saint-Just, les gendarmes ne possédaient pas en nombre suffisant de matériel de vision nocturne, alors que l'individu qui a tué trois gendarmes avait lui-même des armes de guerre et ce matériel.

L'accès aux données des fichiers comme Agrippa constitue un autre problème. Pour mieux sécuriser les interventions, l'accès aux données est-il automatique ou faut-il demander une autorisation auparavant ? Ces fichiers sont-ils interconnectés ?

Enfin, la réponse à ma dernière question m'a été apportée hier. Il s'agissait de la professionnalisation des pelotons de surveillance et d'intervention de la gendarmerie (PSIG). Il me paraît positif que des gendarmes de plein exercice composent les PSIG. Je vous remercie.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Vous avez abordé la pénibilité ou la lassitude qui peuvent s'exercer dans le travail des gendarmes sur leur territoire. Ces gendarmes sont en effet exposés à la part la moins belle de l'être humain, celle qui est violente, alcoolisée, en détresse, qui frappe ses enfants, ses voisins. Les gendarmes sont également confrontés à des morts violentes. Pour rencontrer très souvent de jeunes gendarmes dans ma circonscription, je sais à quel point le souvenir de la première confrontation à ces morts en série est marquant dans leur parcours.

Je souhaiterais que vous nous en disiez davantage sur l'identification des signaux faibles mise en place dans vos protocoles vis-à-vis de la hiérarchie. Comment repérez-vous les grandes difficultés auxquels les gendarmes sont exposés ? Les familles, qui vivent également dans les casernes, peuvent être porteuses d'observations fines sur tel ou tel changement de comportement. Qu'avez-vous mis en place pour permettre aux gendarmes d'optimiser leur potentiel et pour lutter contre les réveils itératifs, puisque les nombreuses nuits d'astreinte qu'ils effectuent conduisent les gendarmes à être régulièrement réveillés en pleine nuit. Ils sont donc plus fatigués le lendemain, malgré les temps de récupération.

Comment générez-vous du bien-être dans ce métier malheureusement au cœur du mal-être ? Je ne reviens pas sur les insultes et menaces dont ils peuvent faire l'objet. Chacun ici aura compris à quel point j'essaie de rester proche des gendarmes.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je souhaitais réagir aux propos de M. Chassaigne. Je constate un acharnement sur de prétendus ruraux survivalistes, alors que tous ceux qui ont un attrait pour les armes à feu dans le cadre d'une pratique sportive ou de la chasse ne sont pas tous des forcenés ou n'ont pas tous un potentiel à l'être. De nombreux gendarmes et policiers sont des membres réguliers de centres de tir. Certains ont besoin de « déterritorialiser » leur capacité à faire du sport, par exemple pour des compétitions, des entraînements ou des chasses. Des millions de Français sont dans une situation qui ne ressemble ni de près ni de loin à celle du forcené de Saint-Just. Cet événement était extrêmement désolant. Je tenais cependant à rappeler que s'il existe des armes en détention irrégulière, la situation est exceptionnelle par rapport à ces millions de personnes pacifistes et innocentes ou aux survivalistes dont il a été question. Ne jetons pas la pierre à des boyscouts ou à des personnes qui cherchent seulement à mieux connaître la nature.

J'ai pu noter l'acquisition par la gendarmerie nationale d'une vingtaine de véhicules de type Alpine A110 qui perpétuent une tradition de l'excellence française des véhicules d'intervention rapide. Je suppose qu'une partie de ces véhicules est destinée à des pelotons autoroutiers. J'aimerais savoir si cette logique se poursuivra afin de montrer l'excellence française sur nos routes et au sein de nos unités d'excellence.

Permalien
Général Hubert Bonneau

Des questions reviennent sur la place de la gendarmerie dans ce qui était autrefois appelé le continuum paix-crise-guerre. En effet, les armées ont évolué en matière de doctrine sur les items évoqués aujourd'hui. Il ne s'agissait pas pour moi de dire que nous adoptions désormais cette formulation. Cependant, nous nous inscrivons pleinement dans ce que définit le chef d'état-major des armées. Des actions menées par des mafias ou des groupes criminels sur le territoire national peuvent aujourd'hui déstabiliser l'État ou la société. Nous devons par conséquent apporter des réponses d'un point de vue juridique. Il faut être capable de détecter et de traiter ces actions par des opérations judiciaires.

La gendarmerie représente une présence territoriale, de proximité, auprès des citoyens dans la profondeur des territoires. La gendarmerie compte 3 100 brigades d'hommes et de femmes qui œuvrent comme capteurs. L'axe prioritaire des gendarmes porte aujourd'hui sur la proximité vis-à-vis des élus, notamment des maires. Nous apportons des réponses de proximité. J'en profite pour répondre à la question de M. Batut sur le renseignement : nous contribuons au renseignement par cette captation tous azimuts. Le service central de renseignement territorial mène une analyse, en liaison avec la gendarmerie. Au sein du service central de renseignement territorial (SCRT), des gendarmes sont présents. Ils œuvrent donc comme une force d'analyse au niveau local pour des services de renseignement qui mènent l'analyse au niveau national, départemental, régional et national. Nous en assurons la continuité.

S'agissant de nos opérations, j'ai fait référence à un système otanien. Les J2 sont les femmes et les hommes sur le terrain qui contribuent à capter l'information et le renseignement dans le cadre de nos missions et de nos actions. Ainsi, dans les opérations récentes de maintien de l'ordre en Nouvelle-Calédonie, un J2 était présent pour contribuer à l'anticipation opérationnelle au profit des forces de gendarmerie, sous l'autorité du préfet, en liaison avec le service départemental de renseignement territorial. La Gendarmerie, aujourd'hui, est une force de contact, une force de proximité dans la profondeur des territoires. L'axe principal de notre action, c'est la proximité, le contact, la continuité et la présence de terrain. J'ai rappelé dans mon propos introductif que nous percevons une certaine fragilisation de la société. Le rôle essentiel du gendarme réside dans cette présence rassurante de contact.

Je remercie M. Chassaigne pour ses propos sur la réalité à laquelle nous sommes confrontés. Il ne s'agit pas de dire qu'il est bien ou mal de posséder des armes. Disposer d'une meilleure visibilité sur la circulation des armes est en revanche important. Vous évoquez des problématiques sur les fichiers et l'accès à Agrippa. Il est nécessaire que nous nous attachions à la comptabilisation et au recensement des armes. Il faut également développer les systèmes d'interconnexion, y compris au niveau européen.

Au quotidien, les gendarmes prennent en compte des problématiques locales pour les traiter. En tant que capteurs permanents de ce qui se passe sur le territoire, nous sommes en mesure de détecter des signaux faibles, ensuite traités par des services mieux armés que nous pour le faire.

Nous évoquions la présence de groupes étrangers sur le territoire national et la déstabilisation qu'ils peuvent entraîner. Il ne revient pas à la gendarmerie de traiter cette problématique mais à la direction générale de la sécurité intérieure (DGSI). Nous y contribuons par l'interconnexion avec les différents services. La place de la gendarmerie est reconnue et nous travaillons en parfaite complémentarité avec tous les grands services de renseignement et les services judiciaires. La DGGN, avec sa sous-direction de la police judiciaire, et la direction de la police judiciaire de la police nationale, travaillent ensemble sur les mêmes dossiers en co-saisine. La gendarmerie assure une présence sur 96 % du territoire pour un peu plus de 52 % de la population. Plus d'un Français sur deux est rattaché à une zone gendarmerie. Nous menons chaque jour un effort de proximité et de contact rassurant vis-à-vis de la population.

Si les choses devaient évoluer de façon dramatique sur le territoire national, nous reviendrions aux concepts de paix, crise, guerre. Nous sommes en mesure de basculer par la force armée vers des approches beaucoup plus militarisées dans l'action. Nous revenons par exemple aujourd'hui sur les problématiques de défense opérationnelle du territoire (DOT) en lien avec les armées. Le modèle de la gendarmerie n'est pas remis en cause. Nous nous donnons des moyens d'action novateurs au contact de la population, avec une réforme de notre gestion de crise au niveau national, qui se répercute à l'échelle des zones et des départements.

Permettez-moi de revenir rapidement sur deux grands thèmes.

Nous avons abordé la réaction aux menaces cyber et numériques. Vous auditionnerez la semaine prochaine le général Marc Boget, qui dirige le COMCyberGend. Le commandement du cyber de la gendarmerie n'est pas destiné à bloquer des actions étrangères d'influence sur le territoire national. C'est là le rôle de l'Agence nationale de la sécurité des systèmes d'information (ANSSI), qui travaille en lien avec la DGSI. Le commandement du cyber à la gendarmerie mène des actions dans le cyber, notamment des actions préventives. Vers qui se tourne aujourd'hui un citoyen victime d'hameçonnage ? L'ANSSI est une agence remarquable, mais elle travaille à la défense des intérêts majeurs de l'État. Nous travaillons quant à nous au profit du citoyen, des entreprises et nous consacrons à un effort de pédagogie afin de sensibiliser les entreprises sur les risques de hacking par rançongiciels. L'action du COMCyberGEND se situe donc dans la prévention et la pédagogie. Le traitement judiciaire de ces affaires relève d'un travail effectué au sein du ministère de l'Intérieur, avec les forces de police nationales qui s'organisent à leur niveau. Nous devons, en outre, prendre en compte les mutations de la cybercriminalité. Aujourd'hui, l'espace numérique est utilisé par la criminalité organisée. Le cyber offre par exemple des services aux groupes criminels. Leurs données sont hébergées dans le cyber ; des moyens leur sont fournis, comme la crypto. Le cyber est un outil formidable, mais il peut être mal utilisé, notamment pour la fourniture de moyens particuliers. Il existe une réelle complémentarité entre l'ANSSI, la gendarmerie et la police nationale sur ces sujets. Il y a de la place pour tout le monde sur ce sujet.

Concernant le renforcement de nos capacités d'action, la gendarmerie mobile compte aujourd'hui 109 escadrons employés au rythme de 68 escadrons par jour. Entre 21 et 23 escadrons sont chaque jour déployés sur les problématiques liées aux outremers. À Mayotte, en Guyane, aux Antilles, une présence quasi permanente de gendarmes mobiles est nécessaire. Dans le cadre du projet de loi d'orientation et de programmation du ministère de l'Intérieur, il est envisagé le renforcement des unités de force mobiles. Le Président de la République l'a d'ailleurs annoncé. Nous verrons le nombre d'escadrons de gendarmerie mobiles qui pourront être recréés au sein de la gendarmerie nationale. La Gendarmerie nationale et les préfets peuvent aujourd'hui compter sur une réserve nationale, qui est la gendarmerie mobile. Les gendarmes mobiles interviennent au quotidien sur des problématiques de maintien de l'ordre mais également de sécurisation des espaces.

S'agissant du retour d'expérience mentionné par M. Chassaigne, le travail d'information et de renseignement est fourni par les gendarmes.

J'ai abordé les problématiques liées aux actions et fichiers. Les interconnexions constituent quant à elles un sujet majeur aujourd'hui, notamment pour le travail en mobilité. Pour être efficaces, les gendarmes s'appuient sur des outils afin de travailler en mobilité et de s'affranchir d'un retour à la brigade pour y consulter les fichiers. Ces mesures se mettent actuellement en place. La gendarmerie travaillera complétement en mobilité. La gendarmerie sera de plus en plus hors les murs, selon une logique de pas de porte, en allant vers les personnes. Demain, nous serons en mesure de recueillir les plaintes au domicile. Nous envisageons des brigades totalement mobiles, avec des systèmes qui restent à imaginer. Celles-ci pourraient par exemple s'appuyer sur des véhicules de type camping-cars, qui feraient le tour de toutes les communes d'un canton dans la journée pour prendre les plaintes et iraient au contact des élus sans avoir à revenir à la brigade. Il ne s'agit pas d'un avenir lointain. Ces outils sont en effet en cours de production au sein de la gendarmerie. Des expérimentations arriveront prochainement dans vos territoires.

Monsieur Chassaigne, le retour d'expérience nous permet aussi de nous regarder. Sur l'affaire de Saint-Just, qui est comme vous l'avez rappelé un véritable drame, ce retour d'expérience consiste à faire l'état d'une gendarmerie face à des individus qui, selon les termes du directeur général, peuvent complètement « dégoupiller », et se retrouver dans des situations extrêmes par rapport aux gendarmes. Y sommes-nous véritablement préparés ? La gendarmerie applique-t-elle réellement tous les moyens pour le faire ? Ce sont les questions que nous nous posons. Le gendarme doit être capable de faire face partout. À Saint-Just, la compagnie d'Ambert était confrontée à très peu de faits criminels. Pourtant, c'est là que le drame s'est produit. Nos gendarmes doivent donc être aguerris face à de telles situations.

Les hommes et les femmes de notre gendarmerie sont des hommes et des femmes de notre société et de notre temps. Aujourd'hui, nos jeunes ignorent ce qu'est la mort. Parfois, les gendarmes découvrent leur premier mort dans le cadre de leur travail dans les brigades. Qui plus est, ils y sont confrontés de façon très violente. Leur expérience se construit sur le terrain en permanence. Pour aguerrir les femmes et les hommes à ces situations, la gendarmerie doit les épauler. Elle doit assurer leur soutien psychologique. Des efforts de soutien en direction des familles et des gendarmes sur le terrain sont ainsi poursuivis. Enfin, le retour d'expérience implique de s'interroger sur les équipements, les matériels, ou la professionnalisation des PSIG. Ce que nous mettons en place n'est pas une transformation de la gendarmerie pour redéfinir un nouveau modèle. Le modèle reste celui de la proximité, de la maîtrise des territoires, du contact avec la population, du lien renforcé avec les élus. Les processus et les dispositifs sont cependant évolutifs afin de s'adapter aux menaces actuelles.

La gendarmerie est très impliquée dans les dispositifs liés aux menaces qui peuvent porter sur la coupe du monde de rugby et les jeux olympiques. Le ministère de l'Intérieur est à la manœuvre sur ces sujets. Un service national de sécurité des Jeux olympiques, la coordination nationale pour la sécurité des jeux olympiques (CNSJ), prend en compte la sécurité des jeux de 2024. La CNSJ a déjà commencé à travailler sur ces sujets avec comme préfiguration la coupe du monde 2023 de rugby, sous l'égide du préfet Ziad Khoury. Nous contribuons à la réflexion et à l'analyse des risques potentiels pour ces grands événements. Le risque terroriste, le risque NRBC et le risque cyber sont pris en compte. Un centre de renseignement sera mis en place au sein de la CNSJ pour ces événements particuliers.

À ce sujet, nous disposons au sein du GBGM à Satory d'une force nationale NRBC permanente avec 15 ETP, 15 militaires dans cette force, pouvant bénéficier de 800 formateurs relais sur le terrain au niveau national. Au niveau de l'ordre public et de la protection, nous pouvons compter sur un groupement tactique de deux escadrons par zone de défense, pour intervenir en cas de crise sur des problématiques NRBC. En matière de contre-terrorisme, le GIGN dispose d'une cellule NRBC lui permettant d'intervenir dans tous les milieux, du nucléaire au chimique, en totale autonomie, pendant des durées relativement longues. Le GIGN est aujourd'hui la seule unité au monde capable de travailler plus de quarante minutes en milieu vicié.

Au niveau de la police judiciaire, nos offices centraux travaillent sur les problématiques NRBC, notamment l'Office central de lutte contre les atteintes à l'environnement et à la santé publique (OCLAESP), mais aussi l'Institut de recherche criminelle de la gendarmerie nationale (IRCGN). Le COMCyberGEND travaille à la détection de certains trafics dans le cyber, par exemple afin d'identifier les stockages de corps contaminés revendus sur internet. La sous-direction de l'anticipation opérationnelle (SDAO) collecte également des informations sur les sujets NRBC pour le SCRT.

Le dispositif est donc très étoffé, il est capable de travailler en interopérabilité avec le DCI-IT du ministère de l'Intérieur et les armées.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Général, colonel, vous avez éclairé mes réflexions sur la haute intensité qui fait l'objet d'une mission d'information dont je suis co-rapporteure avec Jean-Louis Thiériot. J'ai été plutôt rassurée par vos propos et je pense que chacun ici l'a été.

Ma circonscription est à moitié urbaine, à moitié littorale. Je constate que les Français aiment voir du bleu : le bleu du ciel mais aussi le bleu sur terre. Votre engagement auprès de nos concitoyens est un engagement de 365 jours par an, et j'ai toujours plaisir à aller vous rendre visite dans ma circonscription. Le lien entre gendarme et nation existe. Avec le SNU, nous rapprochons notre jeunesse de la fonction de gendarme et de militaire. Avec les cadets de la gendarmerie, ils redécouvrent l'importance de la famille, de la communauté, du corps, des équipes, et de la solidarité. C'est ce que vous montrez tous les jours et je tenais à le préciser. Je crois que c'est la meilleure réponse que nous puissions afficher face à la violence. Je voulais aussi vous remercier pour tout ce que vous faites pour les élus locaux, départementaux, régionaux, et les parlementaires que nous sommes, à la fois pour l'attention que vous avez à notre égard, mais aussi à celui de la population.

La séance est levée à douze heures quarante.

Membres présents ou excusés

Présents. - M. Jean-Philippe Ardouin, M. Xavier Batut, M. Bernard Bouley, M. Jean-Jacques Bridey, Mme Carole Bureau-Bonnard, M. André Chassaigne, M. François Cormier-Bouligeon, Mme Catherine Daufès-Roux, Mme Françoise Dumas, M. Jean-Jacques Ferrara, M. Jean-Marie Fiévet, M. Thomas Gassilloud, Mme Séverine Gipson, M. Christophe Leclercq, M. Jacques Marilossian, Mme Sereine Mauborgne, M. Philippe Meyer, Mme Patricia Mirallès, Mme Florence Morlighem, Mme Catherine Pujol, Mme Isabelle Santiago, Mme Nathalie Serre, M. Joachim Son-Forget, M. Stéphane Trompille, Mme Alexandra Valetta Ardisson, M. Charles de la Verpillière, M. Stéphane Vojetta

Excusés. - M. Florian Bachelier, M. Olivier Becht, M. Christophe Castaner, M. Jean-Pierre Cubertafon, Mme Marianne Dubois, M. Olivier Faure, M. Yannick Favennec-Bécot, M. Richard Ferrand, M. David Habib, Mme Manuéla Kéclard-Mondésir, M. Jean-Christophe Lagarde, M. Gwendal Rouillard, M. Thierry Solère