La séance est ouverte à dix-sept heures trente.
Chers collègues, nous sommes réunis pour auditionner Mme Isabelle Saurat, secrétaire générale pour l'administration du ministère des armées.
Madame la secrétaire générale, je vous prie de bien vouloir excuser l'absence de la présidente Françoise Dumas, partie en début d'après-midi en déplacement à l'étranger avec nos collègues Gwendal Rouillard et Philippe Meyer, dans le cadre de la mission d'information sur la stabilité au Moyen-Orient dans la perspective de l'après-Chammal, qu'elle préside.
Notre réunion inaugure un nouveau cycle d'auditions consacrées à l'actualisation de la loi de programmation militaire (LPM) 2019-2025, dont le coup d'envoi a été donné par l'audition de Mme la ministre, le 4 mai dernier.
Madame la secrétaire générale, je suis heureux que vous soyez la première invitée de ce nouveau cycle, car j'y vois un puissant symbole. Comme l'a rappelé Florence Parly, l'ambition de remontée en puissance de notre outil de défense soutenue par la LPM 2019-2025 concerne certes le domaine des équipements, mais aussi – et sans doute avant tout – la communauté humaine qui constitue le fondement même de cet outil. Telle était l'une des priorités absolues affichées par la loi de programmation militaire, qui s'est voulue, pour reprendre l'expression consacrée, « à hauteur d'homme ».
Les politiques menées par vos directions vous placent au cœur de la vie des militaires et des civils du ministère et des armées. C'est pourquoi nous souhaitons faire avec vous un premier bilan. Il s'agit de savoir ce qui fonctionne, ce qui a du retard et ce qui reste à faire, éventuellement.
En matière de ressources humaines, les objectifs de progression d'effectifs et de maîtrise de la masse salariale sont-ils atteints ? Quel bilan établissez-vous de la mise en place des outils au service de cette politique, notamment la nouvelle rémunération des militaires, l'aide à la reconversion et la politique sociale ?
Concernant l'amélioration des conditions de vie des personnels et de leurs familles, notre commission est pleinement investie dans le suivi de ce dossier, comme l'atteste la mission d'information confiée à deux de nos collègues, Séverine Gipson et Isabelle Santiago, afin de réaliser un bilan approfondi du plan famille. Les objectifs ont-ils été atteints ? Quelles ont été les difficultés rencontrées ? Quel retour avez-vous eu de la part des personnels ?
S'agissant de la politique immobilière du ministère, quelles sont les déclinaisons au service du plan hébergement et de l'amélioration de l'offre de logement ?
Puisque le service d'infrastructure de la défense relève du secrétariat général pour l'administration (SGA), pourriez-vous faire un point sur les infrastructures d'accueil des équipements militaires ?
Le pilotage des systèmes d'information numérique structurants fait également partie intégrante du portefeuille du SGA. À ce titre, une délégation à la transformation et à la performance ministérielles a été créée en janvier dernier, ce qui montre bien que le numérique est au cœur de la transformation et de la modernisation du ministère. Quels premiers retours d'expérience peut-on faire s'agissant de cette délégation ?
Enfin, vous aurez sans doute l'occasion de revenir sur la politique culturelle menée par le ministère et les crédits consacrés au renforcement des liens entre la nation et son armée, ainsi qu'à la reconnaissance et à la réparation en faveur du monde combattant – nous n'oublions pas que l'un des principaux objectifs de notre commission est de veiller à l'expression de la reconnaissance de la nation envers l'engagement sans faille des militaires. Cet engagement peut les amener à être blessés dans leur âme ou dans leur chair, voire les conduire jusqu'au sacrifice suprême. Il est donc particulièrement important pour nous de s'assurer que les engagements pris sont tenus, d'autant que la LPM a prévu des améliorations, à commencer par la réforme du contentieux des pensions militaires d'invalidité.
J'étais venue devant votre commission en octobre dernier pour m'exprimer sur le projet de loi de finances pour 2021 et ses ambitions pour la troisième année de la loi de programmation militaire, qui marque une montée en puissance. La LPM est conçue pour réparer notre outil de défense et préparer l'avenir.
Je ne reviendrai pas sur l'évolution du contexte stratégique, dont Mme la ministre des armées a déjà parlé. Je concentrerai mon propos sur les éléments structurants pour l'activité de nos directions, notamment parce que la loi de programmation a été conçue à hauteur d'homme. Un certain nombre des ambitions de la LPM sont concrétisées par les directions du SGA et financées par le programme 212, dont je suis la responsable.
L'amélioration des conditions d'exercice du métier militaire est un axe prioritaire de la LPM. L'objectif est d'atteindre un point d'équilibre entre sujétions inhérentes à l'état militaire et compensation de celles-ci.
Après quelques années d'excédent sur le titre 2, le bilan de la gestion de la masse salariale pour 2019 et 2020 est pleinement satisfaisant. Les soldes de gestion tendent de plus en plus vers l'équilibre absolu : sur 20 milliards d'euros de dépense s'agissant des effectifs, nous « atterrissons » à moins de 1 million d'euros de la cible, soit 0,004 %.
Nous avons strictement respecté le schéma d'emploi de la LPM 2019-2025, visant la poursuite significative de la montée en puissance des ressources humaines dans les domaines jugés prioritaires. À la fin de l'année 2019, nous enregistrions un retard de 49 équivalents temps plein (ETP) ; il a été compensé en 2020. À l'inverse, l'avance de 67 ETP prise en 2020 a été prise en compte dans le schéma d'emploi pour 2021 : conformément à la LPM, 300 nouveaux emplois ont été inscrits en 2021, mais compte tenu de l'avance constatée en 2020, ce nombre sera ramené à 233 ETP pour l'année 2021. À la fin de l'année, nous devrions donc être strictement au niveau prévu par la LPM.
Ces créations consacrent la montée en puissance des effectifs dans le renseignement – plus 104 emplois –, l'action dans l'espace numérique – plus 102 emplois, dont 96 pour la cyberdéfense – et la sécurité des emprises militaires – plus 20 emplois. La dynamique des créations en matière de cyberdéfense va se poursuivre en raison du contexte géopolitique et de l'importance vitale de ce domaine pour nos activités civiles et militaires.
Nos chaînes de recrutement ont été bouleversées par la crise sanitaire. À cet égard, je ne peux que souligner la réactivité de la fonction RH, face à une situation sans précédent. Les gestionnaires RH ont démontré leur capacité à s'adapter. Ainsi, pour le second semestre, les cibles de recrutement ont été modifiées au regard de l'inflexion des départs des armées provoquée, d'une part, par le contexte de crise, et, d'autre part, par les contraintes de distanciation physique dans la chaîne de sélection et de formation. Nous avons tenu compte de toutes les contraintes pour atterrir le mieux possible. En définitive, les recrutements réalisés en 2020 ont permis aux gestionnaires RH d'atteindre leurs objectifs : nous avons procédé à 25 200 recrutements.
Si, au niveau ministériel, les résultats sont satisfaisants, certaines catégories d'emploi, comme les sous-officiers et certaines familles professionnelles, sont encore en sous-effectif. Le vice-amiral d'escadre Philippe Hello, directeur des ressources humaines pourra les détailler.
La loi de programmation militaire prévoit, notamment, les quatre réformes suivantes.
Le plan catégoriel du ministère a bénéficié, en cumul, entre 2019 et 2021, de 640 millions d'euros.
La prime de lien au service (PLS), instituée en 2019, vise à fidéliser le personnel militaire dans des fonctions spécifiques. Mise en œuvre sur trois ans, elle atteint son régime de croisière. En cumul sur les trois ans, la dépense sera de près de 150 millions d'euros. Ce volume intègre bien sûr les primes qu'elle a remplacées.
Dans le cadre du budget pour 2021, nous avons engagé la première étape de la nouvelle politique de rémunération des militaires (NPRM), incluant l'indemnité de mobilité géographique. Nous avons terminé la définition de son architecture globale. Nous en sommes aux échanges interministériels nécessaires pour mener la deuxième phase en 2022, puis la dernière en 2023.
Enfin, le plan famille, qui bénéficie d'une enveloppe de 530 millions d'euros pour la période 2019-2025, répond de manière concrète à des contraintes inhérentes à la vie militaire. Les résultats en sont déjà visibles. Il a fait l'objet d'une large concertation avec la base, qui a confirmé sa pertinence. Après trois ans de LPM, nous intensifions notre action sur deux points particuliers. D'une part, la structure dénommée Défense Mobilité soutient les personnes qui, au titre de la mobilité géographique, doivent suivre leur conjoint. D'autre part, nous développons les solutions pour la petite enfance.
Je conclurai ce chapitre en insistant sur un point tiré de ma déjà longue expérience en matière de budget de la défense. Comme l'emploi des crédits d'investissement, la gestion des effectifs s'inscrit dans le temps long. Si les deux premières années de la LPM ont été marquées par une augmentation des effectifs, nous sommes confrontés à un nombre insuffisant de sous-officiers, notamment dans l'armée de l'air et de l'espace, et certaines familles professionnelles sont en tension. Même en matière de RH, on peine à se remettre des à-coups de la gestion des années ayant précédé la LPM : il y a dix ans, le ministère était engagé dans une réduction d'effectifs et de crédits. Pour réaliser la déflation prévue dans les précédentes LPM, les armées ont fortement réduit les volumes de recrutement et d'avancement. Nous en voyons encore les résultats sous la forme d'effets de cohorte importants et de faiblesses dont vous parlent régulièrement les chefs d'état-major, notamment celui de l'armée de l'air et de l'espace, en particulier en ce qui concerne les sous-officiers. Pour le service de santé des armées (SSA), se pose la question du nombre d'élèves en formation initiale que nous sommes autorisés à recruter et du temps de formation nécessaire pour les rendre opérationnels.
J'en viens aux deux autres sujets entrant directement dans mon périmètre d'action.
Concernant l'infrastructure et la politique du logement familial du ministère des armées, l'objectif est la mise à disposition de ses ressortissants des logements domaniaux ou réservés par convention auprès de bailleurs à des conditions avantageuses. Un effort budgétaire inédit a été consenti, dans le cadre des trois dernières lois de finances, en faveur du logement familial : plus de 140 millions d'euros chaque année – et même 180 millions d'euros en 2021. Cet effort sera poursuivi tout au long de la loi de programmation militaire. Il s'agit de renouveler quantitativement et qualitativement les logements réservés en métropole, en priorité dans les zones en forte tension locative, d'augmenter l'offre de logements outre-mer et d'améliorer l'état technique des logements du parc domanial.
Afin d'accompagner cette politique du logement, nous avons modernisé nos instruments de gestion du parc. Nous avons consolidé notre politique de loyers grâce à la modernisation du système d'information. Nous souhaitons faciliter les affectations et la rotation des appartements. La mise en concurrence est en cours pour l'attribution du nouveau contrat d'externalisation pour la gestion des logements domaniaux de métropole (CEGELOG), qui sont au nombre de 10 000 ; nous espérons le signer à la fin de l'année, et il devrait entrer en vigueur en 2022. C'est un contrat original, qui prévoit non seulement des prestations de gestion locative, d'entretien, de rénovation et de réhabilitation énergétique de notre parc, mais aussi la construction de 2 500 logements domaniaux neufs.
Le programme d'hébergement du personnel ayant été validé par la ministre en juin 2019, nous avons un programme d'infrastructure à réaliser. Il s'agit des conditions d'hébergement proposées aux militaires du rang en enceinte militaire – autrement dit le casernement –, mais aussi de la prise en charge des « célibataires géographiques », situation choisie ou imposée au fil des mutations. Ce programme prévoit la réhabilitation de 25 000 places et la création de 7 600 nouvelles places. Nous sommes en ligne pour les réhabilitations, mais surtout pour les créations qui sont très attendues. Les ministres viennent régulièrement inaugurer de nouveaux bâtiments d'hébergement.
Un effort de transformation et de modernisation de nos outils numériques a été réalisé. Vous avez suivi la montée en puissance du système Source solde. Celui-ci, désormais pleinement opérationnel, va devoir intégrer la NPRM naissante.
Dans le cadre de la crise sanitaire, nous avons permis aux collaborateurs du SGA de travailler à distance. Ce n'était pas gagné d'avance : en mars 2020, seuls 2 % des personnels étaient équipés. Plus de 50 % le sont aujourd'hui. Toutefois, certaines missions, notamment celles des personnels des services d'infrastructure des armées, ne peuvent être accomplies en télétravail. Nous avons donc, me semble-t-il, atteint un seuil terminal.
Considérant que la transformation des métiers de l'administration passe par la numérisation, l'automatisation et par tout ce que les nouveaux outils numériques permettent de faire, nous avons créé une délégation à la transformation et à la performance ministérielles chargée d'assurer un continuum entre une transformation numérique qui peut paraître tout à fait rapide, banale, facile et la construction de systèmes d'information plus importants.
Parallèlement, la crise nous a aidés à engager des mesures de simplification de notre activité ; nous espérons en conserver certaines par la suite.
Je tiens tout d'abord à souligner l'importance de votre rôle pour la mise en œuvre de la volonté du Parlement. Je me réjouis notamment de votre propos concernant la courbe des effectifs : à la fin de 2021, nous serons au niveau prévu par la LPM, en totale conformité avec la volonté du législateur et de l'exécutif. Vous êtes responsable de trois programmes budgétaires majeurs. Il est donc heureux que vous nous envoyiez ce signal – d'autant plus que, dans le passé, les LPM n'ont pas toujours été respectées.
Dans son discours prononcé à Creil, le 10 mai, la ministre a indiqué qu'au-delà des applications qui irriguent nos systèmes d'armes et contribuent à la planification opérationnelle – féru du sujet, j'ai moi-même commis un rapport d'information sur les systèmes d'armes létaux autonomes (SALA) –, nous avons recours à l'intelligence artificielle dans des métiers administratifs comme les finances ou les ressources humaines. Le SGA, avec son Labo Business Intelligence (BI) & Big Data, recrute régulièrement de jeunes data scientists en alternance. Pourriez-vous nous en dire un peu plus sur ce laboratoire et sur votre plateforme « Watch of Knowledge on Emergent Diseases-COVID 19 » (WAKED-CO), qui restent un peu mystérieux ?
La Cour de justice de l'Union européenne, saisie par la justice slovène au sujet d'un litige relatif aux horaires de garde d'un ancien sous-officier, imposés par sa hiérarchie, doit se prononcer sur l'application aux militaires de la directive européenne relative au temps de travail (DETT) du 4 novembre 2003. Il est préoccupant d'apprendre que les conclusions de l'avocat général de la Cour plaident en faveur d'une telle application, mais rassurant de savoir que le gouvernement français n'a cessé de rappeler le principe de disponibilité des militaires. D'ailleurs, interrogée par le sénateur Cédric Perrin, Mme Florence Parly a certifié que ce principe étant un enjeu essentiel de notre défense nationale comme de la sécurité européenne, elle continuerait à le défendre, d'autant plus que la France, seul pays de l'Union membre permanent du conseil de sécurité de l'ONU, exerce des responsabilités éminentes en matière de défense, et que le Gouvernement s'en remettait à la sagesse de la Cour de justice européenne.
Madame la secrétaire générale, l'actualisation de la LPM aura-t-elle une incidence sur l'application de la directive aux militaires et, inversement, celle-ci pourrait-elle modifier la LPM ?
Nous débutons la troisième annuité de la loi de programmation militaire et notre majorité veille à son respect à l'euro près. Il y a eu quelques frictions, mais les paliers ont été globalement respectés. Sur le terrain, les femmes et les hommes de nos armées voient concrètement les investissements réalisés. Dans ma circonscription de Brest, ces efforts sont tangibles, notamment pour le bataillon de fusiliers marins Amyot d'Inville.
Comme vous l'avez rappelé, à l'heure de l'actualisation, les ambitions de la programmation demeurent intactes malgré les incertitudes liées à la crise économique. Pour paraphraser Milan Kundera, nous avançons dans le brouillard mais nous avons un cap. Le Président de la République a confirmé, dans ses vœux aux armées à Brest, la trajectoire jusqu'en 2023 et l'Ambition 2030 pour nos armées. Cette inquiétude étant levée, votre administration doit se saisir du plan de relance, notamment dans ses volets transition énergétique, transition numérique et cybersécurité, ainsi qu'en ce qui concerne la rénovation thermique des bâtiments.
La ministre des armées déclarait qu'à la fin avril votre administration était en mesure d'engager 370 millions d'euros au-delà des crédits initialement prévus par la LPM. Cela mérite d'être souligné, et je m'en réjouis. Que recouvrent ces 370 millions d'euros supplémentaires ? Quels types de projets avez-vous retenus ? Comment votre administration s'est-elle adaptée à la mise en œuvre du plan de relance, notamment sous l'angle de la territorialisation ?
La fidélisation de nos armées est une question fondamentale car, comme le dit Charles Ardant du Picq, « l'homme est l'instrument premier du combat ». Nos armées sont la cible d'une forte concurrence du secteur privé, notamment dans les domaines stratégiques que sont le numérique, la cyberdéfense, la maintenance et l'aéronautique. Jugez-vous suffisants et efficaces les outils dont dispose le ministère des armées pour retenir nos militaires et les empêcher de rejoindre le monde civil et ses rémunérations sans égales ?
Par ailleurs, on a pu lire que l'enveloppe budgétaire de la prime de lien au service, mise en place par l'armée de terre, s'était révélée insuffisante. Toutes les primes souhaitées n'ont pu être accordées. Est-il prévu d'augmenter cette enveloppe à destination des militaires du rang ? Comment la sélection des demandes est-elle opérée ?
Enfin, quels seront les effets majeurs de la crise sanitaire sur la masse salariale, les rémunérations et les embauches du ministère ?
Nous étions très fiers que le Labo BI, cette petite entité comprenant quatre ou cinq personnes, soit cité par la ministre dans son discours à Creil. Ce laboratoire a été créé pour analyser les données financières du ministère, par exemple pour connaître la somme dépensée par l'industrie de l'armement dans tel ou tel territoire. Il y a trois ans, nous avons embauché un jeune thésard data scientist, qui nous a proposé d'aller plus loin et de développer des systèmes d'information d'intelligence artificielle sur nos données financières, RH et autres. Puis la crise sanitaire nous a conduits à mettre cette compétence à la disposition du service de santé des armées et du ministère des solidarités et de la santé. Le système que vous avez nommé a été construit ; disponible sur le site du ministère, il permet de se tenir informé de toutes les publications scientifiques. Pendant la crise, toutes les publications sur les virus sont en accès libre mais, jusqu'à présent, aucun outil ne permettait aux chercheurs de trouver en quelques clics l'information dont ils ont besoin dans l'ensemble de ces documents. L'outil conçu par le Labo BI a été mis à la disposition de la communauté scientifique avec le soutien des chercheurs du SSA.
Nous entendons poursuivre en ce sens. J'ai coutume de dire que nous avons besoin, dans les métiers administratifs, d'innovation et de transformation numériques. En l'occurrence, il est question de l'intelligence artificielle, mais je pourrais parler aussi des robots que nous créons pour automatiser certaines tâches administratives, ce qui permet aux personnels de se consacrer aux missions les plus intéressantes. Nous avons pour ambition d'aller plus loin et d'augmenter notre capacité à piloter notre activité par la donnée.
Le plan de relance comporte effectivement plusieurs volets.
L'un est lié à l'activité aéronautique. Des commandes passées en fin d'année dernière, d'autres plus récemment, notamment celles d'hélicoptères Caracal, sont en avance sur les prévisions de la LPM et concourent pleinement à la poursuite de la production des chaînes industrielles. Je me suis rendue récemment dans l'usine de montage de moteurs d'hélicoptères qui venait de recevoir la commande de Caracal afin de mesurer le rejaillissement direct de cette commande sur la chaîne industrielle, car ce secteur a beaucoup souffert de la crise, en particulier de celle de l'aéronautique civile.
Un autre volet est consacré à la transition écologique. Nous avons obtenu 208 millions d'euros pour financer des travaux de réduction de la consommation d'énergie du parc immobilier. Tous les types de bâtiments sont concernés – tertiaires, militaires, logements et bâtiments d'hébergement. Conformément à la règle du plan de relance, ces projets ont été décidés au niveau des régions. Dans les préfectures de région, les délégués régionaux à l'accompagnement ont soutenu ces dossiers auprès des préfets. Je pourrai vous en fournir la représentation géographique. Les préfets ont veillé à la répartition équitable de l'enveloppe sur l'ensemble du territoire. Cela explique que certains très beaux projets en Île-de-France n'aient pas été retenus.
Le troisième volet, consacré au numérique, n'en est qu'à ses débuts. Si, pour la transition écologique, tous les projets ont déjà été décidés, ce n'est pas le cas pour la transition numérique. Sur les 400 millions d'euros prévus, 22 millions ont été attribués à des projets, dont nous n'avons récupéré que 1,2 million. En outre, 11 millions d'euros sont prévus pour le financement du cloud, autre sujet important pour la ministre.
Je ne vous cache pas que je n'arrive pas à reconstituer le montant annoncé. Je rappelle les chiffres : 207 millions pour l'écologie, 11 millions pour le cloud et 150 millions pour le volet compétitivité, que je connais moins bien, soit près de 370 millions. Le volet aéronautique, quant à lui, s'élève à 603 millions d'euros.
Je laisserai le soin à l'amiral Hello de vous répondre à propos de la prime de lien au service.
Comme la ministre vous l'a indiqué, nous sommes très mobilisés au sujet de la directive relative au temps de travail. Notre directrice des affaires juridiques fait le tour des instances européennes pour expliquer la position de la France. Nous avons convaincu au niveau interministériel, dans toutes les institutions de la République, de l'importance du sujet pour les armées. Nous n'attendons pas les deux pieds dans le même sabot : nous nous employons à convaincre toutes les instances concernées. La décision récente du Conseil d'État sur les « fadettes » va dans un sens favorable, puisqu'il reconnaît la possibilité, pour des raisons de souveraineté et de défense nationale, de ne pas prendre en compte des textes européens. C'est un élément positif, mais n'étant pas aussi bonne juriste que Claire Legras, je n'entrerai pas dans le détail.
Concernant la DETT, je suis allé à la Cour de justice européenne lors des plaidoiries nationales, à côté des représentants d'autres États. Notre délégation, très unie, était composée de la secrétaire générale aux affaires européennes, des représentants opérationnels, des représentants du secrétariat général et la directrice des affaires juridiques (DAJ). Les débats ont été tendus. Notre position est un peu isolée, notre modèle d'armée étant lui-même spécifique. Le sujet est complexe. Certaines personnes ne défendaient pas toujours la position de leur propre pays, ce qui montre la forte intégration européenne au sein de la Commission et le niveau de cohésion sur ces sujets. Pour l'anecdote, on nous a cité cette pensée du général de Gaulle rapportée dans Les Chênes qu'on abat… : « travailler sans cesse rend fou ». Au-delà de la caricature, les positions des grands pays sont diverses et certains d'entre eux ont décliné la directive. Nous nous sommes battus farouchement en faisant valoir de nombreux arguments juridiques et des principes constitutionnels comme la libre disposition de la force armée, point majeur que nous continuerons à affirmer.
Quant à l'effet de la DETT, aucun sur la loi de programmation militaire mais assurément sur le format des armées, s'il fallait passer à un régime de ce type, sachant que des exceptions seraient toujours possibles. L'avocat général a rappelé dans ses conclusions que l'on pourrait fournir des pourcentages. La gendarmerie avait calculé que même en ayant des dérogations assez larges, elle pourrait avoir besoin de 6 % à 10 % d'effectifs supplémentaires. Mais c'est surtout une question d'état d'esprit : nous sommes attachés à la disponibilité totale de nos personnels. Lorsqu'il le faut, ils ne comptent pas leur temps. Vous le savez, l'activité militaire est régie par des textes permettant de ménager des temps de repos entre les activités opérationnelles. Au demeurant, le devoir du chef est de savoir préserver sa ressource humaine. La directive irait gravement à l'encontre de la gestion collective de la force militaire. Par essence, nous agissons en groupe et instaurer une comptabilité individuelle de l'activité nous paraît totalement antinomique par rapport à l'organisation de nos forces armées nationales. Pour le reste, il s'agit d'un débat politique qui m'échappe complètement.
En ce qui concerne la fidélisation, les outils sont-ils suffisants ? Par définition, ils ne le sont jamais. On me dit régulièrement qu'il n'y a pas assez de ressources pour fidéliser les personnels. En l'occurrence, la prime de lien au service est un dispositif visant à améliorer la situation, non en arrosant largement en finances l'ensemble des personnels mais en ciblant les effets RH que l'on veut provoquer. Tel est le sens de la nouvelle politique de rémunération des militaires et de la PLS, qui en est le précurseur. Ce n'est pas une mesure catégorielle de revalorisation de la condition militaire : il s'agit d'un dispositif visant à cibler des effets RH dans les catégories et les métiers que nous voulons fidéliser. L'objectif n'est pas de fidéliser en masse : le coût d'une mesure de cet ordre serait inacceptable. L'arbitrage interministériel ne le tolérerait pas.
Certes, les « terriens » ont constaté que la PLS n'était pas suffisante, mais c'était au début d'un processus qui est monté progressivement en puissance sur trois ans et qui fonctionne désormais à plein régime, fort de 65 millions d'euros. Nous avons définitivement remplacé les primes préexistantes et donné plus de souplesse aux armées – directions et services – pour l'utiliser, moyennant des plafonds et des contingentements mais en laissant une grande liberté dans les métiers en tension. L'exercice est complexe dans la mesure où les métiers déficitaires dans une armée ne le sont pas nécessairement dans une autre. Les catégories de personnels déficitaires ne sont pas les mêmes dans les trois armées, dont les modèles sont différents en termes d'équilibres et de pyramides.
Nous aurons toujours besoin de plus, mais il faut savoir faire avec ce que l'on a. Les réponses ne se déclinent pas seulement en termes de rémunération. La politique d'accompagnement social a été évoquée en préambule. La reconversion est un élément d'attractivité essentiel. Garantir à des personnels exerçant des métiers opérationnels qu'on saura les reconvertir dans des métiers recherchés sur le marché du travail est rassurant pour quelqu'un qui doit faire une seconde carrière. Il n'est pas question de retenir tous les militaires durant toute leur vie professionnelle. Notre modèle vise une armée jeune, fondée sur la sélection pour des fonctions complexes, mettant en œuvre des outils coûteux et faisant risquer des vies. Nous serons donc toujours conduits à travailler en flux et nous ne retiendrons pas tout le monde. C'est une affaire de dosage. J'attends beaucoup de la nouvelle politique de rémunération des militaires, essentielle pour un modèle d'armée moderne, car elle sera à la fois lisible et simple à appréhender.
En termes de rémunérations, nous avons terminé les années 2019 et 2020 à l'équilibre. Nous avons connu des soubresauts en plus et en moins, mais nous avons su, direction des affaires financières et direction des ressources humaines, piloter étroitement les facteurs de dépense et de gain afin d'équilibrer la masse salariale. L'un des grands progrès des dernières années est d'avoir réussi à mieux répartir les rôles et à établir une programmation plus précise. Nous disposons d'outils numériques plus élaborés pour faire de la prévision et, en aval, assurer le pilotage des treize budgets opérationnels de programme (BOP) du titre 2.
En définitive, la crise sanitaire a eu peu d'effets sur la masse salariale – même au prix de grosses distorsions en dynamique – et en matière d'embauche. Si le premier confinement a entraîné la perte de 2 700 recrutements, nous avons eu près de 3 000 départs en moins, liés pour partie au contexte économique, pour partie à la prime de lien au service – qui, nous l'avions mesuré au premier trimestre, avait produit ses effets avant le début de la crise. Les choses s'équilibrent donc assez bien. Nous avons même terminé l'année avec 67 effectifs supplémentaires par rapport à notre cible, situation que nous allons corriger dans le schéma d'emploi de l'année suivante. Déjà, en 2019, nous avions terminé très légèrement en dessous de la cible – de l'ordre d'une cinquantaine d'effectifs.
Madame la secrétaire générale, le sous-effectif des sous-officiers est-il dû aux difficultés de fidélisation ou à d'autres causes ?
Vous l'avez très bien dit, il faut anticiper. Nous préparons nos armées à des conflits de haute intensité et le service de santé des armées doit suivre. Dans la LPM, avons-nous suffisamment anticipé dans ce domaine ? Un réajustement n'est-il pas souhaitable pour être à effectifs complets et suffisants au regard du temps nécessaire pour former un médecin ou une infirmière ?
Au début du premier confinement, les chefs d'état-major avaient confirmé que les écoles de formation avaient dû arrêter leurs activités et que les entraînements interarmes avaient été réduits d'environ deux tiers. Bien que l'enseignement à distance se soit développé dans les armées aussi, nous n'échapperons pas à un effet de sur-recrutement à la sortie du second confinement, qui se traduira par une saturation des parcours de formation. On lit dans l'« Actualisation stratégique 2021 » : « La préparation opérationnelle des forces a été globalement consolidée. Son renforcement doit toutefois être poursuivi, en raison de l'impact négatif qu'aura eu la pandémie de Covid-19 sur la formation et l'entraînement du personnel ». Quel bilan faites-vous de la formation de nos soldats et matelots dans les trois armées à l'issue du second confinement ? Comment envisagez-vous la mise en œuvre et le respect de la LPM en ce domaine dans les deux ou trois prochaines années ?
Pour les militaires, l'exigence de disponibilité implique de pouvoir être appelé à servir en tout temps et en tout lieu. Cette pleine disponibilité ainsi que l'exigence d'en compenser les contraintes sont à la base de la politique d'hébergement et de logement du ministère des armées. Ainsi, celui-ci assure la responsabilité de plus de 40 % du patrimoine immobilier de l'État et y consacre plus de 1 milliard d'euros par an. Néanmoins, la situation de l'hébergement et du logement des militaires est connue de tous et a été largement commentée. Un rapport de la commission des finances du Sénat sur le parc immobilier du ministère des armées pointait déjà, à l'été 2017, « un modèle à bout de souffle ».
C'est pourquoi le Gouvernement a fait de l'amélioration des conditions de vie des personnels militaires un axe fort et ambitieux de la programmation militaire pour les années 2019 à 2025, avec la volonté de bâtir et de déployer une loi de programmation miliaire à hauteur d'homme. Un large volet du plan d'accompagnement des familles est consacré à l'amélioration des conditions de logement et d'hébergement des militaires. Cinq mesures du plan famille participent de l'amélioration des conditions d'hébergement ou de logement des militaires. Pouvez-vous faire un nouvel état des lieux du plan famille en ce qui concerne le logement ?
En novembre dernier, Mme la secrétaire d'État chargée de la jeunesse et de l'engagement, Sarah El Haïry, était auditionnée par nos collègues sénateurs sur les moyens alloués au service national universel (SNU) depuis 2019 et annonçait un renforcement de l'enveloppe budgétaire : 31 millions d'euros supplémentaires par rapport au projet de loi de finances initial pour 2020. Dans le même temps, le Gouvernement confirmait vouloir s'adresser à près de 25 000 jeunes issus de tout le territoire pour l'édition 2021. Ces chiffres favorables tendent à vérifier que l'objectif d'une classe d'âge passée par le SNU est accessible. Les armées sont pleinement engagées dans cette réussite.
Pourriez-vous, à l'aune de l'exercice passé, indiquer le coût financier de l'engagement des armées dans le SNU ? Dans la perspective de la révision de la LPM, faut-il, pour le coût envisagé, y intégrer le financement du SNU ?
Dans mon rapport budgétaire sur l'armée de terre, j'ai évoqué les entrepôts de Moulins, menacés de fermeture à cause de difficultés d'homologation en matière de prévention des risques d'incendie. Le secrétariat général a fait des remarques en ce sens. Je souhaitais que le plan de rénovation en profondeur de cet entrepôt soit proposé au titre du plan de relance, mais le dossier n'était pas suffisamment mûr. Pensez-vous que, dans un délai assez court, une des trois solutions proposées par l'armée de terre pourrait être envisagée, sachant que le coût est estimé à environ 70 millions d'euros et que le programme 178, compte tenu du mur de maintien en condition opérationnelle qu'il assume déjà, ne pourra pas prendre en charge cette dépense ?
Concernant le SSA, la ministre l'a annoncé et cela figure dans mon budget : nous nous efforçons de tenir compte du retour d'expérience de la crise. Nous avons prévu la création de près de 100 postes sur les prochaines années, à la suite notamment du retex Covid et au titre de la cyberdéfense. Il existe, par ailleurs, des mesures d'attractivité propres au SSA. Le plan « Ségur de la santé » s'appliquera également aux personnels militaires. Il a été décidé d'augmenter l'enveloppe de crédits d'investissement du SSA de 160 millions d'euros pour la période de la LPM, car nous avons constaté que quelques capacités n'étaient pas en nombre suffisant. De plus, nous cherchons à obtenir des crédits du plan de relance pour financer des améliorations de nos installations hospitalières. Mais le volet santé du plan de relance n'a pas vraiment démarré et cela est traité par les agences régionales de santé (ARS). Nous sommes en contact avec les ARS dans lesquelles se trouvent nos hôpitaux pour savoir si quelques-uns de nos projets peuvent être financés par le plan de relance.
Nous avons participé dès l'origine au SNU. Pour le séjour de cohésion 2021, la cible initiale était de 25 000 jeunes volontaires. Pour le moment, il a été réalisé l'affectation de plus de 16 000 jeunes dans les centres SNU de métropole. Nous intervenons sur deux points. Fin 2019 et début 2020, nous avons défini le volet « défense » et l'avons testé avec les premiers jeunes. Ce faisant, nous mettons du matériel pédagogique à la disposition de tous les stages. En outre, nous intervenons pour la formation des formateurs, ce que le ministère sait faire. Ce n'est pas nous qui attribuons le budget, mais le coût total que j'avais annoncé en 2020, de l'ordre de 1 million d'euros par an, est plus limité que celui supporté par l'initiateur du projet, à savoir le ministère de l'éducation nationale, et je ne suis pas sûre qu'il augmente beaucoup. Le volet défense est déjà construit nous avons acheté tout le matériel et en attendons le déploiement ; nous n'y reviendrons pas avant cinq ou dix ans. Je ne suis pas non plus certaine que le coût de formation des formateurs augmente beaucoup.
Le premier confinement a provoqué une lame de fond qui a emporté beaucoup d'éléments des chaînes de recrutement et de formation. Les chaînes de recrutement ont redémarré plus tôt, parce que les structures étaient organisées pour continuer à communiquer avec les jeunes, même quand elles ne pouvaient pas les recevoir. La limite de l'exercice était le passage des examens de santé, puisqu'il était nécessaire de mobiliser du personnel du service de santé des armées qui l'était déjà par la gestion de la crise sanitaire. Mais cette chaîne a plutôt bien tenu le choc et nous avons terminé l'exercice budgétaire en respectant notre schéma d'emploi, même si nous avons fait moins de recrutements que prévu, parce que nous avons eu aussi moins de départs.
La difficulté pour nous et pour les armées s'est reportée sur les chaînes de formation. L'arrêt total, lors du premier confinement, a été suivi par une réorganisation. Tout ce qui pouvait être fait à distance l'a été, mais beaucoup de choses ne peuvent pas l'être. Pendant les différentes phases de confinement et déconfinement depuis la rentrée de septembre, nous avons eu à cœur d'assurer la continuité pédagogique dans les écoles de formation militaire, mais il est certain que certains exercices n'ont pu avoir lieu. Toutefois, le fait que l'on ait moins recruté que prévu l'an dernier donne un peu d'air à nos structures de formation. Parfois, les choses s'arrangent d'elles-mêmes… Je décris une vision générale, qui n'exclut pas l'existence de cas particuliers difficiles. Mais, même dans ces cas-là, dans la mesure où les formations ont été réorganisées en profondeur, certains programmes ont été revus pour tenir compte des contraintes.
Je vous ai déjà fourni des éléments chiffrés sur les montants consacrés à l'hébergement et au logement des militaires, mais j'irai plus loin. Pour l'outre-mer, notre effort est important, puisque nous visons l'objectif d'au moins 50 % de logements domaniaux dans chaque territoire. Un plan de construction de logements décliné sur les cinq ans de la loi de programmation militaire prévoit 20 logements neufs à Mayotte, 54 en Guyane – et des dizaines d'autres en Polynésie, aux Antilles et à La Réunion. Nous livrons des logements domaniaux à Djibouti, au Gabon et, pour 2024, au Sénégal. Nous avons mobilisé des crédits pour améliorer l'état technique du parc domanial, en attendant le contrat CEGELOG en métropole, et nous veillons toujours à définir une enveloppe pour l'outre-mer, où nous avons des difficultés. Le flux moyen annuel d'entretien et de maintien en condition du parc de logements est de 44 millions d'euros, auxquels s'ajoutent 11 millions d'euros d'entretien courant. Au titre du plan de relance, nous allons financer trente-sept chaudières collectives pour les logements en 2021.
Nous avons accompagné la restructuration des bureaux du logement, désormais placés sous la responsabilité du directeur des patrimoines, de la mémoire et des archives (DPMA), chargé de conduire la politique de logement du ministère. Il y a donc une continuité entre l'élaboration de cette politique et sa conduite sur le terrain. Les bureaux du logement sont au service du commandement, pour accompagner les militaires et déterminer ceux qui peuvent avoir accès au logement ou à l'hébergement. Ils ont trois missions : identifier les personnels ayant besoin d'un logement et appliquer les instructions définissant les critères de droit et les ordres de priorité ; permettre à ceux qui ont droit à un logement de le trouver, soit dans le parc domanial, soit par des réservations, soit grâce à un appui quand il doit être cherché dans le privé ; faire le lien avec tous les bailleurs privés puis, bientôt, notre prestataire CEGELOG pour surveiller et améliorer les prestations fournies à nos ressortissants. Nous sommes donc dans une phase de professionnalisation de la chaîne du logement, notamment en y installant des personnels stables, car il faut connaître le territoire où l'on travaille pour trouver les bonnes solutions.
Nous avons un nouveau système d'information du logement visant à offrir des services dématérialisés de gestion aux ressortissants, de la demande de logement au moment où l'on quitte celui-ci. Nous testons cette année les visites virtuelles : à l'instar des agences immobilières, nous avons mis à disposition des bureaux du logement les moyens d'organiser des visites sous cette forme. Surtout en période de crise sanitaire, il est difficile pour les militaires sur le point de rentrer d'outre-mer ou de l'étranger de venir en métropole ou de faire venir quelqu'un de leur famille pour visiter leur futur logement.
L'effectif de sous-officiers est bien la préoccupation majeure. En termes quantitatifs, il nous en manque plusieurs centaines. Rapporté aux 100 000 sous-officiers environ présents dans les armées, cela peut paraître secondaire, mais ce sont le plus souvent des sous-officiers très qualifiés, anciens, expérimentés dans des métiers pointus et déficitaires qui entrent en concurrence avec le secteur privé. C'est pourquoi je parlais de ciblage des populations en fonction des effets RH que l'on veut provoquer.
Nous rencontrons à la fois des difficultés de recrutement et de fidélisation. C'est un mal de notre société : on peine à trouver des jeunes très bien formés aux métiers techniques. Il y a peu d'appétence pour les métiers techniques. Il faut faire monter ces jeunes en compétence, s'assurer qu'ils ont le potentiel pour progresser et devenir des sous-officiers qualifiés. Ils ont souvent le potentiel pour devenir des sous-officiers, mais l'ont-ils pour exercer des métiers d'expertise dans les domaines du numérique, du cyber, du renseignement ? Même et peut-être surtout dans les armes de mêlée, l'activité est de plus en plus technique, notamment depuis l'introduction du système de synergie du contact renforcée par la polyvalence et l'infovalorisation (SCORPION) dans l'armée de terre.
Nous devons trouver un vivier compétent. S'il ne l'est pas, cela prend du temps. Nous devons recourir au déploiement de méthodes efficaces, comme la recréation des écoles techniques. Les écoles militaires de Bourges ont recréé une école technique d'apprentis pour l'armée de terre, à l'instar de l'école des mousses de la marine ou de Saint-Agnant pour l'armée de l'air. Nous profitons aussi de la politique du ministère, qui embauche chaque année en stage plus de 2 000 apprentis civils, pour en flécher quelques-uns vers les armées. L'année dernière, la marine a recruté parmi ses apprentis civils plusieurs dizaines de militaires préformés à des métiers et ayant du potentiel.
Cela n'en reste pas moins un sujet d'attention majeur, car il y a un effet de flux : quand je parle du manque de quelques centaines de sous-officiers, il s'agit du différentiel entre les entrants et les sortants. Nous y sommes attentifs. Si nous nous réjouissons d'atteindre nos cibles en termes d'effectifs, nous sommes attentifs à leur atteinte en termes qualitatifs.
Pour les entrepôts de Moulins, on s'est demandé si l'on pouvait financer les travaux au titre du plan de relance. Nous n'y sommes pas parvenus, mais cela a donné une impulsion pour construire un projet. Pour être éligible au plan de relance, il faut être capable d'engager les projets, c'est-à-dire de signer les contrats, avant la fin de 2021. Pour des projets d'infrastructure complexes, c'est très difficile. Nous allons donc chercher d'autres sources de financement. Le dossier est placé en haut de la pile.
Merci beaucoup, Madame la secrétaire générale, pour le temps que vous nous avez consacré et les réponses précises que vous avez fournies.
La séance est levée à dix-huit heures cinquante.