La réunion débute à quinze heures quarante cinq.
Cette deuxième table ronde de l'après-midi réunit M. Thierry Asselin, directeur politiques urbaines et sociales pour l'Union sociale pour l'Habitat, M. Jean-Paul Clément, directeur général d'Adoma et M. Gilles de Warren, directeur de l'exploitation chez CDC Habitat.
L'article 6 de l'ordonnance du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires impose aux personnes auditionnées par une commission d'enquête de prêter serment de dire la vérité, toute la vérité, rien que la vérité. Je vous invite donc à lever la main droite et à dire : « Je le jure ».
(MM. Thierry Asselin, Jean-Paul Clément et Gilles de Warren prêtent serment)
L'Union sociale pour l'Habitat (USH) regroupe cinq fédérations d'organismes HLM, qui représentent environ 600 organismes chargés du locatif social et de l'accession sociale à la propriété. Le locatif social représente la partie la plus connue de l'activité et un peu moins de cinq cent de nos organismes en sont chargés, regroupant environ cinq millions de logements qui accueillent près de dix millions de personnes, répartis sur toute la France.
L'accueil de ménages réfugiés est une mission historique du parc social. L'USH a mené une étude sur la contribution des bailleurs sociaux à la politique de logement des réfugiés, qui s'est intensifiée ces dernières années. Je parle des bénéficiaires de la protection internationale, car l'éligibilité au parc de logement social repose sur deux conditions préalables : être français ou muni d'un titre de séjour, et disposer de ressources inférieures à un certain plafond. L'étude de l'USH a montré que sur tous les territoires où l'État les a sollicités, les bailleurs ont répondu présents.
Malgré des difficultés liées à une inadéquation de notre offre à la demande en termes de qualité et de volumétrie, nous constatons que l'accueil des réfugiés sur le parc social se passe plutôt bien. Cette bonne insertion dans le logement requiert cependant que certaines conditions soient remplies. La question de l'accompagnement social au sens large revient régulièrement. En effet, il ne suffit pas d'avoir un logement ; l'enjeu principal pour ces ménages est l'accès à l'emploi, qui suppose une maîtrise suffisante de la langue ainsi qu'une formation adaptée. Par ailleurs, certains ménages disposent de ressources très modestes. Nous avons donc besoin de logements à faible niveau de quittances. Près de 70 % des demandes de logements portent sur des petites surfaces, de type T1 ou T2. De plus, ces ménages étant rarement motorisés, les logements doivent se situer près des bassins d'emploi et des transports en commun. Enfin, ils peuvent avoir besoin d'un accompagnement très complet, pour les aider dans leurs démarches ou leur apporter un soutien médical et sanitaire.
Ce portrait est finalement très proche de celui des autres ménages cherchant à accéder au parc social. Les petits logements sont demandés par 70 % des ménages réfugiés et 50 % des ménages du logement social au sens large. De même, ces ménages demandent des logements bien localisés, accessibles en termes de loyers et de niveau de charges, proches des transports et des bassins d'emploi. Or, nous ne disposons pas de tels logements en quantité suffisante dans le parc social. Les meilleures années, nous libérons 450 000 logements grâce aux livraisons de logements neufs et à la rotation dans le parc existant, mais on compte plus de 2,3 millions de demandeurs de logements sociaux. Au niveau national, le ratio est donc d'une offre pour cinq demandes. Dans les métropoles les plus tendues, où se situent les pôles d'emploi, ce ratio atteint une offre pour dix demandes, voire davantage pour les typologies de logement les plus demandées.
Le renforcement de la production de logements dans ces zones est un véritable enjeu sur lequel nous sommes mobilisés. L'objectif annoncé par le ministère du logement en début d'année, porte sur le financement de 250 000 nouveaux logements sociaux sur 2021 et 2022. C'est un véritable défi.
La principale activité des bailleurs sociaux reste la production de logements familiaux pour du locatif social ou pour l'accession sociale à la propriété avec des niveaux de prix de sortie maîtrisés. Au-delà de ces produits phares, les bailleurs produisent également un large panel de solutions plus spécialisées, comme des résidences sociales, des pensions de famille ou des foyers de travailleurs migrants. Cependant, pour répondre aux besoins croissants de logements sur le territoire, une véritable amplification des efforts de construction est nécessaire.
Anciennement Sonacotral, puis Sonacotra après les Accords d'Évian, Adoma est finalement renommée en 2007. Nous comptons 80 000 logements répartis sur 70 départements. Nos 3 000 collaborateurs œuvrent au quotidien sur les dispositifs d'accueil et d'hébergement des personnes les plus fragiles.
Notre action porte d'abord sur le logement accompagné. Nous avons entrepris de transformer nos foyers de travailleurs migrants (FTM) en résidences sociales ; nous en reste aujourd'hui 121 à traiter. En 2019, nous avons franchi un cap important puisque le nombre de chambres en FTM est désormais minoritaire, la majorité des foyers ayant été transformés. Nous comptons 425 résidences sociales, une cinquantaine de pensions de famille. Notre ambition est d'arriver à 80 pensions de famille et un foyer de jeunes travailleurs.
L'autre partie de notre activité concerne l'Hébergement, avec un grand H. C'est la confluence de l'accueil inconditionnel, qui relève des compétences du ministère de l'intérieur, et du dispositif national d'asile (DNA), qui relève principalement du ministère du logement et des affaires sociales. Nous tenons à cette lettre majuscule qui signifie qu'une personne déboutée du droit d'asile peut se retrouver dans des dispositifs d'accueil inconditionnel. Cette distinction, qui est compréhensible au niveau administratif, l'est moins en termes d'accueil et de relations humaines.
La particularité de nos équipes est de compter 70 nationalités différentes. 70 % des personnes que nous accueillons dans le logement accompagné sont de nationalité étrangère, et représentent 120 nationalités différentes, majoritairement non européennes.
Nous produisons 4 000 logements par an, dont 95 % correspondent à des petits studios entièrement aménagés, d'une surface de 20 à 34 m2. Nous produisons quelques T2 ou T3, à la demande d'un maire ou pour héberger des familles, mais c'est exceptionnel. L'accueil et l'accompagnement social sont intensifs : dans beaucoup de nos sites et dans nos pensions de famille, des équipes Adoma travaillent du lundi au samedi, et certains sites d'hébergement ne ferment jamais.
Chez Adoma, les personnes hébergées qui sortent de nos dispositifs sont accueillies dans nos propres logements accompagnés. Nous en accueillons 2 000, soit 15 % de l'objectif national porté par les ministres Mmes Wargon et Schiappa de proposer 14 000 places aux personnes les plus fragiles et notamment aux réfugiés.
Nous venons d'auditionner Emmaüs Solidarité, Elia et Coallia. Nous connaissons votre proximité avec ces acteurs. Ils ont insisté sur la dimension interministérielle de l'accueil des migrants. Vous conviendrez sans doute que les choses s'améliorent quand on travaille en bonne intelligence, la crise sanitaire l'a montré. Mais comment pérenniser cette interministérialité ? J'aimerais entendre votre avis sur ce point.
La crise sanitaire a en effet permis de progresser sur l'interministérialité. Auparavant, lorsque l'on se réunissait
pour parler de la crise de l'hébergement, il manquait les ministères du logement et de l'intérieur. Des progrès sont à constater aujourd'hui. Une circulaire très complète, sortie en février 2021, parle d'animation locale, au niveau national, départemental et régional. Je pense qu'il faut faire davantage au niveau départemental, qui constitue selon nous le niveau pertinent pour travailler en interaction sur les deux publics que sont les sortants du DNA et ceux relevant de l'accueil inconditionnel. Jean-Paul Clément a parlé de confluence, c'est le terme qui convient.
Comment vos actions s'organisent-elles avec les acteurs institutionnels au niveau local, départemental, régional et national ?
Au niveau national, nous nous réunissons régulièrement avec tous les acteurs et têtes de réseaux et Mme Wargon, à un rythme un peu moins fréquent qu'au cœur de la crise. La dernière réunion remonte à début septembre. Au niveau départemental, il s'agit de comités de pilotage et de plans départementaux ; nous interagissons avec les services intégrés de l'accueil et de l'orientation (SIAO) en ce qui concerne l'admission dans l'hébergement et l'accueil inconditionnel, et les directions territoriales de l'OFII en ce qui concerne l'asile. Ces contacts restent réguliers.
Ils sont très fluides. À partir du 20 mars 2020, et aujourd'hui encore, nous avons eu l'appui de la direction générale de la cohésion sociale, de la délégation interministérielle à l'hébergement et à l'accès au logement des personnes sans-abri ou mal-logées, et des différents ministères. Tous suivaient de près les opérations. Nous nous réunissions par vidéoconférence toutes les semaines.
Cette fluidité repose sur le dialogue entre les partenaires, qu'il s'agisse des services déconcentrés de l'État, des collectivités territoriales, ou des opérateurs. Quelques aspects réglementaires font cependant encore obstacle à la fluidité. Je parle des demandeurs d'asile devenus réfugiés. Ce point est très technique, mais il y a un problème avec certaines CAF concernant la neutralisation de l'aide aux demandeurs d'asile. Si un demandeur d'asile hébergé dans un Centre d'accueil de demandeurs d'asile (CADA) accède au statut de réfugié, il dispose de six mois pour partir. Nous lui cherchons un logement, dans nos structures ou auprès des bailleurs relevant de l'USH. Nous travaillons en même temps sur ses ressources, qui au mieux consisteront en un travail, au pire, proviendront du RSA. Mais lorsque nous instruisons un dossier RSA, l'aide aux demandeurs d'asile est prise en compte et ils n'ont donc pas un droit complet au RSA. Par conséquent, leurs ressources sont insuffisantes pour accéder au logement. Nous souhaitons apporter ce point à notre contribution, car il est essentiel d'y remédier.
Les ménages mixtes sont la deuxième raison pour laquelle des réfugiés qui ne devraient plus y être, demeurent dans les CADA. Un seul membre a le statut de réfugié et le ménage ne peut accéder au logement. La circulaire Valls de 2015 est traitée différemment selon les préfets, et je pense qu'il faut aller plus vite et plus loin dans la résolution de ces cas de régularisation. La question est la même pour les couples dont les enfants sont nés en France et qui disposent d'un droit de séjour, mais pas leurs parents. L'amélioration de ces deux freins à l'accès au logement représenterait un vrai axe de progrès.
Je vous remercie pour ces points techniques. Nous vivons dans nos circonscriptions les situations que vous expliquez, et nous manquons de solutions. Nous ferons apparaître dans nos recommandations ces points opérationnels.
Vous avez généralement vu ces dix dernières années une évolution dans le profil des migrants que vous accueillez, qui s'explique par la situation en Syrie, ou en Afghanistan par exemple. Les personnes cherchent à s'installer là où elles trouveront la paix, des écoles, un meilleur accès à leurs droits. On entend beaucoup parler d'appel d'air, et j'aimerais entendre votre appréciation du terrain de ces dix dernières années, bien que ma question soit très politique.
Nous avons entendu tout à l'heure la nécessité de disposer d'une offre de logement très social, c'est-à-dire peu coûteux pour les personnes qui les occupent. Mais se pose aussi la question de l'insalubrité. Les services de l'État font-ils des inspections des hôtels que vous mettez à disposition ? Si oui, à quelle fréquence et selon quels critères ? Y a-t-il des réunions avec ces services sur la question de l'insalubrité ? J'ai été saisi par plusieurs associations en Haute-Garonne au sujet d'un établissement. La sous-préfète de Muret m'a confirmé que l'établissement était en très mauvais état. Il ne correspond pas à la description que vous donniez. Pourquoi ouvre-t-on une structure à un endroit, et pourquoi en maintient-on à tout prix une autre ailleurs ?
Vous parlez sans doute de l'hébergement dédié aux réfugiés, cette description est assez éloignée de notre logement accompagné. Nos produits sont au contraire de très grande qualité. Je pense donc que vous faites allusion à la mise en place dans l'urgence d'un dispositif d'accueil pour héberger et mettre à l'abri des gens en grande souffrance. Nous avons participé à une consultation avec l'État pour mettre en place des hôtels sociaux. Il y a environ cinq ans, nous avons acquis 62 hôtels pour mettre à l'abri des personnes relevant du DNA et des personnes au titre de l'accueil inconditionnel. Les conditions de ces mises à l'abri ne sont peut-être pas toujours idylliques, j'en conviens.
Mme Marlène Schiappa, ministre chargée de la Citoyenneté, a rencontré nos équipes le 2 septembre à Arnage, où elles ont travaillé pour accueillir 450 Afghans, d'abord à Roissy, avant de les placer dans un hôtel social dans de bonnes conditions. Nous avons vu la joie de ces personnes. Maintenant qu'elles sont à l'abri, elles bénéficient de l'accompagnement d'une équipe jour et nuit.
Les conditions ne sont pas toujours optimales, mais nous sortons parfois des personnes de conditions innommables dans la rue et c'est un premier pas vers une insertion que nous souhaitons pérenne. Quand on donne une clé aux 2 000 personnes qui sortent du dispositif d'asile et entrent dans un logement social, c'est une vraie victoire ; nous réalisons 15 % des objectifs nationaux voulus par les deux ministres avec seulement 80 000 logements : quand on est déterminé, on peut réussir.
Dans cette commission d'enquête, je m'intéresse à l'action publique des services de l'État. Je ne vous demande pas de vous justifier, mais de m'indiquer quels sont les exigences ou les contrôles que les services de l'État effectuent sur le service que vous apportez à leur demande.
Non seulement ils effectuent des contrôles, mais ils viennent aussi mesurer. La Direction générale des étrangers en France, pilotée par un préfet et un directeur général, est très sourcilleuse. Leurs services mètrent les surfaces que nous annonçons, vérifient les conditions, nous font savoir de manière très explicite lorsqu'elles ne conviennent pas. Nous veillons naturellement à respecter les cahiers des charges.
Nous devons également rendre un rapport sur les CADA au préfet compétent, qui diligente ensuite une inspection et nous renvoie un mémoire, contradiction de notre propre rapport, normé, sur les équipements, les prestations, les surfaces, le prix.
Il existe deux types de contrôle sur les CADA : dans le cadre du dialogue de gestion, qui est régulier, à partir de l'examen du budget, sont abordés aussi les effectifs, la prestation de services, le projet établissement. Des inspections peuvent également avoir lieu de manière aléatoire, sur un thème précis, ou sur certains CADA, des inspections plus générales. Elles n'ont pas lieu à une fréquence annuelle.
Concernant le marché du programme d'accueil et d'hébergement des demandeurs d'asile (PRAHDA), il s'agissait du premier marché public pour une prestation de ce type. En plus du cahier des charges, un contrôle du service a été effectué au moment de la facturation, tant sur les dispositifs d'asile que sur ceux de l'accueil inconditionnel.
Vous avez évoqué les difficultés liées au logement des ménages mixtes. Y a-t-il d'autres points spécifiques, opérationnels ou génériques qui pourraient être améliorés, par des outils, des politiques publiques, peut-être par une dimension interministérielle plus poussée ?
Il est essentiel pour l'insertion de ces personnes de continuer à développer des cours de français, et de maintenir le quantum à un bon niveau. M. de Warren et moi avons beaucoup milité lors d'auditions parlementaires à ce sujet.
Deuxièmement, on ne s'insère bien que dans des pôles économiques. On ne peut espérer que ces personnes s'insèrent dans notre république en les isolant au fin fond de la campagne.
Enfin, il faut développer des résidences sociales. Nous avons des petits succès : nous avons évoqué les 15 % d'anciens demandeurs d'asile qui rentrent dans nos logements accompagnés. Des difficultés persistent néanmoins pour faire évoluer les personnes dans le logement social, parfois abusivement qualifié de logement très social, ce qui ne figure pas dans le code de la construction et de l'habitation (CCH). Il faut que tout le monde comprenne que les différences font la richesse de notre pays. Nous devons développer des résidences sociales pour favoriser l'insertion de ces personnes qui ont leur propre trajectoire, et qui doivent désormais apprendre une langue et un métier. Il faut d'abord leur assurer des conditions pour qu'ils se reconstruisent, avant de les insérer dans des dispositifs. Par ailleurs, ces résidences augmentent le quantum de logement social pour les communes carencées par rapport à l'article 55 de la loi SRU.
Les résidences sociales sont en effet tout à fait adaptées à l'augmentation de la proportion de personnes isolées parmi les réfugiés. Ces petits logements meublés conviennent très bien aux anciens demandeurs d'asile devenus réfugiés. Même s'ils ne les occupent que deux ans, ils font office de logement tremplin.
Il faut évoquer le sujet des réfugiés de moins de 25 ans qui n'ont pas les ressources suffisantes pour accéder au logement, comme les moins de 25 ans en général.
Enfin, je souhaite mentionner la question de l'accompagnement dans le logement. Les procédures d'obtention du statut de réfugié se sont aujourd'hui accélérées : les 30 % de demandeurs d'asile qui deviennent réfugiés obtiennent plus vite leur statut qu'il y a dix ans. Ils sortent de plus en plus vite des CADA. Ils ont d'autant plus besoin d'accompagnement une fois dans le logement, pour compléter leur formation en français, pour leur insertion professionnelle, pour les démarches administratives et pour accéder à leurs droits. Nous avons développé avec le soutien de l'État des services de suite : un travailleur social du CADA accompagne dans le logement les 2 000 personnes qui accèdent à nos logements. Ces 26 services de suite sont financés par les services de l'État, soit par le BOP 104, soit par le BOP 177, soit en recyclant des excédents de dispositifs. Le programme AGIR devrait se développer en 2022, ce qui est très bien, mais comment va-t-il se décliner de façon opérationnelle ? La force de nos services de suite, aujourd'hui, est qu'ils sont opérés par nos propres équipes, de manière internalisée, et très précise. Il faut gérer la transition. Ces services sont donc peut-être appelés à disparaître, au profit de plateformes départementales multi-opérateurs. J'espère que les résultats seront les mêmes que ceux de nos services de suite.
Je souscris à ce qui vient d'être dit. S'il ne fallait mentionner qu'un point, je dirais qu'il faut plus de logements en France, qui soient adaptés aux besoins des réfugiés et des autres demandeurs. Les moyens sont bien là, mais faute d'une mobilisation collective suffisante, les terrains pour construire manquent. La question du logement ne dépend pas uniquement de la volonté des bailleurs sociaux et des opérateurs, mais c'est un engagement collectif, impliquant aussi l'État, les collectivités locales, les citoyens. Il faut un discours politique extrêmement fort sur la nécessité de développer les logements et de les construire. Beaucoup de territoires restent à l'écart des mouvements de solidarité collective pour accueillir du logement social. M. François Rebsamen remet aujourd'hui ou demain ses conclusions au Premier Ministre sur les manières d'encourager les constructions. Mais il ne s'agit pas seulement de moyens techniques : le discours de solidarité nationale doit être porté par les élus locaux pour pousser la construction de logements sociaux, même auprès des populations qui y seraient récalcitrantes. C'est à l'État de donner un signal fort sur l'engagement collectif.
Les organismes HLM qui accueillent des ménages fragilisés nous remontent la nécessité d'un accompagnement adapté pour qu'ils aient accès aux droits, s'approprient le logement, trouvent des services. Beaucoup de dispositifs existent, mais ils manquent parfois de coordination. Par exemple, les bailleurs s'appuient sur le fonds national d'aide vers et dans le logement (FNAVDL), qui permet d'accueillir des ménages dits du logement d'abord dans le parc social et d'éviter les expulsions de ménages en difficulté. Tous les ans, il faut bricoler. L'année dernière le FNAVDL était financé par les astreintes DALO, puis on a rajouté les cotisations provenant des bailleurs sociaux, et les aides action logement. Ce fonds n'est pas pérenne, alors que les besoins sont importants et que les demandes de soutien formulées par les acteurs associatifs et les bailleurs dépassent largement l'enveloppe. Pourtant, à l'origine, il devait servir à l'accompagnement des ménages qui ont de vraies difficultés. Il faut trouver une cohérence entre les différents dispositifs d'accompagnement social, assurer des financements pérennes. Ce serait aussi un moyen de financer l'accès au logement à ces ménages et de faciliter leur intégration, sous réserve de disposer de logements en quantité et en qualité suffisante.
Merci pour ces éclairages et pour votre travail au quotidien. Tous les acteurs de l'hébergement ont fait entendre la nécessité de construire davantage qui devrait figurer parmi les préconisations. Mme Emmanuelle Wargon, ministre chargée du logement, a affirmé sa volonté sur ce sujet. Il faut maintenant que le budget qui va être discuté suive effectivement cette volonté.
La question de la rémunération des travailleurs sociaux au début et au cours de leur carrière a été soulevée. C'est un métier d'engagement, mais la reconnaissance, et pas seulement financière, se fait attendre. En tant que responsables d'organismes sociaux, j'aimerais votre point de vue à ce sujet.
Nous avons besoin de personnes professionnelles sur ce sujet. Concernant les bailleurs sociaux, Adoma emploie quelques travailleurs, mais beaucoup sont des travailleurs associatifs. Il faut des personnes en volume et en formation suffisants, avec par conséquent des conditions de rémunération adaptées. Les questions de logement reviennent aussi fréquemment. Ces travailleurs ont souvent des revenus modestes et n'ont pas non plus accès au logement dans les zones les plus tendues.
Le sujet a été remonté. Du côté des bailleurs sociaux, les personnes de proximité comme les gardiens ou le personnel d'accueil sont le public le plus fort en termes de volume. Ce personnel est en partie refacturé sur les charges du locataire, ce qui soulève la question du niveau des charges. Ce personnel fait le premier niveau de contact avec les locataires et peut assurer une forme d'interface dans des discussions parfois complexes. Nous devons donc leur assurer un soutien d'ensemble, qui passe par la rémunération mais aussi par d'autres aspects.
Il est légitime que tout le monde puisse espérer être mieux rémunéré, et nous tentons d'être attentifs sur ce point. Le salaire de base d'un intervenant social est d'environ 2 000 euros sur treize mois, auxquels il faut ajouter les primes d'intéressement, de participation et d'objectifs, avec la possibilité de travailler à 32 heures. Le télétravail a été organisé pour tous les services supports. Enfin, il existe une possibilité de devenir directeur d'hébergement adjoint, puis directeur d'hébergement, avec un rythme de progression des salaires significatif. Il y a actuellement un débat sur les rémunérations dans la fonction publique.
Je retiens l'idée de l'hébergement comme grande cause nationale. Il faut des moyens mais il sera moins coûteux d'accompagner les personnes vers l'autonomie que de les rattraper plus tard.
Je comprends aussi de notre discussion que, quelle que soit la personne que nous recevons sur notre territoire, elle doit bénéficier de cours de français dès le début, même si elle repart. La première table-ronde a aussi insisté sur ce sujet.
Vous avez aussi insisté sur l'accompagnement en formation et compétences dès l'arrivée. La CGT et la CFDT ont toujours fait des propositions dans ce sens. Nous devons mieux utiliser les moyens dont nous disposons pour identifier les besoins des personnes ni régularisables ni expulsables. C'est un vrai travail d'accompagnement, en plus de ce que vous faites déjà.
Vous avez tout le soutien de la représentation nationale. Dans cette commission, les réunions autour d'une table n'ont pas pour but de chercher un vainqueur et un vaincu. Avec vous, nous cherchons des solutions concises pour mieux travailler. J'espère que vous trouverez dans notre rapport l'empreinte de ce que vous avez dit aujourd'hui.
La réunion s'achève à seize heures et quarante-cinq minutes.