Commission des affaires européennes

Réunion du mercredi 27 janvier 2021 à 17h00

Résumé de la réunion

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  • britannique
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  • royaume-uni

La réunion

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COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES

Mercredi 27 janvier 2021

Présidence de Mme Sabine Thillaye, Présidente de la Commission

La séance est ouverte à 17 heures.

I. Audition de Son Exc. Edward Llewellyn, ambassadeur du Royaume-Uni en France

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Nous avons l'honneur aujourd'hui de pouvoir auditionner Son Excellence Edward Llewellyn, ambassadeur du Royaume-Uni en France, que je veux remercier très sincèrement d'avoir accepté notre invitation. Je souhaite également féliciter notre collègue et ami M. Jean-Louis Bourlanges pour son élection à présidence de la commission des Affaires étrangères.

Comme vous le savez, au terme d'une négociation historique, l'Union et le Royaume-Uni sont parvenus à un accord crucial pour notre avenir. Celui-ci est en effet une base solide pour assurer une continuité des relations entre les deux parties. Nous avons évité la rupture brutale, qui aurait été catastrophique pour les citoyens et les entreprises des deux côtés de la Manche. L'accord garantit notamment une libre circulation des biens et une circulation des personnes la plus fluide possible. Surtout, l'accord offre des règles de concurrence qui doivent éviter d'avoir à notre porte un partenaire aux pratiques considérées comme déloyales.

L'accord du 24 décembre est d'abord marquant par la diversité et le nombre de sujets qu'il recouvre, allant du climat à la coopération sanitaire, en passant par la sécurité intérieure, la pêche ou encore l'espace. Toutefois, des éléments importants manquent, notamment la politique de sécurité et de défense, pour laquelle le Royaume-Uni est un allié ancien et indispensable pour l'Union européenne, ou encore la politique de l'asile et des migrations.

J'aurai donc deux questions à vous poser, M. l'Ambassadeur. D'abord, puisque des éléments importants continuent de manquer, est-ce que le Royaume-Uni est favorable à la poursuite des discussions autour de certains sujets, en particulier la défense et l'asile ?

Ensuite, il faut bien sûr s'attarder sur la pêche, sujet longtemps bloquant dans les discussions. Nos collègues Jean-Pierre Pont et Pierre-Henri Dumont avaient produit un rapport en juin dernier qui en résumait les grands enjeux. L'accord garantit une stabilité jusqu'en 2026, avec une baisse de 25 % des quotas européens. Au terme de cette période de 5 ans-et-demi, l'accord prévoit une négociation annuelle entre les deux parties sur les niveaux des totaux admissibles de capture (TAC), comme ce qui existe avec la Norvège. D'où ma question : est-ce qu'il ne vaudrait mieux pas, pour la stabilité de l'activité des pêcheurs des deux côtés de la Manche, disposer d'un accord qui nous permette d'anticiper plus que sur une seule année ?

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Son Exc. Edward Llewellyn, ambassadeur du Royaume-Uni en France

Je souhaite d'abord rendre hommage à votre ancienne collègue, Mme Marielle de Sarnez, je sais combien elle a contribué à la vie politique ici à l'Assemblée nationale. Je vous rejoins en félicitant M. Jean-Louis Bourlanges pour son élection.

Sur l'accord du 24 décembre, je veux saluer les négociateurs des deux côtés. Il faut vraiment mesurer leur travail : pendant onze mois, en pleine pandémie, ils ont réussi à négocier un accord entre l'Union Européenne et son plus grand voisin en termes économiques, le Royaume-Uni. C'est un accord sans tarif, sans quotas, qui concerne 700 milliards d'euros de commerce international. L'accord ne régit pas seulement le commerce mais s'applique également aux transports, à la sécurité, à l'aviation. C'est une bonne nouvelle pour l'avenir de notre relation.

L'accord comporte plusieurs volets. Le Royaume-Uni va participer à plusieurs programmes, comme le programme scientifique Arise, le programme Copernicus ou le programme de recherche et de formation Euratom.

Sur la pêche, il y a aussi un accord qui implique une période d'adaptation de cinq ans et demi pour les pêcheurs des deux côtés de la Manche. Cet accord a d'ailleurs été accueilli favorablement par la ministre chargée de la mer et le secrétaire d'État chargé des affaires européennes.

Concernant nos ressortissants, il y a là aussi un accord pour l'avenir de nos concitoyens des deux côtés de la Manche. Il y a, à ce jour, plus de 4,8 millions de demandes pour le Settle status et 4,4 millions ont déjà été accordées, incluant plus de 150 000 ressortissants français. Les Britanniques auront également, en France, besoin d'un titre de séjour : plus de 85 000 Britanniques ont déjà fait leur demande pour un titre de résidence.

Pour le commerce à la frontière, depuis vingt-sept jours, nos entreprises s'adaptent aux nouvelles procédures pour exporter en France. Le trafic à Calais est fluide depuis le premier janvier, mais il y a de nouvelles procédures auxquelles les entreprises doivent s'adapter, accompagnées par leurs Gouvernements des deux côtés de la Manche.

Le sujet de la sécurité intérieur est traité dans l'accord. C'est une bonne nouvelle. L'accord permet, par exemple, de partager les informations relatives à l'ADN, aux passagers, et de coopérer par l'intermédiaire d'Eurojust et d'Europol. Cependant, une large partie de notre coopération dans le domaine de la sécurité a lieu au niveau bilatéral entre nos pays. Nos deux pays ont été malheureusement frappés fortement par le terrorisme ces dernières années et je sais que nos services travaillent main dans la main pour protéger nos citoyens.

Pour l'avenir, je voudrais insister sur deux points. Le premier concerne la faculté pour le Royaume-Uni à continuer à être un pays engagé, ouvert et ambitieux au niveau international. Nous présidons depuis le 1er janvier le G7 et nous souhaitons poursuivre le travail entrepris par la France lors de sa présidence en 2019, avec une grande continuité entre les deux. Nous serons particulièrement actifs sur les sujets du climat, de la santé, ou bien encore, sur la formation et l'éducation des jeunes filles dans le monde. Sur ces questions-là, nous sommes très alignés. Concernant la pandémie, le Royaume-Uni est massivement engagé dans le COVAX pour faciliter l'accès au vaccin pour les pays les plus pauvres du monde. Il a contribué déjà à hauteur de 550 millions de livres pour faciliter l'accès au vaccin pour les pays les plus pauvres du monde parce que nous pensons que nous pouvons vaincre le virus seulement si nous agissons ensemble.

En dernier lieu, le climat est un sujet extrêmement important dans lequel le Royaume-Uni démontre une ambition élevée. Pour répondre aux inquiétudes de certains selon lesquels le Royaume-Uni va baisser ses normes environnementales, je leur conseille d'observer l'action du Royaume-Uni dans ce domaine ces dernières années. Nous étions le premier pays, il y a deux ans, à légiférer en Europe pour atteindre la neutralité carbone d'ici 2050. Nous avons également annoncé il y a plusieurs mois un plan qui implique une baisse de 68 % des émissions de charbon d'ici 2030 et l'interdiction de la voiture à essence. Nous allons aussi présider la COP26 à Glasgow en novembre. Même dans les moments les plus compliqués des négociations, le Président de la République française et le Premier ministre britannique ont poursuivi leur action pour le climat au cours du Climate Ambition Summit à la mi-décembre et, il y a deux semaines, lors du One Planet Summit avec le Prince de Galles. Le Royaume-Uni et la France sont main dans la main pour protéger notre planète.

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Je vous remercie pour votre introduction. Vous avez raison de souligner que la crise n'a pas aidé à conclure les négociations. Il est toujours préférable de se voir en présentiel que par visioconférence. En outre, la complexité des négociations était due au caractère inédit de la sortie d'un État de l'Union européenne. Cette situation nécessite la construction d'un nouveau socle de confiance. Pour illustrer cela, dans le cadre des réunions interparlementaires de la COSAC, beaucoup d'États membres ont fait part de leur inquiétude quant à la suite de la relation avec le Royaume-Uni. Va-t-il tenir ses engagements ? Je crois que les auditions et les rencontres vont permettre de rassurer et jouer un rôle crucial pour les relations futures entre l'Union européenne et le Royaume-Uni.

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J'aimerais d'abord vous poser deux questions sur des sujets qui peuvent être sensibles. Le premier sujet concerne une décision qui a suscité l'incompréhension sur tous les bancs de cette assemblée : le refus d'accorder à l'ambassadeur de l'Union européenne à Londres le statut de mission diplomatique. Le Royaume-Uni deviendra le seul pays parmi 143 pays à refuser à l'ambassadeur ce statut. Il me semble que seuls les Etats-Unis, sous l'administration Trump, ont également procédé à ce refus. J'aimerais donc savoir si vous pouviez nous aider à comprendre cette décision.

Le second sujet est issu de la presse britannique. En effet, cette dernière se fait l'écho d'une décision du gouvernement britannique visant à réintégrer les citoyens européens à un système d'incitation financière au retour dans le pays d'origine. C'est un système qui s'appelle le Voluntary Returns Scheme et qui n'avait pas forcément vocation à l'origine à s'appliquer à des citoyens européens. Je voudrais comprendre s'il s'agit là d'un avant-goût de ce qui se passera pour les citoyens européens qui n'arriveraient pas à faire leurs démarches de Settled Status à temps pour fin juin et qui se retrouveraient de l'autre côté avec un statut en suspens malgré potentiellement des années au Royaume-Uni.

Deux questions ensuite sur le fond de l'accord. Sur le sujet de la sécurité, vous avez dit qu'il y aurait une coordination avec Europol et Eurojust, et notamment plusieurs échanges de données. Pouvez-vous nous décrire quelle va être la différence entre ce que l'accord décrit comme une coopération avec Europol et Eurojust et la situation actuelle ? Quelles seront les conséquences de cette potentielle différence sur la sécurité de nos concitoyens aussi bien au Royaume-Uni qu'en France ? Existe-t-il une différence de fond dans la façon dont nous allons échanger qui serait susceptible d'avoir un impact sur nos concitoyens ?

Enfin, je souhaiterais évoquer le sujet de la protection des données privées. Si je comprends bien, l'accord a été repoussé. Nous prolongeons de six mois le statut actuel et nous nous donnons donc six mois pour observer la politique qui sera mise en place du côté du Royaume‑Uni. Ensuite, nous négocierons une équivalence ou une coordination pour s'assurer que les données continueront de naviguer par-delà la Manche sans problème. Avez-vous des éléments à nous présenter sur le nouveau régime de protection des données privées envisagé par le Royaume‑Uni ? Est-il équivalent au régime européen ? Quel est son objectif ? Quelles vont être les étapes pour arriver à un accord de reconnaissance mutuelle des régimes de protection des données privées ?

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Tout d'abord, je souhaitais exprimer un regret, celui du retrait du Royaume-Uni du programme Erasmus. Je considère que c'est un recul pour tous les étudiants, qu'ils soient européens ou britanniques.

En second lieu, étant député du Calaisis, je dois vous dire que les premières semaines post-accord nous ont montré qu'il y avait des frictions et que ces frictions étaient majoritairement du côté britannique et en particulier auprès d'entreprises qui n'arrivaient pas à faire les démarches administratives. Certaines cargaisons arrivent avec plusieurs jours de retard, avec des transporteurs qui doivent attendre des heures et des heures pour avoir des autorisations auprès des services du Département de l'Environnement, de l'Alimentation et des Affaires rurales (DEFRA). Comment peut-on expliquer ces retards du côté britannique alors que nous sommes en présence de flux qui ne sont que partiels ? Nous sommes actuellement à environ 60 % des flux en raison de la période du mois de janvier mais aussi de la pandémie.

Le troisième point que je souhaitais évoquer concerne la déclaration conjointe qui a été adossée à l'accord. La question de la réunification familiale et notamment des mineurs isolés soulève des interrogations. Dans l'accord, il était indiqué que le Royaume-Uni allait engager très rapidement des négociations bilatérales avec les Etats concernés afin d'établir les modalités concernant l'asile pour les mineurs non accompagnés et les migrants irréguliers. La question se pose en particulier au sujet de la réunification familiale qui ne peut plus exister du fait de la sortie de « Dublin III » du Royaume‑Uni, à laquelle s'ajoute la déclaration faite par Chris Philp, Secrétaire d'État britannique à l'immigration, à la Chambre des communes, qui a expliqué que le Royaume-Uni n'offrirait plus de route légale pour les mineurs non accompagnés qui souhaiteraient rejoindre le sol anglais.

Conformément à la déclaration conjointe, où en êtes-vous dans vos discussions bilatérales avec la France et quelles échéances vous donnez-vous ?

Enfin, nous trouvons anormal que ce soit le port de Calais qui doive payer pour les contrôles sur les personnes et en particulier sur les migrants présents au port. Ceci représente un coût de 8 millions d'euros au port de Calais, et nous voudrions savoir si le Royaume-Uni est prêt à prendre en charge ces dépenses, qui sont en fait directement liées au Brexit et à la politique migratoire britannique.

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Les pêcheurs français des côtes de la Manche essuient une tempête économique considérable. Pour l'année 2020, la perte de chiffres d'affaires est évaluée jusqu'à 40 % pour certaines entreprises de pêche des Hauts-de-France, de Normandie et de Bretagne.

La première cause de ces chiffres est l'épidémie de Covid-19 dont nos voisins britanniques ne sont bien évidemment pas responsables. Nous mesurons même chaque jour le très lourd tribut payé à cette pandémie par votre pays et je tiens à souligner notre empathie à l'égard du Royaume-Uni. La deuxième cause tient à une baisse des captures consécutive notamment à la pression exercée par la pêche industrielle néerlandaise, qui après la mer du Nord fait porter son effort de pêche en Manche-Est. À cela se sont ajoutées les anticipations du Brexit puis son entrée en vigueur.

Malgré une négociation sur la pêche dont le résultat a été plutôt bien accueilli de notre côté, un point essentiel tarde à se régler dans les faits. Il s'agit de l'accès de nos navires aux eaux territoriales britanniques. Dans cette zone très poissonneuse relativement abritée des vents violents, certains de nos navires réalisent plus de 50 % de leur capture. Ainsi, au-delà de l'accord qui a été signé, quand nos pêcheurs pourront-ils opérer dans les eaux territoriales britanniques sans risque juridique ?

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Elue d'une ville jumelée avec Hastings, vous comprenez que je sois soucieuse de la préservation de nos liens d'amitié. La question de la pêche a été un point de négociation particulièrement sensible. En dépit de la divergence de nos positions initiales, nous avons chacun réussi à faire des concessions et à atteindre un point de consensus satisfaisant. Nous espérons que le Royaume-Uni restera ouvert à une renégociation juste et coopérative avec l'Union européenne à la fin du délai de cinq ans et demi prévu dans les accords.

Il reste cependant des failles thématiques en ce qui concerne notamment les indications géographiques, l'agriculture biologique, les contrôles phytosanitaires, la crainte de réglementation des pesticides et la sûreté alimentaire mais aussi le règlement général de protection des données (RGPD).

En outre, nous avons été très contrariés quand, le 26 décembre dernier, le Premier ministre britannique a évoqué sa volonté de sortir du programme Erasmus. Chaque année, 35 000 étudiants étaient accueillis dans votre pays et 17 000 Britanniques avaient l'opportunité d'étudier dans un autre pays européen. Nous regrettons bien évidemment cette décision puisqu'au-delà des séjours d'échange, l'accès aux études outre-Manche sera désormais plus coûteux pour les jeunes Européens.

Boris Johnson a également annoncé vouloir provisionner 100 millions de livres pour financer le départ de 35 000 étudiants chaque année au sein d'un programme appelé « Alan Turing ». Hormis les Nord-Irlandais qui seront pris en charge par la République d'Irlande, j'aimerais savoir quels étudiants seront concernés et quelles parts de financements seront désormais consacrées à l'envoi d'étudiants britanniques en France et dans les autres pays de l'Union.

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Si l'accord de retrait a pris en compte la situation des Britanniques résidant régulièrement en France – depuis plus ou moins de cinq années à la date du 31 décembre dernier – en leur octroyant une carte de séjour valable cinq ou dix ans, des milliers de vos compatriotes sont en difficulté car ils ne séjournent qu'une partie de l'année sur le sol français. Ces Britanniques disposant de résidences secondaires en France doivent maintenant demander un permis de séjour ou un visa long séjour ou pour séjourner entre 90 et 180 jours par an.

Des citoyens britanniques m'ont contactée à ce sujet, et souhaiteraient voir la situation évoluer. Ils proposent notamment la mise en place d'un régime de déplacement sans obligation de visa, d'une durée de 180 jours dont bénéficieraient les citoyens britanniques propriétaires dans notre pays. Bien entendu, il faudrait que cette proposition s'inscrive dans une logique de réciprocité mais il me semble que cette initiative se doit d'être discutée. Je souhaiterais connaître la position du Royaume-Uni sur ces sujets.

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Son Exc. Edward Llewellyn, ambassadeur du Royaume-Uni en France

Sur les questions portant sur la défense, la sécurité et la politique étrangère, le Royaume-Uni reste bien évidemment prêt à coopérer avec l'Union européenne et avec nos partenaires. Notre coopération en matière de défense s'articule autour de l'OTAN et du lien transatlantique, nous maintenons ce point de vue aujourd'hui en dehors de l'Union européenne tout comme lorsque nous en étions membres : le Royaume-Uni va rester un pays pleinement engagé au cœur de l'OTAN. Les premiers contacts entre la nouvelle administration américaine et l'OTAN ont souligné l'importance de ces liens transatlantiques qui pour nous restent fondamentaux.

En ce qui concerne la France et le Royaume-Uni, puissances militaires majeures en l'Europe, disposant toutes deux de la force nucléaire, notre coopération est encadrée par les accords de Lancaster House. Pour répondre à la question du niveau de confiance que peut avoir la France envers le Royaume-Uni, je voudrais évoquer ce que nous faisons à vos côtés dans le Sahel. Il y a notamment trois hélicoptères de la Royal Air Force qui amènent les militaires Français sur la zone de combat dans cette zone. Il s'agit seulement d'un exemple, mais il montre comment mon pays va continuer à contribuer à notre sécurité et à vous soutenir quand vous luttez pour la sécurité de votre continent, tout comme vous allez nous soutenir quand nous faisons la même chose.

À cet égard, nous pensons que la coordination entre nos deux pays fonctionne et nous allons continuer à la renforcer car il s'agit d'un point crucial dans nos relations. Ce sont des sujets qui ont toujours lié nos pays : vous connaissez la contribution du Royaume-Uni au rétablissement de la liberté et de la sécurité sur ce continent pendant les deux guerres mondiales ; tout comme je me souviens très bien de la visite de Mme Marielle de Sarnez aux côtés du Président de la République et du ministre de l'Europe et des Affaires étrangères à mon ambassade pour exprimer votre solidarité avec le Royaume-Uni frappé par l'attentat de Manchester.

Nous continuerons aussi à travailler ensemble en matière de politique étrangère, par exemple au sein de l'OTAN où le Royaume-Uni a défendu l'accord sur l'Iran avec la France et l'Allemagne ces quatre dernières années. Hier soir, plusieurs minutes après la confirmation de la nomination d'Antony Blinken au poste de secrétaire d'État américain, nous étions à vos côtés avec les Américains et nos partenaires du G7 pour déposer une déclaration au sujet de M. Navalny en Russie. Tout cela montre que cette coopération continue et va continuer.

En ce qui concerne la pêche, vous avez évoqué les négociations qui vont avoir lieu chaque année après la fin de la période d'adaptation de cinq années et demie. Il est en effet très important qu'une fois passée cette période d'adaptation, nous ayons une négociation chaque année. Il s'agit d'une procédure normale pour un pays côtier indépendant. Je suppose qu'au sein de l'Union européenne vous avez également ce précédent avec d'autres pays comme la Norvège. Cette certitude que donne l'accord est évidemment une très bonne nouvelle, et je pense que cela a également été salué par le Ministre français.

Concernant les questions qui ont été posées par M. Holroyd, par exemple sur la délégation de l'Union européenne à Londres, je tiens à souligner que le Royaume-Uni a bien évidemment accordé tous les privilèges et immunités qui lui seront nécessaires pour accomplir ses fonctions, et les discussions à ce sujet sont en cours.

En ce qui concerne les ressortissants français, comme les ressortissants des autres Etats-membres, ils sont protégés par l'accord de retrait dès lors qu'ils étaient au Royaume-Uni avant le 31 décembre 2020, comme le sont d'ailleurs les ressortissants britanniques dans l'Union européenne.

Le Royaume-Uni n'est plus membre d'Europol et d'Eurojust, mais la coopération policière et judiciaire va se poursuivre, notamment par l'intermédiaire d'Interpol. D'ailleurs, je rappelle qu'avant 2015, mon pays n'était pas membre d'Europol et pourtant, la coopération avec les Etats-membres fonctionnait bien.

Concernant Erasmus, le Royaume-Uni a décidé de créer un nouveau programme qui aidera les étudiants britanniques à étudier en Europe mais aussi dans le monde. C'est un programme global doté de 100 millions de Livres qui bénéficiera à 35 000 étudiants, lesquels ne seront pas forcément les plus favorisés, comme c'était le cas avant. Le programme devrait être opérationnel à la rentrée 2021.

Il est vrai qu'il y a des frictions à la frontière franco-britannique. Les entreprises doivent en effet s'habituer à de nouvelles procédures, ce qui prend du temps et occasionne des retards. Toutefois, ces retards sont également dus à l'exigence de la France que les routiers soient testés pour le Covid-19 avant leur départ pour le continent. Cette exigence sanitaire, qui n'était pas prévue initialement, s'est ajoutée aux formalités douanières.

S'agissant de l'asile et de l'immigration, nous poursuivons nos discussions bilatérales avec la France. C'est un défi auquel nos deux pays sont confrontés et la coopération va se poursuivre afin d'adapter nos procédures et nos actions aux nouvelles pratiques des passeurs.

Enfin, le gouvernement britannique a longuement discuté avec la Commission européenne de la zone des 6-12 miles et ils se sont accordés sur la méthodologie pour l'octroi des certificats aux pêcheurs européens. Je ne peux pas vous dire quand ils seront concrètement octroyés mais le gouvernement le fera dès que possible.

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S'agissant de la pêche, il est certain que les discussions vont se poursuivre pendant cinq ans pour l'après-2026 mais il y a des problèmes plus immédiats. Sur la zone des 6-12 miles, alors que c'est la côte qui, traditionnellement, en constitue le point de départ. Le Royaume-Uni a fait le choix de prendre la ligne de base, ce qui étend la zone à 20 miles. Un autre problème est celui de l'accès à la zone économique exclusive. Le Royaume-Uni prend en compte l'antériorité des bateaux sur la période 2012-2016 mais si l'un de ces bateaux a été remplacé par un bateau neuf, celui-ci n'y a plus accès. De même pour les fileyeurs qui se sont diversifiés dans les crustacés depuis 2017. Enfin, il y a le problème de l'étroitesse du détroit qui a pour conséquence que les pêcheurs se retrouvent très rapidement dans les eaux britanniques, auxquelles ils devraient avoir accès ne serait-ce que pour se mettre à l'abri en cas de tempête.

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J'ai pour ma part trois questions : comment s'organise la campagne de vaccination contre le covid-19 dans les grandes villes britanniques ? Quelle est votre analyse de la volonté d'indépendance de l'Écosse et des possibilités d'organisation d'un référendum compte tenu de l'opposition de Boris Johnson ? Enfin, quel avenir voyez-vous à l'Eurostar compte tenu de la situation très difficile dans laquelle se trouve la société qui l'exploite ?

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. Cette année 2021 marque le début d'une nouvelle relation entre l'Union et le Royaume-Uni. Je ne doute pas que le Royaume-Uni reste un voisin et un ami. Je vous exprime mon soutien face à la crise sanitaire. Cette pandémie nous a fait comprendre la nécessité d'une réponse européenne coordonnée. Si le Royaume-Uni est le premier État occidental à avoir autorisé un vaccin contre la covid-19, c'est aussi grâce aux dispositions du droit européen durant la période de transition. A l'heure où de nombreux citoyens de l'Union européenne souhaitent se voir construire une Europe de la santé, comment voyez-vous la suite pour l'avenir en termes de coopération sanitaire ?

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Je voudrais également revenir sur la pêche dont la filière est impactée par le Brexit, même si nous avons trouvé un accord satisfaisant. Comment vont être négociés les quotas de stocks partagés, à l'issue de la période de cinq ans ? Les pêcheurs sont inquiets car ils ont besoin d'avoir une visibilité à moyen terme. En cas de manquements de la part du Royaume-Uni, l'Union européenne peut adopter des mesures de rétorsion sous la forme par exemple de droits de douane sur les produits de la pêche britanniques.

Par ailleurs, le Royaume-Uni refuse de reconnaître la qualité d'ambassadeur au représentant de l'Union à Londres. Il semblerait que ce soit le seul État au monde dans ce cas. Je suis donc très étonnée, quel est votre avis là-dessus ?

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Quel est l'état de l'opinion publique devant les chiffres dramatiques de l'épidémie au Royaume-Uni ?

Pouvez-vous également nous faire un point sur les relations entre Londres et Edimbourg ? Je rejoins également l'étonnement exprimé par mes collègues sur la question de la représentation de l'Union auprès du Royaume-Uni.

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Boris Johnson a dévoilé en novembre 2020 les grandes lignes de la stratégie de défense du Royaume-Uni : il parle du « biggest defense spending boost since Cold War ». Comment renforcer la coopération franco-britannique en matière de défense, prévue par le traité de Lancaster House, qui pourrait d'ailleurs être révisé ?

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Son Exc. Edward Llewellyn, ambassadeur du Royaume-Uni en France

Merci pour ces messages de soutien et de solidarité face à la crise sanitaire.

En ce qui concerne la pêche, la première question qui m'a été posée était très technique. Je pourrais sans doute mieux vous répondre par écrit. Le Royaume-Uni et l'Union se sont accordés sur la méthodologie pour mettre en œuvre les dispositions du traité relatives à la pêche. Nous avons eu la nouvelle hier soir de la mise en place d'un système transitoire qui a été saluée par la ministre de la mer.

Notre campagne de vaccination est en effet d'ampleur inédite. Elle a commencé le 8 décembre 2020. Nous avons vacciné 7 064 387 personnes (administration d'une première dose). Nous vaccinons environ 250 personnes par minute. Nous avons vacciné environ 80 % de la population âgée de plus de 80 ans. Nous avons comme objectif de vacciner les quatre catégories de personnes les plus vulnérables, soit environ 15 millions de personnes, d'ici la mi‑février. Pour y parvenir nous avons plus de mille médecins généralistes, plus de 200 centres hospitaliers, et 6 centres « géants » de vaccination. Nous avons aussi mobilisé des lieux qui n'étaient pas destinés à cela, comme la cathédrale de Salisbury, qui s'est transformée en centre de vaccination. L'opération est commandée par un militaire.

Concernant l'Écosse, la position du Gouvernement britannique est claire : un référendum s'est tenu il y plus de 6 ans et il a donné un résultat clair en faveur du maintien de l'Écosse au sein du Royaume-Uni. Par exemple, le développement du vaccin à Oxford et la campagne de vaccination engagée, nous démontrent que le Royaume-Uni est plus puissant lorsque les quatre nations sont unies et coopèrent.

La coopération entre le Royaume-Uni et l'Union européenne ainsi que la coopération internationale pour la vaccination sont importantes pour nous car elles peuvent nous aider à affronter cette crise. La coopération internationale pour le vaccin, les masques et les autres moyens de protection doit être au cœur de nos efforts. C'est pourquoi, le Royaume‑Uni l'a inscrit à l'ordre du jour du G7. Il faut que les pays les plus pauvres aient accès au vaccin, pour mettre fin à cette pandémie.

Pour ce qui est de la délégation de la Commission européenne à Londres, le Royaume-Uni lui a fourni tous les éléments nécessaires pour qu'elle puisse travailler de manière optimale.

Concernant la pêche, tout est dans l'accord. Pour nous, c'est une bonne nouvelle que l'accord ait été trouvé. La Manche a toujours été une zone de pêche paisible, comme l'a souligné la Ministre française de la Mer en décembre, et ce sera toujours le cas à l'avenir.

L'opinion publique au Royaume-Uni réagit de la même manière qu'en France. Les citoyens veulent renouer avec une vie « normale » et en même temps les sondages montrent qu'ils comprennent le sens des mesures prises par le Gouvernement, même si elles sont strictes. Elles sont nécessaires pour préserver la santé publique et freiner la propagation du virus ainsi que des nouveaux variants.

Concernant la défense, le Premier Ministre annonce une augmentation importante de notre budget, la plus importante depuis la guerre froide. Elle tient compte de la situation de notre continent. Nous allons investir dans le développement de nos capacités militaires mais surtout sur leur modernisation. Nous modernisons par exemple notre commandement pour le secteur spatial. De même, nous développons une nouvelle organisation pour lutter contre les attaques liées à la cyber sécurité.

Par ailleurs, nous allons renforcer nos capacités maritimes. Nous avons toujours été un pays maritime et la Royal Navy a toujours joué un rôle fondamental pour garantir notre sécurité. Nous pensons qu'il est important de garantir la liberté de navigation au niveau mondial. Nous avons maintenant de nouveaux porte-avions. Notre porte-avion Queen Elizabeth sera déployé pour la première fois cet été, il traversera la Méditerranée avant de rejoindre l'océan Indien. Je pense que ce sera l'occasion d'une coopération avec la France. Nous allons également acquérir et construire treize nouvelles frégates pour la Royal Navy ce qui est une augmentation conséquente de notre flotte.

Enfin pour ce qui est d'Eurostar, nous avons conscience que le flux de passagers est réduit et que la situation économique de l'entreprise est difficile. Notre Gouvernement a des contacts réguliers avec Eurostar à ce sujet.

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C'est vrai que nous ne pourrons juger les apports de cet accord que dans quelques années. Il reste encore des détails à négocier. Je pense qu'il y a une volonté partagée d'aboutir à un résultat satisfaisant. Celui-ci sera nécessairement moins satisfaisant que le maintien du Royaume-Uni dans l'Union européenne mais nous comprenons qu'une décision a été prise sur ce point. À présent, il est nécessaire d'aboutir au meilleur résultat possible car le Royaume-Uni reste un État européen.

Monsieur l'Ambassadeur, nous vous remercions pour votre disponibilité à répondre à nos questions.

II. Examen de textes soumis à l'Assemblée nationale en application de l'article 88-4 de la Constitution

Sur le rapport de la Présidente Sabine Thillaye, la Commission a examiné des textes soumis à l'Assemblée nationale en application de l'article 88-4 de la Constitution.

Textes actés

Aucune observation n'ayant été formulée, la Commission a pris acte des textes suivants :

 Institutions

- Décision du Conseil portant nomination d'un membre de la Cour des comptes ( 13541/1/20 REV 1 - E 15429).

- Décision du Conseil portant remplacement d'un membre du comité prévu à l'article 255 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ( 13679/20 LIMITE - E 15430).

 Pêche

- Décision du Conseil autorisant l'ouverture des négociations avec le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord et avec le Royaume de Norvège en vue de la conclusion d'un accord de pêche ( 13291/20 - E 15444).

 Politique économique, budgétaire et monétaire

- Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil établissant la réserve d'ajustement au Brexit ( COM(2020) 854 final LIMITE - E 15442).

 Transports, politique spatiale

- Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (CEE) nº 95/93 du Conseil en ce qui concerne l'allègement temporaire des règles d'utilisation des créneaux horaires dans les aéroports de la Communauté en raison de la pandémie de COVID-19 ( COM(2020) 818 final - E 15441).

- Proposition de décision du Conseil relative à la position à prendre au nom de l'Union européenne, au sein de la commission mixte UEPTC établie par la convention du 20 mai 1987 relative à un régime de transit commun, en ce qui concerne les amendements à apporter à ladite convention ( COM(2021) 6 final - E 15443).

Textes actés de manière tacite

La Commission a également pris acte de la levée tacite de la réserve parlementaire, du fait du calendrier des travaux du Conseil, pour les textes suivants :

 Commerce extérieur

- Proposition de Décision du Conseil concernant la position à prendre, au nom de l'Union, au sein du comité mixte institué par l'accord euro-méditerranéen relatif aux services aériens entre la Communauté européenne et ses États membres, d'une part, et le Royaume du Maroc, d'autre part ( COM(2020) 794 final - E 15396).

III. Examen de textes soumis à l'Assemblée nationale en application de l'article 88-6 de la Constitution

Sur le rapport de la Présidente Sabine Thillaye, la Commission a déclaré conformes au principe de subsidiarité les textes suivants transmis à l'Assemblée nationale en application de l'article 88-6 de la Constitution :

Energie

- Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil concernant des orientations pour les infrastructures énergétiques transeuropéennes, et abrogeant le règlement (UE) n° 347/2013 (COM(2020) 824 final - E 15412).

Espace de liberté de sécurité et de justice

- Proposition de règlement du parlement européen et du conseil relatif à un système de communication informatisé pour les procédures civiles et pénales transfrontières (système e-CODEX), et modifiant le règlement (UE) 2018/1726 ( COM(2020) 712 final - E 15367).

Politique économique, budgétaire et monétaire

- Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil établissant la réserve d'ajustement au Brexit ( COM(2020) 854 final LIMITE - E 15442).

Transports, politique spatiale

- Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (CEE) nº 95/93 du Conseil en ce qui concerne l'allègement temporaire des règles d'utilisation des créneaux horaires dans les aéroports de la Communauté en raison de la pandémie de COVID-19 ( COM(2020) 818 final - E 15441).

La séance est levée à 18 h 40.

Membres présents ou excusés

Présents. – Mme Aude Bono-Vandorme, M. André Chassaigne, Mme Marguerite Deprez-Audebert, M. Pierre-Henri Dumont, M. Michel Herbillon, M. Alexandre Holroyd, M. Christophe Jerretie, Mme Chantal Jourdan, M. Jean-Claude Leclabart, M. Patrick Loiseau, M. Thierry Michels, M. Jean-Pierre Pont, M. Didier Quentin, M. Benoit Simian, Mme Liliana Tanguy, Mme Sabine Thillaye

Excusés. – Mme Frédérique Dumas, Mme Carole Grandjean, Mme Constance Le Grip, M. Christophe Naegelen

Assistaient également à la réunion. - M. Bertrand Bouyx, M. Brahim Hammouche, Mme Marie Lebec, M. Jacques Marilossian, Mme Natalia Pouzyreff, M. Gwendal Rouillard, M. Robert Therry, Mme Laurence Vanceunebrock, Mme Annie Vidal