Groupe de travail sur la démocratie numérique et les nouvelles formes de participation citoyenne

Réunion du mardi 3 avril 2018 à 9h00

Résumé de la réunion

Les mots clés de cette réunion

  • accessibilité
  • accessible
  • comptabilité
  • locale
  • participation
  • réflexion
  • technique
  • transparence

La réunion

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Mardi 3 avril 2018

La séance est ouverte à neuf heures cinq.

Présidence de Mme Cécile Untermaier

Le groupe de travail sur la démocratie numérique et les nouvelles formes de participation citoyenne tient une table ronde sur « la dimension participative dans l'élaboration et le vote du budget » réunissant des représentants du ministère de l'action et des comptes publics, avec M. Renaud Duplay, sous-directeur de la première sous-direction de la Direction du budget, M. Pierre Chavy, chef du bureau des lois de finances de la Direction du budget, et M. Olivier Rouseau, sous-directeur de la comptabilité de l'État, à la Direction générale des Finances publiques.

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Nous ouvrons ce matin la troisième réunion consacrée au deuxième champ de réflexion assigné par le président de l'Assemblée nationale à notre groupe de travail sur la démocratie numérique et la participation citoyenne, à savoir les budgets participatifs. Nos échanges s'organiseront autour de deux axes : d'une part, la transparence, l'intelligibilité et la lisibilité des données, en particulier des données budgétaires ; d'autre part, la participation citoyenne et les budgets participatifs.

Sur ce dernier point, des exemples existent déjà en France, au niveau local. Nous avons pour ambition de réfléchir à un budget participatif à l'échelle nationale. À ce titre, les conseils de nos invités nous serons précieux, puisque nous recevons aujourd'hui des représentants du ministère de l'action et des comptes publics : M. Renaud Duplay, sous-directeur de la première sous-direction de la Direction du budget ; M. Pierre Chavy, chef du bureau des lois de finances de la Direction du budget ; M. Olivier Rouseau, sous-directeur de la comptabilité de l'État, à la Direction générale des Finances publiques.

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Renaud Duplay, sous-directeur de la première sous-direction de la Direction du budget au ministère de l'action et des comptes publics

Chargé de la première sous-direction du budget, j'ai la responsabilité de la coordination, de la préparation et du suivi du budget de l'État dans son ensemble, j'ai notamment dans mes attributions la question de la bonne information de la représentation nationale, mais également des citoyens. Les questions que vous soulevez sont donc au coeur de nos réflexions, notamment au regard d'une récente publication internationale, sur laquelle je reviendrai en conclusion de mon propos.

Je lie pour ma part les deux axes que vous avez tracés, car il n'y a pas de participation sans une information de qualité, laquelle constitue la première étape de la participation de nos concitoyens aux questions budgétaires.

Cette information existe, et il est admis par toutes les organisations internationales et par l'ensemble de nos pairs que la France est un pays particulièrement transparent en matière de finances publiques. À ce titre la réforme de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF) engagée dès 2001 a transformé et décuplé tant la qualité que la quantité de l'information offerte à nos concitoyens.

Dans quelques semaines, nous publierons en ligne les rapports annuels de performance, c'est-à-dire les comptes rendus d'exécution dans lesquels le Gouvernement rend des comptes sur l'exécution budgétaire, selon une grille de lecture qui s'attache aux performances, aux objectifs stratégiques et à la description analytique de l'emploi des fonds publics : qu'est-ce qui a été dépensé et pourquoi ? Il s'agit de justifier, le cas échéant, les écarts par rapport au budget initial et les évolutions budgétaires de l'année écoulée.

L'ensemble de cette documentation fera plus de cinq mille pages, ce qui pose d'emblée un problème de lisibilité. Transparence ne signifie pas accessibilité et, si nous sommes très transparents, nous sommes sans doute trop peu accessibles, ne serait-ce que parce que ces données, publiées en ligne, le sont dans un format proche d'un format papier : elles ne sont donc pas téléchargeables et immédiatement réutilisables.

Sur le fond ensuite, le manque d'accessibilité provient de l'utilisation d'un discours très technique, écrit dans cet inimitable style administratif qui est le nôtre. Nous avons là assurément de fortes marges de progrès, pas nécessairement dans ces documents qui ont vocation à perdurer parce qu'ils fournissent une information complète, mais sans doute dans d'autres, plus accessibles, plus clairs et qui rendent plus concrètes pour nos concitoyens les données que nous manipulons tous les jours. C'est ainsi que Gérald Darmanin a souhaité publier au mois de septembre un petit livret consacré aux mesures prises par le Gouvernement en faveur du pouvoir d'achat. C'est un exemple de ce qu'il est possible de faire, dès lors que l'on souhaite rendre plus lisibles les données budgétaires.

Quant à associer davantage nos concitoyens à l'élaboration du budget, il y a beaucoup d'exemples de budgets participatifs en France et dans le monde. Or, qu'ils relèvent de l'État ou des collectivités, ils ont tous en commun une forte dimension locale, le fait de porter sur des sujets de proximité pour lesquels le regard des concitoyens est capital, car ces derniers sont sans doute les mieux à même de dire ce qui, dans leur fréquentation quotidienne du service public leur pose problème.

Si on pose le principe d'une association plus active de nos concitoyens au budget de l'État, il me semble que l'on peut ébaucher deux pistes de travail possibles, pas nécessairement exclusives l'une de l'autre.

Il me semble difficile d'ouvrir à la participation citoyenne les choix stratégiques du budget, dès lors qu'ils sont avant tout les vôtres, à vous parlementaires. Le moment du choix pour les citoyens est celui des élections, lorsqu'ils se choisissent des représentants, élus de la nation qui, lors du débat budgétaire annuel discuteront ces choix stratégiques avec le Gouvernement.

On peut, cela étant, admettre qu'il est possible de mieux associer les citoyens au travers de leur consultation, qui fournira des informations utiles au Gouvernement dans la préparation du budget, mais également aux parlementaire, au moment du vote.

La seconde piste de progression est la piste locale. Le budget de l'État recouvre des initiatives locales et un certain nombre de programmes budgétaires ont pour objet des politiques de proximité, déconcentrées, voire territorialisées. C'est sans doute sur ces enveloppes ciblées qu'une meilleure association des citoyens est possible dans la perspective d'infléchir l'emploi de ces programmes. Je pense ici au budget participatif de la ville de Paris – qui ne représente que 5 % de son budget d'investissement : il pourrait servir de modèle à la répartition des enveloppes budgétaires allouées à certains dispositifs d'interventions publiques, comme les subventions à des projets d'équipements locaux ou à l'activité locale, pour lesquels ce sont aujourd'hui des services déconcentrés de l'État qui emploient les fonds, mais qui peuvent justifier une plus grande association de nos concitoyens.

Je conclurai mon propos en évoquant l'enquête sur le budget ouvert. Il s'agit d'une initiative internationale qui, comme tout classement et comme tout système de notation a ses faiblesses, mais qui permet des comparaisons internationales. Or, dans l'enquête 2017, sortie très récemment, on constate, à la faveur d'un changement de méthodologie de l'enquête, un recul de la France, qui reste néanmoins parmi les pays les plus transparents au monde. Ce recul porte sur trois aspects : notre revue à mi-année, qui est jugée insuffisante ; le manque d'accessibilité de notre budget ; la faible participation enfin de nos concitoyens au processus budgétaire. Il ne vous aura pas échappé que ces problématiques, pour deux d'entre elles au moins, sont au coeur de ce qui vous occupe.

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Monsieur Chavy, en tant que spécialiste de la loi de finances, que pensez-vous du partage des rôles entre le Parlement et le Gouvernement en matière d'accessibilité et de lisibilité des données budgétaires ?

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Pierre Chavy, chef du bureau des lois de finances de la Direction du budget au ministère de l'action et des comptes publics

Les rôles respectifs du Gouvernement et du Parlement dans l'information apportée aux citoyens en matière budgétaire sont très complémentaires. En effet, si le Gouvernement a le souci, lorsqu'il produit la documentation budgétaire à destination des parlementaires, de rendre également cette documentation accessible au citoyen, c'est une des prérogatives historiques du Parlement que de rendre les choix budgétaires formulés par le Gouvernement et par les parlementaires plus transparents, ce qui se traduit notamment par la production de rapports dont il faut souligner la vocation pédagogique.

Sans doute la problématique a-t-elle évolué, puisque les finances publiques font appel à des concepts de plus en plus techniques, donc plus difficile d'accès aux citoyens. Je pense notamment aux notions de « solde structurel » et de « trajectoire du solde structurel », que l'on retrouve à la fois dans le pacte de stabilité envoyé aux institutions européennes et dans la loi de programmation des finances publiques. Or, même si le Gouvernement s'attache à présenter ces concepts et leur utilité dans le pilotage des finances publiques de la manière la plus transparente possible, il me semble que c'est le Parlement qui fait le plus d'efforts pour rendre ces concepts plus accessibles encore.

Les dernières évolutions technologiques nous permettent de disposer d'outils grâce auxquels il est possible de mettre les informations budgétaires à la disposition des citoyens. Il me semble que le Parlement, en tant que chambre d'expertise de la politique menée par le Gouvernement, pourrait mettre ces outils à profit pour rendre plus transparente et plus accessible la politique budgétaire qui est proposée par le Gouvernement.

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Olivier Rouseau, sous-directeur de la comptabilité de l'État, à la Direction générale des Finances publiques

La sous-direction de la comptabilité de l'État est une sous-direction qui produit de l'information financière sous diverses formes, dont on peut évidemment interroger l'accessibilité. Il y a d'abord la comptabilité budgétaire, c'est-à-dire la situation hebdomadaire qui vous est transmise régulièrement et la situation mensuelle publiée au Journal officiel. Mes services élaborent également les données qui alimentent la partie consacrée aux administrations publiques de la comptabilité nationale et sont donc transmises à l'Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE), qui vient de publier, comme chaque année, les comptes provisoires pour 2017. Enfin, nous travaillons surtout à l'élaboration de la comptabilité générale de l'État, le compte général de l'État prévu dans la LOLF.

La LOLF sert de point de départ à notre réflexion sur l'accessibilité, la transparence et la lisibilité des données. Elle pose comme postulat que, pour avoir une démocratie efficace, il faut avoir une information financière très développée. C'est dans cette perspective que ses ambitions en termes d'informations financières sont sans commune mesure avec ce qui existait précédemment. Elles se sont notamment traduites par l'adoption d'une nouvelle comptabilité. Nous produisons ainsi, depuis 2006, le compte général de l'État soumis à la certification de la Cour des comptes – il a été certifié en 2016 avec quatre réserves seulement, contre treize la première année.

Reste la question de la complexité et de l'accessibilité des données que nous produisons. Il y a comme une injonction contradictoire entre cette ambition démocratique et la prescription consistant à exiger de l'État une information complète, donc par nature complexe et pléthorique.

Il faut s'arrêter ici sur cette complexité qui n'est que le reflet de la complexité de l'État, dont l'action peut être lue de différentes manières. La comptabilité budgétaire, relativement simple et accessible offre une lecture des flux. Or, en vertu de la LOLF, le compte général de l'État ne traite pas seulement des flux mais également des stocks, ce qui permet un bilan de ce que l'État doit et de ce qu'il possède à un moment donné. Cette lecture permet d'articuler ce qui se passe aujourd'hui avec ce qui se passera demain, perspective évidemment primordiale dans l'appréhension des finances publiques.

Enfin, la comptabilité nationale prend de plus en plus d'importance, dans une double logique de comparabilité et de consolidation des comptes des administrations publiques. C'est essentiel en ce sens que les politiques publiques sont de plus en plus mises en oeuvre par plusieurs administrations publiques à la fois et que, pour avoir une vision consolidée de l'action publique, il faut arriver à lire l'action de ces différents acteurs, de manière coordonnée.

La réflexion sur l'accessibilité des données est relativement nouvelle pour nous, puisque notre première ambition était d'avoir un compte général de l'État de bonne qualité et basé sur des données fiables. Depuis quatre ou cinq ans, nous considérons ainsi que nous avons des données comptables suffisamment fiables et dont le périmètre et la richesse ont peu d'équivalents dans le monde. Il nous faut donc désormais faire en sorte que cette information puisse être utilisée.

Dans cette perspective, l'une des questions auxquelles nous sommes confrontés, c'est le public auquel nous nous adressons. Nos comptabilités sont conçues de manière très technique et très universelle, dans un souci d'objectivité et de transparence, autant de vertus qui ne les rendent pas nécessairement lisibles par tous les publics.

Nous avons donc travaillé dans un premier temps à les rendre accessibles aux membres de l'administration, sachant que cela ne pouvait qu'améliorer la bonne gestion de l'État. Nous nous sommes ainsi rendu compte que le compte général de l'État n'était pas nécessairement très parlant pour les différents gestionnaires de l'État et qu'il était important de traiter cette information d'une manière individualisée, c'est-à-dire de fournir des éléments de comptes par programme, en les raccrochant à des politiques publiques et aux responsables de ces politiques publiques.

Cette réflexion sur l'individualisation de l'information doit être menée aussi quand on réfléchit de manière plus générale au grand public ou aux institutions extérieures à l'administration. Le citoyen, c'est un peu abstrait, désincarné, et il est très difficile de savoir ce qui peut l'intéresser. L'analyse doit donc être prolongée en pensant aux différents publics qui se cachent derrière le citoyen abstrait : le contribuable, bien sûr, mais aussi des relais d'information comme les universitaires, les journalistes, les associations, qui représentent des intérêts particuliers. Il faut réfléchir à la façon dont on peut présenter la donnée de façon utile pour ces différentes fonctions. Nous avons engagé cette réflexion qui doit accompagner une démarche de participation, si l'on veut croire à ce principe de la LOLF selon lequel il faut être bien informé pour pouvoir participer de manière efficace au budget de l'État.

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Merci. Avant de passer la parole à mes collègues, trois choses. Tout d'abord, il y a en effet complémentarité et nous devons travailler ensemble sur les questions d'accessibilité des données.

Ensuite, notre souhait est de parler, au-delà d'un public particulier, à tous les citoyens ; c'est la préoccupation du parlementaire.

Enfin, quand vous parlez, monsieur Duplay, d'enveloppe ciblée pour la participation, cela me paraît une orientation tout à fait intéressante et c'est quelque chose que nous envisageons depuis le début de nos travaux.

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Je voudrais vous entendre sur quelques-unes de nos pistes de réflexion.

S'agissant de l'accessibilité des données, nous avons commencé à réfléchir à différents formats – réseaux sociaux, petites vidéos, dataviz… – en travaillant peut-être avec des experts, des designers, des développeurs. Cela vous paraît-il une bonne idée ? Nous avons eu des retours d'expériences locales où les citoyens avaient été consultés en amont pour savoir quelles informations les intéressaient dans le budget. Une telle consultation en amont vous paraît-elle une démarche adéquate ?

Pensez-vous que toutes les données dont le Gouvernement dispose sont disponibles ou bien y en a-t-il d'autres qui pourraient être rendues accessibles au Parlement et aux citoyens ? Les formats sont-ils adéquats pour une réutilisation ?

Nous avons également discuté des modèles utilisés par vos équipes pour éclairer les choix budgétaires et présentant les hypothèses de travail pour que puisse avoir lieu la discussion budgétaire à l'Assemblée nationale. Il nous semble parfois que nous n'avons pas, à l'Assemblée, accès aux mêmes ressources techniques qu'au Gouvernement. Pour discuter à égalité de conditions, nous devrions peut-être avoir accès à certaines ressources, comme ces modèles. Qu'en pensez-vous ?

Enfin, l'idée d'une ligne dans le budget qui puisse être répartie par les citoyens eux-mêmes sur les différents programmes budgétaires, vous semble-t-elle une bonne piste ? Cela pourrait-il être établi rapidement ? Avez-vous des recettes techniques pour nous aider à le faire d'ici au prochain PLF ?

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Vous avez indiqué, monsieur Rouseau, que, pour une démocratie efficace, une information financière très développée était nécessaire. C'est le probléme de la lisibilité mais aussi de la compréhension des données par l'ensemble des citoyens. Est-il possible, quand on communique de l'information, d'identifier en amont le potentiel de compréhension des individus ? Un expert en finances publiques n'aura pas les mêmes souhaits d'information et d'investigation que quelqu'un qui n'a que très peu de connaissances dans ce domaine.

Vous avez également indiqué avoir dû donner une information spécifique par rapport au pouvoir d'achat, avec même un petit logiciel de simulation. Y a-t-il eu, derrière, un questionnaire de satisfaction ? Un retour sur l'information communiquée, de façon à améliorer la communication, est-il envisageable ?

Enfin, l'information concerne souvent plusieurs acteurs. Comment mieux la coordonner afin d'éviter le mille-feuille administratif de la communication et de l'information ?

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J'ai été interloqué, monsieur Rouseau, quand vous avez dit qu'il était difficile de savoir ce que veut le citoyen, qui est pour vous quelque chose d'abstrait. J'ai envie de dire que c'est ce que vous faites qui, pour moi, est très abstrait. Je n'ai pas de leçon à vous donner mais les députés sont moins coupés des citoyens. Il faudrait conduire un travail au niveau du Gouvernement et des administrations pour que les citoyens soient plus présents. Même si je ne suis pas complètement surpris, je trouve un peu étonnant que vous vous demandiez ce qu'ils veulent. C'est quelque chose qu'il faut savoir car tout le travail technique est conduit pour eux. Peut-on imaginer une présence citoyenne auprès de vous pour que vous soyez un peu plus connectés avec les demandes des citoyens ?

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Renaud Duplay, sous-directeur de la première sous-direction de la Direction du budget au ministère de l'action et des comptes publics

Je suis pleinement d'accord avec le format des données visuelles. Nous sommes encore balbutiants car il faut bien avoir à l'esprit que l'administration n'a pas de prise de parole publique officielle. Ce n'est pas notre rôle et cela ne doit pas l'être : c'est notre ministre qui parle officiellement, et nous sommes au service de notre ministre. Il est cependant vrai que, si nous voulons animer une information au quotidien, il faut définir la zone de communication dans laquelle l'administration a vocation à agir sans obtenir une validation. Tout ce que nous produisons est par définition politique. Les finances publiques sont sans doute l'élément le plus politique qui soit ; elles relèvent des choix fondamentaux et de l'orientation du Gouvernement.

Nous avons un site internet, « performance-publique. gouv.fr », sur lequel il y a tout, mais ce n'est pas le site le plus agréable qui soit. Je m'en plains moi-même régulièrement ; j'espère que les personnes qui y travaillent durement ne m'écoutent pas… Nous avons lancé un chantier pour que l'internaute ne se perde plus au milieu de toute cette information, car on y trouve aujourd'hui ce que l'on veut quand on sait ce que l'on cherche. Je pense que c'est un enjeu pour tout ministère des finances. On peut assurément mieux utiliser ces éléments de communication.

Notre travail étant, au quotidien, dans la technique, nous avons besoin d'intermédiation pour le travail de communication. Les parlementaires sont là pour le faire, mais il y a aussi des gens dont le métier est de vulgariser. Si nous devions employer toute notre énergie à vulgariser, nous ne pourrions plus faire notre métier. Nous avons besoin de cette intermédiation et, en venant, je repensais à l'émission de télévision « C'est pas sorcier »: nous pourrions peut-être demander à Fred et Jamy d'assurer la communication des finances publiques (Sourires.) ou en tout cas de nous aider à l'assurer, à attirer l'oeil et l'oreille, à faire prendre conscience aux gens des enjeux.

Il faut aussi consulter nos concitoyens pour savoir ce qui leur parle, et s'ils adhèrent ou non au message. Le discours permanent est qu'il faut redresser les finances publiques ; si les citoyens n'y adhèrent pas, nous ne pourrons y arriver. C'est un enjeu capital de s'assurer que le message que l'on diffuse suscite une adhésion, et nous sommes sans doute encore, de ce point de vue, trop techniques. Cela passe par une démarche consistant à tester les supports, tout en ciblant, sans doute, public par public. La documentation pour les experts existe ; c'est plutôt la documentation plus compréhensible, plus directe, pour des journalistes ou autres, qui doit être développée. Quand nous préparons le PLF, sur lequel nous dépensons beaucoup d'énergie, nous constituons un dossier de presse, et il peut être assez frustrant, en ouvrant le journal le lendemain matin, de voir que les journalistes ont produit des graphiques plus sympathiques que les nôtres et ont su présenter en une page les grands enjeux, ce que nous n'avions pas su faire de manière aussi parlante et frappante.

Une partie du problème, c'est que le débat est toujours autour de la nécessité de fournir plus d'information. C'est aussi, très régulièrement, le sens des demandes du Parlement : produire encore plus d'information. Cela demande de l'énergie, pour maintenir le niveau de qualité d'une information relativement technique, précise, documentée. Il existe, par exemple, de très nombreux documents annexes au PLF, les « jaunes », qui sont demandés régulièrement, sur la politique de l'environnement de manière transversale ou autre… Ces documents demandent énormément de travail et je ne suis pas certain qu'ils soient totalement exploités ou que leur utilité soit aussi grande que ça. Donc, d'accord pour plus d'information mais aussi pour mieux d'information, en se demandant quelle information aujourd'hui produite n'est pas utile ou dont la plus-value est faible, qui peut ne plus être demandée, au profit de celle que l'on demande en échange, car il vient un moment où la demande de toujours plus de rapports – qui s'ajoutent aux 5 000 pages déjà produites régulièrement – ne remplit plus l'objectif d'une meilleure information.

Il existe assez peu de modèles, je vous rassure. Je pense que la question porte moins sur les modèles macroéconomiques que sur la façon dont le chiffrage technique des propositions des parlementaires peut être réalisé. Certains pays se sont dotés de structures spécifiques au sein de Parlement pour disposer de cette expertise, et en disposer librement. L'administration est au service de l'exécutif, donc tout ce qui est produit demeure une position officielle de l'exécutif. Quant à une mise à disposition des services de l'État aux parlementaires, ce travail se fait, comme ce matin, dans le cadre de missions et de commissions, mais au moment de la préparation d'amendements cela me semble plus difficile.

S'agissant de la question de savoir si nous consultons les citoyens, la réponse est dans la question : pas encore suffisamment.

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Olivier Rouseau, sous-directeur de la comptabilité de l'État, à la Direction générale des Finances publiques

Nous aussi sommes très déterminés à travailler avec de nouveaux outils ; cela nous paraît nécessaire. Dans nos services, nous travaillons sur de petites vidéos, des outils un peu novateurs pour essayer de rendre l'information plus ludique, susciter l'envie de regarder ce qu'il y a derrière ces données comptables. Je pense que cela ne marche pas trop mal mais cela appelle surtout une action constante dans la durée pour continuer de susciter l'intérêt.

La consultation des citoyens me paraît indispensable pour bien comprendre leurs besoins, et répondre. C'est notre difficulté principale : nous avons de nombreuses informations, dont nous pensons que l'intérêt potentiel est très grand, mais on ne peut le valider que par les échanges avec les citoyens, avec les destinataires de ces informations.

Nous n'avons pas encore testé le potentiel de compréhension des individus, je pense que nous ne sommes pas encore assez avancés dans notre communication pour cela. Nous n'avons pas encore produit de questionnaires de satisfaction. Nous pensons d'abord à le faire en interne à l'administration. Il ne faut pas se lancer dans cette démarche sans avoir bien travaillé sur l'objet de communication ; si nous le faisions aujourd'hui, je pense que le résultat serait très décevant. Il faut commencer par une démarche de pédagogie pour pouvoir espérer des résultats intéressants.

La comptabilité est effectivement très abstraite – je fais le même constat que vous. Ce que je fais est très abstrait. Je ne voudrais surtout pas donner l'idée que nous nous satisfaisons de cette « coupure », bien au contraire ; notre objectif est précisément d'essayer de la réduire. J'espère ne pas être complètement coupé du monde et j'essaie de parler autour de moi de ce que je fais, mais je mesure à quel point c'est difficile.

Nous avons encore beaucoup à faire du point de vue de la pédagogie. Il s'agit de partir de ce qui intéresse les gens. Pour nous, en tant que techniciens, la comptabilité et les données budgétaires ont leur propre logique, disent des choses, mais il ne s'agit pas d'imposer ce message ; cela ne permettrait guère d'intéresser le citoyen, il faut partir de ses besoins. Comme le Parlement joue un rôle de relais entre, d'une part, les citoyens et la société civile, d'autre part, l'État, une démarche conjointe peut, effectivement, être intéressante.

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Je suis bien sûr d'accord, la vulgarisation est un métier à part entière, mais, du coup, réfléchissez-vous – ou avez-vous réfléchi à un moment ou un autre – à l'intégration dans vos équipes de certains profils qui vous aideraient en vue d'une communication plus large ?

Quant aux ressources, je ne songeais pas tant à la mise à disposition d'équipes ou de compétences d'expertise qu'à ces fameux modèles Mésange (Modèle économétrique de simulation et d'analyse générale de l'économie) et Opale, objet de nombreuses discussions. La loi Lemaire les rendrait accessibles, puisque ce sont des documents administratifs, mais pensez-vous que ce soit utile, par exemple pour la société civile, ou pour des économistes qui voudraient travailler sur le budget ? Pour notre part, nous ne savons pas très bien ce qu'il y a dedans.

Par ailleurs, vous n'avez pas indiqué ce que vous pensiez de la possibilité d'une ligne budgétaire spécifique, dont nos concitoyens choisiraient d'allouer les crédits aux différents programmes. Comment cela pourrait-il s'organiser ? De quel ministère faudrait-il que cela dépende ?

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Renaud Duplay, sous-directeur de la première sous-direction de la Direction du budget au ministère de l'action et des comptes publics

En effet, j'avais oublié cette dernière question. Le sous-directeur de la première sous-direction du budget, soucieux de ne pas augmenter les dépenses publiques, ne souhaite pas créer une ligne supplémentaire. Il s'agirait plutôt de trouver une ligne qui existe déjà, avec des moyens budgétaires et des circuits de gestion, et au regard de l'objet de laquelle la participation citoyenne a du sens. Nous pourrons vous fournir la liste des lignes susceptibles de remplir ces conditions.

Au ministère de la culture, une ligne budgétaire est allouée au soutien au spectacle vivant. Hors quelques dispositifs de soutien très transversaux gérés depuis Paris, son pilotage est assuré par les directions régionales des affaires culturelles, qui cherchent à soutenir des initiatives locales. Si l'objectif est « la culture pour tous », en proximité, nos concitoyens ont assurément quelque chose à en dire et peuvent faire valoir leurs préférences.

C'est moins avec le ministère des finances en tant que tel qu'avec les ministères qui mettent en oeuvre ces politiques qu'il convient d'examiner la question. Il n'est pas illégitime que les services de l'État pilotent ces dispositifs mais comment associent-ils, au quotidien, les citoyens aux choix ? De même, la dotation d'équipement des territoires ruraux consiste en enveloppes assez importantes, dont la gestion est déconcentrée, auprès des préfets. Des commissions, auxquelles les parlementaires participent d'ailleurs, attribuent des subventions à des projets d'investissements locaux. Nous pourrions aussi envisager un moment de consultation de nos concitoyens dans le processus de prise de décision.

Cela peut être construit dans un délai relativement réduit, dès lors que l'ensemble de l'architecture existe déjà. Il s'agit de transformer une politique et un dispositif existants pour rapprocher la prise de décision de nos concitoyens.

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L'idée de s'adresser au ministère technique pour que nous construisions ensemble une participation citoyenne me paraît excellente. Pourquoi pas, effectivement, dans le champ de la culture, où s'applique particulièrement le principe de subsidiarité ?

À la suite de la suppression de la réserve parlementaire, j'avais, à titre personnel, souhaité, dans le cadre du budget pour l'année 2018, que nous envisagions une participation citoyenne à la gestion de l'enveloppe départementale consacrée aux associations. Les associations, c'est l'usager ; en l'occurrence, la proximité me semble immédiate. En outre, aucun critère n'est établi aujourd'hui, et une approche verticale, avec préfet et élus, me paraît ne plus tout à fait correspondre à ce que nous attendons de la démocratie. L'idée vous paraît-elle intéressante ? Le cas échéant, à quels obstacles risque-t-elle de se heurter ?

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Renaud Duplay, sous-directeur de la première sous-direction de la Direction du budget au ministère de l'action et des comptes publics

Quoique je connaisse bien cette enveloppe, dont on a beaucoup parlé, je ne suis pas totalement au fait des modalités de son attribution. Il est vrai, en tout cas, qu'elle semble remplir un certain nombre des critères qui rendraient pertinente une démarche de budget participatif.

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Si nous en sommes tous d'accord, chers collègues, nous ferons une proposition très concrète en ce sens, mais cela n'exclut pas une réflexion sur un budget participatif à l'échelle de l'État, pour que la macroéconomie n'échappe pas au citoyen. Je sais Mme la rapporteure très attachée à cette dimension. Qu'en pensez-vous, messieurs ?

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Renaud Duplay, sous-directeur de la première sous-direction de la Direction du budget au ministère de l'action et des comptes publics

Cela me semble beaucoup plus compliqué. J'ai l'impression que les différents budgets participatifs dont nous avons l'exemple fonctionnent de la même manière. Au niveau de l'enveloppe ciblée, le degré de liberté est très élevé, sans contraintes techniques. Dans le cadre d'une enveloppe d'un certain montant, vous pouvez choisir, par exemple, entre la réfection d'une salle de fête, celle de la voirie et la construction d'une nouvelle piscine ou d'un nouveau terrain de basket-ball. Je ne veux pas dire que l'avis du citoyen n'a de sens que pour de tels projets, mais il s'agit de choisir de faire un investissement ou de ne pas le faire, sans autres contraintes.

Considérons maintenant la préparation du budget dans son ensemble. Sa construction n'offre pas le même degré de liberté : il faut honorer tous les engagements du passé, payer la charge de la dette, rémunérer les fonctionnaires en place, verser les pensions, etc. Le jeu de contraintes et d'acteurs est tel que je vois mal à quel endroit une participation citoyenne serait possible – j'entends par là une participation qui s'exprime par des choix, il ne s'agit pas de dire à nos concitoyens : « Venez, regardez, sortez. » Comment faire pour que cette voix de la participation citoyenne pèse ? L'équilibre, fondamentalement politique, du budget de l'État repose, d'une part, sur ces contraintes, que notre rôle est de présenter à nos autorités, d'autre part, sur un choix en pure opportunité qui relève du Gouvernement même, qui le présente à la représentation nationale, laquelle peut l'interroger et exprimer des désaccords. A quel moment pourrait intervenir la participation citoyenne dans ce processus assez lourd, ce jeu d'acteurs en effet complexe ? Serait-ce après la présentation par le Gouvernement de son budget ? Il ne s'agit pas non plus de dessaisir le Parlement de sa fonction en la matière. J'ai du mal à imaginer comment associer les citoyens à la définition des grands équilibres, sinon par le choix d'une politique, d'une grande orientation stratégique au moment des élections.

Si je demandais à nos concitoyens ce qu'ils veulent faire demain, plus personne ne voudrait payer le salaire des fonctionnaires de Bercy – c'est assez logique, mais un État a besoin d'une administration financière pour fonctionner. Comment rendre ce jeu constructif, parce que c'est une forme de jeu ? S'il s'agit de répondre systématiquement qu'il n'est pas possible de retenir telle idée a priori bien sympathique, l'exercice devient vite difficile. Comment offrir des marges de manoeuvre alors qu'un certain nombre de contraintes doivent être respectées ?

Le modèle Mésange a-t-il vocation à être rendu public ? C'est plutôt la direction générale du Trésor, chargée des prévisions économiques, qui pourrait vous répondre – ce n'est pas du ressort de mon administration. Elle pourrait vous préciser ses intentions et la valeur ajoutée d'une telle publication, mais je pense que les acteurs des finances publiques ont intérêt à être transparents : l'opacité n'est pas facteur de bonne gestion. Certes, nous publions tous les mois la situation mensuelle du budget de l'État (SMB), mais c'est un document très fruste. Nous y travaillons : comment le rendre plus clair, plus complet, exploitable ? Il faudrait que n'importe qui puisse voir où nous en sommes et, d'un clic, recalculer le déficit de l'État. Il faut rendre plus clair ce qui est très compliqué aujourd'hui. Compte tenu de la multiplicité des acteurs administratifs, il est parfois difficile de savoir de quoi on parle. Pour lutter contre cette complexité, nous avons besoin d'aide, notamment de l'aide du Parlement. La transparence, l'accessibilité et la clarté de l'information s'amélioreraient aussi avec plus de simplicité dans le financement de nos politiques publiques. Beaucoup de systèmes de financement, parfois issus d'amendements mais pas seulement, sont très complexes. Une réflexion sur la complexité des circuits financiers publics, la multiplicité des acteurs et la fragmentation des compétences pourrait être menée.

Quel est, par exemple, le coût d'une école, d'un collège ou d'un lycée ? L'enseignant est payé par l'État, le personnel technique est payé par l'un des échelons de collectivités territoriales, le bâtiment est entretenu par ce même échelon de collectivités territoriales, les livres sont payés par la commune à l'école primaire, par l'État au collège, officiellement par les parents au lycée – mais les régions sont compétentes en la matière. Si vous voulez savoir combien coûte, à l'euro près, l'enseignement dispensé au lycée le plus proche, il faudra des semaines de travail pour vous répondre. Une réflexion sur cette complexité est nécessaire, d'une certaine manière pour faciliter le travail, pour assurer une plus grande transparence des choix à la représentation nationale et offrir des informations plus accessibles à nos concitoyens.

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Je vous remercie de votre réponse sur les lignes budgétaires mais cantonner la participation à une enveloppe fléchée précise ne nous paraissait pas encourager la compréhension du budget et la responsabilisation des citoyens. Nous imaginions plutôt une enveloppe que les citoyens décideraient de répartir entre les différents programmes. Ainsi devraient-ils connaître la structure globale du budget, du moins s'y intéresser, pour choisir entre le sport, la santé, la défense, etc. Cette piste vous paraît-elle envisageable, même si ce n'est pas forcément pour cette année ?

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Renaud Duplay, sous-directeur de la première sous-direction de la Direction du budget au ministère de l'action et des comptes publics

Je l'imaginerais plutôt sous la forme d'un jeu, d'un serious game, que sous celle d'un processus de prise de décision dans le cadre duquel les options gouvernementales seraient publiquement mises en compétition. Un serious game montrerait la difficulté de la construction du budget, les ordres de grandeur, les équilibres, les pressions. Par le jeu, on peut faire prendre conscience de ce qu'est notre travail.

Comme nous l'a demandé Gérald Darmanin, nous avons engagé une réflexion sur les moyens qui permettraient d'avancer dans cette direction. Il est un peu tôt pour que nous vous disions où nous en sommes, car nous essayons d'inventer quelque chose et rien n'est encore finalisé ; cependant, le moment venu, nous mettrons sur la table des idées qui pourront faire l'objet de critiques et de suggestions, et constitueront ainsi le point de départ d'un projet d'amélioration.

Cela dit, je le répète, je crois peu à une procédure s'inscrivant dans le coeur du dispositif d'arbitrage, car cela me paraît extrêmement difficile à mettre en oeuvre. En effet, cela reviendrait à considérer que, pour un certain nombre d'actions, il existe un budget parallèle sur lequel on peut se reporter quand on n'a pas obtenu satisfaction dans le cadre de la procédure générale. Une telle conception remettrait en cause la notion même d'arbitrage budgétaire, qui consiste pour le Gouvernement à examiner le budget dans sa globalité, avant de procéder à des choix.

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Dans mon esprit, il ne s'agissait pas que les citoyens refassent tout le budget, mais plutôt de leur réserver un certain pourcentage, qui constituerait une ligne spécifique – à l'instar du budget participatif de la Ville de Paris.

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Vous avez parlé de la complexité à laquelle se heurterait le projet de rendre plus transparents les budgets des collectivités locales. Pensez-vous que les parlementaires devraient prendre des mesures en ce sens ? Avez-vous en tête des exemples de collectivités faisant un effort particulier en matière de transparence et de pédagogie ? Vous évoquez, à juste titre, la nécessaire proximité avec le citoyen : cette préoccupation nous pousse, en tant que parlementaires, à rechercher les moyens de rendre tous les budgets publics aussi transparents que possible – un domaine dans lequel nous disposons encore d'une certaine marge de progression.

Avez-vous en la matière des suggestions à nous faire, qu'il s'agisse de garde-fous à poser ou de garanties à apporter ? Pour ma part, en ce qui concerne la culture et les associations, j'ai tendance à considérer que les attributions d'aides et de subventions par les collectivités locales ne se font pas dans la plus grande transparence. Aujourd'hui, battant sa coulpe, l'État a engagé une réflexion afin d'améliorer les choses, et j'estime que la même démarche doit être entreprise à tous les niveaux : on ne peut pas imaginer que le budget de l'État soit participatif, et que les autres établissements publics, notamment les collectivités locales, ne fassent pas, eux aussi, un effort pour rendre leurs budgets plus transparents.

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Renaud Duplay, sous-directeur de la première sous-direction de la Direction du budget au ministère de l'action et des comptes publics

Je ne pense pas que l'on puisse dire que l'État « bat sa coulpe », car il existe déjà un document budgétaire, le « jaune associations » – accessible, me semble-t-il, sur le site data. gouv. fr – qui rend publiques toutes les subventions accordées par l'État à des associations. Cela me paraît une très bonne chose, car les citoyens sont ainsi en mesure de savoir qui a perçu des subventions et pour quel montant, et de demander éventuellement des explications aux responsables publics. Un effort de transparence a donc déjà été accompli, mais on peut toujours faire mieux – en l'occurrence, on peut s'efforcer d'augmenter la transparence et la proximité avec les citoyens.

Pour ce qui est des collectivités, je ne suis pas un spécialiste des finances locales et ne suis donc pas en mesure de porter un véritable jugement sur ce qui pourrait être fait en la matière. Cela dit, je ne vois pas ce qui pourrait s'opposer à ce qu'elles s'engagent dans la voie ouverte par l'État en matière de transparence, si ce n'est une difficulté technique résidant dans le fait qu'elles disposent d'une « force de frappe » inférieure à celle des services de l'État : il paraît difficile d'exiger d'une petite commune qu'elle ouvre, du jour au lendemain, un site internet permettant de consulter l'ensemble des chiffres relatifs aux mesures adoptées par le conseil municipal.

L'une des pistes de réflexion les plus prometteuses est celle consistant à chercher les moyens de fournir une assistance technique aux collectivités locales susceptibles d'en avoir besoin pour améliorer la transparence en matière de finances publiques – une démarche ayant plutôt vocation à s'effectuer de manière transversale : plutôt que d'attendre de chaque collectivité – les 36 000 communes, les 100 départements et les 13 régions – qu'elle crée son propre site en déterminant le format des documents disponibles et les modalités de sa publicité, on pourrait envisager la création d'un espace commun, où l'information serait accessible – selon une certaine granularité – aux personnes concernées. L'un des avantages de cette mise à disposition commune serait de permettre aux citoyens d'établir des comparaisons, sur lesquelles ils pourraient se fonder pour demander des explications à leurs élus locaux.

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Messieurs, nous vous remercions d'être venus vous exprimer devant notre groupe de travail. Nous aurons sans doute l'occasion de vous revoir prochainement afin d'évoquer avec vous ces questions passionnantes.

La séance est levée à dix heure dix.

Présences en réunion

Réunion du mardi 3 avril 2018 à 9 heures

Présents. – M. Nicolas Démoulin, Mme Paula Forteza, Mme Florence Granjus, Mme Cécile Untermaier

Excusée. - Mme Véronique Louwagie