COMMISSION D'ENQUÊTE relative à la mainmise sur la ressource en eau par les intÉRÊts privés et ses conséquences
Mercredi 12 mai 2021
La séance est ouverte à quinze heures quarante.
(Présidence de Mme Mathilde Panot, présidente de la commission)
Mes chers collègues, nous poursuivons les auditions de la commission d'enquête relative à la mainmise sur la ressource en eau par les intérêts privés et ses conséquences.
Nous entendons à présent deux représentants de la direction générale de l'aménagement, du logement et de la nature du ministère de la transition écologique :
– M. Olivier Thibault, directeur de l'eau et de la biodiversité ;
– Mme Amélie Coantic, sous-directrice de la protection et de la gestion de l'eau, des ressources minérales et des écosystèmes aquatiques.
Madame la directrice, monsieur le directeur, je vous souhaite donc la bienvenue et vous remercie de prendre le temps de répondre à notre invitation.
Je vous donnerai la parole pour une intervention liminaire d'une dizaine de minutes, qui précédera notre échange sous forme de questions et réponses. Vous pourrez compléter vos déclarations par écrit.
Je vous remercie de nous déclarer tout autre intérêt public ou privé de nature à influencer vos déclarations.
Auparavant, je vous rappelle que l'article 6 de l'ordonnance du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires, impose aux personnes auditionnées par une commission d'enquête de prêter serment de dire la vérité, toute la vérité, rien que la vérité.
Je vous invite donc, madame, monsieur, à lever la main droite et à dire : « Je le jure ».
M. Thibault et Mme Coantic prêtent successivement serment.
La direction de l'eau et de la biodiversité, qui appartient au ministère de la transition écologique, contribue à élaborer le droit, en appui du Gouvernement et du Parlement. Nous animons ainsi les services déconcentrés – directions régionales de l'environnement, de l'aménagement et du logement (DREAL) et directions départementales des territoires (DDT) – auprès des préfets. Nous détenons également la tutelle d'un certain nombre d'opérateurs comme l'Office français de la biodiversité (OFB), ainsi que des agences de l'eau. Pour leur part, les compétences du domaine de l'eau potable et de l'assainissement sont totalement décentralisées, relevant des communes et de leurs regroupements.
La gouvernance de l'eau fonctionne par grands bassins, qui sont au nombre de 6 en métropole et 5 en outre-mer. Elle associe l'ensemble des parties prenantes (collectivités, usagers, acteurs économiques, industriels et agricoles) au sein de communautés de bassins, qui élaborent les schémas directeurs.
Le corpus législatif et réglementaire du domaine de l'eau demeure très fourni, générant un coût d'entrée relativement important. À ce propos, l'article L210-1 du code de l'environnement dispose que l'eau fait partie du patrimoine commun de la nation. Il définit également les modalités de partage et d'usage. Les droits de propriété relèvent quant à eux plutôt du code civil. De son côté, l'article L211-1 repartit les différents usages, en hiérarchisant les priorités, au premier rang desquelles figurent les exigences en matière de santé et de salubrité publique, de sécurité civique et d'alimentation en eau potable.
Dans le cadre du projet de loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, les deux articles précédemment mentionnés font l'objet de discussions et de dépôts d'amendements, notamment dans l'optique de modifier la hiérarchie des usages. Du côté de l'administration, nous pensons toutefois qu'une certaine stabilité est nécessaire en la matière.
Le domaine de l'eau et de l'assainissement est très cadré au niveau européen, avec de nombreuses directives. Ce cadre se base notamment sur l'organisation française découlant de la loi n° 64-1245 du 16 décembre 1964 relative au régime et à la répartition des eaux et à la lutte contre leur pollution.
La prise en compte du changement climatique se traduit par une évolution des textes concernant les modalités de partage de la ressource en eau, notamment au sujet de la définition des volumes prélevables dans le cas de l'étiage. L'enjeu est de mieux discuter des différents usages dans les territoires. La gestion de crise en cas de sécheresse est également en train d'évoluer.
La baisse des effectifs du ministère de la transition écologique depuis plusieurs années induit une perte d'expertise publique. Pouvez-vous nous décrire les moyens financiers et humains dont vous disposez au sujet de la question de l'eau ?
Actuellement, l'essentiel de la politique de l'eau n'est pas géré par les crédits budgétaires de l'État mais par des taxes affectées, qui sont prélevées par les agences de l'eau sous la forme de redevances. Celles-ci permettent d'alimenter le fonctionnement des opérateurs, ainsi que d'investir dans le domaine de l'eau et de l'assainissement. Quelques crédits budgétaires sont toutefois dédiés au fonctionnement des services déconcentrés de l'État.
Le fonctionnement des agences de l'eau représente 2,1 milliards d'euros par an et celui de l'Office français de la biodiversité (OFB) 500 millions d'euros. Dans le même temps, la capacité de financement de l'actuel programme d'intervention a connu une baisse de 12 % par rapport au précédent, en lien avec l'évolution du plafond de recettes imposé aux agences de l'eau. Le champ de ces dernières a par ailleurs été élargi à la biodiversité à la suite d'une loi de 2016.
Les effectifs de l'ensemble des services déconcentrés de l'État et des opérateurs connaissent une baisse tournant autour de 2 % par an depuis bientôt une dizaine d'années, au point de se retrouver désormais en tension. Il est donc nécessaire de réfléchir à leur mode d'organisation ainsi qu'à l'utilisation des nouvelles technologies, qui permettent de gagner en efficience.
Selon vous, la police de l'eau est-elle correctement exercée en France ? À ce sujet, Sylvain Barone nous a affirmé qu'au sein de l'OFB, chaque équivalent temps plein (ETP) de contrôle est chargé de 1 000 km de cours d'eau. Confirmez-vous ce chiffre ? Est-il suffisant ?
La police de l'eau regroupe une police administrative et une police judiciaire. Elle pratique l'instruction et le contrôle. Ces actions n'ont de sens que si des suites sont données aux contrôles. De leur côté, les inspecteurs de l'environnement dans le domaine de l'eau représentent environ 1 500 ETP à l'OFB et 800 au sein des DDT.
La mission de la police de l'eau est d'instruire les dossiers, afin d'étudier la qualité des projets. Le but n'est pas de placer un inspecteur de l'environnement derrière chaque particulier pour contrôler l'ensemble de ses actions. À ce propos, nous avons adressé à l'ensemble de nos services une circulaire fixant les priorités en matière d'intervention de contrôle. Ces derniers peuvent être effectués a priori, a posteriori ou encore de manière inopinée.
Les missions interservices de l'eau et de la nature servent à coordonner, ainsi qu'à cibler les actions des différents services de l'État. Les suites données à ces actions peuvent être de nature administrative ou judiciaire. Sur ce point, l'établissement de protocoles communs a été demandé entre l'OFB, le préfet et le procureur, afin que les actions soient suivies d'effets.
S'agissant des kilomètres de cours d'eau, je n'ai pas le chiffre en tête mais pourrai vous transmettre l'information. Je ne suis cependant pas certain que cette donnée constitue le meilleur indicateur. Les effectifs se trouvent en tout cas en tension et nos agents éprouvent des difficultés à hiérarchiser l'ensemble des actions qui leur sont demandées. Je pense malgré tout que le système demeure efficient et que l'État est généralement capable de réagir en cas de problème majeur.
Une délégation de la commission d'enquête s'est rendue à Vittel. Nous avons également auditionné différents acteurs de Volvic. Le but était d'enquêter sur les prélèvements de Danone et Nestlé dans les nappes phréatiques. Il est en est ressorti que les minéraliers pratiquaient l'autocontrôle de ces prélèvements. Quel est votre sentiment à ce sujet ?
Pensez-vous que la hiérarchie des usages est bien respectée lorsque les arrêtés « sécheresse » ne restreignent pas les prélèvements des minéraliers, contrairement à tous les autres usages ?
Plusieurs acteurs ont pointé une absence dans la loi au sujet de la propriété des eaux souterraines, ainsi que l'absence de données fiables concernant le niveau des nappes phréatiques.
Tout industriel gérant une entreprise pouvant impacter l'environnement doit disposer d'un système d'indicateurs internes permettant de surveiller ses rejets et sa production. Il est donc indispensable que les industriels pratiquent l'autocontrôle. Il est également normal qu'ils déclarent les volumes qu'ils prélèvent et la pollution qu'ils rejettent le cas échéant. Un contrôle de second niveau de la part de l'État est toutefois nécessaire.
De la même façon, dans le milieu agricole, les acteurs pratiquent l'autodéclaration, qui est suivie de contrôles externes. Chacun à son niveau prend ainsi conscience qu'il est susceptible de recevoir la visite d'un contrôleur. Au final, l'autodéclaration ne me semble pas choquante à partir du moment où de véritables contrôles inopinés peuvent être effectués.
Je pense que nous sommes capables de hiérarchiser les contrôles, même si nous souhaiterions en réaliser davantage. Un certain équilibre doit en tout cas être maintenu en la matière.
À Vittel, des tensions commencent à apparaître. Il est donc nécessaire de vérifier l'existence d'une gouvernance locale et d'outils permettant de réagir de manière adéquate, notamment par le contrôle. Les différentes étapes devront être réalisées dans l'ordre suivant : acquisition des connaissances, partage du diagnostic et construction de solutions qui permettront le bon partage de l'eau. Les phases transitoires ne devront quant à elle pas être trop longues.
Le Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM) est l'opérateur en charge des eaux souterraines. Celui-ci semble en mesure de modéliser l'état global des nappes et d'identifier les secteurs en tension. Ce travail permet d'établir avec précision des cartes d'anticipation et de suivi hydrologiques. Au niveau local, en revanche, des problèmes particuliers peuvent nécessiter des analyses complémentaires spécifiques. Dans le cas de grands groupes industriels comme Volvic ou Vittel, il n'est pas envisageable d'ignorer la réalité du terrain.
Est-il selon vous judicieux de créer une agence nationale en charge du contrôle des services d'eau et d'assainissement, ainsi que des délégations et des régies ?
Cette compétence de contrôle de second niveau est gérée par les collectivités. De son côté, le contrôle sanitaire des unités de production en eau potable est assuré par les agences régionales de santé (ARS). La question est de savoir si cette organisation est assez visible. Sur ce point, il est important que les collectivités gestionnaires organisent elles-mêmes la manière dont elles assurent leur service, ainsi que leur contrôle de premier niveau. Enfin, la question du contrôle de second niveau mérite d'être approfondie.
Selon vous, la police de l'eau est-elle correctement exercée en France ? En outre, nous n'avons pas obtenu de réponse détaillée concernant la propriété des eaux souterraines.
D'après le code de l'environnement, l'eau constitue le patrimoine commun de la nation. Sa propriété demeure toutefois complexe, cette question étant également régie par le code civil. Son article 552 prévoit par exemple que « la propriété du sol emporte la propriété du dessus et du dessous ». Cette définition s'applique aux eaux souterraines et aux eaux de pluie.
Les articles 640 à 645 du code civil précisent les servitudes et les droits d'usage associés aux différentes eaux. Ainsi, le propriétaire d'un terrain a l'obligation de subir la réception des eaux de pluie et leur écoulement vers les fonds inférieurs, sans pouvoir l'empêcher ni l'aggraver. Les prélèvements domestiques sont quant à eux régis par le Code de l'environnement.
L'article 643 du code civil établit que les eaux de source formant un cours d'eau n'appartiennent pas au propriétaire du terrain. Il n'est donc pas possible de capter totalement une source à son profit. Les eaux de surface relèvent par conséquent de l'usage commun. Cette notion se retrouve à l'article 714 du code civil.
La propriété est donc bien liée au sol, à l'exception notable des eaux de source. Il faut ensuite se référer aux articles L210-1 et suivants du code de l'environnement, qui limitent la propriété et l'usage de l'eau.
Au sujet de la police de l'eau, la loi n° 2020-1672 du 24 décembre 2020 relative au Parquet européen, à la justice environnementale et à la justice pénale spécialisée a fait évoluer le corpus législatif, en créant notamment les officiers judiciaires de l'environnement au sein de l'OFB. Ces derniers disposeront des mêmes prérogatives que les officiers de police judiciaire. Des comités opérationnels de défense de l'environnement seront également mis en place, avec pour objectif de coordonner les suites données aux contrôles. Le but est que les contrôles non conformes soient suivis d'effets. Des audiences spécialisées seront ainsi permises.
Selon le chercheur Sylvain Barone, chaque ETP de contrôle au sein de l'OFB est en charge de 1 000 km de cours d'eau. Confirmez-vous ce chiffre ? Est-il suffisant ?
L'OFB compte 1 500 ETP, auxquels s'ajoutent les 800 des DDT, soit un total d'au moins 2 300 inspecteurs de l'environnement chargés du contrôle. Je n'ai pas en tête le nombre de kilomètres concernant les cours d'eau mais m'engage à obtenir la réponse auprès de mes services. Quoi qu'il en soit, cette donnée ne peut pas constituer le seul indicateur et elle renvoie à la manière d'organiser les contrôles.
À votre avis, la propriété privée des eaux souterraines et non domaniales est-elle compatible avec la préservation de la ressource ? Pensez-vous que des évolutions législatives sont nécessaires en la matière ?
Nous avons besoin de règles qui soient les plus lisibles possibles et s'appliquent au plus grand nombre. Nous devons également être capables de gérer les cas particuliers posant des problèmes. Or à l'heure actuelle, le corpus législatif demeure assez complexe. Les articles L210-1 et L211-1 du code de l'environnement régissent par exemple les partages d'usage et leur hiérarchisation. De mon point de vue, l'enjeu est de s'assurer de la mise en œuvre de cette hiérarchie sur le terrain plutôt que de tenter de la changer.
Des tensions concernant les usages surviennent en permanence dans les territoires. Nous devons donc nous assurer que nous disposons de modalités de gouvernance locales. Celles-ci permettront à la fois de partager les diagnostics, d'obtenir la connaissance et de proposer des solutions. Pour l'heure, le système repose fortement sur le préfet, qui est le représentant de l'État au niveau local et organise l'action de ses services. Pour ce qui est de Vittel, le schéma d'aménagement et de gestion des eaux (SAGE) représente selon moi la bonne réponse.
Le BRGM ne fait état d'aucune tension au niveau de la nappe de Volvic, alors que tous les permis de construire ont été arrêtés dans les hauteurs de la région, par crainte que les habitants manquent d'eau. Cette situation pose question, d'autant que la pisciculture locale date du XVIIe siècle et celle-ci se retrouve à sec 5 mois par an.
Il n'est pas choquant que la question de la planification du territoire soit posée en fonction des usages que l'on souhaite y développer. Il serait en effet problématique d'accueillir sans aucune limitation de nouvelles personnes sur un territoire pour ensuite constater que l'eau vient à manquer.
Des questions d'usage peuvent aussi se poser lorsque 70 % de l'eau est envoyée à l'étranger.
D'autres outils sont destinés à d'autres usages, comme les projets territoriaux de gestion de bassin ou les SAGE.
Pourriez-vous nous faire un point concernant la mise en œuvre des 17 mesures annoncées dans le cadre des Assises de l'eau ? Les schémas directeurs en matière d'eau sont-ils obligatoires pour chaque collectivité compétente et à partir de quelle date ? Le centre national de ressources, piloté par l'Agence française pour la biodiversité, qui devait être créé en 2019, est-il en place ?
Nous veillons à mettre en place ces 17 mesures les unes après les autres, dans le cadre de notre feuille de route établie en 2018. À date, nous considérons que 45 % des actions des premières Assises de l'eau ont été mises en œuvre. La mesure 4 figure parmi les plus importantes d'entre elles et porte sur 1,5 milliard d'euros de subventions au cours de la période 2019-2024, afin de mettre en place les contrats de progrès. La mesure 5, qui prévoit que les agences de l'eau engagent 1 milliard d'euros pour accompagner les autres travaux d'eau et d'assainissement, a également été mise en œuvre. De son côté, la mesure 6 concerne 50 millions d'euros sur la période 2019-2024, dans le but d'aider les collectivités à disposer d'une meilleure connaissance de leur patrimoine d'eau et d'assainissement. Cet argent a été engagé, de même que la mesure 9, qui propose de réviser la charte « eau et assainissement DOM » signée en 2016. Enfin, la mobilisation du programme d'investissement d'avenir est terminée et 2,144 millions d'euros ont été engagés pour 5 projets.
Aucune date n'a été fixée concernant le schéma directeur d'eau et d'assainissement. Ce sujet fait l'objet d'amendements à l'Assemblée nationale, qui ont été jugés irrecevables dans le cadre du projet de loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets. Nous estimons toutefois qu'il est absolument indispensable de mettre en œuvre ce schéma directeur, afin de bien gérer les impacts du changement climatique, le partage de l'eau et sa bonne utilisation. Enfin, le centre national de ressources n'est pas encore en place.
Une première livraison du centre national de ressources est prévue en fin d'année, avec un ciblage particulier sur la question de la gestion des eaux fluviales. Le dispositif sera ensuite élargi à l'ensemble du petit cycle de l'eau.
Le prélèvement d'une partie du budget des agences de l'eau pour alimenter le budget général de l'État annonce-t-il la fin du principe selon lequel « l'eau paie l'eau » ?
Que pourrions-nous mettre en place pour renforcer le principe de pollueur-payeur dans le cadre du financement de l'eau ? À ce sujet, Nestlé nous a indiqué qu'il versait aux agences de l'eau une redevance de 96 000 euros par an, qui nous a paru assez faible.
Le fonctionnement des agences de l'eau et des comités de bassin s'est historiquement basé sur les principes de pollueur-payeur et de « l'eau paie l'eau ». À l'origine, le prix de l'eau distribuée payait à la fois le service public de l'eau et de l'assainissement, mais également les redevances des agences de l'eau. Ces dernières réinjectaient les montants collectés sous la forme de subventions et de primes au profit de projets réalisés dans le domaine de l'eau et de l'assainissement.
En ce qui concerne le service public de l'eau et de l'assainissement, un budget annexe doit s'autofinancer. Il est construit sur des redevances prélevées auprès des usagers privés et publics. De leur côté, les collectivités doivent mettre en place des conventions de raccordement avec les industriels, afin de caler les redevances dues par ces derniers. Ces discussions demeurent toutefois difficiles pour les collectivités, à cause d'une forme de chantage à l'emploi. En effet, si le montant des redevances devient trop élevé, l'industrie en question cherchera à délocaliser.
Prenons l'exemple d'une commune de 300 habitants dans laquelle un abattoir serait installé. Celui-ci apporte 300 emplois mais produit également 10 fois plus d'effluents que la quantité pouvant être gérée par la collectivité. Cette dernière se retrouve alors pieds et poings liés à l'abattoir. Dans un tel système, c'est la collectivité qui devrait rejeter les effluents dans la station d'épuration de l'abattoir. Dans le cas inverse, elle assume le risque financier de l'abattoir et ne peut pas discuter du bon niveau de rémunération. Les collectivités doivent donc atteindre une taille critique et se situer au bon niveau d'intervention, afin de renforcer leur pouvoir de négociation.
Sur le petit cycle de l'eau, le principe de « l'eau paie l'eau » s'avère efficace. L'enjeu est de parvenir à une intercommunalisation à la bonne échelle. Il serait toutefois légitime d'élargir le champ des redevances des agences de l'eau, de manière à aboutir à un système de type « l'eau paie l'eau et la biodiversité ». Le but est d'éviter que le consommateur d'eau paie la biodiversité ou l'agriculture.
Le montant des redevances relève d'un choix politique. D'importants efforts d'investissement doivent en tout cas être consentis, aussi bien dans les domaines de l'eau, de l'agriculture que de la biodiversité. La situation demeure en effet tendue. Il faudra également choisir entre un financement direct par les usages et un système de mutualisation adossé à la solidarité nationale. A ce jour, il reste en tout cas encore du travail à accomplir concernant la gestion des pollutions et de l'argent sera nécessaire pour y parvenir.
Pouvez-vous détailler votre réponse au sujet des montants et de la répartition des redevances ?
Les agences de l'eau se sont organisées pour limiter au maximum les prélèvements des bassins vers le budget général de l'État. L'année passée, leur montant s'est élevé à 6 millions d'euros, sur un total de plus de 2,1 milliards d'euros. Ainsi, le plafond imposé aux agences de l'eau a eu pour effet de limiter la fiscalité dans les bassins. Sa réduction de 10 % a fait diminuer d'autant les prélèvements mais a également fait baisser de 12 % les interventions. Dans le même temps, la perception de ces sommes par les collectivités gestionnaires leur permet d'investir plus rapidement, sans passer par l'outil de solidarité.
Merci d'avoir répondu à nos questions. Je vous invite à répondre par écrit au questionnaire transmis.
La réunion se termine à seine heures quarante-cinq.