La commission des affaires économiques a poursuivi l'examen de la proposition de loi visant à renforcer la lutte contre la maltraitance animale (n° 3661 rectifié) (M. Loïc Dombreval, rapporteur général et rapporteur du chapitre Ier, M. Dimitri Houbron, rapporteur du chapitre II, et Mme Laëtitia Romeiro Dias, rapporteure des chapitres III et IV).
Mes chers collègues, nous poursuivons l'examen de la proposition de loi visant à renforcer la lutte contre la maltraitance animale.
Article 12 (suite) (articles L. 211‑33 et L. 211-34 [nouveaux] du code rural et de la pêche maritime) : Interdiction de la détention d'animaux sauvages par les cirques itinérants et les delphinariums
La commission adopte l'amendement rédactionnel CE176 de Mme Laëtitia Romeiro Dias, rapporteure.
Elle examine l'amendement CE80 de M. Cédric Villani.
Cet amendement, déposé dans une logique de rigueur rédactionnelle et juridique, permettra à la disposition prévue à l'alinéa 8 de ne pas s'appliquer seulement aux personnes qui souhaitent détenir des animaux d'espèces non domestiques mais aussi aux établissements.
Dans la mesure où les autorisations mentionnées à l'article L. 413 ‑ 3 du code de l'environnement concernent des établissements, vous avez raison. Je suis favorable à cet amendement rédactionnel.
Je veux alerter l'ensemble de nos collègues sur le fait que la notion d'établissement, en tant que telle, est trop vague et donc dangereuse : elle englobe à la fois des établissements itinérants, des parcs d'attractions et des établissements qui font un travail zoologique, d'une manière experte, ou de la recherche. Cela concernera aussi des acteurs qui œuvrent en faveur de la préservation de la biodiversité et de la cause environnementale, comme les parcs zoologiques, qui disposent de soigneurs experts. Chacun peut s'en rendre compte grâce aux émissions consacrées à ce sujet – elles ne manquent plus à la télévision – ou en allant sur le terrain. Faisons attention.
Vous avez su saisir une occasion de rebondir avec virtuosité. Nous aurons tout le loisir d'évoquer les distinctions entre les établissements lorsque nous examinerons d'autres amendements. Celui-ci tend seulement à faire preuve de rigueur sur le plan rédactionnel.
J'espère que les amendements qui permettraient d'apporter des précisions utiles ne tomberont pas.
Le travail qui sera réalisé d'ici à la séance pourra éventuellement aider à lever les ambiguïtés qui subsisteraient.
La commission adopte l'amendement.
Elle est saisie de l'amendement CE81 de M. Cédric Villani.
Cet amendement concerne le fichier d'identification de la faune sauvage (I-FAP), qui souffre notoirement de carences : il n'est pas aussi complet qu'il le devrait. L'amendement vise à assurer un suivi des animaux sauvages en créant une obligation de recensement et de déclaration, à l'initiative de leur propriétaire.
J'aurais pu être d'accord il y a quelque temps : il est vrai que l'I-FAP a connu certaines insuffisances. Néanmoins, il m'a été indiqué que le déblocage d'un certain nombre d'aides pour les professions circassiennes, dans le cadre de la crise sanitaire, a beaucoup conduit à alimenter le fichier – il fallait, pour bénéficier des aides, que les animaux y soient inscrits. Ce que vous proposez ne me semble plus utile à ce stade, et je vous propose donc de retirer votre amendement.
Je me réjouis que la situation s'améliore. Il n'empêche que créer une obligation de recensement et de déclaration, dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la future loi, ne pourra aller que dans le bon sens.
La commission rejette l'amendement.
Elle examine l'amendement CE3 de M. Fabien Di Filippo.
Il s'agit de supprimer les alinéas 10 à 19. Nous avons évoqué ce matin des sujets qui suscitent beaucoup d'émotion, car ils sont dramatiques – les mutilations, la zoopornographie, l'abandon et la maltraitance d'animaux. Ce sont des faits terribles qui méritent des sanctions d'une sévérité extrême. Comme je l'ai indiqué précédemment, faisons quand même la part des choses, entre des gens qui commettent des exactions à l'égard des animaux et qui les maltraitent, et d'autres qui les soignent, qui en prennent soin ou qui participent à la conservation d'une certaine biodiversité. Mettons aussi à part les cirques itinérants et les parcs d'attractions, qui utilisent des animaux pour leurs spectacles et où des gens travaillent plus ou moins bien – il faut réaliser des avancées en la matière.
Cet amendement vous invite à revoir des points qui paraissent trop flous. S'agissant spécifiquement de la détention et de la reproduction des cétacés, nous souhaitons qu'on ne prive pas des activités visées par ces alinéas les parcs aquatiques, qui ont des biologistes et des soigneurs spécialisés. Je rappelle que l'espérance de vie des cétacés et des dauphins est plus importante en captivité qu'en milieu naturel – la différence est de dix ans pour les dauphins. Par ailleurs, priver un animal de l'acte de reproduction revient à le brimer, par rapport à ses besoins biologiques, et c'est donc une forme de maltraitance. Ajoutons que tout, dans ces parcs, qui sont contrôlés de la manière la plus rigoureuse, se fait par le jeu et dans le cadre des soins. De tels animaux sont des actifs importants, qui valent parfois plusieurs millions d'euros : personne, dans ces milieux très protégés, n'a intérêt à les maltraiter. En outre, les parcs zoologiques ou aquatiques participent à des missions essentielles pour le futur, comme la conservation de la biodiversité et la sensibilisation des plus jeunes aux enjeux environnementaux. Enfin, tous les biologistes nous disent qu'il faut poursuivre ces activités car elles permettent de mener des travaux de recherche scientifique très importants. Si je devais ne citer qu'un exemple, ce serait tout ce qui concerne le magnétisme et les ultrasons chez les dauphins – il est en issu de grandes avancées qui s'appliquent dans bien d'autres domaines.
Je suis extrêmement défavorable à cet amendement qui tend carrément à supprimer l'interdiction de détenir des cétacés dans les delphinariums. L'un des buts de la proposition de loi est de mettre fin à la captivité et aux spectacles de cétacés dans ce cadre. Vous avez parlé de parcs zoologiques : les delphinariums de Planète sauvage et de Marineland en font partie. Vous proposez, en fait, le statu quo.
Vous contestez le fait que la captivité puisse être une source de souffrance ou de maltraitance animale. Or il existe des études scientifiques – c'est la base du texte – qui montrent le contraire. Dans la nature, ces animaux parcourent chaque jour environ 150 kilomètres, ils plongent à plusieurs centaines de mètres de profondeur, ils couvrent de larges territoires où ils chassent ou surfent sur les vagues, et ils ont des relations sociales, entre groupes, qui sont assez complexes. Une orque, par exemple, devrait faire 1 400 tours de bassin par jour compte tenu de ses besoins physiologiques quotidiens.
Les conséquences pour les orques et les dauphins de leur captivité sont scientifiquement établies. On constate une atrophie de l'aileron dorsal, une déconnexion, chez les dauphins, du sonar, qui correspond à l'un de leurs sens principaux, des maladies pulmonaires, des problèmes de peau, de l'agressivité envers les congénères, qui conduit parfois à des bagarres très violentes et à des drames, du stress et des dépressions du fait de l'ennui, de l'exiguïté de l'espace et de l'absence d'ombre et de courant, ce qui peut aller jusqu'à des comportements suicidaires. J'en veux pour preuve le fait que les établissements dont nous parlons traitent ces animaux avec des antidépresseurs et des anxiolytiques. Je veux bien que vous contestiez ces éléments, mais cela me paraît difficile sur le plan scientifique.
Vous avez évoqué, comme preuve du bien-être des animaux dans ces établissements, l'idée qu'ils y vivraient deux fois plus longtemps. Or des études scientifiques montrent le contraire. Dans la nature, une orque vit environ 90 ans et un dauphin soixante ans, contre trente ans, au grand maximum, en captivité. Ce que vous avez dit n'est pas avéré.
J'émets donc, je le répète, un avis particulièrement défavorable à cet amendement qui remet en cause un des principes du texte. J'ai pris un peu de temps pour expliquer mes raisons, car il y a toute une série d'amendements allant dans le même sens, même si leur rédaction est différente – je serai peut-être un peu moins longue par la suite.
Je vous remercie beaucoup, Madame la rapporteure, d'avoir pris le temps d'expliquer dans le détail votre position.
Nous avons, sur le plan scientifique, un profond désaccord. Il n'est pas correct de comparer des durées de vie maximales et moyennes. Une chose est sûre, et scientifiquement prouvée, c'est que, pour la plupart des espèces concernées, l'espérance de vie est plus longue en captivité. Je me fonde sur ce que disent les biologistes, qui font des recherches. Ils trouvent qu'il est incroyablement utile de pouvoir travailler en milieu fermé.
Par ailleurs, je ne pense pas qu'il soit très correct de comparer la violence en captivité – les milieux concernés sont très protégés – et celle du milieu naturel. Ces animaux, en tout cas les plus petits d'entre eux, y sont soumis à une prédation.
Ce n'est pas d'en rester au statu quo que je propose, mais de faire la part des choses, entre certains endroits qui ne sont plus adaptés pour faire un travail de qualité avec ces êtres et des parcs zoologiques ou aquatiques que vous avez cités et qui mènent vraiment un travail d'une grande rigueur et d'une grande qualité.
Par ailleurs, n'oubliez pas que ces parcs, au-delà de leur intérêt économique pour nos territoires et de tous les emplois qu'ils peuvent signifier, participent, sur le plan environnemental, à des actions de réintroduction de certaines espèces en milieu naturel. L'évolution de la situation est telle qu'on aura besoin de ces acteurs à l'avenir pour conserver certaines espèces et, à un moment donné, pour les réintroduire. Faisons confiance aux experts. Tout le monde peut vérifier, en toute transparence, la manière dont ces acteurs travaillent. Ce qu'on ne fera plus en France, on aura besoin d'aller le chercher à l'étranger, peut-être dans dix ou quinze ans.
Nous en venons à un des points majeurs de cette proposition de loi.
On sait que beaucoup de monde est passé par les parcs d'attractions présentant des cétacés ou d'autres animaux marins. Il m'est arrivé, quand j'étais gamin, d'aller voir des orques ou d'autres animaux de ce genre à Marineland, mais c'était dans le temps. Les choses ont bien changé, sur le plan culturel comme scientifique. Il y a maintenant une profusion de films permettant de découvrir la vie sauvage dans des conditions bien plus impressionnantes et intéressantes que la vie en captivité. Certains films, comme le fameux Blackfish, ont également alerté l'opinion publique sur la réalité de ce qui se passe quand un animal sauvage est maintenu en captivité et dressé.
Les études scientifiques ont bien montré, comme l'a dit la rapporteure, à quel point les animaux dont nous parlons sont sensibles, intelligents et sociaux, et combien ils sont inadaptés à une vie dans des bassins qui ne correspondent pas du tout à leurs dimensions et à leurs habitudes. Rien ne justifie leur captivité, ni la distraction des humains, ni la curiosité scientifique.
Je m'inscris, par ailleurs, en faux contre les arguments scientifiques que vous avez invoqués. S'agissant de l'espérance de vie, je tiens à votre disposition des études indiquant le contraire de ce que vous avez affirmé : l'espérance de vie en captivité est réduite. En outre, des articles publiés dans la revue PLOS One, il y a quelque temps, ont montré combien le comportement en captivité est différent du comportement naturel et à quel point l'étude du sonar est faussée quand on se base sur les conditions en captivité. Les opinions des scientifiques que vous avez évoqués ne sont pas du tout partagées par l'ensemble de leur communauté.
Je soutiens la rapporteure, ce qui ne vous étonnera pas.
Des études scientifiques sont réalisées sur des dauphins en captivité, notamment pour en mesurer les effets – celui, par exemple, d'une eau chlorée sur leur peau et leurs yeux. Des observations ont montré les effets délétères de la captivité sur les cétacés.
Le travail réalisé autour cet amendement provient de l'Association française des parcs zoologiques (AFdPZ), qui est tout à fait respectable – je ne remets absolument pas en question l'existence de cette association, ni celle des parcs zoologiques d'une manière générale. C'est néanmoins un amendement maximaliste que vous défendez, Monsieur Di Filippo.
J'ajoute, car il faut que tout le monde le sache, que Marineland et Planète sauvage, qui sont précisément les établissements concernés par la fin de la captivité de ces animaux, sont des parcs zoologiques membres de l'AFdPZ.
Nous citons tous des études scientifiques, plus ou moins différentes. Je pense que les miennes s'inscrivent dans un courant dominant, ce qui n'est pas neutre.
Des dauphins ont été étudiés en milieu naturel. Il est important de le faire aussi dans un milieu qui reste stable. Ils y trouvent de la nourriture et un milieu protégé pour élever des petits. Toutes les naissances qui ont lieu dans ces endroits sont naturelles. Cela prouve bien qu'on est capable de protéger ces animaux et de leur offrir des conditions de bien-être assez élevées.
Ce qu'il faut faire, c'est mieux contrôler ce qui se fait partout, peut-être dans le cadre d'un arrêté établissant des conditions maximales de contrôle du bien-être qui est offert à ces espèces. Je ne crois pas qu'on puisse tout mettre sur le même plan. Ce n'est pas une honte d'être un parc zoologique : nous en avons tous beaucoup, dans nos territoires, qui travaillent avec différentes espèces.
Je redis, car c'est très important – nous en aurons de plus en plus besoin –, que les parcs zoologiques participent, pour la plupart d'entre eux, à la réintroduction d'espèces dans des milieux sauvages. Tenez-en compte au lieu de jeter le bébé avec l'eau du bain.
Travaillons sur la question du bien-être, sur les normes qui s'appliquent à ces établissements. En revanche, décréter des interdictions pures et simples qui mettent sur le même plan des cirques et des parcs zoologiques aura un effet contre-productif.
Il n'y a aucune stigmatisation des parcs zoologiques dans leur ensemble – on sait parfaitement que certains travaillent mieux que d'autres.
Il n'y a aucune réintroduction de cétacés, orques ou dauphins, depuis les delphinariums de notre pays. Cela n'existe pas. La réintroduction d'espèces, qui est, en effet, une caractéristique tout à fait intéressante de certains parcs zoologiques, ne concerne en aucun cas ceux dont nous parlons.
C'est le travail réalisé dans l'ensemble d'un parc qui permet, à un moment donné, d'avoir des marges de manœuvre pour le faire. Je vous dis que dans les années à venir, cela ira de plus en plus loin. On voit ce qui se passe dans les milieux naturels à certains endroits. Nous aurons aussi besoin, en la matière, de ces acteurs.
La commission rejette l'amendement.
La commission examine, en discussion commune, les amendements CE147 de M. Daniel Labaronne, CE103 de M. Cédric Villani et CE11 de M. Fabien Di Filippo.
Je défendrai plusieurs amendements pour lesquels je me propose de faire un propos général – je présenterai ensuite l'objet de chaque amendement sans développer davantage.
Je voudrais d'abord rappeler que les cétacés dont nous parlons font partie d'un programme d'élevage européen – ils sont mis à disposition dans les zoos. Je me demande dans quelle mesure le législateur français peut intervenir. J'ajoute que notre pays serait sans doute l'un des seuls en Europe à interdire la présence de cétacés en captivité dans des établissements zoologiques.
J'aimerais bien que l'on compare les articles dont il a été question, pour voir ceux qui ont été publiés dans des revues à comité de lecture et ceux qui se disent scientifiques mais n'ont pas subi une évaluation par les pairs. La communauté scientifique s'inquiète d'une éventuelle interdiction de la présence de cétacés en captivité dans les parcs zoologiques. La France est un leader des recherches en ce qui concerne ces animaux. On peut se réjouir qu'elle bénéficie d'une renommée internationale en la matière. J'attire votre attention sur ce point. Je ne suis pas sûr que les conclusions des études confortent ce que vous avez dit, Madame la rapporteure.
Le rôle des institutions zoologiques, s'agissant des cétacés en captivité, est reconnu par l'Union internationale de la conservation de la nature : elle considère que ces établissements mènent une action indispensable, pour la prévention, la conservation ou encore les études.
Je souhaite rendre hommage aux vétérinaires, aux soigneurs et à tous ceux qui s'occupent des cétacés dans les parcs zoologiques. Ils pourraient se sentir extrêmement blessés par les propos que vous tenez. Je tiens à leur témoigner ma sympathie : ils consacrent leur vie au bien-être de ces animaux.
Je souhaiterais que Mme la rapporteure reconsidère sa position sur ce sujet et qu'on puisse travailler, d'ici à la séance, en vue d'aboutir à un texte satisfaisant.
L'amendement CE147, que nous allons examiner en premier, vise à autoriser la captivité de cétacés au sein d'établissements zoologiques.
L'amendement CE103 vise, au contraire, à renforcer le texte en élargissant à d'autres mammifères marins l'interdiction relative aux cétacés. Ce sont eux que nous avons le plus en tête – c'est le cas le plus flagrant – mais on pourrait aussi parler des siréniens et des pinnipèdes. Cet amendement émane notamment de discussions avec l'association Sea Shepherd, bien connue sur ces questions.
L'amendement CE11 est une version atténuée de l'amendement que je défendais précédemment. Je souhaite que l'exception prévue à l'alinéa 10 s'étende aux établissements zoologiques.
L'article 12 prévoit d'interdire la reproduction dans les bassins des spécimens de certaines espèces de cétacés, ainsi que la détention en captivité de spécimens de cétacés, sauf exceptions. Il faut faire la part des choses entre ceux qui font un usage purement spectaculaire de ces cétacés et ceux qui travaillent à la conservation et la promotion de certaines espèces avec des professionnels de haute volée. Cette rédaction est le bon moyen de le faire.
Monsieur Labaronne, je m'en tiens à l'argumentaire que j'ai déjà développé. Vous avez émis l'idée que cette interdiction ferait de la France un pays précurseur, ce n'est pas le cas. Plusieurs pays n'ont plus de delphinariums : la Hongrie, le Royaume-Uni, l'Autriche, la Suisse, la Croatie, la Finlande, le Canada, le Costa Rica, le Chili ou encore l'Inde. Nous sommes loin d'être des précurseurs.
Les professionnels qui s'occupent des animaux dans ces centres ne sont pas stigmatisés, leur travail n'est pas remis en question, ni le soin qu'ils essaient d'apporter aux animaux. Le débat porte sur le principe de la captivité de ces animaux. Tous ces professionnels essaient d'en adoucir les conséquences, mais en elle-même, elle constitue une maltraitance. C'est ce que nous remettons en cause, il ne faut pas déformer l'idée que nous défendons. Je suis donc défavorable à l'amendement CE147.
L'amendement CE103 de M. Villani poursuit un objectif diamétralement opposé, puisqu'il vise à étendre cette interdiction à l'ensemble des mammifères marins. Je me suis longuement interrogée sur l'opportunité d'étendre ce dispositif aux lamantins, aux phoques, aux otaries ou aux morses. Je m'en tiens à ce qui m'a été indiqué par les professionnels et les associations : l'incompatibilité des besoins physiologiques de ces animaux avec leurs conditions de détention est moins documentée scientifiquement que dans le cas des cétacés. Cela ne veut pas dire que cette souffrance et cette maltraitance n'existent pas, et je suis convaincue, comme vous, que cette captivité n'est pas satisfaisante. Il convient de faire avancer les études pour objectiver ces souffrances, que nous sommes réduits à imaginer pour l'instant, avant de décider d'une interdiction. L'urgence porte aujourd'hui sur les cétacés, dont nous avons objectivé les souffrances. Avis défavorable.
Enfin, avis défavorable à l'amendement CE11 de M. Di Filippo, pour les raisons déjà citées.
Je souhaite aller dans le sens de notre collègue Labaronne. Nous avons auditionné les responsables des parcs zoologiques, et ils ont clairement posé la question du devenir de ces vingt-neuf dauphins. Comme l'a rappelé le rapporteur général, aucune réintroduction dans le milieu naturel n'a été réussie. Si nous votons la fermeture de ces parcs, que vont devenir les cétacés ?
L'intervention de M. Villani m'amène à me demander jusqu'où nous allons décider de mettre fin à la captivité des animaux. Tous les arguments qui ont été avancés sont applicables aux tigres, aux antilopes ou aux rhinocéros. Je ne voudrais pas mettre le doigt dans un engrenage qui ne va pas dans le bon sens.
Soixante à soixante-dix scientifiques internationaux ont signé une pétition sur l'intérêt scientifique de garder ces dauphins. Je ne suis pas capable d'en juger, mais je trouve dommage de tirer un trait sur l'aspect scientifique de cette question.
Enfin, pour la qualité de nos débats, il me semble dommage et désagréable de faire remarquer que certains amendements émanent des responsables de certaines associations pour les dénigrer, mais de ne pas en faire autant quand ils viennent de Sea Shepherd ou de la Fondation Brigitte-Bardot.
M. Villani a précisé que son amendement venait de la fondation Sea Shepherd, et je trouve que c'est une bonne pratique.
La question est de savoir si les parcs zoologiques seront capables de devenir des établissements de soins, dont la mission sera de recueillir des animaux blessés ou échoués. Et quel sera le futur des animaux qui sont déjà dans les delphinariums ? Il faut trouver une alternative à la fin programmée des delphinariums.
Nous n'avons pas encore la réponse, des scientifiques et des associations ont des avis différents. Je demanderai la remise d'un rapport pour recenser exactement le nombre d'animaux dans ces delphinariums, et déterminer comment faire pour leur donner la possibilité de se déconditionner. Il ne s'agit pas seulement de sauvegarder une espèce, il faut que les animaux se réhabilitent dans un milieu naturel, pour ceux qui le peuvent.
Nous n'avons pas les réponses et les avis sont très partagés.
Je soutiens la rapporteure, je suis convaincu par les arguments scientifiques. Je suis choqué d'entendre que nous ne pouvons pas agir car des personnes seraient heurtées. En politique, si nous nous interdisons d'agir chaque fois que c'est le cas, nous ne ferons jamais rien. Oui, des personnes, des établissements et des institutions seront affectés, mais si c'est l'argument qui justifie que nous ne fassions rien, nous pouvons rentrer chez nous et expliquer à nos concitoyens que nous renonçons pour ne pas gêner certaines personnes. Le courage est de s'attaquer à ces sujets, je remercie les rapporteurs de le faire sans stigmatiser personne, mais avec la volonté d'agir car le statu quo n'est pas possible.
Comme l'a fait observer Mme Tuffnell, il existe un enjeu de reconversion pour ces établissements. Cela ne me préoccupe pas néanmoins car ils recevront l'afflux d'animaux issus de cirques, d'exploitations ou de filières d'importation illégales. Je parlais ce matin du zoo‑refuge de La Tanière, à Chartres. Il héberge des otaries récupérées de cirques qui ont arrêté les spectacles d'animaux.
S'agissant de l'amendement maximaliste de M. Villani, j'ai peur qu'en soumettant tous les mammifères marins à cette interdiction, on ne mette en danger les possibilités de reconversion de ces établissements, qui hébergent parfois des animaux issus de cirques qui ont décidé de changer de modèle. L'interdiction pure, franche et généralisée peut avoir des conséquences perverses.
M. Labaronne interroge le sérieux des revues dans lesquelles les articles sont publiés, et M. Perea s'est aussi exprimé à ce sujet. Je tiens à les rassurer sur la qualité de la revue PLOS One, revue internationalement reconnue à comité de lecture. Je tiens l'étude que j'ai citée à leur disposition.
En ce qui concerne la réintroduction, il n'est pas juste de dire qu'il n'y a pas de réintroduction en milieu naturel avec succès. Le rapporteur général a expliqué que les établissements dont nous discutons ne sont pas à l'origine de telles réintroductions. Mais dans le monde, on dénombre quantité de mammifères marins qui ont été rendus à la vie sauvage avec succès. Un exemple célèbre est fourni par l'ancien dresseur de dauphins de la série Flipper, Ric O'Barry, qui a réhabilité une vingtaine de dauphins captifs, avec un protocole bien au point. Tous ces dauphins ont repris leur place dans un environnement bien adapté. Il existe aussi des cas de dauphins qui se sont échappés dans diverses circonstances et sont revenus à la vie naturelle de manière très simple.
L'éthologie, l'étude scientifique du comportement des animaux et de la façon dont ils sentent ou ressentent, n'a plus rien à voir avec ce que nous pensions il y a trente ou quarante ans. Lisez Jane Goodall ou Marc Bekoff, ils expliquent bien que l'on se moquait d'eux il y a quelques décennies, et qu'au contraire, il existe aujourd'hui un consensus dans le monde scientifique pour reconnaître que les animaux sont bien plus sensibles, conscients – sentients, selon le terme consacré – qu'on ne le croit. Je vous invite à lire l'ouvrage extraordinaire à ce sujet de Marc Bekoff, Les émotions des animaux. Prendre conscience de la palette d'émotions dont ils sont capables modifie notre positionnement en tant que citoyen et législateur.
Enfin, je comprends qu'il y a moins de documentation concernant les mammifères marins que les cétacés, mais dans le doute, qu'est-ce qui nous empêche d'aller plus loin ?
Pour répondre à mon collègue et ami Guillaume Kasbarian, il est de notre rôle en tant que représentants de la Nation de rendre hommage à des hommes et des femmes qui méritent toute notre considération et notre estime pour le travail qu'ils effectuent et le temps qu'ils consacrent à leur métier, qui est une vocation. Le souligner entre dans nos prérogatives.
Je ne suis pas d'accord avec la notion d'objectivation de la souffrance. Nous nous envoyons des études scientifiques au visage, mais prenons le temps de comparer la qualité de ces études et leurs résultats. Faisons ce travail, et nous verrons qu'il y a sans doute beaucoup d'intoxication scientifique dans ces affaires.
Enfin, il n'existe pas d'alternative à ce jour. On ne se préoccupe pas de savoir ce que vont devenir ces spécimens lorsque nous aurons décidé d'interdire la captivité dans les parcs zoologiques. Pourquoi ne pas réfléchir préalablement à cette question ? Quelles sont les conditions pour mettre en place un établissement de soins, un établissement scientifique ou un établissement d'accueil ? Pourquoi ne pas prendre le temps de réfléchir aux conséquences des décisions que nous allons prendre ? On reproche souvent au législateur de mal évaluer les projets de loi qui lui sont soumis par le Gouvernement, mais nous faisons la même chose quand il s'agit d'une initiative parlementaire. Pourquoi ne pas faire ce travail de fond ?
Quand on est sûr de ses arguments, il n'est pas nécessaire de caricaturer ceux des autres. Nous ne disons pas que dès qu'une mesure heurte un acteur économique, il faut renoncer. J'ai essayé de démontrer que la solution que vous proposez sera contre-productive, pas seulement économiquement, mais aussi du point de vue environnemental. Quand vous parlez de reconvertir ces établissements en établissements de soins, connaissant les enjeux économiques en termes d'emplois, on peut se demander qui va payer. Nous n'avons pas la moindre réponse.
Cette mesure pourrait aussi se révéler néfaste pour les animaux. Imaginez que pour les propriétaires de ces parcs, ces animaux représentent un patrimoine de plusieurs millions d'euros. Ils peuvent les revendre ou se délocaliser. Si le parc d'Antibes se déplace de l'autre côté de la frontière, ou vend ses orques dans les pays du Golfe, pensez-vous qu'ils seront mieux traités qu'en France ?
Cette décision nous mettra en marge des recherches sur les cétacés et les mammifères marins au niveau international, et les animaux seront moins bien traités. Dans un contexte international, on ne peut pas faire avancer les choses seuls, au risque de créer plus de problèmes que d'apporter des solutions. Je souhaite vraiment que nous puissions faire la part des choses entre les différents acteurs du secteur.
Le statu quo n'est pas satisfaisant. Les situations sont extraordinairement diverses : peut-on placer sur le même plan ce qui se passe à Planète sauvage ou au Parc Astérix d'un point de vue scientifique ? Je ne le crois pas, pourtant toutes ces situations sont traitées de manière identique. Nous pouvons tous convenir que la situation actuelle n'est pas satisfaisante, et nous souhaitons y remédier. Le titre de l'article 12 est d'ailleurs très clair, il concerne les « animaux sauvages détenus en captivité à des fins de divertissement ».
Nous devons également faire en sorte qu'il n'y ait pas un flux supplémentaire de ces animaux, pour ne pas nous retrouver dans cinq ou dix ans à avoir plus d'animaux à gérer qu'aujourd'hui.
Et comment allons-nous gérer les animaux qui sont actuellement dans ces parcs ? Si les neuf dauphins du Parc Astérix partent en Chine demain, je ne suis pas certaine en effet que leurs conditions de détention y soient beaucoup plus heureuses.
Nous devons travailler d'ici à la séance de manière à identifier clairement les situations auxquelles nous souhaitons mettre un terme parce qu'elles contreviennent aux conditions physiologiques nécessaires à ces animaux, et ce que nous ferons tant qu'ils seront sur notre sol. Je ne pense pas que l'intention de la rapporteure soit de les voir partir en Chine. Faut-il qu'ils soient accompagnés dans des établissements de soins, comme le suggérait notre collègue ? Comment faire pour nous assurer que dans dix ans, les animaux qui sont actuellement sur notre sol connaissent de meilleures conditions de vie et ne soient plus exploités à des fins de divertissement, mais soient au contraire bien traités ? En séance, nous devrions pouvoir trouver une rédaction satisfaisante pour tous.
La question du devenir des vingt-neuf dauphins et des quatre orques détenus dans les parcs ne nous a pas échappé. Une bonne part des auditions y a été consacrée. Outre le fait que nous prévoyons une date d'entrée en vigueur décalée, la solution nous a semblé consister dans une définition de ce que sont les sanctuaires et les refuges – c'est l'objet de l'amendement CE218, qui renvoie au domaine réglementaire pour certains détails. À l'issue du délai prévu, les parcs zoologiques pourraient se transformer en sanctuaires, dès lors que nous aurons précisé de quoi il s'agit. Cela ne me poserait aucun problème.
Cette solution ne permet certes pas de faire converger les positions maximalistes qui ont été défendues, mais elle est de nature à répondre à la préoccupation commune qui est de savoir ce que deviendront les dauphins et les orques. Ce n'est pas parce qu'il est difficile de proposer quelque chose pour eux qu'il faudrait maintenir indéfiniment l'activité des parcs.
En ce qui concerne la source des amendements, il n'y a pas de bons amendements, émanant d'associations de protection animale, et de mauvais, qui viendraient d'autres types d'association. La source de certains amendements est indiquée de façon transparente ; pour les autres, ce n'est pas le cas. Je considère qu'il est de bonne méthode de dire très clairement d'où proviennent les amendements que nous défendons. C'était le cas pour la plupart de ceux qui ont été examinés ce matin.
La commission rejette successivement les amendements.
Elle examine l'amendement CE101 de M. Cédric Villani.
Il s'agit justement de parler du type d'installation qui doit accueillir les cétacés extraits des établissements en question. Les animaux devront disposer d'un espace clos en mer, susceptible de satisfaire au mieux leurs besoins, de manière temporaire. Cet amendement a été travaillé avec les associations très engagées que sont « C'est assez ! » et la fondation Droit animal, éthique et science de M. Louis Schweitzer.
L'amendement que je vous présenterai tout à l'heure donnera une définition des sanctuaires et des refuges, d'ailleurs très proche de la vôtre : il précise que les sanctuaires proposent des conditions de vie proches de celles du milieu naturel des animaux concernés, ce qui me paraît répondre en partie à votre préoccupation. En ce qui concerne le critère de l'établissement en mer, je préfère pour ma part renvoyer la question à un arrêté. Je demande le retrait de l'amendement ; à défaut, avis défavorable.
Je comprends vos arguments. Toutefois, je maintiens mon amendement, considérant qu'il est indispensable pour des mammifères marins de disposer d'un espace clos en mer et que cela doit entrer dans la définition de ce qu'est un sanctuaire.
La commission rejette l'amendement.
Elle est saisie de l'amendement CE17 de Mme Frédérique Tuffnell.
L'alinéa 10 dispose : « Il est interdit de détenir en captivité des spécimens de cétacés, sauf au sein d'établissements ayant pour finalité de prodiguer des soins aux animaux de la faune sauvage trouvés blessés ou affaiblis dans la nature ou dont les propriétaires ont souhaité se dessaisir ou en ont été tenus ». Je propose simplement d'ajouter comme finalité la réhabilitation des animaux, lorsque celle-ci est possible – n'oublions pas que c'est aussi la vocation des établissements de soins, dans la perspective de les relâcher.
Là encore, il s'agit d'un amendement touchant à la définition de ce qu'est un sanctuaire. Mon amendement rappellera que les sanctuaires hébergent des animaux n'ayant pas pu être réintroduits dans la nature, tandis que les refuges peuvent constituer un accueil provisoire avant cette réintroduction. Cela permet de rappeler que la réhabilitation, lorsqu'elle est possible, doit être privilégiée. Je vous demande donc de retirer votre amendement au profit du mien.
Je ne comprends pas bien la réponse : il s'agit ici non pas des sanctuaires mais des établissements de soins, qui peuvent être actuellement des parcs zoologiques. Ils sont aussi habilités à faire de la réhabilitation : on déconditionne des animaux pour les remettre en mer. La loi doit définir les objectifs de manière générale – en l'occurrence celui de réhabiliter les animaux. Il appartiendra à l'arrêté de définir précisément les missions des établissements.
Je regarderai plus précisément votre amendement en vue de la séance. Selon la lecture que j'en faisais, il n'avait pour objet que de préciser partiellement l'objectif que je souhaite assigner aux sanctuaires et aux refuges. À ce stade, je persiste à demander son retrait : retravaillons-le pour voir si le cas des établissements de soins est vraiment différent.
La commission rejette l'amendement.
Elle adopte l'amendement rédactionnel CE177 de la rapporteure.
La commission examine, en discussion commune, l'amendement CE159 de M. Daniel Labaronne et l'amendement CE10 de M. Fabien Di Filippo.
Tout en exprimant mon souhait qu'un travail soit fait sur cet article d'ici à la séance, je retire l'amendement CE159 ainsi que les amendements CE161 et CE160.
Mon amendement vise à modifier la rédaction de l'alinéa 11, de façon à préciser que la participation de spécimens de cétacés à des spectacles est interdite dans les établissements itinérants. Là encore, il s'agit de faire la part des choses : il convient de circonscrire le texte en interdisant les établissements itinérants mais en laissant les autres continuer de travailler, dans les conditions les plus strictes.
Je ne suis pas sûre de bien comprendre votre amendement : l'alinéa que vous modifiez prévoit l'interdiction des spectacles dans les établissements destinés à recueillir les animaux de la faune sauvage ou à leur prodiguer des soins mais ne concerne pas les parcs zoologiques, lesquels, de toute façon auront interdiction de détenir des cétacés. Par ailleurs, aucun établissement itinérant ne présente actuellement de spectacle de cétacés, les bassins nécessaires à la survie de ces animaux n'étant pas mobiles, de toute façon.
Qu'est-ce qu'un spectacle ? Est-ce présenter des animaux au public ? Est-ce faire des animations ? La notion est très vaste. Je considère pour ma part que les interdictions que vous voulez prononcer doivent être limitées aux établissements itinérants, par opposition aux parcs aquatiques ou zoologiques.
Les amendements CE159, CE161 et CE160 sont retirés.
La commission rejette l'amendement CE10.
Suivant l'avis défavorable de la rapporteure, elle rejette l'amendement CE4 de M. Fabien Di Filippo.
La commission examine l'amendement CE12 de M. Fabien Di Filippo.
Je propose de modifier la rédaction de l'alinéa 13 : « Toute nouvelle acquisition de cétacés par des établissements est interdite sauf pour les établissements zoologiques ». Mon objectif est toujours le même : exclure de l'interdiction les gens qui travaillent à la conservation de la biodiversité.
Vous avez trouvé de nombreuses rédactions différentes pour exprimer la même idée, je le reconnais, mais le résultat reste le même : avis défavorable.
La commission rejette l'amendement.
L'amendement CE13 de M. Fabien Di Filippo est tombé du fait de l'adoption de l'amendement CE176 intervenue précédemment.
Elle est saisie de l'amendement CE102 de M. Cédric Villani.
L'amendement est proche du CE101. Il s'agit ici de définir les établissements ayant pour finalité de prodiguer des soins aux animaux de la faune sauvage trouvés blessés ou affaiblis ou dont les propriétaires ont souhaité se dessaisir ou en ont été tenus. Ces établissements doivent être situés en mer.
Même avis que précédemment. Sur le fond, les éléments de définition que vous apportez me semblent intéressants, mais je vous propose d'avoir cette discussion dans le cadre des amendements que nous présenterons après l'article 14, relatifs à la définition des refuges et des sanctuaires. Mon amendement spécifie que les sanctuaires doivent accueillir des animaux dans des conditions de vie proches de celles de leur milieu naturel, ce qui me semble répondre en partie à vos préoccupations. Par ailleurs, parallèlement à nos discussions, une concertation est menée par le ministère avec les associations et les professionnels du secteur, pour préciser les conditions d'existence des refuges et des sanctuaires dans les années à venir.
Je suis d'accord avec vous, Madame la rapporteure : il faut travailler à une définition des refuges et des sanctuaires, et j'examinerai avec la plus grande attention votre proposition. Toutefois, je maintiens mon amendement.
La commission rejette l'amendement.
Les amendements CE46 de Mme Frédérique Tuffnell, CE41 de Mme Typhanie Degois et CE82, CE83 et CE84 de M. Cédric Villani tombent du fait de votes intervenus précédemment.
La commission adopte l'amendement rédactionnel CE178 de la rapporteure.
Les amendements CE48 de Mme Frédérique Tuffnell et CE104 de M. Cédric Villani tombent également du fait de votes intervenus précédemment.
Elle est saisie de l'amendement CE192 de la rapporteure.
Le texte prévoit, pour les orques, un délai de deux ans avant l'entrée en vigueur de l'interdiction, mais, en cas d'absence de solution pour les animaux, la disposition serait repoussée au total de dix ans. S'il faut conserver une certaine souplesse, une durée de dix ans me paraît excessive. L'amendement vise à changer le mécanisme : à l'issue du délai de deux ans, le ministère pourrait accorder une dérogation d'une durée d'un an, renouvelable trois fois, ce qui porterait le délai total à cinq ans. Néanmoins, des questions continuent de se poser : cinq ans seront-ils suffisants pour s'assurer du devenir des quatre orques ? Sans aller jusqu'à dix ans, une durée plus importante se justifie-t-elle ? À ce stade, je retire l'amendement.
L'amendement est retiré.
La commission en arrive à l'amendement CE193 de la rapporteure.
Il s'agit de garantir l'effectivité des dispositions de l'article 12. Pour ce faire, il me semble indispensable de préciser que si les établissements itinérants font le choix de se fixer, ils seront soumis aux mêmes règles que les parcs zoologiques s'agissant de la détention d'animaux sauvages. Certaines personnes demandent l'interdiction de ces animaux y compris dans les cirques fixes ; ce n'est pas ma position. Toutefois, si ces établissements en détiennent, ils doivent être soumis aux mêmes contraintes que les parcs zoologiques.
La commission rejette l'amendement.
Elle est saisie de l'amendement CE47 de Mme Frédérique Tuffnell.
Il vise à demander la remise d'un rapport, dans un délai de douze mois, concernant la transition amenant les cirques, spectacles itinérants, à abandonner leur utilisation traditionnelle des animaux sauvages et à entamer une reconversion. Il est indispensable de savoir de quoi nous parlons : quel est le nombre d'animaux concernés ? On estime que le nombre de félins détenus dans les cirques se situe entre 500 et 700, peut‑être 1 000. Les associations doutent de ce chiffre : il pourrait y en avoir le double, car l'obligation d'identification n'est pas respectée et les contrôles sont insuffisants.
Les animaux sont la propriété des circassiens : quels seront les termes de leur cession ? Quel dispositif pourrons-nous mettre en place pour éviter qu'ils ne soient revendus à prix d'or à des cirques étrangers ?
Sur quels acteurs compter pour cette réforme ? Les fondations et les associations n'ont, le plus souvent, ni les compétences scientifiques ni les moyens financiers, ni les infrastructures pour prendre en charge les animaux sauvages.
Je ne suis pas favorable à l'amendement. S'agissant du nombre d'animaux, la situation s'est éclaircie depuis un an. Le fait d'avoir conditionné les aides covid à l'inscription sur le fichier d'identification de la faune sauvage protégée (I-FAP) a permis au ministère de disposer de chiffres plus précis sur les animaux détenus.
Il nous faut à présent avancer. Plus qu'un état des lieux, il serait intéressant de demander un rapport sur le suivi de l'application des mesures, notamment des délais fixés pour l'interdiction de détention. Il s'agit de connaître, année après année, le nombre d'animaux placés et restant à placer ainsi que les éventuelles difficultés.
Ce rapport d'évaluation me semble également nécessaire. Toutefois, on sait qu'aujourd'hui, l'obligation de déclaration n'est pas respectée. Une mission flash sur le sujet pourrait être envisagée car le législateur doit disposer de tous les éléments pour bien décider.
La commission rejette l'amendement.
La commission examine l'amendement CE49 de Mme Frédérique Tuffnell.
Il prévoit les mêmes dispositions pour les cétacés. J'ai évoqué le grand besoin d'une évaluation de la fin programmée des delphinariums et de la mise en perspective des différentes options disponibles pour une alternative viable et durable.
L'amendement demande donc un rapport d'investigation sur l'étude, le coût et les options envisageables. Il contribuera notamment à élaborer l'arrêté ministériel qui fixera les exigences en termes d'infrastructures, que nous avons évoquées. Il sera également utile pour déterminer la capacité éventuelle des parcs zoologiques à devenir des établissements de soins et remplir, entre autres, la mission de sauvetage des animaux trouvés, échoués ou blessés et, le cas échéant, à quelles conditions. L'objectif sera aussi d'évaluer la viabilité de l'option concurrente d'un établissement en mer, ainsi que de comparer l'impact environnemental – l'empreinte carbone fera également l'objet d'une obligation de suivi – ou la gestion de la ressource en eau des différentes options.
La concertation a été longue sur ce sujet. Aujourd'hui, le ministère dispose de la plupart des éléments que vous mentionnez. La ministre le précisera en séance. Avis défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Elle adopte l'article 12 modifié.
Article 13 (art. L. 211‑35 [nouveau] du code rural et de la pêche maritime) : Interdiction de présenter certains animaux d'espèces non domestiques en discothèque lors d'évènements festifs analogues et dans le cadre d'émissions télévisées ou réalisées en plateau
L'amendement CE85 de M. Cédric Villani est retiré.
La commission examine l'amendement CE194 de la rapporteure.
L'amendement, qui vise à supprimer la notion de liste fixée par arrêté ministériel, introduit une clarification rédactionnelle. Tous les animaux des espèces non domestiques, c'est-à-dire ne figurant pas dans l'annexe à l'arrêté du 11 août 2006, doivent entrer dans le champ de cette interdiction.
La commission rejette l'amendement.
La commission examine l'amendement CE18 de Mme Frédérique Tuffnell.
Il vise à ajouter les camélidés à la liste des espèces qu'il est interdit de présenter en discothèque ou lors d'événements festifs analogues, y compris dans un cadre privé.
L'ajout serait susceptible de créer une rupture d'égalité devant la loi. Les camélidés sont considérés juridiquement comme des animaux domestiques, mais la liste comprend également les zébus, les yacks, les rennes, entre autres. En cas de recours devant le Conseil d'État, il sera difficile de justifier de n'avoir pas étendu le dispositif à ces espèces. C'est donc pour des raisons de sécurité juridique que je suis défavorable à l'amendement : je ne voudrais faire prendre aucun risque juridique à ce texte.
La commission rejette l'amendement.
Elle est saisie de l'amendement CE217 de la rapporteure.
Il vise à étendre l'interdiction d'utiliser des animaux sauvages aux vidéoclips musicaux et aux prises de vues photographiques. Un tel clip vidéo a récemment fait scandale. L'amendement exclut toutefois du champ de l'interdiction les reportages réalisés au sein des locaux des établissements disposant de l'autorisation d'ouverture prévue par l'article L. 413-3 du code de l'environnement.
Je suis d'accord sur le fait que les animaux sauvages ne doivent pas être montrés de manière inopportune dans des émissions de télévision, comme cela a parfois été le cas, hors de tout contexte et, vraisemblablement, de tout contrôle. Cependant, on touche là à la question de la création, qu'elle soit musicale ou photographique.
Vous semblez vous interroger sur les contrôles vétérinaires qui sont organisés, sur le cadre et les raisons pour lesquelles ces animaux sont exposés. Interdire toute possibilité d'utiliser des animaux dans le cadre de clips musicaux ou de shootings photos irait toutefois trop loin par rapport à l'objectif visé.
Le texte actuel semble équilibré, puisqu'il considère que les émissions de télévision ou les discothèques ne constituent pas un cadre adéquat pour l'utilisation d'animaux sauvages, tout en offrant un encadrement respectant le droit de celui qui crée. Aussi, je ne voterai pas l'amendement.
Les questions de création que vous soulevez méritent peut-être d'être rediscutées. Notre préoccupation ne porte pas exclusivement sur les contrôles vétérinaires. Un clip montrant une chanteuse, qui nourrit et caresse un ours brun sur un plateau, entre dans le même cadre qu'une émission télévisuelle.
Je retire cependant l'amendement, afin de le rediscuter d'ici à la séance et d'envisager les exclusions à prévoir pour les shootings photo.
L'amendement est retiré.
La commission examine les amendements identiques CE201 de la rapporteure et CE86 de M. Cédric Villani.
Rien ne justifie de décaler l'entrée en vigueur de l'interdiction de présenter des animaux d'espèces non domestiques en discothèque ou lors d'événements festifs analogues. Aucune adaptation n'est nécessaire puisque les discothèques ne détiennent pas de tels animaux. Aucune reconversion n'est à prévoir. Nous souhaitons simplement que ces établissements ne louent plus les animaux et ne les utilisent plus. Une entrée en vigueur immédiate de la loi est donc requise.
La commission adopte ces amendements.
Puis elle en vient à l'amendement CE87 de M. Cédric Villani.
J'utiliserai le même argument s'agissant de la présentation des animaux d'espèces non domestiques en discothèque ou lors d'événements festifs analogues, y compris dans un cadre privé. Rien ne justifie un délai de cinq ans avant l'entrée en vigueur de la disposition.
Je suis d'accord avec vous sur le principe de réduire le délai de cinq ans, qui semble excessif dans de nombreux cas. Mme O'Petit a proposé un délai d'un an. Pour ce qui me concerne, je propose de le réduire à deux ans car, dans certains cas, notamment celui d'une émission à succès, une interdiction immédiate poserait un problème de replacement des animaux et d'adaptation du concept de l'émission.
Nous sommes tous d'accord pour que, lorsque c'est nécessaire, la loi offre une période de transition afin de permettre aux acteurs économiques concernés de s'adapter. Dans ce cas précis, une période de deux ans semble nécessaire et non excessive. Avis défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Elle examine ensuite, en discussion commune, les amendements CE215 de la rapporteure et CE133 de Mme Claire O'Petit.
Je maintiens qu'une année est largement suffisante pour les émissions de télévision. Les sociétés ne sont pas propriétaires des animaux : cinq ans ne se justifient pas. De même, deux ans me semblent longs. Une année peut suffire pour dénoncer les contrats signés avec des professionnels.
Je rejoins les arguments de Mme O'Petit. L'émission Fort Boyard, à laquelle la rapporteure a fait allusion, est diffusée sur une chaîne de service public. J'imagine qu'avec l'aide de l'État, elle aura les moyens et la capacité, en un an, de se mettre en conformité avec une loi de la République. Le service public a les moyens de replacer quelques tigres dans un délai d'un an. Nous pourrions ainsi aboutir au vote de l'amendement CE133.
La commission adopte l'amendement CE215.
En conséquence, l'amendement CE133 tombe.
La commission adopte l'article 13 modifié.
Article 14 (art. L. 211-36 [nouveau] du code rural et de la pêche maritime) : Interdiction de détenir des ours et des loups en vue de les présenter au public à l'occasion de spectacles itinérants
La commission examine l'amendement CE50 de Mme Frédérique Tuffnell.
L'article 12 complète le code rural et de la pêche maritime, notamment avec un article L. 211-33, qui introduit l'interdiction échelonnée de détenir des espèces non domestiques en vue de les présenter au public dans des établissements itinérants, c'est-à-dire les cirques. Parallèlement, l'article 14 instaure un article L. 211-36 régissant l'interdiction de détenir des ours et des loups en vue de les présenter au public à l'occasion de spectacles itinérants, visant sans les nommer les montreurs d'ours et de loups.
Ces deux articles introduisent un régime sensiblement différent alors qu'ils ont potentiellement vocation à s'appliquer aux mêmes espèces, les loups et les ours. En l'état actuel du droit, c'est d'ailleurs le même arrêté du 18 mars 2011, qui a défini les règles applicables aussi bien aux cirques qu'aux montreurs d'ours et de loups. Le texte contiendra ainsi deux régimes, qui risquent de se superposer.
À la différence des cirques, que l'on doit accompagner dans une reconversion vers des spectacles sans animaux, rien ne légitime une telle tolérance à l'égard des montreurs d'ours et de loups, héritiers directs d'une pratique moyenâgeuse, véritable anachronisme que tous condamnent, au vu des conditions de détention et de celles que l'activité implique – pattes dégriffées, animaux enchaînés s'usant les dents sur les barreaux, état sanitaire déplorable, souffrance dont l'ours Mischa a été l'ambassadeur involontaire.
Vous proposez une réécriture globale de l'article 14. Vous considérez en effet que les articles 12 et 14 entrent en conflit dans la mesure où le dispositif de l'article L. 211-33 s'appliquerait aux ours et aux loups.
Je ne suis pas sûre que vous ayez raison et il me semble que votre objectif est déjà atteint par la rédaction actuelle. L'alinéa 4 de l'article 12 dispose qu'« il est interdit de détenir, en vue de les présenter au public dans des établissements itinérants, des animaux des espèces non domestiques dont la liste et déterminée par un arrêté », tandis que l'alinéa 2 de l'article 14 précise qu'« il est interdit de détenir des ours et des loups en vue de les présenter au public ».
La notion importante est celle d'« établissements itinérants », qui fait clairement référence aux cirques itinérants à l'article 12. L'activité des montreurs d'ours et de loups est différente, puisque les animaux ont un lieu de résidence fixe et qu'ils sont transportés au gré des événements dans lesquels ils sont présentés. Il me semble donc que la rédaction actuelle permet bien de caractériser ces deux activités, qui sont très différentes. Quant à votre volonté de réduire les délais, je la partage et je proposerai moi-même un amendement dans ce sens. Avis défavorable.
L'amendement est retiré.
La commission examine l'amendement CE132 de Mme Claire O'Petit.
L'article 14 vise à interdire, à terme, les spectacles d'ours et de loups.
Les ours et les loups ont des impératifs biologiques qui ne sont pas compatibles avec une quelconque détention, dès lors que sa finalité est de les produire dans des spectacles, qu'ils aient lieu dans des établissements itinérants ou dans des établissements fixes. Quel que soit le type d'établissement, ces spectacles nécessitent un « dressage », qui provoque des mouvements stéréotypés traduisant une maltraitance des ours ou des loups. Par conséquent, tous les spectacles incluant des ours ou des loups doivent être interdits afin de donner à cette proposition de loi une pleine efficacité.
J'émettrai un avis défavorable sur votre amendement. À ce stade, nous n'envisageons pas l'interdiction des spectacles dans les établissements fixes.
Je rappellerai simplement que la souffrance issue du dressage est la même dans un établissement fixe et dans un établissement itinérant.
La commission rejette l'amendement.
La commission examine l'amendement CE216 de la rapporteure.
Cet amendement vise à étendre l'interdiction de présentation au public et d'acquisition aux loups hybrides.
La commission rejette l'amendement.
La commission est saisie des amendements identiques CE88 de M. Cédric Villani et CE211 de la rapporteure.
Cet amendement vise à interdire, non seulement l'acquisition des ours et des loups en vue de les présenter au public lors de spectacles itinérants, mais aussi leur reproduction.
Suivant l'avis de la rapporteure, la commission adopte ces amendements.
Puis elle adopte l'amendement rédactionnel CE179 de la rapporteure.
La commission examine l'amendement CE89 de M. Cédric Villani.
Cet amendement vise à préciser que l'article s'applique non seulement aux personnes, mais aussi aux établissements qui détiennent l'animal.
Suivant l'avis de la rapporteure, la commission adopte l'amendement.
La commission examine l'amendement CE90 de M. Cédric Villani.
Cet amendement vise à interdire sans délai les pratiques cruelles qu'ont évoquées avec éloquence Mmes Tuffnell et O'Petit.
Je suis d'accord pour réduire les délais, mais il faut prévoir un minimum de temps pour permettre aux montreurs d'ours et de loups, dont c'est parfois la seule activité, de s'organiser. Je proposerai, avec l'amendement qui suit, de réduire ce délai à deux ans. J'émets donc un avis défavorable sur cet amendement.
La commission rejette l'amendement.
La commission examine l'amendement CE214 de la rapporteure.
Je répète qu'il faut laisser un délai d'adaptation aux montreurs d'ours et de loups. Compte tenu du nombre d'animaux concernés et du nombre de places disponibles dans les refuges, un délai de cinq ans ne me paraît pas cependant justifié ; un délai de deux ans me semble en revanche nécessaire.
La commission adopte l'amendement.
Puis elle adopte l'article 14 modifié.
Après l'article 14
La commission examine, en discussion commune, l'amendement CE218 de la rapporteure et les amendements identiques CE91 de M. Cédric Villani et CE134 de Mme Claire O'Petit.
Cet amendement, que j'ai évoqué tout à l'heure, propose une définition des refuges et des sanctuaires accueillant des animaux d'espèces non domestiques. Il me semble absolument nécessaire de les définir dans la loi.
Nous avons cherché à mettre au point une rédaction équilibrée, suffisamment ambitieuse pour éviter les dérives, mais laissant tout de même au pouvoir réglementaire le soin de définir certains détails, en concertation avec les acteurs concernés.
J'invite les collègues qui ont déposé des amendements proches du mien à adopter celui-ci.
L'amendement CE91 vise également à donner une définition légale à ces structures d'accueil – je pense au Refuge de l'Arche, en Mayenne, ou à Elephant Haven, dans le Limousin –, afin de lever certaines ambiguïtés. Je n'ai pas eu le temps d'examiner précisément ce qui différencie mon amendement du vôtre, Madame la rapporteure, mais si cette différence est significative, je vous fais confiance pour me l'indiquer.
L'amendement CE134 vise également à la création d'une définition juridique des refuges et des sanctuaires, afin de préparer au mieux la transition vers l'interdiction des animaux sauvages dans les cirques. Je ne vois pas d'inconvénient à travailler à la rédaction d'un amendement commun.
Monsieur Villani, contrairement à vous, je n'ai pas retenu la notion d'animaux « non indigènes », qui me semblait restrictive. Il m'a semblé utile, en revanche, de préciser que ces sanctuaires doivent offrir aux animaux un cadre de vie proche de celui de leur milieu naturel. Telles sont les différences essentielles entre nos amendements. Compte tenu de la complexité de la question, nous pouvons peut-être, en effet, retirer collectivement nos amendements et travailler à une rédaction commune, en vue de la séance.
Je suis prêt à retirer le mien, Madame la rapporteure, à condition que vous mainteniez le vôtre. Vous avez déjà fait un travail important et il me semble préférable que nous votions votre amendement. L'expérience nous a montré qu'il vaut souvent mieux avoir une version préliminaire, même si on la sait imparfaite, quitte à faire les derniers aménagements en séance.
Je vais tout de même retirer mon amendement et je redéposerai, en séance, un amendement issu de notre travail en commun.
Je maintiens donc le mien et j'en profite pour rendre hommage à l'association Code animal, qui travaille depuis longtemps sur ces questions.
Je me félicite de ces tentatives de définition car on voit fleurir, partout dans le monde, mais aussi en France, des territoires qui sont achetés pour devenir des sanctuaires, où toute intervention humaine est interdite. J'ai écrit à deux reprises au ministère de la transition écologique pour lui demander de préciser ce qu'étaient ces sanctuaires et je n'ai jamais eu de réponse. Je suis donc heureux que l'on puisse, à l'occasion de l'examen de ce texte, préciser leur définition. Il faut mettre fin à cette pratique qui consiste à créer des sanctuaires en pleine nature, où la présence de l'homme est totalement interdite.
Les amendements CE218 et CE134 sont retirés.
La commission rejette l'amendement CE91.
Chapitre iv Fin de l'élevage de visons d'Amérique destinés à la production de fourrure
Avant l'article 15
La commission examine l'amendement CE57 de Mme Sereine Mauborgne.
Je crois que le titre actuel reflète bien les ambitions de ce chapitre, qui est de mettre fin à l'élevage de visons d'Amérique destinés à la production de fourrure. Je pense que ce titre ne doit pas être modifié et suis défavorable à cet amendement.
L'amendement est retiré.
Article 15 (articles L. 214-9-1 [nouveau] du code rural et de la pêche maritime) : Interdiction de l'élevage de visons d'Amérique destinés à la production de fourrure
La commission examine l'amendement CE34 de M. Bastien Lachaud.
Cet amendement vise à élargir l'interdiction de l'élevage de visons d'Amérique à l'ensemble des animaux destinés à la production de fourrure. Il vise également à réduire le délai d'entrée en application de la loi.
Des publications scientifiques récentes lient très clairement l'élevage de visons à la propagation de la covid-19, et les zones les plus touchées par le virus sont celles qui comptent des élevages de visons. Il y en a dix en Italie, dont cinq en Lombardie. Or c'est la région qui a été la plus touchée par la covid-19. Des études scientifiques tendent également à démontrer que certaines des mutations du virus proviennent de ces élevages, où la promiscuité, l'insalubrité et les conditions de détention des animaux créent un véritable brasier microbien, favorable aux mutations. Les scientifiques semblent s'accorder pour dire que les deux variants européens majeurs, à la transmissibilité renforcée, trouvent leur origine à proximité des élevages de visons, où les échanges entre les visons et l'homme contribueraient à ces mutations ; 90 % des animaux échantillonnés dans les élevages de visons ont été infectés par la covid-19 et le taux de contamination des travailleurs du vison atteint 68 %.
À l'ère des pandémies, on ne peut ignorer ce lien frappant entre les élevages intensifs, où les animaux vivent dans des conditions déplorables, et les zoonoses ; ces élevages favorisent clairement la transmission des virus à l'homme et, pire, leurs mutations. Fermer les élevages de visons et de tous les animaux destinés à la production de fourrure est un impératif écologique et sanitaire pour la survie de l'humanité. Plus largement, l'ensemble des élevages intensifs devraient d'ailleurs être fermés.
J'ai également déposé un amendement visant à élargir le champ d'application de cet article aux autres animaux non domestiques élevés exclusivement pour leur fourrure. Je pensais par exemple au risque de voir apparaître un jour, sur notre territoire, des élevages de renards.
Au-delà de la question de l'élevage, votre amendement prévoit également l'interdiction de la commercialisation de la fourrure. Indépendamment de mes convictions personnelles, une telle disposition se heurte à un obstacle juridique, puisque la commercialisation de la fourrure relève de la réglementation européenne, qui repose sur le principe de libre circulation des marchandises. Il faudrait mobiliser nos députés européens sur ce sujet. Pour l'heure, et pour toutes ces raisons, j'émettrai un avis défavorable sur votre amendement.
La commission rejette l'amendement.
La commission examine, en discussion commune, les amendements CE202 de la rapporteure et CE92 de M. Cédric Villani.
Cet amendement vise à étendre l'interdiction prévue par l'article 15 aux élevages d'animaux d'espèces non domestiques élevés exclusivement pour la production de fourrure, afin d'éviter le développement d'élevages tels que ceux de renards. On compte trois élevages de visons en France à l'heure actuelle ; l'extension que je propose n'aura aucun impact puisqu'il n'existe aucun élevage de renards ou d'autres espèces sauvages, mais il s'agit de se prémunir contre une telle évolution. Sur le marché international, la fourrure de renard est très en vogue ; puisque nous interdisons les élevages de visons, interdisons d'emblée les élevages de renards.
L'amendement CE92 est assez proche du vôtre, Madame la rapporteure. Il vise à étendre l'interdiction de l'élevage des visons aux autres espèces d'animaux qui seraient élevés spécifiquement pour leur fourrure. Cet amendement n'aurait pas non plus d'impact dans l'immédiat, dans la mesure où seuls les visons sont élevés spécifiquement dans ce but, mais il interdirait que, dans le futur, quelqu'un se mette en tête de lancer un élevage de renards ou de tout autre animal à fourrure. Mon amendement ne se limite pas aux animaux « non domestiques », mais son périmètre est le même que le vôtre, puisque l'autre animal auquel on pourrait penser est l'orylag, qui n'est pas élevé spécifiquement pour sa fourrure.
Dans la pratique, cet amendement aura donc les mêmes effets que le vôtre, Madame la rapporteure ; sa rédaction me semble toutefois préférable car, en ne faisant pas de distinction entre animaux domestiques et non domestiques, il a un caractère plus universel.
Vous nous dites que ces amendements n'auront pas d'effet immédiat : je me méfie des amendements qui, a priori, ne servent à rien. D'une manière générale, je pense que nous devrions prendre le temps de la réflexion. Une de nos collègues avait évoqué la question des lapins angora, qui sont élevés exclusivement pour leur fourrure. Or on ne connaît pas le nombre d'élevages, on ne dispose d'aucune étude d'impact sur ce sujet. Ne serait-il pas préférable de rassembler des données précises sur ces questions avant de voter ces amendements ?
Je trouve un peu étrange que l'on vote l'interdiction de l'élevage des visons, mais que l'on s'abrite derrière Bruxelles pour ne pas interdire la commercialisation de leur fourrure. Cela revient à autoriser les élevages de visons ailleurs dans le monde : c'est une incohérence de plus !
D'autre part, les lapins, notamment angora, étant une espèce domestique, il me semble que l'amendement de M. Villani interdirait leur élevage à des fins de production de fourrure, mais pas le vôtre, Madame la rapporteure. Confirmez-vous cette lecture ?
Je la confirme. Mon amendement tend à interdire préventivement l'élevage des animaux sauvages, du type renards ; il ne concerne pas les lapins angora, qui sont considérés comme des animaux domestiques. Les trente éleveurs de lapins angora que compte la France ne seraient donc pas touchés par mon amendement, Monsieur Perea.
J'ai en effet commis une petite inexactitude lors de la présentation de mon amendement. Il existe bien une différence avec celui de Mme la rapporteure, dans la mesure où le mien mettrait fin, sinon à l'élevage de lapins orylag, élevés à la foi pour leur chair et pour leur fourrure, du moins à celui de lapins angora. J'y vois là un attrait supplémentaire !
L'amendement de M. Villani me semble en effet plus complet, et surtout plus cohérent. Dans le cadre de cette proposition de loi visant à lutter contre la maltraitance animale, nous avons adopté des mesures relatives aux nouveaux animaux de compagnie et à la protection des animaux domestiques, y compris des lapins. Un lapin angora, s'il vit chez un particulier, sera protégé, mais s'il fait partie d'un élevage, on n'en a rien à faire ? Arracher ses poils à vif sera considéré comme un acte de cruauté dans le premier cas – on interdira au propriétaire d'acquérir un autre animal –, mais permis dans le second cas ? J'ai du mal à comprendre !
La commission rejette successivement les amendements.
L'amendement CE93 de M. Cédric Villani est retiré.
La commission examine, en discussion commune, les amendements CE 210 de M. Loïc Dombreval, CE195 de Mme Laëtitia Romeiro Dias et CE94 de M. Cédric Villani.
Pour les raisons que j'ai évoquées lors de la présentation du texte ce matin, à savoir les risques sanitaires et le principe de précaution, je demande l'arrêt immédiat de l'élevage des visons en France.
Tout à l'heure, notre collègue Daniel Labaronne appelait notre attention sur la question des revues dites scientifiques, nous appelant à distinguer celles qui disposaient d'un comité de lecture et celles qui n'en possédaient pas. Même s'il est vrai que le comité de lecture n'est pas toujours fiable, je partage son avis. Or, le 8 janvier dernier, la revue Science publiait une étude révélant que 68 % du personnel de seize élevages néerlandais de visons avait été contaminé par la covid-19. Il n'y a plus que trois élevages de visons en France ; je n'ai aucune envie que la famille d'une personne travaillant dans l'un d'entre eux vienne d'ici à cinq ans – c'est le délai fixé dans le texte – me demander des comptes parce que leur fils, leur frère ou leur cousin est mort du coronavirus !
Je suis cosignataire de l'amendement CE210 visant à l'interdiction immédiate des élevages de visons, qui semble motivée par la situation sanitaire. Ce serait une faute de ma part, en tant que rapporteure, de ne pas appeler votre attention sur ce point.
Indépendamment de toute considération sanitaire, vu que les mesures d'accompagnement et de reclassement seront en nombre limité, la disposition ne concernant que trois élevages, donc quelques personnes, un délai de cinq ans me paraît excessif. C'est pourquoi je propose de le fixer à deux ans.
Le préalable, néanmoins, est de se prononcer sur l'urgence sanitaire de cette décision.
Je me range aux arguments de M. le rapporteur général : s'il est préférable de fixer le délai à deux ans plutôt que cinq, un arrêt immédiat, c'est encore mieux !
Cet article traduit l'annonce, il y a quelques mois, par la ministre de la transition écologique, Mme Barbara Pompili, de l'interdiction de l'élevage des visons en France. À cette occasion, il avait été dit qu'une enveloppe de 8 millions d'euros serait consacrée à la reconversion de ces élevages – mesure d'accompagnement nécessaire pour engager toute transition, en particulier dans le domaine agricole. Quel serait l'impact financier d'une interdiction immédiate ou d'une réduction du délai ? En avez-vous discuté avec le Gouvernement ?
Le groupe MoDem et démocrates apparentés est favorable à l'arrêt immédiat de l'élevage des visons. Je fais néanmoins mienne l'interrogation de M. Dive.
Je partage l'inquiétude du rapporteur général. Allons-nous attendre d'avoir un variant français issu d'un de nos élevages de visons pour les interdire ? Un tiers des visons français ont déjà dû être abattus en raison de la covid-19. Il faut agir ! Certes, il convient de prévoir un dédommagement pour les éleveurs, mais, au point où on en est, ce ne sont pas quelques millions d'euros supplémentaires qui devraient arrêter le Gouvernement.
Je suis désolé d'avoir à dire cela, mais le fait que les différents rapporteurs signent ou présentent des amendements différents ne contribue pas à clarifier le débat. Il serait bon qu'il y ait une coordination en amont et un seul avis.
S'agissant de l'aspect sanitaire de la question, je peux en parler en connaissance de cause, puisqu'il y a en Eure-et-Loir un élevage de visons qui a été contaminé. Sans tergiverser, tous les visons de l'exploitation ont été abattus. Le Gouvernement et les autorités locales ont agi immédiatement, et la filière a été extrêmement compréhensive. Une indemnisation a été versée. Je ne voudrais pas qu'on laisse entendre à nos concitoyens qu'en cas de problème sanitaire, on ne fait pas ce qu'il y a à faire ou qu'il y a la moindre hésitation sur le terrain. Le mot d'ordre, c'est action, réaction, avec la mobilisation générale de tous les acteurs.
Je suis pour un arrêt le plus rapide possible des élevages. Le texte doit encore être examiné dans l'hémicycle, puis faire l'objet de la navette parlementaire : nous avons largement le temps de négocier avec le Gouvernement le montant des aides. Un délai de deux ou cinq ans n'est pas nécessaire. Ces animaux souffrent ; ils vivent dans des conditions inadmissibles. Profitons du contexte actuel et fermons immédiatement les élevages.
Un petit point chronologique. Les premiers cas de coronavirus chez les visons ont été enregistrés aux Pays-Bas au deuxième trimestre 2020. J'ai sonné l'alarme, avec d'autres, à partir du mois de juin. Les mesures annoncées par Mme Barbara Pompili remontent à la fin septembre. L'attention s'est accrue à la suite de ce qui s'est produit aux Pays-Bas, puis au Danemark, aux États-Unis et dans d'autres pays. Les publications scientifiques ont suivi : elles sont récentes et bien postérieures aux annonces. Lorsque Mme Barbara Pompili a annoncé l'interdiction des élevages de visons dans les cinq ans et un soutien de 8 millions d'euros aux éleveurs, on ne disposait pas encore de preuves scientifiques d'une transmission du virus de l'animal à l'homme, même si l'on savait que les mustélidés étaient utilisés pour étudier expérimentalement les infections respiratoires humaines virales. C'est aujourd'hui avéré.
Je n'ai émis aucun doute sur l'efficacité de l'action des directions départementales de la protection des populations (DDPP) et des services vétérinaires sur le terrain en cas de problème sanitaire, Monsieur Kasbarian ; mais il s'agit là d'une intervention curative, à la suite d'une infection, et non d'une mesure préventive, comme celle que je propose.
Enfin, le plan de relance est une occasion rêvée pour engager une transition avec des modalités financières satisfaisantes.
Mon interrogation ne portait pas sur les aspects sanitaires, Monsieur le rapporteur général. La réponse que notre collègue Kasbarian a décrite, avec un dispositif d'indemnisation à la suite d'un abattage en cas de problème sanitaire, me semble adéquate. C'est d'ailleurs ce qui est fait dans le cadre de l'épizootie d'influenza, comme plusieurs collègues l'ont évoqué hier lors des questions au Gouvernement.
Ce sur quoi j'attends une réponse, c'est, indépendamment de la question sanitaire, sur l'accompagnement de la filière. La ministre Pompili a annoncé une certaine enveloppe dans la perspective d'un arrêt des élevages dans un délai de cinq ans. Si, comme vous le souhaitez, ce délai est réduit – ce que je ne conteste pas –, la filière devra assurer sa transition plus rapidement, ce qui aura nécessairement un coût financier. Certes, notre collègue Lachaud a raison, l'État n'est plus à quelques millions d'euros près, mais j'aimerais que vous nous disiez, afin que nous puissions en informer les personnes concernées, quelles sont les garanties financières dont vous disposez de la part du Gouvernement.
Le coût d'une fermeture immédiate des élevages n'a pas encore été calculé. Comme je viens de le dire, lorsque l'enveloppe de 8 millions d'euros a été annoncée, la transmission du virus de l'animal à l'homme n'avait pas encore été prouvée scientifiquement. Cela étant, il est évident qu'il convient d'allouer les moyens nécessaires à l'accompagnement ces mesures.
La commission rejette l'amendement CE 210 et adopte l'amendement CE195.
En conséquence, l'amendement CE94 tombe.
La commission est saisie des amendements CE54 et CE53 de Mme Sereine Mauborgne.
Avis défavorable. Ces amendements visent à autoriser des élevages de visons « prenant en compte la bientraitance animale ». Cela reviendrait à vider l'article de sa substance en autorisant la poursuite d'une activité que nous souhaitons interdire. Le programme européen WelFur, qui fait partie de la soft law citée dans l'exposé sommaire, est très critiqué. Les élevages de visons créent une réelle souffrance pour les animaux : les cages sont insuffisamment grandes, l'accès à un point d'eau leur permettant de nager est inexistant, les animaux développent des comportements stéréotypés répétitifs et l'on assiste à des phénomènes de cannibalisme dans les cas les plus extrêmes. En outre, ces élevages sont particulièrement polluants ; c'est précisément pour cette raison qu'ils font l'objet d'un encadrement au titre de la protection de l'environnement.
Les amendements sont retirés.
La commission en vient à l'amendement CE95 de M. Cédric Villani.
Il convient de préciser les prérogatives du juge, ainsi que les sanctions applicables en cas de non-respect des interdictions formulées aux I et II de l'article.
La commission rejette l'amendement.
Puis elle adopte l'article 15 modifié.
Après l'article 15
La commission examine l'amendement CE199 de la rapporteure.
Il vise à intégrer une formation au respect de l'animal dans l'enseignement moral et civique.
La commission rejette l'amendement.
Article 16 : Gage
La commission adopte l'article 16 sans modification.
Puis elle adopte l'ensemble de la proposition de loi modifiée.