GROUPE DE TRAVAIL N° 7 L'OUVERTURE DE L'ASSEMBLÉE NATIONALE À LA SOCIÉTÉ ET SON RAYONNEMENT SCIENTIFIQUE ET CULTUREL
Jeudi 15 mars 2018
Présidence de Mme Elsa Faucillon, présidente du groupe de travail
La réunion commence à seize heures cinq.
Je suis très heureuse d'accueillir M. Bruno Maquart, président d'Universcience, pour la première audition de la deuxième feuille de route de notre groupe de travail. Universcience est l'établissement public qui gère à la fois le Palais de la découverte et la Cité des sciences et de l'industrie.
Notre première feuille de route était centrée sur la nécessité pour l'Assemblée nationale de se doter d'un lieu d'accueil, d'information, d'expositions, de rencontres et d'éducation populaire qui soit accessible à toutes et à tous. Notre rapport, que nous devrons rendre à la fin du mois de mai en vue de sa présentation à la mi-juin, devra définir plus précisément les finalités de ce projet, sur la base des éléments contenus dans le rapport présenté au Bureau en décembre dernier. Pour cela, nous avons besoin de nous informer car nous ne sommes pas scénographes ni directeurs de musée. Ce n'est pas nous qui ferons le travail de scénographie, mais il nous revient d'en concevoir le projet politique, en lien avec celles et ceux qui se sont déjà posé le même type de questions que nous et grâce à des visites en France ou dans d'autres pays européens. Il s'agit en effet d'approfondir notre réflexion et de trouver la meilleure manière de transmettre un message d'intérêt général pour la démocratie, la citoyenneté et les valeurs des droits humains.
Notre but est d'informer sur le rôle du Parlement, son histoire et son activité mais aussi de promouvoir la réflexion, le débat et l'intervention citoyenne. C'est une démarche de médiation. Or, il semblera évident à ceux qui fréquentent le Palais de la découverte et la Cité des sciences et de l'industrie que Bruno Maquart peut nous éclairer dans ce domaine. Cette démarche de médiation est cruciale dans le champ du politique du fait de la crise démocratique que nous vivons mais elle l'est aussi dans d'autres domaines de la connaissance dont l'accès n'est pas le plus aisé.
Quels supports utiliser ? Quel rôle donner au numérique ? Quel type d'équipement et d'espaces imaginer ?
Je vous remercie, madame la présidente, madame la rapporteure, mesdames et messieurs les députés, de m'avoir invité. J'espère avoir l'occasion de vous accueillir sur place car une démonstration grandeur nature est toujours plus intéressante.
Comme vous l'avez dit, madame la présidente, Universcience regroupe le Palais de la Découverte, l'une des plus anciennes institutions de culture scientifique de ce pays, et la Cité des sciences et de l'industrie. Le Palais de la découverte, original à plus d'un titre, a été créé en 1937 en tant qu'exposition temporaire dans le cadre de l'Exposition internationale des arts et techniques de Paris. Cette exposition temporaire a eu tant de succès que finalement, le Palais n'a jamais fermé – si ce n'est pendant quelques mois, pour consolider ce qui avait été présenté en 1937. Quant à la Cité des sciences et de l'industrie, c'est un établissement que connaît bien madame la rapporteure puisqu'il est situé dans sa circonscription. La Cité des sciences et de l'industrie vient de fêter ses trente-deux ans puisqu'elle a ouvert en mars 1986, les deux établissements ayant été réunis en un seul il y a quelques années au sein de l'établissement public du Palais de la découverte et de la Cité des sciences et de l'industrie (EPPDCSI), autrement appelé Universcience.
Au Palais, nous n'avons pas d'œuvres ni de collections mais bien des phénomènes scientifiques à montrer. C'est un musée en mouvement dans lequel on parle des sciences en faisant des démonstrations – par exemple, une démonstration emblématique sur l'air liquide, connue de tous les enfants, ou une démonstration de l'électrostatique au cours de laquelle on fait se dresser les cheveux sur la tête. Nous avons aussi des présentations permanentes sur les grandes disciplines scientifiques. Nous en avons inauguré une dimanche dernier, ouverte au public depuis hier, sur l'informatique et les sciences du numérique et le secrétaire d'État chargé du numérique nous a fait l'honneur de présider cette cérémonie. Nous présentons l'ensemble des grandes disciplines scientifiques qui structurent le savoir et l'enseignement – physique, chimie, mathématiques, informatique et sciences du numérique.
Les choses sont un peu différentes à la Cité des sciences et de l'industrie qui a été conçue à l'époque comme un « anti-Palais de la découverte », ou du moins comme son complément, pour montrer les rapports que la science et les techniques entretiennent avec la société. C'est une grande cité de l'innovation, plus que des disciplines ou des théories scientifiques. Nous n'avons pas plus de collections à la Cité des sciences et de l'industrie qu'au Palais de la découverte, mais nous proposons des expositions temporaires. Nous en avons une en ce moment sur les effets spéciaux et en en avons proposé une autre l'année dernière, intitulée Valerian et Laureline en mission pour la Cité, dans le cadre de laquelle nous avons notamment présenté un dispositif inédit de réalité augmentée. En effet, quand on n'a rien à montrer, tout est dans la manière de faire. Nous avons ainsi développé de multiples techniques pour nous adresser au public qui font beaucoup appel aux technologies d'aujourd'hui.
Quant à la Cité des enfants au sein de la Cité des sciences et de l'industrie, c'est un des plus gros équipements qui s'adressent aux enfants. Nous avons développé une offre spécifique pour les petits à partir de deux ans, âge où l'enfant ne lit pas encore, car on ne s'adresse pas de la même manière à un enfant lecteur et à un enfant non lecteur. Notre dernier dispositif mêlant le numérique et le matériel s'appelle le Vaisseau spécial, modèle breveté qui est appelé à un brillant succès à l'exportation, puisque nous vivons aussi de ce que nous vendons. L'État nous finance à 75 %, les 25 % restants correspondant à ce que nous gagnons. Aujourd'hui, les manipulations interactives sont un nouveau champ majeur de la muséologie scientifique : il s'agit d'encourager les gens à toucher.
Nous proposons des festivals d'un week-end sur un thème grand public, comme le festival Roue libre dans le cadre duquel on montre les technologies d'aujourd'hui que le public peut essayer. Nous avons par exemple montré l'année dernière une valise se transformant en scooter dans les longs couloirs des aéroports et allons montrer cette année une valise qui suit son propriétaire grâce à un dispositif de commande à distance. Nous parlons aux Français de leur quotidien et de la manière dont la science et les techniques arrivent chez nous. Au lieu de voir les choses à la télévision ou sur internet, ils peuvent les voir en vrai.
Nous proposons aussi de nombreuses offres spécifiques à destination des jeunes adultes après lesquels courent toutes les institutions culturelles. Ces jeunes adultes viennent dans ces institutions quand ils sont petits, avec l'école ou avec leurs parents, puis ils y viennent quand ils sont eux-mêmes parents avec leurs enfants, mais entre les deux, ils disparaissent. Nous avons donc par exemple organisé une soirée intitulée « Sciences Frictions », au cours de laquelle nous avons accueilli 2 500 jeunes adultes à la Cité, entièrement en musique.
Nous développons beaucoup de laboratoires qui sont des lieux interactifs, notamment sur le jeu vidéo. Nous allons ouvrir à la fin de l'année le Fab Lab dans lequel on pourra découvrir tout ce qui façonne le monde de la production de demain.
Je résumerai notre métier en trois verbes. On offre au public quelque chose à voir, à la manière traditionnelle des musées. On le fait toucher : on engage le visiteur à s'approprier par la main des savoirs complexes. Enfin, on le fait faire. Les musées de sciences sont ceux qui sont allés le plus loin dans ces directions pour des raisons tenant au sujet même de notre activité et pour répondre à la diversité des publics accueillis, constitués aussi bien de sachants que de non-sachants, de jeunes que de moins jeunes, de primo-arrivants que de passionnés de sciences.
Nous accueillons près de 3 millions de visiteurs par an, ce qui fait de nous la plus grosse institution en France. Parmi nos homologues à l'étranger, nous nous comparons à nos amis de Londres, de Munich et de Milan. Il y a également un réseau d'une trentaine de centres de sciences en région dans toutes les villes de taille importante en France. Ces centres, répartis sur tout le territoire, sont très bien connus des populations locales mais n'ont pas de visibilité nationale en tant que grande famille culturelle.
Notre établissement public a de nombreux projets de développement et est aujourd'hui en phase d'intégration numérique. Nous nous interrogeons, comme tous les établissements, sur la meilleure manière de nous saisir du numérique qui est un langage et un monde à part entière. Comme de plus en plus de gens sont dans ce monde, il faut aller les y rencontrer, sortir de nos murs pour aller dans le monde virtuel. Enfin, le numérique est aussi une science, raison pour laquelle nous avons ouvert au Palais de la découverte un nouvel espace consacré à l'informatique et aux sciences du numérique.
Je vous remercie. Je suis ravie, moi aussi, de pouvoir accueillir à l'Assemblée nationale le président d'Universcience. Comme vous m'avez fait l'honneur de me faire visiter la Cité des sciences et de l'industrie, je vous poserai des questions dont j'ai parfois les réponses pour qu'à défaut de visite in situ, les autres membres de ce groupe de travail puissent se faire une idée.
Y a-t-il, au sein de la Cité des sciences et de l'industrie, un auditorium ou un espace d'échanges avec le public et de transmission du savoir ? Vous nous avez en effet expliqué que selon le triptyque « Voir, toucher, faire », il y avait une véritable interaction entre le public et les installations de la Cité des sciences.
Comment avez-vous conçu le parcours des publics ? La Cité des sciences et de l'industrie est un espace énorme et nous n'aurons évidemment pas la même superficie à l'Assemblée nationale. Cependant, avez-vous conçu un itinéraire, du tout premier accueil vers l'orientation des différents publics ?
Quels dispositifs avez-vous mis en place pour les visiteurs étrangers non francophones ?
Enfin, avez-vous prévu des dispositifs spécifiques pour les personnes en situation de handicap ?
Nous avons effectivement plusieurs auditoriums. Nous y proposons des formats traditionnels de conférences, aujourd'hui en voie de diversification grâce à de petites applications numériques assez simples permettant de beaucoup mieux associer l'auditoire à ces conférences qu'auparavant et d'avoir un dialogue de meilleure qualité avec la salle. Les enfants, par exemple, ne seront pas réceptifs à une conférence. Il existe aujourd'hui des techniques pour s'adresser aux adolescents en les faisant utiliser leur téléphone portable et pour ainsi animer les échanges.
En partenariat avec un grand groupe français, nous avons développé une petite application très simple grâce à laquelle nous interrogeons en direct l'auditoire, qui nous répond. La personne qui fait la conférence adapte donc en permanence son propos à la manière dont réagit la salle. Notre idée est de faire participer le public. Le temps est révolu où l'on entrait en silence dans un établissement culturel, ébloui par la majesté du lieu. Nous encourageons les curieux à poser des questions. Les jeunes générations veulent interagir sur les contenus. L'avenir de nos établissements repose donc sur la question de savoir comment faire entrer la parole du public très en amont.
Nous concevons d'ailleurs nos expositions avec nos publics. Quand nous avons organisé notre première grande exposition temporaire sur le big data, intitulée Terra data, nos vies à l'ère du numérique, nous avons réuni un panel de personnes autour d'un spécialiste de la concertation sur les projets d'équipements locaux, ce qui nous a permis de mieux cerner ce que les visiteurs pouvaient attendre d'une exposition comme celle que nous voulions faire. On se fait toujours une représentation de ce que le public va demander. Or, nous étions un peu à côté de la plaque. Si je fais un micro-trottoir et que je demande aux gens ce qu'ils attendent de la Cité des sciences et de l'industrie, ils me regarderont d'un air effaré mais aujourd'hui, on sait interroger le public intelligemment. On fait souvent des enquêtes une fois que les gens sortent des lieux mais c'est trop tard car on a déjà produit des contenus, ce qui coûte de l'argent, et l'on ne peut redresser la barre que la fois suivante. Ce type d'enquêtes nous fournit un avis sur ce qu'on n'a pas encore fait alors qu'en s'appuyant sur des relais, on peut co-construire les expositions.
Nous utilisons aussi des plateformes de ressources et de services. La Cité des sciences et de l'industrie a la troisième bibliothèque publique de France après la Bibliothèque nationale de France (BNF) et la Bibliothèque publique d'information (BPI) du Centre Georges-Pompidou. Comme toutes les bibliothèques « à livres », la bibliothèque de la Cité des sciences et de l'industrie voit sa fréquentation baisser, mais nous avons développé un nouveau modèle qui va prendre de l'ampleur puisque nous allons faire de la bibliothèque une plateforme de ressources cognitives. Nous avons déjà sur place depuis plusieurs années la Cité des métiers et la Cité de la santé. Le public peut y venir anonymement, gratuitement et sans rendez-vous pour s'informer sur les métiers et la santé. Ces structures s'intègrent dans un réseau de partenariats car il faut aujourd'hui éviter de tout faire tout seul et créer un écosystème. La Cité des métiers travaille donc, entre autres, avec l'éducation nationale, Pôle Emploi, des associations d'accueil de migrants et des associations travaillant avec les jeunes des quartiers. C'est en tricotant des offres plurielles qu'on a le plus de chances de s'adresser de manière pertinente aux populations dans leur diversité. Il n'y a plus un public – c'est une commodité de langage – mais des publics très divers, sans parler de toutes les personnes qui ne viennent pas et qu'il faut aller chercher.
Les espaces dédiés aux échanges se trouvent donc aussi sur internet. Les réseaux sociaux sont désormais l'espace par lequel on accède à l'information. Les jeunes ne regardent plus la télévision – l'âge moyen du téléspectateur et de l'auditeur des canaux publics étant situé entre 50 et 59 ans. Leur consommation culturelle n'a plus rien à voir avec celle que nous avions à leur âge. Nous devons donc nous adapter à ces générations, à leurs usages et aller chercher les gens sur ces réseaux sociaux. Nous voulons devenir des établissements conversationnels, le défi étant de faire venir les publics dans nos murs – surtout chez Universcience car si les publics ne viennent pas, ils n'achètent pas de billets d'entrée et j'ai des problèmes d'équilibre économique. Le numérique est donc un complément du physique : ce n'est pas l'un ou l'autre mais l'un et l'autre. Le numérique induit des besoins d'incarnation. On ne fait pas les mêmes choses dans un lieu que sur un écran, ce qui veut dire qu'il faut éviter que les lieux offrent la même chose que les écrans. Si vous ne faites que des salles avec des écrans, vous n'apporterez rien de plus au public. Il faut donc être à la fois en lien avec et dans le prolongement du numérique, tout en proposant autre chose. Le besoin d'incarnation à l'heure du numérique fait que les lieux physiques ont encore un avenir dans le nouveau monde. Vous avez donc raison d'ouvrir des salles et d'avoir des murs.
J'en viens au parcours. Construire un parcours est toujours un casse-tête, surtout dans un aussi grand bâtiment qui n'a pas été conçu au départ pour être un musée. En général, les publics font autre chose que ce à quoi on s'attendait. Ce sont donc eux qui dessinent les parcours. Ils n'entrent pas toujours par la porte principale. Je connais donc de nombreux établissements qui ont été obligés de faire bouger leur entrée pour la mettre là où les gens arrivaient. La Cité des sciences et de l'industrie a été conçue pour que les gens arrivent par le parc, c'est-à-dire par le sud. Or, ils viennent par le nord. Il a donc fallu que l'établissement se retourne sans pouvoir évidemment le faire physiquement. Nous avons donc réaménagé des accueils. D'ailleurs, une séquence d'accueil s'organise : il faut gérer les files d'attente, dématérialiser les réservations, la billetterie et les informations et faire en sorte que l'information sur place soit très qualitative et pointue. Nous orientons le public dans une maison comprenant la Géode, un planétarium 8K, des expositions permanentes, un programme de conférences, une bibliothèque et mille autres choses.
Nous n'avons pas de parcours imposé mais des parcours. Si vous venez avec un enfant de cinq ans, on vous proposera tel parcours ; un autre parcours si vous venez en famille ; un autre parcours encore si vous vous intéressez à la physique ou au numérique. Nous sommes aussi en train de développer des dispositifs embarqués d'aide à la visite. Cela étant, il ne faut pas fétichiser l'outil. Les contenus sont importants et les applications simples sont souvent les meilleures. Il ne faut pas chercher à faire sophistiqué sur des smartphones : les meilleures applications que je connaisse sont toutes simples. Je prendrai l'exemple de l'application du musée d'art de Brooklyn qui permet d'interroger en direct le musée. Une équipe est là pour répondre via un système de messagerie instantanée. Les répondants savent géolocaliser la personne qui les interroge. Ce système de médiation instantanée, qui utilise le numérique, permet de ne pas mettre dix personnes par salle, mais plutôt de n'en mobiliser que dix pour tout le musée. C'est très efficace et simple.
D'autres exemples montrent qu'il faut trouver la bonne solution d'accompagnement numérique mais que l'humain reste important, surtout pour des gens qu'intimident les lieux culturels. Un lieu culturel dédié à l'Assemblée nationale peut même susciter une double intimidation car le lieu est impressionnant par nature, par son architecture. Il faut donc que vous réfléchissiez à la manière de faire tomber cette barrière symbolique pour que les gens osent poser des questions. Souvent, les gens n'osent pas le faire car ils ont peur de se trouver bêtes. Un des fondateurs du Centre Georges-Pompidou disait qu'il voulait mettre dans les salles des mères de famille, car elles seraient capables de parler à tout le monde. On ne le ferait plus aujourd'hui mais l'idée est de trouver des gens capables de se mettre à la place des visiteurs qu'on accueille. Ces visiteurs, divers, seront intimidés et ne sauront pas forcément ce qu'ils viennent faire chez vous.
Quant à l'accueil des étrangers, il ne posera plus de problème de traduction dans une dizaine d'années, car nous aurons des systèmes d'interfaçage plurilingues automatiques. N'importe qui pourra converser avec une personne parlant une autre langue sans aucune difficulté. Nous appliquons la « loi Toubon », qui permet une expression en plusieurs langues : le français, l'anglais et l'espagnol, sans oublier la langue des signes et le braille car nous menons une grande politique en direction des personnes porteuses de handicap. Nous animons, depuis les origines, le groupe de bonnes pratiques des établissements culturels en matière d'accessibilité, groupe intitulé Réunion des établissements culturels pour l'accessibilité. Nous avons en la matière un savoir-faire et sommes consultés dans le monde entier sur ces sujets. L'attention qu'on porte aux gens qui voient mal, qui entendent mal ou qui ont des difficultés à se déplacer bénéficie à tout le monde. Il faut penser à prévoir des sièges, des lieux de repos et des endroits où l'on ne fait rien, où l'on respire et où l'on regarde par la fenêtre. Les lieux culturels ne sont pas que des distributeurs de contenu mais aussi des lieux de vie où les gens doivent se sentir bien. Il faut donner aux gens à manger, à boire et de quoi s'asseoir. Il faut prévoir des services d'information adéquats. C'est aussi en portant attention à ces petites choses que l'on crée un contexte d'accueil.
Comment expliquez-vous le succès d'Universcience ? Avez-vous des indicateurs des divers publics qui fréquentent votre établissement ? Arrivez-vous à dépasser les pratiques culturelles des Français ou bien votre succès ne concerne-t-il que celles et ceux qui fréquentent déjà des lieux culturels ? Je ne doute pas que la barrière symbolique soit plus importante à l'Assemblée nationale que chez vous, tant à cause du lieu que de la barrière politique, mais le champ de la connaissance et des sciences peut aussi être une barrière symbolique pour la mauvaise élève en mathématiques que je suis. Or, je puis témoigner qu'il y a un vrai plaisir à venir dans votre établissement. Je suis issue d'une ville très populaire où votre établissement est l'un des lieux les plus connus et les plus cités. Est-ce parce qu'il n'est pas identifié comme un lieu culturel ? Sa force n'est-elle pas d'être un lieu d'accueil porteur d'un vrai univers ?
Une des clefs est d'avoir toujours quelque chose à dire de nouveau ou, présenté autrement, de renouveler votre offre au public assez fréquemment pour que vous reveniez sur le devant de la scène médiatique. Les musées qui n'ont pas d'activité récurrente voient leurs visiteurs venir une fois, pas deux. Pour fidéliser un public, il faut donc dynamiser sa programmation. C'est pourquoi tous les sites culturels, quels qu'ils soient, ont « événementialisé » cette programmation. Cela a un coût et les équations financières sous-jacentes à cet impératif ne sont pas évidentes. Il faut faire la part entre vos présentations dites permanentes et vos présentations dites temporaires, même s'il existe des modèles hybrides. Si nous avons réussi, c'est que chaque fois que le public nous rend visite, il trouve quelque chose qui n'y était pas la fois d'avant. Nous avons un public de fidèles abonnés qui viennent nous voir régulièrement. La Cité des enfants présente par ailleurs l'avantage que les enfants ne se lassent pas de revenir au même endroit même si notre responsabilité d'opérateur culturel est de faire évoluer ce lieu et d'y apporter progressivement des choses nouvelles. Il faut trouver un équilibre entre renouvellement et familiarité.
Ensuite, un musée qui est dans les beaux quartiers comme le Palais de la découverte n'est pas la même chose qu'un musée qui est dans le 19e arrondissement. Les gens qui passent la porte de la Cité des sciences et de l'industrie incarnent la société française dans sa diversité. Ce n'est pas le même public que celui que vous trouvez au Palais de la découverte. Les lieux font beaucoup. Je dis souvent au président Stéphane Troussel que nous sommes une institution de Seine-Saint-Denis car plus de la moitié des lecteurs de la bibliothèque viennent du « 9.3 ». Il leur suffit de franchir le périphérique, donc ils se sentent chez eux chez moi. Ils ne viennent pas aussi facilement au Palais de la découverte qui est plus éloigné, à de nombreux égards. C'est un atout d'être dans le 19e arrondissement et de faire partie du plus grand parc culturel européen, qui comprend la Philharmonie, la Grande Halle de la Villette, le Zénith, le théâtre de la Villette et le Conservatoire national supérieur de musique et de danse de Paris – sans parler d'un parc magnifique où l'on fait son jogging, où l'on promène son chien, où l'on se dore au soleil, où l'on pique-nique et où les enfants jouent au ballon.
Enfin, il y a l'école. C'est à elle de faire venir les gens. Les enfants ont moins de préventions culturelles et symboliques que les adultes. Ils ont un rapport beaucoup plus immédiat à l'offre culturelle. Il faut impérativement que les écoles viennent dans nos établissements car après cela, les enfants y font revenir leurs familles. Nous avons d'ailleurs un programme permettant aux enfants qui sont déjà venus dans notre établissement avec leur classe de revenir gratuitement avec un membre de leur famille. Nous soignons donc les enseignants qui sont les prescripteurs. Nous leur proposons des visites privilégiées gratuites, des publications et des dossiers pédagogiques. Un jour, peut-être que la représentation nationale imposera l'obligation annuelle de faire visiter aux enfants un établissement culturel. Il est des pays où la sortie dans un centre scientifique est obligatoire chaque année. Ce ne doit pas forcément être chez Universcience. Cela peut se faire au Muséum, etc.
Je ne suis pas, sinon par échantillons, la catégorie socioprofessionnelle de mes visiteurs. Je sais que nous sommes un peu moins mauvais que la moyenne et que les gens qui ne viennent pas dans nos établissements sont ceux que le progrès n'intéresse pas, qui ont un rapport à la modernité fortement déterminé par leurs origines sociales et qui considèrent que la mondialisation n'a que des effets négatifs. Cette question dépasse un peu mon champ d'action mais je la partage avec vous. Encore une fois, il faut miser sur l'école. Les élèves représentent 30 % de la fréquentation au Palais de la découverte. Les attentats ont entraîné, du jour au lendemain, une diminution par deux de la fréquentation scolaire. Nous en avons récupéré la moitié de cette moitié. Il reste donc un quart des élèves à récupérer. Nous avons été très handicapés par ce phénomène conjoncturel.
Il y a trois ans, j'ai eu la chance de participer à une journée de réflexion sur les sciences cognitives et le droit à la Cité des sciences et de l'industrie, dans un espace intitulé « la classe du numérique ». J'ai été particulièrement impressionné par cet ensemble de dispositifs mis à disposition du public, des chercheurs et des universitaires.
Vous avez mentionné tout à l'heure les moyens que vous avez mis en œuvre pour assurer votre succès. Quels sont les prochains défis que vous avez identifiés et que vous serez, je pense, à même de relever avec succès comme vous l'avez fait jusqu'ici ? La Cité des sciences et de l'industrie est un très bel établissement qui est presque mondialement connu. J'ai de la famille qui vient de Belgique, spécialement pour le visiter.
Je vous remercie, monsieur le député. Nos défis sont nombreux. Il en est un qui me tient à cœur mais qui est difficile à relever : mes effectifs, d'une centaine de salariés, ne sont pas représentatifs de la diversité de la société française. Quand vous accueillez du public, il est important qu'il trouve dans l'établissement la même diversité que celle dans laquelle il vit. Les pays anglo-saxons sont beaucoup plus en avance que nous en ce domaine. Nous avons quand même commencé à faire travailler des doctorants car ce sont des jeunes. Les adolescents ont donc en face d'eux non pas des vieux comme moi mais des gens qui ont l'âge d'être leurs grands frères ou leurs grandes sœurs. Nous venons d'être labellisés par l'Association française de normalisation (AFNOR) au titre de l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes et au titre de la diversité, mais la labellisation n'est qu'un point de départ et la validation d'un plan d'action. Il importe que nos établissements soient à l'image de la société. Pour être un établissement démocratique, qui plus est financé par la collectivité publique, il faut être ouvert. Or, nous sommes très loin de ce que nous pourrions faire. C'est de l'ingénierie professionnelle mais elle compte beaucoup car quand le public entre dans un établissement, il voit d'abord les personnes qui l'accueillent puis les murs, les bâtiments et les offres. Il faut veiller à raconter des histoires et non pas une histoire, faire la place à la pluralité des points de vue et être ouvert aux débats qui agitent la société et le monde. Nous avons un rapport important aux contenus puisque nous disons qu'il y a une méthode scientifique, que la science n'est pas une opinion et que chacun pense ce qu'il veut de l'utilisation qui est faite de la science dans la société par les entreprises privées et les pouvoirs publics. Nous proposons par exemple une exposition sur Louis Pasteur en ce moment au Palais de la découverte, dans le cadre de laquelle nous démontrons les vertus scientifiques de la vaccination – qui ne sont pas un sujet de discussion. Ensuite, que les pouvoirs publics décident d'une obligation vaccinale est un autre débat mais si vous ne comprenez pas ces vertus scientifiques, vous ne pourrez pas participer à ce débat.
Nous avons d'ailleurs réfléchi, à la demande de la ministre des solidarités et de la santé, à la manière de développer des outils pour réhabiliter une parole experte. C'est sans doute notre deuxième défi. Nous vivons dans un monde où la parole experte est dévaluée, où les politiques ont du mal à se faire entendre et où les corps constitués sont critiqués. Ainsi, depuis Fukushima, les Japonais ne croient plus la presse, les politiques ni les industriels – et ils n'ont pas totalement tort. Ils vont donc dans les centres de science, singulièrement dans celui de Tokyo, pour poser des questions, sachant que c'est un lieu de neutralité dans lequel ils peuvent disposer d'une information de qualité. C'est notre rôle que d'être un lieu public dans lequel puissent être posées et débattues des questions complexes, dans un climat de neutralité.
Il s'agit donc de savoir comment nos institutions, au-delà de leur aspect ludique et divertissant, peuvent contribuer à animer le débat en société au XXIe siècle, dans un contexte marqué par la remise en cause de la parole experte et le développement des fake news. Ce n'est pas facile pour nous car il commence à y avoir des études scientifiques sur nos métiers et on a fait des découvertes horribles (Sourires). Jusqu'à présent, nous vivions dans un monde simple : je m'adressais à vous et ce que je vous disais venait combler une lacune – c'est ce qu'on appelle le deficit model. Nous étions des sachants face à un public ignorant. Il suffisait de nous mettre en contact pour que la lumière jaillisse. Or, les études montrent que plus leur niveau d'études est élevé, plus les gens ont des idées arrêtées, même si elles sont fausses. Autre problème, plus vous donnez aux gens d'informations, plus vous les confortez dans leurs idées fausses. Nous sommes donc en pleine réflexion sur nos méthodes. L'idée est de susciter la curiosité. Sur la vaccination, par exemple, nous essayons d'expliquer ce qu'est un risque – individuel comme collectif. Nous essayons de faire comprendre les choses en prenant des chemins détournés. Il nous faut investir dans la science de nos métiers. Nous allons donc créer au Palais de la découverte d'ici à 2024 une unité de recherche sur la médiation scientifique pour essayer de devenir plus intelligents en utilisant les méthodes de la science que nous promouvons.
En matière d'utilisation du numérique, vous nous avez montré la tablette de réalité augmentée. L'ayant vue, je l'ai trouvée très impressionnante et aimerais beaucoup qu'on en ait une à l'Assemblée nationale. Pourriez-vous nous donner un autre exemple percutant d'utilisation du numérique ? D'autre part, si, aujourd'hui, vous aviez carte blanche pour définir et concevoir l'espace d'accueil et d'exposition de l'Assemblée nationale, qu'imagineriez-vous dans vos rêves les plus fous ?
Je vous donnerai un autre exemple d'utilisation du numérique. Dans le cadre de notre exposition sur Louis Pasteur, nous avons des écrans qui, tout d'un coup, deviennent transparents et qui offrent une vision en profondeur grâce à des dispositifs en deux et en trois dimensions. Nous avons notamment un écran sur lequel vous voyez quelqu'un en train de vous parler, qui est en fait est un plongeur dans la mer. Puis il passe un petit balai pour nettoyer la vitre, et vous découvrez un vrai aquarium derrière. Nous travaillons pour la réouverture du Palais de la découverte à la création d'un cabinet d'émerveillement. Nous allons notamment proposer d'assister en direct à des opérations à cœur ouvert, comme dans le bloc opératoire. Nous sommes au début du commencement de ce que le numérique pourra offrir au public en matière d'expériences.
Vous m'avez demandé ce que j'imaginais dans mes rêves les plus fous pour l'Assemblée nationale. Nous sommes évidemment à disposition pour répondre à toutes vos questions car nous faisons de l'ingénierie et répondons à ce type de demandes. Nous travaillons notamment en ce moment pour le gouvernement omanais, qui souhaite rénover un établissement vieillissant, mais aussi pour de grandes collectivités locales en France. Nous avons répondu à un appel d'offre pour le centre d'interprétation d'une abbaye classée au patrimoine mondial de l'UNESCO. Faire un musée est un métier. Il faut donc que vous vous associez les compétences de ceux qui savent puis concevoir, produire, mettre en œuvre et exploiter. Il y a des professionnels dans ce secteur et beaucoup d'établissements, non seulement le mien, développent ce type de prestations.
S'agissant de la gratuité, si la vie était simple, rendre gratuits les établissements culturels entraînerait une augmentation de leur fréquentation. Ce n'est pas le cas. La gratuité ferait que ceux qui fréquentent déjà ce type d'établissements les fréquenteraient encore plus. La dépense profiterait donc à des personnes venant de toute façon. Il faut comparer les coûts et les avantages de la gratuité, et ne pas faire d'idéologie. Dans le monde des musées au sens large, on considère qu'il ne faut pas imposer de tarifs prohibitifs, qu'il faut prévoir des tarifs spéciaux pour certains types de personnes, notamment pour les classes scolaires et qu'il faut faire des opérations de gratuité à certains moments, mais que la gratuité généralisée n'est pas la clef. Les collections permanentes des musées de la ville de Paris sont gratuites, ce qui montre bien que la gratuité peut être efficace. C'est un choix mais ce n'est pas cela qui, par miracle, vous permettra d'attirer tout le monde.
Nos méthodes d'évaluation sont doubles. Nous faisons des enquêtes de satisfaction de nos visiteurs. Cela fait partie des indicateurs que m'impose l'État pour juger de ma performance. Comme tout indicateur, cela a ses limites mais cela permet d'avoir des débats intéressants. Nous avons des objectifs en nombre de visiteurs et d'abonnés à notre compte Twitter ainsi que des objectifs quant à la manière dont nous consommons nos crédits d'investissement et quant au rythme de renouvellement de nos expositions permanentes.
Je vous remercie beaucoup de ce premier échange qui nous permet de mieux appréhender nos finalités et notre ambition. J'espère que nous pourrons aller ensemble au Palais de la découverte et à la Cité des sciences et de l'industrie.
L'audition s'achève à dix-sept heures.
Audition de M. Stéphane Guy, directeur du service des affaires immobilières et du patrimoine de l'Assemblée nationale.
L'audition commence à dix-sept heures dix.
Mes chers collègues, nous reprenons le nouveau cycle d'auditions prévu par notre seconde feuille de route afin de déterminer comment aménager à l'Assemblée nationale un lieu d'accueil, de médiation, d'information et de débat ouvert, accessible à tous. Notre rapport devra être achevé à la fin du mois de mai prochain afin d'être présenté au Bureau à la mi-juin.
Nous accueillons aujourd'hui M. Stéphane Guy, directeur du service des affaires immobilières et du patrimoine de l'Assemblée nationale, accompagné de M. Xavier Brun, ingénieur en chef. Nous nous sommes déjà rencontrés au mois de février, avec la rapporteure, Delphine O, pour une première exploration, dans ce travail que nous avons à accomplir au cours de ces quelques mois. Il nous était en effet difficile de concevoir le projet sans penser à un espace ; c'est donc tout naturellement que nous nous sommes tournées vers vous aux prémices de cette réflexion.
Il est important que le groupe puisse maintenant vous entendre, avant de procéder à des auditions, de rencontrer des interlocuteurs pertinents, d'effectuer des déplacements et de visiter quelques parlements européens.
Nous souhaiterions que vous puissiez évoquer la situation actuelle de l'accueil du public dans les espaces de l'Assemblée nationale qui lui sont déjà dévolus, mais surtout les perspectives possibles pour créer le lieu qui nous intéresse aujourd'hui. Dans le cadre de notre première feuille de route, nous avions songé à l'hôtel de Broglie, qui nous semblait intéressant. Notre réflexion nous a conduits à considérer que cet espace ne pouvait pas répondre à nos attentes, car, bien que proche du Palais Bourbon, il aurait exigé du public venant visiter l'Assemblée nationale qu'il fasse un détour.
Nous nous sommes alors intéressés aux possibilités offertes par les travaux réalisés sous l'emmarchement dans l'enceinte de notre Assemblée. Je précise que le terme d'emmarchement, en l'occurrence, concerne les marches qui conduisent à la colonnade de l'Assemblée nationale donnant sur le Quai d'Orsay, et par où nos compatriotes pensent que nous entrons, alors même que nous ne fréquentons jamais cette entrée, la plus symbolique au titre du patrimoine.
Nous attendons, monsieur Guy, que vous nous apportiez des éléments d'information supplémentaires sur les possibilités offertes, et déterminiez avec nous les principales hypothèses portant sur l'aspect le plus minimal – on parle aujourd'hui de la « boîte » – jusqu'au plus ambitieux. Nous avons toutefois conscience qu'il nous revient de définir en priorité notre projet : ce que nous voulons montrer, faire voir, connaître et dire, ce qui implique l'utilisation des espaces déjà existants.
Une définition plus précise des besoins d'espace et d'aménagement nous renseignera sur les coûts éventuels ; car les aspects financiers ne manqueront pas de peser sur tout projet. À ce stade, nous ne vous demandons pas de déterminer de façon très précise les possibilités, mais de nous permettre d'intégrer l'élément financier dans les hypothèses que vous nous présenterez, même si nous avons présent à l'esprit que vous n'engagez pas ainsi l'Assemblée nationale.
Madame la présidente, madame la rapporteure, mesdames et messieurs les députés.
Vous avez souhaité entendre des représentants du service des affaires immobilières et du patrimoine sur la problématique de l'accueil du public. À cette fin, je suis accompagné par M. Xavier Brun, ingénieur en chef, membre de la cellule maîtrise d'ouvrage, qui connaît autant nos locaux que les différents projets qui ont pu être conçus pour améliorer cet accueil.
Je présenterai tout d'abord, si vous m'y autorisez, la situation actuelle puis les espaces éventuellement aménageables, sachant que lors de notre entrevue préalable vous avez d'emblée marqué un intérêt pour une extension des espaces actuels du Palais Bourbon.
En vérité, vous connaissez parfaitement les espaces aujourd'hui dévolus à l'accueil du public. Ils sont éclatés, peu pratiques, peu accessibles.
On observe tout d'abord que le public accède au Palais Bourbon par les entrées des 126 et 128 rue de l'Université sur invitation des autorités politiques, et par le Quai d'Orsay pour les visites ou la séance publique. La boutique, qui ailleurs clôt d'ordinaire les circuits de visite des châteaux et des expositions, est excentrée puisqu'elle est située au rez-de-chaussée d'un autre bâtiment, l'immeuble du 110 rue de l'Université, loué à l'assureur Generali.
Les surfaces sont les suivantes : au Palais-Bourbon, 648 m2 sont affectés à l'accueil et, au 110 rue de l'Université, la Boutique représente 191 m2, réserves incluses. Le total ne représente donc que 839 m2.
L'ensemble est indéniablement étriqué, compte tenu de l'importance des flux de personnes et des stockages. Il l'est plus encore au regard des nouvelles nécessités de l'accueil et de la sûreté.
La situation est encore plus mauvaise si on décrit les circuits. Le public arrivant devant l'entrée du Quai d'Orsay – environ 100 000 personnes par an – arrive dans un tout petit espace de contrôle de 57 m2 servant aussi d'entrée pour la presse et ne disposant ni de toilettes ni de vestiaires. Il suit ensuite une sorte de boyau et traverse une zone de bureaux correspondant aux locaux de la division de la Presse, descend un escalier très étroit pour accéder à la salle de projection et aux toilettes, pour remonter par le même escalier et entamer la visite proprement dite du Palais, ou se rend aux vestiaires, distants, pour assister à une séance publique.
Ce circuit n'est pas accessible aux personnes à mobilité réduite, et je sais que cette question constitue pour vous un sujet de préoccupation. Dès l'entrée, sur le Quai, des marches empêchent ces personnes de suivre leur groupe ; elles doivent donc passer par la cour du Pont. À l'intérieur, au sein de la division de la Presse, des escaliers descendant ou montant constituent de nouveaux obstacles. Pour se rendre à la salle de projection située au sous-sol, de nouvelles marches restent à franchir. Les personnes à mobilité réduite ne peuvent donc pas voir le film institutionnel ; aucun contournement n'est possible.
Nous avons essayé d'améliorer les choses. Du côté des sanitaires du sous-sol, ont été installés un élévateur puis une rampe. Les sanitaires eux-mêmes ont été intégralement agrandis et refaits, et des toilettes pour personnes à mobilité réduite ont été conçues. Mais la salle de projection demeure inaccessible et les escaliers qui y mènent ne sont pas aux normes.
Compte tenu des espaces en cause, on ne peut multiplier les élévateurs. Cette solution n'est au demeurant guère satisfaisante : les élévateurs restent chers alors qu'ils sont au total peu utilisés ; ils nécessitent une maintenance coûteuse et il n'est pas rare qu'ils soient hors service – comble de malchance – au moment même où, justement, on a besoin d'eux. Une telle mésaventure, tout à fait fâcheuse, nous est arrivée récemment.
Les difficultés ne s'arrêtent pas là ! Dans l'autre sens, pour sortir, cour du Pont, il faut encore emprunter des marches depuis la rotonde. À cet endroit, aucune rampe n'est concevable compte tenu de la pente exigée par les normes. Un élévateur extérieur, soumis aux intempéries toute l'année, serait une source permanente de soucis et de frais de maintenance. Côté rue Aristide Briand, nous avons prolongé un ascenseur pour desservir la sortie, mais il reste à adapter cette dernière, ce qui est un peu compliqué.
Nous sommes ainsi probablement au bout de ce qui peut être fait. L'amélioration de la situation semble passer désormais par des travaux de gros œuvre impossibles à concevoir sans restructuration complète et sans projet global.
On ajoutera que d'autres interventions techniques seraient nécessaires. Les réseaux électriques de la zone sont à revoir sérieusement. Les équipements audiovisuels de la salle de projection sont en fin de vie après une vingtaine d'années de service : la sonorisation est médiocre et le projecteur très moyen. Ils ne permettent pas, au-delà des films institutionnels, de projections de films de qualité. Avec 94 places, la salle elle-même est par ailleurs probablement trop petite alors que son emplacement, proche de l'Hôtel de Lassay, suscite régulièrement de l'intérêt – ce qui est compréhensible – à la Présidence.
Au-delà de ces aspects techniques, il est clair que les espaces d'accueil – et vous l'avez d'emblée pointé – ne répondent plus aux exigences d'une institution de la République ouverte sur la société – la directrice du service de la communication pourrait vous détailler cette faiblesse – et ne sont pas au niveau d'un espace patrimonial aussi prestigieux que le Palais Bourbon.
Il n'y a pas d'espace d'exposition, soit permanente, soit provisoire, sur le rôle de l'institution ou ses grandes heures, ou son patrimoine. Des expositions ont certes été organisées jadis dans la galerie de liaison entre le Palais et l'immeuble Jacques Chaban-Delmas, mais ce n'est plus possible pour des raisons d'accès, de sécurité, de normes et de sûreté. De son côté, la Bibliothèque organise des expositions, mais elle vise essentiellement la mise en valeur de son fond, dans son propre espace, très limité. Des expositions ont aussi pu être organisées dans la salle des Pas perdus, par exemple sur l'année 1914 et l'engagement des députés de l'époque, mais elles gênaient les circulations, notamment lors des séances, ou étaient gênées par elles. Enfin, la galerie des Fêtes de l'Hôtel de Lassay a pu servir à plusieurs reprises : anniversaire du Code civil en 2004 ou des Congés payés en 2016, mais le cadre s'est révélé peu adapté, les visites impliquant des inscriptions préalables.
On peut aussi naturellement, comme vous l'avez fait, relever qu'il n'existe aucun lieu pédagogique, propice aux débats citoyens ou aux rencontres entre députés et électeurs.
Il n'existe pas plus d'espace de restauration rapide pour les visiteurs. Les scolaires n'ont, par exemple, pas d'autre solution pour déjeuner sur le pouce que de se rendre dans un jardin alentour ou sur l'esplanade des Invalides pour consommer leur sandwich, éventuellement sous la pluie et dans le froid.
Je ne saurais oublier le caractère perfectible de l'accueil au regard de la sûreté. Vous comprendrez toutefois que mon propos soit quelque peu laconique compte tenu du sujet. Quelques travaux seraient nécessaires, sachant qu'ils ne doivent pas de leur côté freiner excessivement les accès. L'exercice, on l'a vu à l'occasion de la rénovation de l'accueil du 128 rue de l'Université en 2016, n'est vraiment pas simple… Actuellement, l'entrée du Quai d'Orsay ne dispose et ne peut disposer que d'un seul scanneur et portique pour le public. Ce qui est peu.
Un mot enfin sur la Boutique. Extérieure au Palais Bourbon, puisque située au 7 rue Aristide Briand, éloignée des circuits de visite et ne permettant pas vraiment d'événements comme des séances de dédicace ou de débats autour de récentes publications, ses surfaces sont limitées. L'espace ouvert au public n'occupe que 117 m2, ses réserves, indispensables, représentant en sus 74 m2 au total.
L'ensemble de ces données est connu de longue date. Si une opération de rénovation devait être lancée, il serait d'ailleurs peut-être opportun qu'elle fasse l'objet d'un reportage public, vidéo ou photo, afin de dissiper tout malentendu sur l'objectif des travaux, à l'instar de ce qu'a fait – assez bien à mon avis – la Chambre des Communes.
Seul en effet – on l'a dit – un projet d'ampleur peut résoudre de façon satisfaisante les problèmes soulevés. Des réflexions ont déjà eu lieu. L'opération actuellement menée sous l'emmarchement, au nord, est l'occasion de les relancer et de repenser ces espaces. Votre groupe de travail est en mesure de fournir le cadre nécessaire ainsi que de nouvelles lignes directrices.
S'agissant des réflexions déjà menées, on doit signaler l'étude présentée au Bureau de l'Assemblée nationale le 23 novembre 2011.
Le projet imaginé par un programmiste était ambitieux ; tellement qu'il n'a pas été mis en œuvre, d'autres priorités ayant été retenues sous la XIVe législature. Ce sont quelque 3 000 m2 supplémentaires qui étaient envisagés grâce à la valorisation des sous-sols situés sous le jardin de la buvette des parlementaires, l'emmarchement, la cour du Pont, le bâtiment actuel de l'accueil et même une partie du jardin de la Présidence. S'agissant du bâtiment d'accueil, deux options étaient présentées : un façadisme, avec démolition des planchers intérieurs, et la construction d'un nouveau pavillon. Une livraison cinq ans après les premières décisions était alors envisagée.
Ce projet ne peut aujourd'hui être repris tel quel : une importante opération sous l'emmarchement est en cours ; le pavillon d'accueil est désormais protégé par le plan de sauvegarde et de mise en valeur du VIIe arrondissement ; l'opération poursuivait des objectifs contradictoires impliquant des croisements de flux en prévoyant un meilleur accueil, mais aussi des espaces pour les députés. En outre, l'ampleur de l'opération impliquait des engagements financiers – 63 millions d'euros, hors travaux dans la zone Presse – peut-être incompatibles avec les orientations budgétaires actuelles, mais devant surtout être revus.
L'ouvrage mérite donc d'être remis sur le métier. La perspective de l'achèvement de l'opération d'emmarchement, au printemps 2019, y invite fortement. Les espaces dégagés n'attentent en effet qu'une utilisation au profit du public.
On rappellera qu'il est prévu, dans le cadre du confortement de l'emmarchement, menacé d'effondrement à la suite d'un lessivage des sols détecté en 2006 et dû à la présence d'une fosse fuyarde de récupération de condensats, de déplacer l'ensemble des installations techniques, à hauts risques, à un niveau inférieur, exactement sous le niveau où elles se situent actuellement. Le précédent collège des questeurs, pressentant les nécessités à venir, a décidé de profiter de l'opération pour faire creuser la partie située sous le parvis, devant l'emmarchement proprement dit. Cette « boîte » est en cours de réalisation, et vous avez eu l'occasion de la voir lors de votre visite de chantier. Elle ne devrait toutefois, au terme des travaux actuels, disposer d'aucun équipement, d'aucune ventilation, d'aucun plancher intermédiaire, d'aucun fluide : tout demeure à concevoir et à créer. Mais la localisation de l'espace est évidemment exceptionnelle. Toute la zone située entre le pourtour de l'hémicycle et le vestiaire du public d'une part et la zone d'emmarchement d'autre part pourrait constituer un lien vers cet espace.
On peut donc imaginer des espaces d'accueil passant de moins de 700 m2 à 3 000 m2 si l'on valorise la totalité de la cour du Pont, soit 1 000 m2, si l'on réhabilite sur plusieurs niveaux le pavillon d'accueil et si l'on intègre bien l'ensemble de la réserve foncière résultant de l'opération emmarchement en cours, soit 1 200 m2 en dehors des espaces techniques. Il faut toutefois prendre cette projection avec une extrême prudence, car des espaces en sous-sols requièrent, en termes de sécurité incendie, des dégagements et des équipements techniques fortement consommateurs d'emprises, très difficiles à évaluer à ce stade. On ne saurait donc aucunement dire aujourd'hui quelle serait la taille d'une salle d'exposition, d'une cafétéria ou d'un lieu de rencontre ouvert.
La Boutique pourrait en tout cas être rapatriée au Palais Bourbon, où elle avait d'ailleurs été créée à la fin des années 1980, et placée au terme des circuits de visite. Ce transfert serait d'autant plus logique qu'il est question, à l'issue de l'indispensable rénovation de l'ensemble de Broglie, prévue mi-2021, de renoncer à la location de l'immeuble qui l'abrite aujourd'hui.
Compte tenu des enjeux architecturaux – il s'agit aussi de donner une nouvelle image de l'Assemblée –, des contraintes techniques comme les passages de fluides, les évacuations, etc. ainsi que de l'importance des questions de sûreté et des estimations financières préalables, la procédure du concours pourrait être pertinente pour obtenir un projet parfaitement cohérent et traitant de tous ces aspects. Cela prend du temps – huit mois au minimum, après une phase programme et de sondages –, mais un projet de qualité, marquant, pour les cinquante ans qui viennent, passe sans doute par là. Concevoir des espaces d'exposition, des lieux d'accueil du public en sous-sol et des équipements interactifs réclame des expertises multiples qui ne s'improvisent pas. Cela vous a été clairement dit tout à l'heure lors de l'audition de M. Maquart. Il ne s'agirait pas d'une rénovation classique – de l'aménagement de locaux standards, de salles de réunion ou de bureaux comme à l'Hôtel de Broglie – mais de créer des espaces véritablement novateurs, à la hauteur du patrimoine historique du Palais Bourbon. Il appartient au collège des questeurs d'en décider.
Il faudra aussi, si l'opération doit être lancée, traiter de très nombreuses difficultés de chantier liées à l'occupation du site, en partie près de la salle des séances. Si l'on ne peut mener des travaux ni le jour ni la nuit pendant que l'Assemblée siège… cela peut être en effet assez compliqué et renchérir singulièrement l'opération. L'avantage de la « façade nord » est sa proximité avec le cœur battant du Palais. C'est aussi son inconvénient.
Il faudra aussi, comme l'a relevé précédemment Mme la rapporteure, traiter des conditions d'accueil du public pendant les travaux, en liaison évidemment avec le service de la communication. L'affaire serait négligeable si l'opération ne devait durer que quelques mois. Or, nous savons que cela ne saurait être le cas. Deux ans de travaux paraissent un minimum.
Compte tenu de ces éléments, le recours à un programmiste pourrait être une première étape éclairante pour tous : pour vous, pour nos autorités comme pour le service technique que nous sommes. Sur la base de vos préconisations et au vu d'un « terrain de jeu » net, il lui appartiendrait de décrire ce qui est envisageable dans l'espace considéré et les calendriers possibles. Le collège des questeurs pourrait être saisi de cette proposition à l'issue de vos travaux.
Des données comparatives seraient aussi sans doute utiles pour affiner un nouveau projet. Je crois savoir que vous en rassemblez, et que vous allez effectuer des déplacements. Je n'ai pas de vision platonicienne de l'enquête à l'étranger, mais je souhaite attirer votre attention sur le fait que si les projets menés au-delà de nos frontières peuvent être instructifs, suggestifs même, ils ne seront pas forcément « importables » au cas où le périmètre de la façade nord serait retenu, et ce pour de multiples raisons. S'il est question d'imaginer un nouvel accueil pour de nombreuses années, il faut par exemple tenir compte de l'environnement patrimonial dans lequel il s'insérerait – fruit d'une histoire plus que bicentenaire –, des règles d'urbanisme et des exigences de sûreté propres à notre pays. Certains parlements étrangers ne connaissent pas nécessairement les mêmes contraintes.
La contrainte est aussi budgétaire. Il nous faut aussi rénover d'autres espaces de l'Assemblée nationale : des salles de réunion supplémentaires et équipées de moyens de captation audiovisuelle nous sont demandées ; le Bureau et le collège des questeurs ont décidé l'acquisition puis la rénovation de l'ensemble de Broglie pour régler les problèmes d'espace dévolus aux députés et à leurs collaborateurs, souvent exigus, inégaux et parfois inconfortables, chauds l'été et froids l'hiver ; le défi environnemental réclame enfin des investissements croissants. C'est dire l'importance des tâches à mener de front. Lancer une opération telle que la rénovation et l'agrandissement de l'accueil actuel exigerait naturellement des moyens budgétaires et humains importants. On ne saurait le dissimuler. Au-delà de la définition des lignes directrices, pour laquelle votre groupe de travail va naturellement jouer un rôle essentiel, il appartiendra à nos autorités politiques de procéder aux choix qui s'imposent pour dégager ces moyens.
Permettez-moi de conclure en disant que le chantier que vous ouvrez répond indéniablement aux exigences du temps présent et qu'il est, par son ambition, ses contraintes, la multiplicité de ses facettes, particulièrement stimulant pour mon service.
Vous avez tracé l'historique des travaux effectués sur l'emmarchement, bien antérieurs à la présente législature.
Vous avez évoqué un budget de 63 millions d'euros, j'ai compris que l'objet des travaux précédemment engagés était le déplacement du dispositif de chauffage et autres systèmes techniques parce que le lieu ne répondait pas aux normes de sécurité. Si le groupe de travail ne formulait aucune proposition, au printemps 2019, ces espaces ne seront-ils effectivement constitués que de murs nus ?
Vous avez encore évoqué une période de huit mois, puis de deux ans de travaux. Si à l'issue de nos réflexions nous faisons des recommandations, sera-t-il possible de récupérer les travaux en cours, et les réorienter vers une autre finalité ? Quel serait le délai estimé entre le départ donné par le groupe de travail et la livraison des locaux ?
Je conçois que vous ne pouvez pas répondre à ces questions puisque nous ignorons ce que nous allons vous demander, mais j'imagine que les deux années que vous estimez nécessaires n'incluent pas le temps de préparation.
Enfin : qu'est-ce qu'un programmiste ?
Dix ans après l'apparition du sinistre, le chantier de l'emmarchement a pour objet la réparation des dégâts, qui consistent en un lessivage des sols, avec pour conséquence une déstructuration complète de la maçonnerie et, partant, de l'emmarchement de la façade nord. Les travaux en cours se limitent donc à refaire des fondations, et mettre à profit ce chantier pour déplacer les équipements techniques à un niveau inférieur à celui où elles se trouvent aujourd'hui.
À l'issue de ce chantier, à l'horizon du printemps 2019, nous serons en mesure de restituer des espaces actuellement occupés par des locaux techniques, afin de pouvoir les valoriser à proximité immédiate des espaces empruntés aujourd'hui par le public ; à savoir le vestiaire du public et le couloir du pourtour situé derrière l'hémicycle. Ces espaces seront libérés vides de toute occupation technique, sans pour autant disposer de l'infrastructure des futurs aménagements qui y seraient projetés. Il n'y aura donc pas d'installation technique de climatisation ni de ventilation.
Les deux ans envisagés constituent une épure imaginée en 2011 lorsque l'on a commencé à travailler avec un programmiste, donc une équipe d'architectes et de bureaux d'études techniques. Cette durée était susceptible d'être multipliée par des coefficients selon qu'il fallait travailler en horaires décalés, en fonction des perturbations causées par les travaux sur la salle des séances, qui est tout proche, ou de l'Hôtel de Lassay, avec la Galerie des Fêtes également à proximité.
Nous étions à la tête d'une séquence de deux ans de travaux, faisant suite à une période de recrutement des équipes, par voie de concours, et des entreprises chargées des travaux.
Un programmiste permet d'éclairer les choix initiaux, de présenter des options alternatives ainsi que les calendriers possibles et les espaces concevables dans un périmètre bien déterminé. Il est en effet hautement souhaitable de démarrer avec un « terrain de jeu » net afin d'éviter la multiplication de projets qui ne clarifieraient pas la prise de décision par nos autorités politiques.
Jusqu'où les locaux dévolus à l'accueil du public devront s'étendre. En 2011, il a été envisagé de creuser sous l'accueil actuel du public et en partie sous le jardin de l'Hôtel de Lassay. La chose est toute différente s'il n'est pas question d'entamer le jardin de la présidence. De même, le jardin de la buvette des parlementaires fait-il partie du terrain de jeu ou non ?
L'incidence sur le fonctionnement de l'institution ne serait absolument pas la même dans ces différents cas. C'est ce qu'il conviendrait de déterminer à l'avance.
Les 63 millions d'euros correspondent au projet tel qu'il était conçu en 2011 ; le coût de l'opération portant sur l'emmarchement est inférieur à 10 millions d'euros.
Si l'on s'en tient à la fameuse boîte que vous avez évoquée, ce sont 700 m2 qui sont disponibles. Pour arriver à 3 000 m2, faudrait-il, pour rejoindre le niveau - 1, et donc les espaces déjà existants pour l'accueil du public, creuser plus loin sous les jardins ?
Le gain de surface concernerait surtout la cour du Pont, pour faire le lien avec l'accueil actuel, qu'il faudrait rénover, et les nouveaux espaces situés sous l'emmarchement et sous le parvis.
MM Stéphane Guy et Xavier Brun produisent des plans en couleur.
La façade est constituée par la colonnade, l'emmarchement, et le parvis situé devant l'emmarchement.
Je rappelle que ce projet élaboré après consultation d'un programmiste impliquait une équipe constituée d'architecte et d'un bureau d'études, des gens dont le métier est d'établir un état des lieux, un audit des besoins, en fonction de la situation de l'existant, et de déterminer ce qu'il est possible de faire.
Le montant évoqué n'est plus d'actualité. La relocalisation des locaux techniques n'était pas prévue sous l'emmarchement, mais dans la perspective d'un creusement du jardin de la buvette, ce qui surenchérissait le projet. L'espace situé sous l'emmarchement avait, à l'époque, la double vocation d'améliorer les conditions d'accueil du public et la création de salles de réunion des commissions.
Le reste de la réflexion conduite par le programmiste en lien avec les services de l'Assemblée nationale, dont celui de la communication, demeure d'actualité, car tous les défauts constatés aujourd'hui étaient déjà identifiés en 2011.
Combien de temps faut-il compter pour conduire la réflexion, notamment avec un programmiste, avant le démarrage des travaux ?
En établissant un compte à rebours, il faut compter six mois pour le recrutement des entreprises chargées de réaliser les travaux, ce qui inclut les appels d'offres et les consultations propres aux marchés publics.
Avant cela, doit être prise en compte la période consacrée aux études réalisées par une équipe pluridisciplinaire composée d'architectes, d'ingénieurs et de spécialistes en ingénierie d'aménagement de musées, qui, selon la complexité du projet, occupe quatre à six mois. Cela suppose que le maître d'ouvrage, en l'occurrence l'Assemblée nationale, a constitué un programme, et implique un travail pouvant durer six mois, pour dresser un état des lieux, expertiser les besoins en réalisant un audit. Les contraintes sont par ailleurs sévères, et concernent le plan de sauvegarde du VIIe arrondissement, la réglementation applicable aux établissements recevant du public, notamment pour la sécurité incendie, la sûreté du site.
Le travail du programmiste consiste à formuler une équation sans forcément fournir une réponse architecturale. Car les architectes et ingénieurs que nous recruterons retranscriront ces besoins sous la forme d'une esquisse.
Cela représenterait donc un an et demi ? Entre quatre à six mois pour la programmation, autant pour l'étude de maîtrise d'œuvre, et six mois pour le recrutement d'entreprises du BTP ? À quoi viendraient s'ajouter deux ans de travaux environ.
En 2011, nous tablions sur une période de cinq ans entre la première décision et l'achèvement des travaux.
Lancer un concours pour choisir un maître d'œuvre constitue une entreprise un peu plus compliquée ; or j'ai la faiblesse de penser qu'au regard de la nature des lieux concernés, le concours s'impose.
Si j'entends bien, l'intervention d'un programmiste ne signifie pas nécessairement que des travaux seront engagés ; c'est ce qui s'est produit en 2011. Car le recours à un programmiste permet d'évaluer ce qui est réalisable dans les délais souhaités ; c'est pourquoi si nous souhaitons que les choses aillent à leur terme, notre vigilance ne doit pas être prise en défaut.
Pouvez-vous nous indiquer ce qui a fait qu'en 2011, à l'issue de la programmation, les travaux n'ont pas été réalisés ?
Lors de la précédente législature, les autorités politiques ont défini d'autres priorités.
L'un des enseignements du travail de ce programmiste – qui montre d'ailleurs l'intérêt de faire intervenir des tiers – aura été de prendre conscience que la zone nord du Palais-Bourbon devait être essentiellement consacrée à l'accueil du public, sans y créer de salles de réunion, ce qui risquait de mêler les flux du public avec ceux des députés.
En effet, un tel choix n'aurait pas manqué de créer de sérieux problèmes fonctionnels et de sûreté. De ce fait, qui explique aussi l'abandon du projet, la création dans cette zone de salles de réunion avait perdu sa pertinence.
Est-il donc possible de considérer que, dans le projet que nous envisageons, qui est ambitieux mais emporte assez peu de fonctionnalités et de détails, les principaux obstacles – car il y en a toujours – que vous identifiez portent sur la sûreté et les coûts ? En voyez-vous d'autres ?
Pas vraiment, d'autres difficultés résulteraient du contexte réglementaire. Pour les professionnels que nous venons d'évoquer, il s'agit plutôt d'un terrain de jeu vierge, car ces contraintes peuvent être retournées et mises à contribution du projet.
Vous avez indiqué que l'Assemblée nationale ne louerait plus le local occupé par la boutique.
Ce qui est prévu, c'est que lors de l'achèvement de la rénovation de l'Hôtel de Broglie, où devraient être créés de nombreux bureaux de députés, la location du rez-de-chaussée de l'immeuble du 110 rue de l'Université, n'ayant plus de justification, pourrait être abandonnée.
L'Assemblée est propriétaire de l'immeuble sis 3 rue Aristide Briand, mais pas de ce local, ce dont on ne se rend pas bien compte, car, ces bâtiments étant contigus, une fois que l'on se trouve à l'intérieur, le passage de l'un à l'autre est peu perceptible.
Il me semble que nous serons amenés à nous revoir au cours de la prochaine période (Sourires.). D'autres membres du groupe de travail souhaiteront peut-être se rendre sur place, car cette visite a été très éclairante pour la rapporteure et moi-même sur le choix du lieu.
Merci, messieurs, et à bientôt.
La réunion s'achève à dix-sept heures cinquante.
Membres présents ou excusés
Groupe de travail sur l'ouverture de l'Assemblée nationale à la société et son rayonnement scientifique et culturel
Réunion du jeudi 15 mars 2018 à 16 heures
Présents. – Mme Elsa Faucillon, M. Jean François Mbaye, Mme Delphine O
Excusée. – Mme Marguerite Deprez-Audebert