Mission d'information sur le thème « bâtir et promouvoir une souveraineté numérique nationale et européenne »

Réunion du jeudi 17 décembre 2020 à 9h30

Résumé de la réunion

Les mots clés de cette réunion

  • avocat
  • brevet
  • intellectuelle
  • propriété
  • propriété intellectuelle
  • start-up
Répartition par groupes du travail de cette réunion de commission

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La réunion

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Audition, ouverte à la presse, de M. Didier Patry, directeur général de France Brevets, de MM. Guillaume Ménage et Vincent Puyplat, directeurs adjoints, et de Mmes Anne-Sophie Sebire, directrice juridique, et Audrey Lenne, directrice conseil au sein du cabinet Rivington

La séance est ouverte à 9 heures 30.

Présidence de M. Philippe Latombe, rapporteur.

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Nous auditionnons aujourd'hui France Brevets, une société fondée en 2011, détenue par l'État et la Caisse des dépôts et consignations, dont la mission est « d'accompagner les entreprises dans la valorisation de leurs innovations par la structuration de leur propriété intellectuelle et par sa défense à travers le monde ».

Sont présents pour cette visioconférence M. Didier Patry, directeur général de France Brevets, les deux directeurs adjoints M. Guillaume Ménage et M. Vincent Puyplat, Mme Anne-Sophie Sebire, directrice juridique, et Mme Audrey Lenne, directrice conseil au sein du cabinet Rivington.

Cette audition s'inscrit dans le cadre des réflexions que nous menons sur la souveraineté numérique. Cette notion recouvre non seulement les sujets classiques relatifs à nos infrastructures, sujets que nous avons déjà largement explorés, mais aussi les enjeux propres à la protection et à la valorisation de la propriété intellectuelle, c'est-à-dire des brevets déposés par nos entreprises.

Dans ce cadre, nous nous réjouissons, monsieur le directeur général, de pouvoir échanger avec vous et votre équipe sur votre conception de la souveraineté numérique française et européenne et sur la façon dont France Brevets peut contribuer à la promouvoir. Je souhaite que ce moment d'échange nous permette également d'aborder votre actualité pour l'année 2021 et la façon dont la crise de la covid a pu impacter vos activités en 2020.

J'aimerais d'abord que vous nous présentiez France Brevets et son activité, en insistant notamment sur le dispositif de la Fabrique à brevets destiné aux start-up et aux petites et moyennes entreprises (PME) de la Tech à fort potentiel. Nous aimerions aussi savoir de quelle façon vous vous êtes organisés pour poursuivre votre activité dans le cadre de la crise épidémique, notamment comment vous anticipez les mois à venir.

Je voudrais ensuite vous interroger sur la façon dont vous concevez la souveraineté numérique française et européenne. Ce concept, parfois rapproché de celui d'autonomie, désigne une forme d'indépendance, de capacité à maîtriser son destin numérique et à ne pas subir les contraintes imposées soit par des acteurs publics comme les États soit par les acteurs privés que sont les géants du web (GAFAM). Je voudrais savoir de quelle façon cet impératif croissant peut se traduire au sein de votre secteur d'activité, notamment pour les start-up.

Enfin, je souhaite aborder avec vous la question de l'innovation qui est au cœur de la souveraineté technologique de la France et de l'Europe. D'après les données du dernier tableau de bord européen de l'innovation (TBEI) qui comprend 27 indicateurs distincts, la France se classe dans le groupe des innovateurs notables avec des pays comme l'Allemagne, l'Autriche, la Belgique ou l'Estonie. Quel regard portez-vous sur nos performances nationales ? Le cas échéant, comment serait-il possible de nous rapprocher encore plus du haut du classement, c'est-à-dire des champions de l'innovation que sont le Danemark, la Finlande, les Pays-Bas et la Suède ?

J'aimerais aussi vous entendre sur les performances européennes comparées à celles de nos concurrents directs, la Chine et les États-Unis. Nos échanges sur ce point devraient nous permettre de dresser ensemble le bilan des secteurs dans lesquels les entreprises françaises et européennes déposent le plus ou le moins de brevets et d'évoquer les moyens de les encourager à innover encore davantage.

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Didier Patry, directeur général de France Brevets

France Brevets a une assez petite équipe de 17 personnes. Nous sommes essentiellement logés à Paris, dans le 9e arrondissement, près de la gare Saint-Lazare. La société travaille avec un nombre important de consultants, avec des personnalités extérieures et avons une présence en Chine, en Corée et au Japon ainsi qu'en Amérique du Nord et au Canada. Les personnes situées dans ces pays ne sont techniquement pas des employés de France Brevets mais des consultants que nous utilisons durant 60 % à 80 % ou 90 % de leur temps.

Nous faisons de plus appel à un certain nombre de consultants dans le domaine de la technologie ou du droit, à beaucoup d'avocats et de conseils en propriété intellectuelle. Comme nous devons traiter des dossiers technologiquement complexes, nous devons d'abord être professionnels ce qui nous impose de nous référer à des personnes de référence dans leur domaine. Nous faisons donc régulièrement appel à des consultants de très haut niveau dans des domaines technologiques très spécifiques tels que le transport, l'automobile, les véhicules autonomes, les batteries ou la physique quantique ou l'informatique quantique ou la cybersécurité.

Nous avons deux actionnaires puisque France Brevets a été créée en 2011 dans le cadre du premier plan d'investissements d'avenir (PIA). Nous avions à l'époque une relation assez forte avec le Commissariat général à l'investissement (CGI) devenu maintenant le Secrétariat général pour l'investissement (SGPI). Nous avons dix administrateurs, quatre de l'État, quatre de la Caisse des dépôts et consignations et deux administrateurs du privé, dont notre président Olivier Appert.

Techniquement, France Brevets est une société privée, une société par actions simplifiée (SAS). Nous avons de ce fait la capacité d'être titulaires de brevets. Nous sommes aussi en mesure de rentrer dans des relations contractuelles qui peuvent être complexes et d'aller en justice. Nous représentons en justice certaines entreprises pour faire valoir leurs droits. Notre mission est de protéger et défendre l'industrie française. Quand besoin est, nous représentons des PME, quelquefois des entreprises de taille intermédiaire (ETI) pour faire valoir leurs droits dans certaines juridictions. Il est donc important que France Brevets soit une SAS pour avoir cette liberté d'action.

Nos activités principales tournent autour de la propriété intellectuelle, essentiellement des brevets. Notre première mission est de générer des modèles économiques qui permettent de satisfaire l'industrie et l'économie françaises.

Le premier point est d'apporter de la valeur. Dans nos missions, il s'agit d'abord d'axer sur la qualité et de se dire que la propriété intellectuelle n'est pas intéressante si elle n'a pas de valeur. Cela ne signifie pas qu'il faille nécessairement qu'elle rapporte de l'argent. Nous ne parlons pas nécessairement de revenu mais il faut que cette propriété intellectuelle apporte quelque chose à l'entreprise. Notre combat quotidien est d'expliquer aux sociétés françaises qu'accumuler des brevets et de la propriété intellectuelle sur des étagères ne sert à rien, qu'il est fondamental que cette propriété intellectuelle soit activée ou activable à tout moment.

Très concrètement, nous avons dans un premier temps généré des revenus pour des entreprises ou des laboratoires de recherche en monétisant de la propriété intellectuelle, donc en utilisant les portefeuilles de brevets disponibles pour générer des revenus.

Notre programme phare est le programme Near Field Communication (NFC), une technologie qui permet d'émuler les techniques de paiement et les transactions à courte distance. Certaines entreprises l'utilisent aujourd'hui pour payer dans les magasins, notamment avec le téléphone. Cette technologie est en grande partie une technologie française, créée par une très belle entreprise française qui a été leader de la carte à puce. Notre mandat est donc d'administrer un programme de licences et, si possible, de générer des revenus lorsque l'entreprise est titulaire de ces brevets. Deux entreprises sont concernées : une PME française et un grand groupe français de télécoms. Les licenciés sont actuellement des géants de la Tech, des télécoms. France Brevets est certainement la seule entité en France à avoir réussi à conclure ce type de contrats. Cela n'a parfois pas été sans douleur puisque, manifestement, tout le monde n'a pas envie de payer ces licences. Il faut parfois un peu montrer les muscles. Il nous faut donc aller en justice pour faire valoir les droits des entreprises que nous représentons en arguant de la contrefaçon, que nous transformons après accord en un accord de licence.

Nous nous sommes ensuite focalisés sur les entreprises à fort potentiel les plus vulnérables ce qui nous a amenés à développer le programme de la Fabrique à brevets (FaB). L'idée de base est d'équiper les start-up et PME de portefeuilles de brevets de qualité pour que ces brevets soient utilisables. C'est le principe que j'ai déjà évoqué : la propriété intellectuelle sur étagère, qui ne sert à rien, n'est pas activable ou activée, n'est pas utile. Cette propriété intellectuelle vient grever le budget de l'entreprise ou impacter négativement son compte d'exploitation. Il faut donc qu'elle ait une utilité et une efficacité. Ce n'est possible qu'à partir d'une certaine qualité et d'une certaine masse. Toutes les analyses que nous faisons nous démontrent que les entreprises les plus offensives, celles qui gagnent, jouent avec ces deux critères de quantité et de qualité. La France n'est malheureusement pas très bien placée pour ce qui est de la quantité.

Une quarantaine d'entreprises ont été analysées ou accompagnées dans le cadre de ce programme. Certaines sont maintenant sorties du programme. Nous étions jusqu'à présent en phase de test puisqu'il a fallu faire évoluer l'environnement contractuel. Nous aimerions étendre ce programme en 2021, avec l'ambition d'accueillir une trentaine d'entreprises.

Nous n'avons pu accueillir en 2020 que sept entreprises du fait de notre modèle économique : nous prenons à notre charge les frais de constitution d'un portefeuille de brevets. Il s'agit d'abord d'identifier les inventions à breveter, pas nécessairement brevetables mais qu'il est intelligent de breveter, ce qui va dans le sens de la recherche de qualité. Ensuite, nous travaillons avec nos partenaires conseils en propriété intellectuelle, qui sont les représentants juridiques de la start-up que nous épaulons, pour définir un axe, une direction, un objectif, un volume de brevets. Main dans la main, nous constituons le meilleur portefeuille de brevets au vu de la situation de la société à l'instant où nous l'assistons.

Cela signifie que nous essaierons de doter une entreprise au stade de l'amorçage d'au minimum cinq brevets puis, au fur et à mesure de son évolution, ce nombre augmentera pour aller jusqu'à quarante ou cinquante. Dans la plupart des domaines techniques, électronique, informatique, science des matériaux, mécanique, peut-être même la chimie mais pas la pharmacie et la biotechnologie, le principe de base est qu'il faut entre trente et cinquante brevets pour pouvoir peser sur les marchés.

Nous prenons donc à notre charge ces frais. Nous payons les factures des conseils en propriété intellectuelle pour la mission et l'objectif que nous nous sommes assignés, pendant une période variant entre douze et vingt-quatre mois. À la fin du contrat, nous demandons le remboursement des frais que nous avons avancés, additionnés d'une marge correspondant au service d'accompagnement et de chef de projet que nous fournissons. Techniquement, ce n'est donc ni un prêt ni une subvention. À ce stade, ce n'est pas non plus un investissement en capital puisque France Brevets ne prend pas de position au capital. C'est une avance remboursable.

Ce projet demande à évoluer car le taux de sinistralité des entreprises est assez élevé en ce moment. Nous courons malheureusement le risque de ne pas pouvoir amener ce programme à l'équilibre. Nous devons trouver un moyen de rémunération différent, supérieur à celui que nous avons actuellement. Nous y travaillons avec des fonds d'investissement. Le constat est qu'il serait bon que nous ayons des collaborations avec les fonds pour qu'ils identifient avec nous les sociétés ayant le plus fort potentiel afin que nous nous retrouvions de façon synchrone dans les cycles d'investissement.

L'idée de ce programme est aussi de doter les entreprises d'une propriété intellectuelle qui soit satisfaisante pour les investisseurs, de façon à ce qu'ils considèrent cette propriété intellectuelle comme suffisamment attractive et solide pour investir de façon sereine.

Le constat est net : le niveau de sophistication des investisseurs s'accroît car le ton est très anglo-saxon. Les Anglo-Saxons ont toujours cherché à investir dans des entreprises possédant des actifs immatériels de qualité. Cet état d'esprit arrive de plus en plus en France. Notre programme rencontre donc une demande des investisseurs et cela se traduit par des investissements, des réussites.

Nous espérons que ce programme FaB continuera et évoluera. Des entreprises nous interrogent et nous avons ainsi eu l'opportunité la semaine dernière de discuter avec l'Office de la propriété intellectuelle de Singapour qui s'intéresse à ce que nous faisons. Il trouve que ce modèle est intéressant et songe à le développer également. La Chine nous a aussi posé beaucoup de questions sur ce programme ; le ministère chinois de l'économie et de l'industrie s'y intéresse.

Nous avons donc beaucoup de satisfactions, des réussites et des échecs. Certaines des premières entreprises que nous avons aidées ont pu trouver des fonds, conclure des partenariats ce qui est important pour une toute petite entreprise. Pour conquérir des parts de marché, elle doit trouver des partenaires et certaines ont trouvé de très beaux partenaires. D'après leurs témoignages, cette propriété intellectuelle leur a permis d'avoir un dialogue plus équilibré. C'est le problème des petites entreprises : au-delà d'être toujours à la recherche de cash, il s'agit aussi de rééquilibrer le rapport de forces qui est par nature déséquilibré.

Nous avons aussi eu quelques échecs. Certaines entreprises n'ont pas réussi à survivre. Cela a été pour nous une difficulté. Pour rééquilibrer cette situation, nous devons aller chercher des revenus complémentaires. C'est le cycle naturel de la vie ; toutes les start-up ne réussissent pas. Par contre, plus nous les accompagnons et plus nous sommes présents tôt dans le cycle, plus nous avons de chances de travailler avec elles. Malheureusement, d'autres éléments interviennent dans la recette de la réussite d'une start-up : le management, l'appétence du marché, parfois des coïncidences. Lorsque plusieurs start-up arrivent avec le même produit sur le même marché, toutes ne survivent pas. Un certain taux de sinistres est donc normal.

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Quelles sont à votre avis les pistes d'évolution pour diversifier vos sources de revenus et permettre l'équilibre économique de ce programme ? Envisagez-vous de rentrer au capital de ces structures, directement ou indirectement ? Envisagez-vous plutôt un partenariat avec les fonds en faisant de la facturation ? Prévoyez-vous de la prestation de services ou de la participation ou un mélange des deux ?

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Didier Patry, directeur général de France Brevets

Nous envisageons un mélange des deux solutions. L'objectif in fine n'est pas du tout d'être au capital mais d'utiliser des instruments financiers tels que des bons de souscription d'actions (BSA) ou des obligations convertibles afin de profiter de la valorisation de l'entreprise et du cycle suivant d'investissement. À long terme, nous n'avons pas l'intention d'être au capital ni d'être un investisseur actif. Nous ne souhaitons ni diriger l'actif des entreprises ni avoir une quelconque influence sur l'entreprise.

Toutefois, vous avez raison, il existe des instruments financiers qui permettent de participer à l'évolution de la valeur de l'entreprise et d'en capter une partie sans que ce soit pénible ou difficile pour l'entreprise. De nombreuses entreprises sont prêtes à ce type de schéma, à condition que nous ne venions pas charger inutilement la partie administrative. Nous devons donc travailler avec les fonds, être synchrones avec les levées de fonds au moment où la charge administrative est la plus lourde. Nous envisageons de plus d'avoir un mécanisme de prestation de services.

Nous souhaitons que ce programme soit un véhicule d'investissement pour guider de l'argent de grandes entreprises vers de plus petites entreprises. Notre objectif est également que le tissu industriel français de moyennes et de grandes entreprises trouve sur son sol des start-up qui lui plaisent, qui l'intéressent, qui soient sujettes à des acquisitions. C'est ainsi que la mécanique économique sera dynamique et viable.

Toutes les grandes entreprises se transforment. Par exemple, les grandes entreprises électriques ont besoin d'aller vers la domotique – capter des données, véhiculer de l'information, avoir des capteurs partout – et cette croissance se fait souvent par une croissance inorganique, c'est-à-dire par l'acquisition de start-up. Il serait plus intéressant que ces grands groupes français acquièrent des start-up françaises plutôt que des start-up américaines, israéliennes, allemandes, anglaises ou chinoises par exemple. Même si c'est possible, l'acculturation et l'intégration sont toujours nettement plus difficiles.

Une telle acquisition peut faire partie d'une stratégie économique nationale et d'un jeu géopolitique mais nous ne pourrons permettre l'évolution, la croissance, la stabilité et le virage de grandes entreprises françaises que si elles trouvent sur leur sol un vivier de start-up suffisamment viables. Le programme de la Fabrique à brevets pourrait être un moyen de véhiculer de l'argent vers ces start-up et d'avoir une position de petit investisseur discret pour favoriser l'essor d'un secteur. Nous avons déjà des discussions avec des groupes qui s'intéressent à ce programme.

Il est important de noter que la start-up, dans le modèle actuel, est propriétaire de ses brevets, en reste propriétaire et en fait ce qu'elle veut. Nous n'avons pas ou très peu de leviers d'action sur ces brevets. Nous ne cherchons pas à faire de la valorisation. Nous voulons simplement que les start-up soient équipées comme il faut, avec la quantité et la qualité nécessaires donc un calibrage parfait, le plus précis qu'il est possible pour qu'elles atteignent l'objectif économique qu'elles se sont fixé.

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Pensez-vous que les PME et les grandes entreprises françaises ont suffisamment cette culture d'achat de l'immatériel comme peuvent l'avoir notamment les Anglo-Saxons ? Vous avez dit que cette culture de la qualité de l'immatériel arrive en France. Sommes-nous en retard sur ce sujet ? Existe-t-il encore des freins ? Le fait que votre travail consiste à le promouvoir signifie qu'il a existé des freins. Sont-ils en train d'être levés, sont-ils déjà levés ?

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Didier Patry, directeur général de France Brevets

Cette remarque est extrêmement pertinente. Effectivement, le constat est net qu'un certain nombre d'entreprises qui ont eu un très fort succès sur le marché – par exemple dans le domaine des moteurs de recherche ou du positionnement précis par GPS ou de la fourniture de taxis ou des places de marché numériques – ont eu des stratégies de brevets hybrides. Elles ont engagé des phases d'achat de brevets. Leur propriété intellectuelle s'est construite par des acquisitions, en particulier de très grosses acquisitions ayant pour but de renforcer la position de la société.

Malheureusement, force est de constater que nous sommes assez en retard. La philosophie en ce moment, dans ce pays, est plutôt une stratégie des années 1980 ou même 1970 consistant à constituer sa propriété intellectuelle à l'aide de sa recherche et développement (R&D) interne. Ce n'est pas du tout ce que font certaines entreprises du côté ouest de l'Atlantique et celles qui ont eu beaucoup de succès dans le domaine de la Tech n'ont pas procédé ainsi.

Nous devons nous imprégner de cette façon d'agir. Dans le cadre de la Fabrique à brevets, nous suggérons aux entreprises avec lesquelles nous travaillons de regarder ce sujet. Évidemment, tout n'est pas à acheter. De nombreux brevets sont sur le marché et de nombreuses ventes ont lieu actuellement. De très grandes sociétés de télécommunications, dont une société canadienne qui fut vraiment précurseur dans le domaine des télécoms, mettent leur portefeuille de brevets en vente. Un très gros opérateur allemand du domaine des télécoms et une grosse société informatique japonaise ont également mis leur portefeuille de brevets en vente. Un grand nombre de brevets sont donc sur le marché.

Il existe également des brevets à acheter dans le stock de la recherche publique française. Il faut reconnaître la qualité de nos laboratoires de recherche, en particulier d'un laboratoire dont le siège est dans le 16e arrondissement à Paris. Il est souvent remarqué même par les organismes outre-Atlantique qui notent la recherche. De brevets de qualité sont issus de la recherche française et nous pourrions imaginer que les start-up ou les PME françaises s'équipent en brevets achetés auprès de la recherche française.

Je pense important d'étudier cet axe car le retour sur investissement est intéressant. En effet, il est plus facile d'acheter quelque chose de qualité en le voyant, en pouvant le jauger, l'examiner, l'analyser. Lorsqu'une entreprise dépose une demande de brevets de sa propre R&D, elle n'a aucune idée de ce que cela donnera. Il faut attendre trois, quatre ou cinq ans pour arriver à maturité, pour que les brevets soient délivrés et pour commencer à avoir une idée de la pertinence et de l'impact des brevets. À mon avis, il faut donc acheter sur étagère. Le seul blocage est que les entreprises n'y pensent pas, surtout pour des entreprises dont un pilier important dans leur stratégie intellectuelle est de ne pas se faire copier en protégeant leurs inventions.

Toutefois, un autre pilier important est de ne pas se faire agresser. Notre stratégie est de protéger et défendre. Pour défendre, il faut avoir des moyens de défense et, souvent, ses propres brevets ne sont pas les meilleurs moyens de défense pour une entreprise agressée sur un marché lors d'une tentative de déstabilisation ou de prédation organisée par une entité quelle qu'elle soit pour racheter l'entreprise. Nous avons déjà observé ce phénomène et nous souhaitons d'ailleurs mettre sur pied un système permettant de l'éviter.

Le premier objectif à notre avis n'est plus d'éviter de se faire copier mais de ne pas se faire agresser. En effet, une agression provoque des pertes économiques importantes et, même sans décision de justice, pendant les premières années de contentieux en première instance par exemple, les coûts sont énormes. Pour vous donner un ordre d'idée, en France aujourd'hui, les frais de défense en première instance sont de 100 000 à 200 000 euros. En Allemagne, il faut compter entre 2 et 3 millions d'euros et il s'agit d'argent qu'il faut sortir tout de suite. En Chine, cela coûte entre 500 000 et 2 millions d'euros. Aux États-Unis, le coût monte entre 4 et 6 millions par an. Ce coût est une pression énorme pour une ETI, encore plus pour une PME et, pour une start-up, c'est la mort.

Pour être capable de réagir, il faut des brevets capables d'impacter l'agresseur. Les brevets issus de sa propre R&D sont rarement percutants face aux plus grands agresseurs. Cela implique de développer le pilier « Défense » en pensant à des acquisitions. Ces acquisitions de brevets ne sont pas destinées à être en relation avec sa propre activité mais avec l'activité de l'agresseur pour être capable de l'impacter, d'avoir une adhérence sur sa surface d'activité et de préférence sur sa surface d'activité la plus chère, celle qui est la plus importante pour lui. Cela permet de rééquilibrer le rapport de force.

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Aujourd'hui, votre activité va donc au-delà du conseil stratégique et s'intéresse aussi à la protection juridique, au conseil juridique préalable.

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Didier Patry, directeur général de France Brevets

Attention, nous collaborons étroitement avec des avocats et des conseils en propriété intellectuelle mais nous ne pouvons pas aller dans un domaine d'activité qui est réglementé car nous ne sommes pas accrédités, bien que certains d'entre nous aient cette formation et cette qualification. Nous n'agissons ni en tant que conseil en propriété intellectuelle ni en tant qu'avocat. Nous nous refusons à donner des avis de droit et nous ne le ferons pas.

Par contre, il existe une ingénierie du droit, une gestion des activités très liées au juridique par association avec un conseil en propriété intellectuelle ou un avocat. Nous constatons que, malheureusement, surtout vis-à-vis des avocats, la perception dans ce pays est trop souvent que les avocats servent à faire sauter des amendes ou à régler des problèmes de divorce.

L'avocat, comme le conseil en propriété intellectuelle, est un stratège. Tous deux ont une vision stratégique et sont indispensables pour formuler une stratégie non pas d'entreprise mais d'ingénierie juridique, que ce soit pour se protéger ou pour être à l'offensive. Nous incitons donc très fortement les entreprises à travailler avec un avocat et/ou un conseil en propriété intellectuelle en fonction des besoins, selon s'il s'agit de déposer un brevet, une marque, un modèle ou d'un besoin plutôt d'architecture contractuelle ou de préparer un contentieux ou une offensive.

L'important pour nous est surtout que la direction de l'entreprise s'approprie la stratégie juridique. C'est rarement le cas. Soit il existe un ou une juriste dans l'entreprise qui est capable d'architecturer cette ingénierie, soit il n'en existe pas et c'est souvent le cas. Il faut généralement attendre très longtemps dans le cycle d'évolution de l'entreprise pour qu'un juriste entre dans l'entreprise. Ce vide n'est pas suffisamment comblé aujourd'hui par le conseil juridique des avocats ou des conseils. Nous voyons beaucoup de directeurs d'entreprise très intelligents, très diplômés, très capables qui, eux-mêmes, écrivent leurs contrats ou bataillent avec leurs partenaires. C'est bien sûr normal pour la partie commerciale ou économique mais ils sont personnellement à la manœuvre pour la rédaction du texte et ce n'est pas normal. Certains éléments du droit sont d'une extrême complexité, de plus en plus complexes, ce qui signifie qu'ils peuvent oublier beaucoup de points sur les garanties, les indemnisations…

Nous sommes un peu sur une ligne de crête. Nous ne voulons pas être en infraction d'un point de vue réglementaire. Nous ne voulons pas être en porte à faux avec nos collègues et partenaires qui sont avocats et conseils. Nous voulons que l'entreprise ait une stratégie la plus fine, la plus forte et la plus pertinente possible. Il faut que les dirigeants d'entreprise s'en emparent et soient capables d'exprimer, vis-à-vis de leurs investisseurs, quelle est leur stratégie. Lorsqu'ils s'accaparent leur stratégie commerciale, marketing, certaines stratégies réglementaires, la stratégie de ressources humaines, de propriété intellectuelle et d'architecture juridique, cette stratégie doit être formalisée, comprise et exprimée par la direction.

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En comparant avec nos voisins anglo-saxons à l'ouest et nos voisins chinois à l'est, en comparant aussi au sein de l'Europe avec le tableau de bord européen de l'innovation, la France est dans la partie moyenne supérieure, parmi les innovateurs notables, mais pas dans le haut du classement parmi les champions de l'innovation. Qu'en pensez-vous ? Quelles bonnes pratiques pourrions-nous copier chez nos voisins européens ou généraliser en Europe pour devenir une véritable force d'innovation et pouvoir rivaliser avec nos voisins ?

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Didier Patry, directeur général de France Brevets

Nous pouvons prendre la question sous plusieurs angles selon la façon d'interpréter les statistiques.

Un rapport de l'Office européen des brevets vient de sortir en décembre sur la quatrième révolution industrielle. Ce rapport comporte beaucoup de chiffres. Les auteurs se sont limités à des domaines très spécifiques tels que la collecte d'informations, le logiciel, la connectivité… Nous devons malheureusement constater qu'aucune entreprise française ne fait partie des 25 plus gros déposants au monde. Cette liste comporte des entreprises allemandes, néerlandaises mais pas d'entreprise française. Les Échos ont repris cette étude et noté le fait que la France est placée en troisième position en Europe mais il faut aussi regarder le nombre de dépôts de brevet par habitant. Nous sommes de ce point de vue en huitième position en Europe, juste devant l'Espagne et l'Italie. L'Allemagne est très loin devant : elle dépose entre deux et quatre fois plus de brevets que la France, toutes catégories confondues. La France est aussi tout simplement absente de certains classements ce qui est un sérieux problème.

Que faire ? C'est une vaste question. Notre programme de la Fabrique à brevets, tentait de réagir, avec nos moyens et surtout intelligemment, c'est-à-dire en ciblant au mieux. Globalement, lorsque nous n'avons pas toutes les munitions dont nous aurions besoin, la seule réponse est de faire un tir précis ou de s'échapper mais ce n'est pas ce que nous souhaitons faire. Nous voulons être à l'offensive. Nous devons donc cibler et calibrer au mieux ce dont l'entreprise a besoin. Notre réponse n'est pas dans le volume. Ce n'est pas possible.

Le moteur de recherche français qui, avec beaucoup d'ardeur, essaie actuellement de conquérir des parts de marché n'arrivera pas au volume de brevets du moteur de recherche américain que la plupart des gens utilisent. Le déséquilibre est d'un à mile, il est trop grand pour être rattrapé. Toutefois, par la qualité et un certain volume, nous pouvons tenter de remonter.

Ce volume n'a pas besoin d'être aussi grand que celui des Américains. Les chiffres américains sont généralement hors de proportion et c'est naturel puisque telle est culturellement leur façon de faire et qu'ils ont d'énormes moyens. La situation est d'ailleurs identique pour nos amis chinois. La réponse n'est certainement pas en essayant de copier ce que font les autres mais nous pouvons essayer de nous rapprocher des modèles allemand ou suisse.

Je ne suis pas d'accord sur le fait que la propriété intellectuelle doive être low cost, qu'il faille rogner les taxes perçues par les offices. C'est un faux problème et le problème n'est pas dans les taxes. Le vrai problème est d'obtenir le retour le plus approprié pour chaque euro dépensé donc de choisir le bon conseil en propriété intellectuelle ou le bon avocat. Il faut aussi s'assurer que la collaboration soit forte, que le temps alloué au conseil pour la rédaction des demandes de brevet soit le plus grand possible avec un budget adéquat, pour aller vers la qualité. Je ne crois donc ni au low cost ni à une course aux chiffres.

Il nous faut cependant augmenter certains de nos chiffres. Comment le faire ? Peut-être devrions-nous observer ce que font les Allemands. L'acculturation à la propriété intellectuelle se fait très jeune, dès l'école primaire. De nombreuses écoles enseignent la propriété intellectuelle et l'incitation est forte pour les inventeurs, avec une rémunération beaucoup plus importante.

Nous faisons notre part, en essayant d'enseigner dans des universités, des écoles, des colloques. Nous essayons d'être présents et d'acculturer mais je pense qu'une réflexion au niveau de l'éducation nationale serait nécessaire pour amener vers une éducation plus forte à la propriété intellectuelle. Il faut le faire sans pudeur et je pense que c'est la première étape.

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Les Allemands déposent-ils beaucoup de brevets parce qu'ils développent beaucoup chez eux ? Vous disiez que nous devions avoir création de brevets à la fois par la R&D à l'intérieur de l'entreprise et par l'acquisition sur étagère. Les Allemands sont-ils aussi de forts acquéreurs sur étagère ? Ont-ils ces deux piliers ou privilégient-ils la création en interne ?

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Didier Patry, directeur général de France Brevets

Nous n'avons malheureusement pas ces chiffres ; ce sont des analyses qui pourraient être faites. Notre regard se portait actuellement plus sur le côté ouest de l'Atlantique pour lequel nous avons des données que nous exploitons. Nous n'avons pas de données du côté allemand mais il faudrait effectivement aller observer la situation.

D'après les informations que j'ai du fait de mon passé dans l'entreprise et le monde industriel, les Allemands s'intéressent plus à la R&D interne car il existe de fortes incitations pour les inventeurs, avec à la clé une très forte rémunération en cas de succès de l'invention. La charge administrative imposée pour être capable de corréler tel brevet avec tel produit ou tel programme est d'ailleurs considérable pour les entreprises. Il s'agit de savoir si tel brevet de tel inventeur est à la source ou a contribué au succès d'un produit. C'est un énorme casse-tête administratif qui donne beaucoup de travail aux entreprises mais se traduit par le doublement du salaire de l'inventeur certaines années. C'est donc un très gros bonus qui incite à la R&D interne.

Les Allemands achètent aussi des entreprises et, en même temps qu'ils achètent une entreprise, ils acquièrent de la propriété intellectuelle.

Il ne nous semble pas intéressant d'entrer dans la guerre des volumes et de tenter de copier les Américains, les Allemands ou les Chinois. Même si la course n'est pas nécessairement perdue, elle risque de nous essouffler économiquement. Pour nous, la solution est aussi dans la structure systémique, c'est-à-dire dans une organisation intelligente des entreprises, par filière, pour que les entreprises définissent une stratégie commune de propriété intellectuelle et y travaillent ensemble. C'est très novateur et peut apporter une plus grande efficacité sans dépenses ou sans dépenses complémentaires ou avec des dépenses très faibles.

Cela signifie concrètement que les entreprises se cotisent pour acheter des brevets : en se cotisant à dix pour acheter un brevet, chacun ne paie que 10 % du prix ce qui montre bien l'intérêt de l'opération. L'autre intérêt de cette opération est l'intelligence collective. Beaucoup d'entreprises ne sont pas au niveau de sophistication voulu et elles peuvent bénéficier des activités de leurs pairs lorsqu'elles communiquent avec eux. En offrant une plateforme de dialogue sur la stratégie de propriété intellectuelle aux chefs d'entreprises ou aux responsables au sein des entreprises, nous pouvons percoler, diffuser une vision stratégique vers les plus faibles et les plus petits.

Nous travaillons donc actuellement sur un programme de stratégie de filière, par filière, pour que les entreprises associent leurs moyens. Cette mutualisation offrira une dissuasion : les brevets acquis coûteront certes moins cher à chacun mais, surtout, ils apporteront un effet de dissuasion contre les agresseurs potentiels. Le fait d'être en groupe permettra un deuxième niveau de dissuasion puisqu'un groupe a moins de risques d'être agressé qu'une entreprise isolée.

Je ne suis donc pas sûr qu'il faille imiter ce que font les autres en ce qui concerne les volumes de brevets. Je pense que cette quête est un peu dangereuse comme nous l'avons vu récemment dans le cas d'une start-up française ayant une très belle technologie qui est allée manifestement beaucoup trop loin dans son volume de brevets, tellement loin qu'elle a fini par faire peser trop de coûts sur sa trésorerie et s'est retrouvée en très grande difficulté.

Nous proposons un programme d'alliances, de coalitions, de groupements. Nous y travaillons depuis plus d'un an et avons présenté ce programme aux différents cabinets, aux décideurs, aux cercles de décision et aux cercles industriels. Notre conseil d'administration a approuvé le lancement de ce projet. Il devrait donc être lancé en 2021. Ce projet est extrêmement novateur en France et en Europe. Il existe des initiatives similaires outre-Atlantique. Elles ont d'ailleurs fonctionné ce qui nous inspire beaucoup.

Cette réponse est à notre avis pertinente, pragmatique et peu coûteuse. Elle représentera pour les entreprises une fraction de ce qu'elles devraient payer pour déposer un seul brevet grâce à la mutualisation. Nous n'excluons pas le partage, pour ceux qui sont intéressés, de leurs propres brevets au profit de la communauté de la filière. Ceux qui le font bénéficieraient d'une diminution de leur cotisation et éventuellement d'une prise en charge de leurs frais de brevets par les cotisants de la filière. L'effet sera ainsi double : les membres de la filière profiteront de brevets qui ne sont pas les leurs et celui qui met ses brevets au pot commun verra ses coûts diminuer donc aura des charges moins importantes et pourra réinvestir dans l'économie ou dans sa propre R&D.

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Vous avez dit que les entreprises, actuellement, ne disposent pas forcément d'une structure juridique en interne ou n'ont pas le réflexe d'une structuration juridique en externe. Vous travaillez avec des conseillers pour les aider sur la partie brevets et avec des avocats pour la partie juridique. Vous êtes donc au cœur du système et voyez l'ensemble de la situation. Que pourrait faire la puissance publique pour vous donner plus de fluidité dans votre travail ? Pourrions-nous enlever rapidement certains grains de sable ? Existe-t-il des gros cailloux auxquels nous devons nous attaquer pour vous aider à moyen terme ?

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Didier Patry, directeur général de France Brevets

L'important serait d'améliorer la collaboration entre les outils du PIA. Depuis une dizaine d'année, nous avons tous appris et nous sommes aujourd'hui à un niveau d'expertise et de professionnalisme nettement plus élevés. Je pense que le moment est venu de nous demander comment articuler et coordonner au mieux tous ces outils.

Lorsque nous faisons la promotion d'un portefeuille de brevets de qualité, de taille suffisante au travers du programme de la Fabrique à brevets, nous incitons l'entreprise à acheter des brevets auprès de la recherche publique. Ces brevets peuvent se trouver dans les sociétés d'accélération du transfert de technologies (SATT) ou auprès d'instituts techniques, de laboratoires de recherche. Plus nous avons de visibilité sur les brevets disponibles sur les étagères, plus nous pourrons aller vite. Une collaboration entre ces organismes et nous-mêmes serait donc très intéressante.

Cela peut concerner le Centre national de la recherche scientifique (CNRS) et CNRS Innovation, l'Institut Pasteur ou l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) avec Inserm Transfert. Nous collaborons déjà, grâce à des relations personnelles ; nous nous croisons régulièrement mais je pense que, en augmentant cette collaboration, nous permettrons de mieux satisfaire les besoins de l'industrie française et d'avoir plus de fluidité dans la mécanique, à tous les niveaux.

Au niveau des institutions, nous avons actuellement un bon dialogue avec les cabinets et avec un certain nombre de députés ou de sénateurs. Nous avons beaucoup œuvré pour le plan d'action pour la croissance et la transformation des entreprises (loi PACTE) qui nous a semblé être une excellente proposition et que nous avons fortement soutenu. Nous avons bataillé en sa faveur et cela nous a permis de nouer des liens avec certains députés et des sénateurs. Cet échange extrêmement fructueux a également alimenté notre réflexion personnelle.

La collaboration est fondamentale et nous devons avoir une vision à 360 degrés. Cela peut être fait très rapidement, par exemple au sein du plan de relance dans lequel un ou des chefs de projet pourraient intégrer l'élément « propriété intellectuelle ». Nous collaborons avec France Stratégie qui est évidemment l'entreprise qui « met sur le radar », ce que pourrait être le futur, les risques et les opportunités. Toutes les informations doivent aller vers le plan de relance pour que, au sein du plan de relance, l'intégration des composantes de la propriété intellectuelle ait lieu aussi rapidement que possible, avec la mise en place de mesures correctives ou de plans de protection ou de parades. Nous proposons de créer ces parades dans le cadre d'une stratégie par filière. Ces parades peuvent être mises en œuvre immédiatement.

Il n'existe pas énormément de cailloux mais tout le monde est extraordinairement occupé, encore plus du fait de la pandémie puisqu'il y a urgence à sauver la France en quelque sorte, les PME et les artisans qui sont en très grande difficulté. La propriété intellectuelle n'est pas forcément la principale préoccupation et c'est tout à fait naturel.

Toutefois, en 2021, pour la relance, l'ambition n'est pas seulement de rester à genoux mais de se lever, de courir et si possible de gagner la course. Nous ne gagnerons la course que si nous avons des stratégies de propriété intellectuelle sophistiquées. Il ne s'agit pas seulement d'en avoir ; elles doivent être au plus haut niveau de sophistication car nos partenaires et parfois concurrents, à l'est ou à l'ouest, sont dans un très haut niveau de sophistication, dans une prise en compte et une intégration très précoce de la propriété intellectuelle et des brevets, avec des objectifs très nets. Ainsi, le plan d'expansion de la Chine cite la propriété intellectuelle et les brevets comme un levier pour cette expansion économique. C'est normal puisque c'est ce qu'ont fait nos amis d'outre-Atlantique. La Chine a tout à fait saisi cette philosophie et s'en inspire.

Plutôt que d'enlever des grains de sable, il s'agit donc de lancer un signal au plus haut niveau des institutions, des cabinets et des ministères, de dire que la propriété intellectuelle est importante, qu'il faut y penser, l'intégrer et l'intégrer avec des professionnels.

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La crise pandémique actuelle a un impact sur l'économie. Laissera-t-elle des traces ? Ne relèguera-t-elle pas l'ensemble du processus de brevets et de propriété intellectuelle au second plan s'il faut d'abord survivre économiquement ? Comment relancer la machine pour 2021 ?

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Didier Patry, directeur général de France Brevets

Il y a effectivement urgence et tous les responsables – Bruno Le Maire, Agnès Pannier-Runacher, Cédric O – se sont très fortement mobilisés. Nous enregistrerons bien sûr des pertes malgré ce gros effort. Je n'ai pas l'impression que la propriété intellectuelle soit négligée même si elle n'est pas citée immédiatement. Nous sommes un peu négligés dans l'urgence mais c'est naturel et nous ne pouvons rien y faire.

Toutefois, il faut s'assurer que l'argent mis sur la table se transforme rapidement en valeur. Ce ne sera pas simple mais il se produit une prise de conscience intéressante, visible dans des expressions telles que « souveraineté ».

La souveraineté est pour nous l'indépendance opérationnelle, le droit de choisir entre une entreprise française et une entreprise d'un autre pays. Je crois que nous allons dans le sens de cette indépendance opérationnelle. La pandémie a eu pour vertu de faire apparaître cet élément.

Vous et moi communiquons aujourd'hui sur une plateforme de visioconférence qui n'est pas européenne. Je crois que l'ordinateur que j'utilise actuellement n'est pas de marque européenne pas plus que le téléphone à côté de moi, le logiciel que nous utilisons ou la majorité des composants électroniques de mon ordinateur. Nous l'avons compris et je pense qu'un réveil a lieu.

Nous voyons déjà dans le Digital Services Act (DSA) et le Digital Market Act (DMA) un travail collectif de la Commission européenne et des États membres en faveur d'une idée de Europe first ou de France first. Je pense que c'est important et nous amènera à réfléchir à la souveraineté, à l'autonomie et à l'indépendance opérationnelle. Cela signifie avoir des entreprises viables, qui survivent et grandissent.

Que faisons-nous pour rééquilibrer les rapports de force très déséquilibrés entre nos entreprises et les entreprises étrangères ? Les cadres des marchés sont parfois un coupe-gorge pour nos entreprises, surtout outre-Atlantique où des entreprises se sont fait agresser localement, au tribunal, avec des coûts énormes – 4 à 6 millions de frais d'avocats par an que l'entreprise ne récupère pas, même si elle gagne – et donc un impact très important sur la marge opérationnelle.

Une entreprise ne survit pas sans marge. Il est donc impératif que les entreprises préservent leur marge. La marge sur un véhicule ou sur une batterie est très faible, de l'ordre du pourcent. Ce n'est pas comme lorsque je me fais un café : les capsules de café font actuellement environ 80 % de marge. Sur un véhicule, l'entreprise est au pourcent près. Si elle doit payer des frais de licence à des entreprises externes parce qu'elle ne dispose pas de la technologie et des brevets nécessaires, cela posera problème.

Cette autonomie opérationnelle ne pourra donc être acquise que lorsque nous aurons un choix local, la liberté de choisir, ce pour quoi il faut encore avoir des entreprises à choisir ! Si nous ne parvenons pas à protéger nos entreprises lorsqu'elles sont mises à mal à l'étranger par une organisation systémique en France, nous n'aurons pas d'autonomie parce que nous n'aurons pas d'entreprise.

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J'essaie de réfléchir aussi à l'avenir à moyen et long terme. L'intelligence artificielle se développe fortement et nous pouvons envisager qu'elle devienne créatrice de contenus brevetables ou pouvant faire partie de ces actifs immatériels. Nous n'avons pas réfléchi jusqu'à présent à la structure juridique qui accompagnerait de tels développements. Nous ne savons pas qui deviendrait le créateur ou le propriétaire. Avez-vous réfléchi à ces questions ? Pensez-vous qu'il existe d'autres sujets sur lesquels nous devrons nous pencher à un moment ou un autre, sur lesquels vous souhaitez attirer notre attention pour que nous y réfléchissions aussi ?

Le débat monte dans la communauté juridique pour savoir s'il faut donner une personnalité à l'intelligence artificielle ou non, si elle est un mineur sous tutelle ou rien du tout. Voyez-vous d'autres sujets dans votre champ de travail auxquels nous devons commencer à réfléchir ?

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Didier Patry, directeur général de France Brevets

De nombreux débats ont eu lieu sur l'intelligence artificielle, en particulier pour savoir si une invention issue d'une intelligence artificielle est brevetable. Beaucoup d'encre coule dans ce domaine et des décisions ont déjà été prises. Je ne pense pas que nous ayons besoin d'y réfléchir. Nous pouvons y contribuer mais beaucoup de gens y réfléchissent déjà. Il ne me paraît pas nécessaire que nous ajoutions notre grain de sel à un domaine déjà très salé.

Il me semble par contre utile de rappeler quelques fondamentaux. Tout d'abord, le logiciel est brevetable et il est breveté massivement. Environ 70 % des brevets délivrés aujourd'hui aux États-Unis, toutes catégories confondues, sont des brevets de logiciels. Les Américains ont donc largement bétonné leur territoire économique de prédilection. En Europe, nous avons toujours un courant de pensée selon lequel le logiciel n'est pas brevetable. Pourtant, il l'est même si le taux de réussite au contentieux sur les brevets de logiciels n'est pas très important. De nombreuses sociétés déposent, malgré tout, des brevets dans le domaine logiciel, y compris dans celui de l'intelligence artificielle qui s'exprime in fine, d'un point de vue technologique, par un logiciel.

Certains croient que le logiciel libre, open source, serait la réponse européenne pour éviter les mécanismes de dépendance extrême dans lesquels nous sommes. Nous sommes loin de la souveraineté numérique, nous sommes inféodés. Le logiciel libre n'est pas la réponse parce qu'il n'est pas immunisé vis-à-vis des brevets de tiers. Tout le monde ne l'a pas bien compris aujourd'hui. Le logiciel libre est immunisé vis-à-vis de ceux qui contribuent mais pas vis-à-vis de ceux qui n'y contribuent pas. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle une grande société de la côte Est a eu un programme de licence extrêmement agressif vis-à-vis d'Android, pourtant logiciel libre.

Il faut faire attention à ces croyances, à ces dogmes, savoir raison garder et faire une analyse calme et sereine. Nous ne devons pas avoir des croyances religieuses mais être capables de comprendre les mécanismes, les avantages et les inconvénients et où nous pouvons réussir.

À mon avis, nous pouvons réussir dans un modèle propriétaire. Nous pouvons aussi réussir dans un modèle de logiciel libre mais à condition de très bien savoir comment manier ce modèle qui est dangereux et potentiellement très toxique. Peut-être serait-il utile d'établir une doctrine vis-à-vis du logiciel libre, ses limites, les précautions à prendre pour que nous ne soyons plus dans le dogme, l'incantation ou la croyance religieuse mais dans l'analyse et le rationnel.

Un autre élément, peut-être moins important, sans rapport avec l'intelligence artificielle et le logiciel ou la brevetabilité, est la question des moyens juridiques, techniques, systémiques utilisables pour être plus forts, en France et en Europe.

Je pense que nous devrions continuer à travailler sur le droit de la concurrence car c'est le droit qui s'est montré le plus coercitif, dans ce pays et en Europe en général. Nous devrions nous demander comment régler les situations de déséquilibre et les utilisations abusives de la propriété intellectuelle ou des systèmes juridiques hors de nos frontières pour mener des actions de prédation ou de déstabilisation contre nos entreprises. Le droit de la concurrence ne peut-il pas rééquilibrer ces situations de déséquilibre et d'abus en dehors de nos frontières ? Nous nous posons la question et travaillerons certainement dessus, bien que la ligne soit assez fine.

Cette question nous semble importante car l'extraterritorialité n'existe que parce que notre système juridique est faible, que nous ne voulons pas nous opposer à ces actions d'extraterritorialité. Il faut que nous revoyions notre copie et que nous réfléchissions à la façon dont la solidité de notre système juridique national, sa pertinence et son impact pourraient aider nos entreprises. Il faut donner des moyens au système, aux tribunaux. Il faut que les juges disposent de moyens et de temps, puissent prendre le temps de décider de façon professionnelle. Notre justice a besoin de moyens pour être efficace. Ce n'est malheureusement pas toujours le cas et nos entreprises ne peuvent pas se reposer sur notre système. C'est un réel problème qui rend trop facile l'utilisation de mécanismes d'extraterritorialité du fait de l'absence de défense et de protection chez nous.

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Pensez-vous que le DSA et le DMA peuvent y contribuer par leur volet consacré à la transparence dans la concurrence ? Est-ce un embryon qui va dans le bon sens, qu'il faut que nous appuyions encore ou sommes-nous passés à côté ?

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Didier Patry, directeur général de France Brevets

Ces textes sont le signal que l'Europe veut s'organiser et c'est fondamental. Ces documents contiennent beaucoup d'intelligence ; ils sont denses, épais, complexes. Ils témoignent de beaucoup de réflexion et n'ont pas été rédigés à la va-vite ; nous pouvons en être fiers.

Le sujet principal de ces documents n'est pas la propriété intellectuelle et certains regrettaient d'ailleurs le manque de mesures liées à la propriété intellectuelle. Je pense que ce n'était pas l'objet. L'objet était d'amener dans l'espace numérique des règles de droit qui sont celles du sol, de notre espace, de faire en sorte que nous ne soyons pas dans le Far-West mais plutôt dans un espace réglementé avec une protection des consommateurs, la capacité de rejeter des contenus haineux… Je pense que le signal ainsi lancé va vraiment dans la bonne direction par l'organisation mise sur pied mais il faut évidemment aller plus loin.

La transparence est fondamentale. Le sujet qui nous touche parfois est la transparence des programmes de licences liés aux brevets essentiels aux normes. Ce sujet reviendra nous toucher puisque, pour la 5G par exemple, la France a contribué mais les plus gros contributeurs sont chinois ou américains. Les quelques contributeurs européens souhaitent tout naturellement administrer les programmes de licences qui s'appliqueront aux entreprises montant des réseaux 5G privés. C'est compliqué par manque de transparence dans cette mécanique. Nous ne savons jamais vraiment qui paie combien.

Des initiatives ont eu lieu récemment dans l'automobile pour clarifier la tarification, ce qui n'a pas forcément donné des résultats positifs car une très grande société européenne de télécommunications est maintenant en conflit direct avec une très grosse société allemande de l'automobile. Ce procès fait beaucoup parler de lui. La tarification forfaitaire n'a donc pas apporté de réponse. Il faut faire encore des efforts de transparence pour que nous ayons tous des informations sur les prix pratiqués. Tout le monde a à y gagner.

Les DSA et DMA ne contiennent donc pas grand-chose sur les brevets et la propriété intellectuelle mais ils vont dans le bon sens et ils sont importants car ils donnent un axe à l'Europe. C'est fondamental et cela signifie que l'Europe veut compter dans l'espace du numérique. Nous nous en réjouissons.

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Guillaume Ménage, directeur adjoint de France Brevets

Je voudrais insister sur deux points. L'innovation et sa protection nécessiteront toujours des fonds, des capitaux, des investissements.

La première étape est la culture qui peut passer en particulier par la formation. Nous intervenons dans différents modules mais, si vous regardez d'où vient l'innovation c'est-à-dire les gens qui ont un parcours d'ingénieur et de management, ces personnes ont suivi très peu de modules de formation sur la propriété intellectuelle. La formation ne doit pas être une formation d'expert mais elle doit générer un réflexe. Nous avons des experts, des juristes et des avocats spécialisés en propriété intellectuelle. La personne qui innove doit toutefois savoir que l'étape qui suit immédiatement l'innovation est la protection. Nous insistons pour intégrer la formation sur la propriété intellectuelle au plus tôt dans les écoles d'ingénieur, de management et autres. Ce point nous paraît fondamental pour créer une culture dans le pays.

Mon deuxième point concerne les grands projets nationaux et européens pour pousser de nouvelles innovations, de nouvelles technologies et qui doivent être accompagnés d'une politique de propriété intellectuelle, autrement dit d'une doctrine de propriété intellectuelle. Nous voyons des projets mis en place avec des subventions mais un programme autour de la propriété intellectuelle faible voire inexistant. France Brevets est à disposition pour y contribuer. Nous avons tous en tête que le niveau élevé de militarisation de l'économie dans d'autres pays et la façon dont ils abordent notre marché nécessitent que nous ayons cette dimension et cette doctrine, que nous agissions tous ensemble.

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Cette question de l'éducation ressort effectivement d'autres auditions que nous avons déjà menées. Nous avons un levier important à mettre en place dans les écoles d'ingénieur, de management et même plus tôt au sein de l'éducation nationale, au collège et au lycée. Le rapport contiendra un gros volet sur l'éducation, à la fois sur votre domaine et sur d'autres sujets connexes.

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Didier Patry, directeur général de France Brevets

J'insiste aussi sur le fait que la France a été à l'origine de grandes évolutions législatives dans le domaine de la propriété intellectuelle. Au niveau international, la France est à l'origine de la convention de Paris sur la propriété intellectuelle de 1883. Elle est fondamentale dans la structuration de la propriété intellectuelle et du droit d'auteur dans le monde. La France est très active dans le domaine des marques mais pas suffisamment dans le domaine des brevets.

Il nous semble important de communiquer aux élèves des écoles d'ingénieur, de commerce, de stratégie et de management ou même de sciences politiques des recettes stratégiques. Nous ne souhaitons pas faire de ces gens des juristes. Ils peuvent le devenir s'ils le souhaitent et il existe dans ce domaine des formations très nobles, riches et intellectuellement intéressantes, qui forment l'esprit ; c'est d'ailleurs la raison pour laquelle beaucoup d'Américains font des études de droit en plus de leurs études d'ingénieur ou de commerce. Ceci étant, il est important que tous aient rapidement une idée de la stratégie à prendre, qu'ils aient des réflexes, qu'ils puissent s'accaparer et se former une vision stratégique. Cela ne nécessite pas un master mais simplement la mise en place de modules avec de bons intervenants. Nous avons ces intervenants en France et il faut que les directions des écoles prennent conscience que cette formation est importante. Ce ne sont pas des investissements énormes.

Nous venons tous et toutes du privé, avec un bagage provenant de différentes entreprises nationales ou internationales. Toutes nos observations sont le fruit d'années d'expérience. Ce qui importe est finalement le futur économique de la France, son indépendance économique. Il s'agit de faire en sorte que, demain, nos enfants, nos familles et nos voisins trouvent un emploi de qualité, qui permette au pays non seulement de survivre mais de vivre bien. Qu'on le veuille ou non, toutes les économies qui vivent bien, toutes les entreprises qui réussissent ont intégré très tôt la propriété intellectuelle et les brevets, de façon forte, au niveau le plus élevé de la direction et avec des moyens importants. Nous ne pourrons pas y échapper. Ce n'est pas une option.

Nous vous remercions de nous donner cette possibilité de nous exprimer. La France a beaucoup de capacités, beaucoup de gens très intelligents, très forts, très bien formés. Ce n'est qu'une question de transformation et d'articulation. Ce n'est pas très compliqué mais il faut le vouloir et le faire.

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L'objectif de cette audition était effectivement de savoir, grâce à votre expérience, ce qui marche et ne marche pas. Je vous remercie du temps que vous nous avez consacré. Cette audition était très intéressante et enrichissante.

La séance est levée à 10 heures 50.

Membres présents ou excusés

Mission d'information de la Conférence des Présidents « Bâtir et promouvoir une souveraineté numérique nationale et européenne »

Réunion du jeudi 17 décembre 2020 à 9 h 30

Présents. - M. Philippe Latombe, M. Denis Masséglia, Mme Nathalie Serre

Excusés. - Mme Frédérique Dumas, M. Jean-Michel Mis, M. Jean-Luc Warsmann