Publié le 23 juillet 2018 par : M. Waserman, Mme Jacquier-Laforge, M. Balanant, M. Bru, M. Latombe, Mme Vichnievsky, Mme Bannier, M. Barrot, Mme Benin, M. Berta, M. Bolo, M. Bourlanges, M. Cubertafon, Mme de Sarnez, Mme de Vaucouleurs, Mme Deprez-Audebert, M. Duvergé, Mme El Haïry, Mme Elimas, Mme Essayan, M. Fanget, M. Fesneau, Mme Florennes, M. Fuchs, Mme Gallerneau, M. Garcia, M. Hammouche, M. Isaac-Sibille, M. Joncour, M. Lagleize, M. Lainé, M. Laqhila, Mme Lasserre-David, Mme Luquet, M. Mathiasin, M. Mattei, Mme Mette, M. Michel-Kleisbauer, M. Mignola, M. Millienne, M. Pahun, M. Frédéric Petit, Mme Maud Petit, Mme Poueyto, M. Ramos, M. Turquois.
Rédiger ainsi cet article :
« L'article L. 622‑4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est ainsi rédigé :
« Art. L. 622‑4. – Sans préjudice des articles L. 621‑2, L. 623‑1, L. 623‑2 et L. 623‑3, ne peut donner lieu à des poursuites pénales sur le fondement des articles L. 622‑1 à L. 622‑3 l'aide apportée à un étranger en situation irrégulière lorsqu'elle est le fait :
« 1° Des ascendants ou descendants de l'étranger, de leur conjoint, des frères et sœurs de l'étranger ou de leur conjoint ;
« 2° Du conjoint de l'étranger, de la personne qui vit notoirement en situation maritale avec lui, ou des ascendants, descendants, frères et sœurs du conjoint de l'étranger ou de la personne qui vit notoirement en situation maritale avec lui ;
« 3° De toute personne physique ou morale, lorsque l'acte reproché a consisté à fournir des conseils et de l'accompagnement, notamment juridiques, linguistiques ou sociaux, ou des prestations de restauration, d'hébergement ou de soins médicaux destinées à assurer des conditions de vie dignes et décentes à l'étranger, ou bien toute autre aide visant à préserver la dignité ou l'intégrité physique de celui-ci, ou bien tout transport directement lié à l'une de ces exceptions, sauf si l'acte a donné lieu à une contrepartie directe ou indirecte ou a été accompli dans un but lucratif.
« Les exceptions prévues aux 1°, 2° et 3° ne s'appliquent pas lorsque l'acte reproché a constitué une aide à l'entrée irrégulière en France d'un étranger.
« Les exceptions prévues aux 1° et 2° ne s'appliquent pas lorsque l'étranger bénéficiaire de l'aide vit en état de polygamie ou lorsque cet étranger est le conjoint d'une personne polygame résidant en France avec le premier conjoint. » ».
Le présent amendement a pour objet d'aménager le régime d'immunité pénale prévu à l'article L. 622‑4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en conformité avec la décision du Conseil constitutionnel n°2018‑717/718 QPC du 6 juillet 2018.
La loi n°2012‑1560 du 31 décembre 2012 a élargi le champ des immunités pénales applicables en matière d'aide au séjour irrégulier, tel qu'il figure à l'article L. 622‑4 du CESEDA, en établissant dans le cadre de l'immunité dite humanitaire une liste de critères en vertu desquels l'acte reproché ne peut faire l'objet de poursuites judiciaires.
En dépit de cette évolution, plusieurs décisions de justice attestent qu'en pratique le dispositif actuel ne permet pas de protéger effectivement les personnes agissant dans le cadre strict de ces immunités. En particulier, ce mécanisme ne suffit toujours pas à protéger ceux, qui pour apporter une aide à vocation humanitaire, telle que donner accès à des soins médicaux, sont contraints de transporter des étrangers en situation irrégulière d'un point A à un point B. Dans ce cas en effet, le transport, compris comme « l'aide à la circulation », en poursuivant le même objectif que celui de donner accès à des soins médicaux, et pouvant en constituer le préalable, devrait être couvert par l'immunité.
Par conséquent, pour remédier à cette insuffisance qui fragilise, de fait, l'immunité, et rendre sa cohérence aux dispositions législatives applicables en matière d'immunités pénales, cet amendement vise à clarifier le régime actuel.
D'abord, il intègre explicitement « l'aide à la circulation » dans le champ des actes couverts par l'article L. 622‑4 du CESEDA en conformité avec la directive européenne du 28 novembre 2002 qui prévoit une immunité humanitaire pour l'aide à la circulation.
Ensuite, il propose de préciser davantage les conditions de l'autorisation de « l'aide à la circulation » en spécifiant que tout transport directement lié à l'une des exemptions doit être couvert par l'article L. 622‑4 du CESEDA.
Le présent amendement, en apportant des modifications législatives simples, se veut équilibré en ce qu'il permet de mieux protéger les actes de solidarité nécessaires au bon fonctionnement de notre société, et qu'il préserve l'efficience de nos dispositifs de démantèlement des filières en maintenant dans sa rédaction actuelle le délit d'aide à l'entrée et au séjour irréguliers tel que prévu à l'article L. 622‑1 du CESEDA.
Il assure ainsi une conciliation équilibrée entre le principe de fraternité et l'objectif de valeur constitutionnelle de sauvegarde de l'ordre public conformément à la décision du Conseil constitutionnel du 6 juillet dernier.
Il ne fait pas de doute que l'adoption de cette modification enverrait un signal positif clair à ceux qui, chaque jour, donnent de leur personne, sans aucune contrepartie, afin de rendre notre société plus juste et plus humaine, et dont nous avons besoin. Aussi, en défendant avec force ces actes de solidarité, la France s'honorerait vis-à-vis de ses voisins européens en montrant la voie vers plus d'humanité et de fraternité.
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