Publié le 20 novembre 2018 par : Mme Vichnievsky, M. Balanant, M. Bru, Mme Florennes, Mme Jacquier-Laforge, M. Latombe, Mme Bannier, M. Barrot, Mme Benin, M. Berta, M. Bolo, M. Bourlanges, M. Cubertafon, Mme de Sarnez, Mme de Vaucouleurs, Mme Deprez-Audebert, M. Duvergé, Mme El Haïry, Mme Elimas, Mme Essayan, M. Fanget, M. Fesneau, M. Fuchs, Mme Gallerneau, M. Garcia, M. Hammouche, M. Isaac-Sibille, M. Joncour, M. Lagleize, M. Lainé, M. Laqhila, Mme Lasserre-David, Mme Luquet, M. Mathiasin, M. Mattei, Mme Mette, M. Michel-Kleisbauer, M. Mignola, M. Millienne, M. Pahun, M. Frédéric Petit, Mme Maud Petit, Mme Poueyto, M. Ramos, M. Turquois, M. Waserman.
Supprimer l'alinéa 18.
En vertu de l'article 706‑71 du code de procédure pénale, le recours à la visioconférence peut être autorisé par la juridiction pour le placement en détention provisoire du mis en examen ou pour la prolongation de cette mesure. L'intéressé a toutefois le droit de s'y opposer et d'obtenir ainsi que la décision soit prise au cours d'une audience où il est physiquement présent devant le juge, sauf en cas de risques graves d'évasion ou de trouble à l'ordre public.
Le projet de loi propose de supprimer ce droit du mis en examen, pour ce qui concerne les audiences où il est statué sur la prolongation de sa détention provisoire, la visioconférence pouvant désormais lui être imposée.
Pour une décision aussi importante que la privation de liberté, même lorsqu'il s'agit de la prolongation de cette mesure, il est légitime que la personne mise en examen conserve le droit de rencontrer son juge. Son éloignement physique de l'audience renforcerait le caractère formaliste de celle-ci et favoriserait la prolongation quasi-automatique de la mesure initiale, alors que la proportion de la détention provisoire sur l'ensemble de la détention est déjà anormalement élevée en France.
Il est donc proposé de supprimer l'alinéa 18 de l'article 35 du projet de loi tendant à imposer au mis en examen le recours à la visioconférence pour les audiences de prolongation de sa détention provisoire. Les nouvelles dispositions de l'article 706‑71‑1 introduit par la commission des lois interdisent à l'intéressé d'user de manière dilatoire de son droit de refus.
La comparution de l'accusé en personne devant son juge est l'essence même de l'habeas corpus. Cette règle, qui remonte au XVIIe siècle en Angleterre, fait obligation au geôlier d'amener au juge le prisonnier, corps présent, pour qu'il soit statué sur son sort : Habeas corpus ad subjiciendum et recipiendum.
L'Angleterre, bien sûr, a maintenu cette règle et n'autorise la visioconférence que pour l'audition de témoins se trouvant à l'étranger. Les règles fédérales américaines de procédure criminelle prescrivent la présence physique de l'accusé (defendant's presence) à chaque étape de la procédure. Quant à la Cour fédérale de Karlsruhe, elle considère que la visioconférence est susceptible de fausser la conviction du juge et de déstabiliser les personnes entendues ; elle subordonne le recours à cette technique au consentement des intéressés.
En définitive, seules des considérations d'ordre budgétaire pourraient militer en faveur du caractère obligatoire de la visioconférence. Notre pays est déjà l'un des moins bien placé en Europe au regard des dépenses consacrées à la justice. Malgré le souci légitime de préserver les deniers publics, on ne peut se résoudre au déclassement de la France par rapport aux grandes démocraties en matière de libertés et de droits de la défense.
Le présent amendement vise donc à restaurer les dispositions actuelles du code de procédure pénale, en ce qu'elles permettent à la personne mise en examen de comparaître en personne devant son juge lors des audiences où il est statué sur la prolongation de sa détention provisoire, sauf en cas de risques graves d'évasion ou de trouble à l'ordre public.
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