La commission a poursuivi l'examen des articles du projet de loi relatif à la croissance et la transformation des entreprises (n° 1088) (M. Roland Lescure, rapporteur général, Mmes Coralie Dubost et Marie Lebec, MM. Jean-Noël Barrot et Denis Sommer, rapporteurs thématiques).
Mes chers collègues, nous reprenons l'examen en première lecture des articles du projet de loi relatif à la croissance et la transformation des entreprises, en présence de M. Bruno Le Maire et de Mme Delphine Gény-Stephann, que je remercie. Au cours de la journée et de la soirée d'hier, nous avons examiné un peu plus de 290 amendements. Je tiens à vous remercier d'avoir respecté les règles édictées ensemble. À ce rythme, aujourd'hui, nous devrions achever l'examen du chapitre Ier « Des entreprises libérées ».
Nous en venons à l'examen de l'article 7.
Article 7 (article 50 de la loi n° 2003-721 du 1er août 2003 pour l'initiative économique) : Adaptation de la gouvernance de l'établissement public Business France
La commission examine les amendements identiques CS593 de M. Vincent Descoeur, CS1928 de M. Patrice Anato et CS2123 de M. Dominique Potier.
L'article 7 conduit à exclure du conseil d'administration de l'agence Business France les représentants des organisations professionnelles et des réseaux consulaires. Or cette exclusion rendra le dispositif moins lisible et efficace pour les entreprises. Je propose donc la suppression de l'article 7.
La réforme proposée exclut également les parlementaires du conseil d'administration. Or leur présence me paraît au moins aussi importante que celle du secteur privé et des réseaux consulaires. Nous sommes favorables à cet outil. Sa réforme fait l'objet d'un consensus et c'est tant mieux. Il faut moderniser notre capacité à nous projeter dans le monde, mais il faut le faire avec l'appui du Parlement.
En coordination avec les régions et les chambres de commerce et d'industrie régionales (CCIR), Business France met en place un guichet unique export et réorganise le dispositif. Dans ce cadre, le débat sur le pilotage et l'administration de Business France est logique. Nous vous proposerons un amendement visant à assurer la représentation de CCI France et des parlementaires. En conséquence, je souhaiterais le retrait de vos amendements. À défaut, mon avis sera défavorable.
Mon avis sera le même que celui du rapporteur thématique. Je remercie les parlementaires d'avoir soulevé ce point. Cela nous a permis de débattre de la présence de parlementaires au conseil d'administration de Business France. C'est en effet une bonne idée de réintroduire des parlementaires et des représentants des réseaux consulaires au sein du conseil d'administration. Nous allons vous faire une proposition, sur la base des vôtres. Je vous suggère donc de retirer vos amendements pour éviter un avis défavorable, puisque nous sommes d'accord sur le fond.
Les amendements sont retirés.
La commission passe à l'amendement CS2277 du rapporteur thématique.
Notre amendement permettra à la fois aux parlementaires et à des personnes qualifiées en matière de développement économique ou issues des réseaux consulaires de siéger au conseil d'administration de Business France. Députés, sénateurs, représentants de l'État et des régions y siégeront donc. C'est important pour les régions, car le développement des guichets uniques est réalisé en partenariat avec elles et les CCIR.
Mon avis est favorable. Vous pouvez constater que nous tenons parole en quelques secondes !
La commission adopte l'amendement.
En conséquence, les amendements CS1369 et CS1367 de M. François Ruffin, CS905 de M. Buon Tan, CS42, CS389 et CS304 de M. Paul Christophe, CS444 de Mme Frédérique Tuffnell, CS590 de M. Ian Boucard et CS1292 de M. Mohamed Laqhila tombent .
Après l'article 7
La commission en vient à l'amendement CS1908 du rapporteur général.
J'associe Marie Lebec, rapporteure thématique du chapitre II, à cet amendement. Les volontaires internationaux en entreprise (VIE) sont un des quelques succès de notre stratégie à l'exportation. Ils permettent à la fois à de jeunes Français de travailler à l'international et à des entreprises qui veulent s'installer à l'étranger de s'appuyer sur de jeunes Français de talent, de les former et de bénéficier d'une aide de l'État, tout en s'assurant – quand elles sont encore peu implantées à l'étranger – d'une présence personnalisée sur le terrain.
Je viens d'Amérique du Nord et visite régulièrement des consulats. Il n'est pas rare que les représentants de Business France, ceux du consulat et les VIE travaillent au même endroit. C'est une véritable force de frappe – cela a d'ailleurs inspiré les réformes de Business France. Le soutien à l'export ne se fait pas seulement à Chicago, Hong Kong ou Taïpei, mais commence en France. Par parallélisme avec l'évolution de Business France qui implique une présence croissante de ses représentants dans les régions afin d'aider les entreprises à se projeter à l'international, nous souhaitons que les VIE puissent également bénéficier d'une expérience plus importante en France.
Dans le cadre de leur formation en entreprise et pour tenir compte de leur rôle de « pont » entre la France et l'international, nous souhaitons donc qu'ils puissent passer un peu plus de temps en France. C'est le sens de cet amendement.
Mon avis est également favorable. J'insisterai sur le caractère positif et novateur de cet amendement. Son principe semble paradoxal puisqu'il vise à augmenter la durée de séjour du jeune dans l'entreprise en France. Or c'est très important pour les PME, le dispositif actuel étant trop contraignant.
Les VIE pourront ainsi passer dix-sept jours de plus dans l'entreprise en France pour se préparer à leur séjour à l'étranger. Cela avantagera clairement les petites entreprises, dont la capacité de projection à l'étranger est moindre et qui ont besoin de garder le VIE plus longtemps en France. Dans le droit fil du projet de loi PACTE, c'est une mesure principalement favorable aux PME.
Par ailleurs, la révision du dispositif d'indemnisation permettra de tenir compte de la réalité du coût de la vie à l'étranger. Aujourd'hui, nombre de jeunes, en particulier les moins favorisés, en sont pour leurs frais, les modalités de calcul de l'indemnité n'étant pas toujours adaptées.
Cet amendement constitue donc une transformation utile et profonde du statut des VIE.
La commission adopte l'amendement.
La commission examine l'amendement CS1837 de M. Adrien Taquet.
Depuis le 1er janvier 2017, le régime de garantie en faveur des sociétés du secteur de la construction navale a été transformé : d'un schéma dit de garantie indirecte ou « oblique », dans lequel la Caisse française de développement industriel (CFDI) octroyait en son nom propre des garanties sous le contrôle, pour le compte et avec la garantie de l'État, on est passé à un schéma de garantie directe – les opérations sont garanties au nom de l'État. Cet amendement explicite la capacité donnée à la CFDI de réaliser des opérations de maniement des fonds issus de son activité assurée au nom et pour le compte de l'État.
Par ailleurs, il introduit une précision afin de permettre à la CFDI de recourir à des tiers pour procéder à certains recouvrements et d'engager les dépenses afférentes.
Mon avis est extrêmement favorable car ce dispositif de garantie est précieux pour les chantiers navals français, en particulier pour ceux de l'Atlantique.
Si je comprends bien, en votant cet amendement, nous allons autoriser la CFDI à encaisser la rémunération des garanties données par l'État. Monsieur le ministre, ces recettes reviendront-elles sur le budget de l'État ou resteront-elles à la CFDI ? Comment la rémunération d'une garantie accordée par l'État peut-elle être versée à un tiers ? Tel que rédigé, c'est ambigu…
C'est une excellente question, mais il n'y a aucune ambiguïté. La CFDI va pouvoir percevoir des recettes au nom et pour le compte de l'État, ce qui va simplifier son rôle. En revanche, elle devra évidemment les lui reverser à intervalles réguliers.
Mais la CFDI n'aura pas les mêmes prérogatives que les comptables publics pour recouvrer ces sommes, puisqu'il me semble qu'elle n'est pas assujettie à la comptabilité publique. Avec un système de comptabilité privée, elle ne disposera pas des mêmes moyens que les comptables de l'État pour recouvrer lesdites sommes.
Vous avez raison, les règles comptables ne sont pas les mêmes, mais c'est une mesure de simplification de la gestion et du fonctionnement de ce régime de garanties. Par ailleurs, il n'y aura pas d'impact budgétaire puisqu'à intervalles réguliers, la CFDI reversera ces recettes à l'État.
La commission adopte l'amendement.
Article 8 (article L. 310-3 du code de commerce) : Passage de la durée des soldes de six à quatre semaines
Suivant l'avis défavorable du rapporteur thématique, la commission rejette l'amendement CS1380 de M. Emmanuel Maquet.
La commission examine, en discussion commune, l'amendement CS1371 de M. François Ruffin, les amendements identiques CS61 de M. Vincent Descoeur, CS582 de M. Éric Pauget et CS658 de M. Daniel Fasquelle, ainsi que l'amendement CS975 de M. Jean-Louis Masson.
L'amendement CS61 concerne la durée des soldes. Il s'agit de trancher définitivement cette question, en faisant le choix d'une durée de quatre semaines, correspondant d'ailleurs au consensus qui s'était dégagé de la consultation initiée par M. le ministre.
En 2005, à l'unanimité de la commission des affaires économiques de l'époque, nous avions mis fin aux soldes flottants à la demande des commerçants. C'était une bonne chose. Le présent projet de loi propose de limiter les soldes à une période de trois à six semaines. Six semaines, c'est beaucoup trop long ! C'est ce que nous disent tous les commerçants. L'amendement CS658 fixe le plafond à quatre semaines.
Tant du point de vue des commerçants que de celui des consommateurs, il faut redynamiser le commerce et relancer l'intérêt des Français pour les soldes, notamment dans les boutiques physiques. En outre, l'extension de pratiques telles que le « black Friday », avec des remises très importantes sur une seule journée, accélère la désuétude de périodes de solde trop longues. Le présent amendement CS975 les limite à quatre semaines.
Une grande concertation a effectivement été menée par M. le ministre sur ce sujet. Ses conclusions ne sont pas tout à fait celles que vous indiquez. Les soldes doivent en effet se concentrer sur deux moments forts dans l'année. Mais la loi doit garder de la souplesse pour que nous n'ayons pas à la modifier tous les deux ou trois ans, dès que la situation économique ou les demandes des commerçants évoluent.
Je soutiens ces amendements au nom de notre groupe car la fourchette de trois à six semaines, deux fois par an, est trop large. Six semaines, c'est considérable ; les soldes pourraient durer jusqu'à trois mois par an… Il convient de réduire cette fourchette ou d'adopter les amendements proposant quatre semaines. À défaut, tous les commerçants le disent, on est en soldes permanents !
Sur le fond, nous sommes tous d'accord, mais il s'agit d'un problème de hiérarchie des normes. J'ai effectivement organisé des semaines de consultations, qui m'ont passionné. Les soldes sont un moment important de la vie française. En ce domaine, les intérêts sont très divergents entre les grands magasins, les petits commerçants et le commerce en ligne, mais le consensus est clair sur les quatre semaines. Je m'en remets donc à votre sagesse, tout en vous rappelant que l'arrêté du ministre fixe la durée des soldes, ainsi que leur date de début et de fin. Au regard de la hiérarchie des normes, il me paraît plus cohérent qu'un arrêté continue à fixer les détails et la loi le cadre. Je continuerai – moi ou mon successeur – à fixer par arrêté la date de début et de fin des soldes, et la durée totale des soldes, à quatre semaines.
Je rejoins MM. de Courson et Fasquelle sur les six semaines, beaucoup trop longues. Si vous tenez absolument à graver une durée dans le marbre de la loi, c'est envisageable, mais cela me semble une mauvaise idée juridique. Je me méfie des lois qui prennent la place des règlements ou des arrêtés. La loi fixe un principe général et l'arrêté le précise. On dévalorise les lois à force d'y faire figurer tous les détails de l'organisation de la vie des Français…
En poussant jusqu'au bout votre raisonnement, monsieur le ministre, il faudrait seulement indiquer dans la loi que les périodes de soldes sont fixées par arrêté ministériel, sans prévoir de fourchette. À partir du moment où la durée figure dans la loi, allons au bout de la démarche ! Les commerçants attendent un signal clair ; dans la vie économique, rien n'est pire que l'incertitude. La fourchette actuelle ne donne absolument pas satisfaction aux commerçants, vous l'avez dit. Unanimement, ils souhaitent ces quatre semaines. Montrons-leur que l'Assemblée nationale est à leur écoute et mettons fin à l'incertitude. Ce sera apprécié des interlocuteurs que vous avez rencontrés pendant des semaines.
J'entends les propos de M. le ministre. Afin que le travail produit au cours de la consultation soit utile, fixons dans la loi un plafond à quatre semaines, l'arrêté définissant les modalités d'application.
Monsieur Fasquelle, je n'ai pas le pouvoir de fixer arbitrairement la durée des soldes par arrêté si le législateur n'a pas fixé de cadre. Le renvoi dans la loi à une décision du ministre n'est donc pas suffisant.
En conséquence, vous avez deux options, et je m'en remettrai à votre sagesse. Vous pouvez conserver l'article dans sa rédaction actuelle. Cette option a ma préférence, et celle du rapporteur, car la loi conserve ainsi son rôle d'encadrement, l'arrêté ministériel venant la préciser. Je prends l'engagement solennel devant vous que cet arrêté fixera la durée des soldes à quatre semaines et non plus six, pour les deux périodes concernées.
Vous pouvez à l'inverse insérer ces quatre semaines dans la loi mais, à mon sens, cela constitue un risque de dérive législative et de rabaissement de la loi. Pour autant, vous êtes souverains.
Comme le ministre, je plaide pour la souplesse. Je vous rappelle que la loi a été modifiée en 2008 pour définir une période de quatre semaines de soldes. En 2014, elle a été à nouveau amendée pour instituer six semaines de soldes. Pour l'avenir, nous souhaitons que la loi fixe le cadre, l'arrêté définissant la durée précise. Nous ne serons ainsi pas obligés de modifier régulièrement la loi comme par le passé, dévalorisant par là même le travail législatif. L'environnement commercial peut changer et le cadre fixé par le projet de loi permet aux acteurs et au Gouvernement d'évoluer ultérieurement, même si nous sommes actuellement tous d'accord sur ces quatre semaines.
La commission rejette l'amendement CS1371.
Puis elle rejette les amendements identiques CS61, CS582 et CS658.
Elle rejette également l'amendement CS975.
La commission passe à l'amendement CS1381 de M. Emmanuel Maquet.
J'y suis également défavorable car cet amendement crée une rupture d'égalité entre les territoires, en laissant aux préfets de région le soin de fixer les durées et les dates de début et de fin des soldes. Cela pourrait être très pénalisant pour les commerçants, les consommateurs pouvant parfaitement se déplacer dans la région voisine pour profiter des soldes. Je tiens à ce que la disposition soit appliquée de manière uniforme sur le territoire, d'autant plus que les commerçants se sont unanimement prononcés contre un tel mécanisme.
Député du Pas-de-Calais, je constate que nous recevons une importante clientèle belge et britannique. Nous subissons aussi la concurrence directe de nos voisins européens, dans un marché désormais complètement ouvert. Ces périodes de soldes différenciées par région, tenant compte des dates de soldes de ces voisins, pourraient être intéressantes.
La commission rejette l'amendement.
Elle en vient à l'amendement CS736 de Mme Véronique Louwagie.
Mon amendement vise à supprimer le délai de six mois prévu pour l'application de la réforme des soldes. En effet, celui-ci implique que le dispositif ne pourra être appliqué qu'aux prochains soldes de janvier 2020. Si votre dispositif est bon, monsieur le ministre, il faut l'appliquer très rapidement d'autant qu'il ne nécessite de mesures particulières.
Le délai de six mois permettra aux commerçants d'ajuster leurs stocks afin de mieux gérer les soldes. Je suis défavorable à votre amendement.
J'y suis également défavorable. Madame Louwagie, votre intention est louable car ces quatre semaines sont unanimement souhaitées, mais les commerçants indépendants nous ont alertés sur la nécessité de disposer d'un délai supplémentaire pour reconstituer leurs stocks. Les grandes surfaces et les chaînes de magasins sont favorables à l'accélération de la mise en place de la mesure, mais les petits commerçants indépendants y sont très défavorables. L'inscription de ce délai de six mois est une réponse à la demande expresse des petits commerçants de centre-ville.
La commission rejette l'amendement.
Elle adopte l'article 8 sans modification.
Après l'article 8
La commission est saisie de l'amendement CS546 de M. Sébastien Leclerc.
La commission rejette l'amendement.
Elle examine l'amendement CS1334 de Mme Claire O'Petit.
L'amendement CS1334, qui reprend la teneur d'une proposition de loi que j'ai déposée au printemps dernier, vise à faciliter la garde d'enfants pour les salariés des commerces de détail non alimentaires situés dans les zones géographiques instituées par la loi Macron, et qui dérogent au droit de repos dominical.
Tout d'abord, il propose de porter à 75 % le crédit d'impôt pour les dépenses ayant pour objet de financer la création et le fonctionnement des crèches privées, engagées par les entreprises situées dans ces zones : il s'agit donc d'une approche incitative.
Ensuite, il propose que l'attribution des tickets CESU, financés notamment par les entreprises ouvertes le dimanche, relève de la loi, afin de s'assurer que les contreparties mises en oeuvre par l'employeur soient bien réelles.
Enfin, il propose de créer un label « Qualité familiale » délivré par le ministère du travail et destiné à certifier l'engagement des commerces de détail ouverts le dimanche en faveur de la garde d'enfants de leurs salariés.
En tant que président de la commission des affaires économiques, j'ai souhaité qu'il soit procédé à une évaluation en profondeur de la loi dite Macron, trois ans après sa promulgation, à la fois pour que soit respecté l'engagement qui avait été pris de le faire – nous avons fait campagne sur le thème d'une meilleure évaluation des lois – et parce que j'estime que cette loi portant le nom du Président de la République mérite d'être évaluée à sa juste mesure, avec toute l'objectivité que le travail parlementaire peut apporter.
Une mission d'évaluation, présidée par notre collègue Yves Blein et réunissant des représentants de quatre commissions – affaires économiques, finances, lois et affaires sociales –, est en cours. Je suggère que nous attendions qu'elle soit terminée et que nous prenions connaissance de ses conclusions avant d'en tirer éventuellement les conséquences qui s'imposent. En attendant, je suggère le retrait de l'amendement CS1334.
Puisque nous nous sommes engagés dans une dynamique d'évaluation ambitieuse, il me semble effectivement opportun d'attendre les résultats de cette évaluation avant de prendre des décisions sur le sujet qui nous intéresse. Maintenez-vous votre amendement, madame O'Petit ?
J'admets la nécessité d'attendre les résultats de l'évaluation, et je retire donc mon amendement CS1334. Cependant, j'insiste sur le fait que l'évaluation devra notamment porter sur l'ouverture des crèches le samedi. En effet, la plupart des crèches ferment le vendredi à dix-sept heures, alors qu'un très grand nombre de nos concitoyens travaillent le samedi.
L'amendement CS1334 est retiré.
La commission est saisie de l'amendement CS739 de Mme Véronique Louwagie.
Avec votre permission, madame la présidente, la présentation que je vais faire de l'amendement CS739 vaudra également pour l'amendement CS738.
Ces deux amendements visent à harmoniser les conditions juridiques d'ouverture dominicale des commerces de détail alimentaires, quelles que soient les zones dans lesquelles ils se trouvent. Ces zones composent actuellement une véritable mosaïque de situations – zone touristique (ZT), zone touristique internationale (ZTI), zone commerciale (ZC) – qui est source d'un manque de visibilité et de lisibilité dans ce domaine.
L'amendement CS739 a pour objet d'harmoniser les conditions d'ouverture en soirée, entre vingt et une heure et minuit ; quant à l'amendement CS738, il a le même objet pour les commerces alimentaires après treize heures.
Il ne serait pas normal de prendre des décisions en matière d'ouverture des commerces le dimanche avant d'avoir laissé la mission d'évaluation terminer ses travaux et rendre ses conclusions – ce qui doit être fait, me semble-t-il, pour la fin novembre – et d'en avoir pris connaissance : cela serait en effet injuste et incorrect vis-à-vis des membres de cette mission et des personnes qu'elle auditionne. Sur un sujet revêtant une telle importance pour la vie quotidienne des Français, nous ne sommes pas à deux mois près. J'émets donc un avis défavorable aux amendements CS739 et CS738.
Les amendements CS739 et CS738 sont retirés.
La commission examine l'amendement CS2204 de M. Dominique Potier.
L'économiste François Perroux disait qu'en économie, il y a des choses qui ont un prix et d'autres qui n'en ont pas. Comme vous le savez, j'étais hostile à l'extension du travail dominical en dehors des zones touristiques, et en 2015 j'ai eu sur ce point des discussions très vives avec Emmanuel Macron au sein du groupe majoritaire de l'époque. De même, il me semble nécessaire de faire preuve d'un minimum de décence en certaines occasions, à savoir le 14 juillet – la journée commémorant la fondation de la République –, le 11 novembre – rappelant la fin de la Première Guerre mondiale, il y aura cent ans cette année – et le 8 mai – commémorant la victoire sur l'Allemagne nazie en 1945.
Durant ces trois journées, nous célébrons la mémoire de ceux qui ont donné leur vie pour la patrie, pour la République, pour la France, et il me paraît insupportable qu'il puisse y avoir, en ces occasions, des opérations commerciales donnant lieu à des promotions spéciales ou à l'émission de bons de réduction. Si chacun de nous est attaché à la liberté, que doit favoriser le monde nouveau que nous avons appelé de nos voeux, il est cependant nécessaire de continuer à se référer à des repères historiques indéracinables : au moins durant les trois journées que j'ai évoquées, il me semble que nous pourrions nous abstenir de consommer et d'obliger pour cela les salariés des grandes surfaces à y être présents pour les faire fonctionner. Si nous ne sommes pas capables de nous imposer cela, alors il faut également renoncer à ce que ces jours soient fériés.
Nous partageons tous l'attachement à la République que vient d'exprimer notre collègue Dominique Potier, et c'est toujours avec une grande émotion que nous nous retrouvons le 8 mai et le 11 novembre devant les monuments aux morts, afin de nous y recueillir avec nos concitoyens. L'évocation de ces événements historiques et des souvenirs douloureux qui y sont attachés est également l'occasion d'en tirer des enseignements pour le présent.
Cela dit, il me paraît excessif d'interdire toute activité commerciale durant les journées de commémoration, comme le propose cet amendement. La question est d'importance et mérite qu'on y réfléchisse. Dans l'immédiat, j'émets cependant un avis défavorable à l'amendement CS2204.
Je partage évidemment la volonté de garder une mémoire vivante des trois dates que sont le 8 mai, le 14 juillet et le 11 novembre, et j'attache une extrême importance à la mémoire qui rassemble les Français et permet de construire l'avenir. Pour autant, si votre raisonnement se défend parfaitement, monsieur Potier, je ne pense pas que le respect de la mémoire implique que personne ne travaille durant ces trois journées : à mon sens, une telle mesure serait disproportionnée.
J'émets donc également un avis défavorable à cet amendement.
Les députés du groupe Les Républicains sont sensibles à la proposition de notre collègue Potier, mais je pense exprimer un sentiment largement partagé en disant que la mesure proposée paraît impraticable. Durant les jours fériés, nos compatriotes ont besoin tout autant que les autres jours de recourir aux services des petits commerçants, et ceux-ci ont tout autant besoin de travailler. Par ailleurs, comment pourrait-on interdire aux commerçants des zones touristiques de servir les touristes étrangers, sans soute moins sensibles que nous à la signification des fêtes nationales ? Entrer dans une logique de zones, de quotas, de seuils, serait synonyme d'une extrême complexité. À mon sens, pour renforcer l'importance des journées de commémorations, nous devons plutôt agir dans le cadre de la formation à la citoyenneté et de l'incitation.
Effectivement, s'il s'agit là d'une idée sympathique, elle ne résiste guère à l'analyse. Faudrait-il donc imposer la fermeture des services publics et des usines qui produisent en continu ? Devrait-on exiger la fermeture des boulangeries et priver les Français de pain les jours de commémoration ? Cela ne me paraît pas raisonnable.
J'insiste sur le fait que je ne souhaite surtout pas que ma proposition donne lieu à une compétition mémorielle, qui serait indécente : à mes yeux, les personnes hostiles à cet amendement n'ont pas moins que moi le sens de la patrie et du devoir.
Cela dit, j'insiste sur l'importance de préserver des symboles. Il ne me viendrait pas à l'idée de prétendre qu'il faut, durant les journées de commémoration, arrêter de traire les vaches – j'ai été éleveur laitier –, fermer les hôpitaux ou les usines qui, le reste de l'année, produisent en continu : mon amendement ne concerne que ce qui est superficiel et inutile. Peut-être serait-il un peu compliqué à mettre en oeuvre, mais il me paraît indispensable. Je ne vois pas comment on peut créer un service national civique tout en continuant de permettre que, durant une journée de commémoration, les grandes surfaces fassent des promotions pour des articles dont on peut tout à fait se passer.
La commission rejette l'amendement.
Elle est saisie, en discussion commune, de l'amendement CS1333 de Mme Claire O'Petit et des amendements identiques CS737 de Mme Véronique Louwagie et CS1373 de Mme Laure de La Raudière.
Monsieur le ministre, j'ai entendu la déclaration que vous avez faite hier, et je ne maintiendrai donc pas mon amendement en attendant les résultats de l'évaluation en cours. Nous avons été plusieurs collègues à poser la question de l'extension de l'ouverture du dimanche, car nous sommes extrêmement attentifs au commerce de proximité, et souhaitons que des solutions permettent de maintenir en vie le petit commerce. À l'heure actuelle, un très grand nombre de commerçants baissent leur rideau définitivement, n'ayant pas la possibilité de travailler comme ils le souhaiteraient pour sauver leur source de revenus et les emplois de leurs salariés. En dépit de l'urgence, nous patienterons jusqu'à ce que la mission d'évaluation ait achevé ses travaux. Je retire donc mon amendement.
Actuellement, les commerces de détail alimentaire peuvent ouvrir le dimanche matin toute l'année jusqu'à treize heures. Cependant, en raison de l'évolution des habitudes de consommation et des rythmes de vie, on constate une demande croissante des consommateurs pour faire leurs courses alimentaires le dimanche toute la journée : dans les zones où les commerces alimentaires sont déjà ouverts le dimanche, la fréquentation maximale s'observe entre treize heures et quatorze heures, puis entre dix-sept heures et dix-neuf heures.
Supprimer la limite de treize heures serait un facteur de simplification réglementaire, mais permettrait également de faire face à la concurrence du e-commerce – qui n'est soumis à aucune réglementation en termes d'horaires – et de renforcer l'attractivité commerciale des centres-villes et des centres-bourgs, répondant ainsi à un besoin constaté dans les zones rurales. Enfin, cela rétablirait l'équité concurrentielle avec certaines grandes enseignes, quel que soit leur statut juridique.
Bien évidemment, le dispositif proposé devrait être encadré juridiquement : il ne s'agit pas de généraliser l'ouverture dominicale des magasins alimentaires en France, mais de faire en sorte que la dérogation introduite soit limitée à certains types et formats de magasins. Tel est l'objet de l'amendement CS737, qui sera par ailleurs source de création d'emplois.
Mme Louwagie a très bien défendu cet amendement, dont l'objectif est de fournir autant d'outils que possible à nos commerces de centre-bourg pour se défendre face à la concurrence de la grande distribution située en périphérie, mais aussi du e-commerce. Dans le cadre d'un projet de loi visant à responsabiliser les acteurs, il appartiendra aux commerces de centre-bourg de choisir comment ils souhaitent s'organiser pour lutter au mieux contre la concurrence sauvage. J'entends bien que des travaux d'évaluation et des discussions sont en cours, mais j'appelle votre attention sur l'urgence qu'il y a à adapter la réglementation actuelle pour permettre aux commerces de détail de décider, de manière responsable, de leur organisation.
Nous avons conscience du fait qu'il est absolument nécessaire de renforcer les centres-villes, qui souffrent et se trouvent souvent en grand péril : c'était d'ailleurs l'objectif du plan gouvernemental de revitalisation des centres-villes lancé au printemps dernier. Bien évidemment, la réflexion sur l'offre commerciale, qui constitue l'un des vecteurs essentiels de cette redynamisation, doit se poursuivre. Au-delà des centres-villes, les grands centres commerciaux situés en périphérie présentent parfois des situations pour le moins étonnantes : il arrive ainsi que, passé une certaine heure, les clients présents en grand nombre dans une galerie marchande ne puissent plus accéder aux commerces alimentaires de détail situés dans cette galerie ! Il est donc évident qu'il y a des choses à faire évoluer, ce qui pourra être entrepris lorsque la mission d'évaluation de la loi Macron aura rendu ses conclusions – j'invite les plus impatients d'entre vous à prendre contact dès maintenant avec notre collègue Yves Blein, président de la mission, afin d'échanger avec lui.
Puisque nous allons examiner un grand nombre d'amendements portant sur le travail le dimanche, je vais exprimer ma position globale sur le sujet à l'occasion de l'examen de cet amendement.
Je suis convaincu que nous ne sommes pas au bout du dispositif sur le travail du dimanche : il reste encore en la matière des incertitudes et des complexités – je pense notamment aux commerces alimentaires de centre-ville qui ferment à treize heures, c'est-à-dire à un moment où de nombreux clients seraient encore susceptibles de se présenter.
M. Buon Tan a également soulevé la question des dimanches du maire. Sur ce point, j'estime que nous devons donner plus de liberté et de pouvoir aux maires, afin qu'ils puissent disposer de la souplesse nécessaire pour développer les commerces de leur centre-ville. Il faut savoir faire preuve de cohérence : on ne peut pas, d'un côté, affirmer qu'il faut revitaliser les commerces de centre-ville et, de l'autre, priver les maires des instruments qui leur permettraient de le faire – étant précisé qu'au bout du compte, ce sont les citoyens qui votent ou ne votent pas pour le maire qui a décidé d'augmenter le nombre de dimanches ouvrés.
Cela dit, je vois deux obstacles à l'adoption de cet amendement et de tous ceux ayant trait à la même question. Premièrement, ce n'est pas l'objet principal de la loi PACTE, dont nous devons préserver la cohérence : celle-ci vise essentiellement à faire grandir les entreprises. Deuxièmement, il s'agit d'un sujet extrêmement sensible, qui engage la vie concrète de nos concitoyens et l'idée qu'on se fait de la vie active, des temps de travail et des temps de repos, et qui mérite par conséquent un débat plus long, basé sur l'évaluation de la loi Macron, ainsi qu'une vraie discussion. En tout état de cause, il me semblerait dommage que sur ce sujet nous prenions à la va-vite des décisions morcelées : nous ne pouvons faire l'économie d'un vrai débat de fond, que je suggère d'avoir en 2019, sur la base d'une évaluation préalable à laquelle auront procédé les parlementaires.
Je retire également mon amendement, en espérant que l'engagement pris par le Gouvernement en termes de calendrier pourra être tenu.
Les amendements identiques CS737 et CS1373 sont retirés.
La commission examine les amendements identiques CS738 de Mme Véronique Louwagie et CS1378 de Mme Laure de La Raudière.
L'amendement CS1378 est retiré.
La commission est saisie de l'amendement CS906 de M. Buon Tan.
L'amendement CS906 me semble constituer un juste milieu en offrant la possibilité aux commerces de détail d'ouvrir un dimanche sur deux, ce qui répondrait aux problématiques que l'on retrouve dans les centres-villes de province, mais aussi à Paris. Cela dit, j'ai entendu ce qu'a dit M. le ministre sur la nécessité d'attendre les conclusions de la mission d'évaluation de la loi Macron avant d'entrer dans une phase d'étude et de concertation, et je retire donc mon amendement.
L'amendement CS906 est retiré.
Je remercie les parlementaires de leur compréhension, et je précise que l'idée est bien de disposer de l'évaluation fin 2018 – je souhaite que les parlementaires y soient associés, afin de pouvoir bénéficier de retours de terrain extrêmement utiles. Un débat approfondi pourrait ensuite avoir lieu en 2019, éventuellement à l'occasion de l'examen d'une proposition de loi.
La commission examine les amendements CS2125 et CS2126 de M. Dominique Potier, qui font l'objet d'une présentation commune.
Quelles que soient nos divergences de vue, je prends acte de la volonté de M. le ministre de ne pas bâcler le débat sur un point particulièrement important. Je ne souhaite cependant pas retirer les deux amendements que je vais maintenant présenter, car ils me paraissent constituer deux pierres à apporter au débat qui va suivre.
L'amendement CS2125 propose que, dans un délai de six mois à compter de la publication de la présente loi, le Gouvernement remette au Parlement un rapport sur l'impact des choix d'urbanisme commercial sur les filières agroalimentaires et les territoires ruraux en matière d'emploi, de valeur ajoutée et d'environnement. Lorsque nous avons visité le marché de Rungis avec le président Lescure, nous avons pu constater que le modèle économique de distribution, comprenant des filières de production, de transformation et de distribution, différait de celui de la grande distribution en matière de création d'emploi et de plus-value économique et environnementale. Or, depuis quelques années, on a laissé filer l'urbanisme commercial sans imposer aucune contrainte à la libre-concurrence. Sans doute y a-t-il moyen de revisiter les stratégies mises en oeuvre en France en matière d'urbanisme commercial, dans le cadre d'un débat en amont des questions d'ouverture dominicale, et sur la base de comparaisons internationales montrant qu'il y a d'autres choix possibles que celui fait par la France, particulièrement destructeur de valeurs environnementales et économiques – je pense évidemment au débat de la loi Égalim.
Certains de nos collègues du groupe La République en Marche avaient publié une tribune dans la presse appelant à profiter de l'examen de ce projet de loi pour ouvrir le commerce le dimanche, en invoquant pour principal argument la concurrence du commerce électronique. Je propose que, dans le cadre d'une réflexion en profondeur, on s'interroge sur les externalités environnementales, sociales et économiques du commerce électronique, afin que les éléments qui en ressortiront puissent être apportés au débat. Tel est l'objet de l'amendement CS2126. Je ne suis pas sûr que l'argument de la concurrence du commerce électronique doive conduire à ouvrir les commerces tous les jours de la semaine, mais aussi la nuit : comme on le voit, il est nécessaire d'engager une réflexion sereine et approfondie.
Je ne suis pas sûr qu'il soit très efficace de multiplier les rapports. Une mission d'évaluation est en cours et il convient d'en attendre les conclusions, qui comprendront des estimations très concrètes en termes d'emploi ou d'évolution du chiffre d'affaires pour les commerces concernés. À mon sens, cette mission d'évaluation doit aussi avoir pour objet de s'intéresser aux questions relatives au numérique, au développement des centres commerciaux et à leur avenir – il est en effet permis de se demander si ces centres sont susceptibles de constituer un modèle répondant aux attentes des consommateurs. Nous aurons tout loisir d'enrichir les travaux de cette mission après la publication de son rapport et le débat collectif que nous devrons ensuite organiser. Dans l'immédiat, il ne me paraît pas opportun de disperser les énergies en rédigeant des rapports sur différents thèmes, c'est pourquoi j'émets un avis défavorable à ces deux amendements.
La commission rejette successivement les amendements CS2125 et CS2126.
Article 9 ( articles L. 225-7, L. 225-16, L. 225-26, L. 225-40, L. 225-73, L. 225-88, L. 225-100, L. 225-115, L. 225-177, L. 225-204, L. 255-209-2, L. 225-231, L. 225-235, L. 226-9, L. 226-10-1, L. 227-9-1, L. 136-228-19, L.232-3, L. 232-19, L. 232-23, L. 823-2-1 [nouveau], L. 823-2-2 [nouveau] et L. 823-12-1 du code de commerce) : Relèvement des seuils de certification légale des comptes
La commission est saisie des amendements identiques CS197 de Mme Émilie Bonnivard, CS562 de M. Ian Boucard, CS1395 de M. Adrien Quatennens et CS2127 de M. Dominique Potier.
Je comprends la motivation qui sous-tend l'article 9 du projet de loi, à savoir une volonté d'harmonisation des seuils de certification légale des comptes, au regard des seuils européens. Cependant, je veux souligner qu'à l'heure actuelle, certains pays reviennent en arrière et s'engagent dans une démarche d'abaissement des seuils d'audit – c'est le cas de l'Italie, mais aussi de la Suède – afin de prendre en compte un certain nombre de points relatifs à la sécurité des comptes et de lutter contre les fraudes.
Le rapport Cambourg fait état de trente-huit propositions. Combien comptez-vous en retenir ?
L'enjeu est important, puisque sur environ 200 000 mandats, 153 000 sont concernés.
Monsieur le ministre, comment entendez-vous accompagner la profession qui est d'accord pour passer d'une logique d'obligation à une logique de volontariat ? On ne peut pas laisser sans accompagnement une profession qui rend un véritable service public, qui participe à la qualité des comptes, élément important que nous défendons les uns et les autres, et à la diminution des fraudes – je rappelle que l'examen du projet de loi relatif à la lutte contre la fraude débutera en séance publique le 17 septembre.
Nous sommes favorables à l'obligation de la certification des comptes pour les petites entreprises, alors que vous souhaitez supprimer cette disposition, en vous appuyant sur certaines études, notamment celle de l'Inspection générale des finances (IGF) de mars 2018 qui considère que cette certification aurait peu d'effets bénéfiques pour les petites entreprises. Or d'autres économistes font un autre diagnostic que le vôtre quant à l'utilité de la certification des comptes pour les petites entreprises. Jean Tirol, prix Nobel d'économie, estime en effet que : « Quand on compare ce qui est comparable, les PME certifiées subissent 40 % de moins de procédures collectives et vont deux fois moins en liquidation que la moyenne des PME. Elles connaissent une croissance supérieure, enregistrent de moindres délais de règlement et affichent une meilleure trésorerie. Phénomène remarquable, l'écart positif de rentabilité pour les PME certifiées est d'autant plus important qu'elles sont petites ! Ces constats devraient conduire à la proposition d'étendre l'obligation de contrôle, et non de la restreindre ».
Concernant les comparaisons avec les pays étrangers, observons que la Suède, qui sert souvent de modèle, et l'Italie, dont la part de petites entreprises est comparable à la nôtre, sont revenues à des seuils inférieurs aux seuils français après le bilan négatif d'un moindre contrôle.
Cela augmente aussi les risques en matière de petits abus de biens sociaux, de fraudes fiscales, de travail au noir, de blanchiment d'argent, etc. et risque d'affaiblir les petites entreprises face aux banques qui ne remplissent pas toujours leur rôle en matière de financement.
Enfin, cela risque de produire un effet de seuil important alors que le Gouvernement utilise cet argument pour supprimer certains effets de seuil. Il est bien plus lourd pour une société d'avoir une comptabilité en règle que de respecter certains seuils sociaux.
L'article 9 vise notamment à fixer des seuils de certification obligatoire des comptes sur la base des niveaux retenus par la directive européenne. Or les seuils français actuels sont beaucoup plus bas que ceux prévus par la réglementation européenne et varient selon la nature juridique des entités et leur appartenance ou non à un groupe. Il nous semble donc que cet article pose des difficultés et que ce choix apparaît à contretemps, notamment compte tenu du retour d'expérience que mon collègue évoquait à l'instant de la Suède, du Danemark et de l'Italie qui ont vu une érosion de leurs bases fiscales et une augmentation de la fraude, au point que ces États envisagent de revenir à des seuils plus faibles.
Il faut ensuite noter que la rétractation du réseau d'audit au niveau des seuils européens laisserait 345 milliards d'euros de chiffre d'affaires sans contrôle, d'après la Compagnie nationale des commissaires aux comptes, ce qui représente quasiment l'équivalent du budget de l'État. Le coût moyen pour les petites entreprises de la certification des comptes demeure pourtant raisonnable. Ce choix nous paraît donc peu justifié au regard de ce coût modéré.
Nous proposons donc la suppression de cet article, même si nous pensons qu'une réforme ambitieuse des missions des commissaires aux comptes pourrait être envisagée, notamment sous le prisme de la responsabilité sociale des entreprises. De tels moyens pourraient amener le Gouvernement à développer des dispositifs sociaux et fiscaux favorisant les entreprises vertueuses en matière de RSE, qui intégreraient pleinement des dimensions économiques, sociales et environnementales de leurs externalités.
Un problème n'a pas encore été évoqué, celui de l'incidence de la disposition sur les recettes de l'État. On constate en effet qu'il y a un écart entre les taux de redressement des entreprises ayant un commissaire aux comptes et celles qui n'en ont pas.
Si, l'étude de l'Inspection générale des finances est complètement biaisée.
Dire que la suppression des commissaires aux comptes n'aura aucune incidence sur les recettes de l'État n'est pas exact. Ceux qui connaissent un peu le métier de commissaire aux comptes savent que celui-ci a un rôle non seulement de certification des comptes mais aussi de conseil qui permet d'éviter des erreurs ou de les corriger avant que ne soient certifiés les comptes. Je pense donc que le Gouvernement va trop vite dans cette affaire.
Si le texte est voté en l'état, il risque d'y avoir grosso modo un tiers de licenciements, soit 4 000 à 4 500. On peut en effet considérer qu'une partie des entités conservera leur commissaire aux comptes même s'ils n'y sont pas obligés, ce qui représente 2 000 à 2 500 personnes, si l'on s'en tient à la moitié.
J'ajoute que la mesure frappera surtout les petits cabinets de province, et sera sans incidence sur les grands cabinets des grandes villes dont la clientèle est bien au-delà de ces seuils
Je veux bien qu'on modifie les plafonds pour réduire l'écart qui existe entre les seuils français et le seuil européen, mais passer brutalement au seuil européen est une erreur.
Les commissaires aux comptes reconnaissent avoir loupé l'étape de leur modernisation et de l'adaptation nécessaire de leurs prestations à des entreprises qui sont effectivement majoritairement des TPE et des PME. Ils se sont bornés à leur proposer une offre basée sur leurs obligations légales. La disposition prévue leur a permis de réfléchir à leur profession, et à ce qu'ils pourraient présenter à l'avenir aux entreprises.
Par ailleurs, n'agitons pas le spectre de l'emploi : plus de 80 % des commissaires aux comptes sont également experts-comptables. Ils auront donc la possibilité de rebondir dans des activités professionnelles et ne seront pas amenés à licencier brutalement des centaines de personnes.
Enfin, je tiens à saluer le travail que les commissaires aux comptes ont accompli ces derniers mois pour accompagner la nécessaire mutation de leur profession.
On ne peut pas dire que cette disposition n'aura pas d'impact sur l'emploi puisque le travail effectué actuellement par un certain nombre d'employés de ces cabinets n'existera plus.
En outre, cette mesure a de quoi inquiéter parce que les commissaires aux comptes, notamment auprès des entreprises de taille modeste, ont un rôle d'accompagnement pour sécuriser, fiabiliser notre économie et garantir sa bonne santé. C'est un rôle utile à la fois pour les entreprises, mais aussi pour l'ensemble de la société, pour la qualité des échanges, leur sincérité. Nous ne comprenons donc pas pourquoi, au prétexte une fois de plus de simplifier certaines règles, on supprime cette fonction qui permet aussi de lutter contre des tentatives de fraudes. La présence de commissaires aux comptes est plutôt un atout en la matière.
Au fond, nous avons toujours le même beau débat : que voulons-nous pour l'économie française. Moi je veux des PME qui créent des emplois. Or vous ne créerez pas d'emplois dans les PME – et nous en resterons à la situation que nous connaissons depuis trente ans – si vous n'allégez pas les charges qui pèsent sur les PME, les contraintes réglementaires et les charges financières. On a parfois reproché à la loi sa complexité – je l'assume dans un environnement économique complexe. Il nous revient de lever un à un ces obstacles à la croissance de nos PME.
Vous êtes tous des élus locaux. Vous voyez bien que nos PME sont trop fragiles, qu'elles ne sont pas assez profitables, qu'elles n'investissent pas assez, qu'elles ne se digitalisent pas, que leurs produits ne sont pas au niveau de la compétition mondiale et que nous perdons du terrain. Les chiffres sont sans appel.
Il y a dix-huit ans, notre pays comptait le même nombre d'entreprises de taille intermédiaire que l'Allemagne. Aujourd'hui, nous en avons près de trois fois moins. Nos PME n'ont pas grandi. Ce n'est pas la faute des entrepreneurs, c'est parce que nous refusons, nous responsables politiques, d'adapter notre modèle économique.
Comme l'a dit Cendra Motin, les commissaires aux comptes avec lesquels j'ai eu de longues discussions, reconnaissent qu'ils n'ont pas procédé à la nécessaire modernisation de leur profession. Qui fait-on payer ? Les entrepreneurs et les PME. Je suis désolé, cela ne peut pas continuer ainsi.
La mesure que nous proposons rend 700 millions d'euros aux PME. Sans remettre en cause la sécurité des comptes de ces PME puisqu'il s'agit non pas, je le précise à M. Quatennens, de supprimer mais d'harmoniser les règles. Nous garderons une certification des comptes mais à un niveau qui sera plus élevé.
Pour ma part, je revendique cette volonté d'alléger, de simplifier la vie de nos entrepreneurs, en particulier des petites et moyennes entreprises, pour qu'elles créent de l'emploi. Telle est la philosophie fondamentale du texte.
Je voudrais faire le point très honnêtement sur la situation actuelle, pour qu'on comprenne bien de quoi nous parlons.
D'abord, elle est extrêmement complexe. Comme toujours en France, avec les meilleures intentions du monde, on a rajouté des règlements, des lois, des arrêtés, des précisions : pour faire le bonheur de tous, on a fait le malheur de chacun. Aujourd'hui, nous avons le système le plus complexe au monde en matière de certification des comptes. Pour toutes les sociétés anonymes, il y a, sans condition de seuil, une obligation de certification des comptes. Pour les sociétés à responsabilité limitée, les sociétés en nom collectif et les sociétés en commandite simple, il y a l'obligation de certification des comptes lorsque deux des trois seuils suivants sont atteints : une taille de bilan supérieure à 1,55 million d'euros, un chiffre d'affaires hors taxes supérieur à 3,1 millions d'euros et un effectif de cinquante personnes. Cette obligation de certification des comptes s'applique à toutes les sociétés par actions simplifiées lorsque deux des trois seuils suivants sont atteints : une taille de bilan supérieure à un 1 million d'euros, un chiffre d'affaires hors taxes supérieur à 2 millions d'euros et un effectif de vingt personnes. Jugez la complexité de notre législation ! Il faut donc prendre un peu de recul et regarder l'absurdité du système auquel nous sommes parvenus par empilement de décisions successives animées des meilleures intentions du monde. Trente ans plus tard, le résultat est sans appel : du chômage, des entreprises qui ne grandissent pas et une complexité invraisemblable.
La directive européenne précise que sont soumises à obligation de certification des comptes toutes les entreprises qui ont un bilan supérieur à 4 millions d'euros, un chiffre d'affaires supérieur à 8 millions d'euros et un effectif de cinquante personnes.
Très souvent, dans le débat public, on entend dire que Bruxelles réglemente sur tout, la taille des poireaux, le calibre des navets, les chasses d'eau… Parfois c'est vrai, et parfois c'est totalement faux. En l'espèce, c'est totalement faux. La complexité est du côté de la France, et la simplicité du côté de l'Europe. Je souhaite donc que nous fassions nôtre cette simplicité et que nous renoncions à cette complexité administrative française qui, je n'hésite pas à le dire, tue nos PME et l'esprit d'entreprise.
Par ailleurs, il est possible de déroger à ces seuils vers le haut. Vous avez cité l'exemple de la Suède : le débat est effectivement en cours dans ce pays, mais pour l'instant aucune décision n'a été prise sur le fait de rabaisser ou de changer les seuils.
Certains États ont décidé d'aller plus loin que cette directive européenne qui a le mérite de la simplicité et de la lisibilité. Il en est ainsi de l'Allemagne, l'Autriche, des Pays-Bas, du Royaume-Uni – je n'ose pas dire que ce sont les pays qui ont aujourd'hui le plus faible taux de chômage en Europe, mais il se trouve que c'est le cas. Ils ont utilisé l'option dérogatoire de la directive pour remonter le seuil de chiffre d'affaires en le passant de 8 à 12 millions d'euros. Ayons ces chiffres en tête. Nos principaux compétiteurs en Europe, ceux qui rivalisent le plus avec nous en termes de commerce extérieur, de vente de leurs produits et de dynamisme économique, peuvent avoir un chiffre d'affaires d'obligation de certification des comptes de 12 millions d'euros, contre 1,55 million d'euros pour nous. On peut toujours faire la course avec des boulets aux pieds mais c'est plus compliqué de la gagner. Interrogeons-nous : pourquoi notre niveau de croissance est-il systématiquement en dessous de celui de nos partenaires européens ? Allons au fond des choses dans le cadre de l'examen de ce texte, regardons les chiffres et la réalité en face. On peut toujours faire de grands discours à la radio ou à la télévision, mais à un moment donné il faut analyser les faits crûment et faire des choix politiques. Chaque choix est respectable, mais il faut expliquer aux Français pourquoi nous en sommes là.
Ces seuils ont un coût moyen de 5 511 euros pour toutes les entreprises sous les seuils européens soumis à une obligation de certification des comptes. Pour certaines, il sera de 10 000 ou 12 000 euros.
On peut toujours se plaindre de la faiblesse de la croissance française, on peut toujours dire que nos PME ne sont pas assez compétitives, on peut toujours ressasser les mêmes discours : il faut s'en tenir aux chiffres et c'est l'intérêt du débat parlementaire de les rappeler. Moi je ne veux plus que les PME payent en moyenne 5 511 euros parce qu'elles sont soumises à des seuils de certification sept à huit fois plus stricts que ceux de leurs concurrents européens. Elles ne peuvent pas rivaliser dans de telles conditions.
On m'explique que la qualité des comptes des entreprises varie beaucoup en fonction de la certification. Or ce n'est pas ce que montre l'analyse des redressements fiscaux opérée par la Direction générale des finances publiques (DGFiP). Certes, on peut contester la validité des examens de l'IGF, comme l'a fait Charles de Courson. Mais je n'ai pas d'autres éléments à ma disposition. La DGFiP a établi de manière très précise que le nombre de redressements fiscaux opérés pour des motifs d'inexactitude comptable ne varie pas significativement en fonction du franchissement du seuil. Juste au-dessous des seuils, il n'y a pas de différence majeure dans la qualité des comptes des entreprises. Certains avancent parfois l'argument – pas dans cette salle – que je voudrais tout de suite écarter d'un revers de main, selon lequel nous serions un pays latin pas respectueux des règles et que nous aurions vocation, voire tendance à tricher. Je suis désolé, ce n'est pas ce que disent les responsables de l'administration fiscale.
Avoir des comptes certifiés permettrait, me dit-on, d'accéder plus facilement à du crédit bancaire. J'ai étudié les cotations FIBEN de la Banque de France pour vérifier s'il y avait une différence importante suivant que l'on est certifié ou non par un commissaire aux comptes. Résultat : il n'y a pas de différence majeure.
Tous ces éléments que sont la complexité, le coût, la différence de compétitivité par rapport à nos partenaires, nous ont amenés à faire ces propositions de réforme des seuils d'audit légal pour nous ajuster sur les seuils européens.
Les commissaires aux comptes ont objecté que tout cela était beaucoup trop brutal pour eux. J'aurais pu écarter leurs remarques d'un revers de main et leur dire : il y a un rapport de l'IGF, circulez, il n'y a rien à voir. Mais ce n'est pas ma méthode. J'ai rencontré à plusieurs reprises les commissaires aux comptes – et je recevrai d'ailleurs à nouveau leur représentant à l'heure du déjeuner. Comme ils trouvaient le rapport de l'IGF trop technocratique, je leur ai proposé d'en rédiger un eux-mêmes. Il a été utile car nous avons fait, à partir de ces conclusions, un certain nombre de propositions. À cet égard, je conteste formellement le chiffre de 4 500 suppressions d'emplois. Cela aurait peut-être été le cas sans mesure d'ajustement. Mais le texte prévoit précisément toute une série de dispositions qui répondent aux attentes et aux craintes des commissaires aux comptes sur la base du rapport qui a été remis par Patrick de Cambourg il y a quelques semaines.
Nous allons ainsi créer une mission d'audit simplifié pour les petites entreprises. Les commissaires aux comptes, notamment dans les territoires ruraux, craignent en effet de disparaître, le mandat de six ans étant trop lourd. Nous avons accepté de définir un nouveau mandat dont la durée sera deux fois moindre – trois ans –, avec des missions allégées, et donc un coût allégé. Cela répond à une demande très forte des commissaires aux comptes. Cette mission, qui sera facultative, pourra rassurer beaucoup de petits entrepreneurs. Elle sera moins inaccessible que la mission actuelle, nettement trop lourde pour une PME. Nous allons retenir cette très bonne idée des commissaires aux comptes.
Par ailleurs, les commissaires aux comptes se sont beaucoup interrogés sur les groupes. Nous avons accédé à leur demande en créant une mission d'audit sur les petits groupes, c'est-à-dire les groupes dont le chiffre d'affaires global dépasse 8 millions d'euros mais qui comprennent différentes entités. C'est la deuxième proposition.
En troisième lieu, nous allons offrir une passerelle pour que les titulaires du certificat d'aptitude aux fonctions de commissaire aux comptes puissent également s'inscrire à l'ordre des experts-comptables et qu'il y ait ainsi davantage de fluidité entre les deux professions qui, très souvent, se regroupent.
Au-delà de ces premières mesures, nous allons présenter quatre séries de propositions complémentaires.
Premièrement, il s'agit de reconnaître le statut d'expert-comptable en entreprise. Comme il existe des avocats d'entreprise, il y aura des experts-comptables en entreprise. C'est un changement très important pour la profession qui, ainsi, ne reposera plus uniquement sur les cabinets, mais qui pourra également se développer dans l'entreprise. Cela augmentera le nombre d'experts-comptables. La mesure leur offrira également une sécurité puisqu'ils seront membres de l'entreprise.
Deuxièmement, nous allons ouvrir la possibilité de facturer des honoraires qui seront liés au succès des missions réalisées, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui. Si une fusion acquisition a bien fonctionné, si les commissaires aux comptes ont joué un rôle dans la certification de cette mission – puisque nous élargirons aussi le périmètre des missions des commissaires aux comptes – ils pourront dorénavant bénéficier d'honoraires liés au succès de l'opération.
Troisièmement, nous reconnaîtrons la possibilité pour les experts-comptables de gérer les créances et les paiements des dettes pour le compte de leurs clients.
Enfin, nous donnerons un mandat d'intervention auprès de l'administration fiscale pour les commissaires aux comptes.
Telles sont les mesures complémentaires dont nous avons discuté avec la profession et que j'évoquerai avec le président de l'ordre d'ici à quelques instants. J'ai été un peu long sur le sujet, mais l'enjeu est considérable. Je crois profondément qu'il existe une voie permettant à la fois d'alléger la charge qui pèse de manière indue sur nos PME et qui les empêche d'être compétitives par rapport à leurs grands voisins européens, et de moderniser profondément la profession de commissaire aux comptes en leur ouvrant de nouvelles perspectives, de nouvelles possibilités de certification et une vraie diversification de leur métier.
Monsieur le ministre, je vous remercie pour vos explications précises sur ce sujet important.
Quand on est membre d'un groupe parlementaire, on n'est pas toujours d'accord avec l'expression de certains collègues. Pour ma part, je souhaite soutenir la position du Gouvernement s'agissant des commissaires aux comptes. J'ai eu une PME, et je peux dire que le coût était supérieur à ce que vous avez annoncé, monsieur le ministre, puisqu'il était de 7 000 euros. Or j'aurais préféré consacrer cette somme à d'autres prestations de conseil que celles qui m'avaient finalement déjà été fournies peu ou prou par l'expert-comptable. Par exemple, j'aurais pu choisir de moderniser les processus à partir d'outils numériques, j'aurais pu souhaiter bénéficier de conseils en innovation, j'aurais pu améliorer le système informatique, etc.
J'engage le Gouvernement à poursuivre dans cette voie, à revenir sur certaines dispositions de surtransposition des directives européennes, et à en rester à l'esprit européen en ce qui concerne les nouvelles transpositions des directives. Je l'invite à surtout faire de même à l'article 66 qui vise à habiliter le Gouvernement à prendre une ordonnance pour promouvoir l'engagement à long terme des actionnaires.
Monsieur le ministre, je vous remercie pour ces explications complètes et précises.
Les commissaires aux comptes ont été créés il y a un siècle environ. À l'époque, cette décision avait fait l'objet de controverses. Pour l'école libérale en effet, c'était une atteinte à la liberté des entreprises. Or ce fut au contraire un facteur de prospérité, parce que cela a créé un contexte de loyauté dans les échanges.
Le groupe Nouvelle gauche soutient votre proposition d'un produit allégé pour les petites entreprises, qui correspondrait à un rapport qualité-prix plus adapté. Toutefois, comme Charles de Courson, nos collègues de La France insoumise et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine, nous restons dubitatifs sur le risque d'érosion fiscale. La controverse subsiste, au regard de ce que nous observons dans d'autres pays du nord de l'Europe.
Enfin, si une mission et un dialogue se poursuivent, je souhaiterais que l'on intègre la question de la RSE dans des modalités très simples, pas dans une usine à gaz, afin qu'à côté de la réalité économique, celle de l'impact social et environnemental vienne enrichir, à coût équivalent ou coût inférieur, la prestation de ce regard extérieur sur les entreprises.
Monsieur le ministre, vous souhaitez alléger les charges et améliorer la compétitivité des entreprises, et nous vous rejoignons les uns et les autres sur ce point. Toutefois, le Gouvernement est contradictoire puisque d'un côté, il propose de diminuer les charges des entreprises en supprimant l'obligation de recourir à un commissaire aux comptes pour certaines entreprises, tandis que de l'autre, il met en place le prélèvement à la source qui coûtera chaque année 400 millions d'euros aux entreprises, à ajouter à l'investissement initial de 600 millions d'euros.
Vous souhaitez renoncer à la complexité et vous évoquez les différents seuils. Je vous rejoins aussi sur ce point, parce que ce n'est pas forcément lisible. Je pense que la profession regrette bien évidemment votre décision, mais elle l'a prise en compte et a participé à la réflexion pour assumer une transition. Cette profession a oeuvré pour l'intérêt général, et s'est énormément adaptée ces dix dernières années, contrairement à ce qu'a dit Mme Motin.
Il est important qu'un certain nombre de propositions du rapport Cambourg soient retenues. Effectivement, la mission d'audit simplifié est défendue par la profession. Par ailleurs, je suis heureuse que vous ayez entendu la proposition sur les filiales, car c'est dans les filiales qu'on rencontre toutes les difficultés qui peuvent exister. Mais au final, le compte n'y est pas puisque vous retenez deux propositions sur les trente-huit du rapport Cambourg. Les propositions que vous évoquez comme l'expert-comptable en entreprise, les honoraires liés au succès, la possibilité de gérer les créances et les dettes pour les clients, concernent les experts-comptables. Il y a donc bien deux métiers différents.
Je vous remercie, monsieur le ministre, pour la clarté de vos explications qui met en perspective nos désaccords politiques.
Vous considérez que la clé de la réussite et du succès de notre économie tient dans la diminution des règles et la baisse des prélèvements avec une toile de fond que vous ne remettez pas en cause, celle de la compétition, de la concurrence libre et non faussée. Nous pensons le contraire, et je précise que nous ne confondons pas les grosses entreprises et les PME. On sait que les secondes subissent souvent l'écosystème imposé par les premières. Je vous rappelle que c'est La France insoumise qui a proposé, pendant la campagne présidentielle, la baisse de l'impôt sur les sociétés pour les PME. Vous vous focalisez sur des problèmes microéconomiques sans voir que l'enjeu se situe au niveau macroéconomique. Ce sont les carnets de commandes qui seront porteurs de la relance de l'activité.
Monsieur le ministre, il n'est pas sérieux de penser qu'une entreprise pourrait renoncer à grandir si elle en a les facultés économiques, si les carnets de commandes se remplissent, parce qu'elle devrait offrir les conditions de déjeuner dans un local à ses salariés. Je ne pense pas qu'une entreprise dont les carnets de commandes sont pleins renoncerait à grossir parce qu'il lui faudrait établir un règlement intérieur. Je ne pense pas qu'une entreprise dont les carnets de commandes sont pleins renoncerait à grandir parce qu'il faudrait offrir un local syndical. Pour nous, le problème se situe à un autre niveau. Vous ne tirez pas non plus certaines conclusions, évoquées notamment par Nicolas Hulot à l'occasion de la démission. Nous sommes face à une grande bifurcation. Je suis intimement convaincu que la trajectoire que vous poursuivez n'est pas compatible avec le défi écologique. Or celui-ci défi nous permettrait de relancer l'activité sur d'autres bases.
Vous ne cessez de nous dire que l'entreprise doit être compétitive. Mais la non-harmonisation fiscale et sociale au niveau européen fait que la compétition est toujours gagnée, et vous le savez, par le moins-disant social. Il y a quelques semaines, l'Autriche a voté la semaine de travail à soixante heures. Dans ces conditions, comment voulez-vous que nous soyons compétitifs ? En réalité, tout est organisé de telle manière que l'harmonisation sociale se fait systématiquement par le bas. La France est un grand pays, nous avons des capacités, y compris économiques, des savoir-faire, et nous pourrions faire autre chose que cette politique rabougrie.
L'investissement public est aussi sans doute la clé. Le fonds monétaire international (FMI) nous explique que, par l'effet du multiplicateur, l'investissement public peut parfois provoquer un choc positif.
Bref, je souhaiterais que nous puissions élargir la focale et je ne crois pas que ce soient simplement ces petites règles qui freinent l'activité de notre pays.
J'ai eu l'occasion, au cours de ma carrière, de côtoyer les commissaires aux comptes et de voir ce qu'ils apportent aux entreprises. C'est un rôle particulier, à mon avis très positif, même pour une entreprise moyenne. Vous avez, monsieur le ministre, mis en lumière certains problèmes et répondu aux critiques qui peuvent s'élever dans différents domaines. Il n'empêche que l'on passe à côté du rôle d'un professionnel responsable et original, nommé par les dirigeants mais ayant une totale indépendance, notamment dans le cadre de procédures d'alerte et dans divers autres processus qui peuvent aider à la pérennité d'une entreprise ou protéger ses partenaires. Leur mission est particulièrement utile. En vingt, vingt-cinq ans d'expérience professionnelle, j'ai pu voir l'évolution de cette profession, les contrôles mis en place, la qualité de la prestation des commissaires aux comptes. Ils jouent un rôle de tiers important. Je trouve dommage que l'on balaie ce rôle dans les PME. Il est un peu caricatural de le limiter à un montant d'honoraires.
Je me félicite de la qualité du débat que nous avons.
Je commencerai par remercier Laure de La Raudière pour l'exemple qu'elle a apporté. C'est l'illustration la plus frappante des choix que nous avons à faire. Je préfère en effet que les PME investissent 5 000, 6 000 ou 7 000 euros dans leur digitalisation plutôt que dans une obligation à laquelle les autres entreprises européennes de même taille ne sont pas soumises.
Je rappelle ensuite à Mme Louwagie que nos propositions en faveur des experts-comptables bénéficieront aux commissaires aux comptes puisque 90 % de ces derniers sont également experts-comptables et que nous allons développer des passerelles entre les deux professions. C'est un des éléments importants de la réforme que nous portons.
Nous avons, monsieur Potier, entendu les demandes sur les questions de RSE puisque non seulement les commissaires aux comptes pourront réaliser des audits en la matière, ce qu'ils font déjà, mais nous allons aussi permettre le développement d'attestations ciblées qui seront utiles à la fois aux commissaires aux comptes et aux entreprises. Je souhaite que ces attestations ciblées de conformité en matière d'engagement sur la RSE soient développées sur d'autres sujets, en particulier le cyber-risque et la lutte contre la corruption. Cela ouvrira pour les commissaires aux comptes des perspectives de développement importantes.
Enfin, vous avez, monsieur Quatennens, parfaitement posé le débat sur nos désaccords politiques mais aussi, je tiens à le dire, sur de vrais points d'accord. S'agissant de nos désaccords, j'estime que la diminution d'un certain nombre de règles trop contraignantes par rapport à nos partenaires européens ainsi que l'allégement des charges et prélèvements permettront à nos entreprises d'être plus compétitives, et donc d'augmenter leurs carnets de commandes. Si le carnet de commandes n'est pas suffisamment fourni aujourd'hui, c'est parce que nos produits n'intègrent pas assez d'innovations, ne sont pas au niveau technologique où ils devraient être ni n'ont le niveau de qualité requis.
En revanche, je vous rejoins sur plusieurs points. Sur le local syndical, je rappelle que j'ai pris la décision de revenir sur le seuil de 250 et de maintenir le seuil de 200. C'est un geste politique très fort de la majorité en direction des organisations syndicales ; nous avons entendu les critiques sur le sujet. Je vous rejoins également sur l'idée de la grande bifurcation écologique, c'est un défi considérable et je suis convaincu que la France a tout intérêt à investir massivement dans la transition écologie et les énergies renouvelables, en y mettant l'innovation et les technologies nécessaires pour être à la pointe de cette transformation.
Je vous rejoins également sur l'harmonisation fiscale et sociale européenne et je tiens à vous dire que je livre ce combat tous les jours. Je ne prendrai qu'un exemple, celui de la taxation des GAFA. Je suis obligé de me rendre ce soir à Vienne afin de continuer à me battre pour obtenir une juste taxation des géants du numérique. L'Europe est là aussi face à une grande bifurcation. Soit elle continue de se soumettre à la Chine et aux États-Unis, soit elle affirme ses valeurs et son indépendance. Les citoyens, en politique, vous jugent sur vos décisions. Je le dirai avec autant de gravité à mes homologues ministres européens : dans six mois, les peuples européens vont nous juger et ils verront si nous acceptons de garder quatorze points de fiscalité de moins pour Google, Amazon et Facebook que pour nos PME françaises, italiennes, allemandes ou espagnoles. Ils verront et ils jugeront. Ils verront si nous sommes capables de nous attaquer à un des grands problèmes économiques européens qui est le caractère monopolistique de ces grandes entreprises ayant des niveaux de capitalisation supérieurs à ceux de 90 % de la richesse nationale des États de la planète. Ils verront si nous allons vers du dumping social et fiscal ou vers de l'harmonisation. Je me bats pour l'harmonisation. Nous avons trouvé un accord avec les Allemands sur l'harmonisation de la base fiscale de l'impôt sur les sociétés. Si nous allons vers le moins-disant fiscal, vers 10 ou 8 % d'impôt sur les sociétés, nous en crèverons tous car il n'y aura plus de services publics, plus de financement du bien public, plus de financement de l'innovation. Être plus compétitif ne veut pas dire renoncer au financement du bien commun.
La commission rejette ces amendements.
La séance, suspendue à onze heures vingt-cinq, reprend à onze heures cinquante.
La commission est saisie de l'amendement CS390 de Mme Lise Magnier.
Actuellement, la loi oblige les associations qui bénéficient de subventions publiques, à partir de 153 000 euros, d'avoir un commissaire aux comptes. Or les entreprises n'ont pas la même règle. L'objet de l'amendement est donc d'appliquer cette règle à tous. Pourquoi cette discrimination entre associations et entreprises ?
Imposer au secteur associatif un contrôle des commissaires aux comptes, avec les coûts que cela représente, est prohibitif pour le secteur.
C'est l'inverse, monsieur le ministre. Les entreprises qui bénéficient d'aides publiques égales ou supérieures à 153 000 euros ne sont pas soumises à un commissaire aux comptes, contrairement aux associations. Pourquoi ne pas étendre cette obligation à toutes les entreprises ?
Les subventions publiques ne sont pas octroyées aux entreprises n'importe comment et à n'importe quelles conditions. Les entreprises sont obligées de fournir leurs comptes à l'organisme public octroyant la subvention. Le dossier de l'entreprise est visé par la Banque de France et les services fiscaux, et c'est seulement si l'entreprise est réputée à jour de toutes ses obligations que l'aide publique est accordée. J'ai participé à des comités d'engagement, dans une autre vie, et je peux vous assurer que les comptes des entreprises sont passés au peigne fin avant que la collectivité puisse octroyer une quelconque aide. Le besoin de certification ne paraît donc pas justifié car toutes les garanties sont prises par les administrations.
J'appuie l'argumentation du rapporteur, en ajoutant que l'immense majorité de ces entreprises ont déjà un commissaire aux comptes.
La commission rejette cet amendement.
Elle examine ensuite l'amendement CS508 de M. Vincent Descoeur.
Suivant l'avis défavorable du rapporteur thématique, la commission rejette cet amendement.
Puis Puis elle examine l'amendement CS505 de M. Martial Saddier.
Cet amendement propose de maintenir l'uniformisation des seuils de déclenchement de la nomination d'un commissaire aux comptes, en prévoyant deux seuils distincts : le seuil européen minimum à partir duquel l'audit est obligatoire – 4 millions d'euros de bilan, 8 millions de chiffre d'affaires et cinquante salariés – et un seuil intermédiaire pour lequel serait nommé un commissaire aux comptes pour une mission d'audit légal « petite entreprise », moins onéreux et directement créateur de valeur pour l'entreprise. C'est une proposition du rapport Cambourg, dont nous avons parlé ce matin, et qui répond à une logique de volontariat.
J'en demande le retrait car l'amendement CS2036 du Gouvernement reprend cette proposition.
L'amendement est retiré.
La commission est saisie de l'amendement CS1145 de M. Arnaud Viala.
Nous ne sommes pas favorables à l'idée de doubler les amendes en cas de non-dépôt des comptes. Il y aura sans doute des propositions à faire, dans la suite de nos débats, sur le dépôt et la publication des comptes. Le dépôt est obligatoire. La publication peut poser nombre de difficultés à nos entreprises dans leurs relations en tant que donneurs d'ordres et avec leurs clients et fournisseurs, notamment dans les entreprises établies en zone frontalière, les entreprises établies en Allemagne ou en Suisse, par exemple, n'ayant pas forcément les mêmes obligations en la matière.
Il y a de véritables scandales. Que des sociétés holdings de grands groupes ne déposent jamais leurs comptes, pour les dissimuler, et se contentent de payer une amende ridicule, n'encourage guère la transparence. Notre collègue soulève un vrai problème.
L'amendement vise à doubler une amende qui portera principalement sur des PME. On peut toujours prendre les grandes holdings financières comme bouc-émissaires mais, dans la réalité concrète, ce sont des centaines de PME qui seront touchées. Le doublement de l'amende introduit à mon avis une complète disproportion dans l'échelle des peines. Il s'agit déjà d'une contravention de cinquième classe réprimée par l'amende maximale prévue pour cette catégorie de contravention.
Il est possible de demander la confidentialité : une entreprise peut déposer ses comptes sans qu'ils soient publiés. La liberté existe. Certaines sociétés, y compris de très grands groupes, contournent complètement cette obligation. La très grande majorité des chefs d'entreprise ne le font pas, certes, mais un certain nombre en profitent. Il faut avoir cette réflexion.
Nous l'aurons. Comme l'a indiqué le rapporteur thématique, le sujet est abordé un peu plus loin dans le texte.
La commission rejette cet amendement.
Elle examine ensuite l'amendement CS360 de M. Martial Saddier.
Cet amendement vise à renforcer la responsabilité des sociétés-mères de groupes de sociétés, ainsi que de leurs dirigeants et bénéficiaires effectifs, vis-à-vis des faits dommageables commis dans les filiales, ou en termes de continuité d'exploitation desdites filiales, de façon à assurer les salariés et fournisseurs de la pérennité de leurs relations. C'est dans les filiales que se produisent les turpitudes.
Cet amendement est contraire à l'esprit du texte car il traduit une défiance vis-à-vis des entreprises alors que le grand sujet de ce projet est la confiance entre l'État et les entreprises, et entre les entreprises et les citoyens. Avis défavorable.
Même avis. Le droit pénal exclut la responsabilité du fait d'autrui. Or l'amendement fait porter à la société-mère la responsabilité du comportement des filiales. Par ailleurs, nous allons développer les audits « petit groupe » qui visent justement à répondre au problème posé.
La commission rejette cet amendement.
Ensuite de quoi, elle examine l'amendement CS507 de M. Martial Saddier.
Cet amendement propose d'abaisser le seuil d'intervention des commissaires aux comptes dans les associations dès l'octroi de fonds publics de plus de 75 000 euros. C'est le premier point. La seconde disposition s'attache à rassurer les donateurs pour les associations qui perçoivent plus de 75 000 euros de dons ouvrant droit à avantage fiscal ; il doit y avoir un contrôle.
Je ferai une remarque générale sur ce type d'amendements concernant le monde associatif. Cette loi PACTE est pour les entreprises et je suis pour que nous nous concentrions sur les entreprises, à charge, peut-être, pour le Gouvernement de conduire un travail à part entière sur les associations. Avis défavorable.
J'ai déjà marqué les plus grandes réserves à l'extension de l'intervention des commissaires aux comptes dans les associations car cela les pénaliserait beaucoup. Je suis ouvert à ce que nous ayons ce débat dans les mois à venir mais, comme l'a très bien dit le rapporteur général, PACTE porte sur les entreprises.
Il existe deux types d'associations : les associations philanthropiques, qu'il n'est certes pas question d'évoquer dans le cadre de la loi PACTE, mais aussi quantité d'associations qui sont des acteurs économiques et concurrencent directement les sociétés civiles et commerciales et les entrepreneurs individuels. Il faut appliquer à ces associations-là les mêmes règles qu'aux autres acteurs économiques, sinon on crée les conditions d'une concurrence déloyale. Les associations qui sont des acteurs économiques ont leur place dans un texte qui concerne l'activité économique et les entreprises.
C'est un monde qui recouvre des réalités différentes mais la quasi-totalité des associations ont tout de même une vocation non lucrative. C'est un sujet très important qui doit être évalué dans son ensemble et pas seulement par le biais du sujet des commissaires aux comptes.
La commission rejette cet amendement.
Elle examine ensuite l'amendement CS205 de Mme Véronique Louwagie.
Cet amendement, peut-être mal placé car il prend en compte que l'audit « petite entreprise » est créé par un amendement ultérieur, vise à permettre la levée du secret entre les commissaires aux comptes chargés d'un audit légal et ceux chargés d'un audit légal « petite entreprise ». Cela coule de source.
Cette mesure pourrait être utile marginalement lorsque les filiales de petits groupes désignent volontairement un commissaire aux comptes ou lorsque ces filiales, dans le cadre des nouvelles obligations, dépassent les seuils de certification. Mais cela n'aurait un sens que si nous imposions l'audit de certaines filiales dans le cadre de l'audit « petit groupe », ce qui n'est pas ce que nous avons prévu pour le moment. L'amendement ne me semble donc pas adapté à sa finalité. Je vous invite à le retirer.
L'amendement est retiré.
La commission examine, en discussion commune, l'amendement CS1872 de M. Daniel Fasquelle ainsi que les amendements identiques CS207 de Mme Véronique Louwagie et CS363 de M. Martial Saddier.
L'amendement CS1872 reprend la recommandation figurant en page 22 du rapport Cambourg dans le but d'adapter le dispositif de contrôle de qualité, qui pourrait être recentré sur une vérification de la pertinence de la démarche suivie par le professionnel, et de faire une large place à une délégation à la compagnie nationale des commissaires aux comptes (CNCC) plus à même et légitime à confronter les obligations des contrôlés à la réalité concrète de l'exercice de la profession.
L'amendement CS207, s'inscrivant dans le rapport Cambourg, vise à établir sans délai une norme d'exercice professionnel allégée, proportionnée, modulable et autonome concernant le commissariat aux comptes des PME, en dehors de la mission d'audit légal « petite entreprise ». Il vise également à adapter le dispositif de contrôle de qualité existant dans la profession.
Je demande le retrait de ces amendements au profit de l'amendement du Gouvernement CS2036.
Même avis. La question importante est : qui est responsable in fine de la régulation de l'activité des commissaires aux comptes ? Ce qui est prévu dans les amendements qui suivent, c'est que le principe de responsabilité finale implique que le Haut Conseil du commissariat aux comptes ait sur cette activité un droit de regard, ce qui n'exclut pas le rôle de la CNCC. Les deux ont trouvé un accord par le biais d'une convention d'ores et déjà effective et rappelée dans l'amendement suivant. Cela répond, je crois, à votre souhait.
Ces amendements sont retirés.
La commission examine, en discussion commune, l'amendement CS2036 du Gouvernement, l'amendement CS209 de Mme Véronique Louwagie et l'amendement CS1878 de M. Daniel Fasquelle.
Cet amendement porte principalement sur l'accompagnement de la profession de commissaire aux comptes et sur l'élargissement des possibilités d'activité qui lui sont offertes.
En premier lieu, il vise à assouplir l'interdiction faite aux commissaires aux comptes d'exercer une activité commerciale afin de permettre à ceux d'entre eux qui exercent en même temps une activité d'experts-comptables de bénéficier d'une flexibilité quasi-totale. Cela me semble être un élément positif pour le développement de leur activité.
Le deuxième point suscitera sans doute un débat : nous allons créer un audit légal des petites entreprises. C'est un instrument extrêmement porteur comportant des obligations allégées pour les commissaires aux comptes, certaines diligences étant supprimées par rapport au système ordinaire. Surtout, la durée du mandat est ramenée à trois exercices au lieu de six, ce qui constitue un assouplissement considérable et qui permet en outre à un entrepreneur de changer de commissaire aux comptes s'il n'en est pas satisfait, ou de mettre fin à son mandat au bout de trois ans s'il estime disposer de comptes assez solides ou d'un accès bancaire aisé.
Enfin, ces nouvelles modalités n'excluent pas la possibilité pour une société de choisir une certification classique si, à l'inverse, elle estime avoir besoin d'une certification plus solide et de longue durée.
En revanche, s'agissant des amendements déposés en discussion commune, je serai tout à fait transparent : je ne souhaite pas que cette mission d'audit légal des petites entreprises soit obligatoire. En la rendant obligatoire, en effet, nous rétablirions le système de seuils et de contraintes imposées aux PME, auquel je ne suis pas favorable. Je préfère qu'elle reste facultative.
L'amendement CS2036 que vient de présenter M. le ministre va en effet dans le sens souhaité par la profession. L'amendement CS209 que je défends concerne un point supplémentaire que nous n'avons pas encore abordé : la possibilité pour les commissaires aux comptes d'exercer dans le cadre de sociétés pluri-professionnelles d'exercice – dans le respect des règles d'indépendance qui s'appliquent à eux, naturellement – de la même manière qu'ils exercent déjà dans des sociétés mixtes de commissaires aux comptes et d'experts-comptables. Quelle est la position du Gouvernement sur ce sujet ?
Enfin, pouvez-vous préciser, monsieur le ministre, combien de propositions du rapport Cambourg le Gouvernement entend-il retenir dans le présent projet de loi ? Cette information est importante.
L'amendement CS1878 vise à adapter la règle de l'interdiction d'activité commerciale faite aux commissaires aux comptes suite à l'ouverture récente de la possibilité d'exercer des activités commerciales accessoires légalement encadrées pour d'autres professions, dans l'esprit de la loi Macron – j'utilise un mot magique dont j'espère qu'il permettra l'adoption de cet amendement.
J'ai également déposé un amendement CS1870 qui prévoit l'ajout d'un alinéa consistant à lever le secret entre les commissaires aux comptes de petits groupes ne procédant pas à une consolidation.
Permettez-moi de demander quelques éclaircissements à M. le ministre. Si j'ai bien compris, le premier volet de son amendement vise à autoriser les commissaires aux comptes à exercer des activités commerciales accessoires ou principales selon leur activité. Pouvez-vous préciser la nature de ces activités ? Pourront-ils par exemple gérer une société commerciale ou autre ?
L'audit légal des petites entreprises, ensuite : je comprends qu'il s'agit d'une option donnée aux entreprises qui ne seront plus tenues de recourir à un commissaire aux comptes, moyennant un allégement de leurs missions et une réduction à trois ans de la durée de leur mandat.
Enfin, qu'en sera-t-il des mandats en cours ? Une fois les seuils supprimés, qu'adviendra-t-il d'un commissaire aux comptes nommé pour six ans il y a deux ans seulement ? Le mandat tombera-t-il ou courra-t-il jusqu'à son terme ?
Pourriez-vous expliquer, monsieur le ministre, ce que recouvre la notion de « normes professionnelles d'exercice homologuées » ? J'approuve l'idée de l'audit légal des petites entreprises avec un allégement des règles, même si j'aurais préféré qu'il ait un caractère obligatoire. Où en êtes-vous dans la définition de ces diligences par rapport aux diligences qui s'appliquent actuellement aux commissaires aux comptes ?
Je remercie le Gouvernement d'avoir conservé parmi les éléments retenus du rapport Cambourg le coeur de la mission des commissaires aux comptes, à savoir la certification.
Je m'interroge simplement sur le rôle du rapport de prévention des risques et de son possible allégement, qui permettrait de gagner en attractivité commerciale. C'est un rapport dont la confection représente en effet une charge très lourde pour les commissaires aux comptes, dont la facturation diminuerait s'ils y consacraient moins de temps.
Enfin, le rapport Cambourg évoque la possibilité de délivrer des attestations de nature fiscale. Quelle est votre position sur cette proposition qui n'est pas reprise ?
Nous retiendrons une dizaine de propositions issues de la mission Cambourg, voire un peu davantage. Autrement dit, nous avons largement repris les suggestions des commissaires aux comptes et de M. de Cambourg.
S'agissant de la mission allégée, qui est le point clé, je maintiens qu'elle doit rester facultative. La rendre obligatoire reviendrait à ne pas faire grand-chose : nous nous contenterions d'alléger certaines obligations tout en maintenant la charge qui pèse sur les PME.
Le sort des mandats en cours est un point capital, monsieur Mattei : ces mandats iront jusqu'à leur terme. Nous avons abordé cette question avec les commissaires aux comptes. Les mandats de six ans ne tomberont pas du jour au lendemain au 1er janvier 2019 ni à la date de promulgation de la loi ; c'est une garantie de transition pour les commissaires aux comptes.
En ce qui concerne l'audit allégé, monsieur de Courson, l'ensemble des rapports joints au rapport de gestion ne feront pas l'objet d'un audit – c'est une première modalité d'allégement. D'autre part, les normes comptables seront examinées de manière beaucoup plus synthétique que ce qui est prévu : l'examen portera sur les soldes intermédiaires et les grands risques principaux. En clair, l'audit allégé entrera moins dans le détail que l'audit conduit sous mandat classique.
En ce qui concerne l'autorisation qui pourrait être faite aux commissaires aux comptes de participer à des sociétés pluri-professionnelles d'exercice, madame Louwagie, j'y suis favorable – c'est une avancée que je ne leur ai d'ailleurs pas encore annoncée – dans le cadre de la rénovation de leur fonction. Des amendements seront présentés en ce sens ; j'y suis ouvert.
L'adoption de cet amendement aurait-elle pour effet de faire tomber les autres amendements en discussion commune ?
Cela présenterait une difficulté, car l'amendement CS2036 ne comprend pas la possibilité – à laquelle je suis favorable – d'exercer une activité dans le cadre d'une société pluri-professionnelle d'exercice. J'ignore quelle solution technique apporter à ce problème, mais c'est un point capital.
Je crois comprendre qu'il s'agit d'un problème rédactionnel que nous devrons résoudre en vue de la séance : l'adoption de l'amendement CS2036 supprimerait la partie du texte à laquelle s'accroche l'amendement de M. Fasquelle.
Il faut revoir la rédaction de l'amendement CS1870 afin qu'elle soit compatible avec le texte une fois l'amendement CS2036 adopté.
N'est-il pas possible de sous-amender l'amendement du Gouvernement afin de régler la question des sociétés pluri-professionnelles d'exercice ?
Si cette solution est possible sur le plan technique, j'y suis très favorable. Il s'agit en effet – chacun doit en avoir conscience – d'une véritable ouverture pour les commissaires aux comptes. Aujourd'hui, ils ne peuvent pas exercer une activité dans le cadre de sociétés pluri-professionnelles d'exercice, qui serait pourtant valorisante. Un tel sous-amendement le leur permettrait. Cette disposition trouverait parfaitement sa place dans l'amendement CS2036 qui vise précisément à ouvrir de nouvelles perspectives aux commissaires aux comptes.
Je vous remercie. Il serait en effet opportun d'envoyer des signaux positifs à la profession des commissaires aux comptes, que ce texte malmène quelque peu.
Soit. Le sous-amendement de M. le rapporteur général, cosigné par M. Fasquelle et par Mme Louwagie, vise à ajouter après le mot « comptes » à l'alinéa 2 de l'amendement CS2036 le membre de phrase suivant : « ,ainsi que des activités commerciales accessoires exercées par la société pluri-professionnelle d'exercice dans les conditions prévues par l'article 31-5 de la loi n° 90-1258 du 31 décembre 1990 relative à l'exercice sous forme de sociétés des professions libérales soumises à un statut législatif ou réglementaire ou dont le titre est protégé et aux sociétés de participations financières de professions libérales ».
La commission adopte successivement le sous-amendement CS2351 puis l'amendement CS2036 sous-amendé.
En conséquence, les amendements CS209 et CS1878 tombent .
La commission passe à l'amendement CS1870 de M. Daniel Fasquelle.
Cet amendement est satisfait : le secret professionnel n'est pas obligatoire entre commissaires aux comptes d'un même groupe.
En effet, la possibilité de lever le secret professionnel entre commissaires aux comptes relevant d'un même groupe existe déjà. L'objectif de l'amendement est donc atteint.
Sans doute faudrait-il vérifier, monsieur le ministre ; aujourd'hui, le secret n'est levé que dans le cas de groupes qui consolident, ce qui est différent. Il vous est proposé par cet amendement d'étendre la possibilité de la levée du secret à tous les groupes, même en l'absence de consolidation. Ce sujet prendra d'autant plus de sens avec la création d'une nouvelle mission relative aux filiales.
Sur le principe, je suis tout à fait favorable à cette proposition. Je vous propose que nous vérifiions si l'amendement du Gouvernement couvre ce cas de figure : si c'est le cas, votre amendement n'aura pas de raison d'être mais, dans le cas contraire, nous l'approuverons.
Je vous propose de revenir sur ce point en séance publique ; à ce stade, je ne suis pas en mesure de vous dire si l'amendement du Gouvernement répond à votre objectif, auquel je suis favorable. Encore une fois, si c'est le cas, votre amendement peut être retiré, et sinon, je prends l'engagement de l'accepter.
L'amendement est retiré.
La commission examine, en discussion commune, l'amendement CS361 de M. Martial Saddier et les amendements identiques CS208 de Mme Véronique Louwagie et CS1875 de M. Daniel Fasquelle.
L'amendement CS361 de M. Saddier poursuit trois objectifs : d'une part, rappeler que le commissaire aux comptes peut être nommé dans une entité pour une mission de contrôle légal ou pour une mission d'audit légal de petite entreprise sur la base du volontariat, préciser ensuite qu'il peut également exercer des missions complémentaires – cela soulève la question abordée par Mme Motin des attestations : il serait intéressant de connaître le point de vue du ministre en la matière – et enfin permettra aux commissaires aux comptes d'intervenir dans des entités dans lesquelles il n'y a pas de commissaires aux comptes pour certaines prestations particulières comme des audits d'acquisition, car il est parfois nécessaire de certifier des éléments de valorisation.
Mon amendement CS208 va dans le même sens, quoique sous une autre forme. Il vise à préciser que les commissaires aux comptes peuvent effectuer un certain nombre de prestations complémentaires à leurs missions, par exemple l'audit ou l'examen limité d'informations comptables ou financières, des contrôles de ratios de solvabilité, des contrôles et fiabilisations d'informations extra-financières, des diagnostics de conformité – ce qui prendrait tout son sens en matière de RSE – ou encore certaines attestations en lien sur la comptabilité et des diligences à accomplir dans le cadre d'acquisitions, de transmissions, de rapprochements ou de cessions d'entités, mais aussi des attestations sur l'adéquation de la conception et du fonctionnement des dispositifs de protection des systèmes d'information avec les recommandations et dispositions législatives, afin de protéger les entreprises.
L'amendement CS1875 vise à rappeler dans un même article les différentes catégories de missions qu'un commissaire aux comptes inscrit peut être amené à effectuer ainsi que le fait qu'il est soumis à un code de déontologie qui régit son indépendance.
Ces amendements n'ont guère de portée normative puisqu'ils consistent à rappeler ce que sont les missions des commissaires aux comptes. J'en propose le retrait ; à défaut, avis défavorable.
Je propose aussi le retrait de ces amendements, même si je ne vois aucune objection à leur contenu. En effet, ils n'ont en rien leur place dans la loi puisqu'ils rappellent la teneur des missions des commissaires aux comptes, déjà précisée ailleurs.
Je maintiens mon amendement. La profession des commissaires aux comptes est importante et, comme toute profession réglementée, elle a droit à une reconnaissance dans la loi, qui doit en préciser clairement les missions.
J'entends les arguments du rapporteur et du ministre sur la portée normative de l'amendement concernant certains points mais je maintiens la question particulière des attestations : il est proposé que les commissaires aux comptes puissent signer des attestations en-dehors de la mission légale de certification. C'est un problème concret qui n'a pas encore reçu de réponse. Je maintiens donc mon amendement : ce sujet mérite d'être examiné alors même que nous procédons à une véritable révision de la profession des commissaires aux comptes.
La question des attestations, également posée par M. Potier, est distincte. Nous sommes favorables à ce que les commissaires aux comptes puissent fournir des attestations sur un certain nombre de sujets comme la RSE et la cybersécurité. Je dois rencontrer le président de la Compagnie nationale des commissaires aux comptes dans quelques instants : j'aborderai la question avec lui et nous préparerons un amendement, qui pourra tout à fait être défendu par un groupe parlementaire et non pas nécessairement par le Gouvernement. Je renvoie donc ce débat à la séance publique, car il manque en effet un amendement sur la question des attestations, mais il ne pourra être défendu qu'après ma discussion avec le président de la Compagnie.
La commission rejette les amendements.
Elle passe à l'amendement CS206 de Mme Véronique Louwagie.
Cet amendement vise à confirmer que les entités qui ne sont pas soumises par obligation au contrôle légal d'un commissaire aux comptes peuvent s'y soumettre volontairement. Il me semble utile de le préciser de manière explicite.
La commission rejette l'amendement.
Elle passe à l'amendement CS1861 de M. Daniel Fasquelle.
Cet amendement vise à mettre en oeuvre les principales propositions formulées dans le rapport Cambourg sur l'avenir des commissaires aux comptes.
Défavorable également ; il s'agit là d'un véritable choix politique. Cet amendement se traduirait par un nouvel alourdissement des charges qui pèsent sur les petits groupes. Le système facultatif est préférable.
Je réitère donc la question de Mme Louwagie : que retiendrez-vous finalement de la mission Cambourg ?
Nous retenons l'audit simplifié, quoique sur une base facultative et non obligatoire. Nous retenons la mission concernant les petits groupes, là aussi sur une base facultative. Nous retenons le principe de l'attestation que vient de mentionner Mme Louwagie et que nous accepterons sous forme d'amendement. Nous retenons les sociétés pluri-professionnelles d'exercice : c'est un changement majeur, puisque l'autorisation est aujourd'hui cantonnée à certaines professions. Tout cela représente de réelles évolutions pour les commissaires aux comptes.
S'agissant de l'audit de petits groupes, je rappelle qu'il sera obligatoire pour la tête de groupe dès lors qu'elle dépassera les nouveaux seuils de certification, soit 4 millions d'euros de bilan et 8 millions d'euros de chiffre d'affaires, mais facultatif pour les filiales qui, par définition, sont en-deçà du seuil.
Nous avons donc retenu de nombreuses propositions de la mission Cambourg, y compris certaines que nous avons annoncé retenir ce matin seulement – la question des sociétés pluri-professionnelles d'exercice, par exemple, n'avait pas encore été mentionnée, et nous avons donné notre accord.
Je vous remercie pour ces précisions importantes, monsieur le ministre. Vous indiquez qu'au-delà d'un certain seuil, la tête de groupe fera l'objet d'un audit. Les filiales dont le chiffre d'affaires dépasse 4 millions d'euros feront-elles elles aussi l'objet d'un audit ? C'est la question cruciale.
Je vous répondrai très précisément sur ce choix politique que j'assume et que nous avons fait au terme de longues discussions, y compris au niveau interministériel. Je veux la simplicité et je la revendique, car la complexité détruit de l'emploi. Il existait auparavant des dizaines de seuils selon la nature des sociétés ; il n'en existe plus qu'un seul, celui du bilan de 4 millions d'euros, de 8 millions d'euros de chiffre d'affaires et de 50 salariés. Nous retenons donc le seuil européen. Si des filiales d'un groupe dépassent ce seuil, la tête de groupe sera soumise à l'obligation de certification des comptes.
En ce qui concerne les filiales elles-mêmes, les commissaires aux comptes souhaitaient que soit recréé un nouveau seuil pour celles qui appartiennent à des groupes dont la tête est soumise à l'obligation de certification des comptes. Autrement dit, on rétablirait une mission obligatoire de certification des comptes des filiales ayant un chiffre d'affaires supérieur à 4 millions d'euros. J'y suis défavorable – et j'aurai de nouveau ce débat dans quelques instants avec la Compagnie nationale des commissaires aux comptes. J'y suis défavorable parce que l'on rétablirait subrepticement un nouveau seuil. En l'état, les filiales dont la tête de groupe dépasse le seuil peuvent être soumises à la certification à titre volontaire et sur la base d'un mandat simplifié ; lorsque le seuil n'est pas dépassé, elles ne sont pas soumises à l'obligation de certification.
L'idée de recréer subrepticement un nouveau seuil – par souci sans doute légitime de sécurité mais avec un impact considérable sur la croissance et la création d'emplois –correspond à une logique administrative et à mon sens très technocratique. Je ne suis pas favorable à ce que l'on recrée un nouveau seuil pour les petits groupes dès lors que la tête de groupe est soumise au nouveau seuil légal.
La commission rejette l'amendement.
Elle est saisie de l'amendement CS506 de Mme Véronique Louwagie.
Suivant l'avis défavorable du rapporteur thématique, la commission rejette l'amendement.
Elle passe à l'amendement CS1863 de M. Adrien Taquet.
Cet amendement anti-abus vise à contrôler les chiffres d'affaires de la société-mère comme de ses filiales afin de vérifier si les nouveaux seuils sont dépassés et de procéder au contrôle des filiales constituant une part significative de l'activité, à fixer par décret.
Défavorable également, sur ce sujet dont nous venons de débattre.
J'y suis également défavorable : que signifie la notion de part « significative » ? Nous entrerions dans le brouillard.
L'amendement est retiré.
La commission examine, en discussion commune, les amendements CS1864 de M. Daniel Fasquelle et CS204 de Mme Véronique Louwagie.
Si l'amendement CS1864 est adopté, le contenu et les modalités de la mission nouvelle des commissaires aux comptes désignés sur une base volontaire ou dans les petits groupes seront définis dans les normes d'exercice professionnel homologuées par arrêté du garde des sceaux, comme prévu à l'article L.823-12-1 du code de commerce.
Je propose le retrait de cet amendement déjà intégré à l'amendement CS2036 que nous avons adopté il y a quelques instants.
Je constate que le Gouvernement répond à mes demandes avant même que je ne les formule : c'est de mieux en mieux ! Cet amendement étant déjà satisfait par l'amendement CS2036, je le retire naturellement.
L'amendement CS1864 est retiré.
Compte tenu de la position exprimée par le ministre, je doute que le rapporteur et le Gouvernement soient favorables à l'amendement CS204. En effet, celui-ci tend à rendre obligatoire la nomination d'un commissaire aux comptes dans le cadre d'une mission d'audit légal « petites entreprises » ou, sur option, dans les filiales dès lors que leur chiffre d'affaires dépasse 4 millions d'euros.
J'ai bien compris, monsieur le ministre, que vous ne souhaitiez pas créer un nouveau seuil, mais si, dans les groupes de sociétés, seule la société mère fait l'objet d'un audit, celui-ci ne présente guère d'intérêt, car on ne peut pas ignorer les filiales. Le texte aura donc, me semble-t-il, un véritable impact sur la sécurité des comptes, leur transparence et leur fiabilité. Vous auriez pu, je crois, faire preuve d'ouverture dans ce domaine précis. J'ajoute qu'actuellement, 100 000 filiales sont concernées par le commissariat aux comptes et que mon amendement ne s'appliquerait qu'à 10 000 entités. Il s'agit d'une mesure de bon sens ; il y va, j'y insiste, de la sécurité.
Mon raisonnement reste le même : nous voulons privilégier la simplicité et la lisibilité.
La commission rejette l'amendement.
Puis Puis elle examine l'amendement de précision CS509 de M. Vincent Descoeur.
La commission rejette l'amendement.
Elle est ensuite saisie de l'amendement CS196 de Mme Véronique Louwagie.
Il me semble que cet amendement, qui tend à créer la mission d'audit légal « petites entreprises », est couvert par l'amendement CS2036 – il aurait dû tomber, du reste. Aussi, je le retire.
L'amendement est retiré.
L'amendement CS699 de M. Fabien Di Filippo est retiré.
La commission examine l'amendement CS1869 de M. Daniel Fasquelle.
Cet amendement, qui tend à aménager une période transitoire, est très important. Il est en effet fondamental d'adopter une disposition transitoire pour offrir, à chaque professionnel exerçant actuellement un mandat dans une entité en deçà des seuils européens, la possibilité de mettre en place et de promouvoir, au bénéfice des entreprises concernées, une démarche d'audit adaptée à la nouvelle norme d'exercice professionnel, accompagnée d'une valeur ajoutée renforcée et susceptible de mieux répondre pendant trois exercices aux attentes des entrepreneurs. Cette mesure fait, du reste, partie des propositions formulées dans son rapport par M. de Cambourg.
Puisque vous ne voulez pas reculer sur le seuil d'intervention des commissaires aux comptes, laissons-leur au moins le temps de s'adapter. Des emplois et des sommes considérables sont en jeu. La profession sera profondément déstabilisée. Une période transitoire me paraît donc absolument indispensable. Je crois que nous pouvons tous souscrire à cette proposition.
Défavorable. La discussion avec les commissaires aux comptes est engagée depuis plusieurs mois, et le choix a été fait d'une entrée en vigueur rapide. Je rappelle, par ailleurs, que les contrats en cours seront maintenus, de sorte que les missions des commissaires aux comptes ne s'éteindront pas.
En effet, cet amendement n'est pas anecdotique. Toutefois, il restreindrait de manière considérable la liberté de choix des entreprises, et cela pose deux problèmes majeurs.
Prenons l'exemple d'une entreprise dont le chiffre d'affaires est de 2 millions ; elle sera désormais sous les seuils légaux d'obligation de certification des comptes. L'amendement imposerait, dans l'hypothèse où elle serait, par exemple, à la cinquième année de sa certification de comptes, qu'il soit mis fin au contrat et que celui-ci soit remplacé par un mandat de mission d'audit légal « petites entreprises ». Premier problème : ce mandat serait obligatoire, alors que nous, nous souhaitons qu'il soit facultatif. On peut, à la rigueur, être en désaccord sur ce point – c'est parfaitement légitime. Pour ma part, je souhaite qu'on laisse la liberté aux entreprises ; c'est le choix que le Gouvernement a arrêté après un débat très approfondi avec les commissaires aux comptes.
Deuxième problème : dès lors que cette mesure mettrait fin d'autorité à des mandats en cours, nous nous exposerions à un risque constitutionnel majeur.
Pour ces deux raisons, l'avis du Gouvernement est défavorable.
J'entends vos arguments, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur. Mais le texte aura un impact brutal sur la profession, et je regrette que nous n'aménagions pas une période de transition, de préparation, qui lui permette de se réorganiser. S'agissant des soldes, lorsque j'ai proposé, ce matin, que le dispositif soit mis en oeuvre plus rapidement, il m'a été répondu qu'il fallait laisser aux commerçants le temps – douze mois – de s'organiser. De même, nous avons pris en compte l'impact que pourraient avoir sur la presse les mesures concernant les annonces légales. Pourquoi ne prévoirions-nous pas un dispositif pour aider la profession des commissaires aux comptes à organiser la transition ? Celle-ci sera brutale, croyez-moi, notamment pour les petits cabinets indépendants, en particulier dans les territoires ruraux.
De fait, la profession bénéficiera d'une période transitoire car les contrats, dont la durée moyenne est actuellement de trois ans, vont s'éteindre progressivement dans les années qui viennent. Elle pourra ainsi s'adapter et « vendre », de manière responsable, le nouveau service aux petites entreprises dans le cadre de relations commerciales qui existent déjà. Il me semble que, dans la majeure partie des cas, ces relations sont bonnes : les entreprises font confiance à leur commissaire aux comptes et elles envisageront donc un nouveau service utile de manière favorable.
Premièrement, je souscris à ce que vient de dire le rapporteur général. En effet, la durée des mandats est de six ans et celle des contrats en cours est en moyenne de trois ans ; il n'y aura donc pas de brutalité.
Deuxièmement, la promulgation de la loi n'interviendra pas avant le milieu de l'année 2019 – au plus tôt au premier trimestre 2019 – de sorte que, pour la grande majorité, ces dispositions s'appliqueront à compter du 1er janvier 2020. Douze à dix-huit mois de transition, cela me paraît raisonnable.
Monsieur le ministre, vous sous-estimez le choc que ces mesures vont représenter pour un certain nombre de cabinets, dont ces mandats représentent parfois jusqu'à 80 % du chiffre d'affaires. Peu d'entreprises pourraient résister à un pareil choc dans des délais aussi brefs.
La commission rejette l'amendement.
Elle examine ensuite, en discussion commune, les amendements CS302 et CS301 de M. Vincent Descoeur.
L'amendement CS302 est dans la droite ligne de la discussion que nous venons d'avoir puisqu'il vise à reporter de deux ans la date d'entrée en vigueur de la mesure. La modification des seuils de certification légale des comptes est actée, mais il conviendrait de permettre à la profession de disposer de temps pour s'organiser, car cette mesure aura des conséquences financières et sociales pour bon nombre de cabinets, en particulier en province, qui ne trouveront peut-être pas facilement un complément d'activité. J'ai entendu, monsieur le ministre, vos propositions en faveur de la modernisation de la profession, et il serait cohérent de laisser à celle-ci un temps d'adaptation.
Quant à l'amendement CS301, il prévoit, si vous n'acceptez pas un report de deux ans, de limiter celui-ci à un an.
La commission rejette successivement ces deux amendements.
Elle est ensuite saisie de l'amendement CS391 de M. Charles de Courson.
Dans son avis, le Conseil d'État indique : « Enfin, ces dispositions », c'est-à-dire le relèvement des seuils de certification légale des comptes, « ne sauraient faire obstacle à la possibilité d'une indemnisation par l'État du préjudice grave et spécial pouvant résulter, pour certains professionnels, de la mesure présentée sur le fondement de la responsabilité sans faute du fait des lois. »
Je propose donc, par cet amendement, que le Gouvernement remette au Parlement, dans un délai de trois mois à compter de la promulgation de la loi, un rapport évaluant l'impact budgétaire d'une éventuelle indemnisation. Il existe, en effet, un risque que certains professionnels déposent des recours et réclament une indemnisation du préjudice grave et spécial qu'ils subiraient du fait des lois. Comment évaluez-vous ce risque juridique, monsieur le ministre ?
Avis défavorable. L'étude d'impact, que j'ai lue très attentivement, comporte beaucoup d'informations sur la situation des commissaires aux comptes et les conséquences de ces dispositions sur la profession. D'où les mesures que nous avons évoquées précédemment.
La logique de ce texte est de réinventer la profession de commissaire aux comptes et d'offrir à ses membres d'autres perspectives. Prévoir une indemnisation, ce serait baisser les bras et partir du principe que cette transformation échouera. Je refuse d'entrer dans cette logique, car je crois à cette réforme.
Monsieur le ministre, vous ne répondez pas à la question : quel risque juridique court-on en cas de recours individuels visant à obtenir de l'État une indemnisation sur le fondement de la responsabilité sans faute du fait des lois ? La jurisprudence est constante, sur ce sujet, et se fonde sur le principe constitutionnel du droit de propriété.
Pour obtenir une indemnisation, il faut subir un préjudice anormal et spécial. Peut-être quelques commissaires aux comptes soumettront-ils leur cas au tribunal administratif, mais il leur faudra établir qu'ils subissent un tel préjudice. Or, je ne suis pas certain qu'ils soient des milliers à se trouver dans cette situation. Je ne vois donc pas la nécessité de réaliser une évaluation budgétaire de ce risque, qui me paraît tout à fait mesuré.
La commission rejette l'amendement.
Puis elle adopte l'article 9 modifié.
Membres présents ou excusés
Réunion du vendredi 7 septembre 2018 à 9 h 30
Présents. – M. Patrice Anato, M. Didier Baichère, M. Jean-Noël Barrot, Mme Marie-Noëlle Battistel, Mme Sophie Beaudouin-Hubiere, M. Philippe Bolo, M. Éric Bothorel, M. Paul Christophe, M. Charles de Courson, Mme Michèle Crouzet, M. Vincent Descoeur, M. Pierre Dharréville, Mme Coralie Dubost, M. M'jid El Guerrab, M. Daniel Fasquelle, M. Nicolas Forissier, M. Éric Girardin, Mme Olga Givernet, Mme Valérie Gomez-Bassac, Mme Olivia Gregoire, M. Stanislas Guerini, Mme Nadia Hai, M. Guillaume Kasbarian, Mme Fadila Khattabi, M. Mohamed Laqhila, Mme Laure de La Raudière, Mme Célia de Lavergne, Mme Marie Lebec, M. Jean-Claude Leclabart, M. Roland Lescure, M. Jean-Paul Mattei, Mme Patricia Mirallès, Mme Cendra Motin, Mme Valérie Oppelt, M. Patrice Perrot, Mme Anne-Laurence Petel, M. Dominique Potier, M. Adrien Quatennens, M. Laurent Saint-Martin, M. Jacques Savatier, M. Denis Sommer, M. Adrien Taquet, Mme Marie-Christine Verdier-Jouclas, M. Jean-Marc Zulesi
Excusés. – Mme Élodie Jacquier-Laforge, M. Arnaud Viala
Assistaient également à la réunion. – M. Damien Adam, Mme Anne Genetet, Mme Véronique Louwagie, M. Jean-Louis Masson, Mme Claire O'Petit, M. Buon Tan