Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Réunion du mercredi 16 février 2022 à 10h00

Résumé de la réunion

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  • CDC
  • dépôts
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La réunion

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Avant l'audition de la présidente du conseil de surveillance et du directeur général de la Caisse des dépôts et consignations (CDC), certains groupes ont demandé à s'exprimer.

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Monsieur le président, vous avez été élu à la présidence de la commission des finances en votre qualité de député appartenant à un groupe d'opposition – en l'espèce, Les Républicains –, conformément à l'alinéa 3 de l'article 39 du règlement de l'Assemblée nationale. Mercredi dernier, 9 février, vous avez démissionné du groupe Les Républicains ; vous n'appartenez dorénavant plus à un groupe d'opposition.

Le poste de président de la commission des finances de l'Assemblée nationale revient à un député de l'opposition pour respecter les droits de l'opposition, dans un objectif d'équilibre démocratique. Certes, le règlement n'aborde pas la situation, inédite, d'un président membre de l'opposition passant ensuite dans la majorité, mais vous connaissez très bien l'esprit du texte. Comment nous, députés, législateurs, pourrions-nous accepter de contourner un principe démocratique ? Comment les Français pourraient-ils faire confiance à une commission des finances dont la présidence s'assied sur un équilibre arrêté par notre règlement ?

Monsieur Woerth, les députés Les Républicains vous demandent solennellement de respecter les droits de l'opposition en laissant à cette dernière la présidence de la commission des finances, comme établi par notre règlement. Nous vous demandons donc de démissionner.

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Je souhaiterais, moi aussi, que notre assemblée soit exemplaire quant à l'application du règlement dont elle s'est dotée. Ce règlement, en son article 39, est clair : « Ne peut être élu à la présidence de la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire qu'un député appartenant à un groupe s'étant déclaré d'opposition. »

Sur le mur du fond de la salle de notre commission, sont apposés les noms de ceux qui l'ont présidée : depuis 2007, ce sont systématiquement des députés de l'opposition. Monsieur Woerth, vous allez laisser votre nom sur ce mur, mais la date indiquée pour la fin de votre présidence devrait être celle d'aujourd'hui, car vous devriez démissionner. Lorsqu'on est représentant du peuple français, on se doit d'appliquer les lois et le règlement de notre assemblée. Afin de vous conformer à l'esprit de la révision constitutionnelle de 2008, nous vous demandons solennellement de démissionner. Le choix politique que vous avez fait vous appartient, mais vous devez agir en conséquence.

Certains estiment que ce n'est pas nécessaire, car la session se termine dans une semaine. Mais nous sommes tous élus jusqu'au mois de juin. Qui peut dire ce qui se passera pendant les quatre mois qui nous en séparent, dans un contexte économique et géopolitique aussi complexe que celui d'aujourd'hui ? Notre commission n'arrête pas fonctionner ; elle peut poursuivre ses travaux, être convoquée à tout moment pour procéder à des auditions.

Comme vient de le faire notre collègue Louwagie, je vous demande donc de nouveau de démissionner pour laisser à un député ou une députée de l'opposition la présidence de la commission des finances, dont le rôle ne s'arrête pas à la semaine prochaine.

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Je partage l'analyse de mes collègues républicains et socialistes. Votre choix est personnel et nous n'avons pas à en discuter. Mais l'esprit de la réforme constitutionnelle de 2008 et de celle du règlement – que vous aviez validées en tant que ministre –, qui était de donner à l'opposition un droit de regard sur ce qui se passe en commission de finances, n'est plus. Cet après-midi, lors de l'examen du rapport annuel de la Cour des comptes en séance publique, seuls le président et le rapporteur général prendront la parole. L'opposition ne pourra pas s'exprimer. Quelle démocratie fonctionne ainsi ?

Mme Rabault a raison, notre commission ne s'arrête pas de travailler dans moins de quinze jours ; elle fonctionne jusqu'en juin. Nous vivons des temps très particuliers, où tout peut arriver. Respectez nos institutions comme nous respectons votre choix : démissionnez ! Si vous ne le faites pas, mon groupe ne siégera plus au sein de la commission.

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Comme mes collègues, au nom de mon groupe, je demande votre démission, par respect pour la démocratie.

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Monsieur le président, vous savez quelle amitié je vous porte. Le choix que vous avez fait, s'il vous appartient, ne s'accorde pas avec l'exigence démocratique selon laquelle, à l'Assemblée nationale comme au Sénat, le président de la commission des finances doit être membre d'un groupe s'étant déclaré d'opposition. La législature ne prendra fin qu'en juin, même si la session se termine fin février. Des affaires graves pourraient exiger que la commission des finances se réunisse à tout moment.

Mon groupe, comme tous ceux de l'opposition, pense qu'une clarification s'impose, dans votre intérêt et par respect pour les principes démocratiques.

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Évidemment, ce débat est légitime ! Il était attendu à la suite de votre décision, Monsieur le Président, de quitter le groupe Les Républicains. J'entends les arguments des groupes d'opposition, mais il y a l'esprit et la lettre du règlement. Selon la lettre, l'appartenance à un groupe d'opposition ne vaut qu'au moment de l'élection.

Au-delà du plan juridique, je souhaite également rappeler comment cette commission a été présidée depuis bientôt cinq ans…

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Plusieurs députés

Ce n'est pas le sujet ! Il s'agit des droits de l'opposition !

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Comment mieux respecter les droits de l'opposition qu'en assurant une bonne présidence de commission, la neutralité dans le respect des opinions et des avis ? Il en a été ainsi pendant cinq ans et personne n'aurait dit le contraire il y a encore deux semaines – personne ne le remet en cause aujourd'hui non plus, d'ailleurs.

Non, sauf événement exceptionnel ou cas particulier, la commission des finances ne devrait pas être amenée à siéger pendant quatre mois, puisqu'il n'est pas prévu de séance publique au-delà de la fin de la semaine prochaine. La qualité des échanges et des travaux qui se sont déroulés au sein de notre commission pendant cinq ans mérite mieux que l'importation d'un débat purement politique et symbolique, à une semaine de la fin de nos travaux. Je n'ai pas l'impression qu'Éric Woerth, membre des Républicains, a été partial pendant cinq ans vis-à-vis de la majorité ou de l'opposition. Je ne crois pas plus qu'Éric Woerth, membre apparenté au groupe majoritaire, sera partial pendant la semaine et les deux jours qu'il nous reste à travailler.

Soyons honnêtes ! Vous importez un débat politique et politicien – je l'entends, c'est la période. Mais, au total, nous savons parfaitement que la lettre et l'esprit du règlement seraient respectés quand bien même la présidence de la commission ne connaîtrait pas un changement symbolique et purement politique à une semaine de la fin de ses travaux.

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Je partage l'analyse du rapporteur général : l'alinéa 3 de l'article 39 du règlement vise clairement l'élection. À ce moment, l'opposition choisit la personne la plus compétente pour présider la commission, ce qu'elle a fait il y a cinq ans. Que cette personne décide de soutenir, pour la prochaine élection présidentielle, un candidat qui n'est pas dans l'opposition ne remet pas en cause sa capacité à présider la commission – il l'a démontrée depuis cinq ans avec une rigueur dont tous nous pouvons témoigner.

Nous pouvons passer un long moment sur ce débat politique qui ne s'adresse qu'à l'extérieur, ou nous concentrer sur nos fonctions – l'audition à venir de la Caisse des dépôts est très importante. La session ordinaire touche à sa fin et, sauf événement exceptionnel, il n'y aura plus de textes importants à examiner ni de vote. Nous devrions clore le débat et avancer.

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Nous nous en tiendrons à l'application du règlement. L'article 39 est clair : c'est en début de session qu'on élit le président de commission. Au moment de son élection, Éric Woerth était bien dans l'opposition.

En outre, notre commission est souvent présidée par des vice-présidents qui ne sont pas forcément de l'opposition, mais qui jouent leur rôle de président. Je comprends les aspects politiques du débat mais il n'y a pas de discussion possible au niveau juridique.

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La position des groupes de la majorité ne m'étonne pas. La nôtre est diamétralement opposée. Je salue le travail du président Woerth, mais Éric Woerth a fait un choix qui le regarde, en conséquence duquel il n'appartient plus à l'opposition.

Les propos de M. Mattei sont contredits par des constitutionnalistes comme Jean-Philippe Derosier, qui explique que, par principe, un président qui est passé de l'opposition en début de mandat à la majorité, fût-ce à quelques semaines de la fin de la session, doit être remplacé par un nouveau président issu de l'opposition.

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Au nom du groupe La France insoumise, je propose ma candidature car, idéologiquement, il n'y a pas la moindre ambiguïté sur notre opposition au néolibéralisme de M. Macron et de sa majorité. Nous demandons donc la démission du président Woerth et l'élection d'un nouveau président.

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À mon tour de donner mon opinion. Le règlement est clair : on doit être membre d'un groupe d'opposition le jour de l'élection. Il y a eu quatre élections du bureau de la commission depuis le début de la législature ; à chaque fois, j'étais dans l'opposition. C'est précisément parce qu'il peut y avoir des changements que les bureaux des commissions sont renouvelés tous les ans, pour mettre le droit en adéquation avec la réalité.

En outre, je ne soutenais pas le premier mandat d'Emmanuel Macron. Je vais soutenir le deuxième, ce n'est pas la même chose.

(Exclamations parmi les députés des groupes d'opposition.)

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La commission ne se réunira plus dans une semaine – ce n'est pas tout fait la même chose que si elle devait continuer à travailler encore un an ou deux. L'attribution de la présidence à un membre de l'opposition se comprenait pour l'examen des textes et les votes : or il n'y aura plus ni l'un ni l'autre, sauf pour autoriser la publication de rapports d'information.

Madame Louwagie, si Mme Pécresse était élue Présidente de la République, le groupe LR demanderait-il que le président ou la présidente qui m'aurait remplacé soit à nouveau remplacé ? Madame Rabault, vous oubliez qu'au moment de l'élection de François Hollande, le président de la commission des finances était socialiste. Votre groupe s'est-il élevé pour demander son changement en attendant les élections législatives ? C'est une plaisanterie !

Je n'ai donc pas décidé de démissionner parce que la commission va suspendre ses travaux dans une semaine et que, d'ici là, aucune décision de nature politique n'aura à être prise, qui mériterait que quelqu'un de l'opposition prenne ma place. C'est probablement une grande déception pour certains, mais c'est ainsi.

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C'est surtout un problème éthique, en démocratie !

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N'employez pas de grands mots, qui parfois vous dépassent. Je ne suis pas agressif, ne le soyez pas. Si vous décidez de partir, partez ; si vous décidez de rester, restez.

(Protestations parmi les députés des groupes d'opposition.)

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Nous allons vous laisser, en totale démocratie avec votre majorité !

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Et les mots ne nous dépassent pas ! Regardez votre passé ! Les gens ne sont pas dupes de vos fausses bienséances.

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Ne parlez pas au nom des gens, vous les connaissez bien mal.

(Les députés des groupes de l'opposition quittent la salle.)

La commission entend M. Éric Lombard, directeur général de la Caisse des dépôts et consignations, et Mme Sophie Errante, présidente de la commission de surveillance

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Nous avons déjà reçu notre collègue Sophie Errante et Éric Lombard à plusieurs reprises au cours de la législature. Cette audition sera celle de la fin de mandat, ainsi que nous l'avions décidé pour les divers interlocuteurs permanents de la commission des finances.

La Caisse des dépôts et consignations (CDC) est une institution centrale dans l'économie et le système financier français. Elle est placée sous la surveillance du pouvoir législatif depuis près de deux siècles. Au printemps dernier, nos invités nous avaient exposé l'implication de la Caisse dans le plan de relance ; l'exécution de l'année 2021 devrait de nouveau en être l'occasion. La période est marquée par une forte croissance, mais des nuages planent sur l'économie, sous les traits de l'inflation et du ralentissement de la croissance dans les années à venir. Reste que les résultats de l'exécution 2021 devraient être bien meilleurs que ceux de l'année 2020, ce qui laisse espérer le versement d'un dividende à l'État plus proche de celui des années antérieures.

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Je vous prie de bien vouloir excuser l'absence des autres députés membres de la commission de surveillance, Gilles Carrez et de Denis Sommer. La présente audition ne se déroule pas dans les conditions prévues pour notre audition annuelle devant la commission des finances et celle des affaires économiques. Celle-ci n'aura pas lieu avant la prochaine législature, après l'arrêté des comptes et l'accord sur le versement à l'État, d'ici à septembre ; ces sujets seront donc traités par nos futurs collègues.

Le fait que la grande institution qu'est la Caisse des dépôts soit placée « de la manière la plus spéciale sous la surveillance et la garantie du Parlement » vaut en effet depuis plus de deux cents ans et, surtout, est unique au monde. Cette situation est à la fois très intéressante et à l'origine d'une certaine complexité.

Au cours de ce mandat, nous avons fait énormément de choses, avec Éric Lombard. Nous avons engagé des transformations fondamentales qui ne sont pas encore terminées. Il s'agissait de transposer les dispositions de la loi PACTE, qui induisait une remise en question et une modernisation de la gouvernance, en tout cas celle des grands projets. Dans ce cadre, les sujets clés ont été la prise de participation majoritaire dans le groupe La Poste, puis l'adoption du budget et le passage sous la supervision de l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR), en évitant la banalisation – car la Caisse des dépôts n'est pas une institution comme une autre, ni une banque comme les autres.

Nous avons donc vraiment changé de paradigme en matière stratégique et budgétaire. Nous avons aussi dû analyser les nouvelles compétences au fur et à mesure des décrets, dans un contexte atypique de changement d'ampleur du groupe, devenu l'une des institutions publiques dont le bilan, qui avoisine 1 250 milliards d'euros, est le plus important.

Nous avons décidé l'opération avec La Poste en toute indépendance, avec l'éclairage d'un conseil indépendant. Le projet industriel ne s'est pas terminé une fois que le bilan comptable a été arrêté. L'opération représente le début de la transformation. Ce qui constitue le plus gros actif de la Caisse des dépôts est exposé à des éléments conjoncturels adverses : les taux bas, la concurrence sur GeoPost, le déclin irréversible du courrier et la montée en puissance encore à confirmer des relais de croissance dans la branche courrier. La réussite d'une telle opération ne pourra être mesurée qu'avec le temps, à moyen ou long terme, même si les résultats sont très satisfaisants.

Au moment de l'adoption du budget, la commission de surveillance a joué son rôle et cette nouvelle compétence lui a permis d'approfondir sa connaissance de l'établissement public et de faire valoir ses positions et recommandations. Le dialogue a été exigeant mais constructif ; la Cour des comptes a d'ailleurs salué en 2021 le chemin parcouru et le nouveau dialogue instauré.

Depuis la supervision de l'ACPR, nous avons pris le relais des parlementaires lors du vote de la loi PACTE pour réaffirmer devant l'Autorité que la Caisse des dépôts ne peut être banalisée. Face à la demande par l'ACPR d'un pilier 2, c'est-à-dire d'une mobilisation de fonds propres supplémentaires au-delà des obligations réglementaires, la commission de surveillance a engagé des discussions approfondies pour défendre la singularité du modèle de la Caisse. Je tiens à remercier le président du comité d'audit et des risques (CAR), Gilles Carrez, et le président du comité du fonds d'épargne, Jean-Yves Perrot, pour leur grande implication dans ce dossier.

La commission de surveillance a changé, elle aussi, pour s'adapter au renforcement de ses prérogatives, aux enjeux d'aujourd'hui et au nouveau périmètre du groupe. J'ai ainsi souhaité la création de deux comités spécialisés.

Le premier est un comité stratégique, lieu privilégié de dialogue, mais aussi de débat entre commissaires et dirigeants des directions et des filiales, permettant des délibérations éclairées et équilibrées. Nous sommes ainsi parvenus à inciter la Caisse des dépôts à faire davantage ressortir l'empreinte extrafinancière de sa stratégie dans ses plans à moyen terme. Rappelons que la commission de surveillance a toujours soutenu la stratégie de la direction générale, qu'il s'agisse de la stratégie à moyen terme ou des dossiers d'investissement, dont pas moins de quatre-vingts, représentant chacun au moins 150 millions d'euros, ont été examinés et approuvés par son comité des investissements entre 2019 et 2021.

Le second est un comité RSE (responsabilité sociale des entreprises) et éthique, à la création duquel les commissaires ont abouti tout récemment après y avoir travaillé en 2021 ; c'était un souhait de l'ensemble des commissaires surveillants, plus particulièrement de notre collègue Claude Nahon. De fait, ces sujets doivent être pris en considération dans un groupe aussi pluriel et au rayonnement mondial – citons Egis, le groupe La Poste, Transdev, la Compagnie des Alpes et Icade.

Avec des parties prenantes aussi atypiques et diverses que le sont les collectivités, les bailleurs sociaux et les particuliers, le fil conducteur de l'exercice a été la défense de l'intérêt général et la protection des intérêts de la Caisse. Le défrichage des nouvelles prérogatives renforcées, enjeu de premier ordre, a permis de mettre la commission de surveillance sur les bons rails. Un travail régulier et constructif avec les directions de la Caisse et les membres du comité exécutif a aussi été l'occasion d'un apprentissage réciproque qui ne pouvait se faire en quelques semaines ou en quelques mois. Les réglages prennent du temps, surtout dans un groupe aussi divers. Il est important pour nous de trouver le bon degré d'exigence pour la conduite d'un groupe de cette puissance et de cette complexité.

En ce qui concerne le fonctionnement même de l'instance que je préside, j'ai laissé aux commissaires surveillants toute liberté pour s'exprimer et faire valoir leurs points de vue, si différents fussent-ils – nous n'avons pas tous la même expérience ni la même histoire. J'ai fait de la commission de surveillance un lieu de dialogue, d'écoute, de débats, parfois animés, voire vifs – c'est la vie des groupes – avec la direction générale et l'État, dans l'objectif sans cesse réaffirmé de protéger les intérêts patrimoniaux de la Caisse. La commission de surveillance est maintenant inscrite dans les meilleures pratiques de place. Un processus vertueux d'autoévaluation de notre instance est en cours.

Quelques mots, enfin, sur l'année 2021. Le plan de relance mobilise l'ensemble des équipes, auxquelles je souhaite rendre hommage, et d'importants moyens financiers, l'objectif étant de 26 milliards d'euros d'investissements en cinq ans. La commission de surveillance a été particulièrement attentive à ses impacts extrafinanciers et à l'empreinte de la Caisse des dépôts dans tous les territoires, au-delà des seuls volumes financiers.

Par le biais d'une commission de surveillance exceptionnelle, j'ai souhaité que nous nous prononcions sur le dossier majeur et sensible de l'entrée au capital du « nouveau Suez ». Dans le cadre du comité des investissements, nous avons étudié et approuvé le renforcement de la Caisse des dépôts dans le capital de GRTgaz, la cession d'une partie du capital d'Egis et l'évolution de la SCET (Services, conseil, expertises et territoires). La commission de surveillance a soutenu le groupe La Poste dans la transformation de son modèle par une stratégie de mutation de La Banque Postale en banque assurance et de développement de GeoPost à l'international, sans relâcher la vigilance quant aux effets des taux bas sur la profitabilité du groupe.

Beaucoup a été fait ; beaucoup reste à faire. Des questions demeurent de la part de l'instance dont je suis ici le porte-parole. Le groupe a toujours été, par construction, hétérogène, et il est complexe à appréhender. La durée du mandat, de trois ans, n'est pas simple non plus ; la raison n'en est pas connue – elle fera peut-être l'objet de questions lors de la prochaine législature. Pour préserver le modèle de la Caisse, il faut travailler à la meilleure façon d'appréhender la Caisse des dépôts par tous les parlementaires, au-delà des seuls commissaires aux finances et aux affaires économiques.

En cette période électorale, les candidats ont des idées à foison, qui pourraient impliquer la Caisse des dépôts. On entend parler de livrets dans tous les sens. Or, s'il faut peut-être s'interroger sur l'épargne réglementée, on ne peut le faire qu'en discutant avec la Caisse des dépôts.

Le rôle du Parlement et de la commission de surveillance au quotidien est de garantir que la Caisse puisse poursuivre son action au service de l'intérêt général et à long terme. C'est en vertu de ces principes simples que le groupe pourra continuer à servir nos concitoyens. Les futurs membres de la commission de surveillance sont peut-être parmi nous aujourd'hui, ainsi que son futur président ou sa future présidente ; Gilles Carrez, Denis Sommer et moi-même leur laisserons un bilan et des conseils plus étayés que ceux que je viens d'énoncer.

Ce mandat a été pour moi passionnant et passionné. Je souhaite évidemment que l'institution reste toujours plus proche, plus agile, plus rapide et au service de tous les Français, dans tous les territoires. Un grand merci !

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éric Lombard, directeur général de la Caisse des dépôts et consignations

Je vous avais présenté les résultats de 2020 en avril 2021. Il est un peu tôt pour que j'en fasse de même pour l'année 2021, mais je souhaite vous tenir informés de l'avancement de notre contribution au plan de relance.

Depuis le déclenchement de la crise, au printemps 2020, nous avons d'abord voulu jouer notre rôle d'acteur contracyclique : nous avons revu nos positions sur les marchés financiers, décidé de ne pas vendre et, au contraire, lancé un vigoureux programme de soutien pour redonner confiance à la place financière, ce qui fait partie de notre mission. Nous nous sommes mobilisés dans l'urgence, au premier semestre 2020, en lançant un programme d'achat d'actions de sociétés françaises, pour 1,6 milliard d'euros, et en rachetant 8 milliards d'euros de dettes d'entreprises sur les marchés financiers. Nous avons aussi soutenu l'ensemble des entreprises dans le cadre des prêts garantis par l'État lancés par le ministère des finances et Bpifrance. À l'échelon local, nous avons renforcé notre partenariat avec les régions en créant dix-neuf fonds régionaux destinés à soutenir plus spécifiquement les très petites entreprises et celles de l'économie sociale et solidaire, pour 145 millions d'euros.

Nous avons ainsi su nous mobiliser, accompagner, investir et opérer à tous les niveaux puisque tous les segments de l'économie avaient besoin de soutien. C'est un véritable motif de fierté pour tous les collaborateurs de la Caisse des dépôts d'avoir alors répondu présent. Dans cette démarche, nous avons bénéficié du soutien plein et entier de la commission de surveillance, que je remercie.

Une fois ces mesures engagées, s'est posée la question essentielle de la relance de notre économie. Nous avons fait le constat que la crise affectait l'économie réelle et se traduisait dans ce domaine par une destruction des fonds propres de nos entreprises en raison des pertes subies et de l'absence de chiffre d'affaires et de résultat. Notre philosophie a donc d'emblée consisté à aider les entreprises à reconstituer leurs fonds propres par l'injection massive de capital.

C'est l'origine du plan de 26,3 milliards d'euros d'investissements sur la période 2020-2024 que la commission de surveillance a approuvé dès le mois de juin 2020 et que nous avons annoncé en septembre de la même année. Au 31 décembre 2021, nous avions réalisé près de 60 % de l'ensemble de ce plan, ce qui représente 15,4 milliards d'euros. En réponse à la crise, nous avons en effet relevé notre niveau d'activité. Notre rythme d'investissement a été multiplié par 2,5 : c'est un effort massif. Notre objectif est de continuer à mettre le plus vite possible ces fonds à disposition de notre économie pour réaliser au moins 80 % du plan d'ici à la fin 2022 ; nous sommes en bonne voie pour y parvenir.

Les crises sont un moment de basculement qu'il ne faut jamais gâcher, comme disait Churchill. C'est ce à quoi nous veillons : le plan de relance de la Caisse vise à accélérer la transformation de notre économie afin de la préparer aux défis à venir, notamment celui du réchauffement climatique, et de la rendre plus durable et plus solidaire.

Parmi nos quatre grandes priorités, en matière de soutien au logement et à l'habitat, nous avons réalisé 6,2 milliards d'euros d'investissements, soit 55 % de notre cible ; en matière de soutien à l'économie et aux entreprises, 6,2 milliards d'euros également sur les 8,3 milliards prévus, soit les trois quarts de l'objectif ; en matière de financement de la transition écologique et énergétique, 2,8 milliards d'euros sur les 6,3 milliards du plan, soit 44 % ; enfin, en matière de cohésion sociale, plus de 45 % des 500 millions d'euros prévus.

Au delà de ces chiffres, je veux vous dire un mot de la territorialisation accrue que nous avons retenue pour le déploiement du plan. En effet, il ne s'agit pas seulement de rétablir notre économie, mais aussi de préparer l'avenir en améliorant l'équilibre entre les territoires de la République. Les résultats dont je vous ai parlé sont le fruit de notre dialogue constant avec l'ensemble des acteurs territoriaux pour connaître leurs besoins et y répondre, et pour nous appuyer beaucoup plus sur les 850 collaborateurs du réseau, dans 37 implantations, qui travaillent au quotidien avec les élus locaux et les acteurs publics et privés de chaque territoire.

Avant même la crise, nous avions renforcé cette organisation territoriale et beaucoup déconcentré les décisions. C'est une évolution importante qu'il faut continuer d'amplifier pour être au plus proche du terrain. Aujourd'hui, neuf prêts sur dix sont décidés par les directions régionales et la moitié des investissements le sont localement.

En créant la Banque des territoires, en mai 2018, nous avons signé un véritable acte de déconcentration de la Caisse des dépôts, pour plus d'agilité. Cette transformation a montré toutes ses vertus pendant la phase de crise sanitaire où la décision locale était primordiale pour s'adapter aux particularités de chaque territoire. La Caisse des dépôts était insuffisamment connue des acteurs territoriaux ; la marque Banque des territoires s'est imposée, ce qui permet aux élus de venir plus facilement à notre rencontre pour que nous puissions les soutenir, notamment dans les territoires plus petits, ruraux, et dans les quartiers. Fin 2021, la Banque des territoires avait déjà injecté 80 milliards d'euros dans les territoires, compte tenu des investissements en fonds propres et des prêts.

Nous avons donc transformé et diversifié notre offre, en lien avec le ministère de l'économie et des finances, notamment en matière de prêts, afin d'être mieux armés pour lutter contre les fractures territoriales et gérer la transition énergétique. Je pense au prêt pour la rénovation énergétique des bâtiments publics, une grande transformation absolument nécessaire, et à la rénovation thermique du parc social, urgente pour compenser la hausse du prix de l'énergie, très difficile pour les locataires des logements sociaux dont 70 % sont chauffés au gaz. Nous avons aussi déployé des produits spécialisés, comme Mobi Prêt, pour financer les mobilités douces, Édu Prêt, pour rénover nos écoles, et Aqua Prêt, pour l'adduction d'eau ; ces prêts ciblent les enjeux prioritaires de développement, qui nécessitent un accompagnement à long terme. En 2021, nous avons proposé de nouveaux prêts pour la relance verte et la relance santé, afin de répondre aux besoins des collectivités.

La hausse du taux du livret A peut susciter des inquiétudes chez les organismes de logement social ; nous en avons conscience, puisqu'ils sont nos partenaires et que nous sommes en contact avec eux tous les jours. Il s'agit d'une inflexion du paradigme financier – la hausse des taux, que l'on n'avait pas observée depuis longtemps, va probablement se poursuivre. En pareil cas, nous adaptons automatiquement les échéances de remboursement par ce que l'on appelle la double révisabilité, de sorte que la hausse du taux d'intérêt de nos prêts, lorsqu'il est indexé sur le taux du livret A – cela concerne plus de 140 milliards d'euros de prêts –, ne pèse pas trop sur les finances du logement social. Sur les charges du logement social, l'effet représente 700 millions d'euros, mais, sur la liquidité, il est de 250 millions d'euros. Tout est fait pour étaler cet impact afin que les acteurs du logement social n'en souffrent pas trop. Nous avons aussi des véhicules de très long terme – soixante ou quatre-vingts ans – qui permettent de financer dans la durée les transformations en œuvre.

Un mot des nouveaux programmes auxquels nous participons et qui ont été lancés par le Gouvernement depuis le début du quinquennat. Ils nous semblent tout à fait correspondre à une façon moderne de concevoir l'aménagement du territoire, car ils visent à fédérer les acteurs autour des élus.

Un exemple particulièrement emblématique, car il s'agit d'une réussite qui produit déjà des effets très nets, est le plan Action cœur de ville : 222 territoires ont été retenus, pour lesquels nous avons créé des offres pour soutenir le foncier, la redynamisation, l'ingénierie, l'innovation, l'expérimentation et apporter des financements. Au total, nous avons déployé près de 1,6 milliard d'euros pour appuyer 3 800 projets. Surtout, le changement de méthode a permis aux acteurs fédérés autour de l'État, de la Caisse, d'Action logement et de l'Agence nationale de l'habitat (ANAH) de se mobiliser pour des projets décidés intégralement par les élus. Nous avons fourni la boîte à outils, les élus apportent le projet, ce qui est normal dans une démocratie bien organisée. C'est une expérience qui mérite d'être reproduite. Dans le passé, l'État proposait des solutions toutes faites, aussi cette évolution me paraît-elle de bonne facture. Elle permet de traiter les enjeux des villes dans leur diversité. J'étais il y a peu à Châteauroux, à Blois, à Tours : dans chaque cas, les élus utilisent différemment la boîte à outils. Le programme est aussi très transversal : les échanges entre élus sont nombreux.

La prolongation du plan jusqu'en 2026 et son extension aux quartiers, aux entrées de ville et aux zones de gare sont un signe fort. Nous réfléchissons à l'utilisation des friches qui vont sans doute être laissées disponibles par les hypermarchés de périphérie. En effet, les années à venir seront celles de la bataille pour le foncier, notamment pour éviter l'artificialisation des sols ; or les hypermarchés qui réduiraient leur surface ou partiraient par suite de l'extension du commerce entre centre-ville et sur internet libéreraient du foncier susceptible d'être utilisé pour refaire des quartiers de ville déjà connectés et équipés, et où seront construits des logements et des entreprises, le tout, bien sûr, dans la concertation et sous l'autorité des élus.

Tout aussi nets sont les effets du programme Petites Villes de demain, que nous pilotons conjointement avec l'Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT), et au titre duquel 200 millions d'euros de subventions ont été versés par la Banque des territoires.

Citons également le programme Territoires d'industrie, dans lequel la Banque des territoires et Bpifrance interviennent conjointement, la première pour financer le foncier, éventuellement le bâtiment, la seconde pour financer les entreprises. Nous assistons à un retour de l'industrie dans notre pays : plus d'une centaine de projets d'implantation de nouvelles industries sur l'ensemble du territoire vont participer à construire une économie décarbonée, avec des méthodes entièrement nouvelles. Le programme a permis de déployer 390 millions d'euros, l'approche décentralisée ayant été, là aussi, déterminante.

Il y a vingt ans, certains théorisaient l'entreprise sans usine. Nous en avons vu les effets désastreux dans nos territoires : quand une industrie s'en va, les services et les emplois s'en vont aussi. Ce retour de l'industrie, avec tout ce qui l'accompagne, me paraît un mouvement très fécond, notamment en matière de transition écologique. De ce point de vue, il faut considérer l'empreinte carbone, et non les seules émissions directes de carbone. Or l'empreinte carbone d'une usine écologique consommant de l'énergie décarbonée est bien moindre que celle d'une usine implantée en Chine qui fonctionne grâce à de l'électricité produite à partir du charbon et dont les produits nous arrivent par des transports eux-mêmes carbonés. Je constate que les mentalités changent dans les territoires et que la réindustrialisation est désormais accueillie positivement par les uns et par les autres.

Le rôle et les missions de la CDC ont été fortement accrus dans le domaine social, ce qui s'est d'ailleurs traduit par un changement de nom : la direction des retraites et de la solidarité est devenue la direction des politiques sociales.

D'abord, la CDC gère la retraite d'un Français sur cinq. Nous sommes attentifs aux réformes que votre assemblée pourrait être amenée à examiner dans les mois qui viennent. Celles-ci pourraient s'appuyer, en tout cas pour ce qui concerne la sphère publique, sur le « camp de base » que nous constituons. À cet égard, nous sommes en train d'engager un rapprochement informatique avec le service des retraites de l'État, afin de déployer des outils communs et de former un pôle qui pourrait, demain, gérer l'ensemble des retraites publiques. Cela rend évidemment les investissements plus efficaces et moins coûteux.

Par ailleurs, la loi m'octroie la présidence du directoire du Fonds de réserve pour les retraites, qui a été utilisé pour soutenir l'économie pendant la crise et qui pourrait à l'avenir jouer un rôle de coordination dans la gestion des réserves. Ce point fera probablement l'objet de réflexions dans le cadre de la campagne électorale qui s'ouvre.

Ensuite, la CDC soutient la formation, dont j'ai évoqué l'importance, notamment dans la politique de réindustrialisation. La plateforme Mon compte formation, dont vous avez voté la mise en œuvre, permet le financement de plus de 3 millions de formations. C'est un instrument d'égalité des chances très efficace. Géolocalisée, l'application permet de mener des actions territorialisées. Elle a complètement changé le profil des bénéficiaires : ce sont désormais des hommes et des femmes à parité, alors que les hommes étaient auparavant majoritaires – ce qui ne correspondait à aucune logique ; ce sont à 63 % des ouvriers ou des employés, ce qui répond à l'objectif – il est bon que les personnes les moins formées aient davantage recours à la formation ; 20 % d'entre eux ont plus de 50 ans, conformément au principe de formation tout au long de la vie. Cet outil permet une meilleure coordination des politiques publiques ; le plan « 1 jeune, 1 solution » a été développé dans ce cadre.

Enfin, la CDC gère Mon parcours handicap, qui s'adresse aux personnes en situation de handicap et à leurs familles. C'est une très belle plateforme, qui est elle aussi, dans une certaine mesure, un enfant de la crise.

La présidente de la commission de surveillance l'a dit, le rapprochement de la CDC avec La Poste et SFIL, prévu par la loi PACTE et achevé en 2020, a débouché sur la constitution d'un grand pôle financier public, ce qui permet des coordinations nouvelles. Je pense par exemple à la société Urby, opération conjointe de La Poste et de la Banque des territoires, qui assure la logistique décarbonée du dernier kilomètre. Nous accompagnons aussi le développement des espaces France services et des bus France services – il y en a actuellement quatre-vingt-neuf –, pour mettre à disposition les services publics dans tous les territoires de la République, notamment dans les quartiers et les zones les plus éloignées ; c'est un beau succès.

La CDC est devenue un grand acteur en matière d'infrastructures. Elle a récemment fait l'acquisition, aux côtés de CNP Assurances, de 50 % d'Orange Concessions, pour contribuer au développement du haut débit sur le territoire. Dans le domaine de l'environnement, elle a acquis 20 % du « nouveau Suez », garantissant ainsi la présence d'un investisseur public français auprès de cet acteur clé pour les collectivités locales. Son implication est très forte dans le secteur de l'énergie : elle détient des participations dans Réseau de transport d'électricité (RTE) et dans la Compagnie nationale du Rhône (CNR) – je remercie votre assemblée d'avoir voté la prorogation de la concession de la CNR, ce qui me paraît conforme à l'intérêt général – et a renforcé sa présence auprès de GRTgaz. Les infrastructures énergétiques sont appelées à jouer un rôle clé, et nous veillerons à apporter les financements appropriés.

La CDC, qui repose sur un modèle unique, a de nouveau montré, pendant cette crise, son utilité, sa capacité à mobiliser l'ensemble des acteurs et son engagement à long terme. Afin d'être prêts pour la nécessaire transition écologique qui est devant nous – l'engagement des accords de Paris, je le rappelle, c'est une économie décarbonée en 2050, ce qu'une économiste a appelé « l'urgence du long terme » –, il faut engager dès maintenant les investissements à long terme. C'est précisément ce que nous faisons. Comme nous voulons être les moins seuls possible dans cette aventure, nous avons demandé à Bernard Attali de réaliser un rapport sur les freins qui empêchent les acteurs financiers d'accompagner ce financement de long terme. Si l'on devait résumer la mission essentielle de la CDC, c'est préparer la France à l'économie et aux enjeux sociaux et écologiques de demain. Tel est l'esprit qui nous anime.

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Dans un rapport qu'elle a publié en ce mois de février, la Cour des comptes a relevé qu'il y avait seulement 3,3 milliards d'euros d'argent neuf dans l'enveloppe d'investissements prévue par la CDC pour le plan de relance. La Cour considère qu'il faut neutraliser les interventions de Bpifrance, dont le capital n'est pas détenu seulement par la CDC. Cette critique, fondée sur une approche sans doute un peu comptable, correspond-elle à la réalité ? Quelle est la part d'argent réellement nouveau ? Quelle est la part de recyclage de crédits ancien – étant entendu que l'on peut évidemment en changer la destination ?

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D'après vos modélisations, quel est l'impact de la hausse des taux des livrets réglementés sur le groupe Caisse des dépôts d'une part et sur le renchérissement du coût des prêts octroyés aux organismes de logement social d'autre part ? Quelle visibilité avez-vous sur cet impact à moyen terme, après deux années de très forte collecte sur l'épargne réglementée dans le contexte que nous connaissons ? Pouvez-vous nous faire un point sur les dividendes perçus en 2021 par la CDC en sa qualité d'actionnaire, notamment d'Egis, de Transdev, de La Poste, d'Icade et de CNP Assurances ?

Nous pouvons le constater chaque année lorsque nous examinons les textes financiers, la CDC contribue au budget de l'État à travers plusieurs canaux : des dividendes, une contribution représentative de l'impôt sur les sociétés et des prélèvements sur les fonds d'épargne. Quel montant votre groupe a-t-il réservé à l'État en 2021 ? Pouvez-vous en préciser la ventilation, afin que notre commission en ait une parfaite connaissance ?

Nous avons désormais une bonne visibilité sur les difficultés rencontrées en 2020 par le groupe La Poste. Les résultats des exercices suivants s'annoncent meilleurs. Pouvez-vous nous donner un aperçu des résultats 2021, qui seront présentés prochainement ? Quelles sont les perspectives pour l'avenir, alors que nous avons voté des aides financières au bénéfice du groupe La Poste dans la loi de finances pour 2022 et que nous avons débattu de ce sujet à la suite du rapport de Jean Launay et des annonces du Premier ministre ?

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La CDC participe activement au financement de l'économie, à travers l'appui au logement social, la politique d'investissement dans les territoires et le soutien aux entreprises. Elle est chargée des comptes bancaires et des assurances en déshérence et administre la base Ciclade. Elle gère le compte personnel d'activité (CPA) et le compte personnel de formation (CPF).

Dans le cadre du plan d'urgence, vous l'avez indiqué, la CDC a eu une stratégie contracyclique, sous forme d'achat d'actions et de dettes. Dès lors, elle a sans doute augmenté son exposition aux risques. Quel est le rendement des capitaux propres qu'elle a investis en déployant cette stratégie ?

Dans le cadre du plan de relance, la Banque des territoires s'est engagée à investir 300 millions d'euros dans le développement des foncières de redynamisation territoriale, dont l'objectif est de revitaliser les centres-villes, si importants, notamment dans les zones rurales. Où en est-on dans cet effort en faveur de l'attractivité des centres-villes ? Quelle ligne directrice vos prochaines actions suivront-elles dans ce domaine ?

S'agissant des comptes en déshérence, si les ayants droit ont pu récupérer en 2020 quelque 2 900 euros en moyenne, il resterait un encours de près de 6 milliards d'euros dormants. Que deviennent ces fonds ? Pourquoi ce montant est-il aussi élevé ? N'est-ce pas la conséquence d'un manque de promotion du site Ciclade ?

Je tiens à souligner la qualité des publications de l'Institut pour la recherche, dépendant de la CDC. Je regrette toutefois que ses travaux ne soient pas davantage connus, notamment des élus locaux et nationaux. Comment la CDC pourrait-elle mieux les faire connaître des élus ? Quel vecteur de vulgarisation pourrait-on trouver ?

La CDC est responsable du développement du CPF, qui a fait l'objet de nombreuses fraudes. Le comité de pilotage ministériel chargé de lutter contre le démarchage abusif et la fraude au CPF a tenu récemment une première réunion. Comment la CDC se place-t-elle dans cette action ? Quelles démarches préconisez-vous ?

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Vous avez présenté tous les programmes et dispositifs auxquels contribue la CDC, en insistant sur une vision à long terme, logique qu'il faut continuer à privilégier selon nous.

Il est un peu tôt, avez-vous dit, pour nous présenter les résultats du groupe en 2021. Le résultat de la section générale s'est établi à 2,056 milliards en 2019 et à 566 millions en 2020. Peut-être êtes-vous en mesure de nous dire s'il se situe en 2021 dans la tranche basse ou dans la tranche haute ? Cette question est liée à celle qu'a posée le rapporteur général sur les dividendes et la contribution versée à l'État.

Vous avez évoqué un programme d'achat d'actions de sociétés françaises, pour 1,6 milliard, et de dettes financières, pour 8 milliards. Dans quels types d'activités et d'entreprises avez-vous investi de la sorte ?

La CDC a une doctrine et des outils : Bpifrance pour les entreprises, la Banque des territoires pour les collectivités, La Poste et CNP Assurances pour la population. Le moment n'est-il pas venu de vous doter d'un quatrième outil, pour les associations, véritable pilier de la vie locale ? Elles rencontrent des difficultés croissantes, notamment en matière de trésorerie.

Nous sommes globalement satisfaits de l'action menée par la CDC dans les territoires, à travers des programmes publics et l'accompagnement des entreprises. Il faut continuer sur cette lancée et nous vous soutenons avec force à cet égard.

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Je partage totalement votre avis sur les effets bénéfiques de la déconcentration de la Banque des territoires et salue votre volonté d'accompagner l'ensemble des territoires de notre pays. Je puis témoigner de l'efficacité du programme Action cœur de ville : à Châlons-en-Champagne, ville moyenne, nous en voyons les effets très concrets sur la reconquête et la redynamisation du centre-ville.

La CDC a fortement contribué à la relance, notamment grâce au plan d'investissements en fonds propres de 26 milliards d'euros. Vous en avez dressé un premier bilan et fait un état des lieux des décaissements. Avez-vous identifié des dispositifs qui n'ont pas trouvé leur cible, car ils ne répondaient pas à un besoin, et qu'il serait nécessaire de réorienter ?

Vous avez évoqué le rapport remis par Bernard Attali, intitulé « Investir à long terme, urgence à court terme ». Avez-vous d'ores et déjà identifié des propositions à mettre en œuvre prioritairement ?

Je poursuis sur la question des investissements à long terme. Notre pays connaît aujourd'hui un taux de croissance historiquement élevé, lié à un rebond et à la reprise de l'activité économique. Toutefois, nous craignons tous un retour rapide à une croissance plus atone, de l'ordre de 1,5 %. Nous devons tout faire pour maintenir un niveau de croissance dynamique, proche de 2 %. Le gouverneur de la Banque de France a évoqué à cet égard un levier, l'investissement dans la recherche appliquée, pour faire de la France un pays d'innovation sur des produits à valeur ajoutée. La CDC réfléchit-elle à la part qu'elle pourrait prendre en la matière ?

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Je souscris à tout ce qui a été dit sur les effets bénéfiques de l'action de la CDC. Une question me taraude depuis des années : pourquoi la Corse est-elle le seul territoire métropolitain dans lequel les filiales logement de la CDC, en particulier CDC Habitat, n'interviennent pas ? Peut-être y a-t-il une raison objective à cela ? Les directeurs généraux successifs de la CDC m'ont tous regardé avec des yeux ébahis lorsque je leur ai posé la question, et je n'ai jamais obtenu de réponse.

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Un article récent des Échos consacré au rôle des banques et aux grandes manœuvres en cours dans ce secteur constate que de nombreux groupes financiers sont en train de se diversifier, voire essayent de s'engager dans des métiers totalement nouveaux. D'ailleurs, la prise de participation de La Poste dans CNP Assurances aboutit à une structure de banque-assurance – sans même parler du Crédit Agricole ou de la BNP.

Quelle est la rentabilité de la CDC ? Tous les experts disent que prêter de l'argent n'est pas aujourd'hui un métier qui rapporte. Les partenaires avec lesquels vous travaillez cherchent tous à se diversifier. Placée sous la surveillance du Parlement, la CDC doit dégager des résultats, sans nécessairement réaliser des bénéfices énormes. Elle doit notamment s'assurer que tous les placements faits auprès d'elle généreront des ressources. Quelle stratégie de diversification envisagez-vous ? Tous vos concurrents mondiaux ont adopté des stratégies – j'ignore si elles sont bonnes – très différentes de celle du groupe Caisse des dépôts.

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Évoquant l'accompagnement des politiques sociales, vous avez parlé d'investissements « plus efficaces et moins coûteux ». Pouvez-vous nous en donner des exemples ?

Comment le programme Territoires d'industrie est-il décliné dans les territoires, notamment dans mon département, la Moselle ? Où trouver les informations à ce sujet ? Dois-je me rapprocher de la direction territoriale compétente de la Banque des territoires ?

Au cours de la législature, j'ai consacré deux rapports à la lutte contre la pauvreté. Pouvez-vous évoquer l'accompagnement de la CDC en la matière et donner des chiffres à ce sujet au niveau territorial ?

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La CDC est un outil unique, qui contribue à la régulation et à la stabilisation de l'ensemble des relations financières sur notre territoire. Vous avez évoqué votre participation à dix-neuf fonds régionaux d'investissement et de consolidation en fonds propres. Certaines régions étant très grandes, il y a parfois un défaut de proximité. Que pensez-vous d'autres formes d'action possibles, par exemple de sociétés d'économie mixte (SEM) qui interviendraient en haut de bilan des entreprises ?

Sur les sujets de la transmission et de la reprise des entreprises ainsi que de la participation et de l'intéressement des salariés, quel rôle pourrait tenir la CDC en matière d'accompagnement et de sécurisation ? L'État et la CDC sont intervenus à travers les prêts garantis par l'État (PGE) ; comment pourrait-on sécuriser ces participations financières de l'État ?

Quel est votre retour d'expérience sur les prêts participatifs relance (PPR) ? Ils ont eu, semble-t-il, assez peu de succès.

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éric Lombard, directeur général de la Caisse des dépôts et consignations

Vous m'avez interrogé, monsieur le président, sur la part de fonds nouveaux dans notre plan de relance. D'après ce que je comprends, la Cour des comptes a fait le commentaire que vous évoquez dans un rapport consacré à la gestion des participations financières de l'État durant la crise sanitaire. Or il est logique que nous ne nous soyons pas concentrés à ce moment-là sur ce portefeuille de participations stratégiques, puisque le plan de relance visait à soutenir d'autres segments de l'économie.

Cela étant, la somme indiquée par la Cour des comptes me paraît faible. Je vous donne un indicateur très simple, que j'ai déjà évoqué dans mon propos liminaire : de septembre 2020, date du lancement de notre plan de relance, à fin 2021, nous avons engagé 15,4 milliards d'euros d'investissement en capital, alors que le rythme annuel d'investissement de la CDC était auparavant de l'ordre de 4 milliards.

L'approche de Bercy est différente : notre plan de 26 milliards sur quatre ans excède certes légèrement ce que l'on investit habituellement en quatre ans, mais nous allons engager 80 % de cette somme en l'espace de deux ans. Sur les années 2021 et 2022, qui sont cruciales, notre rythme d'investissement sera multiplié par 2,5 ; on verra ce qui passera en 2023 et 2024, selon la situation économique. La France a besoin actuellement d'un surinvestissement.

Nous avons certes défini une programmation, mais les investissements de la Caisse n'obéissent pas à une logique budgétaire ; ils ne sont pas engagés en fonction d'un texte de loi ou d'une limite. C'est la manière de dépenser les crédits qui importe – en l'occurrence, nous accélérons l'engagement des fonds. Les résultats étant très bons, je n'exclus pas que l'on puisse maintenir pendant deux ou trois ans de plus un rythme d'investissement très élevé, surtout si notre pays en a besoin. Nos investissements en capital ont pour seule limite le montant de nos fonds propres, puisqu'ils doivent être proportionnés à ceux-ci. Nous avons pu mobiliser autant de crédits parce que, depuis quatre ans, nous avons fabriqué beaucoup de fonds propres. Pour l'essentiel, ces sommes n'auraient pas été engagées s'il n'y avait pas eu la crise sanitaire.

Monsieur le rapporteur général, nous pensons qu'il est possible d'amortir l'effet de la remontée du taux du livret A sur le logement social en l'étalant dans le temps. Par ailleurs, nous avons institué des mesures de soutien, notamment des prêts participatifs en faveur du logement social, à hauteur d'un milliard d'euros, qui ont été utilisés. Ces prêts sont à ce point avantageux pour l'emprunteur que, dans les comptes de 2021, nous passons une provision pour prendre acte de leur faible rentabilité. Nous faisons en sorte que les bailleurs continuent à fonctionner, mais aussi à bâtir. La construction des logements sociaux à venir sera financée sur la base du nouveau taux du livret A, mais on peut allonger la durée des prêts, appliquer de nouveaux mécanismes pour soutenir le foncier ou permettre le démembrement de propriété. Cette contrainte financière n'est certes pas une bonne nouvelle pour le secteur, mais on peut s'en arranger ; en tout état de cause, elle n'est pas de nature à limiter le rythme de construction.

De manière générale, la remontée des taux que l'on observe depuis trois mois était attendue depuis cinq ans, sans que l'on sache quand elle se produirait, ni à quel rythme. La hausse est très rapide : l'obligation assimilable du Trésor (OAT) à dix ans, qui était proche de zéro pendant toute l'année 2021, a atteint aujourd'hui, au terme d'une progression d'une rapidité inédite, un niveau compris entre 70 et 80 centimes. Toutes les indications données par la Banque centrale européenne laissent penser que la hausse va se poursuivre, ce qui relativise la décision du Gouvernement de remonter le taux de rémunération du livret A, puisque celui-ci finira par être rejoint et dépassé par les taux de marché.

Pour les établissements financiers, les banques et, bien qu'elle n'appartienne pas à cette dernière catégorie, la Caisse des dépôts, c'est plutôt une bonne nouvelle. Un économiste bien connu a parlé d'une « période de répression financière » pour décrire la situation que l'on a connue récemment. En effet, beaucoup de nos investissements se fondent sur les taux. Lorsque ces derniers étaient à zéro, les investissements étaient insuffisamment rentables, notamment pour les fonds d'épargne. Compte tenu de l'évolution en cours, nous avons reporté la publication d'une nouvelle prévision de résultats et d'une nouvelle courbe de taux.

Je n'ai pas en tête les dividendes de nos filiales. Notre politique consiste à soutenir le développement de celles-ci et celui de l'établissement public en faisant remonter les dividendes dont nous avons besoin. Les règles sont variables selon les sociétés. À titre d'exemple, conformément à l'accord qu'elle a conclu avec l'État, Bpifrance verse des dividendes correspondant à 35 % de son résultat, à l'instar de La Poste. Si ces entreprises ont, à un moment donné, des besoins financiers pour assurer leur développement, nous procédons, comme nous l'avons fait pour la Compagnie des Alpes – même si le cas de figure était différent –, à une augmentation de capital. Cela offre une respiration.

S'agissant de la contribution au budget, les choses ne sont pas encore tout à fait calées. Ce qui est à peu près certain, c'est que la contribution représentative de l'impôt sur les sociétés sera de l'ordre de 400 millions d'euross. La discussion avec le ministère de l'économie, des finances et de la relance se poursuit au sujet des fonds d'épargne. Ceux-ci comprennent un portefeuille de 40 milliards d'euros d'obligations assises sur l'inflation. La hausse du taux du livret A n'ayant eu lieu en 2021, les résultats économiques des fonds d'épargne, qui forment un bilan indépendant, seront donc très élevés. Toutefois, la hausse des taux pouvant se révéler quelque peu inconfortable pendant une période transitoire, nous allons mettre en réserve près des trois quarts du résultat. Nous avons avec Bercy un débat s'agissant du solde, qui appartient à l'État en tant qu'ayant droit économique : doit-il lui être versé ou être mis de côté, sachant que les fonds d'épargne devraient connaître quelques difficultés dans les années qui viennent ? Du fait de la hausse du taux du livret A, qui se répercutera avec un certain délai sur le coût des emprunts, et des taux de rentabilité déjà anciens de nombre de nos actifs sur les marchés financiers les résultats attendus seront médiocres, mais ils se redresseront avec le temps. Il n'y a pas d'inquiétude à avoir à ce sujet.

Monsieur Jerretie, les résultats de la Caisse des dépôts, qui se sont élevés à plus de 2 milliards d'euros en 2019, ont chuté en 2020 à un peu plus de 500 millions d'euros, en raison de la crise ; ils retrouveront en 2021 un niveau très largement supérieur à celui de 2019. La maison va bien ; nous reprenons des provisions qui ont été passées l'année dernière. Compte tenu des règles en vigueur, nous entretenons un trilogue avec la commission de surveillance et le ministère de l'économie, des finances et de la relance pour déterminer le montant du prélèvement. Je peux d'ores et déjà vous dire que nous serons un contributeur très important au budget de l'État cette année.

En matière de rendement des capitaux propres investis, j'ai souhaité distinguer, dans le pilotage de l'institution, ce qui relève de l'intérêt général et ce qui ressortit à la sphère concurrentielle, où les équipes sont au moins aussi bonnes que celles des acteurs privés. Pour ce qui est du premier, nous recherchons une rentabilité plutôt inférieure à 4 % ; pour la seconde, le rendement se situe en moyenne à 6 %, mais il dépassera ce taux cette année. Nous avons approuvé, il y a deux jours, au sein du comité exécutif, l'évolution très favorable de la valeur du portefeuille d'investissements. Nous avons certes pris des risques en accordant des prêts au cours de cette période, mais les équipes sont très professionnelles et notre économie va bien. Ces risques ne se sont donc pas traduits par des provisions ou des pertes.

Les foncières de redynamisation rencontrent un grand succès. Plus de soixante-dix foncières commerce ont été instituées, en lien avec le ministère de l'économie, des finances et de la relance, et plus de 1 000 commerces ont déjà été achetés, l'objectif étant d'atteindre les 6 000. D'autres foncières s'inscrivent dans le cadre des Territoires d'industrie, d'autres encore s'occupent de réaménagement urbain en faisant du portage d'immeuble. Tout cela se met en place en lien avec les collectivités locales, et cela fonctionne très bien selon une double ligne directrice : répondre aux besoins des élus et être économiquement équilibré. En outre, on peut faire preuve de beaucoup de flexibilité.

Les comptes en déshérence représentent en effet la somme considérable de 6,3 milliards d'euros. Avant d'être transférés à la Caisse des dépôts, ils font l'objet de démarches actives des banques et des compagnies d'assurance. Il faut dire que l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution a sanctionné celles d'entre elles qui ne s'y employaient pas assez énergiquement. Les sommes qui nous parviennent concernent des contrats dont les banques et les assurances n'ont pas trouvé le détenteur. Nous ne faisons pas de publicité, car nous exerçons un mandat, mais les médias se font l'écho de cette question – Le Parisien y a consacré un papier il y a une semaine, et TF1 et France 2, entre autres chaînes généralistes, ont parlé de Ciclade. Les Français sont beaucoup mieux informés. On a reçu, depuis, de nombreux appels. Nous faisons tout pour que Ciclade soit connu. La rémunération de ces fonds s'élève à 30 centimes par an. Leur gestion est par ailleurs très coûteuse, mais elle fait partie de nos missions d'intérêt général. Au bout de trente ans, nous transférons les sommes à l'État. Cet argent fait partie de nos ressources, même s'il ne représente qu'une faible part des 1 250 milliards d'euros inscrits à notre bilan. À titre de comparaison, les fonds détenus par les notaires s'élèvent à 50 milliards d'euros.

Monsieur Labaronne, nous allons nous employer à diffuser les résultats de l'institut CDC pour la recherche. Les équipes seront heureuses de l'hommage que vous leur rendez.

Nous travaillons très activement sur la fraude au CPF. Nous avons eu récemment une réunion avec la ministre et avons rencontré les parquets. Nous proposons qu'un texte vous soit soumis en vue d'interdire le démarchage pour le CPF, qui est illégal ; nous n'en faisons évidemment jamais. Nous employons des outils d'intelligence artificielle, nous faisons la chasse aux fausses formations. La fraude atteint un montant modeste au regard des milliards engagés chaque année, mais c'est encore trop.

Monsieur Jerretie, il est difficile de dire à qui ont bénéficié les achats d'actions et de dettes. En effet, nous sommes actionnaires de presque toutes les sociétés du CAC40 et de la plupart de celles du SBF120. Nous avons maintenu nos allocations d'actifs. Les 8 milliards étaient orientés vers les dettes émises par les entreprises.

Le soutien aux associations fait partie de nos mandats. Nous avons au sein de la direction des investissements une équipe dédiée qui, soit souscrit à l'émission de titres associatifs, soit prête à des associations. Au début de mon mandat, nous avons réorganisé le suivi de la création d'entreprises : Bpifrance finance la partie entreprises, et nous nous concentrons sur l'économie sociale et solidaire. Nous avons ajouté 100 millions d'euros, pour ce type de partenaires, dans le cadre du plan de relance.

Madame Magnier, monsieur Mattei, contrairement aux obligations relance, les prêts participatifs relance n'ont pas trouvé leur public – nous ne les proposons plus. C'est une bonne nouvelle, car cela signifie que notre économie ne rencontre pas de difficultés de financement. Pour être très souvent sur le terrain, je peux vous dire que nos entreprises ne rencontrent pas de problèmes de financement. La Caisse des dépôts est présente, comme Bpifrance ; les banques commerciales ont également fait leur part.

Nous n'avons pas encore de propositions identifiées à la suite du rapport de Bernard Attali, mais cela fait partie des sujets sur lesquels nous travaillons avec lui.

Monsieur Pupponi, je ne vais pas me démarquer de mes prédécesseurs : je ne sais pas pourquoi nous n'intervenons pas en Corse. Je vais regarder cela.

Monsieur Jolivet, nos stratégies ne sont pas comparables à celles des banques. En raison des réglementations internationales et européennes, ces dernières ont abandonné toute détention d'actions. C'est l'une des raisons qui expliquent la floraison des fonds de private equity, qui ont pris le relais des banques. Grâce aux règles particulières qui s'appliquent à elle, la Caisse des dépôts a pu conserver ses participations en actions. Nous avons près de 100 milliards d'euros d'investissements en actions, que nous avons pris dans des domaines d'intérêt général, comme les infrastructures – qui sont des opérations assez rentables –, ou dans des secteurs à forts risques mais bien choisis. Les revenus générés sont élevés, notamment en période de taux bas, puisque le rendement des dividendes est de l'ordre de 3 % à 4 %. Par ailleurs, compte tenu du fort développement de ces entreprises, nous réalisons des plus-values de cession. La détention d'actions est donc extrêmement prégnante dans notre modèle.

Quant à la partie prêteur, elle est relativement atypique. Chez Bpifrance, les résultats sont le fruit de participations, et non de l'activité prêteur, qui est tout de même bénéficiaire, mais plus modestement. Il en va de même à La Banque Postale. La Banque des territoires, pour sa part, accorde des prêts basés sur le taux du livret A ; c'est une équation économique particulière.

Par rapport aux banques, notre modèle accorde une place beaucoup plus forte aux activités industrielles. Nous détenons ainsi près de 50 % de RTE et de GRTgaz ; GeoPost, La Poste, la Compagnie des Alpes ou Transdev sont également de nature essentiellement industrielle. Notre modèle est hybride et protecteur, dans la mesure où il assure une bonne diversification.

Monsieur Hammouche, les investissements plus efficaces et moins coûteux sont essentiellement, à mes yeux, ceux qui sont décidés localement. Leur instruction, conduite par des équipes très compétentes, est plus rapide ; ils répondent à la demande. Dans le cadre du programme Petites villes de demain, nous allons financer à Villedieu-sur-Indre le déplacement de trois bâtiments de l'école. C'est une décision locale qui va changer la vie des habitants.

Territoires d'industrie est cogéré par les régions et les industriels, mais nous intervenons également sur ce programme. Si vous avez connaissance d'un projet qui pourrait en bénéficier, je vous invite à contacter Patrick François, directeur régional, ou le directeur territorial de votre département. C'est un réflexe à acquérir de la part des élus.

La lutte contre la pauvreté relève du mandat indirect de la Caisse. Nous y contribuons par une action très déterminée dans les quartiers, en participant aux programmes de rénovation de l'Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU), en particulier dans les copropriétés dégradées où, parfois, la pauvreté se concentre. Par ailleurs, nous facilitons l'accès au travail par la formation, en particulier au travers de Mon compte formation. Nous sommes là aux limites de notre mandat, car toutes nos activités doivent trouver un équilibre économique, fût-il proche de zéro.

Monsieur Mattei, s'agissant des outils à utiliser dans le cadre régional, il appartient aux élus de décider du véhicule à utiliser et du ressort territorial de ce dernier. Par exemple, en Bretagne, nous sommes coactionnaires, aux côtés de la région, de la SEM Breizh, qui couvre tout le territoire breton ; nous avons créé, avec la région et des banques locales, la filiale BreizhCité qui fait du portage pour le commerce ; les grandes villes de Bretagne ont aussi des SEM locales, auxquelles nous participons. En Vendée, il y a une SEM qui couvre La Roche-sur-Yon et Fontenay-le-Comte. Nous offrons une grande flexibilité d'usage. Toutefois, si un élu souhaitait créer une SEM avec un objet trop étroit et un ressort trop limité, nous lui conseillerions un autre type de véhicule.

Pouvez-vous s'il vous plaît préciser votre question sur la sécurisation de la reprise d'entreprises ?

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La reprise d'une entreprise par des salariés devrait pouvoir être accompagnée à travers des structures qui permettraient de stabiliser et consolider ces procédures. En matière de participation, comment garantir aux salariés qu'ils auront une chance de racheter leurs titres ? Il y a toute une ingénierie à organiser, dans laquelle la CDC me semble avoir un rôle majeur à jouer.

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éric Lombard, directeur général de la Caisse des dépôts et consignations

Je suis tout à fait d'accord avec vous. Bpifrance, car c'est plutôt son rôle, est très attentive à toutes les situations à risque. Même si on ne peut pas racheter tout type d'entreprise – notre économie est ouverte et nous avons un intérêt collectif à ce qu'elle le reste –, nous examinons les cas sur lesquels les élus appellent parfois notre attention. Vous avez raison, il est de notre rôle, dans ces situations, d'intervenir, surtout s'il s'agit de permettre l'entrée de salariés au capital des entreprises. C'est un développement auquel je suis personnellement très attaché. Sous réserve de certaines précautions – car ce n'est pas sans risque –, il est positif d'associer les salariés à la création de richesses résultant du développement des entreprises.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Merci pour ces propos extrêmement éclairants. Je souhaite que la commission des finances sache, lors de la prochaine législature, s'appuyer sur les compétences de la Caisse des dépôts et consignations et reconnaître la nécessité de la conforter encore et toujours.

Information relative à la commission

La commission propose Mme Cendra Motin et Mme Véronique Louwagie pour siéger au sein du comité national d'orientation de la société anonyme Bpifrance.

Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Réunion du mercredi 16 février 2022 à 10 heures

Présents. - M. Saïd Ahamada, M. Éric Alauzet, M. Julien Aubert, M. Fabrice Brun, M. Alain Bruneel, Mme Émilie Cariou, M. Michel Castellani, M. Jean-René Cazeneuve, M. Philippe Chassaing, M. Francis Chouat, M. Éric Coquerel, M. François Cornut-Gentille, M. Charles de Courson, Mme Marie-Christine Dalloz, M. Olivier Damaisin, Mme Jennifer De Temmerman, M. Benjamin Dirx, Mme Stella Dupont, Mme Sophie Errante, M. Brahim Hammouche, M. Patrick Hetzel, M. Alexandre Holroyd, M. Christophe Jerretie, M. François Jolivet, M. Daniel Labaronne, M. Michel Lauzzana, Mme Marie Lebec, Mme Patricia Lemoine, M. Fabrice Le Vigoureux, M. Patrick Loiseau, Mme Véronique Louwagie, Mme Marie-Ange Magne, Mme Lise Magnier, M. Jean-Paul Mattei, M. Christophe Naegelen, M. Xavier Paluszkiewicz, Mme Zivka Park, M. Hervé Pellois, Mme Christine Pires Beaune, M. François Pupponi, Mme Valérie Rabault, Mme Muriel Roques-Etienne, M. Xavier Roseren, Mme Sabine Rubin, M. Laurent Saint-Martin, Mme Marie-Christine Verdier-Jouclas, M. Éric Woerth, M. Michel Zumkeller

Excusés. - M. Damien Abad, Mme Anne-Laure Cattelot, M. Marc Le Fur