Commission d'enquête sur l'impact économique, industriel et environnemental des énergies renouvelables, sur la transparence des financements et sur l'acceptabilité sociale des politiques de transition énergétique

Réunion du jeudi 16 mai 2019 à 18h00

Résumé de la réunion

Les mots clés de cette réunion

  • EDF
  • hydraulique
  • mix
  • renouvelable
  • solaire
  • stockage
  • électricité
  • électrique
  • éolien
Répartition par groupes du travail de cette réunion de commission

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La réunion

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La séance est ouverte à dix-huit heures cinq.

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Nous accueillons pour notre dernière audition de la journée les représentants d'EDF Renouvelables.

M. Bruno Bensasson est président-directeur général d'EDF Renouvelables. Il est accompagné de M. Bertrand Le Thiec, directeur des affaires publiques, et de Mme Élodie Perret, chargée des relations institutionnelles.

Le groupe EDF se présente comme un énergéticien intégré, présent sur l'ensemble des métiers et ayant développé un mix de production diversifié, basé sur l'énergie nucléaire, l'hydraulique, les énergies nouvelles renouvelables et le thermique.

Le groupe s'est fixé une stratégie « Cap 2030 », qui prévoit notamment de doubler sa production d'énergies renouvelables d'ici 2030.

Aujourd'hui, l'éolien terrestre est la principale filière renouvelable du mix d'EDF, avec 80 % de la puissance installée à ce titre, le solaire en représentant 19 %.

À la fin de 2017, le groupe EDF a lancé un plan solaire pour développer 30 gigawattheures d'énergie solaire d'ici 2035, soit quatre fois les capacités de production d'énergie solaire en France lors de son lancement.

Au début de 2018, c'est un plan stockage électrique qui a été lancé.

Comment envisagez-vous l'évolution des différentes filières dans les années à venir entre l'éolien terrestre, l'éolien en mer, le solaire, les énergies marines et le stockage d'énergie ?

S'agissant des parcs de production importants, les conditions relatives de développement ne conduisent-elles pas à penser que l'option photovoltaïque est potentiellement plus prometteuse que l'éolien en France ? Si c'est le cas, comment envisagez-vous la question de l'affectation de nouvelles superficies foncières pour une production d'énergie solaire de grande capacité ? Que recouvre le développement du photovoltaïque flottant ?

Quelle est votre appréciation sur la filière de l'éolien en mer ?

Quelle est votre appréciation sur la question du recyclage des pales d'éoliennes ?

Monsieur Bensasson, nous allons vous écouter pour un exposé liminaire de quinze minutes. Puis les membres de la commission d'enquête vous interrogeront à leur tour avec, d'abord, les questions de notre rapporteure, Mme Meynier-Millefert.

S'agissant d'une commission d'enquête, il me revient, conformément aux dispositions de l'article 6 de l'ordonnance du 17 novembre 1958, de vous demander de prêter serment de dire la vérité, toute la vérité, rien que la vérité. Je vous invite à lever la main droite et à dire « Je le jure ».

(M. Bruno Bensasson et Mme Élodie Perret prêtent successivement serment.)

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Bruno Bensasson, président-directeur général d'EDF Renouvelables

Monsieur le président, madame la rapporteure, EDF Renouvelables recouvre à la fois l'hydraulique, l'éolien et le solaire. Je resituerai d'abord notre action dans le cadre plus large de la transition énergétique telle que la perçoit EDF.

Je ne peux entamer mon intervention sans évoquer l'efficacité énergétique, voie dans laquelle notre groupe s'engage résolument. La chaleur renouvelable est également un élément très important, porté par mes collègues de Dalkia. Je pense aussi au programme de chauffage durable lancé récemment. Bien entendu, le nucléaire et les réseaux de distribution font partie de la transition énergétique.

J'en viens à notre stratégie énergies renouvelables (EnR). Comme vous l'avez dit, Monsieur le président, elle a été fixée en 2015 par le programme « Cap 2030 » qui vise à doubler notre puissance pour la faire passer de 25 à 50 GW net par une croissance de 10 % par an, ce qui est important dans des économies qui croissent plus lentement.

Cette croissance, nous la ferons avec un double rééquilibrage.

Le premier rééquilibrage sera opéré entre technologies. Notre première énergie renouvelable reste et restera l'hydroélectricité. Hydroélectricité et éolien restent au cœur de notre mix, surtout l'hydroélectricité, avec un peu plus de 20 000 MW hydrauliques exploités par notre groupe. Nous opérerons un rééquilibrage progressif depuis l'éolien vers le solaire. Nous avions historiquement 80 % d'éolien, aujourd'hui, dans le flux, le rapport est plutôt de 50/50 entre éolien et solaire. Nous opérerons aussi un rééquilibrage entre éolien terrestre et éolien maritime.

Le second rééquilibrage est géographique. Paradoxalement, notre groupe était d'abord présent en Amérique du Nord, aux États-Unis d'Amérique. Nous resterons importants en Amérique du Nord, mais nous nous rééquilibrons vers une série de pays émergents et vers l'Europe, en particulier la France, avec notamment le plan solaire que vous avez cité, Monsieur le président, qui prendra toute son ampleur à partir de 2020.

Nous sommes le premier électricien par la puissance renouvelable installée en France. Nous sommes d'ailleurs aussi le premier électricien par la puissance renouvelable installée en Europe. Au niveau mondial, nous sommes dans le peloton de tête, mais reconnaissons que l'italien ENEL, par exemple, est un peu devant nous.

Cette position française est d'abord faite d'hydroélectricité, qui est la première des électricités renouvelables. C'est une électricité formidable, ancrée dans les territoires, compétitive, souvent flexible. Il reste du potentiel. Vous savez sans doute que notre groupe poursuit des projets, comme à La Coche, en Savoie, mais aussi l'important projet de station de transfert d'électricité par pompage à la Truyère, dans l'Aveyron, qui représente 1 milliard d'euros d'investissement et 2 000 emplois. Sous réserve de l'accord des autorités françaises et communautaires, nous souhaiterions vivement le réaliser.

Après l'hydraulique, l'éolien terrestre représente 1 300 MW dans notre parc français. S'y ajoutent nos projets maritimes. Nous avons été les lauréats de projets à Saint-Nazaire, Fécamp et Courseulles. J'espère que nous pourrons bientôt passer à une nouvelle étape après une décision du Conseil d'État. En matière d'éolien terrestre et maritime, nous nous inscrivons naturellement dans le cadre de la programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE) et des appels d'offres. Beaucoup de progrès ont été réalisés ces dernières années par les pouvoirs publics dans la façon de promouvoir ces technologies. Les appels d'offres offrent un assez bon équilibre entre le souhait légitime des pouvoirs publics d'obtenir le meilleur prix et la possibilité pour les investisseurs de réaliser des investissements à long terme avec une sécurité de prix, à la hausse et à la baisse, comme à peu près toutes les technologies, qu'elles soient renouvelables, nucléaires ou fossiles, le demandent aujourd'hui.

Nous avons été un très grand acteur du solaire. Nous le sommes toujours dans le solaire pour toiture, dont nous sommes le premier acteur, avec notamment l'offre « Mon soleil & moi ». Sur le solaire au sol, nous avons été très forts hors de France mais, paradoxalement, pour des raisons que je pourrais développer, depuis 2012, nous avons levé le pied en France. Avec le plan solaire décidé par Jean-Bernard Lévy à la fin de 2017, notre intention est de redevenir un leader du solaire en France. Là aussi, les procédures ont fait des progrès. Les questions de la taille et du foncier restent des points d'attention pour beaucoup d'acteurs. La PPE, qui prévoit de l'ordre de 50 000 MW à l'horizon 2028, fixe un objectif qui appelle environ 50 000 hectares, soit 500 kilomètres carrés. C'est à la fois beaucoup et à l'échelle de notre pays. Nous voulons croire que c'est possible. Les évolutions en cours de réflexion pour l'éolien, sur le repowering ou pour le solaire sur la taille typique des projets nous paraissent aller dans le bon sens.

Je terminerai mon propos introductif en évoquant les enjeux de croissance, qui sont d'ordre économique, industriel et environnemental.

Concernant l'enjeu économique, il est vrai que les énergies renouvelables électriques ont coûté cher et que cela se ressent toujours sur les finances publiques. Après la contribution au service public de l'électricité (CSPE) à une époque, c'est maintenant la contribution climat énergie (CCE), et vous le savez bien mieux que nous. Mais il convient de souligner que les coûts de ces énergies, qu'il s'agisse de l'éolien ou du solaire, ont beaucoup baissé. Il y a quelques jours, le président de la commission de régulation de l'énergie (CRE) parlait d'une gamme de prix de 60 à 80 euros par mégawattheure, et l'on constate même des appels d'offres solaires ou éoliens légèrement inférieurs. Dans un coût du solaire de 55 euros par mégawattheure, il y a encore environ 15 euros par mégawattheure de taxe locale. Oui, il y a eu un coût. Les décisions passées ont encore un coût aujourd'hui, en particulier un coût allemand - les Allemands ont beaucoup payé l'apprentissage du solaire – mais elles ont permis l'émergence d'une filière. Aujourd'hui, force est de constater que le solaire et l'éolien sont proches de la monnaie, ici, en France, et, a fortiori, dans d'autres endroits du monde. Et si on imaginait un bon prix du CO2, elles seraient encore plus proches de la monnaie.

Le Parlement avait fixé l'objectif de 20 % de renouvelables en 2020 et de 32 % en 2030, dont 40 % d'électricité en 2030 et, naturellement, notre groupe s'inscrit dans ce cadre législatif. Une PPE qui prévoit davantage d'électricité décarbonée nucléaire – je le dis clairement – et renouvelable nous paraît aller dans le bon sens, quand on considère les euros publics par tonne de CO2 évités.

L'enjeu est aussi industriel. Selon les chiffres publics de la Cour des comptes et de l'ADEME, la part de valeur ajoutée française dans les filières renouvelables serait de 35 à 45 %. C'est à la fois plus que ce qu'on imagine, moins que le cas du nucléaire ou de l'hydraulique et plus que les énergies fossiles. En tant que propriétaire de Photowatt qui, à Bourgoin-Jallieu, dans l'Isère, emploie quelque deux cents personnes pour produire des panneaux photovoltaïques, nous ne pouvons que souhaiter que les autorités françaises et communautaires défendent leur industrie, au même titre que les autorités chinoises, indiennes, américaines le font sans hésitation.

Je finirai par les enjeux environnementaux, que nous considérons comme très importants. J'évoquerai sans exhaustivité les paysages, la biodiversité et les déchets.

S'agissant des paysages, il va de soi qu'il y a des enjeux autour de l'éolien terrestre et maritime. Parmi nos savoir-faire figurent le choix des sites et la concertation. Il faut avoir beaucoup d'humilité dans ce domaine. Nous nous efforçons d'avoir cette humilité et de pratiquer la concertation. Sans être parfaites, nos relations avec les territoires nous paraissent bonnes. C'est notamment le cas en ce qui concerne les projets éoliens maritimes, pour lesquels les choses se passent relativement bien. Cela ne veut pas dire que c'est facile partout, mais partout nous voulons cette concertation, dont nous reconnaissons la légitimité. Nous y sommes attentifs, même dans des cas sensibles, comme actuellement au Blayais.

La biodiversité est un autre sujet. Pour le solaire ou l'éolien, terrestre ou maritime, il y a des enjeux de faune, de flore. Cela fait partie aussi des savoir-faire de nos équipes que d'identifier, prévenir, limiter les risques pour la faune et pour la flore.

Enfin, si les déchets représentent des filières relativement jeunes, il est déjà temps de penser au recyclage. Pour le solaire, 95 % du contenu d'un panneau solaire peuvent être recyclés, les 5 % restants ne l'étant pas principalement pour des raisons économiques et non pour des raisons technologiques ou de dangerosité. Pour l'éolien, 97 % peuvent être réutilisés ou recyclés. Ce qui ne l'est pas est valorisé sous forme d'énergie, ce qui est mieux que rien. Ce sont les parties composites des pales qui, pour le moment, n'ont pas d'autre exutoire. Au total, le coût de démantèlement d'une éolienne est estimé à 50 000 euros, c'est-à-dire environ moins de 5 % de son coût total, selon sa puissance. Il est naturellement intégré et provisionné dans nos plans d'affaires.

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. Lorsque EDF a commencé à s'intéresser aux énergies renouvelables, quel était le portefeuille de l'ancienne SIFF ? Quelle est l'augmentation du potentiel depuis dix à quinze ans ?

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Bruno Bensasson, président-directeur général d'EDF Renouvelables

. Je ne dispose pas de tout l'historique mais pour les dernières années, je peux vous dire que nous avons connu un rythme soutenu depuis le lancement de « Cap 2030 ». Pour les trois dernières années, nous avons ajouté à notre portefeuille, qui est aujourd'hui, à travers le monde, de 8 500 MW net, de l'ordre de 800 MW net, soit 10 %, par an. Pour les trois années précédentes, le rythme était sensiblement identique. Nous avons donc continué à croître à bon rythme, selon des modèles un peu différents. Il y a eu des époques très « solaires », puis « éoliennes » et nous revenons vers le solaire maintenant qu'il est vraiment à bon coût. Il y a eu des époques très nord-américaines et nous revenons aujourd'hui vers les pays émergents et l'Europe. S'agissant du solaire, il y a eu beaucoup de toiture et nous avons aujourd'hui un mix plus équilibré entre toiture et sol. Sans revenir à 2004 et à la création de SIFF, l'aventure commune a permis à EDF de faire de ces nouvelles énergies renouvelables, en plus de l'hydraulique qui est au cœur de notre mix, un élément à part entière du mix, en complémentarité du nucléaire dans notre pays-cœur, la France, et souvent en avant-garde dans beaucoup de pays du monde, notamment en Amérique du Nord, en Amérique latine, aujourd'hui au Maroc, au Moyen-Orient, en Inde, en Chine.

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. Quelle est aujourd'hui la valeur de l'entreprise ?

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Bruno Bensasson, président-directeur général d'EDF Renouvelables

. EDF Renouvelables n'étant plus cotée, je ne saurais vous en indiquer la valeur. Nous avons 8 000 MW net, avec une rentabilité tout à fait décente qui, pour reprendre les termes de la loi française, est adaptée, compte tenu du risque. Nos modèles d'affaires sont à risque modéré, donc à rentabilité modérée.

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. Quelle était la valeur d'acquisition originelle ?

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Bruno Bensasson, président-directeur général d'EDF Renouvelables

. Nous vous l'indiquerons par écrit. J'aurais pu dire, et ce n'est pas une excuse, que j'ai rejoint et dirige EDF Renouvelables depuis un an et je n'ai pas repris la valeur d'acquisition de 2008.

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. De mémoire, l'entreprise était possédée par M. Mouratoglou et on avait évoqué un prix de rachat d'un milliard d'euros, ce qui semblait énorme au regard de 8 000 MW. Comme vous avez eu une forte progression d'installation, nous essayons de comprendre, dans cette commission d'enquête, le mécanisme de formation de la valeur ajoutée d'entreprises du renouvelable.

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Bruno Bensasson, président-directeur général d'EDF Renouvelables

. Mettons qu'un mégawatt éolien vaille un million d'euros, tandis que les coûts d'un mégawatt solaire ont beaucoup baissé. Il est difficile d'intégrer tous ces coûts puisque, sur cette quinzaine d'années, ils ont beaucoup baissé, mais ce sont aujourd'hui, ces ordres de grandeur. EDF Renouvelables peut faire cette croissance par sa valeur ajoutée et parce que le groupe EDF a pris le parti de financer cette croissance renouvelable dans un rééquilibrage de son mix. Par conséquent, EDF Renouvelables croît à la fois en autofinancement et par le soutien de son actionnaire EDF rééquilibrant son mix, ceci dans des conditions d'investissement raisonnables, rentables, mais sans rentabilité excessive.

La valeur ajoutée de nos équipes réside dans la capacité à bien choisir et sécuriser des sites, à bien concevoir, dessiner, accompagner la construction, exploiter, maintenir des installations, à bien négocier et acheter des équipements et, en dernier ressort, à bien financer et parfois céder nos actifs, tout ce qui fait le savoir-faire de nos équipes.

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. Les mécanismes d'aide et de tarifs de rachat qui existaient pour les petits parcs éoliens donnent une visibilité sur plusieurs années, avec un revenu garanti. Cela ne produit pas mécaniquement, sous forme de valorisation actualisée nette, une augmentation de la valeur de l'entreprise. Posséder cinquante éoliennes dont on sait que, pendant vingt ans, elles donneront lieu à un prix de rachat, cela se monnaie.

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Bruno Bensasson, président-directeur général d'EDF Renouvelables

. Cela a bien sûr de la valeur, que ce soit avec un tarif administré ou un tarif après appel d'offres. L'avantage d'intérêt général de l'appel d'offres, c'est qu'il permet aux États, en France et ailleurs, de créer la compétition et aux investisseurs d'être sécurisés. Ce bénéfice de la sécurité, quand la concurrence joue, se traduit par moins de risque, donc par un coût du risque moindre, donc par moins de coûts. Quand on répond à un appel d'offres dans une tension concurrentielle, le fait que le prix soit sécurisé pour une partie de la durée de vie de l'installation réduit le coût du risque, ce qui bénéficie au consommateur, qu'il soit consommateur d'électricité ou contribuable. L'appel d'offres et le tarif administré sur la durée de l'appel d'offres offrent un bon équilibre.

Je crois pouvoir dire au titre du groupe que les porteurs de toutes les technologies à travers le monde sont attachés à la sécurité. Quand vous investissez pour vingt, trente, quarante, voire soixante ans, vous avez besoin de sécurité. Les prix de marché de l'électricité donnent une visibilité à deux ou trois ans, ce qui n'est même pas la durée d'installation. Que l'on opère dans l'hydraulique, l'éolien ou le nucléaire, on cherche à obtenir des prix pas trop volatils.

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. Si on supprimait les mécanismes d'aide en laissant jouer purement le marché, sans élastique pour rattraper la volatilité, votre entreprise resterait-elle viable ?

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Bruno Bensasson, président-directeur général d'EDF Renouvelables

. À travers le monde, aujourd'hui, qu'il s'agisse de renouvelables, de nucléaire ou de thermique, et même au-delà de l'énergie électrique, très peu d'investissements à vingt, trente, quarante ou soixante ans se font sur la base de prix de marché volatils. En France, nous nous inscrivons naturellement dans le cadre de la PPE. Nous voulons contribuer à ces 40 % d'électricité renouvelable. Des mécanismes de type appels d'offres permettent d'obtenir ces renouvelables au meilleur prix. Le fait que l'investisseur soit sécurisé, ce qui est un transfert de risque – il est sécurisé si le prix baisse mais celui-ci peut aussi monter – a plutôt tendance à réduire le risque perçu, donc le coût du risque, donc le coût.

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. À vous écouter, la nature inhérente des énergies intermittentes et la longueur des investissements font que, de toute façon, un subventionnement public ou un mécanisme de garantie sera toujours d'actualité ?

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Bruno Bensasson, président-directeur général d'EDF Renouvelables

. C'est ce qu'on observe à travers le monde. Je ne dirai pas que c'est spécifique aux énergies intermittentes, parce que les centrales à gaz ont recherché une rémunération de capacité. Il est notoire que notre entreprise, s'agissant du nucléaire, cherche un mécanisme de régulation qui soit plus équitable, qui équilibre la solidité financière de notre entreprise et les enjeux des consommateurs dans un corridor de prix, surtout dans la mesure où il s'agit d'investissements à très long terme, soumis à concurrence. Le prix spot a des vertus. Il permet de placer l'électricité au bon moment dans la journée, dans la semaine, voire dans l'année, mais dans aucun pays du monde il n'a permis de diriger des investissements.

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. Alors que certains experts ont soutenu ici l'idée que la volatilité des prix rendait nécessaire le lissage par un système public, pour vous, c'est plutôt lié au fait que l'investissement porte sur une longue période de temps et soit fortement capitalistique.

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Bruno Bensasson, président-directeur général d'EDF Renouvelables

. Cela n'est pas contradictoire. C'est moins lié au fait que les prix bougent dans l'année, qu'à l'incertitude à moyen et long terme, laquelle vaut pour tous les actifs longs, voire beaucoup d'autres secteurs de l'économie. Je me permettrai de nuancer le mot de « subvention ». Quand, au Brésil ou au Moyen-Orient, un appel d'offres prévoit des prix garantis, qui ressortent à 20, 25 ou 30 euros le mégawattheure, comme c'est le cas en Inde, j'appelle plutôt cela un système de régulation et d'appel d'offres public qu'un subventionnement. Dans nos systèmes électriques, compte tenu de la baisse du coût des renouvelables, il est efficace de lancer ces appels d'offres.

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Bruno Bensasson, président-directeur général d'EDF Renouvelables

. L'électricité a toujours un coût.

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. Un coût pour les finances publiques ! Avec un financement par la CSPE ou la contribution climat énergie, il y a bel et bien à un moment donné quelqu'un qui paie.

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Bruno Bensasson, président-directeur général d'EDF Renouvelables

. Ce coût, tel qu'on le voit aujourd'hui dans les finances publiques françaises, est beaucoup lié aux investissements passés de la période 2000-2012. Concernant le Brésil, il y a bien un mécanisme par lequel les Brésiliens paient l'électricité, mais l'auraient-ils payée moins chère sans ces renouvelables ? Je ne le crois pas. Si on regarde les prix de l'électricité qui ressortent des tarifs, j'admets que tant qu'on est encore dans les 50 à 60 euros le mégawattheure, il y a non seulement une sécurité mais un soutien public. Celui-ci est sans doute nécessaire si on veut atteindre les 32 ou 40 % d'électricité renouvelable à l'horizon 2030.

Quand on compare avec d'autres solutions, il y a évidemment de la place pour l'efficacité énergétique, le bois-chaleur, les biocarburants ou le biogaz, mais il faut considérer l'euro public par tonne de CO2 économisé. L'éolien maritime va aussi se rapprocher de la monnaie. Sans faire trop de technique, si on souhaite que le prix du CO2 ne soit pas à 20 euros, comme il l'est sur les marchés, mais plus près de ce que France Stratégie a proposé ou de ce que le Parlement a voté au travers de la contribution climat énergie, cela représente en France, compte tenu des liens, 10 euros par mégawattheure. On se rapproche de la monnaie et surtout, à titre d'entreprise, on s'inscrit dans la loi telle qu'elle est fixée.

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. Je ne vous parle pas de la loi, que je connais bien pour l'avoir suffisamment combattue. La facture d'électricité a augmenté de 44 %. Vous dites : « Les consommateurs l'auraient-ils payée moins cher » ? Ma réponse est « oui ». Une CSPE est passée par là, qui a principalement servi à financer des énergies intermittentes vertes. Par définition, il est plus cher pour le consommateur d'avoir un tel mix.

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Bruno Bensasson, président-directeur général d'EDF Renouvelables

. Il est sûr que financer du solaire à 500 ou 600 euros le mégawattheure - vous en avez parlé ici, on l'a appelé « la bulle » - a eu un coût que les Français continuent de payer. Mais je m'inscris dans le présent et dans le futur.

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. Après que nous avons beaucoup payé pour l'émergence d'une filière, puisque vous avez expliqué que les prix s'orientaient tendanciellement vers le prix du marché, qu'est-ce qui justifie qu'on continue à subventionner ou, si vous préférez, à aider ou à garantir ? J'essaie de définir les conditions qui permettraient d'arrêter. Soit c'est lié à l'intermittence, et comme les énergies seront toujours intermittentes, on pourra arrêter quand le stockage sera devenu possible, soit c'est lié au fait qu'il s'agit d'un investissement long, et on n'arrêtera jamais. Si on arrêtait aujourd'hui, parviendriez-vous à faire sans ?

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Bruno Bensasson, président-directeur général d'EDF Renouvelables

. Je ne tenterais pas l'expérience. Dès lors que le Parlement a fixé une trajectoire, les appels d'offres permettent d'obtenir le meilleur coût. Je note de nouveau que ce n'est pas spécifique aux intermittents.

Au-delà des enjeux technologiques, nous croyons beaucoup au stockage et nous en ferons. Mais comme il vit des écarts, où les prix sont encore plus volatils que la moyenne, il sera difficile de faire du stockage face au marché.

Quant aux investissements longs, que l'on songe, par exemple, aux autoroutes ou aux aéroports, peu sont soumis aux prix des commodités de tous les jours. On pourrait citer le pétrole, sauf que son prix est assez bien tenu.

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. On n'a pas confié les autoroutes aux entreprises privées en leur garantissant un prix. On les a d'abord fabriquées, puis on les a concédées.

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Bruno Bensasson, président-directeur général d'EDF Renouvelables

. En tout cas, je note qu'il est rare que les investissements longs soient soumis au prix de marché. C'est un peu le cas de l'immobilier.

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. Je n'ai pas bien compris à quel moment, selon vous, on peut arrêter le subventionnement, mais je vais arrêter avec cette question.

Quand on dit que l'éolien revient à 60 euros le mégawattheure, ce coût intègre-t-il le coût du stockage de l'énergie intermittente afin de la libérer au moment idoine ?

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Bruno Bensasson, président-directeur général d'EDF Renouvelables

. Aujourd'hui, le coût de l'éolien et du solaire tel qu'il ressort des appels d'offres intègre le coût des machines. S'il n'y a pas de stockage, il n'y a pas de coût de stockage intégré. Si on ajoutait du stockage, on l'intégrerait. Comme vous le suggérez, cela aurait un coût en plus mais aussi un bénéfice en plus qui serait de fournir de l'électricité de quinze heures à dix-neuf heures. Mais en l'état actuel de l'écart de prix entre quinze heures et dix-neuf heures, malheureusement, une batterie n'est pas encore rentable. Cela dit, comme les batteries connaissent une baisse de prix de l'ordre de 15 % par an, comme le solaire l'a connu, ce jour viendra peut-être.

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. Vous êtes dans une position intéressante, non pas en tant qu'EDF Renouvelables mais en tant que partie du groupe EDF. On parle beaucoup de complémentarité entre le nucléaire et les énergies vertes, et l'on invite à ne pas les opposer. Lors de notre précédente audition, M. Jancovici, un expert de l'énergie, nous expliquait que c'était de la fumisterie et qu'en comparant des énergies pilotables et des énergies non pilotables, on comparait des choux et des carottes et qu'on allait additionner les coûts fixes de l'énergie pilotables, qu'on utiliserait moins mais qu'on serait obligé de garder, et une énergie non pilotable qu'on n'utiliserait pas toujours au bon moment en l'absence de stockage, en sorte qu'on augmenterait ainsi indéfiniment la facture d'électricité. Quel est votre argument en faveur de la complémentarité, hormis le fait que la main gauche peut financer le nucléaire et la main droite, les énergies renouvelables ?

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Bruno Bensasson, président-directeur général d'EDF Renouvelables

. Je n'ai pas eu la chance d'entendre Jean-Marc Jancovici. Par ailleurs, je m'inscris dans la politique de complémentarité du groupe. Si vous avez regardé mon parcours professionnel, vous comprendrez que je ne taperai pas sur le nucléaire tel qu'il existe.

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. Justement, vous avez un excellent parcours pour défendre la complémentarité que M. Jancovici a démolie.

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Bruno Bensasson, président-directeur général d'EDF Renouvelables

. En ce qui concerne les renouvelables, il importe de reconnaître, et EDF s'inscrit dans ce champ, que la France a pris le parti de diversifier son mix électrique et, si l'on suit la projection de la PPE, de plus d'électricité, ce qui nous paraît très bien. La France a choisi de diversifier son mix pour tendre vers 50 % de nucléaire, si la loi est votée, en 2035, plutôt qu'en 2025. Notre groupe s'est exprimé sur ce décalage. Une fois ce décalage acté, il faut préférer avoir, à côté du nucléaire, des renouvelables plutôt que du charbon et du gaz. Notre pays a choisi de sortir rapidement du charbon et de ne plus faire de gaz. Nous nous inscrivons dans la loi. Je ne reviens pas sur l'année 2010, mais le développement des renouvelables solaires et éoliens, avec 55 % de solaire, est très proche du marché.

Je ne doute pas que M. Jancovici soit désireux d'avoir un vrai prix du carbone. Les experts estiment qu'il devrait être de 100 euros par tonne de CO2. Je n'ignore pas les enjeux intergénérationnels. Or si vous payez 100 euros par tonne de CO2, c'est-à-dire 80 euros de plus qu'aujourd'hui, vous augmentez le prix français de l'électricité de 40 euros par mégawattheure. Je vous assure que l'éolien et le solaire sont compétitifs face au marché, en dépit de leur intermittence, que je reconnais. Peut-être qu'un jour le stockage aidera mais en attendant, face au marché, dans de telles conditions, ils seraient compétitifs. Ces dernières années, le solaire et l'éolien, en France et dans le reste de l'Europe, se seront développés d'abord, et c'est heureux, au détriment du charbon et un peu du gaz. Aujourd'hui, la plupart du temps, les prix en Europe et en France sont faits par une centrale charbon ou gaz allemande et pas française.

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. Le cadre législatif prescrit de faire du renouvelable. Le groupe EDF a fait le choix d'investir dans cette filière. Mais imaginons que je sois un producteur de diligences et que le législateur dise qu'il faille introduire la voiture. Vous décideriez d'avoir une branche qui continue à faire des diligences et une branche qui commence à faire des voitures. M. Jancovici estime qu'il n'y a pas complémentarité et que ce doit être l'un ou l'autre. Il peut être contradictoire d'avoir dans la même entreprise des producteurs de produits concurrents. Soit il y a complémentarité et M. Jancovici a tort, soit votre analyse économique conduit à considérer que ce ne sont ni les mêmes usages ni les mêmes personnes et qu'on peut très bien développer les deux. Puisque vous avez fait le choix de développer les deux, vous croyez en la complémentarité. D'un autre côté, on nous dit que cela nuit au modèle économique du nucléaire. Je n'imagine pas une minute qu'EDF puisse développer une activité dont elle saurait pertinemment qu'elle casse son modèle d'origine. Les représentants de Total nous ont expliqué pourquoi ils investissaient dans les énergies de demain. Quelle est votre défense ? En quoi pour vous est-ce complémentaire ?

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Bruno Bensasson, président-directeur général d'EDF Renouvelables

. De même que certains acteurs font du pétrole, du gaz et de l'électricité, de même, pour produire de l'électricité, pouvons-nous faire du nucléaire et des renouvelables. La question de l'intérêt de la diversité et de la complémentarité d'un mix nucléaire-renouvelables, relève d'abord des pouvoirs publics. Ce sont les pouvoirs publics qui fixent le mix. En tant qu'EDF, nous avons fait le choix de nous inscrire dans le mix français.

Pour prendre une autre métaphore, est-ce qu'il a mieux valu que Kodak se concentre sur le film argentique menacé par le numérique, ou est-ce que Kodak n'aurait pas pu garder une expertise argentique et une expertise numérique ? Aujourd'hui, les diligences ont disparu, mais nous croyons en un futur qui ressemble à celui dessiné par la PPE, avec à la fois du nucléaire et des renouvelables. Nous savons que nous pouvons créer de la valeur dans ces deux domaines. Notre groupe a bien l'intention de rester le leader de l'électricité en France et, dans un mix avec 50 % de nucléaire et 50 % de renouvelables, nous avons l'intention d'être un leader dans les renouvelables.

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. On nous a également pointé le fait que les garanties d'origine sur l'électricité verte ne suivaient pas le kilowattheure acheté par l'acheteur mais allaient dans l'escarcelle de l'État, pour les appels d'offres, ou dans l'escarcelle d'EDF, pour les tarifs de rachat, et que ces garanties d'origine n'étaient pas forcément valorisées par EDF, mais revendues sur un marché dérivé des garanties d'origine. Quel est votre point de vue sur le mécanisme des garanties d'origine qui, du fait de la loi, ne suivent pas le kilowattheure acheté. Si La Poste achète de l'électricité verte à un parc éolien terrestre, c'est l'État ou EDF qui a la garantie verte. Comme La Poste a un kilowattheure gris, elle est obligée d'acheter sa garantie d'origine à un voisin étranger ou directement de l'électricité à un voisin étranger.

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Bruno Bensasson, président-directeur général d'EDF Renouvelables

. L'intention du législateur ou du réglementeur a été d'éviter des effets d'aubaine par lesquels les producteurs de renouvelables auraient été rémunérés deux fois : une première fois par un tarif garanti au titre d'un guichet ouvert ou d'un appel d'offres, une seconde fois par la revente de garanties d'origine. Si des développements renouvelables sont faits sans le soutien de personne, ce qui peut être le cas dans l'hydraulique, le producteur a sa garantie et en dispose.

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Élodie Perret, chargée des relations institutionnelles d'EDF Renouvelables

. Jusqu'en 2017, si un producteur d'énergie renouvelable valorisait sa production sur le marché des garanties d'origine, sa rémunération était déduite du tarif d'achat, afin que celui-ci soit toujours le même. Depuis 2017, la loi prévoit que si un producteur d'énergie renouvelable veut valoriser ses garanties d'origine sur le marché, il doit renoncer à son contrat d'achat ou à son contrat de complément de rémunération. Il n'a donc aucun intérêt à le faire. Une installation qui est sous contrat d'achat ou de complément de rémunération doit être référencée électroniquement sur un registre qui appartient à l'État. Cette garantie d'origine n'appartient pas au producteur, puisqu'il y a autant de garanties d'origine que de productions renouvelables. Les garanties d'origine figurent donc sur le registre de l'État qui lance des enchères, lesquelles peuvent être achetées par n'importe quel industriel souhaitant dire qu'il s'approvisionne avec de l'électricité renouvelable. On paie un supplément par suite de l'achat de cette différence. Les revenus de ces enchères générés par l'État viennent alimenter le compte d'affectation spéciale destiné à financer la transition énergétique et le développement des énergies renouvelables.

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. Le compte d'affectation spéciale est ainsi alimenté ?

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Élodie Perret, chargée des relations institutionnelles d'EDF Renouvelables

. En partie. Pas pour une grosse part.

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. C'est fondu dans le transfert budgétaire. Tout est mélangé.

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Élodie Perret, chargée des relations institutionnelles d'EDF Renouvelables

. C'est une partie assez faible.

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. L'État le revend et affecte le produit de la vente au compte d'affectation spéciale.

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Élodie Perret, chargée des relations institutionnelles d'EDF Renouvelables

. L'État met mensuellement aux enchères ces garanties d'origine et en tire des revenus qui sont affectés à ce compte.

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. Ne trouvez-vous pas que c'est une usine à gaz ? Imaginez que je produise du jambon de Bayonne, produit auquel est attaché un label de qualité. Je vends mon jambon mais le label de qualité ne part pas avec le jambon. Je le donne à celui qui a subventionné la production, lequel revend le label à je ne sais pas qui, au motif que, dans la production globale de jambon, il y a 10 % de jambon de Bayonne et que le label peut être revendu à quelqu'un qui peut consommer du jambon pas du tout de Bayonne et pas bio. On marche sur la tête ! Un tel dispositif vous semble-t-il logique ?

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Bruno Bensasson, président-directeur général d'EDF Renouvelables

. Nous nous inscrivons dans le cadre législatif et règlementaire.

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. Depuis le début, vous nous dites que vous suivez le cadre législatif à la lettre. Je vous en félicite mais nous sommes ici pour le faire changer.

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Bruno Bensasson, président-directeur général d'EDF Renouvelables

. S'agissant de la PPE, nous avons participé à la construction d'une vision et il est bien que les parties y participent. Mais une fois le cadre posé, nous nous inscrivons dedans. Éviter les doubles comptes est un principe. Le Parlement avait posé le principe d'une rentabilité normale. Il faut éviter les rentabilités anormales. Mais il y a peut-être moyen de faire plus simple.

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. Si on supprimait l'aide publique, ce que vous n'appelez pas subvention mais ce que je qualifie du gros mot de « subvention », en rémunérant les acteurs par la garantie d'origine, cela ne le remplirait pas de joie, parce que c'est visiblement un revenu très mince.

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Bruno Bensasson, président-directeur général d'EDF Renouvelables

. Vous maniez aussi bien la métaphore que l'euphémisme. Cela ne les remplirait pas de joie, parce qu'on se retrouverait avec la forte volatilité du prix de marché, sans doute accrue car l'équilibre entre l'offre et la demande dépend de la demande de garanties d'origine. De fait, aujourd'hui, le prix de la garantie ne permettrait pas du tout de rémunérer. Cela pourrait s'envisager si les clients avaient envie de payer très cher la garantie, mais on en est loin.

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. Estimez-vous qu'on investit suffisamment aujourd'hui dans la recherche, aussi bien pour les EnR que pour le stockage ?

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Bruno Bensasson, président-directeur général d'EDF Renouvelables

. Nous avons à notre actif un effort important et historique dans le domaine de la recherche et du développement électrique, sans doute peu égalé dans le pays, à hauteur de 600 millions d'euros par an. Il est diversifié mais le stockage et les énergies renouvelables en font partie. J'en atteste puisque j'en suis un client.

Nous travaillons avec le commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA), nous contribuons au financement de l'institut photovoltaïque d'Ile-de-France (IPVF). Nous avons des programmes communs. Est-ce suffisant ? En tout cas, le solaire a fait de très gros progrès, mais la question est de savoir si nous pourrions avoir plus d'industrie en France. Le stockage a fait des progrès mais il n'a pas encore atteint un niveau compétitif.

Le groupe travaille aussi sur l'électrification de l'économie. Il est bien de faire des renouvelables électriques ou de l'électricité décarbonée avec le nucléaire, mais si les courbes de CO2 en France mais surtout à travers le monde n'ont pas l'inflexion voulue, c'est parce que les transports et le bâtiment ne fonctionnent pas uniquement, loin s'en faut, avec de l'électricité renouvelable. Stockage, véhicules électriques, rénovation des bâtiments sont autant de domaines dans lesquels les technologies ne sont pas encore économiquement faciles. Qui dit pas facile économiquement dit subventions, budget de l'État et résistances.

(M. Vincent Thiébaut, vice-président de la commission, remplace M. Julien Aubert à la présidence.)

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. Puisque vous investissez beaucoup dans la recherche, quels sont vos pourcentages d'investissement dans ces différentes solutions ? Cette répartition correspond-elle à ce que font ceux qui investissent dans la recherche ?

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Bruno Bensasson, président-directeur général d'EDF Renouvelables

. Je ne peux m'exprimer que sur la partie des renouvelables. Pour le reste, nous vous fournirons des éléments ultérieurement.

Dans le domaine des renouvelables nous travaillons sur le stockage, l'optimisation solaire plus stockage, l'évolution des panneaux, l'optimisation des champs – le président a cité le solaire flottant –, le solaire bifacial, quand les deux faces du panneau produisent de l'électricité. Nous travaillons aussi sur l'éolien, notamment l'éolien maritime pour optimiser nos fondations, l'hydraulique, l'optimisation industrielle de nos actifs hydrauliques et les enjeux environnementaux autour de l'hydraulique. Je n'en ai pas les pourcentages précis ni le rapport avec le reste des recherches de notre groupe.

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Bruno Bensasson, président-directeur général d'EDF Renouvelables

. Nous travaillons surtout sur la résistance, la durabilité, le cyclage et le recyclage des batteries, mais plus en utilisateurs qu'en fabricants. Nous ne nous définissons pas comme un fabricant de batteries.

Store and Forecast, une spin off qui est sortie de la R & D, travaille sur la partie logiciel du stockage, sur le power management system (PMS ), c'est-à-dire l'optimisation des blocs de batteries, en température, en charge et décharge, et sur l' energy management system (EMS), qui articule le stockage avec la demande du client, la production solaire, voire une réserve diesel. Cela fait partie de nos travaux de R & D, plutôt sur la partie soft que sur la manufacture de batteries.

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. Où en sont vos recherches sur les smart grids et d'autres solutions de stockage dans le chaud, le froid, le sol et les fonds marins ?

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Bruno Bensasson, président-directeur général d'EDF Renouvelables

. Je préfère ne pas m'avancer sur ces sujets, compte tenu du respect de la séparation fonctionnelle. Les smart grids sont l'activité de commerce d'Enedis, notre filiale de distribution. Les sujets relatifs à la chaleur sont l'apanage de mes collègues de Dalkia. L'hydraulique, l'éolien et le solaire sont mes cœurs d'activité.

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. Estimez-vous que les EnR thermiques destinées à remplacer les consommations carbonées liées au chauffage sont assez soutenues ?

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Bruno Bensasson, président-directeur général d'EDF Renouvelables

. Comme je l'ai indiqué, l'émission de carbone provient de plus en plus du logement et du transport, et je n'ai pas oublié la chaleur renouvelable dans mon introduction. Nous avons toujours soutenu le fonds chaleur, qui va dans la bonne direction. Les pompes à chaleur font l'objet de notre programme « Mon chauffage durable ». L'investissement étant rentable dans la durée, nous aidons nos concitoyens à sortir du fioul au profit des pompes à chaleur. Cela réduit le marché du fioul mais je note que cela n'empêche pas les pétroliers de s'y intéresser. Dalkia contribue au développement du biogaz. Nous n'ignorons pas le débat sur le rythme de baisse du coût du biogaz. Les pouvoirs publics ont beaucoup appris des bulles précédentes. Il faut être attentif et lui laisser sa chance tout en veillant à ce que l'euro public par tonne de CO2 économisée reste mesuré. Cela relève du choix des pouvoirs publics. Mais pour la chaleur et les réseaux de chaleur, beaucoup de dispositifs sont mis en place. La chaleur renouvelable, c'est important.

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. On entend dire de plus en plus que la première des EnR, c'est l'économie d'énergie. Qu'en pensez-vous ?

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Bruno Bensasson, président-directeur général d'EDF Renouvelables

. Les mots ont leur importance et j'ai commencé par parler d'efficacité énergétique. C'est un autre programme. Ce sont des efforts anciens faits par notre maison. La campagne d'information et de communication que nous venons de lancer est ciblée sur l'efficacité énergétique, à partir du slogan « Le bonheur consomme généralement peu d'électricité ». Notre groupe entend ainsi montrer l'importance de l'économie d'énergie. Il est l'un des premiers investisseurs dans les certificats d'économies d'énergie (CEE). Il vient de lancer Easybail EDF, qui veut aller plus loin dans l'économie d'énergie.

Comme les mots ont leur sens, j'appellerai plutôt cela une économie d'énergie. Comme toute solution, son coût doit être mesuré. S'il était facile de rénover 500 000 logements pour les amener à 50 kWh par mètre carré et par an, cela aurait déjà été fait. Ces investissements ne sont pas réalisés assez vite, que les immeubles soient publics ou privés, en raison du coût de l'investissement. Dans ce grand gisement, il y a des actions faciles d'accès, tel que le remplacement des chaudières au fioul par des pompes à chaleur. Il y a des gestes simples. Il y a de l'isolation. C'est une très bonne politique dans laquelle EDF est fortement investi, mais je ne la qualifierai pas d'énergie renouvelable.

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On a l'impression que la sobriété énergétique a deux formes, dont la forme noble serait la production d'électricité, quelle qu'elle soit. La sobriété électrique ne sera pas prise en compte tant qu'on ne concevra pas que c'est une forme de production. Or la sobriété est une forme de production d'énergie disponible pour autre chose.

M. Jancovici a estimé que, le développement des EnR électriques, qui ne contribue aucunement à la lutte contre le réchauffement climatique, ne devrait pas faire l'objet d'investissements publics, lesquels devraient être uniquement dédiés aux investissements liés à la lutte contre le CO2.

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Bruno Bensoussan

. Je reviendrai brièvement sur le point précédent. Il est important de communiquer et d'agir sur l'efficacité énergétique, mais cela passe-t-il par du renouvelable ? Le mot est joli et je le porte, mais l'efficacité énergétique et la sobriété se voient encore moins que l'électricité. L'isolation, le remplacement des fenêtres entreront dans le PIB, mais tourner le bouton, régler correctement le chauffage et la climatisation contribueront à la satisfaction des gens mais pas directement au PIB. Si on intégrait un vrai prix du CO2, peut-être que cela se verrait mieux.

Même si M. Jancovici est un grand expert, je ne considère pas qu'il reflète l'alpha et l'oméga de la politique énergétique. Je m'inscris dans la loi, laquelle a mis singulièrement en avant l'électricité renouvelable. Dans les 32 % de 2030, il y a 40 % d'électricité renouvelable. Ces chiffres ne sont peut-être pas assez connus mais ce sont ceux de la loi. Il y a également pas mal de chaleur et moins de biocarburants. Il ne m'appartient pas de refaire la loi, mais les électricités renouvelables ont vu beaucoup baisser leurs prix. Cette loi comporte un volet diversification du mix. Il ne m'appartient évidemment pas de commenter le choix du législateur de passer de 75 % à 50 % de nucléaire. Je redis que la France n'est pas isolée. Elle vit électriquement en Europe. La plupart du temps, ce qui fait le prix de l'électricité en France, ce sont les voisins, c'est-à-dire le charbon et le gaz. Si M. Jancovici regarde bien, il verra une forte corrélation entre le prix de l'électricité et le prix du CO2, pas au Danemark mais en France, qui tient au fait qu'il y a un vrai couplage. D'où sans doute un intérêt à développer les renouvelables en France, outre le choix du législateur.

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. Je voudrais vous interroger sur la stratégie d'EDF en matière d'énergies renouvelables. Avec le nucléaire, nous avons la chance d'avoir une production d'énergie décarbonée. Avec le développement des énergies renouvelables, le vrai sujet n'est pas de décarboner, mais la mixité énergétique. Nous rencontrons depuis quelques mois, en France, un problème d'acceptabilité des impositions et des taxes. L'État subventionne fortement le développement des énergies renouvelables par différents dispositifs sur la base d'un prix de marché d'environ 52 euros le mégawattheure. Les nouveaux contrats sont intéressants puisqu'ils intègrent un coût moyen de 60 à 65 euros pour l'éolien et de 55 euros pour le solaire, sachant que le coût de marché est aujourd'hui de 62 euros. En 2028, il est fort possible qu'on soit au-delà des 55 euros du coût du marché, en sorte que les contrats qui coûtent aujourd'hui pourraient rapporter de l'argent à l'État.

Je m'interroge sur la raison des subventions, car des pays développent les énergies renouvelables, pour différentes raisons, certes, pas toujours en fonction des mêmes problématiques sociales, économiques et géopolitiques que nous, mais sans subvention. Aujourd'hui, ne sommes-nous pas dans l'obligation de subventionner les EnR parce que notre tarification d'électricité n'est pas assez élevée ? De plus, cette tarification, qui a été remise en cause par la Cour des comptes, ne permet pas non plus la prise en compte du démantèlement et du renouvellement d'une partie du parc nucléaire actuel. Celle-ci indique qu'il faudrait vendre l'électricité nucléaire 60 euros le mégawatt, sachant que s'agissant de l'EPR de Flamanville, les premières estimations font état de 70 euros, en tenant compte du fait que c'est le premier projet de réacteur de ce type. La tarification actuelle permet-elle de renouveler notre colonne vertébrale qu'est le nucléaire ?

Enfin, est-ce que pour EDF, le développement des énergies renouvelables n'est pas le moyen de faire mieux accepter un niveau de tarification de l'électricité que si la production était tout nucléaire ?

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Bruno Bensasson, président-directeur général d'EDF Renouvelables

. Je reprendrai vos trois questions, sur la tarification, les subventions et la garantie d'un coût acceptable.

Concernant les subventions, peu nombreux sont les pays dans lesquels les énergies renouvelables se développent toutes seules. D'ailleurs, peu nombreux sont les pays dans lesquels les moyens de production électrique se développent sur la simple base d'un signal marché. Les pays dans lesquels l'électricité renouvelable est sans hésitation la plus compétitive, tels que le Brésil, le Maroc, les Émirats Arabes Unis, l'Inde ou la Chine, ont tous mis en place des mécanismes régulatoires, qu'on les appelle subventions ou pas. Quand, au Brésil ou aux Émirats un appel d'offres solaire sort à 20 dollars par mégawattheure, il bénéficie pour vingt ans d'un tarif garanti. Cela tombe bien parce qu'il n'y a pas de prix de marché aux Émirats arabes unis. Mais s'il y en avait un, il serait peut-être au-dessous ou en dessous mais il serait volatil et incertain.

Les appels d'offres, et des pays comme le Brésil ou les Pays-Bas en ont lancé plus tôt que nous, ont le mérite de faire jouer la concurrence, parce que les gens se bagarrent pour proposer un prix qui gagne, tandis que les tarifs administrés n'avaient pas cette vertu. Tantôt trop bas, il ne se passait rien, tantôt trop hauts, il y avait des bulles puis des surcoûts. Ils évitent à l'investisseur l'incertitude sur les prix à long terme, autrement dit le coût du risque. Dans le cadre d'un appel d'offres, cela permet de baisser le prix proposé. Les régimes de prix libres sont plutôt l'exception. Je songe à des structures d'appels d'offres, d'ailleurs pas si simples que cela, aux Pays-Bas ou en Allemagne, dans lesquels des gens pensent qu'ils pourront rémunérer les investissements sur la base des prix de marché. Cela présente au moins un inconvénient, à savoir que le gagnant n'est pas nécessairement le meilleur industriel mais souvent le plus optimiste sur les prix de marché. À la fin, quand il fait ses comptes, il s'aperçoit qu'il a détruit de la valeur. Les appels d'offres sont un schéma intéressant.

Ce qu'il manque au système électrique, et pas seulement renouvelable, c'est un prix du CO2 à la mesure des enjeux climatiques. Aujourd'hui, paradoxalement, on a en France, quatre prix du CO2 : le prix qui est la contribution climat énergie, le prix sur le marché européen, le prix à zéro par dérogation et le prix implicite dans toutes les politiques qui n'utilisent pas le prix du CO2 mais des normes. Je ne dis pas que c'est facile pour les générations présentes, je crois que les renouvelables électriques peuvent y contribuer en apportant des solutions à un coût compétitif. Mais cette incohérence des prix du CO2 est un sujet qui pèse sur le système et représente un petit dysfonctionnement.

Pour les acteurs des énergies renouvelables, la référence qui compte, c'est le marché de gros, car on vend son électricité soit sur le marché de gros, soit à un client susceptible d'acheter sur le marché de gros. Je ne mettrais pas cela en lien avec le tarif bleu tel qu'il existe, ni avec le tarif nucléaire dont vous savez que notre groupe souhaite vivement qu'il soit revu. Cela fait partie des chantiers qu'en novembre, le chef de l'État a confiés à Jean-Bernard Lévy, qui a encore récemment qualifié le dispositif très asymétrique d'accès régulé à l'électricité nucléaire historique (ARENH) de « vrai péril » pour notre entreprise. D'ailleurs, avec une certaine cohérence, nous souhaitons que le nucléaire soit rémunéré à un coût qui permette l'investissement dans la durée, comme vous l'avez dit, avec une visibilité, sans être soumis aux aléas du marché, en préservant à la fois la solidité financière de l'entreprise et l'intérêt des consommateurs, ménages et entreprises, dans un corridor de prix croissant avec l'inflation. Il est quand même original que l'ARENH ait été fixé en euros courants et n'ait même pas suivi l'inflation depuis sa création en 2010. De notre point de vue, il y a beaucoup d'amélioration à apporter du côté des tarifs, sans faire de lien direct avec le renouvelable.

Enfin, je suis d'accord avec vous sur le troisième point : notre stratégie des renouvelables est une stratégie de diversification - nucléaire plus renouvelables -, conformément au choix du Parlement. C'est sans doute, mais vous le savez mieux que moi, une des conditions d'acceptabilité et d'acceptation du mix électrique dans la durée. Je n'ai pas plus de commentaires à faire sur la diversité. Elle est une force dans les mix énergétiques, comme dans les entreprises et comme dans les sociétés.

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. La diversification de votre mix ne permet-elle pas aussi de minimiser les coûts potentiels de renouvellement, démantèlement, voire de stockage de la partie nucléaire ?

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Bruno Bensasson, président-directeur général d'EDF Renouvelables

. Je ne le dirai comme ça. Les coûts des déchets et du démantèlement nucléaire sont ce qu'ils sont. Ils ont fait l'objet de loi et d'un suivi attentif du Parlement et de la Cour des comptes. Le nucléaire a ses mérites propres, y compris au regard des coûts. Il a évidemment ses enjeux qu'il ne faut pas minimiser. Il y a évidemment des enjeux autour des déchets et de la sûreté, mais notre entreprise les gère avec excellence depuis des décennies. Le nucléaire doit être apprécié pour ses mérites - compétitif, français, sans carbone - et pour ses enjeux de sûreté et de déchets. Nous assumerons ces responsabilités quoi qu'il en soit. Et à côté de cela, nous développons des renouvelables.

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. Je ne dis pas qu'il faut passer aux 100 % non-nucléaire, mais le fait de passer de 25 à 50 % avec la stratégie fixée ne donne-t-il pas un peu plus de respiration au groupe EDF, auquel nous tenons tous ?

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Bruno Bensasson, président-directeur général d'EDF Renouvelables

. En tout cas, je peux vous assurer que la stratégie « Cap 2030 » fixée en 2015 donne beaucoup de souffle aux agents d'EDF et aux agents d'EDF Renouvelables. Il y a beaucoup d'enthousiasme autour des renouvelables dans le groupe, parce que le groupe ressemble à la France, où il y a aussi une envie de renouvelable.

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. Je suis député du Bas-Rhin, cette belle région d'Alsace. Une très belle filiale que je connais bien, Électricité de Strasbourg, développe la géothermie profonde. Nous évoquions le fonds chaleur. Il semble toutefois possible que la prochaine PPE remette en question la géothermie profonde. Je reconnais qu'avec un coût de 240 euros le mégawattheure, très loin du solaire à 55 euros, on peut s'interroger sur la géothermie profonde pour la pure production d'électricité. Quelle est votre position à ce sujet ? Vous concerne-t-il d'ailleurs directement ?

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Bruno Bensasson, président-directeur général d'EDF Renouvelables

. En tant qu'EDF Renouvelables, non. Ce n'est pas directement ma part et je préfère ne pas trop m'avancer. Le Groupe, à chaque fois qu'il le peut, apprécie la cogénération, qui est cette production mixte d'électricité et de chaleur.

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. On a coutume de comparer l'énergie renouvelable avec les énergies installées. Dans le cadre des travaux de la commission d'enquête, nous avons évoqué les externalités potentielles, notamment avec l'hydraulique en énergie secondaire. Il existe un projet visant à produire de l'hydrogène à partir d'un barrage hydraulique, le long du Rhin. Avez-vous travaillé sur ces externalités ? Qu'est-ce que cela peut apporter en plus de la simple production d'électricité ?

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Bruno Bensasson, président-directeur général d'EDF Renouvelables

. Si vous me lancez sur les externalités de l'hydraulique, cela va être long, parce que j'en vois beaucoup.

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Bruno Bensasson, président-directeur général d'EDF Renouvelables

. La première des externalités, c'est la réduction des émissions de CO2 à partir de l'hydraulique. Il existe beaucoup d'usages publics de l'eau, de l'eau potable, de l'irrigation, du tourisme ou de la navigation. Il y a évidemment d'importants enjeux de sûreté et de sécurité, qui sont des externalités au sens propre. Il y a des enjeux importants d'ancrage territorial qui relèvent un peu moins de l'externalité, parce que l'hydraulique, l'éolien et le solaire sont des énergies très décentralisées qui irriguent nos territoires, drainent de l'emploi dans les territoires – territoires de montagne et de vallées, s'agissant du Rhin. Nous investissons 400 millions d'euros par an dans l'hydroélectricité en France et il est prévu pour le Rhin un important programme de rénovation des équipements dont nous discuterons prochainement. Cela a beaucoup de contenu local et de retombées locales.

Au-delà de ces externalités, il y a un intérêt dans la flexibilité de l'hydraulique.

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Bruno Bensasson, président-directeur général d'EDF Renouvelables

. Il y a un champ d'étude sur les liens avec le stockage, qui peut revêtir la forme de batteries, d'hydraulique ou d'hydrogène. Le groupe travaille sur ces différents champs. Nous continuons de travailler pour l'hydrogène sur le Rhin.

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. Nous avons aujourd'hui des politiques énergétiques nationales. Je crois fortement à une politique nationale qui donne une colonne vertébrale, avec garantie de continuité, dans laquelle on retrouve tous les sujets, notamment les réseaux et la production nucléaire ; mais je crois aussi beaucoup à la part territoriale, qui a été un peu remise en cause, il faut l'avouer, par l'audition précédente. Que pensez-vous de la vision stratégique d'une politique élaborée du point de vue national ? Est-ce qu'on ne pourrait pas favoriser un peu plus le local ou le territorial pour faire émerger de nouvelles énergies renouvelables ou de nouveaux usages ?

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Bruno Bensasson, président-directeur général d'EDF Renouvelables

. Une partie de la politique doit être communautaire, nationale, régionale, municipale et même individuelle. Nous sommes chacun porteurs d'une politique énergétique. À l'évidence, au niveau municipal, intercommunal, il y a des choses à faire.

Bien entendu, en tant qu'EDF, nous nous inscrivons dans une péréquation, car nous avons une histoire ancienne plutôt nationale. Parallèlement, les énergies décentralisées nécessitent une proximité de terrain et bénéficient de la force d'initiative du terrain. Notre entreprise, toute nationale qu'elle soit, a développé la proximité territoriale. J'ai eu plaisir, ces derniers mois, à rencontrer des élus qui m'ont dit que le lien avec les territoires était bon et s'améliorait.

Des éléments relèveront sans doute toujours du national. Toutefois, et je ne vous apprends rien, si des décisions sont prises localement, il faut veiller à ne pas s'inscrire dans le schéma « je décide, tu paies ». Cela dit, dans les sujets à notre sens croissants, relatifs à l'urbanisme, au logement et au transport, les décisions énergétiques relèvent de choix territoriaux. L'électricité ne se transporte pas aussi simplement que les céréales mais elle se transporte, la chaleur se transporte moins bien, mais les routes ne se transportent pas du tout. Ce sont des sujets éminemment locaux. Par exemple, notre groupe a travaillé sur le projet de « smart city », à Dijon, avec la ville. Les solutions peuvent bénéficier à d'autres, mais cela se passe à Dijon. Il en est de même du déploiement des bornes de recharge. Pour en revenir à l'éolien et au solaire, tous les territoires n'ont pas les mêmes ressources, les mêmes gisements, les mêmes enjeux paysagers. Nous nous inscrivons dans ce cadre. Nous savons bien que l'acceptation est très importante. Nous savons aussi qu'il y a très peu de projets, très peu d'activités humaines et très peu d'activités économiques qui fassent l'unanimité. Vous trouvez souvent au moins un opposant qui suffit, en démocratie, et c'est très bien, à introduire un recours.

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. J'aurais encore plein de questions à vous poser, mais nous allons en rester là. Concernant les usages, j'aurais voulu vous interroger sur la prise en main à distance des installations des clients. On doit ainsi pouvoir faire mieux en termes d'énergie sans produire davantage.

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Bruno Bensasson, président-directeur général d'EDF Renouvelables

. Nous reviendrons, puisque nous avons aussi des offres dans ce domaine, notamment avec notre équipement Sowee.

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. Ce sera avec grand plaisir.

Merci beaucoup pour la qualité de vos réponses.

La séance est levée à dix-neuf heures trente-cinq.

Membres présents ou excusés

Commission d'enquête sur l'impact économique, industriel et environnemental des énergies renouvelables, sur la transparence des financements et sur l'acceptabilité sociale des politiques de transition énergétique

Réunion du jeudi 16 mai 2019 à 18 h 15

Présents. - M. Julien Aubert, Mme Marjolaine Meynier-Millefert, M. Vincent Thiébaut

Excusés. - M. Vincent Descoeur, M. Didier Quentin