Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Réunion du mercredi 25 novembre 2020 à 11h00

Résumé de la réunion

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La réunion

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La commission entend Mme Florence Lustman, présidente de la fédération française de l'assurance (FFA), sur l'action de la FFA pendant la crise.

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Nous entendons aujourd'hui Mme Florence Lustman, présidente de la fédération française de l'assurance (FFA), accompagnée de M. Franck Le Vallois, directeur général de la FFA, de M. Stéphane Pénet, délégué général adjoint, de M. Christian Pierotti, directeur des affaires publiques et internationales, et de MM. Christophe Gauer et Philippe Poiget, directeur de cabinet et conseiller.

La commission des finances avait auditionné la FFA en avril, pendant la phase aiguë de la première vague de l'épidémie de covid-19. Il était important de pouvoir réentendre les représentants du secteur de l'assurance aujourd'hui, au cœur de la deuxième vague, alors que les perspectives économiques sont soumises à de fortes incertitudes.

Vous nous aviez expliqué, en avril, les modalités de prise en compte des pertes d'exploitation des entreprises dans les contrats d'assurance dommages existants, qui étaient un grand sujet d'incompréhension pour les assurés. Vous nous aviez également exposé les efforts extracontractuels consentis par les assureurs pour soutenir l'économie, notamment une participation de 400 millions d'euros au fonds de solidarité.

Il paraît utile de revenir aujourd'hui sur ces deux sujets. Entre la baisse de la sinistralité et les économies réalisées par les assureurs, d'une part, et les efforts consentis par les assureurs pour soutenir l'économie, d'autre part, quel est le solde ? Quel est le coût net de la crise pour le secteur ?

Par ailleurs, avez-vous clarifié la question de la couverture des pertes d'exploitation dues à une épidémie ou à une pandémie ? La presse rapporte que les assureurs proposent actuellement des avenants à leurs assurés tendant à préciser l'exclusion des risques d'épidémie ou de pandémie des contrats. Au fond, ces risques sont-ils assurables ou non ? Et où en sont les discussions avec l'État sur ce point ?

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Florence Lustman, présidente de la fédération française de l'assurance (FFA)

Je vous remercie de nous donner cette opportunité de vous tenir informés de la situation du secteur de l'assurance, mais aussi de rétablir quelques vérités et de détailler les actions mises en place par les assureurs dans le cadre du deuxième confinement.

Dès le premier jour du deuxième confinement, nous avons annoncé quatre engagements collectifs pour soutenir nos assurés et, plus généralement, nos compatriotes.

Premièrement, pour les mois d'octobre, de novembre ou de décembre, les assureurs renoncent à au moins un mois de loyer pour les entreprises de moins de 250 salariés fermées administrativement et les hôtels, cafés et restaurants. Nous avions d'ailleurs déjà procédé à des annulations de loyer pour aider certaines entreprises.

Deuxièmement, les assureurs continuent à assurer les commerces fermés pour raison administrative, même s'ils ont du retard dans le paiement de leurs primes d'assurance, et cela pour toute la durée du confinement.

Troisièmement, nous offrons la couverture prévoyance aux personnes vulnérables, c'est-à-dire aux personnes en affection de longue de durée qui sont placées en arrêt de travail selon la procédure dérogatoire de la sécurité sociale mais qui ne sont pas couvertes par les contrats de prévoyance car elles ne sont pas déclarées malades par un médecin. Cela nous semble très important pour ces populations qui subissent une double peine et pour qui la crise de la covid-19 est encore plus contraignante que pour les autres.

Enfin, la FFA a décidé d'étendre la couverture du matériel informatique des entreprises lorsqu'il est utilisé par les salariés chez eux pour du télétravail.

À ces mesures collectives viennent s'ajouter les gestes décidés par chaque assureur en fonction de ses moyens et de son secteur d'activité.

Je souhaite exprimer la sidération de la profession que je représente face aux discours tenus sur le secteur de l'assurance depuis quelques semaines. Les accusations dont nous faisons l'objet sont graves et semblent justifier toutes sortes d'actions punitives à notre encontre, notamment le projet de taxation sur les contrats d'assurance dommages envisagé dans le cadre du projet de loi de finances pour 2021, initialement à hauteur de 1 % des primes d'assurance, mais qui est passée à 2 % lors de l'examen du texte au Sénat. Cela représenterait un coût supplémentaire de 1,2 milliard d'euros pour le secteur.

On dit dans la presse que les assureurs auraient fait des économies durant la crise et qu'ils auraient gagné plusieurs milliards d'euros. Cela est totalement faux. Au contraire, si l'on regarde la charge de sinistres effective, la crise va coûter au secteur de l'assurance 2 milliards d'euros de plus en 2020 par rapport à 2019.

Au plan mondial, les études ont réévalué de 107 à 140 milliards d'euros la charge de sinistres supplémentaires due à la crise pour les assureurs. Il s'agit, certes, d'un chiffre au niveau mondial, mais il est révélateur de l'impact de la crise sur le secteur. En outre, cela nous rappelle qu'il faut du temps avant de pouvoir évaluer précisément le coût définitif d'un événement pour les assureurs.

Pour ce qui est de la charge de sinistres en France, on observe effectivement une baisse de la sinistralité pour l'assurance automobile en raison de la diminution des accidents de la route pendant le confinement. Mais dans d'autres branches les sinistres ont explosé.

S'agissant par exemple des contrats de prévoyance dans les entreprises, qui couvrent une partie des salariés et des indépendants, les arrêts de travail ont augmenté d'un tiers en 2020 et les assureurs ont, conformément aux contrats en vigueur, versé davantage d'indemnisations que les années précédentes.

Concernant la responsabilité civile dans le domaine médical, dans les hôpitaux, les établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) et l'ensemble des établissements de soins, les mises en cause à l'encontre des personnels soignants se multiplient.

Pour les assureurs qui couvrent les entreprises, on observe une explosion des indemnisations au titre de l'assurance voyage, de l'assurance annulation ou encore de l'assurance construction. Cela concerne aussi les assureurs crédit, qui couvrent 300 milliards d'euros d'engagement en crédit interentreprises domestique.

Enfin, même si, comme l'a confirmé l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR), 93 % des contrats d'assurance pertes d'exploitation des entreprises excluaient explicitement le risque d'épidémie ou de pandémie tel que nous le subissons, 3 % des contrats couvraient ce risque, même s'ils n'avaient pas été initialement rédigés pour le couvrir, ce qui représente une charge de sinistres lourde pour environ cinquante mille professionnels.

Bien qu'il ne s'agisse pas d'une charge de sinistres, je mentionnerai également l'explosion des impayés, conséquence inévitable de la fragilisation du tissu économique.

Au total, l'augmentation de la charge de sinistres s'élève à 2 milliards d'euros en 2020 pour le secteur de l'assurance.

Malgré l'impact de la crise pour les assureurs, que nous continuons d'essayer d'évaluer le plus précisément possible, nous avons pris des engagements très importants pour aider les entreprises, à hauteur de 2,5 milliards d'euros dont 400 millions d'euros dans le fonds de solidarité et 2,1 milliards d'euros de gestes commerciaux individuels et collectifs, comme des aides financières pour nos clients, des annulations de loyer ou encore des remises de primes.

Il faut y ajouter la taxation sur les contrats d'assurance complémentaire santé, qui représente entre 1,5 et 2 milliards d'euros pour l'ensemble du secteur et 500 000 euros pour les assureurs de la FFA. Nous contestons fermement cette taxation car elle se fonde sur des évaluations que le ministère de la santé a effectuées au début de l'été et qui ne prennent pas en compte le rattrapage des soins. Or, par exemple, les dépenses de soins dentaires ont explosé au mois de juillet.

En outre, les assureurs seront affectés en 2021 par la portabilité des droits, qui permet à un chômeur de conserver gratuitement pendant un an une couverture maladie associée au contrat qu'il avait quand il était salarié dans l'entreprise qu'il a quittée. Compte tenu de la situation économique, il y a malheureusement de fortes chances pour que le nombre de chômeurs et la durée du chômage augmentent. Nous estimons que le coût pour les assureurs pourrait représenter jusqu'à 1,5 milliard d'euros.

Si j'additionne l'ensemble de ces éléments, la crise de la covid-19 va coûter 5 milliards d'euros supplémentaires au secteur de l'assurance. Ce chiffre est à comparer au résultat net de l'assurance non-vie en 2019, qui atteignait 3,9 milliards d'euros.

Nous restons néanmoins tournés vers l'avenir et avons mis en place un plan d'investissement massif de 2,2 milliards d'euros, dont 2 milliards d'euros financés par les seuls assureurs. Ce plan est destiné à soutenir les entreprises de taille intermédiaire (ETI) ainsi que les petites et moyennes entreprises (PME) françaises, avec 65 % des montants investis en fonds propres, 200 millions d'euros fléchés spécifiquement vers le secteur du tourisme et 800 millions d'euros vers le secteur de la santé. Il s'agit d'aider le pays à renforcer sa souveraineté sanitaire et à développer les nouvelles technologies, notamment les biotechnologies. Nous nous sommes dotés d'un conseil scientifique pour sélectionner les asset managers qui interviendront pour notre compte dans le domaine de la santé.

Étant spécialistes des catastrophes naturelles, nous n'avons pas attendu 2020 pour nous intéresser au réchauffement climatique et à ses conséquences dramatiques. Le coût des catastrophes naturelles a été multiplié par trois depuis quarante ans. Les conséquences du réchauffement climatique incluent en outre la baisse de la biodiversité, les difficultés d'accès à l'eau, mais aussi les pandémies.

Le plan de relance mis en place par les assureurs est aussi destiné à aider notre pays à aller vers une économie plus durable. Nos investissements seront conditionnés au respect par les entreprises bénéficiaires de politiques de responsabilité sociale et environnementale (RSE) ambitieuses, qui sera étroitement contrôlé au moyen de vingt‑sept indicateurs renseignés par les entreprises.

Vous m'avez également interrogée sur le régime de catastrophe exceptionnelle, dit Catex. Comme vous le savez, nous avons sans délai et dès le premier confinement travaillé à une couverture des conséquences économiques d'un événement exceptionnel tel que la pandémie. Il était important de le faire de manière collégiale, avec les parlementaires, les risk managers, les entreprises. Nous avons rendu une première copie le 15 juin dernier, en nous inspirant du régime existant pour les catastrophes naturelles. Le ministère de l'économie et des finances a de son côté fait des consultations tout l'été, à la suite de quoi il nous a demandé, comme le prévoyait le dispositif initial, de revoir cette copie.

L'objectif était notamment de pouvoir couvrir toutes les entreprises, y compris les grandes. Dans la nouvelle copie remise il y a quelques semaines, nous nous sommes inspirés du régime existant pour les catastrophes naturelles, que beaucoup souhaitaient mettre à contribution pour la pandémie bien que ce fût impossible.

C'est une originalité française et une grande richesse que d'avoir un partenariat public-privé qui couvre les conséquences d'une catastrophe. Car pour répondre à votre question, monsieur le président, la pandémie n'est pas un risque assurable par la seule assurance privée. C'est très clair et cela est désormais compris par tous. Les risques systémiques, ceux qui touchent tout le monde en même temps, ne relèvent pas de l'assurance privée seule. Pour autant, nous pouvons imaginer un partenariat public-privé pour rendre assurable ce type de risque, notamment afin de couvrir les conséquences économiques d'une fermeture administrative totale ou partielle des entreprises dans le cadre d'un état de pandémie déclaré sur tout ou partie du territoire.

En ce qui concerne l'indemnisation, nous avons constaté lors du premier confinement que les entreprises avaient besoin d'un concours très rapide. Le fonctionnement classique des contrats des pertes d'exploitation après dommage, dans lequel il faut faire intervenir des experts-comptables pour évaluer l'impact du sinistre, n'est pas adapté car il demande trop de temps. Nous avons donc imaginé une indemnisation en partie forfaitaire et déterminé un capital résilience qui pourrait être versé dans les 20 à 30 jours suivant la déclaration de l'assuré à l'assureur et qui indemniserait 50 % de la marge brute perdue hors masse salariale et hors bénéfices.

S'agissant du tarif de ce produit, le dispositif serait entièrement forfaitaire pour les entreprises dont le chiffre d'affaires est inférieur à 100 000 euros : elles paieraient 4,20 euros par mois et pourraient être indemnisées à hauteur de 3 750 euros, ce qui correspond à trois mois de fermeture. Nous avons capé le nombre de mois d'indemnisation et nous avons ainsi répondu à une demande du ministre de l'économie, qui souhaitait que ce dispositif soit moins coûteux que la prime catastrophes naturelles.

Au delà, les montants dépendraient du secteur d'activité de l'entreprise car les taux de marge ne sont pas les mêmes selon les secteurs. Par exemple, un restaurant dont le chiffre d'affaires serait d'un million d'euros par an paierait 26 euros par mois et pourrait être indemnisé jusqu'à 22 000 euros pour trois mois de fermeture. Une entreprise du BTP dont le chiffre d'affaires serait de 5 millions d'euros par an paierait 155 euros de prime mensuelle et pourrait être indemnisée à hauteur de 130 000 euros environ. Pour les grandes entreprises, l'indemnisation maximale serait limitée à 500 000 euros, et la prime annuelle serait capée, par exemple à 7 400 euros dans le BTP.

Tel est le fonctionnement du régime Catex que nous avons proposé au ministre de l'économie et des finances : il est simple d'application, facile à comprendre, il peut être mis en œuvre facilement, mais il ne peut pas couvrir les conséquences à venir de la crise du covid-19, il ne pourrait intervenir que pour une prochaine pandémie.

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En net, combien la crise coûte-elle au secteur de l'assurance, entre les contributions à l'économie sous différentes formes et le coût net des sinistres ? Par exemple, le gain sur les sinistres automobiles est-il compensé ou non par des pertes sur d'autres sinistres ?

Concernant l'assurance vie, la situation est compliquée. Avez-vous des inquiétudes sur le devenir de cette forme de placement, sachant que l'évolution des taux peut bouleverser le modèle économique des contrats ?

Lors de votre précédente audition, vous avez évoqué la dévalorisation des portefeuilles d'actifs des assureurs. Faites-vous le même constat aujourd'hui ? Cette situation pose-t-elle des questions d'ordre prudentiel ?

Certains de nos collègues ont déposé des amendements sur la fiscalisation des réserves des assureurs ; d'autres amendements sont votés au Sénat sur la taxation des primes d'assurance dommage à hauteur de 1 % puis de 2 %. Cela pose-t-il, là aussi, des problèmes d'ordre prudentiel ?

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Laurent Saint Martin, rapporteur général

Madame la présidente, je remarque que votre intervention s'en tient à la problématique du risque pandémique et systémique, comme lors de l'audition précédente. Or, depuis le début de cette crise, il ne s'agit pas tant de reprocher au secteur assurantiel de ne pas savoir couvrir un risque pandémique que d'affirmer son devoir d'accompagner un pays en difficulté. Certes, vous apportez une explication sur les raisons pour lesquelles le risque pandémique n'est pas couvert par l'assurance, et celles pour lesquelles il devrait l'être demain sous certaines formes, dans le cadre d'un partenariat public-privé. Mais je crois que le pays a aujourd'hui besoin d'un engagement du secteur des assurances aux côtés des petits commerçants et de toux ceux qui reçoivent des avenants leur indiquant des modifications à leur contrat auxquelles ils doivent se résoudre, sous peine d'être exclus de la protection. Je comprends que des assurés soient sidérés par ces avenants.

Bien davantage qu'une simple discussion juridique sur ce que peut couvrir un contrat ou non, ce que nous demandons au secteur assurantiel est un accompagnement. Lors de l'examen des textes financiers, nous avons eu des débats sur la taxation des assurances. Nous avons rejeté ces propositions. Le Sénat a fait une proposition différente que je proposerai de rejeter en nouvelle lecture. Mais il faut que le secteur assurantiel accompagne de manière plus qualitative un certain nombre d'acteurs.

J'éprouve un certain agacement lorsque vous expliquez que le risque systémique ne peut être couvert dans le système actuel. Non que ce soit faux, mais il faut nous aider à vous aider et réfléchir à la manière de mieux accompagner les acteurs économiques.

J'en reviens au secteur lui-même. On parle de perte de valeur dans les portefeuilles d'actifs. Pourriez-vous préciser cela en termes de montants à ce jour et consolider une sorte de bilan des pertes et profits mettant en balance les gains enregistrés en matière de sinistralité et les pertes constatées sur les portefeuilles d'actifs ?

Le secteur dispose-t-il de suffisamment de fonds propres, ou au contraire est-il en difficulté ? Faut-il, comme je le pense, revoir les critères prudentiels européens, notamment ceux appliqués aux assurances ?

Un mot également sur l'avenir. Nous allons devoir transformer les volumes très importants de dettes des PME en fonds propres ou quasi-fonds propres. Le secteur de l'assurance peut-il participer à cet effort collectif de transformation par des prêts participatifs, en imaginant le cas échéant des garanties de l'État ?

Vous avez parlé des travaux en cours avec le ministère de l'économie. Quand pourrons-nous avoir une copie commune pour cette proposition de nouveau risque ?

L'assurance vie est le placement préféré des Français. L'enjeu est donc considérable. Pouvez-vous nous donner une photographie des comportements d'investissement des particuliers, notamment ceux qui ont sur-épargné ? Avez-vous constaté plus d'investissements sur les unités de compte, ou au contraire ces fonds supplémentaires ont-ils été orientés vers des valeurs monétaires et des fonds sécurisés ?

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Florence Lustman, présidente de la fédération française de l'assurance (FFA)

Je tiens tout d'abord à préciser qu'il y aura un alourdissement de la charge de sinistres, que nous évaluons à 2 milliards d'euros. La baisse des taux aura également un impact financier négatif puisqu'elle empêche la réalisation de produits financiers. Les deux vont se cumuler.

Si l'on s'en tient au coût des sinistres, les charges supplémentaires sont de 2,6 milliards pour les risques professionnels, très fortement alourdis par cette crise, de 350 millions d'euros pour la responsabilité civile, de 100 millions d'euros pour l'assurance crédits et de 870 millions d'euros pour la prévoyance.

En face de cela, nous avons une moindre sinistralité de 1,4 milliard d'euros en automobile et de 500 millions d'euros en santé. Voilà comment nous arrivons à un solde net de 2 milliards d'euros.

Je précise que le métier de l'assurance est de mutualiser les risques. Il y a évidemment des mutualisations au sein d'une catégorie de contrats entre tous les assurés, mais également entre les branches. Cette compensation entre branches est reconnue par la norme prudentielle Solvabilité II. Il est donc normal que, certaines années, certains risques soient plus touchés que d'autres.

Les assurés reçoivent actuellement des avenants à leurs contrats. Nous concevons que cette situation puisse être très désagréable pour eux mais, dans la plupart des cas, des explications leur sont données par les équipes commerciales.

Ces avenants se bornent à clarifier une situation spécifique, qui ne concerne que 4 % des contrats, dans laquelle des clauses laissent subsister une marge d'interprétation. À l'heure actuelle, des juges, saisis sur ces clauses, tranchent pour un même contrat parfois en faveur de l'assureur, d'autres fois en faveur de l'assuré. Il y a par conséquent un vrai besoin de clarification. Notre autorité de contrôle, l'ACPR, nous a également demandé cet éclaircissement dans son communiqué de presse du 24 juin dernier.

La clarification, indispensable tant pour l'assuré que pour l'assureur, ne peut aller que dans le sens d'une exclusion plus explicite dans les contrats dans la mesure où la pandémie n'est pas assurable par la seule assurance privée, en dépit de l'accompagnement commercial considérable que nous dispensons.

Dans le cadre de la négociation commerciale de fin d'année, beaucoup de contrats sont renouvelés, ce qui suscite, comme toujours, beaucoup d'émotion. Les courtiers qui représentent les entreprises mettent énormément de pression sur les assureurs. Nombre d'assureurs essaient à cet égard d'être pédagogues et fournissent des explications à ces avenants.

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Le fait de préciser l'interprétation des clauses contractuelles ne révèle-t-il pas a contrario que ces 4 % de contrats offraient en réalité une couverture – ce que la plupart des assurances contestent ?

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Florence Lustman, présidente de la fédération française de l'assurance (FFA)

Notre autorité de contrôle relève effectivement qu'il y a une marge d'interprétation sur 4 % des contrats. Beaucoup de procédures sont en cours. La presse s'en fait très régulièrement l'écho et il ne m'appartient pas de les commenter. Il faut sortir de l'ambiguïté dans la rédaction des contrats en trouvant un accord de bonne foi entre les parties afin de les protéger. C'est précisément le rôle de ces avenants qui ne peuvent qu'exclure la pandémie. Nulle part dans le monde le risque pandémique n'est couvert par la seule assurance privée. D'où la proposition relative à la mise en place du dispositif Catex.

Dans le secteur automobile, l'alourdissement de la charge de sinistres s'explique par un marché automobile extrêmement compétitif – 93 assureurs en France – et donc le moins cher en Europe, une possibilité de résiliation infra-annuelle qui favorise le changement d'assurance et une augmentation du coût des pièces détachées d'environ 30 % sur les cinq dernières années. Pour toutes ces raisons, ce risque est déficitaire depuis 2006.

En tout état de cause, la fixation des tarifs dans ce domaine est régie par le principe de concurrence. Il semble donc hasardeux d'annoncer des chiffres en augmentation alors que beaucoup d'acheteurs du secteur, notamment ceux pour lesquels l'échéance du contrat est fixée au 1er avril, n'ont pas encore déterminé leurs tarifs. En tant que syndicat professionnel, je ne peux m'intéresser aux tarifs de mes membres. C'est le droit de la concurrence qui s'applique.

La collecte de l'assurance vie a été négative en septembre et le sera à nouveau en octobre. Cette décollecte est importante depuis le début de la crise. Néanmoins, la collecte nette demeure positive sur les contrats en unités de compte. Les primes placées en unité de compte représentent 34 % des primes en 2020 contre 28 % en 2019. Cette diversification des portefeuilles de nos concitoyens est sans aucun doute une bonne décision.

Sur l'ensemble des encours de l'assurance vie, qui s'élèvent à 1 700 milliards d'euros, 60 % sont placés dans les entreprises. Dès lors, toute baisse de la collecte nette est une très mauvaise nouvelle pour l'économie française et européenne. Une décollecte se traduirait nécessairement par un désinvestissement dans les entreprises. Contrairement à une idée largement répandue, nous ne détenons donc pas majoritairement de titres souverains.

Les portefeuilles d'actifs et la solvabilité sont des sujets complexes qui doivent être analysés au regard de deux éléments : les marchés, dont la hauteur en fin d'année est difficile à anticiper, et les taux d'intérêt, auxquels nous sommes beaucoup plus sensibles. Nous avons en effet de gros portefeuilles obligataires : 550 milliards d'euros dans des obligations d'entreprises qui seront touchées par l'augmentation des risques de crédit compte tenu de la dégradation du climat économique en France.

La baisse des taux – ceux-ci devraient être négatifs pendant cinq à dix ans – a des impacts extrêmement forts sur le calcul du besoin en fonds propres exigés par les normes prudentielles issues de la directive européenne Sovabilité II.

Au début du premier confinement, les taux et les marchés ont baissé et, en quelques jours, les ratios de solvabilité ont perdu 30 points. C'est totalement déraisonnable. L'urgence absolue est de réviser une norme prudentielle qui induit une telle volatilité. Le minimum fixé par les autorités de contrôle est passé de 100 % à 130 % pour pallier le risque de variation. Les normes internes des entreprises suivent la même logique, portant le ratio à 160 %.

Certes, les ratios restent confortables, mais les montants minimums exigés par les différents acteurs sont bien supérieurs à 100 %. Or nous sommes face à une perspective de taux durablement négatifs qui aura un effet très fort sur les calculs du besoin en fonds propres.

Je me suis rapprochée de la Commission européenne qui travaille en ce moment à une révision de la directive Solvabilité II. Il est extrêmement préoccupant d'entendre dire que le mieux que l'on puisse obtenir serait de ne pas aggraver la charge de fonds propres. Ce serait un non-sens total ! Nous sommes prêts à investir pour rendre l'économie plus durable sur le plan national et européen mais il ne faut pas que nous soyons pénalisés.

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Je ne reviendrai pas sur le sentiment d'opposition, voire d'abandon, que vient d'évoquer notre rapporteur général, et concentrerai mon propos sur le régime Catex.

Quels sont l'exposition et l'engagement des assureurs dans le cadre de ce régime ? Quel est le risque maximum que ce dispositif représenterait pour l'État – puisqu'il s'agit d'un partenariat public-privé ? Est-ce que le montant de l'indemnisation que vous venez d'évoquer, à savoir 3 500 euros maximum sur trois mois pour une très petite entreprise (TPE) qui réalise moins de 100 000 euros de chiffre d'affaires annuel, sera suffisant alors que le fonds de solidarité a apporté 4 500 euros sur trois mois aux entreprises de cette taille ? Le projet répond-il véritablement aux besoins des grandes entreprises ? Le monde économique est-il en phase avec votre proposition d'associer ce dispositif à l'assurance multirisque et donc d'en faire une assurance obligatoire pour les entreprises ? Je n'en suis pas persuadée. Quel serait l'intérêt pour l'État et pour nous, parlementaires qui défendons les intérêts collectifs, de nous engager dans ce dispositif Catex alors que les mesures prises pendant les deux périodes de confinement vont déjà au delà de ce qu'il pourrait apporter ?

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Nous avons bien noté la volonté des assureurs d'accompagner les entreprises qui subissent de plein fouet la crise sanitaire. Cependant, je partage les observations de notre rapporteur général sur l'agacement de nos concitoyens à l'égard des assureurs. Le pays a besoin d'un secteur des assurances fort qui joue le jeu de la solidarité nationale en période de crise.

S'agissant du dispositif Catex et de la prime forfaitaire qu'il prévoit, ne serait-il pas possible de travailler à partir de la perte d'exploitation secteur par secteur afin de sauver des entreprises qui sont fermées ?

La loi prévoit que les assurés peuvent obtenir une baisse du montant de leur prime en cas de diminution du risque. Pensez-vous que les compagnies d'assurances vont jouer le jeu, sachant que plusieurs secteurs sont à l'arrêt ?

Comment expliquez-vous que les compagnies d'assurances augmentent leurs tarifs pour 2021 de 2 % en moyenne alors que les risques ont diminué, permettant au secteur d'économiser 2 milliards d'euros ? Les assureurs ne pourraient-ils pas abonder le fonds de solidarité au delà de ce qui a été fait pour le premier confinement ?

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Vous avez parlé d'un allègement d'un mois de loyer pour les entreprises de moins de 250 salariés. Combien d'entreprises sont-elles concernées et quel montant cela représente-t-il ? Quelle est l'articulation de votre dispositif avec les aides d'État dans le même domaine ?

Par ailleurs, nous sommes tous sensibles à la survie de nos commerces. On connaît leur rôle d'animation dans le territoire. Ils constituent en quelque sorte l'âme et la vie de nos petites et moyennes villes. J'ai à cet égard de nombreuses interrogations quant au rôle qu'auraient pu ou qu'auraient dû jouer les compagnies d'assurance concernant les pertes d'exploitation lors des première et deuxième vagues de la covid. L'image du secteur, on l'a dit, a d'ailleurs été quelque peu dégradée.

La situation s'annonce difficile pour ces petits commerces. Ils attendent un accompagnement dans le temps. À l'évidence, ils ne retrouveront pas leur niveau de chiffre d'affaires antérieur avant quelques mois. Pour autant, ces entreprises sortiront des dispositifs de soutien parce que leur chiffre d'affaires dépassera rapidement le plafond de 50 % alors même que le niveau des charges fixes reviendra, lui, à 100 %. Elles auront également à leur charge le remboursement des prêts garantis par l'État (PGE). Leur niveau de chiffre d'affaires permettra difficilement d'absorber de telles charges fixes, si bien qu'il y a un risque pour leur survie même.

Quelle part des pertes d'exploitation liées à la covid pourrait-elle être prise en charge par le secteur de l'assurance durant cette période intermédiaire qui sépare la crise du retour à la normale, que ce soit dans de nouveaux contrats offrant une couverture des pertes d'exploitation limités dans le temps ou dans des dispositifs de soutien d'État ?

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D'après les informations qui vous remontent, la taxation de 1,5 milliard d'euros sur les contrats d'assurance complémentaire santé sera-t-elle répercutée, en tout ou en partie, sur les assurés ?

Quel est le bénéfice ou la marge supplémentaire, lié à la crise de la covid, qui est généré par l'ensemble des contrats d'assurance santé ?

Le Gouvernement a évoqué un montant de 15 milliards d'euros de prêts participatifs accordés par les banques et assurances, qu'il s'est engagé à garantir. Les négociations concernant ces prêts ont-elles abouti ?

En matière d'assurance vie, la baisse prolongée des taux, couplée aux incertitudes économiques, ne va-t-elle pas produire une décollecte durable ? Quelles en seront les conséquences pour les compagnies d'assurance françaises ?

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Pour tordre le cou aux rumeurs, pouvez-vous nous confirmer qu'il n'y aura pas d'augmentation des tarifs d'assurance de 2 % en 2021, contrairement à ce que certaines associations de consommateurs affirment ?

Certains assureurs, peu nombreux, ont répercuté au bénéfice de leurs assurés les économies réalisées sur les contrats d'assurance auto et moto. Mais on dit que cela profiterait davantage aux nouveaux assurés qu'aux clients fidèles. Pouvez-vous, là aussi, tordre le cou à cette affirmation ?

Permettez-moi de tempérer votre enthousiasme quant à l'élargissement du régime catastrophes naturelles, dit Catnat. Il y a des trous dans la raquette ! Je vous invite à rencontrer les milliers de sinistrés des retraits et gonflements des argiles : certaines assurances prennent en charge le sinistre quand il n'y a pas de reconnaissance, d'autres ne le prennent pas en charge. C'est aujourd'hui kafkaïen et extrêmement pénalisant pour tout le monde. Si le régime Catnat est un régime exemplaire en ce sens qu'il coordonne acteurs privés et publics, il est aujourd'hui à bout de souffle. Le risque de catastrophe naturelle a été multiplié par trois en quarante ans, avez-vous dit. Toutes les prévisions indiquent que cette tendance va se poursuivre, au regard du dérèglement climatique. Dès lors, pensez-vous que le modèle de ce régime soit le bon pour couvrir les pandémies à venir ? Et, j'y reviens, comment pouvez-vous nous aider à combler les manques concernant notamment le phénomène des retraits et gonflements des argiles ?

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Cette audition tombe bien : nous apprenons ce matin que les restaurateurs ont reçu de leur assureur un avenant à leur contrat indiquant que les pertes d'exploitation liées à la pandémie ne feront plus partie des risques assurés dès 2021. Nous apprenons également une augmentation de 2 % des tarifs des contrats d'assurance automobile. Vous nous confirmerez certainement qu'il s'agit d'une fausse nouvelle !

Vous avez fourni un certain nombre de chiffres. Pour reprendre une célèbre réplique de film, « le langage des chiffres a ceci de commun avec le langage des fleurs : on peut lui faire dire ce que l'on veut ». Je produirai donc d'autres chiffres qui permettront de mettre en balance toutes les interprétations.

Vous avez parlé de 140 milliards d'euros de sinistres à l'échelle mondiale ainsi que d'une augmentation des charges des assureurs français de 2 milliards d'euros. Mais que représentent ces 2 milliards d'euros au regard des charges de 2019, qui atteignent 183,7 milliards d'euros ? Est-ce vraiment beaucoup ? Ce chiffre doit également être mis en rapport avec les bénéfices record de 11 milliards d'euros cette même année 2019, ainsi qu'avec les dividendes versés. Cela permettra de pondérer votre propos.

Vos annonces ne sont pas à la hauteur de ce que pourraient réaliser les assurances. Comme ne semble pas être à la hauteur ce qui est préparé par Bercy, à savoir une prime obligatoire supplémentaire sur les contrats multirisques pour une indemnisation des TPE moindre que ce qui est assuré par l'État via le fonds de solidarité – fonds que vous avez chichement abondé de 400 millions d'euros.

Notre groupe avait déposé une proposition de loi que nous avons revue pour la pérenniser étant donné la persistance du risque de pandémie. L'objet de ce texte est d'étendre la garantie de perte d'exploitation sans dommage en étendant le dispositif Catnat aux épidémies. Il n'y aurait pas de hausse des cotisations. Pour ne pas déséquilibrer le régime existant et ne pas faire porter les surcoûts sur l'État, il est proposé une taxe de 12 % sur les dividendes et les stock options, ce qui apporterait une recette de 400 millions d'euros pour la seule compagnie AXA. Ce n'est pas énorme. J'aimerais avoir votre avis sur cette proposition.

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L'image du secteur de l'assurance s'est dégradée auprès des acteurs du commerce. Ces derniers attendaient beaucoup plus.

Notre rapporteur général a besoin de grain à moudre, madame la présidente ! Il a besoin d'arguments pour repousser les amendements qui proposent de taxer les réserves des assurances. Aidez-le. Sinon, il finira par craquer !

Pourriez-vous nous indiquer les chiffres des réserves de capitalisation, que nous avons du mal à obtenir ? Nous les évaluons à 20 milliards d'euros mais il existe d'autres modes de calcul.

Enfin, vous avez évoqué 3 % de dossiers indemnisés pour pertes d'exploitation. Quel montant cela représente-t-il ?

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Le coût de la sinistralité supplémentaire pour les assureurs est, dite-vous, de l'ordre de 2 milliards d'euros. Quelle a été la prise en charge par Cap Relais de ce montant ? Je rappelle que Cap Relais prend en charge 75 % des sinistres d'assurance crédits.

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J'entends bien tous les efforts faits par les assureurs. Je souhaite néanmoins revenir sur la question des avenants. Trouvez-vous normal qu'un restaurateur ayant fermé son établissement pendant plus de cinq mois reçoive une lettre le lundi lui indiquant que, si l'avenant n'est pas signé d'ici le vendredi qui suit, il ne sera plus assuré ? Une telle méthode est-elle acceptable dans le contexte actuel ? Quels que soient vos efforts, de telles pratiques discréditent votre secteur d'activité.

En outre, je doute qu'il soit légal de dénoncer un contrat en trois jours et de rompre l'engagement contractuel en l'absence d'acceptation de l'avenant. Un avenant ne commente pas un contrat, il le modifie.

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J'ai eu l'occasion de m'intéresser en début d'année, avant la crise de la covid, au système assurantiel en agriculture. Pour la couverture des aléas de marché, on constate une faible application du système assurantiel privé. Or, au cours de ces derniers mois, le manque de main-d'œuvre et la fermeture de nombreux débouchés ont conduit à des pertes d'exploitation importantes pour certaines filières.

Des exploitants agricoles ont-ils pu être en partie indemnisés sur le fondement de ces contrats assurant le risque de marché ? Ou, suivant la demande du Gouvernement, les assureurs ont-ils fait preuve de souplesse et apporté des indemnisations à leurs clients au titre d'autres risques assurés ?

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Florence Lustman, présidente de la fédération française de l'assurance (FFA)

En matière tarifaire, il existe des règles de concurrence en France et la fédération française des assurances, que je représente, n'a pas le droit d'évoquer les tarifs. Quant à l'augmentation de 2 % dont vous avez parlé, personne ne peut en réalité avancer un quelconque chiffre. De grands acteurs du marché de l'assurance automobile, dont les contrats peuvent arriver à échéance le 1er avril, n'ont même pas commencé à réfléchir à leur politique tarifaire pour 2021. Je ne peux me prononcer en rien sur la réalité ou non d'une éventuelle augmentation. Je m'interroge seulement sur la source de cette information indiquant une augmentation de 2 %, qui a été largement commentée.

Concernant les tarifs de l'assurance complémentaire santé, l'objectif national des dépenses d'assurance maladie (ONDAM) et les dépenses de santé augmentent chaque année de 3 % en moyenne dans notre pays. Pas plus que pour les tarifs d'assurance automobile, je ne peux me prononcer sur les tarifs d'assurance santé. Je rappelle cependant une évidence que vous connaissez : quand les risques augmentent, les tarifs augmentent. C'est inévitable. Il n'y a pas de cagnotte chez les assureurs. S'il y a plus de sinistres, il faut nécessairement plus de primes. Je note qu'il existe en France une taxation de 13,9 % sur les contrats de complémentaire santé. Cette taxation est exceptionnelle par rapport au reste de l'Europe, alors que l'assurance complémentaire me paraît être un bien de première nécessité. La taxation allemande est à zéro parce que les Allemands considèrent qu'il s'agit d'un bien de première nécessité. Si nous voulons analyser le niveau des tarifs, il faut regarder l'ensemble des taxes qui grèvent les contrats d'assurance !

Je rappelle le résultat net de l'assurance non-vie en 2019 : 3,9 milliards d'euros. Une augmentation de 2 milliards d'euros des charges ne me paraît donc pas négligeable, d'autant que s'y ajoutent 3 milliards d'euros de gestes solidaires. Ces ordres de grandeur parlent d'eux-mêmes. On nous reproche de ne pas être assez solidaires, mais comment pourrions-nous faire plus ? Connaissez-vous d'autres professions qui aient fait preuve d'une telle solidarité ? Les petits commerçants ont bénéficié d'un certain nombre de mesures individuelles de leurs propres assureurs… et du fonds de solidarité – j'imagine que certains petits commerçants ont évidemment bénéficié de ces 400 millions d'euros. Je ne peux pas laisser dire que nous ne sommes pas solidaires. Nous le sommes, à hauteur d'un montant bien supérieur à nos profits de l'année 2019.

Les titres participatifs ont fait l'objet d'une première présentation, très générale, par Bercy, mais les inconnues étaient encore nombreuses – des discussions étaient encore en cours avec Bruxelles. Que puis-je donc en dire ? Dans un environnement de taux durablement négatifs, s'ils présentent un bon couple rendement-risque, je ne doute pas du fait que certains assureurs seront intéressés. Attention, toutefois : nous parlons là de l'argent des assurés, non d'une cagnotte ou d'un quelconque matelas ; ces 2 700 milliards d'euros d'actifs des assureurs appartiennent en fait aux assurés, directement, parce que c'est leur épargne, placée sur des contrats d'assurance vie, ou parce que ce sont des sommes qui leur sont dues en vue du remboursement de leur sinistre. Notre responsabilité à leur égard nous impose donc de placer avec prudence ces montants ; certes, un peu de rendement est souhaitable, mais nous devons avant tout préserver leur épargne et tenir les engagements que nous avons pris à leur égard. Et vous savez que notre autorité de contrôle est elle-même très préoccupée de l'impact de cette crise sur le secteur – qui ne se limitera pas à l'année 2020, je vous le garantis. Cela étant, s'il s'agit d'un produit de marché, c'est-à-dire un produit dans lequel il est tout à fait justifié, en bonne gestion financière, d'investir, les directions des investissements, je n'en doute pas, considéreront cette possibilité. Chacun se déterminera et il n'appartient pas à la fédération de se prononcer à sa place.

Au cours de la réunion qui avait eu lieu à Bercy, j'avais tout de même précisé qu'il serait très important de s'assurer du traitement prudentiel de ces produits : combien un investissement de 100 euros dans ces prêts participatifs coûte-t-il en fonds propres ? quel sera le traitement comptable de ces produits ? Il conviendra le savoir lorsque le produit nous sera présenté de manière complète.

Je suis tout à fait d'accord avec la remarque qui a été faite sur le régime Catnat. D'ailleurs, dans la première version de Catex, nous avions proposé d'intégrer les pertes d'exploitation consécutives à une catastrophe naturelle. Je peux vous citer le cas récent d'une épicerie, à Breil-sur-Roya, qui, sans avoir été directement touchée par la catastrophe naturelle qui a ravagé des vallées des Alpes-Maritimes, se trouve néanmoins dans l'impossibilité d'avoir aucune activité de vente à la suite de cette catastrophe. Les problèmes du relogement et des pertes d'exploitation doivent par exemple être traités. Nous suggérons également d'organiser des journées de prévention sur les territoires exposés à des risques particuliers, pour que chacun ait les bons réflexes et n'agisse pas sous le seul empire de l'émotion.

La réserve de capitalisation sert à garantir les engagements des assureurs vis-à-vis des assurés. Si vous la réduisez, c'est autant d'argent en moins pour les assurés, à qui elle appartient. Vouloir s'y attaquer me paraît témoigner d'une incompréhension totale du mode de fonctionnement technique de l'assurance vie.

Nous ne sommes pas maîtres du calendrier de la réforme Catex. Pour notre part, nous avons rendu notre copie. Il appartient au ministre chargé de l'économie, puis à la représentation nationale, de s'en saisir.

Quant à la légalité des mesures qui seraient introduites par voie d'avenant, elle ne pose aucun problème. Dans les trois mois précédant le renouvellement du contrat, l'assureur peut se rapprocher de l'assuré dans la perspective d'une modification des clauses.

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L'exemple que je vous citais n'entre pas dans ce cadre !

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Florence Lustman, présidente de la fédération française de l'assurance (FFA)

Il ne m'est pas possible de répondre sur ce cas particulier.

Cela étant, dès le mois de septembre, nous avons prévenu, notamment par un communiqué de presse assez long, de l'impossibilité de couvrir les conséquences de la pandémie. Les assureurs font d'ailleurs œuvre de pédagogie pour éviter toute ambiguïté à l'avenir.

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Du point de vue du calendrier, il aurait pu être meilleur de parvenir à un accord sur le dispositif Catex et, par la suite, de préciser ce qu'il en était sur ce point…

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Florence Lustman, présidente de la fédération française de l'assurance (FFA)

Au mois de juillet dernier, nous pensions que les consultations en cours permettraient effectivement d'aboutir. Pour notre part, nous avons été réactifs.

Quant aux abandons de loyers, entre les deux confinements, ils coûteront à peu près 160 millions d'euros.

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Pourquoi ne retenez-vous qu'un seul mois ? Un crédit d'impôt est prévu…

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Florence Lustman, présidente de la fédération française de l'assurance (FFA)

Monsieur le président, les 260 membres de la fédération sont tous affectés par la crise – à des degrés divers, certes, mais ceux qui assurent les entreprises paient un tribut très important. C'est normal – c'est leur métier d'assureurs –, mais il ne faut pas l'oublier. Il ne leur est pas forcément possible de faire davantage. J'évoque pour ma part les mesures prises collectivement par la profession ; peut-être un geste supplémentaire sera-t-il possible pour certains, mais je ne connais pas de profession qui ait fait autant que celle des assureurs. Les comptes seront compliqués, particulièrement dans le contexte de baisse des taux qui contraindra à reprovisionner…

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Stéphane Pénet, délégué général adjoint de la FFA

Je précise que si Catex avait existé au début de la pandémie, selon les paramètres que nous proposons, il aurait indemnisé les entreprises à hauteur de 9 milliards d'euros – 6,5 milliards d'euros dans le cadre du premier confinement, 2,5 milliards d'euros lors du second –, dont 8 milliards d'euros fléchés sur les petites et moyennes entreprises. Ce sont 2 milliards d'euros qui auraient été pris en charge par les assureurs et réassureurs, 2 milliards d'euros par la Caisse centrale de réassurance (CCR), via ce qu'on appelle le traité en quote-part, et 5 milliards d'euros par la CCR en tant que réassureur public.

Le système que nous proposons prévoit que la CCR soit indemnisée pour cette prise de risque. Sur 500 millions d'euros de primes annuelles perçues, 300 millions d'euros seraient destinés à la CCR et 200 millions d'euros aux assureurs et réassureurs.

Par ailleurs, des confinements locaux ou régionaux, comme il pourrait en être décidé ultérieurement, coûteraient bien moins cher.

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Est-ce que cela aurait changé beaucoup de choses, finalement ? La CCR est publique, donc, in fine, c'est toujours l'État qui est l'assureur…

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Stéphane Pénet, délégué général adjoint de la FFA

Ce qui aurait été différent, c'est que tout aurait été contractualisé et préfinancé. La CCR recevant 300 millions d'euros tous les ans pour couvrir le risque, ce n'est qu'à l'épuisement de ses provisions que l'État aurait dû lui verser de l'argent. Un préfinancement aurait permis aux entreprises de faire face au pic de la crise. La contractualisation et le préfinancement sont les deux avantages majeurs d'un tel système assurantiel.

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Je vous remercie. Cette réunion aura permis d'éclaircir certains points d'un problème compliqué, alors que les attentes à l'égard des assureurs sont fortes.