Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Réunion du mercredi 10 mars 2021 à 9h30

Résumé de la réunion

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La réunion

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La commission entend une communication sur le suivi des conclusions du rapport de la mission d'information sur la taxation des titres de séjour (M. Jean-François Parigi et Mme Stella Dupont)

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L'idée d'une mission d'information sur la taxation des titres de séjour était née, comme souvent, en séance publique ; il s'agissait de mieux comprendre la fixation des tarifs de ces taxes. La mission ainsi créée avait présenté ses conclusions au mois de juin 2019, et ses travaux ont fourni la matière de certains des amendements dont nous avons débattu et que nous avons parfois adoptés lors de l'examen des projets de loi de finances pour 2020 et pour 2021.

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Effectivement, monsieur le président, la rapporteure Stella Dupont et moi-même vous avions présenté les conclusions des travaux de notre mission d'information sur la taxation des titres de séjour. Nous venons à présent vous exposer un bilan du suivi des seize recommandations que nous avions formulées, un bilan favorable puisque douze d'entre elles ont été retenues et, en tout ou partie, mises en œuvre.

Quel constat avions-nous dressé ?

En France, les étrangers non communautaires sont tenus de posséder un titre de séjour et doivent s'acquitter de taxes au moment de la délivrance et du renouvellement de ce document. Nous avons constaté que celles-ci se caractérisaient par une grande complexité, par des montants élevés et par la grande latitude laissée au pouvoir réglementaire.

Premièrement, la complexité se résumait en un chiffre : treize montants et majorations différents existaient, auxquels de multiples dérogations pouvaient s'appliquer. Le plus souvent, l'étranger concerné devait payer 269 euros pour la première délivrance ou le renouvellement d'une carte de séjour temporaire ou d'une carte de résident.

Deuxièmement, c'est en nous fondant sur une analyse comparative conduite au niveau européen que nous avions conclu que les tarifs pratiqués étaient élevés. Notre pays se situait, à cet égard, dans la tranche supérieure de la moyenne de l'Union européenne. Cela pesait non seulement sur les personnes concernées mais aussi, indirectement, sur les collectivités territoriales, puisque de nombreuses associations subventionnées par celles-ci ou les services sociaux des villes étaient sollicitées pour participer au paiement de ces taxes. Pour l'État, les sommes ne sont pas négligeables, puisque le produit de ces taxes représentait 180 millions d'euros en 2019, avant la réforme.

Troisièmement, nous avions constaté qu'une trop grande latitude, dont les parlementaires que nous sommes ne peuvent se satisfaire, était laissée au pouvoir réglementaire. Le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA) fixait ainsi des fourchettes à l'amplitude importante – qui pouvait aller du simple au quadruple – et non des montants précis. Ainsi le ministère de l'intérieur pouvait modifier de façon substantielle, par décret, sans associer le Parlement, le montant des taxes.

Sur le fondement de ces constats partagés, nous avions donc formulé seize propositions, destinées à simplifier le régime applicable, réduire le montant de certaines taxes et affermir le pouvoir du Parlement.

Dix-huit mois plus tard, le bilan est favorable, puisque douze d'entre elles ont été retenues. Avant de laisser à Stella Dupont le soin de préciser lesquelles ont été prises en compte, j'insisterai sur trois points.

Tout d'abord, j'insiste sur le caractère vertueux du travail accompli. Des parlementaires de sensibilités différentes ont souligné – vous y faisiez allusion, monsieur le président – des difficultés lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2019. Une mission d'information s'est constituée ; des recommandations ont été formulées, discutées et largement retenues lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2020. D'une certaine façon, la boucle était bouclée. Cette méthode illustre tout l'intérêt du travail de contrôle et des suites qui peuvent lui être données, y compris sur un sujet sensible comme peut l'être l'immigration.

Le deuxième point concerne le transfert de charges financières indûment opéré par l'État vers les collectivités territoriales à la faveur du paiement de ces taxes. Bien souvent, nous avons pu constater que les associations venant en aide aux étrangers sollicitent l'appui des services sociaux des communes pour permettre la prise en charge de ces taxes, mais nos communes ne sont pas là pour payer les taxes imposées par l'État aux étrangers. En réduisant le montant des taxes demandées aux étrangers, nous avons, je crois, permis de diminuer une partie de ce transfert indirect et indu de charges vers les collectivités territoriales.

Le dernier point est, en revanche, moins favorable. Lors de nos travaux, et plus particulièrement lors d'un déplacement à la sous-préfecture du Raincy en Seine-Saint-Denis, j'avais été très frappé par les difficultés rencontrées par certains étrangers pour obtenir des rendez-vous en préfecture et par l'émergence d'un phénomène de commercialisation frauduleuse de ces rendez-vous. Cette commercialisation est le plus souvent le fait d'aigrefins qui revendent ces créneaux à des tarifs élevés : 50, 100, 200 euros, voire plus.

Quelle que soit notre opinion sur les flux migratoires et sur la façon d'y répondre, nous ne pouvons pas accepter cette situation. L'État doit accueillir les étrangers en préfecture dans des délais raisonnables, sans que ceux-ci aient à payer quelque somme que ce soit pour obtenir un rendez-vous. Je sais que Stella Dupont, à qui je vais céder la parole, partage ce point de vue et je crois qu'elle a choisi d'approfondir ce sujet avec Jean-Noël Barrot dans le cadre du Printemps de l'évaluation.

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Merci, chers collègues, de nous donner l'occasion de présenter ce bilan.

Effectivement, je partage complètement la préoccupation de M. Parigi sur la revente frauduleuse de créneaux de rendez-vous pour les étrangers dans les préfectures. Cette situation n'est pas acceptable et j'approfondirai effectivement la question de l'accès des étrangers aux rendez-vous en préfectures avec Jean-Noël Barrot à l'occasion du Printemps de l'évaluation.

Jean-François Parigi l'a dit, les trois quarts de nos recommandations ont été retenues dans le cadre de la loi de finances pour 2020, ce qui est positif.

Je ne vais pas égrener les seize propositions, je vais plutôt vous exposer les grands axes de ce qui a été retenu et de ce qui ne l'a pas été.

Les propositions retenues ont permis de simplifier les taxes appliquées, d'abaisser leur montant et de renforcer les pouvoirs du Parlement.

La simplification des taxes est réelle puisque, conformément à notre recommandation, nous sommes passés de treize à cinq montants différents et les montants retenus, qui peuvent s'additionner, sont désormais des montants ronds, plus aisés à comprendre : 0, 25, 50, 180 et 200 euros. En divisant par presque trois le nombre de taxes, le Parlement a amélioré la lisibilité du dispositif, facilité sa compréhension et favorisé sa bonne application par les personnels des préfectures.

Le montant des taxes a également été abaissé de manière significative. Pour la situation la plus courante, à savoir la première délivrance ou le renouvellement d'une carte de séjour temporaire, le montant a été abaissé de plus de 15 %, passant de 269 à 225 euros, soit 44 euros d'économies. Ce montant se décompose en une taxe de 200 euros et un droit de timbre de 25 euros.

Un montant de 44 euros d'économie, cela peut paraître peu mais si une famille avec un enfant majeur à charge renouvelle trois titres de séjour en même temps, cela représente une économie cumulée d'environ 125 euros ; ce n'est pas neutre. Même si j'étais partisane d'une baisse encore plus prononcée, cette économie est bienvenue d'autant plus qu'elle s'est appliquée aux titres délivrés et renouvelés à compter du 1er janvier 2020, c'est-à-dire quelques semaines après notre vote et avant la dégradation du contexte économique que nous connaissons. Je souligne d'ailleurs la rapidité avec laquelle le ministère de l'intérieur a su, en peu de temps, adapter ses systèmes d'information afin que les nouveaux montants s'appliquent dès le 1er janvier 2020.

L'ampleur de cette baisse est plus importante encore pour les personnes régularisées dans le cadre du dispositif d'admission exceptionnelle au séjour, dont nous avions beaucoup parlé en commission et dans l'hémicycle. Pour ces personnes, le montant dû au moment de la régularisation est passé de 609 à 425 euros, soit 184 euros en moins, ce qui est très significatif. Encore une fois, j'aurais souhaité aller plus loin, notamment pour supprimer l'exigence du paiement de 50 euros au moment du dépôt de la demande ; je salue néanmoins l'avancée que nous avons collectivement obtenue.

La modification des articles du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA) relatifs à la taxation des titres de séjour a également eu pour effet d'affermir les pouvoirs du Parlement. Le principe des fourchettes de taxes évoqué par Jean-François Parigi a été supprimé. Désormais, les montants des taxes figurant dans le CESEDA sont des montants précis et le Parlement devra être associé à leur modification. C'est important puisque, en 2016, un simple décret avait multiplié par près de trois le montant de la taxe appliquée au renouvellement de certaines cartes de séjour temporaire sans que le Parlement soit associé à cette décision. Ce type de décret n'est plus possible et seule une disposition législative pourra demain modifier le montant des taxes.

Toutes nos recommandations n'ont cependant pas été satisfaites. Quatre n'ont pas été retenues, et, en particulier, dans deux cas, cela me semble regrettable.

Il est ainsi dommage que notre demande de publication du produit annuel de la taxation des titres de séjour n'ait pas été satisfaite. Cette information n'est disponible nulle part : ni dans les documents budgétaires – pas même dans le fascicule Voies et moyens –, ni dans le rapport annuel que le ministère de l'intérieur remet au Parlement sur les orientations pluriannuelles de la politique de l'immigration et de l'intégration. Le ministère de l'intérieur explique cette situation par l'absence de timbre fiscal propre à ces paiements, qui ne permettrait pas d'isoler ce flux financier. Cette explication technique ne peut nous satisfaire et nous devrions, au minimum, disposer d'une estimation par le Gouvernement du produit de ces taxes.

Sans cet élément, il est difficile de mesurer le coût pour le budget de l'État de la réforme engagée. Pour l'heure, nous ne sommes pas en état de confirmer ou d'infirmer la prévision de 30 millions d'euros établie en novembre 2019. Avec Jean-François Parigi, nous renouvelons donc notre souhait de connaître le montant de cette recette, éventuellement, monsieur le rapporteur général, dans les prochains documents budgétaires.

La deuxième recommandation non retenue dont la satisfaction me tient à cœur concerne la situation des conjoints étrangers de Français.

À l'heure actuelle, un étranger ou une étrangère marié à une citoyenne ou à un citoyen français reçoit de plein droit une carte de séjour d'une durée maximale d'un an, alors que l'épouse ou l'époux étranger d'un ressortissant européen résidant en France reçoit un titre de séjour d'une durée maximale de cinq ans. De ce fait, les conjoints étrangers de Français sont tenus de renouveler plus fréquemment leur titre de séjour que les conjoints étrangers des ressortissants communautaires en France et doivent payer plus fréquemment les taxes associées à ce titre.

Le Défenseur des droits s'est ému de cette situation, et je regrette que notre recommandation visant à exonérer les conjoints étrangers de Français du paiement des taxes liées à la délivrance et au renouvellement de leur titre de séjour n'ait pas été retenue. Comme je l'ai fait l'an dernier, je prendrai une initiative lors de l'examen du prochain projet de loi de finances.

De la même façon, je souhaite, à titre personnel, que la baisse des taxes engagée en 2020 se poursuive et soit accentuée dans les années à venir. Même si les montants des taxes ont été abaissés, ceux-ci demeurent élevés : 225 euros pour un titre de séjour à renouveler, parfois, chaque année, ce n'est pas neutre. Les associations que Jean-François Parigi et moi avons auditionnées récemment nous ont confirmé que, si la baisse des taxes décidée il y a un an était bienvenue, des difficultés persistent.

À mon sens, je crois que nous devons résolument aller vers la délivrance de titres de séjour d'une durée plus longue et moins coûteux afin de favoriser l'intégration des étrangers résidant légalement sur notre territoire, dans une logique de simplification administrative et d'allègement du travail de l'administration.

L'évolution récente est intéressante mais doit encore être amplifiée. Depuis 2016, des cartes de séjour pluriannuel peuvent être délivrées. Cinq ans plus tard, plus de 500 000 cartes de ce type ont été remises et, dans le même temps, le stock des cartes de séjour temporaire et des visas de long séjour valant titre de séjour est passé de 564 000 à 311 000 documents.

Ces pas dans la bonne direction doivent être confirmés et s'accompagner d'une véritable réflexion sur la structuration des titres de séjour. Comme la Cour des comptes l'a écrit il y a quelques mois dans son rapport sur l'entrée, le séjour et le premier accueil des personnes étrangères, « il serait pertinent que toutes les voies susceptibles de désengorger le régime du séjour soient explorées, en faisant basculer certaines catégories de cartes de séjour temporaires vers des titres pluriannuels et certains titres pluriannuels vers des cartes de résident ».

Si la mission d'information dont j'ai eu le grand plaisir de mener les travaux avec Jean-François Parigi a permis d'utiles avancées, en une matière pourtant sensible qui nous divise parfois et peut susciter des débats particulièrement vifs, j'espère donc que d'autres suivront, sur les taxes comme sur la structuration des titres de séjour. Il faudrait y travailler dans le cadre d'une prochaine mission, et je me tiens, chers collègues, à votre disposition.

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Merci, monsieur Jean-François Parigi et madame Stella Dupont. En effet, il s'agissait d'une mission à risque sur un sujet particulièrement sensible. Vous avez su garder la tête froide et éviter les risques de dérapage ; c'est tout à fait remarquable.

Toutes les recommandations formulées n'ont pas été suivies mais, dans l'ensemble, la mission a obtenu satisfaction. Je ne sais pas si cela a pu alléger le travail des préfectures. Avez-vous pu obtenir des informations sur ce point ?

Je retiens également votre volonté de poursuivre votre travail, d'abord dans le cadre de vos travaux du Printemps de l'évaluation, mais aussi en ce qui concerne la connaissance du produit annuel de la taxation des titres de séjour. Il est incroyable que ce chiffre ne soit pas disponible ! Nous continuerons donc d'interroger le ministère pour l'obtenir.

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Tout d'abord, je remercie Stella Dupont et Jean-François Parigi pour leur travail. De telles communications sur le suivi des recommandations des missions sont toujours très utiles et instructives ; il est intéressant de voir quelles recommandations ont été satisfaites et lesquelles ne l'ont pas été.

J'ai bien compris que nous nous ne connaissons pas précisément le produit annuel de la taxation des titres de séjour et que nous n'en avons que des estimations, qui proviennent soit de votre travail, soit du ministère de l'intérieur. Je rejoins l'étonnement du président Woerth quant à l'absence de publication de ce chiffre. Toutefois, pouvez-vous estimer l'évolution du produit annuel de la taxation des titres de séjour, par exemple sur la durée de la législature ?

Vous avez également présenté la situation problématique des conjoints étrangers de citoyens français, qui acquittent des taxes sur les titres de séjours plus fréquemment que les conjoints étrangers de ressortissants de l'Union européenne résidant en France. Peut-on isoler, dans le produit total de la taxation sur les titres de séjour, la part acquittée par des conjoints étrangers de citoyens français ?

Votre recommandation n° 10, « Autoriser le paiement échelonné des taxes tout en assurant la délivrance du titre de séjour original dès l'enregistrement du premier paiement », me paraît tout à fait pertinente. Je n'arrive pas à comprendre pourquoi elle n'est pas satisfaite. Sont-ce des considérations techniques ou politiques qui y font obstacle ?

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Merci, chers collègues, pour ce travail remarquable. Que 75 % des recommandations soient mises en œuvre après dix-huit mois seulement est assez exceptionnel. C'est le reflet d'un travail bipartisan, sur un sujet délicat, qu'il convient de saluer collectivement. Le groupe La République en marche a été particulièrement vigilant à poursuivre ce travail d'évaluation sur le temps long et les avancées permises par cette mission d'information montrent l'importance de ce travail.

Vous avez évoqué un phénomène de subvention cachée des collectivités territoriales via les associations. Pouvez-vous estimer, dans le produit total de la taxation des titres de séjour, la part qui correspond à ces subventions cachées des collectivités territoriales ?

Indépendamment de votre recommandation n° 13, « Publier le produit annuel de la taxation des titres de séjour », avez-vous rencontré durant votre mission des difficultés pour obtenir des informations ? Et vous êtes-vous interrogés ou le ministère de l'intérieur vous a-t-il donné des informations sur ce que coûterait un chiffrage précis du produit annuel de la taxation des titres de séjour ?

Quant à la commercialisation frauduleuse des rendez-vous en préfecture, pouvez-vous, d'une manière ou d'une autre, estimer l'ampleur du phénomène ?

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Je remercie moi aussi, très sincèrement, nos deux collègues pour le travail effectué. Cela démontre qu'un travail de fond et des recommandations bien ciblées peuvent permettre d'obtenir des résultats – puisque douze des seize recommandations sont satisfaites. C'est tout l'intérêt des travaux de « coconstruction » et de concertation.

Vous avez parlé de cinq montants de taxation différents. Pouvez-vous donner des détails sur les variations et sur les raisons de ces applications différentes ?

Je m'interroge également sur la recommandation n° 16, qui est de « modifier les conditions de détermination du montant de la taxe due par les ressortissants britanniques […] pour ne plus fixer celui-ci par renvoi au montant acquitté par lesétrangers entrés en France au titre du regroupement familial en tant qu'enfants mineurs ” » : quelles seront les conséquences exactes de la sortie du Royaume-Uni de l'Union européenne sur la situation des ressortissants britanniques séjournant en France, qui n'ont pas eu à solliciter de titre de séjour en 2020 ? Devront-ils en solliciter un à l'avenir et quel sera alors le montant de la taxe ?

Quant à la recommandation n° 13, il est incompréhensible que le produit annuel de la taxation des titres de séjour ne soit pas publié. On peut imaginer que c'est techniquement possible. Dès lors, où se situe le blocage ?

S'agissant des ventes frauduleuses de rendez-vous en préfecture, avez-vous constaté une amélioration de la situation ou une diminution du délai de traitement des demandes de titre de séjour ? Comment résoudre ce problème ?

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À mon tour, je félicite nos deux collègues pour cet exercice de travail parlementaire réussi.

Comme vous tous, monsieur le président, chers collègues, je suis sidéré que la recommandation n° 13 ne soit pas satisfaite et que le produit annuel de la taxation des titres de séjour ne soit pas publié. Comment l'expliquer ?

S'agissant des collectivités territoriales qui sont amenées, via les associations, à participer au paiement des taxes sur les titres de séjour, ce sont souvent les collectivités les plus pauvres qui sont concernées, puisque c'est chez elles que l'on trouve le plus de demandeurs de titre de séjour.

Concernant la vente frauduleuse de rendez-vous en préfecture, je peux témoigner de mon expérience à la sous-préfecture de Sarcelles : tous les matins, à la vue de tous, des individus organisent la file d'attente et distribuent les places en se faisant rémunérer. On sait que cela existe et que c'est frauduleux, mais j'ai l'impression que c'est peu réprimé. Il faut que l'État et la police fassent respecter le droit.

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Effectivement, c'est insupportable. Il faudrait savoir si des mesures ont été prises.

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Comme tous, je salue la qualité du travail de la mission. Votre travail de fond, chers collègues, montre que, au delà de la taxation des titres de séjour, d'autres sujets sont extrêmement importants, notamment le problème de la fraude. Peut-être pourrait-on comparer la situation avec ce que qui a été fait à l'étranger, dans les pays de départ, par France‑Visas et par les ambassades, puisque nous avons a réussi à faire disparaître un certain nombre de problèmes de corruption et à sécuriser les choses ?

Je m'interroge sur la situation des étudiants étrangers, qui doivent renouveler leur titre de séjour dans le contexte complexe de la crise sanitaire liée à l'épidémie de la covid‑19. Sont-ils identifiés ? A-t-on pu mesurer leurs difficultés ? Une tarification allégée est-elle envisagée pour les aider à surmonter la crise ?

Enfin, je rejoins mes collègues concernant les difficultés de fonctionnement des préfectures, qui ont du mal à faire face au traitement des demandes de titre de séjour. Une plus grande efficacité serait bienvenue. Nous avons déjà pu voir que le ministère de l'intérieur savait réagir très vite aux préconisations des parlementaires.

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Je me félicite du rapport de la mission d'information relative à la taxation des titres de séjour et du suivi de la mise en œuvre de ses recommandations. Si le rapport reconnaissait le niveau excessif de la taxation et préconisait la baisse de certains tarifs, et même si cette baisse a été partiellement mise en œuvre, la taxation des titres de séjour demeure très élevée et excessive pour un public dont la situation est souvent très précaire.

J'insiste également sur le sujet de la dématérialisation des demandes de rendez-vous en préfecture, car c'est elle qui entraîne le trafic de rendez-vous en préfecture dont vous avez parlé. C'est un véritable trafic ! Pour le département de la Seine-Saint-Denis, nous avions demandé une commission d'enquête sur le sujet et nous avons plusieurs fois interpellé la préfecture sans recevoir de réponse. Il est absurde que des gens qui étaient en situation régulière se retrouvent soudainement en situation irrégulière en raison de l'impossibilité d'obtenir le rendez‑vous nécessaire pour demander le renouvellement de leur titre de séjour. La situation est alarmante.

Je retiens que la mission n'est pas terminée. Vous faites des propositions, comme celles de délivrer des titres de séjour plus longs, de simplifier les démarches, voire de réévaluer la structuration des titres. Tout cela va dans le bon sens. Toutefois, des associations, comme La Cimade, ont fait d'autres propositions, par exemple celles de doter les services préfectoraux de moyens suffisants pour répondre à l'ensemble des demandes, de développer des services de prise de rendez-vous non dématérialisés et de s'engager sur des délais de traitement raisonnables.

Nous avions déjà déposé des amendements concernant à la fois le niveau de la taxation des titres de séjour, les délais de traitement des demandes et la prise de rendez-vous non dématérialisée. Que pensez-vous de ces propositions ? Allez-vous continuer à travailler en ce sens ?

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Je remercie Stella Dupont et Jean-François Parigi pour ce travail important et intéressant, ainsi que pour le suivi de la mise en œuvre des recommandations de la mission d'information.

Il s'agit d'un travail qui doit se poursuivre. Certaines recommandations qui prévoyaient une baisse plus substantielle du niveau de taxation des titres de séjour n'ont pas été acceptées en l'état. Je pense notamment à la recommandation n° 3 d'abaisser la taxe due en cas de renouvellement d'une carte de séjour temporaire, qui passe de 250 à 200 euros alors que le rapport proposait 100 euros. Je pense aussi à la recommandation n° 4 d'abaisser le montant du droit de visa de régularisation, qui passe de 340 à 200 euros au lieu de 100 euros.

En outre, la recommandation n° 8, « exonérer les conjoints étrangers de Français du paiement des taxes liées à la délivrance et au renouvellement de leur titre de séjour pour mettre fin à la discrimination à rebours relevée par le Défenseur des droits dans sa décision no MLD‑2014-071 du 9 avril 2014 », n'a pas non plus été acceptée…

La réflexion doit vraiment se poursuivre sur ce sujet.

Je m'interroge également sur l'impossibilité d'obtenir des informations plus précises sur le produit de ces taxes. Nous ne pouvons pas nous contenter de l'explication selon laquelle certains éléments techniques manquent : nous devons avoir des précisions sur ces données.

Je ne suis pas confronté au problème de la revente – du trafic – de rendez-vous que vous évoquez, mais il y a une véritable urgence à agir sur ces questions.

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Je pense que nos deux collègues ont choisi le bon créneau : une missions sur un sujet pas trop important mais des recommandations qui aboutissent.

Concernant la recommandation n° 8, serait-il possible de procéder par étapes, en commençant par exonérer tous les conjoints ressortissants d'États membres de l'Union européenne ? Je crois me souvenir qu'ils sont également redevables.

Je ne comprends pas trop l'utilité de la recommandation n° 10. Permettre l'échelonnement du paiement ne me paraît pas une bonne idée : ce sont de petites sommes, et le coût de gestion d'un échéancier de 15 ou 20 euros par mois me paraît disproportionné.

Quant à la recommandation n° 13, tous les collègues ont regretté l'absence de connaissance du montant perçu. Ne pourrait-on, monsieur le président, dans le cadre de l'examen du prochain projet de loi de finances, adopter un amendement de nomenclature afin d'obliger l'administration ?

En ce qui concerne la recommandation n° 16, comment l'administration a-t-elle pu décider d'une telle exonération ? Est-ce en application d'un vote du Parlement ?

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Je voudrais remercier mes collègues pour ce travail. Les avancées sont certaines, même si des progrès restent à faire. Nous attendons notamment de pouvoir connaître et comprendre l'évolution des recettes.

Des titres d'une durée de validité plus longue me paraissent également nécessaires, au regard des risques de trafic et des charges administratives.

Même dans les territoires ruraux, il est difficile d'obtenir des rendez-vous.

Je souhaite que l'on puisse continuer à avancer et aboutir sur ce dossier.

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Je tiens à féliciter les rapporteurs : il est satisfaisant de voir que 75 % de leurs propositions ont été reprises.

Je reviens sur le Brexit et la recommandation n° 16 : l'exonération est-elle provisoire ou pérenne ?

Par ailleurs, un passeport – plutôt qu'un titre – de séjour qui corresponde au projet de vie personnelle et professionnelle est-il envisageable ? Beaucoup d'angoisses naissent de ces situations, avec des services de l'État qui n'arrivent pas toujours à tenir les délais. Pourrait-on, dès lors, allonger les durées de validité des titres de séjour ?

Enfin, un tarif global pour les titres familiaux, qui tiendrait compte de la composition de la famille, serait-il aussi envisageable ?

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Ne faudrait-il pas également, chers collègues, s'interroger sur les demandes de naturalisation. Par exemple, récemment, un jeune homme est venu me voir, sportif de haut niveau, qui voudrait être naturalisé. Il a passé il y a un peu plus de deux ans un test de langue française qui n'est valable que deux ans. Il doit donc le passer à nouveau, et, dans ma circonscription, il lui est demandé de patienter trois mois. S'il va à La Rochelle, il en a pour un mois et demi. Et s'il paye quarante euros de plus – ce qui ferait passer le prix de 170 à 210 euros – il peut obtenir son rendez-vous en trois semaines. Beaucoup de choses sont à revoir dans ces procédures : je ne suis pas sûr qu'il faille repasser un test de langue française tous les deux ans.

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En effet, le niveau de langue a plutôt tendance à s'améliorer au bout de deux ans en France ! Effectivement, il y a beaucoup de situations absurdes. Par ailleurs, je suis d'accord, il est particulièrement pertinent de travailler sous un angle très précis.

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Concernant l'évaluation et le contrôle, les difficultés sont liées au fait qu'il n'y a pas de timbre fiscal propre à ces recettes, qui sont versées au budget général – il n'y a donc pas de visibilité, même si je pense qu'il devrait être possible d'apporter plus de lisibilité. Selon les estimations du ministère de l'intérieur, le produit de la taxation des titres de séjour aurait été de 157 millions d'euros en 2013, 193 millions d'euros en 2017 et 181 millions d'euros en 2019. Les recettes sont naturellement liées au nombre de titres accordés et reflètent donc les flux.

La taxe applicable aux conjoints étrangers n'est due que par les étrangers qui ne sont pas ressortissants de l'Union européenne, puisqu'au nom du principe de libre circulation, les ressortissants européens ne sont pas soumis à l'obligation de disposer d'un titre de séjour. Le produit de cette taxation des conjoints étrangers non communautaires est estimé à 20 millions d'euros. L'incohérence entre la situation d'un conjoint de Français et la situation d'un conjoint de ressortissant européen pose un problème d'équité. Un alignement entre conjoints de Français et conjoints de ressortissants de l'Union européenne aurait du sens.

À propos de l'échelonnement du paiement des taxes, évoqué par plusieurs collègues, le ministère de l'intérieur souligne un surcroît de travail administratif pour des services des étrangers des préfectures déjà très occupés. Nous souhaitons néanmoins qu'un étalement soit possible dans le cas de certains titres, qui peuvent être onéreux.

Nous n'en sommes plus aux files d'attente en préfecture aujourd'hui car les rendez-vous ont été dématérialisés. C'est une autre forme de commercialisation illicite des rendez-vous que nous constatons, plus perfectionnée. Des robots inscrivent massivement, prennent des rendez-vous, puis les commercialisent de façon illicite – d'où l'intérêt de Jean-Noël Barrot et moi-même pour l'accès des étrangers aux préfectures ; nous vous rendrons compte de nos travaux, chers collègues, au printemps.

J'en viens au sujet des différents tarifs de taxe. Tous les étrangers venant en France ne sont pas dans la même situation, selon qu'ils viennent par exemple pour y travailler ou pour y étudier. La base est de 200 euros, mais peuvent s'y appliquer des réductions ou des majorations dans certains cas de figure. Le droit de régularisation, par exemple, ajoute 200 euros à cette base – à titre personnel, je voudrais qu'il soit plus réduit. Le droit de timbre est fixé, quant à lui, à 25 euros pour tous les titres. Le total fait, dans ce cas, 425 euros. Pour un étudiant, nous avons un tarif inférieur : 50 euros de taxe et 25 euros de droit de timbre – donc 75 euros au total.

Je n'ai pas connaissance des demandes liées à la baisse de la taxe pour les étudiants étrangers. Il me semble que cela nécessiterait une modification législative – tout passe par la loi désormais. En revanche, la dématérialisation des demandes de titre des étudiants a été accélérée dans le contexte de crise sanitaire.

Jean-Noël Barrot et moi allons rencontrer des associations d'étudiants étrangers pour voir comment se passe cette dématérialisation. Est-elle facteur d'amélioration ou de difficultés pour les étudiants étrangers ? Les premiers échos semblent plutôt positifs, les étudiants semblent à l'aise avec l'outil et cela semble simplifier la demande de titre et non la complexifier, mais nous vous rendrons compte, chers collègues, de nos constats sur le sujet.

La situation des ressortissants britanniques a été évoquée plusieurs fois. Nous sommes aujourd'hui dans une situation transitoire : n'étant plus des ressortissants de l'Union européenne, ils ont jusqu'au 1er octobre 2021 pour solliciter un titre de séjour et bénéficient d'une exonération de taxe – en somme, ils sont dehors mais toujours un peu dedans…

Les moyens des personnels en préfecture sont précisément l'objet de notre travail d'évaluation du printemps. Nous aurons donc bientôt davantage d'éléments à vous communiquer. Nous nous concentrons sur ce sujet car nous avons tous constaté, dans nos circonscriptions, quelle que soit l'importance des flux migratoires, que certaines personnes, qui considèrent leur demande comme légitime, avaient des difficultés à obtenir un titre. Un problème d'embolisation demeure, et cela pose aussi la question de la dématérialisation. Dans une décision de février dernier, une juridiction administrative a jugé que le développement par les préfectures de la dématérialisation des titres de séjour n'a pas de base légale. Nous interrogerons le ministère de l'intérieur.

Je suis assez favorable à l'idée de titres familiaux, même s'il faut avoir à l'esprit que seuls les majeurs sont redevables des taxes sur les titres de séjour. Néanmoins, pour une famille, les coûts respectifs des différents titres s'ajoutent les uns aux autres. Pourquoi donc ne pas imaginer des évolutions ?

Quant à un éventuel allongement de la durée de validité des titres, le sujet est extrêmement sensible, mais, comme vous l'avez relevé, monsieur le président de la commission des finances, il y a beaucoup de situations absurdes en matière de droit des étrangers.

Quel que soit notre avis sur la gestion de la politique migratoire en France, il faut bien reconnaître qu'il y a des dysfonctionnements. Un peu de recul permet d'y travailler et d'améliorer certains aspects. C'est ce qu'évoquait Hervé Pellois à propos des tests de langue française. Dans un État de droit, qui place l'égalité est au cœur de ses valeurs, le fait que certains doivent payer plus pour obtenir un rendez-vous doit nous interpeller. Des améliorations sont nécessaires, auxquelles l'esprit constructif dont nous venons de faire preuve permettra d'aboutir.

Jean-Noël Barrot et moi avons travaillé sur l'insertion professionnelle des étrangers et rendu nos conclusions il y a quelques mois. C'est également une matière à laquelle il faudra revenir dans ce même esprit de consensus. L'idée selon laquelle il y aurait d'autant moins d'étrangers attirés par la France que les obstacles seraient nombreux est contredite par l'observation de ces dernières années. C'est beaucoup plus complexe, et il faut changer notre façon de voir.

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J'ajouterai que le service, dans les préfectures, s'est amélioré, mécaniquement, sous l'effet de la réduction du nombre de montants différents, passé de treize à cinq, et, surtout, parce que le ministère de l'intérieur a profité de cette réforme pour adapter son système d'information. Désormais, le montant de la taxe est renseigné automatiquement par l'outil informatique en fonction de la nature du titre de séjour délivré.

Quant à l'économie réalisée par les collectivités territoriales, rappelons que certaines soutiennent les différentes associations qui, elles-mêmes, aident les demandeurs, tandis que les services d'autres, notamment la ville de Clichy-sous-Bois, aident et accompagnent directement le demandeur. Préciser le montant économisé ou même donner un ordre de grandeur est donc difficile. Une chose est sûre, cependant : comme il ressort des auditions tant d'associations que de communes que nous avons menées, avoir recours à la ville est nécessaire pour une association lorsque le nombre de demandes explose et qu'elle-même ne peut plus suivre. Il serait peut-être possible, cependant, de préciser ce qu'il en est dans le cadre des suites données à ces travaux.

Je tiens également à dire que, malgré la sensibilité du sujet et nos approches initialement tout à fait différentes, Stella Dupont et moi avons, sous l'effet des situations rencontrées, pris le parti du bon sens, qui a inspiré nos propositions.

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Merci, cher Jean-François Parigi, chère Stella Dupont, pour cet excellent travail, qui montre qu'il faut un suivi des recommandations formulées dans le cadre des rapports d'information. J'ai d'ailleurs écrit à chaque rapporteur pour le lui indiquer, et nous inscrirons régulièrement ce travail à l'ordre du jour de la commission. Nous sommes là au cœur du mécanisme de contrôle parlementaire.

Je propose que nous écrivions aux ministres compétents sur les points saillants évoqués au cours de la réunion. L'objectif est d'obtenir des précisions et de connaître les intentions du Gouvernement lorsque les recommandations ne sont pas suivies.

Informations relatives à la commission

La commission a désigné M. Patrick Hetzel rapporteur sur la proposition de nomination de Mme Florence Peybernes à la présidence du Haut Conseil du commissariat aux comptes.