Publié le 1er juin 2018 par : Mme Florennes, M. Lagleize, M. Bolo, Mme Deprez-Audebert, M. Mathiasin, M. Ramos, M. Turquois, M. Barrot, Mme Elimas, M. Garcia, M. Lainé, Mme Lasserre-David, M. Mignola, M. Pahun, Mme Poueyto, M. Thierry Robert, M. Balanant, Mme Bannier, Mme Benin, M. Berta, M. Bourlanges, M. Bru, M. Cubertafon, Mme de Sarnez, Mme de Vaucouleurs, M. Duvergé, Mme El Haïry, Mme Essayan, M. Fanget, M. Fesneau, M. Fuchs, Mme Gallerneau, M. Hammouche, M. Isaac-Sibille, Mme Jacquier-Laforge, M. Joncour, M. Laqhila, M. Latombe, Mme Luquet, M. Mattei, Mme Mette, M. Michel-Kleisbauer, M. Millienne, M. Frédéric Petit, Mme Maud Petit, Mme Vichnievsky, M. Waserman.
I. – Pour l'application du présent article, on entend par branchements collectifs l'ensemble des ouvrages qui, dans les limites d'une propriété comportant un ou plusieurs immeubles à usage principal d'habitation sur plusieurs niveaux, concourent à l'alimentation électrique de chacun des points de livraison, quelle que soit l'appellation de tout ou partie de ces ouvrages, telle que, notamment, branchement intérieur, colonne montante, dérivation collective ou individuelle.
II. – Nonobstant toutes stipulations contraires des cahiers des charges de concession de distribution publique d'électricité et des contrats concernant l'accès aux réseaux publics de distribution d'électricité ou la fourniture d'électricité, les ouvrages visés au I du présent article, mis en service avant la date d'entrée en vigueur de la présente loi, sont réputés incorporés de plein droit aux réseaux publics de distribution d'électricité. Toute personne, physique ou morale, qui, revendiquant la propriété desdits ouvrages, estimerait que cette incorporation est de nature à lui causer un préjudice peut, dans les trois mois suivant la date d'entrée en vigueur de la loi, en demander réparation, devant le juge, à l'autorité organisatrice de la distribution d'électricité attributaire.
Cette intégration est également de plein droit pour tous les ouvrages visés au I, mis en service à compter de la date d'entrée en vigueur de la présente loi.
Dans tous les cas, les gestionnaires de réseaux publics de distribution ont, du fait de cette incorporation, la charge intégrale de ces ouvrages et en assurent l'installation, l'exploitation, la maintenance, le renforcement et le renouvellement ainsi que l'exécution des travaux induits par le passage des câbles électriques.
III. – Afin de garantir le droit à l'électricité pour tous, inscrit à l'article L. 121‑1 du code de l'énergie, les propriétaires et occupants ne peuvent, tant que l'alimentation électrique par le réseau public est nécessaire, s'opposer à l'installation, dans les parties communes d'une propriété, des ouvrages visés au I, à leur exploitation, à leur maintenance, à leur renforcement et à leur renouvellement. Seuls les préjudices anormaux résultant d'une exécution défectueuse des travaux ouvrent droit à réparation devant le juge.
IV. – Les dispositions du présent article entrent en vigueur six mois après la publication au Journal officiel de la loi. Toutefois, les gestionnaires de réseaux publics de distribution d'électricité doivent, conformément aux obligations de sécurité que leur impose l'article L. 322‑9 du code de l'énergie, prendre en charge la mise en sécurité permettant de garantir durablement le bon fonctionnement de tout ouvrage visé au I dont la vétusté présente un danger imminent pour les personnes et les biens.
Les colonnes montantes d'électricité sont les ouvrages basse tension qui acheminent l'électricité depuis le pied d'un immeuble jusqu'aux compteurs des logements.
La question de la prise en charge de la rénovation des colonnes montantes d'électricité, assurant dans les immeubles l'alimentation de l'électricité à chaque étage, est devenue, depuis quelques années, une problématique sérieuse compte-tenu des divergences persistantes quant à leur propriété.
Dans de nombreuses situations, cette problématique a pu conduire les propriétaires d'immeubles à renoncer à des travaux de rénovation énergétique de leurs biens.
Schématiquement, on peut retenir que le cœur du débat porte sur le point de savoir si :
* Par défaut, la loi n° 46‑628 du 8 avril 1946 sur la nationalisation de l'électricité et du gaz et le décret n°46‑2503 du 8 novembre 1946 relatif aux colonnes montantes d'électricité ont consacré l'intégration de l'ensemble des colonnes montantes au patrimoine concédé par les Autorités Organisatrices de la Distribution publique d'Electricité (AODE) aux Gestionnaires des Réseaux de Distribution (GRD), sauf opposition expresse des propriétaires. Auquel cas l'entretien et la rénovation sont à la charge des distributeurs d'électricité. Il s'agit de la position adoptée par de nombreux propriétaires d'immeubles, par les autorités organisatrices de la distribution et le Médiateur National de l'Energie, position renforcée par le fait que chaque fois que la rénovation, le renforcement ou le renouvellement d'une colonne ait été nécessaire, EDF y a procédé naturellement, agissant de fait en propriétaire, afin de favoriser le
développement des usages électriques (passage de la tension de 100 à 220 V ou installation des compteurs « bleus ») sans susciter de différends ou de contentieux ;
* Ou si, à l'inverse, seules les colonnes montantes établies après l'entrée en vigueur d'un contrat de concession relatif à la distribution d'électricité accompagné d'un cahier des charges conforme au modèle approuvé au niveau national en 1992 font partie du réseau de distribution publique d'électricité. Il s'agit de la position retenue notamment par la société ENEDIS en sa qualité de principal GRD sur le territoire national.
Depuis maintenant près de dix ans, toutes les tentatives de médiation se sont révélées vaines. À la suite de ces contentieux, ouverts par les propriétaires privés et les bailleurs sociaux, la jurisprudence s'oriente aujourd'hui majoritairement vers une présomption d'appartenance des colonnes au réseau public, et la possibilité d'abandon sans condition mais sans position unifiée.
La mission d'expertise du CGEDD à l'origine du rapport du Gouvernement remis au parlement en mars 2017, dénombrait environ 1.600 000 de colonnes montantes dont environ 50 % hors concession sur la base d'un inventaire réalisé par ENEDIS, et jugé très imparfait par le CGEDD.
Par ailleurs, l'analyse du CGEDD a permis de confirmer que les craintes d'un problème de sécurité généralisé apparaissent non fondées et permet d'estimer que plus de 90 % des colonnes devraient être considérées en « bon état de fonctionnement ».
Par conséquent, seuls 10 % des colonnes nécessiteraient des travaux de mise en sécurité que l'on peut chiffrer, sur la base d'un coût unitaire de 10 000 € et d'un volume annuel de l'ordre de 16 000 colonnes, à environ 160 M€, à rapprocher des 13.5 Mds € des recettes d'Enedis.
Dans ce contexte, où les enjeux de sécurité et financiers sont réduits, le présent article vise à apporter des solutions aux différentes problématiques rencontrées actuellement en définissant un cadre stable et définitif, et par ailleurs faciliter la mobilisation des propriétaires d'immeubles en faveur de la rénovation énergétique. Ainsi cet article :
* Donne une définition des ouvrages concernés par la réforme proposée (I) :
Les conflits actuels se sont cristallisés sur les colonnes montantes, lesquelles ne constituent toutefois qu'un des éléments (même si c'est le principal) de la partie des branchements située dans les immeubles desservis. Pour prévenir toute difficulté future quant à la définition des ouvrages concernés, le présent amendement :
* Propose que les ouvrages concernés soient les « branchements collectifs » et fournit une définition de cette notion ;
* Limite le champ d'application du dispositif aux seuls branchements collectifs situés dans les immeubles à usage principal d'habitation comportant plusieurs niveaux.
* Assure un transfert global de toutes les colonnes montantes d'électricité, existantes ou à créer, aux AODE (II) :
Le présent amendement pose le principe selon lequel tous les ouvrages sont désormais « réputés » intégrés au réseau public de distribution d'électricité, cette intégration valant pour les ouvrages existants ainsi que pour les ouvrages futurs. Cette intégration prévaudra sur les dispositions en vigueur des cahiers des charges des concessions de distribution publique
d'électricité, voire sur celles des contrats d'accès aux réseaux de distribution ou à la fourniture d'électricité portant sur la propriété des branchements intérieurs et colonnes montantes.
L'article intègre également un dispositif d'indemnisation des propriétaires d'immeubles strictement encadré dans le temps.
* Institue un droit d'occupation permanent des propriétés fondé sur le droit à l'électricité pour tous (III) :
Il s'agit de prendre acte que les branchements intérieurs et colonnes montantes, internes à l'immeuble desservi en électricité, sont indispensables à cette desserte et installés dans l'intérêt même des propriétaires et occupants et qu'ils bénéficient à ce titre d'un droit d'occupation des parties communes auquel les intéressés ne peuvent faire obstacle. La légitimité de ce droit d'occupation se trouve dans « le droit de tous à l'électricité, produit de première nécessité » inscrit à l'article L. 121‑1 du code de l'énergie.
* Prévoit une application différée dans le temps (IV) :
Afin d'éviter que l'exécution immédiate de la loi emporte des effets trop importants pour les gestionnaires de réseau, et notamment pour la société ENEDIS, un différé de six mois est prévu.
Pour autant, et à titre transitoire, une obligation immédiate sera faite aux gestionnaires de réseaux de prendre en charge la rénovation permettant de garantir durablement le bon fonctionnement de toute colonne montante dont la vétusté présente un danger imminent pour la sécurité des personnes et des biens.
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