Mercredi 3 octobre 2018
La séance est ouverte à neuf heures trente.
Présidence de Mme Brigitte Bourguignon, présidente
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La commission procède à l'examen de la proposition de loi visant l'orientation pour l'avenir de la santé (n° 1229) (M. Jean-Carles Grelier, rapporteur).
L'ordre du jour appelle ce matin l'examen de trois propositions de loi déposées par le groupe Les Républicains dans le cadre de l'ordre du jour réservé aux groupes minoritaires de l'opposition.
La commission examine tout d'abord la proposition de loi n° 1229 de M. Jean-Carles Grelier, visant l'orientation pour l'avenir de la santé.
La parole est à M. Jean-Carles Grelier, rapporteur de la proposition de loi visant l'orientation pour l'avenir de la santé.
Le 18 septembre dernier, j'étais, comme un certain nombre d'entre vous sans doute, présent dans la salle des fêtes de l'Élysée pour écouter le Président de la République nous parler de santé. Et, comme vous, j'imagine, je me suis réjoui que le chef de l'État se saisisse en personne de cette importante question. C'est une question transversale qui intéresse chacune et chacun de nos concitoyens, de la néo-natalité jusqu'à la fin de vie. Je me suis réjoui également que le chef de l'État évoque la santé dans son acception la plus large, c'est-à-dire à la fois le volet curatif et le volet préventif. Je me suis réjoui enfin que le Président de la République place le patient au coeur de notre dispositif et de notre organisation.
Visiblement, les orientations étaient les bonnes. Elles rejoignent les constatations que, depuis quelques mois, j'ai pu faire et qui m'ont conduit à déposer devant vous avec mes collègues du groupe Les Républicains, la proposition de loi qui vous est soumise ce matin. Celle-ci a fait l'objet d'un travail approfondi durant plusieurs mois, de plus d'une centaine d'heures d'auditions, et j'ai consacré une partie de mon été à la visite d'établissements. Le constat que j'ai pu faire, sans doute assez partagé sur ces bancs, est celui d'une grande difficulté dans l'organisation de notre système de santé et d'une véritable inquiétude de nos concitoyens au regard de la prise en charge par des professionnels de santé sur l'ensemble des territoires. Mais c'est aussi un cri d'alarme et d'inquiétude de la part des professionnels de santé dans les établissements de santé, au regard de la pression à laquelle ils sont aujourd'hui soumis, pression extrêmement difficile à contenir.
Notre première préoccupation – elle a été énoncée dans la stratégie nationale de santé – doit être la prévention. Elle a fait l'objet d'un rapport récent de deux de nos collègues, Mme Bareigts et M. Isaac-Sibille, et c'est le thème du titre Ier de cette proposition de loi. La prévention ne peut pas se réduire simplement à des moyens budgétaires supplémentaires accordés sur un plan tabac ou toxicologie… Si on veut qu'elle soit efficace et qu'elle produise à terme les effets qu'on est en droit d'attendre, elle doit être organisée. Or le principal défaut de notre système de santé est que la prévention n'est pas gouvernée : sept départements ministériels et douze organismes infra-ministériels se partagent les activités de prévention. Il n'y aucune coordination entre ces différents organismes et surtout, ce qui est peut-être plus grave, aucune évaluation n'est faite des politiques de prévention conduites. Les moyens consacrés à la médecine préventive, qu'il s'agisse de la médecine scolaire ou de la médecine du travail, sont notoirement insuffisants. L'ensemble de notre système ne produit pas les effets que nous serions en droit d'attendre.
C'est pourquoi l'une des propositions que nous avons fait le choix de vous soumettre ce matin vise à organiser notre système de prévention, sans créer de nouveaux comités parce que c'est toujours un exercice à la fois compliqué et coûteux, et que nous ne sommes pas dans ce type de logique. Il existe d'ores et déjà un organisme, Santé publique France, qui remplit, au nom et pour le compte de l'État, une partie de ses activités de prévention. Même si ses moyens sont notoirement insuffisants – son directeur général ne me disait-il pas, dans une de nos dernières auditions, qu'il ne comptait que six experts en prévention au sein des 600 salariés de son organisme ? –, il y a lieu de confier à cette agence une mission interministérielle en la plaçant sous l'autorité du Premier ministre. Cela permettra d'offrir une lecture parfaitement horizontale des différents départements ministériels et de l'action conduite par cet organisme, en un mot de disposer d'une vraie gouvernance de nos activités de prévention.
Pourtant, les choses ne peuvent pas s'arrêter là. Santé publique France ne pourra pas fonctionner efficacement si on ne le dote pas non plus des moyens budgétaires adéquats et correspondants à sa fonction et à sa mission. C'est pourquoi l'une de nos propositions vise à confier à cet organisme, outre la gouvernance, la gestion budgétaire des activités de prévention, en lui attribuant à la fois les crédits inscrits au budget de l'État au titre de la prévention, qui sont de l'ordre de 5 à 6 milliards d'euros par an, et les crédits inscrits dans le budget de l'assurance-maladie – de manière que la prévention soit axée sur une seule et même organisation. Santé publique France présenterait ainsi annuellement à la représentation nationale, et notamment à notre commission, à la fois sa stratégie en matière de prévention et, à la fin de chaque exercice, une évaluation des actions de prévention conduites et de leurs résultats, mesurés par des indicateurs qui seront créés à cette fin.
Il n'y aura pas non plus de prévention efficace sans une sensibilisation, dès le plus jeune âge, aux activités de prévention. C'est pourquoi nous proposons que l'éducation à la santé, qui est sans doute la base de toute politique de prévention, soit enseignée dans les écoles maternelles et primaires, ainsi que dans les collèges et les lycées. Nous voulons que les enseignants soient formés à ce type d'intervention.
Toutes les activités périscolaires qui peuvent être proposées, tel le chant choral, ont évidemment un intérêt pédagogique. Mais l'éducation à la santé présente en plus un intérêt majeur, qui est un intérêt sociétal : c'est au travers des actions d'éducation à la santé que nous parviendrons à conduire une véritable politique de prévention et à corriger, tant que c'est encore possible, tous les comportements qui pourraient porter atteinte à la santé de nos concitoyens. J'imagine, mes chers collègues, que, comme moi, vous avez à de nombreuses reprises ressenti que le meilleur message de prévention routière, c'est encore d'avoir ses propres enfants assis sur la banquette arrière de sa voiture : c'est souvent par le canal des enfants et de l'éducation des enfants que les meilleurs messages – et notamment ceux de santé publique – peuvent être diffusés.
Les intervenants auxquels nous faisons appel dans le cadre du temps périscolaire ou extra-scolaire, tels les éducateurs sportifs, qu'ils soient municipaux ou associatifs, pourraient bénéficier d'une formation en matière de prévention. Nous proposons ainsi que, dans le cadre de la formation pour la licence STAPS, un enseignement de la prévention et d'éducation à la santé soit dispensé. En effet, si l'on veut que les politiques éducatives, notamment en matière de santé publique, soient efficaces, il faut que les enfants entendent partout où ils passent le même discours éducatif, du moins si l'on veut que ce message marque et qu'il produise des effets durables sur la santé de la jeune génération et des futurs adultes qu'ils sont en puissance.
Enfin, et ce point a été soulevé également par nos deux collègues, lorsqu'ils ont présenté leur rapport sur cette importante question de la prévention et de l'éducation à la santé, il ne faut pas négliger la formation des professionnels de santé. Aujourd'hui, dans le cadre des études médicales, la prévention est enseignée, mais n'est pas sanctionnée par un examen. Or chacun s'accorde à reconnaître qu'une discipline universitaire qui n'est pas sanctionnée n'est pas forcément celle qui attire le plus l'attention des étudiants. Il y a là sans doute une correction à apporter.
Le deuxième titre de la proposition de loi est consacré à la formation des professionnels de santé. D'abord à celle de la profession médicale, bien évidemment : la ministre de la santé a déjà évoqué la suppression de la première année commune des études de santé (PACES), qui est effectivement un drame et un massacre, vers lequel on conduit des milliers d'étudiants tous les ans. Certains d'entre eux ont pourtant une vraie vocation à exercer dans le monde de la santé. Mais ils se voient sélectionnés, assez durement, par des QCM à caractère exclusivement scientifique et technique. Il faut sans doute faire évoluer les choses. Je partage, de ce point de vue, la préoccupation de la ministre de la santé.
Il faut vraisemblablement faire évoluer aussi les épreuves classantes nationales (ECN). L'idée de sélectionner des étudiants est assez classique : il n'y a pas aujourd'hui de filière de formation universitaire dans laquelle on ne sélectionne pas les étudiants. En revanche, sélectionner des étudiants et induire ultérieurement, sur cette base, une hiérarchie des spécialités médicales est aujourd'hui préjudiciable. Alors qu'il faut répondre à l'attente des élus des territoires, comme à celles des populations des territoires, la médecine générale est en effet rarement choisie en priorité parmi les spécialités. Les ECN sont sans doute très préjudiciables à ce très beau métier de médecin généraliste, ou de médecin de famille, comment on le disait autrefois.
Dans cette réforme en profondeur, l'un des points marquants de la présente proposition de loi consiste à introduire, comme cela a déjà été expérimenté par Mme la doyenne Richard à la faculté de médecine d'Angers, un examen oral, à la fin de la première année d'études médicales, de manière à apprécier la motivation d'un étudiant à devenir médecin – je dirais ses capacités empathiques, compassionnelles et tout simplement humaines. Celles-ci, en effet, ne sont pas aujourd'hui prises en compte dans la sélection des futurs médecins. Peut-être gagnerait-on à cette inclusion le fait d'avoir des médecins qui répondent exactement à ce qu'attendent les populations, c'est-à-dire des médecins dont c'est la vocation première et le premier projet professionnel.
Permettez-moi un point particulier sur la formation des autres professionnels de santé que les médecins. Nous proposons d'inclure la formation des paramédicaux dans le dispositif licence, master, doctorat – le dispositif LMD. Car il faut qu'on puisse offrir à un certain nombre de professionnels de santé des perspectives de carrière. Ainsi, une infirmière, après avoir obtenu son diplôme d'État, est cantonnée à demeurer infirmière une bonne partie de sa carrière et, si elle est à l'hôpital, à n'avoir, comme seule perspective de développement de sa carrière professionnelle, que la possibilité de passer, à un moment donné, le concours de cadre de santé, lequel la fait sortir du domaine du soin pour que lui soient confiées des tâches un peu plus administratives… Voilà qui n'est pas satisfaisant.
Une infirmière doit avoir la possibilité de reprendre, dans le cours de sa vie professionnelle, un cycle de formation. Elle doit pouvoir acquérir des mentions de spécialité, en fonction de ce qu'ont été ses expériences professionnelles. Car une infirmière qui a passé dix ans dans un service de chirurgie, que ce soit à l'hôpital ou dans un établissement privé, doit pouvoir faire reconnaître, dans le déroulé de sa carrière, y compris dans le montant de sa rémunération, l'acquis de son expérience. Je milite, pour ma part, pour un véritable statut des infirmiers en pratique avancée (IPA) et pour une reconnaissance d'une mention de spécialisation à un niveau bac plus 5, soit un niveau master 2. Nous voulons, avec mes collègues, que cette formation puisse faire l'objet d'une reconnaissance statutaire et salariale pour les futures infirmières.
Nous avons aussi l'idée de développer un cursus LMD dans les soins infirmiers et de faire accéder des infirmiers à un niveau doctoral. Cela favorisera la recherche française et les publications internationales en soins infirmiers, domaine dans lequel la France est aujourd'hui un peu le parent pauvre de l'Europe.
Nous voulons également réfléchir à une conférence pédagogique qui, placée auprès de chaque faculté de médecine, pourrait faire se rapprocher, faire dialoguer et mettre en cohérence les programmes pédagogiques de l'ensemble des formations aux métiers de la santé d'un même territoire. Je sais que les préoccupations de la ministre rejoignent les nôtres à cet égard. Nous pouvons ainsi envisager que puissent dialoguer, dès leurs études, l'ensemble des futurs professionnels de santé. Le Président de la République a parlé, à juste raison, de la mise en place de coopérations de professionnels de santé sur les territoires. Eh bien, cette coopération ne sera efficace et ne produira les effets escomptés que si les professionnels de santé se connaissent et savent ce à quoi ils ont été formés, quel est le niveau et le degré de compétence de tous… Il faut qu'ils apprennent, dès leurs études, à travailler ensemble. Il y a là, me semble-t-il, une piste intéressante.
Mon dernier point porte sur une expérimentation conduite dans un certain nombre d'universités et de facultés de médecine et qui mériterait qu'on la dote d'un véritable statut. Il s'agit de l'expérimentation du patient formateur. Cette expérimentation pourrait intervenir de manière plus régulière et bénéficier d'une vraie reconnaissance statutaire au sein de l'université. Ce n'est pas une révolution en soi, mais simplement l'officialisation de pratiques déjà avérées. Cette reconnaissance permettrait à ceux qui en profitent de jouir d'un statut proche de celui de « collaborateur occasionnel du service public », lequel, défini depuis de longues années par le Conseil d'État, parlera aux juristes présents dans la salle. Il me semble que cela consacrerait la place des patients à l'intérieur du dispositif de formation.
Le troisième titre de cette proposition de loi est consacré à l'accès aux soins. Le constat auquel nous sommes parvenus est un peu identique à celui qui a été fait par le Président de la République, sans doute parce qu'il s'agit de mesures de bon sens : le numerus clausus et l'organisation actuelle des formations dans les facultés de médecine ne permettront pas d'alimenter les territoires en professionnels de santé, et notamment en médecins, à la hauteur des attentes de nos concitoyens.
Nous n'aurons donc vraisemblablement pas d'autre choix que de faire travailler les professionnels de santé ensemble. Il convient de leur proposer de travailler dans des coopérations territoriales et de s'organiser, de sorte que nous soyons en mesure d'offrir à nos concitoyens un accès le plus rapide et le plus proche possible à des professionnels de santé, quelle que soit l'heure du jour ou de la nuit.
Certes, des communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS) ont été créées par la loi de 2016. Mais, si 200 projets sont aujourd'hui dans les tuyaux, assez peu ont été concrétisés : de l'ordre d'une vingtaine de ces CPTS sont pour l'heure opérationnelles, ce qui est notoirement insuffisant. L'inspection générale des affaires sociales a eu l'occasion de rendre un rapport sur le sujet, il y a peu de temps. Elle y notait notamment que, vraisemblablement, le mode incitatif à créer des CPTS, par le canal des agences régionales de santé (ARS), n'était pas suffisamment efficace.
C'est la raison pour laquelle nous avons fait, pour notre part, le choix d'un concept un peu différent. Nous avons donné à ces structures un nom qui rappelle cette dimension de proximité avec la santé à laquelle nos compatriotes sont particulièrement attachés, puisque nous les avons baptisés « villages de la santé ». Les villages de la santé sont des CPTS dans lesquelles pourront se retrouver tous les professionnels de santé et tous les acteurs de santé d'un même territoire.
Nos villages de la santé sont des CPTS qui naissent de l'initiative non pas des agences régionales de santé, mais des professionnels de santé eux-mêmes. Car il me semble que proposer clé en main, rédigées et préparées par les ARS, des coopérations territoriales, sans que les professionnels libéraux ne puissent exprimer leur choix et leur volonté, est une erreur. En effet, cela ne permet pas de se donner les moyens de faire adhérer massivement les professionnels libéraux au dispositif. Laissons plutôt à ces derniers l'initiative tant de leur organisation que de la rédaction des chartes constitutive de ces villages de la santé. Soyons, là encore, extrêmement souples et légers en matière normative. Nous ne leur imposons ainsi que le strict minimum, à savoir assurer la permanence des soins, organiser les soins non programmés et veiller, une fois encore, à ce que chaque patient du territoire puisse avoir un accès, le plus rapide et le plus proche possible de chez lui, à un professionnel de santé.
Apprenons aussi à regarder la santé et les professionnels de santé avec un regard nouveau. Le Président de la République a parlé d'un changement de paradigme. C'est peut-être de cela qu'il s'agit effectivement. Porter un regard nouveau sur la santé, c'est regarder la compétence des professionnels de santé de manière différente : le pharmacien d'officine n'est pas qu'un marchand de pilules, c'est un professionnel de santé formé à un niveau doctoral et vraisemblablement armé pour rendre sur les territoires des services en santé supérieurs à ceux pour lesquels on le sollicite ; les infirmières comptent, dans les décrets qui répertorient leurs actes de compétences, des actes qu'on ne leur confie pas aujourd'hui sur les territoires. Peut-être pouvons-nous, là aussi, regarder les choses de manière différente.
J'aurai même l'occasion de vous proposer, par voie d'amendement, que les décrets de compétences de chacune des professions de santé puissent faire l'objet de révisions beaucoup plus régulières pour s'adapter à l'air du temps et à l'évolution, notamment celle des techniques et des moyens numériques qui sont à leur disposition. Regardons donc les professionnels de santé avec un regard différent.
Pourquoi les villages de la santé ? Parce que nous proposons d'impliquer les élus des territoires. Certes non pour diriger les villages de la santé, qui doivent rester sous la maîtrise des professionnels de santé, mais pour participer à l'initiative, en l'accompagnant, le cas échéant, de moyens de fonctionnement et d'investissement. Car, comme nous le savons tous, un réseau de professionnels de santé ne peut fonctionner que s'il est coordonné. Or ce n'est pas le médecin généraliste du secteur qui a le temps de la coordination, non plus que l'infirmière libérale, le kinésithérapeute, la sage-femme ou le chirurgien-dentiste… Peut-être que les collectivités locales, aux côtés de l'État, via les ARS, et aux côtés des caisses primaires d'assurance maladie, auront aussi la possibilité de participer au financement de ces villages de la santé. Elles pourront ainsi favoriser cette coordination entre les professionnels de santé, peut-être grâce à la présence d'un agent ou en permettant tout simplement le changement des systèmes informatiques des différents professionnels de santé, pour qu'ils soient cohérents et dialoguent.
Voilà donc quelques mesures relativement simples, mais qui sont de nature à apporter une solution rapide, dans des délais assez brefs. Car les projets en santé que nous pouvons faire pour nos compatriotes ne peuvent pas être à dix ans, à quinze ans ou à vingt ans. C'est aujourd'hui que les besoins sont exprimés sur les territoires ! J'imagine que les élus, que nous sommes tous dans cette salle, l'entendent régulièrement dans leur permanence ou dans leur circonscription.
Les villages de la santé replacent également le patient au coeur du dispositif, grâce à la présence en leur sein d'associations représentant des patients. Ce nouveau système ne sera pas élaboré soit en opposition soit sans concertation avec les patients. Il se fera au contraire avec eux, parce qu'ils sont in fine les destinataires de tout ce que nous pouvons imaginer, organiser et mettre en oeuvre en matière de santé.
Le titre suivant est relatif à l'innovation en santé. Il s'agit de faciliter l'accès à des données de santé. Ce sont des sujets un peu plus techniques. Avec votre permission, je vais donc les passer rapidement.
Un titre est aussi prévu sur la modernisation de l'exercice libéral. À vrai dire, il vise plutôt les médecins que les autres professionnels de santé. L'idée est de remettre en place ce que certains ont appelé, à juste raison et avec un terme plutôt sympathique, le compagnonnage. Il faudrait qu'un médecin qui s'apprête à prendre sa retraite puisse bénéficier d'un statut, y compris fiscal et en termes de cotisations sociales, qui lui permette d'accompagner pendant quelque temps un confrère qui prend sa suite sur un territoire. Cela suppose un cumul emploi-retraite défini par des plafonds et des taux un peu plus intéressants que ceux qui existent aujourd'hui.
Cela passe aussi par la reconnaissance de la place et du rôle des professionnels de santé, en leur conférant une protection juridique dans le cadre du code pénal, notamment, et en assimilant tous les professionnels de santé, tels qu'ils sont définis par le code de la santé et de la famille, à des personnes dépositaires d'une autorité publique. Cela vise à renforcer le niveau des sanctions pénales pouvant être imposées à une personne qui outragerait, invectiverait ou violenterait un professionnel de santé dans l'exercice de ses fonctions.
Le dernier titre de cette proposition de loi est relatif au financement. Je m'arrêterai sur deux mesures plus éclairantes de notre volonté en matière de santé.
La première vise à prévoir une loi de programmation en santé. Les professionnels de santé et les établissements de santé, qu'ils soient publics ou privés, à but lucratif ou non lucratif, ont besoin en effet, dans leurs investissements et leur programmation budgétaire et financière, d'aller au-delà de la règle de l'annualité budgétaire, qui nous impose de concevoir tous les ans un nouveau budget pour la santé. Il faut qu'un gouvernement s'engage sur deux, trois, quatre ou cinq ans, éventuellement la durée d'un mandat, sur ses objectifs et sa politique budgétaire. Car il convient que, par-delà les effets d'annonce, tout soit inscrit et gravé dans le marbre de la loi. Cela me paraît de nature à rassurer les professionnels de santé et à leur permettre d'envisager l'avenir avec un peu de sérénité sans attendre, tous les ans, que le couperet du PLFSS tombe.
La seconde mesure porte sur le financement « au parcours ». Le Président de la République l'a évoqué pour deux types de pathologies. Vous savez comme moi, parce que notre rapporteur général a produit en la matière un rapport, que le financement au parcours de soins est vraisemblablement ce vers quoi il faudra que nous tendions. Il permettra en effet de sortir du tout T2A et d'éviter tous les actes redondants et inutiles, qui encombrent et pèsent très lourdement sur le budget de l'assurance-maladie.
Nous avons donc réfléchi à une formule un peu originale : comme le dossier médical partagé (DMP) devrait se mettre en place très prochainement et que chacun et chacune d'entre nous a dans sa poche sa carte Vitale, on peut parfaitement imaginer que, demain, le financement et le suivi du parcours de soins, dans le cadre des protocoles arrêtés sur le diabète, la néphrologie ou d'autres maladies chroniques, puissent s'effectuer depuis la carte Vitale. L'assurance maladie, comme les professionnels de santé, pourraient savoir, au travers de parcours de soins accompli par le patient, mentionné dans le DMP et rendu lisible par la carte Vitale, où en est le patient et comment s'effectue sa prise en charge.
Il ne s'agit pas de « fliquer » les professionnels de santé dans leur pratique et dans leur droit à prescrire, ou dans la façon dont ils envisagent le suivi de leurs patients. Il ne s'agit pas non plus de pénaliser le patient, à qui on dirait : « ça y est, vous avez terminé votre parcours et on ne vous rembourse plus les soins ». Il s'agit simplement de pouvoir rendre lisible le suivi du parcours.
La crainte qui s'exprime aujourd'hui dans les hôpitaux, notamment par rapport au parcours de soins, porte sur la modification en profondeur des règles de fonctionnement qui leur sont imposées. Les hôpitaux ont en effet mis dix ans à s'adapter à la T2A et à modifier leurs procédures internes pour pouvoir produire de la tarification à l'activité. Aussi, l'idée qu'on puisse, demain, leur demander, de modifier grandement leur champ d'organisation pour que le parcours de soins puisse être pris en compte n'est pas audible. Les professionnels de santé ou administratifs du monde de l'hospitalisation publique ne peuvent l'entendre.
C'est la raison pour laquelle l'idée de rebasculer sur le patient, au travers de sa carte Vitale, le suivi du parcours nous a semblé pertinente. Il se trouve que j'ai, dans ma circonscription, un organisme national ayant en charge la programmation des données qui figurent sur nos cartes Vitale. Je m'y suis fait confirmer que, techniquement, tout cela était parfaitement viable et réalisable. C'est une proposition un peu originale et un peu innovante qui vous est faite. Elle devrait nous permettre d'arriver au résultat attendu, c'est-à-dire d'offrir, à coup mesuré et à coût maîtrisé, le meilleur système de santé pour chacune et chacun de nos compatriotes.
Mes chers collègues, la santé mérite d'être traitée au plus haut niveau politique – c'est d'ailleurs pourquoi je me suis réjoui que le Président de la République se saisisse de la question. C'est un sujet qui, sans être politicien, dans sa transversalité et par son côté oecuménique, intéresse tous nos concitoyens. Il doit être, à mes yeux, fédérateur. Certes, on peut évidemment débattre de la pertinence de telle ou telle disposition, mais le sujet doit nous rassembler et non pas nous diviser. En la matière, il n'y a pas, à mes yeux, de place pour la posture.
Le groupe Les Républicains a pris en tout cas la mesure de l'importance de l'enjeu. Telle est la raison d'être de cette proposition de loi qui vous est aujourd'hui soumise dans un esprit extrêmement constructif et ouvert.
Pour finir, je voudrais remercier celles et ceux qui m'ont accompagné dans cette démarche, tels mes collègues du groupe Les Républicains, qui ont cosigné cette proposition de loi à mes côtés. Je voudrais saluer le travail de mes collaborateurs, saluer le travail du groupe d'experts dont je me suis entouré depuis plusieurs mois et qui m'accompagne dans chacune de mes réflexions et de mes propositions en matière de santé. Voilà, mes chers collègues, en quelques mots, ce que je souhaitais vous dire ce matin pour vous parler de la santé.
Cette proposition de loi compte vingt-huit articles et mérite qu'on s'y attarde. Je vais donc me montrer libérale dans le décompte du temps de parole des orateurs des groupes politiques, auxquels je passe la parole.
Monsieur le rapporteur, nous avons entendu dans vos propos votre engagement et l'intérêt que vous portez à cette ambitieuse mission que constitue la santé. Comme vous l'avez souligné, l'importance du sujet nécessite une grande mobilisation de tous.
Votre proposition rejoint nombre de nos préoccupations et comprend six grands titres. Le constat est globalement partagé. Vous exprimez une réelle ambition, notamment en matière de prévention – étant moi-même dans ce domaine, je ne peux qu'y souscrire. Vous évoquez aussi la mise en cohérence des études médicales et paramédicales, ou la diversification des profils.
Mais il n'aura échappé à personne que le Gouvernement est particulièrement investi sur ces sujets. Plusieurs mesures législatives ont ainsi été inscrites dans la LFSS de 2018 et de nombreuses autres sont en phase d'être examinées dans le prochain PLFSSS. Ces réflexions ont été alimentées par le travail de plusieurs de nos collègues, dont M. Mesnier, Mme Iborra, Mme Fiat, Mme Lecocq, Mme Vidal, mais aussi tant d'autres qui ont remis des rapports sur différents points.
Notre première préoccupation par rapport à votre proposition de loi, c'est l'avis du Conseil d'État. Eu égard à l'ambition exprimée, il paraît effectivement important de s'assurer de sa rédaction. La seconde est relative à la temporalité. Il est question en effet de l'évaluation et de modifications de dispositifs très récents, puisqu'ils datent de la loi de modernisation de notre système de santé de 2016.
Pour conclure, votre proposition de loi, qui a été déposée le 29 août dernier, s'inscrit dans un agenda politique particulier : moins d'un mois avant la présentation du plan « Ma santé 2022 », plusieurs mois après la présentation de la stratégie nationale de santé et de son volet prévention, ou encore de la feuille de route sur l'autonomie des personnes âgées – points que vous reprenez dans votre texte. Pour toutes ces raisons, je tiens à vous dire dès à présent que nous n'y sommes pas favorables.
Merci, madame la présidente, pour votre largesse en matière de temps de parole.
Notre collègue Jean-Carles Grelier présente à l'occasion de la niche parlementaire de notre groupe une proposition de loi qui décline l'orientation de l'avenir de santé telle que la conçoivent les Républicains.
Il y a juste deux ans, ici même, notre groupe avait déjà présenté une autre proposition de loi qui s'intitulait : « Pour l'avenir du système de soins », et qui avait été rejetée à l'époque par le gouvernement et la majorité socialistes en place – vous vous en souvenez, madame la présidente, puisque vous en faisiez partie. Nous évoquions alors des orientations indispensables comme : les CPTS, le regroupement des médecins entre eux, la réforme des études médicales, l'assouplissement du service public hospitalier, et surtout la mise en place de la prévention, ainsi qu'une plus grande régionalisation.
Ces orientations sont reprises dans le projet du rapporteur, et soutenues par les professionnels de santé. C'est un plan ambitieux, basé sur des mesures de bon sens qui restent souples pour laisser le champ le plus libre possible aux initiatives collectives ou territoriales.
Je ne vais pas reprendre en détail les propositions qui ont été décrites avec brio par notre rapporteur. Je retiendrai six thèmes.
Le premier, partagé par tous les parlementaires, est la prévention dès l'enfance et tout au long de la vie, qu'il conviendrait de « booster » fortement.
Le deuxième porte sur la formation, qu'il importe d'améliorer, en misant sur les qualités du terrain.
Le troisième thème est l'accès à la santé dans nos territoires, qu'on pourrait faciliter en innovant, notamment avec la mise en place des villages de la santé, qui contractualiseraient les CPTS avec les élus du terrain.
Le quatrième thème est l'exercice libéral, qui reste l'ADN de la droite, et qu'il faut soutenir en prescrivant des mesures de simplification administrative.
Le cinquième est l'innovation en santé grâce à des mesures de bon sens. Je pense aux fameux CAR T-cells qui se développent ici ou là, et qui sont des médicaments du futur.
Le sixième thème est le financement, en raisonnant en pluriannuel et en donnant une plus grande dimension prospective à la santé.
Mes chers collègues, je sais que vous allez rejeter ce texte au motif que le Gouvernement a présenté son projet santé et, il faut le dire, parce qu'il émane de l'opposition – ce qui est regrettable et qu'on pourrait considérer comme sectaire. Mais bien entendu, le groupe Les Républicains soutient le projet de notre rapporteur.
La présente proposition de loi est extrêmement dense, tant par le nombre d'articles que par les ambitions qu'elle affiche. Transformer notre système de santé pour passer d'un système cloisonné et actuellement fondé sur le curatif, à un système davantage tourné vers le préventif et vers la coordination de ses acteurs est une des priorités de notre assemblée, et j'apprécie que l'on se retrouve sur ce point.
Ce texte présente des dispositions intéressantes. Il nous semble cependant redondant dans le contexte de refonte en profondeur de pans entiers de notre système de santé. Il y a dix jours, le Président de la République a en effet présenté son Plan santé, qui comporte des mesures de grande ampleur, qui vont au-delà de ces propositions.
Par ailleurs, eu égard à l'objectif affiché, nous regrettons l'absence d'articles dédiés spécifiquement à la PMI et à la médecine scolaire, acteurs incontournables de la prévention de la santé, qui sont actuellement malmenés. Les conseils départementaux mènent en effet des politiques très variables en la matière. Des efforts s'imposent.
Vous proposez la création de villages de la santé. Nous pensons qu'il faut plutôt se baser sur l'existant, à savoir les CPTS. Certes, il est intéressant d'associer les élus à la démarche. Pourquoi ne pas utiliser les contrats locaux de santé – CLS – où les élus sont actifs ? On pourrait ainsi jumeler les CPTS et les CLS, ce qui permettrait de rassembler les professionnels de la santé, les élus et le monde associatif.
S'agissant de la formation des professionnels de santé, de leur carrière, de la mixité et de la souplesse d'exercice, la stratégie santé va au-delà de ce que vous proposez : donc, merci de nous appuyer, si je puis dire.
Concernant l'évaluation financière, vous gagez sur le tabac, ce qui est la règle. Le Président de la République, quant à lui, a relevé l'ONDAM de 2,3 à 2,5 % pour moderniser le système de santé, ce qui permet de libérer 400 millions d'euros.
En conclusion, bien qu'étant réservé sur plusieurs aspects de votre PPL, j'ai envie de vous dire, monsieur le rapporteur : « Bienvenue dans la majorité ! » tant nos préoccupations se rejoignent.
Vous pourrez soutenir nombre des mesures du PLFSS, ainsi que le projet de loi sur la santé que Mme Buzyn présentera au printemps. Nous en serons ravis.
Nous sommes aujourd'hui saisis d'une PPL déposée par nos collègues du groupe Les Républicains dans le cadre de leur journée réservée. Et comme on l'a déjà dit, cette PPL est dense, eu égard au nombre d'articles et aux mesures qu'elle contient.
Elle formule un certain nombre de constats que nous partageons. Je pense à la place insuffisante accordée à la prévention – vos propositions en la matière sont très intéressantes ; au fonctionnement trop cloisonné, entre médecine de ville et hôpital ; à la nécessité de sortir du tout T2A à l'hôpital, et de rémunérer de manière forfaitaire le parcours de soins.
Cette PPL porte en conséquence une série de propositions de réforme. Nous en partageons quelques-unes, comme la nécessité d'accorder un droit de prescription aux médecins coordonnateurs des EHPAD, ou celle d'offrir aux professionnels de santé une évolution de carrière et une formation continue.
Pour autant, nous sommes pour le moins circonspects sur l'opportunité d'une telle proposition de loi, alors que vient d'être présenté par le Gouvernement un plan de santé bien plus exhaustif, à la philosophie duquel nous souscrivons. Il faudra bien évidemment juger sur pièces au moment de l'examen de la future loi santé, mais les mesures proposées nous paraissent pour l'heure aller dans le bon sens.
Monsieur le rapporteur, vous l'avez très justement dit, il n'y a pas de posture à avoir sur un sujet qui doit nous rassembler et – on le voit bien dans les propos de chacun – qui nous rassemble. Nul doute, eu égard à l'esprit constructif qui règne dans cette commission, que, lors de l'élaboration de la future loi, vos propositions seront écoutées par la majorité, et nous vous accompagnerons.
Cette PPL vise à définir l'orientation de la France en matière de politique de santé. Vous nous faites, monsieur Grelier, vingt-sept propositions très variées : certaines portent sur la prévention, d'autres tendent à réformer la formation aux métiers de santé, d'autres sont relatives à l'accès à la santé dans les territoires, certaines concernent l'exercice libéral de la médecine, mais aussi l'innovation et l'accès aux données de santé. Les dernières portent sur le financement de la santé, puisque vous proposez de passer d'un financement à l'acte à un financement au parcours de soins, c'est-à-dire au forfait.
Pour la petite histoire, la fameuse tarification à l'acte avait été instituée en 2004 par la droite et le ministre UMP de l'époque, M. Jean-François Mattei. N'y voyez pas de provocation de ma part, permettez-moi simplement de souligner que la droite reconnaît son erreur d'alors en proposant un changement total de paradigme en matière de financement de la santé. Pour autant, soyons honnêtes : vos propositions ne manquent pas d'intérêt, notamment celles qui portent sur la formation des étudiants aux métiers de la santé.
Cependant, je préfère être direct avec vous : nous avons de nombreux points de désaccord. Je citerai, par exemple, les propositions que vous faites pour déréguler la médecine libérale, ou encore les mesures relatives aux données de santé, qui posent clairement le problème de la protection des données personnelles et de la vie privée. Mais surtout, monsieur Grelier, pourquoi déposer votre PPL sur l'avenir de la santé maintenant, juste après les annonces du Gouvernement dans le Plan santé, et juste avant l'examen par l'Assemblée nationale du PLFSS pour l'année 2019, sachant que la plupart de vos propositions sont déjà annoncées par le Gouvernement, qu'il s'agisse du parcours de soins, de la réforme des études de santé, de la politique de prévention, ou encore de la réorganisation territoriale de la santé ?
Pour toutes ces raisons, malgré l'intérêt que représentent certaines de vos propositions, le groupe Socialistes et apparentés votera contre cette PPL.
La France insoumise ne soutiendra pas ce texte de nos collègues Les Républicains. En effet, cette longue proposition de loi est un exposé programmatique dans lequel se nichent des mesures qui ne nous conviennent pas, et les quelques points qui peuvent être considérés comme positifs ne suffisent pas.
Ainsi, les villages de la santé sont assez proches des établissements communautaires voulus par Emmanuel Macron dans son Plan hôpital. Mais le fait que ces villages de santé sous statut associatif soient obligatoirement dirigés par le privé alors qu'ils accueillent une activité mixte est, d'après nous, une très mauvaise idée.
On découvre également dans le texte toute une partie sur la médecine libérale, dont l'exposé des motifs ne parle pas. Pourtant, c'est là que se trouve le coeur du problème. En effet, permettre aux médecins retraités de poursuivre une activité ne règlera absolument pas les problèmes de désertification médicale. Cette partie contient aussi une mesure qui va concrètement faire augmenter tous les ans le prix de la consultation. Au regard du nombre de personnes qui renoncent déjà à se soigner pour des raisons économiques, cette idée nous semble très mauvaise.
Pour ces quelques raisons, et pour d'autres que nous aurons le temps d'exposer, nous voterons contre cette proposition de loi.
Notre système de santé, en particulier l'hôpital public, connaît une situation de crise aiguë. Je ne pense pas que le Plan santé présenté par le Gouvernement et par Emmanuel Macron y répondra – c'est d'ailleurs ce que l'on commence à entendre sur le terrain, notamment parmi le personnel hospitalier. C'est un peu comme ces boules qu'on vous vend dans les lieux touristiques : on secoue un peu en pensant que tout va changer, mais il ne tombe que de la neige. Là, je ne crois même pas que la neige finira par tomber…
Monsieur le rapporteur, je vois des convergences – même s'il n'y a pas que cela – entre le plan du Gouvernement et vos propositions.
Je vois aussi des choses intéressantes. Ce que vous proposez en matière de prévention peut effectivement trouver notre assentiment sur un certain nombre de points. Votre souci en matière de formation peut être partagé. Il est ainsi nécessaire d'investir dans ce domaine. Il faut prévoir un grand plan de formation pour les professionnels de santé. Et peut-être faut-il effectivement se méfier de l'hyperspécialisation, qui entraîne une pénurie de médecins généralistes – vous avez pointé là un véritable enjeu.
Par ailleurs, et cela fait partie des sujets absents de notre débat, il importe de prendre en compte les mutations de la médecine générale, notamment les aspirations des jeunes médecins. L'installation de centres de santé dans nos territoires pourrait souvent constituer une réponse.
Je voudrais signaler un dernier point de désaccord, qui porte sur la confusion entre le public et le privé, à laquelle certaines de vos mesures conduisent. En effet, une telle confusion aboutit toujours à financer le privé au détriment du public, et à une organisation extrêmement déséquilibrée du système de soins, sans répondre réellement aux besoins.
Voici quelques éléments, peut-être rapides au regard de l'ampleur de votre proposition de loi. En tout état de cause, ce débat est utile, en raison de la gravité de la crise que nous traversons et des enjeux auxquels nous sommes confrontés. Cette proposition de loi a au moins le mérite de mettre les questions sur la table.
Mme Tamaralle-Verhaeghe, pour le groupe La République en Marche a fait allusion à l'agenda du Président de la République. Mais si ce dernier avait annoncé son Plan santé comme c'était prévu, à la mi-mai, puis à la mi-juin, puis au début de l'été et pas à la mi-septembre, il est vraisemblable que je n'aurais pas déposé ma proposition de loi. Cela étant, je travaille sur ce thème depuis un certain temps déjà. J'ai ainsi rendu public un Livre blanc sur la santé comprenant vingt-huit propositions à la fin du mois de janvier dernier. Il m'a semblé que le sujet était suffisamment important pour que l'on arrête de se donner du temps, alors que le constat que nous faisons tous est à peu près le même, et que nous pourrions nous retrouver sur la plupart des propositions.
Vous me demandez aujourd'hui d'attendre le PLFSS. Dont acte. D'attendre le futur projet de loi de Mme la ministre des solidarités et de la santé. Dont acte. Mais allez expliquer alors à nos concitoyens, dans nos territoires, pourquoi ils devront attendre six mois de plus pour envisager d'avoir un jour, peut-être, une réponse à la difficulté qu'ils ont de trouver un médecin.
Je ne suis pas un professionnel de santé. Il est d'ailleurs assez peu fréquent que d'autres que les professionnels de santé s'intéressent à ces sujets. Si je m'y suis intéressé, c'est parce que j'ai été maire d'une petite ville de 10 000 habitants, et que, comme nombre de mes collègues élus, j'ai été confronté à ces difficultés. J'ai pu mesurer à quel point nos concitoyens prennent à coeur ces questions de santé, et l'angoisse que suscite chez les patients le départ en retraite de leur médecin. Et j'ai compris que chaque jour, chaque mois, chaque trimestre qui passe sans que nous, législateurs, n'agissions dans le concret et l'immédiateté, c'est du temps de perdu pour la santé et la sécurité de nos concitoyens.
Vous considérez aujourd'hui qu'il faut perdre encore du temps, alors qu'une partie du travail a été fait et que j'ai bien compris que, dans le fond, vos préoccupations rejoignent les miennes et inversement. Soit. Mais alors, mesdames et messieurs du groupe de La République en Marche, vous serez comptables devant les Français du temps que vous demandez pour agir concrètement en matière de santé.
Vous avez également évoqué un avis du Conseil d'État sur la rédaction de ma proposition de loi. Je rappellerai simplement que seul le Président de l'Assemblée nationale peut solliciter un tel avis. Mais comme je vous l'ai dit, je ne suis pas parti la fleur au fusil sur ce dossier. D'ailleurs il me reste, à défaut d'en avoir en matière de santé, quelques compétences en matière juridique, et notamment en matière de droit public. Voilà pourquoi j'ai pris l'attache d'un cabinet d'avocats spécialisé en droit constitutionnel, qui a validé chacune des propositions de cette PPL, au regard de la jurisprudence actuelle du Conseil constitutionnel. Cela devrait être de nature à vous rassurer.
Je tiens à remercier mes collègues du groupe Les Républicains pour leur accompagnement et leur soutien, ainsi que les collaborateurs du groupe. Mme Tamarelle-Verhaeghe a cité quelques députés de cette commission qui sont intervenus en matière de santé. De mon côté, je voudrais rendre un hommage appuyé à Jean-Pierre Door qui porte depuis des années les questions de santé au sein de cette grande maison qu'est l'Assemblée nationale.
Monsieur Isaac-Sibille, vous avez dit pour le MODEM qu'il y avait certains points sur lesquels nous convergions, et d'autres points sur lesquels vous me trouviez redondant. Vous avez appelé mon attention sur les CPTS que vous préférez à mes villages de la santé. Je ne partage pas du tout votre analyse : depuis dix ans, l'État se défausse sur les élus locaux et les collectivités locales pour régler les problèmes de démographie médicale. À chaque fois qu'on a trouvé des solutions, qu'on est parvenu à créer des centres de santé ou des maisons pluridisciplinaires de santé, des élus municipaux, départementaux et régionaux étaient à la manoeuvre. Leur dire aujourd'hui qu'on va les tenir à l'écart de l'ensemble de ces dispositifs et que l'État va reprendre la main me paraît inacceptable.
Vous avez le droit, mes chers collègues, de ne pas partager cette analyse. Je suis pour ma part extrêmement respectueux de l'engagement des élus des territoires – de tous les élus. Les conseillers municipaux sont souvent les soutiers de la République. Ils sont en première ligne, et à ce titre, les premiers à entendre les attentes et les angoisses de nos populations. Encore une fois, il serait inacceptable de les tenir à l'écart de l'organisation territoriale de la santé.
Enfin, monsieur Isaac-Sibille, vous m'invitez gentiment à rejoindre la majorité. Je vous en remercie infiniment. C'est vrai que tout bouge et tout change, puisque ce matin-même, la présidente s'est qualifiée de « libérale ». Malgré tout, je suis contraint de décliner votre invitation : je préfère rester dans mon rôle d'aiguillon de la majorité, plutôt que de devenir l'un des vôtres.
Madame Firmin-Lebodo, je ne reviendrai pas sur les constats que nous partageons, ni sur le calendrier du Président de la République car je m'en suis déjà expliqué. Mais il se trouve que le calendrier législatif m'imposait de déposer cette proposition de loi avant le 29 août et, qu'à cette date, les Français n'avaient toujours pas eu connaissance des projets du Président de la République en matière de santé.
Monsieur Aviragnet, je vous remercie de l'intérêt que vous avez porté à mes propositions. Je vous ferai par ailleurs remarquer que ni les uns ni les autres n'avons à porter indéfiniment tout ce qu'ont fait les gouvernements auxquels nous avons appartenu ou que nous avons soutenus – du reste, il faut avoir l'honnêteté de reconnaître qu'on fait de bonnes choses à droite comme à gauche. En l'occurrence, je pense que la T2A a montré ses limites. Proposer d'en sortir ne constitue pas forcément une condamnation du passé, mais revient à prendre en compte de manière assez pragmatique la situation.
Monsieur Ratenon, vous avez sans doute en mémoire quelques vieux cours de mathématiques. Je pense en l'occurrence au théorème – ou à la relation – de Chasles : AB+BC=AC. Il semblerait qu'à partir du moment où un Républicain fait des propositions qui pourraient être partagées par M. Macron, il devienne lui aussi l'ennemi à abattre. Je le regrette, et je regrette que vos appliquiez ce principe à la politique. Laissez-le aux mathématiques, il y est bien mieux.
Monsieur Dharréville, merci d'avoir évoqué les boules à neige de notre enfance. Je n'ai pas la prétention de faire la pluie et le beau temps sur la santé. J'aurais juste aimé pouvoir avancer un peu et servir d'aiguillon.
Vous avez évoqué les centres de santé. Sachez que l'élu républicain et libéral qui vous parle a été l'un des premiers maires de France à en créer un en 2011 pour pallier les problèmes de démographie médicale – et plus de 400 maires sont venus s'inspirer de notre expérience. Mais aujourd'hui, je rencontre les mêmes difficultés que partout ailleurs sur le territoire à recruter des médecins généralistes. Pendant dix ans, le salariat a semblé être la solution, mais il montre à présent ses limites.
Je partage toutefois avec vous l'idée selon laquelle il n'y a pas de modèle unique. Si l'un d'entre nous, dans cette salle, avait trouvé la pierre philosophale en matière de démographie médicale et la solution à tous les problèmes, cela se saurait. Pour ma part, je n'ai pas une telle prétention.
Vous avez également parlé de « confusion » entre le public et le privé : je préfère parler de « collaboration ». Je pense notamment qu'à l'intérieur des groupements hospitaliers de territoire, les GHT, un vrai dialogue avec la médecine de ville peut s'instaurer. N'oublions pas que c'est toujours la médecine de ville qui prescrit l'hospitalisation, qu'elle soit publique ou privée, en dehors des soins non programmés et des urgences. Voilà pourquoi il me semble que penser et organiser la carte sanitaire d'un territoire sans y associer les médecins de ville et, dans un esprit de collaboration et de complémentarité, l'hospitalisation privée, c'est se priver d'une chance. Sans compter que cela peut finir par être dispendieux.
Je préside aujourd'hui encore le Comité des élus d'un petit GHT dans la Sarthe, qui rassemble dix hôpitaux. Nous sommes en train de travailler à la création d'un centre de cancérologie, qui sera commun à une clinique privée et au centre hospitalier du Mans. C'est, à mes yeux, une solution exemplaire et intelligente, qui préfigure peut-être ce qu'il faudra envisager de faire à l'avenir : un peu moins de concurrence, et un peu plus de complémentarité entre le public et le privé.
On ne peut que saluer l'initiative parlementaire dans un domaine aussi important que la santé. Chacun des intervenants en a d'ailleurs salué l'intérêt.
Les mesures proposées par nos collègues sont innovantes, relèvent du bon sens et restent souples, pour permettre précisément des initiatives individuelles, collectives et territoriales. Je pense notamment à l'adaptation des communautés professionnelles territoriales de santé à travers les villages de santé, et à cette volonté de coopération et de collaboration entre le secteur public et le secteur privé – c'est essentiel, et vous avez eu raison d'insister sur ce point.
La prévention est aussi une des priorités de cette proposition de loi – vous avez raison là encore. Une politique de santé solide doit passer par un plan pluriannuel, par une gouvernance interministérielle, par des actions menées dès l'enfance, et par des actions plus spécifiques à certains âges de la vie.
Je voudrais évoquer à cette occasion le mois national de mobilisation contre le cancer du sein, avec la campagne « Octobre rose », dont on connaît l'importance sur l'ensemble de notre pays. Ainsi, 40 % des cancers pourraient être évités par des modifications de nos modes de vie, et de notre environnement. La prévention est un moyen d'agir essentiel si l'on veut les faire reculer. La prévention du cancer, c'est l'ensemble de ce que l'on peut faire à titre individuel et collectif pour diminuer le risque d'être confronté à cette maladie.
Le dépistage vise à diagnostiquer un cancer à un stade précoce, même s'il ne produit pas encore de symptômes, pour favoriser les chances de guérison. Ainsi, nous devons tous nous mobiliser pour le dépistage du cancer du sein. Selon l'INCa, dont nous recevions il y a quelques jours le représentant, 59 000 nouveaux cas de cancers du sein sont détectés chaque année. On mesure donc l'importance de la prévention à travers cette thématique comme à travers beaucoup d'autres.
Mon cher collègue Grelier, merci pour votre très belle énergie et votre implication. Cela me rassure sur la façon dont vous allez déployer le plan « Ma santé 2022 » sur votre territoire. En effet, je ne vois pas ce que votre proposition de loi apporte de plus à ce Plan santé. Mais sans doute allez-vous pouvoir me l'expliquer.
Le périmètre de votre PPL est effectivement assez limité, puisque vous n'abordez que certains aspects de la politique de santé publique, alors que le Gouvernement propose une réforme globale et ambitieuse. En tant que référente de Santé Publique France, j'aimerais m'arrêter sur la prévention, et vous rappeler qu'elle constitue le premier volet de la Stratégie nationale de santé qui a été présentée le 23 mars 2018. La priorité prévention, « rester en bonne santé tout au long de sa vie », est la colonne vertébrale du Plan santé.
Par ailleurs, je veux également vous rappeler en tant que parlementaire membre du Haut conseil pour l'avenir de l'assurance maladie, que cette instance s'est réunie pendant un an pour alimenter très largement la stratégie de transformation du système de santé, et que son rapport a été très largement repris dans le plan « Ma santé 2022 ». Je précise afin de vous rassurer que tous les professionnels de santé siégeant au sein du Haut conseil – organismes d'assurance complémentaire, représentants de tous les professionnels, agences régionales de santé, instituts de recherche, usagers – se sont déclarés satisfaits de ce rapport.
Votre PPL est-elle uniquement une proposition d'opportunité, ou une proposition politique ? (Murmures) Ce serait dommage d'arriver à une telle conclusion. En tout cas, merci de m'expliquer avec la même énergie ce que votre PPL apporte de plus que le Plan santé 2022.
Merci, monsieur le rapporteur, pour votre proposition marquée du signe du pragmatisme. Je pense que dans ce domaine comme dans d'autres, nous en avons besoin.
Je voudrais revenir sur le sujet des déserts médicaux. En effet, même dans le territoire où je suis élue, c'est-à-dire le littoral varois, le problème est réel. Je dirais qu'on empile des mesures au lieu de redéfinir la médecine dans ces zones.
Je vais vous en donner un exemple concret : on déploie des moyens financiers conséquents pour inciter les praticiens à s'installer dans des zones sous-dotées – salaire, logement, matériel. On consent de gros efforts, mais en réalité, cette politique de la subvention est un échec. Les praticiens refusent en effet d'exercer de manière isolée et d'endosser toutes les attentes d'un territoire, d'être le réceptacle de tous les espoirs et frustrations des citoyens qui se considèrent parfois comme des oubliés.
La proposition de créer les villages de la santé, à la main des professionnels de santé, mais avec le soutien des acteurs locaux que sont les élus et les institutionnels, me paraît être une excellente voie. Au-delà des moyens, la réussite d'un plan pour lutter contre les déserts médicaux se mesurera à sa philosophie, c'est-à-dire à sa souplesse et sa capacité de « débureaucratisation ». C'est notamment pour cela que je soutiens cette PPL, dont j'aurais vivement souhaité qu'elle fasse consensus.
Monsieur Grelier, ce n'est pas la première fois que nous avons l'occasion de vous entendre parler de santé. Nous nous retrouvons régulièrement pour débattre et j'ai pu apprécier, comme d'autres dans la majorité, votre esprit constructif. J'en veux pour preuve vos remarques à destination du Président de la République, à la suite de la présentation du Plan santé.
Si j'étais un peu taquin, je dirais que vous êtes moins un aiguillon de la majorité qu'un aiguillon pour l'opposition. En effet, ayant vécu de près la campagne santé avec le programme Fillon I, le programme Fillon II, et les interventions des différents tenants de la politique de santé pour Les Républicains, je décèle aujourd'hui un changement extrêmement important : vous êtes rentré dans le « Nouveau monde » en matière de politique de santé.
À titre personnel, je trouve très intéressant d'avoir des dialogues constructifs. Je ne doute pas que dans le cadre du PLFSS qui commencera à concrétiser des mesures du Plan santé, et à l'occasion de la loi santé qui interviendra au cours du mandat, nous aurons des échanges qui permettront d'améliorer les textes.
Je ferai deux ou trois petites remarques sur le fond. Sans remettre nullement en cause le rôle des élus locaux, je voudrais rappeler qu'organiser l'offre de soins sur leur territoire ne relève pas de leurs compétences et que la logique intercommunale a mis un peu de temps à s'affirmer. Très longtemps, le modèle d'« un médecin par commune » a prévalu. Perdre le dernier médecin de sa commune pour le voir renforcer sa présence sur le territoire intercommunal par le biais d'une maison de santé n'a pas toujours été simple à accepter. C'est finalement assez nouveau. Il faut saluer la capacité d'adaptation des élus locaux qui font un gros travail. Encore faut-il que ceux qui construisent une maison de santé s'assurent d'abord qu'il y aura des médecins pour venir y travailler, ce qui n'est pas encore systématiquement le cas.
Par ailleurs, je vous trouve sévère sur les CPTS, qui ont à peine un an d'existence, mais dont le modèle est plutôt promu par les professionnels. Je ne doute pas que ce modèle va fonctionner, que nous allons pouvoir le renforcer, et qu'avec le temps, vous serez convaincu.
De la même façon, je trouve que votre proposition manque un peu de souplesse s'agissant de l'organisation des financements au parcours de soins. Nous avons finalement une vision plus décentralisée, plus girondine. Nous faisons davantage confiance aux professionnels de santé pour organiser et faire des propositions en la matière.
Enfin, à propos de la T2A, je dirai qu'il ne faut pas jeter le bébé avec l'eau du bain. Celle-ci est intervenue à un moment de notre histoire où elle faisait sens, avec le développement du programme de médicalisation des systèmes d'information – PMSI. Et c'est parce que nous avons connu la T2A que nous serons capables de faire preuve d'efficacité pour élaborer des financements au parcours et à l'épisode de soins.
Monsieur le rapporteur, chers collègues, avec cette PPL, nous proposons très clairement un nouveau modèle pour le système de santé français, qui corrige les lacunes, notamment budgétaires, du Plan santé 2022 du Gouvernement.
Ce modèle dépasse le paradigme du « tout curatif », pour intégrer la notion tout à fait majeure de prévention, qui intervient cette fois-ci comme un dispositif de santé à part entière. Il est construit autour des individus et des territoires, pour tenir compte de la spécificité de chacun face à la maladie, et pour répondre à l'énorme défi de la désertification médicale. Il est innovant dans son financement, avec le préalable d'un projet de loi de programmation en santé, présenté devant le Parlement, et la rémunération sur la base d'un parcours de soins pour les établissements de santé.
Ce sont des mesures souhaitées par les Français et les professionnels de santé, qui attendent depuis trop longtemps des simplifications et des allégements de contraintes administratives. L'avenir de la santé est en jeu. C'est maintenant qu'il faut agir et cette proposition de loi a l'audace et la crédibilité pour le préparer.
Je souhaite à mon tour remercier notre collègue Jean-Carles Grelier pour le travail qu'il a accompli et pour la pertinence de sa proposition de loi. Je dois avouer que je m'interroge sur l'intérêt de poser des questions au sujet de cette proposition, car j'ai un peu le sentiment qu'elle ne sera même pas examinée au fond – ce qui me semble dommage, car elle complète efficacement un axe majeur de la politique du Gouvernement en matière de santé, celui de la prévention. Chacun s'accorde à considérer que la prévention doit constituer la pierre angulaire de notre système de santé. En effet, en dépit d'indicateurs de santé globalement bons, la France connaît des inégalités sociales et régionales, une mortalité prématurée plus élevée et une espérance de vie sans incapacité plus faible que dans d'autres pays de l'Union européenne.
Il nous faut donc assurer la plus large diffusion d'une véritable culture de prévention, et cette proposition de loi a le mérite d'orienter vers des actions très concrètes en ce sens – prévention dès le plus jeune âge, formation des enseignants et des éducateurs, pilotage centralisé par Santé Publique France –, auxquelles je souscris. Cependant, le succès de la prévention repose avant tout sur une réelle implication de tous les citoyens et de la collectivité afin de garantir des conditions de vie et de travail saines. Aussi, monsieur le rapporteur, je souhaiterais savoir si vous avez un avis sur la meilleure façon d'associer l'ensemble des citoyens à cette politique de prévention : cela doit-il se faire au moyen de rendez-vous de la prévention associant l'ensemble des citoyens, ou par la définition de messages plus efficaces ?
Monsieur Perrut, vous avez eu raison d'évoquer Octobre rose, qui illustre bien la façon dont s'organise la prévention dans notre pays, puisque c'est à l'initiative de la Ligue contre le cancer que l'on doit cette campagne. Cependant, on ne pourra pas avoir une politique de prévention efficace en se reposant intégralement pour cela sur les bénévoles des associations : même si ceux-ci accomplissent un travail formidable, qu'il convient de saluer, la prévention a besoin d'une vraie gouvernance, d'une vraie stratégie et d'une vraie évaluation.
Puisque vous aimez manier la dialectique, madame Wonner, je vous invite à prendre connaissance des récents communiqués de presse des fédérations hospitalières, des syndicats de médecins et d'infirmiers, afin d'entendre les inquiétudes exprimées par les professionnels de la santé quant aux mesures contenues dans le plan Santé, notamment quant à la création des assistants médicaux : peut-être prendrez-vous conscience du fait que les choses ne sont pas aussi évidentes que vous semblez le croire.
Pour ce qui est de la prévention, nous n'allons pas reprendre tout le débat sur le calendrier, sur mon livre blanc sorti en janvier dernier et sur les propositions faites en mars dans le cadre du Comité interministériel de la santé – vous voyez, j'ai toujours au moins un mois d'avance –, mais force est de constater qu'à l'heure actuelle, le Gouvernement ne semble rien proposer en matière de gouvernance de la prévention. Pour ma part, je propose de créer, à l'intérieur du DMP, un parcours de prévention permettant au médecin de PMI de transmettre ces informations au médecin scolaire, qui les transmettra à son tour au médecin traitant, qui pourra disposer d'une source d'information lui permettant d'engager un dialogue avec le médecin du travail… Ainsi, tout ce qui est fait en matière d'éducation à la santé ou, en cas de pathologie chronique, d'éducation thérapeutique, pourra être suivi, tracé et évalué.
Mme Levy m'a fait part de son soutien, en évoquant la souplesse qui doit nécessairement caractériser le système de santé. Je suis moi aussi persuadé qu'une partie de la solution viendra des professionnels de santé eux-mêmes, et qu'il est vain de chercher à leur imposer des contraintes d'une manière ou d'une autre, comme le démontrait déjà le rapport de notre collègue Philippe Vigier sur l'accès aux soins, déposé en juillet dernier. Les étudiants en médecine comme les praticiens, jeunes ou moins jeunes, ont besoin de se sentir aidés, accompagnés, soutenus, plutôt que contraints et montrés du doigt comme les responsables des dysfonctionnements de notre système de santé.
Monsieur Véran, vous avez fait allusion aux nombreuses occasions que nous avons eues de nous rencontrer pour évoquer les questions de santé, qui ont effectivement toujours constitué des moments agréables et constructifs. Pour ce qui est du « nouveau monde », je suis un peu plus réservé que vous, et les récents événements de l'actualité politique m'incitent à penser que nous ne sommes jamais au bout de nos surprises ! Vous avez évoqué une organisation décentralisée – girondine, pour reprendre votre expression – du financement de la santé. Or, quand je propose un financement géré par le patient depuis sa carte Vitale, il me semble qu'on peut difficilement faire plus libéral, plus proche des patients et du terrain.
Enfin, nous sommes d'accord au sujet des maisons de santé pluridisciplinaires, qui ont parfois été l'occasion, pour les élus de certains territoires, de s'acheter une bonne conscience en matière de santé à coup de parpaings et de béton, mais sans régler pour autant les vraies problématiques relatives à la santé. Pour ma part, je me méfie toujours un peu de ces MSP : certes, elles ont pu montrer une grande efficacité, mais leur création en certains points du territoire peut également avoir pour effet d'assécher l'offre médicale aux alentours en concentrant tous les professionnels de santé en un seul lieu.
Outre votre amical soutien à cette proposition de loi, madame Corneloup, vous avez évoqué un nouveau modèle. Pour ma part, comme le Président de la République, je crois que nous devons plutôt nous efforcer de porter un nouveau regard sur la santé, ses professionnels, son organisation, ainsi que sur l'attente des patients. Ceux qui se présentent aujourd'hui au cabinet d'un médecin n'ont plus le même comportement qu'il y a vingt ans : venant consulter après avoir fait de longues recherches sur internet, ils ont souvent tendance à arriver avec leur propre diagnostic, parfois même en exigeant tel ou tel traitement, ce qui a pour effet de modifier en profondeur le dialogue singulier entre le médecin et son patient. Je crois que, pour mieux comprendre ces nouveaux phénomènes, nous devons élargir notre regard sur la santé.
Enfin, M. Lurton, dont le soutien ne m'étonne pas, a évoqué le parcours de prévention. Dans ce domaine, comme je l'ai dit précédemment, je pense que l'inscription d'un parcours de prévention à l'intérieur du dossier médical partagé serait très utile pour conserver une trace de ce parcours, de la néonatalité jusqu'à la fin de vie.
Si je comprends bien, Monsieur le rapporteur, nous vous devons le concept de la prévention législative, puisque vous avez toujours un mois d'avance. (Sourires.)
Nous en venons à l'examen des articles.
TITRE Ier – Pour une politique de prévention globale et ambitieuse
Article 1er : Faire de la prévention la grande cause nationale pour 2018-2022
La commission rejette l'article 1er.
Chapitre Ier – La gouvernance de la prévention
Article 2 : Nouvelle gouvernance et élargissement des missions de l'Agence nationale de santé publique
La commission rejette l'article 2.
Article 3 : Informations relatives au parcours individuel de prévention au sein du dossier médical partagé
La commission rejette l'article 3.
Chapitre II – La formation à la prévention en santé et à l'éducation à la santé
Article 4 : Enseignement obligatoire relatif à la prévention au cours des études supérieures médicales, paramédicales ou sportives
La commission rejette l'article 4.
Article 5 : Enseignement obligatoire relatif à la prévention dans les écoles primaires, collèges, lycées et centres de formation des apprentis
La commission rejette l'article 5.
Article 6 : Actions de prévention et de dépistage des troubles visuels et bucco-dentaires
La commission rejette l'article 6.
TITRE II – De la modernisation des formations médicales et paramédicales
Chapitre Ier – La réforme des études médicales
Article 7 : Repenser le mode de sélection des étudiants en fin de PACES
La commission rejette l'article 7.
Article 8 : Encourager les stages extrahospitaliers au cours des études de médecine
La commission est saisie de l'amendement AS5 du rapporteur.
Cet amendement précise que la liste des stages effectivement pourvus par les étudiants en médecine est rendue publique, au même titre que les stages proposés aux étudiants. Assurer la publicité des stages pourvus et à pourvoir permettra d'évaluer la proportion de stages effectués au sein des centres hospitaliers universitaires, des centres hospitaliers généraux, des cliniques privées et des médecins de ville.
La commission rejette l'amendement.
Puis elle rejette l'article 8.
Article 9 : Patient-formateur
La commission rejette l'article 9.
Article 10 : Création d'un diplôme d'études spécialisées et d'une formation spécialisée de médecine polyvalente hospitalière
La commission est saisie de l'amendement AS6 du rapporteur.
Le V de l'article L. 632-9 du code de l'éducation, que je propose de créer, dispose que les praticiens de médecine hospitalière polyvalente « peuvent bénéficier du développement professionnel continu ».
Or, le développement professionnel continu constitue une obligation pour tout professionnel de santé : je vous propose donc de supprimer cette référence dans le texte.
La commission rejette l'amendement.
Puis elle rejette l'article 10.
Chapitre II – La réforme des études paramédicales
Article 11 : Création de conférences pédagogiques communes aux professions paramédicales
La commission est saisie de l'amendement AS12 du rapporteur.
Cet amendement, qui vise à corriger un oubli constituant une profonde injustice, propose d'associer les représentants des étudiants aux conférences pédagogiques réunissant les organismes de formation paramédicaux au sein des facultés de médecine.
La commission rejette l'amendement.
Puis elle rejette l'article 11
Article 12 : Création d'un statut d'infirmier de pratiques avancées
La commission rejette l'article 12.
TITRE III – Pour un accès à la santé pour tous, plus proche et plus rapide
Chapitre Ier – Les villages de la santé
Article 13 : Création des villages de la santé
La commission rejette les amendements rédactionnels AS7, AS8 et AS9 du rapporteur.
Elle est saisie de l'amendement AS10 du rapporteur.
La commission rejette l'amendement.
Puis elle rejette l'article 13.
Après l'article 13
La commission est saisie de l'amendement AS4 de M. Adrien Quatennens.
Les inégalités d'accès à la santé sont en hausse et menacent le droit à la santé, qui n'est plus garanti pour tout le monde : selon le ministère de la santé, les 10 % de nos concitoyens les mieux desservis ont des possibilités d'accès aux médecins généralistes trois fois supérieures aux 10 % les moins avantagés. La situation est encore plus inégale dans l'accès aux spécialistes : le rapport entre les deux déciles est de un à huit pour les chirurgiens-dentistes, les gynécologues ou les ophtalmologistes. Les communes rurales sont les plus touchées, mais aussi les périphéries des grandes villes.
Les raisons de l'existence des déserts médicaux sont connues : la liberté d'installation totale dont jouissent les professionnels de santé exerçant en ville les conduit naturellement à privilégier leur confort de vie présumé sur leur mission de service public. Ils se concentrent de plus en plus dans les centres-villes des métropoles et dans les zones littorales, au détriment des périphéries et des territoires ruraux.
Cette liberté d'installation constitue une forme d'ingratitude corporatiste envers la collectivité. L'État finance les études des médecins, tandis que la sécurité sociale assure, par son conventionnement, leurs revenus. Dans la situation actuelle, il semble cohérent de réclamer de la part des médecins une contrepartie, en conditionnant leur conventionnement au niveau de densité des territoires. Ce niveau sera défini périodiquement par les agences régionales de santé. Il sera ainsi impossible pour un praticien de s'installer dans une zone surdotée, et il devra se reporter sur des territoires jusqu'alors délaissés.
Ce n'est qu'ainsi que nous résorberons rapidement les déserts médicaux et que nous lutterons efficacement contre les inégalités territoriales qui minent littéralement notre système de santé.
Avis défavorable. Tout ce qui est de nature à apporter des contraintes supplémentaires à l'installation et à la pratique des médecins va à l'encontre de notre proposition de loi.
Je voulais réagir à ce qu'avait dit M. le rapporteur au sujet des villages de la santé. Il est faux d'affirmer que les CPTS ne sont pas efficaces : nous avons des retours positifs de cette mesure encore récente, et qui ne demande qu'à être élargie. Venant moi-même d'une zone rurale à très faible démographie médicale, je sais que, si les professionnels de santé ont besoin de bénéficier du soutien des élus locaux, l'envie de travailler à plusieurs et de créer une dynamique de santé ne peut venir que d'eux-mêmes. Les jeunes médecins ont souvent cette envie, et je trouve très dommage de remettre déjà en question un modèle récent, mais ayant commencé à montrer son efficacité.
Si personne ne songe à nier l'implication dont doivent faire preuve les élus locaux, il ne faut pas oublier qu'il existe déjà deux dispositifs récemment créés, à savoir les communautés professionnelles territoriales de santé et les contrats locaux de santé. Dès lors, plutôt que de créer une nouvelle structure, il me semble que nous devons commencer par faire travailler ensemble les CPTS et les CLS.
La commission rejette l'amendement.
Chapitre II – Dispositions diverses
Article 14 : Internats territoriaux
La commission est saisie de l'amendement AS11 du rapporteur.
L'article 14 vise à encourager les étudiants en médecine à effectuer des stages auprès de médecins exerçant en libéral, en autorisant les collectivités territoriales à créer des internats territoriaux en lien avec les facultés de médecine et les professionnels de santé, dans le cadre d'une convention. L'amendement AS11 vise à préciser que tous les étudiants résidant au sein de l'internat territorial – et pas seulement les futurs médecins – peuvent effectuer un stage au sein du cabinet de l'un des professionnels de santé signataires de la convention.
La commission rejette l'amendement.
Puis elle rejette l'article 14.
Article 15 : Conférences territoriales de santé
La commission rejette l'article 15.
Article 16 : Accorder un droit de prescription aux médecins coordonnateurs en EHPAD
La commission est saisie de l'amendement AS13 du rapporteur.
Cet amendement vise, d'une part, à préciser qu'en cas de prescription à un résident d'EHPAD par le médecin coordonnateur, le médecin traitant du résident – s'il en a un – est systématiquement informé de la prescription ; d'autre part, à reconnaître au médecin coordonnateur la qualité de médecin traitant de toute personne prise en charge dans l'EHPAD dans lequel il travaille, sous réserve que les résidents, leur représentant légal ou la personne de confiance qu'ils ont désignée ne s'y opposent pas.
Je tiens à préciser qu'il y a à l'heure actuelle des médecins coordonnateurs dans tous les EHPAD, et que ces médecins ont déjà l'autorisation de prescrire en cas d'urgence ou de risque extrême.
La commission rejette l'amendement.
Puis elle rejette l'article 16.
TITRE IV – Modernisation de l'exercice libéral de la médecine
Chapitre Ier – Les négociations conventionnelles
Article 17 : Suppression d'une obligation de transmission d'informations et de propositions à la commission des équipements matériels lourds d'imagerie médicale
La commission rejette l'article 17.
Article 18 : Modalités d'application de la convention entre l'UNCAM et les syndicats représentatifs des médecins libéraux
La commission est saisie de l'amendement AS14 du rapporteur.
Cet amendement rédactionnel propose d'étendre à l'ensemble des conventions conclues entre l'assurance maladie et tous les professionnels de santé libéraux les modalités d'entrée en vigueur immédiate prévues à l'article 18.
La commission rejette l'amendement.
Elle examine l'amendement AS15 du rapporteur.
La commission rejette l'amendement.
Puis elle rejette l'article 18.
Article 19 : Clause d'indexation au sein de la convention entre l'UNCAM et les syndicats représentatifs des médecins libéraux
La commission rejette l'article 19.
Après l'article 19
La commission est saisie de l'amendement AS2 de Mme Caroline Fiat.
Si les médecins généralistes sont moins nombreux que par le passé à pratiquer le dépassement d'honoraires, ce n'est pas le cas des spécialistes, au sein desquels le taux moyen du dépassement pratiqué est de 56 %.
Le cas des chirurgiens-dentistes est l'un des plus préoccupants : en 2016, la Cour des comptes déplorait l'augmentation continue du reste à charge des Français en matière de santé bucco-dentaire, tout en soulignant la passivité du législateur. On pouvait ainsi lire dans l'un de ses rapports que « la Cour a constaté un attentisme des pouvoirs publics face aux conséquences de ce désengagement, qui s'aggravent pour les assurés sociaux. En particulier, le renoncement aux soins pour raisons financières touche près d'un patient sur cinq. » .
Ce renoncement aux soins tient beaucoup au fait que la part du remboursement par l'assurance maladie est devenue minoritaire. Les dépassements d'honoraires sont responsables pour moitié de la dépense bucco-dentaire. Ce phénomène est donc fortement nuisible à un accès aux soins.
Or, la santé bucco-dentaire n'a rien de cosmétique. Elle prévient d'autres risques sanitaires, et l'impossibilité pour de nombreux citoyens de se soigner a des conséquences dramatiques sur leur santé. En matière de santé bucco-dentaire, l'obstacle financier joue pleinement, dès le plus jeune âge. En CM2, 40 % des enfants d'ouvriers ont au moins une dent cariée – 1, 5 fois plus que ceux de cadres ! L'inégalité est cumulative, car la consultation pour des soins de caries étant moins fréquente pour des raisons financières, chez les citoyens aux revenus moyens et modestes, l'accès à des prothèses dentaires est quasi impossible.
Il nous semble que, pour remédier à cela, il faut mettre fin à la pratique du dépassement d'honoraires. C'est pourquoi cet amendement prévoit que la convention conclue entre l'Union nationale des caisses d'assurance maladie (UNCAM) et les syndicats représentatifs des professionnels libéraux de santé met en oeuvre la fin des dépassements d'honoraires, en supprimant la possibilité pour les professionnels d'être conventionnés en secteur 2.
Je suis défavorable à cet amendement proposant une méthode trop brutale, qui risque d'entraîner le déconventionnement d'un grand nombre de médecins. Procéder à un nivellement par le bas ne me semble pas très motivant pour les futurs médecins, qui pourraient avoir l'impression qu'on ne leur permettra pas de gagner leur vie à hauteur de leurs qualifications, de leur travail et de la mission de service public qui est la leur.
Les auteurs de cet amendement sont dans l'erreur, car le secteur 2 ne concerne que les médecins, et certainement pas les chirurgiens-dentistes.
Il ne faudrait pas laisser croire aux étudiants en médecine qu'ils ne pourront pas gagner correctement leur vie en secteur 1 : j'ai moi-même exercé en secteur 1 et cela ne m'empêchait pas d'avoir des revenus très confortables. Cela étant, on ne peut pas tout interdire, en l'occurrence supprimer le secteur 2. Sans doute devons-nous faire preuve d'imagination, par exemple en envisageant que l'hôpital, chargé d'une mission de service public, s'investisse davantage en proposant une offre de soins sans dépassement d'honoraires et qui ne serait évidemment pas une sous-médecine – un point sur lequel il conviendrait de communiquer.
La commission rejette l'amendement.
Chapitre II – Mesures diverses
Avant l'article 20
La commission examine l'amendement AS18 du rapporteur.
Cet amendement vise à réparer un oubli en introduisant une obligation de révision périodique des décrets d'actes des professionnels médicaux et paramédicaux de santé, notamment pour tenir compte du fait que les nouvelles technologies progressent très rapidement.
La commission rejette l'amendement.
Article 20 : Conditions de détention des sociétés créées par des professionnels de santé
La commission rejette l'article 20.
Article 21 : Exercice de la médecine par un médecin remplaçant retraité
La commission rejette l'article 21.
Article 22 : Protection des professionnels de santé en cas d'agression ou d'outrage
La commission est saisie de l'amendement AS16 du rapporteur.
La commission rejette l'amendement.
Puis elle rejette l'article 22.
TITRE V – Innovation et données de santé
Article 23 : Intégration des données relatives à la prévention au sein des données de santé
La commission rejette l'article 23.
Article 24 : Faciliter l'accès aux données de santé
La commission rejette l'article 24.
TITRE VI – Financement
Article 25 : Projet de loi de programmation en santé
La commission rejette l'article 25.
Article 26 : Paiement forfaitaire au parcours de soins
La commission rejette l'article 26.
Article 27 : Définition du contenu du panier de garanties collectives pris en charge dans le cadre des contrats collectifs d'assurance complémentaire
La commission est saisie de l'amendement AS17 du rapporteur.
La commission rejette l'amendement.
Puis elle rejette l'article 27.
Article 28 : Gage
La commission rejette l'article 28.
L'ensemble des articles de la proposition de loi ayant été supprimés, le texte est considéré comme rejeté par la commission.
Force est de constater que nous avons assisté à une véritable entreprise de démolition de ce texte, ce qui n'est guère étonnant puisqu'il s'agit d'un texte de l'opposition… Je regrette que, dans la perspective du plan Santé prévu pour 2022, notre commission n'ait pas su voir que ce texte contenait des propositions très intéressantes et qui auraient pu être mises en oeuvre dès maintenant. Le sectarisme a encore frappé et c'est bien dommage. Nous verrons s'il en sera de même la semaine prochaine dans l'hémicycle.
Je conçois la déception qui est la vôtre, monsieur Door. Pour ma part, si je salue le travail et l'implication du rapporteur, je veux également souligner que cette proposition va moins loin que le Plan santé présenté il y a quinze jours par le Président de la République. Le texte que nous venons d'examiner contient des éléments intéressants, qui auront vocation à enrichir nos débats lors de l'examen du prochain PLFSS. L'essentiel est d'être dans le bon tempo… En l'occurrence, compte tenu du fait qu'il est ici question d'un enjeu majeur – l'un de ceux sur lesquels nous serons évalués au terme de ce mandat –, nous ne devons pas hésiter à prendre un peu plus de temps pour réfléchir et pour faire le tri parmi les dispositions que vous avez proposées, de manière à déterminer celles qui sont de nature réglementaire et celles qui pourraient éventuellement être reprises dans un texte législatif.
Pour ma part, je retiendrai de cette proposition de loi tout ce qui a trait à la prévention. En matière d'éducation à la santé, de promotion de la santé et de compétences psychosociales dès le plus jeune âge, il y a effectivement tout un travail à effectuer en complément de ce qui est actuellement prévu par le PLFSS, et j'espère que nous pourrons travailler ensemble à cette fin.
Cette proposition de loi n'arrive peut-être pas au meilleur moment mais, en tout état de cause, nous ne devons pas en faire une affaire politicienne. Nous avons tous sensiblement les mêmes attentes et les mêmes ambitions en matière de santé, et le plus important n'est pas de savoir qui a raison et qui a tort : nous devons plutôt nous engager dans une démarche de prospection visant à construire, au terme d'une réflexion en profondeur, le nouveau modèle de santé que tout le monde attend depuis un certain temps – en particulier dans les zones où l'accès à la santé devient très problématique.
Le plan « Ma Santé 2022 » contient de vraies propositions – déjà plus ou moins annoncées dans le plan de stratégie de santé exposé par la ministre –, notamment en matière de prévention, ce qui montre bien que cet aspect constitue une vraie préoccupation pour le Gouvernement.
On peut toujours reprocher à ce plan de ne pas en faire assez, mais en matière de santé, on n'en fera de toute façon jamais assez ! L'essentiel est qu'une démarche d'évolution, contenant des pistes très novatrices – qui rejoignent certaines des propositions de ce texte – soit enclenchée. Plutôt que de nous inventer des sujets de querelle, tâchons de rester dans cet esprit de coconstruction.
La réunion, suspendue à onze heures quinze, reprend à onze heures trente.
La commission en vient à l'examen de la proposition de loi n° 965 de M. Damien Abad, visant à la consolidation du modèle français du don du sang.
La parole est à M. Damien Abad, rapporteur de la proposition de loi visant à la consolidation du modèle français du don du sang.
À quelques mois de la révision de la loi de bioéthique, il est important de se rappeler que les grands principes qu'elle a forgés, ancrés dans le code civil et le code de la santé publique, déterminent l'approche française du don du sang.
Il en est ainsi de la gratuité et du principe d'anonymat. En audition, M. Toujas, président de l'Établissement français du sang (EFS), expliquait l'intérêt que suscitait encore notre organisation pour certains États, citant des actions de coopération avec le Brésil, le Chili, le Liban ou encore le Vietnam.
Rappelons que l'objectif de la collecte est de répondre à des besoins : d'une part, le besoin en produits sanguins labiles, assurés par l'EFS, dans un cadre monopolistique et réglementé, avec pour objectif l'autosuffisance ; d'autre part, le besoin en médicaments dérivés du sang, dans un marché globalisé, concurrentiel et en proie à une demande exponentielle. Le Laboratoire français du fractionnement et des biotechnologies (CLFB) est un acteur essentiel pour la couverture de ce besoin.
La question qui se pose est alors la suivante : peut-on encore défendre l'éthique « à la française » alors que le droit de l'Union européenne autorise l'indemnisation et que certains pays extérieurs à l'UE ont fait le choix de la rémunération ? Cette question se pose avec d'autant plus d'acuité que 55 % de nos besoins de plasma permettant la fabrication des médicaments dérivés du sang sont aujourd'hui couverts par les importations, et que 80 % de ce plasma en circulation dans le monde proviendraient des seuls États-Unis où, dans certains lieux, les modalités de la collecte sont à mille lieues de correspondre à notre approche. Entendons-nous bien : ce n'est pas la qualité des produits qui est en cause. Tous les produits importés sont contrôlés et correspondent aux exigences françaises et communautaires. Néanmoins, les forts besoins en plasma justifient-ils de jeter un voile pudique sur la situation des donneurs ? C'est un enjeu important auquel nous sommes confrontés.
Les termes du débat ne se résument pas au prétendu « retard » de la France et à son splendide isolement. Il y a quelque chose d'essentiel qui se joue alors que le marché investit de façon croissante la santé publique. La proposition du « moins-disant éthique », portée par l'extension de la loi du marché à la santé publique, présenterait plus d'inconvénients que d'avantages. Il est dès lors permis de s'interroger autrement : demandons-nous si les principes éthiques applicables dans notre pays ne le situent finalement pas en avance. Les produits sanguins labiles collectés ont une durée de vie limitée : cinq jours pour les plaquettes, quarante-deux pour les globules rouges. Dans un contexte marqué par des besoins importants et constants, la gestion éthique de nos stocks aboutit à un taux de péremption de 0,05 %, situant l'EFS à une place enviée. C'est sans doute cela qu'il faut rappeler à nos partenaires et concurrents. La gratuité est une formidable invitation à ne pas gâcher.
S'agissant des médicaments dérivés du sang, l'objectif d'autosuffisance ne peut être atteint par le seul jeu du marché en raison de l'intensité concurrentielle et de la demande mondiale. La satisfaction des besoins de nos patients ne peut se réaliser qu'au moyen de la sécurité d'approvisionnement et de la diversification des sources et donc, par l'importation. En ce domaine, personne ne pardonnerait aux autorités sanitaires une quelconque défaillance dans la chaîne d'approvisionnement. Mais la loi du marché ne doit pas non plus nous inhiber dans la promotion de nos principes. Si la résignation l'emporte, c'est parce nous sommes déjà convaincus de l'ascendant de la loi du marché sur la santé. Dans Les grands cimetières sous la Lune, Georges Bernanos écrivait : « le démon de mon coeur s'appelle : À quoi bon ? ». Or je suis intimement convaincu qu'il n'y a pas de fatalité en la matière.
Je me félicite ainsi de ce que les conditions de collecte en France n'entraînent pas une « surexploitation du donneur », à la différence d'autres pays moins regardants sur les conditions de prélèvement et l'état de santé du donneur.
Cette proposition de loi s'inscrit dans cette démarche et vise à susciter un débat autour de la collecte de sang : celle-ci doit pouvoir répondre à nos besoins sans compromettre nos principes éthiques. Le texte déposé contient des dispositions qui répondent aux préoccupations exprimées par différents acteurs de la collecte du sang. Il réaffirme également les positions de principe applicables au don du sang. Soucieux de conforter l'effectivité et la portée des mesures législatives, j'ai souhaité retenir certaines des suggestions formulées lors des auditions, et je présenterai donc un certain nombre d'amendements qui traduisent cette coproduction législative et effectuent un certain nombre d'ajustements par rapport à la proposition initiale.
Les articles premier à 3 visent à élargir le public des donneurs en prévoyant la généralisation de l'autorisation d'absence pour don du sang, l'abaissement de l'âge pour accomplir le don et la nécessaire sensibilisation de nos concitoyens, en lien avec les collectivités et avec les associations.
Pour des motifs qui tiennent à l'intelligibilité de la norme législative, l'article premier fera l'objet d'un amendement de rédaction globale qui vise à ancrer au sein du code du travail le droit à l'autorisation d'absence, pour permettre aux salariés d'effectuer un don du sang. Cette mesure sera d'ailleurs étendue aux agents publics, qu'ils soient civils ou militaires.
L'article 2 prévoit d'abaisser l'âge minimal à partir duquel un don peut être effectué. Dans sa rédaction initiale, le seuil est abaissé à 16 ans, mais par souci de conformité au droit communautaire, je proposerai un ajustement à l'âge de 17 ans. Cet abaissement, qui implique toujours le recueil du consentement parental, permettrait sans nul doute d'élargir le cercle des donneurs.
Notre modèle de collecte est par ailleurs ancré dans nos territoires. Si la mission de l'EFS est de promouvoir le don du sang, nos collectivités territoriales peuvent aussi s'engager à ses côtés pour des actions de sensibilisation, et tel est l'enjeu porté par l'article 3. Je voudrais juste citer un exemple, celui de la ville de Toulouse, qui s'est mobilisée durant trois jours en vue de la collecte du sang. Cet exemple montre, s'il en était besoin, que les bonnes volontés existent, qu'il importe de les fédérer et de les inscrire dans une dimension territoriale. Les associations de bénévoles du don dans les collectivités y ont toute leur part. La promotion du don désintéressé trouve à s'incarner dans l'exemplarité des bénévoles, les liens de proximité et la mobilisation territoriale.
Les articles 4 et 5 réaffirment le cadre juridique dans lequel s'inscrit notre modèle. Le principe de sécurité constitue aujourd'hui une dimension majeure des politiques publiques de dons, et des produits et éléments du corps humain : sécurité du patient, bien sûr, sécurité des produits, mais aussi sécurité du donneur. Dans un environnement mondialisé où le marché tend à réifier l'être humain, la promotion de l'éthique française du don du sang se distingue également par l'attention portée aux donneurs.
C'est pourquoi il nous semble essentiel que notre corpus juridique prévoie explicitement cette dimension, parfois largement ignorée par certains pays extra-européens. On regrettera de ce point de vue les obstacles empêchant la généralisation à l'échelle européenne d'un label éthique, idée qui a été portée par notre collègue Olivier Véran au cours de la précédente législature.
Nous proposons donc une solution alternative qui consiste à préciser que les bases de données publiques mentionnent le caractère gratuit, indemnisé ou rémunéré du don du sang, afin de favoriser le principe de sécurité du donneur.
Enfin, l'article 6 a pour objet d'inscrire sur la carte d'identité le groupe sanguin et le réseau. Il s'agit de davantage sensibiliser chaque citoyen à la connaissance de ses caractéristiques sanguines afin de favoriser ultérieurement le don. La conscience du besoin des autres passe par la connaissance de ce que l'on est en mesure d'apporter via le don.
Voilà, en quelques mots, les objectifs de cette proposition de loi qui tend à consolider et renforcer le modèle français de don du sang.
Nous avons aujourd'hui à nous saisir au fond de la proposition de loi de notre collègue Damien Abad.
Nous devons en préalable nous poser quelques questions : quel est le modèle français ? En quoi se distingue-t-il au sein de l'Europe ? En quoi pouvons-nous affirmer qu'il est l'un des plus sûrs et des plus aboutis au monde ? Nous avons pu malheureusement vérifier l'efficacité de ce modèle lors des attentats du 13 novembre 2015 et notamment de la tuerie au Bataclan. Nous saluons la forte mobilisation citoyenne des associations de bénévoles et des professionnels de santé, qui organisent, sous l'égide de l'Établissement français du sang, un maillage efficace de notre territoire dans l'organisation des collectes de sang.
Aujourd'hui encore, l'EFS remplit parfaitement les missions qui lui sont dévolues. Premièrement, il garantit la sécurité de la filière avec les consultations pré-don sous responsabilité médicale, la séparation de la collecte et du fractionnement plasmatique, et l'activation du système d'hémovigilance.
Deuxièmement, il garantit l'autosuffisance en produits sanguins labiles avec les collectes nationales et en médicaments dérivés du sang, par un double approvisionnement : national, par le laboratoire français du fractionnement et des biotechnologies au sein de sa filiale LFB Biomédicaments ; et également hors de France, dans le cas d'une autorisation de mise sur le marché (AMM) dérogatoire sous l'égide de l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé.
Troisièmement, il garantit l'éthique du don, qui est fondé sur des valeurs éthiques respectant l'anonymat, l'EFS étant le seul à connaître l'identité du donneur et du receveur afin de garantir la traçabilité du produit, le don étant par essence gratuit et bénévole, et consubstantiellement volontaire, librement accompli sans aucune contrainte.
En résumé, chers collègues, si nous sommes favorables à l'abaissement de l'âge légal à 17 ans pour le don de sang, conformément à la directive européenne, en le soumettant à l'accord parental et au consentement du mineur dans le cadre d'un choix libre et éclairé, nous serons défavorables au reste de la proposition de loi, dont les mesures sont redondantes et s'inscrivent dans le domaine réglementaire, ou sont déjà satisfaites par le code de santé publique et les missions dévolues à l'Établissement français du sang.
Cette proposition de loi pertinente a le mérite de poser un débat nécessaire sur la collecte du sang dans notre pays, et cette démarche est très utile pour soutenir l'action de l'Établissement français du sang.
Notre système français est solide. Il repose sur trois principes étayés qui peuvent rassurer l'opinion publique : la sécurité, l'autosuffisance et l'éthique. En outre, ce modèle français - est-il nécessaire de le confirmer ? - est singulier en comparaison de ce qui peut se passer ailleurs, éthiquement fort, et doit être, en tout état de cause, préservé.
À cet instant, je voudrais saluer l'action des comités locaux, des associations de donneurs, qui permettent, partout en France, de favoriser la collecte nécessaire aux travaux de l'EFS. Il convient de s'assurer que notre modèle peut fonctionner, ce qui signifie qu'il faut favoriser et faciliter l'acte de don du sang. Les propositions très concrètes de cette proposition de loi y contribuent très largement, et c'est la raison pour laquelle nous les soutiendrons avec conviction.
Une autre question paraît d'actualité compte tenu de l'existence de ce marché mondial déshumanisé : il convient de s'assurer d'un contrôle sanitaire des médicaments dérivés du sang importés. Nous devons, en France, être particulièrement vigilants à ce qui peut se passer. Là encore, la proposition de loi permet d'avancer.
Enfin, monsieur le rapporteur, je m'interroge sur l'exclusion de certains donneurs putatifs. Nous avons bien compris que vous vouliez élargir le cercle de celles et ceux qui peuvent donner dans notre pays ; quel est votre sentiment et comment pourrions-nous avancer pour que certains donneurs – je pense notamment aux homosexuels – puissent davantage contribuer à ce don citoyen ?
Le groupe Mouvement démocrate et apparentés (MODEM) tient à saluer l'intention de cette proposition de loi, qui a pour objet de renforcer notre modèle de don du sang. Nous le savons, les besoins en produits sanguins labiles et en médicaments dérivés du sang sont importants : 10 000 dons de sang par jour sont nécessaires pour soigner les malades. Avec l'allongement de la durée de vie et les progrès de la médecine, les besoins se sont accrus ces dernières années, et même s'ils se stabilisent, certaines périodes comme la période estivale restent encore très sensibles, et nous ne pouvons accepter qu'un malade ne puisse être soigné faute de don.
Le modèle français est exemplaire. Volontariat, anonymat, non-profit et bénévolat en sont les valeurs essentielles. Cependant, cela ne veut pas dire que nous ne pouvons pas l'améliorer afin de le rendre encore plus efficient. C'est tout l'objet de cette proposition de loi qui, si elle nous amène à débattre de sujets extrêmement intéressants, comporte selon nous un certain nombre d'imperfections. Nous ne pourrons donc pas la voter en l'état.
Ainsi, faire peser des obligations sur les entreprises ou les collectivités ne nous semble pas être le moyen le plus pertinent de faire progresser le don du sang. Nous pensons cependant que les entreprises ont un rôle à jouer et nous proposerons ainsi un amendement afin que la promotion du don du sang soit incluse dans le champ de la responsabilité sociale des entreprises, ce qui aura selon nous un effet incitatif.
Par ailleurs, l'abaissement de l'âge du don à 16 ans risque d'être contre-productif en raison des inconvénients qu'il présente. Du reste, du fait de la directive européenne, nous ne pouvons pas l'abaisser en dessous de 17 ans.
Si des efforts restent à faire en termes de sensibilisation des jeunes publics et auprès des entreprises, nous ne devons pas douter de notre modèle, qui est sûr et éthique. Nous étudierons donc attentivement cette proposition de loi, à l'aune des modifications qui lui seront apportées, et nous nous réjouissons de manière générale que ce sujet soit abordé au sein de notre commission.
Rebaptisé l'or rouge, le sang est devenu, dans certains pays, un marché lucratif. Opposée à cette marchandisation du vivant, la France a souhaité développer un modèle non mercantile, basé sur le volontariat. Chaque personne est ainsi libre de donner son sang, sans contrepartie financière. Un geste simple qui permet chaque jour de sauver des vies.
Malheureusement, les pénuries quotidiennes et les appels aux dons de l'Établissement français du sang nous rappellent souvent la vulnérabilité de ce modèle.
Pour tenter de le préserver et éviter ainsi son basculement dans un système marchand, la proposition de loi de notre collègue développe plusieurs dispositions qui devraient permettre de faciliter le don et d'accroître le nombre de donneurs.
Je souhaite à ce propos remercier notre rapporteur et collègue, Damien Abad, pour son travail. Je profite également de l'occasion pour remercier tous les bénévoles des amicales de don du sang qui oeuvrent, au quotidien, pour promouvoir ce geste, formidable témoignage de solidarité.
Concernant les mesures proposées, notre groupe y souscrit dans leur grande majorité.
À titre personnel, je suis favorable à l'abaissement de l'âge légal ouvrant droit au don du sang à 17 ans. Cette mesure permettra d'élargir le nombre de donneurs potentiels et de fidéliser le don, sans mettre en danger la santé de ces jeunes donneurs.
Une seconde mesure importante, prévue à l'article 1er, vise à dégager du temps de travail pour favoriser le don. Cette pratique existe déjà au sein des entreprises, mais elle repose actuellement sur la libre appréciation de l'employeur qui peut, ou non, décider de libérer son salarié et de lui maintenir sa rémunération. La disposition proposée par notre collègue permet donc de sécuriser juridiquement une pratique déjà existante, tout en garantissant pour l'employé un maintien de salaire. J'émets toutefois une légère réserve quant au caractère obligatoire de cette disposition, qui peut devenir contraignante et problématique pour les petites et très petites entreprises ayant des effectifs limités. Le ratio déterminé par le texte, à savoir deux heures par semestre, me semble raisonnable au vu des données de l'EFS qui limite et espace le don pour garantir la bonne santé du donneur.
Monsieur le rapporteur, votre texte est un signal très positif envoyé à tous les donneurs de sang. Espérons qu'ils soient encore plus nombreux demain ! Le groupe UDI, Agir et Indépendants soutiendra donc ce texte, et proposera de l'enrichir par le biais d'amendements.
Nous pouvons en effet affirmer qu'il existe un modèle français de don du sang, fondé sur la sécurité et sur l'éthique, et qui repose aussi sur un immense réseau de bénévoles qu'il convient de saluer.
Le don du sang est un enjeu national, qui a d'ailleurs été reconnu comme grande cause nationale en 2009. Mais chacun le sait ici, les causes, parfois, s'étiolent dans l'esprit de nos concitoyens. Cette proposition de loi a donc aussi pour objectif de ranimer la flamme.
Selon l'Établissement français du sang, en France, il faut 10 000 dons de sang par jour pour soigner le million de malades en ayant besoin chaque année. Ce nombre est en constante augmentation, de 1 à 3 % par an, en raison de différents facteurs, principalement des progrès de la médecine. Les besoins en globules rouges se sont quant à eux accrus de 29 % entre 2002 et 2012.
Seulement 4 % de la population en âge de donner son sang le fait et régulièrement, l'Établissement français du sang se voit dans l'obligation de mener des campagnes d'appel au don, la dernière datant de l'été dernier.
Les réticences sont encore nombreuses à effectuer ce qui est vécu par certains comme un acte médical. Nous devons réfléchir à la façon dont nous pouvons les lever pour favoriser les conditions du don.
Au nom du groupe Socialistes et apparentés, je tiens à saluer cette proposition de loi qui contient des avancées sur les facilités pour permettre aux salariés de s'absenter de leur lieu de travail, sur l'abaissement de l'âge légal pour devenir donneur, sur les campagnes de sensibilisation ou encore l'établissement d'un contrôle sanitaire, pour les médicaments dérivés du sang provenant de l'étranger, identique à celui appliqué aux produits émanant du marché français. Le groupe Socialistes et apparentés salue d'autant plus cette initiative qu'il avait lui-même programmé une proposition sur ce sujet. Nous aurons donc à coeur d'enrichir ce texte qui sert une cause pour laquelle je n'ose imaginer que la représentation nationale ne trouve les conditions de son rassemblement.
Je tiens moi aussi à commencer par saluer cette proposition de loi qui contient des propositions intéressantes sur un sujet essentiel, et qui répond à la campagne lancée en début d'année par l'Établissement français du sang sur la pénurie de dons de sang dans notre pays aujourd'hui.
Nous considérons cependant que deux aspects importants ne sont pas traités dans ce texte. C'est pourquoi le groupe La France insoumise a déposé trois amendements.
La proposition de loi enjoint à lutter contre la marchandisation du don du sang et du sang : nous partageons cet objectif, mais il importe alors d'interdire l'importation de produits dérivés du sang dont le recueil n'est pas basé sur le don et la gratuité, et de renforcer la mention des principes du modèle français en prévoyant que ces produits ne peuvent faire l'objet d'une exploitation commerciale en garantissant que le laboratoire public reste bien dans le giron de l'État.
Par ailleurs, si nous voulons élargir le nombre de donneurs, nous ne pouvons pas fermer la porte à toute une catégorie de la population. Or, aujourd'hui, les hommes homosexuels ne peuvent donner leur sang qu'à la condition d'une d'abstinence sexuelle d'un an, ce qui rend de fait le don impossible. Un appel a été lancé le 24 juin 2017 à la ministre de la santé par différents collectifs, notamment Stop Homophobie et le Comité Idaho, soulignant que cette distinction entre les hommes homosexuels et hétérosexuels n'était fondée sur aucune justification médicale ou épidémiologique. Il s'agit donc d'une discrimination, d'autant que les tests actuels permettent de détecter le VIH dans le sang des donneurs sauf si la contamination a eu lieu moins de douze jours avant le don. La suppression de ce délai de douze mois que rien ne justifie médicalement permettrait d'accroître le nombre de donneurs de manière significative.
Je voudrais saluer à mon tour l'esprit qui a présidé à cette proposition de loi. Ce dispositif est un espace préservé dans notre société. Chacun peut s'accorder à souligner la force de cet acte, ce don qui a fondé le modèle éthique de notre pays, sur lequel nous fonctionnons aujourd'hui. Préservons donc au moins le sang de la marchandisation, c'est le moins que nous puissions faire. Le système français fonctionne, avec beaucoup d'efforts et grâce à l'engagement des bénévoles, cet engagement formidable absolument nécessaire. Il nous revient donc de faciliter le plus possible les démarches qui peuvent conduire à augmenter le nombre de dons pour répondre aux besoins.
Je veux faire part de mon inquiétude sur le plasma, qui fait l'objet des questions les plus sensibles. Il y a sans doute des initiatives à prendre pour répondre autrement aux besoins de plasma dans notre pays – un certain nombre de mesures seront proposées. Cette inquiétude est renforcée par la suspension de l'utilisation de certaines machines, qui ont été incriminées. Il y a urgence à se pencher sur cette question. Il ne faut pas renoncer au système du don, y compris pour le plasma.
L'enjeu de santé doit primer. Ainsi, la mesure qui consiste à accorder un droit aux salariés qui souhaitent donner leur sang me semble de très bon aloi.
Nous soutiendrons ce texte, ainsi que la proposition de Mathilde Panot tendant à revenir sur les dispositions concernant les hommes homosexuels.
Merci à chacun des intervenants d'avoir salué ce texte et souligné l'importance du don du sang en France, les spécificités de notre modèle et la nécessité de le préserver.
Monsieur Marc Delatte, nous partageons les objectifs et les principes. Vous avez rappelé à juste titre la tuerie du Bataclan qui a effectivement montré l'efficience du modèle français dans des conditions malheureusement tragiques, et également l'importance de la sécurisation de la filière autour de l'EFS.
Votre groupe est par ailleurs favorable à l'abaissement de l'âge du don à 17 ans. Comme je l'ai dit, cela fera l'objet d'un amendement pour nous mettre en conformité avec le droit communautaire, en maintenant bien sûr l'accord parental.
Je souhaite revenir simplement sur les deux points négatifs que vous avez pointés. S'agissant tout d'abord du caractère redondant de certaines dispositions, qui relèveraient du domaine réglementaire, nous cherchons précisément à aller dans le sens contraire. Ainsi, un salarié peut s'absenter aujourd'hui pour donner son sang, mais avec l'accord de l'employeur. Avec l'article 1er, nous généralisons l'autorisation d'absence. La proposition de loi tend à donner un caractère législatif à cette possibilité pour créer un statut du donneur, afin que ce ne soit plus une simple faculté laissée à la libre appréciation de l'employeur, mais un droit pour le salarié, en vue de multiplier le nombre de donneurs et d'encourager leur fidélisation. De même, l'article 5 relatif au label éthique propose que la base de données publique permette de savoir si le don du sang est rémunéré ou non : c'est un objectif législatif en tant que tel. Il en va de même pour les autres articles. J'espère donc avoir répondu à votre inquiétude : nous ne souhaitons pas une loi bavarde, mais au contraire de vraies dispositions de valeur législative.
Monsieur Viry, vous avez rappelé l'action au quotidien des donneurs et l'engagement des associations de donneurs de sang dans les territoires. Cette proposition de loi a pour objectif de maximiser un modèle dont on connaît certaines limites. Nous souhaitons déverrouiller le plus possible tout en respectant chacun des principes, de manière à sauver notre modèle et à favoriser l'acte du don du sang.
À l'instar d'autres collègues, vous avez soulevé la question importante de l'exclusion des dons de la part d'hommes homosexuels, sur laquelle je reviendrai.
Madame de Vaucouleurs, vous avez rappelé les principes essentiels du don du sang, que nous partageons. Je voudrais revenir sur les deux points qui suscitent des interrogations de votre part : l'obligation à la charge des entreprises et l'abaissement du don à 16 ans.
S'agissant de l'âge, je le répète, je présenterai un amendement qui répond à votre demande afin de nous mettre en harmonie avec le droit communautaire et de prendre en compte les risques évoqués lors des auditions, notamment un risque supérieur de malaise vagal pour les jeunes. Il est donc important de fixer l'âge du don à 17 ans, je suis d'accord avec vous sur ce point.
En ce qui concerne les obligations pour les entreprises, notre modèle vise précisément à créer un statut du donneur tout en gardant le plus de souplesse possible. Certains amendements déposés par votre groupe créent des contraintes plus fortes pour les entreprises que le système que nous vous soumettons. Il en est ainsi de votre proposition de faire figurer la promotion du don de sang dans le document RSE. Pourquoi pas ? Mais c'est aussi une contrainte. Il faut donc étudier cela ensemble. Je préfère moi aussi la souplesse au formalisme administratif. Dans le contexte économique actuel, l'objectif est, non pas de créer des obligations nouvelles, notamment pour les petites et moyennes entreprises, mais de favoriser la sensibilisation, et donc de prévoir un certain nombre de dispositions en ce sens. Nous y reviendrons lors de la discussion des amendements.
Je vous remercie également, monsieur Christophe, pour votre soutien – nous partageons l'objectif de sécurité juridique. Vous émettez une légère réserve sur le caractère obligatoire pour les entreprises d'organiser en leur sein le don de sang. Certes nous généralisons, certes nous créons un statut du donneur – affirmer le contraire serait vous mentir –, mais nous avons veillé à ne pas créer un dispositif trop contraignant qui serait considéré comme un fardeau pour les entreprises et qui irait à l'encontre du but recherché. Nous resterons donc vigilants sur ce point.
Merci à vous aussi, monsieur Saulignac, pour votre soutien. Vous avez raison de rappeler que le don du sang est une grande cause nationale et qu'il faut 10 000 dons par jour pour soigner un million de malades : vous montrez par-là l'effort important que nous devons faire. Les dons sont effectués par 4 % de la population. S'il y a un enjeu d'élargissement du don, il y a aussi un enjeu de fidélisation des donneurs.
Dans le même ordre d'idées, madame Panot est revenue sur la condition d'abstinence d'un an imposée aux homosexuels qui veulent donner leur sang. Chacun de vous deux défendra un amendement sur le sujet. Je suis moi aussi convaincu que le dispositif en vigueur est dépassé. Il faut dès lors supprimer ce qui peut être considéré comme une discrimination. Je préfère toutefois, nous y reviendrons, l'amendement de M. Saulignac, tel qu'il est rédigé, à celui de Mme Fiat, cosigné par Mme Panot.
En ce qui concerne l'interdiction de l'importation de dons de sang sur les marchés dérivés, on part du présupposé que, par essence, le don gratuit est forcément plus sûr et de meilleure qualité que le don rémunéré. Or ce n'est pas forcément le cas. Ensuite, le texte permet de franchir un pas important. Olivier Véran, vous le savez, avait défendu la création d'un label éthique ; or l'Union européenne refuse la création de ce qu'elle considère comme un étiquetage – nous avions eu un débat similaire concernant l'étiquetage des viandes, nous heurtant à la même difficulté. Nous proposons par conséquent l'établissement d'une base de données précisant le caractère rémunéré ou gratuit du don et, si ce n'est pas ce que vous souhaitez, c'est malgré tout un premier pas.
Enfin, merci à vous aussi, monsieur Dharréville, pour votre soutien au texte. Vous avez raison de rappeler les inquiétudes sur le plasma et raison de nous inviter à ne pas renoncer à notre modèle – ce pourquoi nous envisageons de donner un statut au donneur et un nouveau droit au salarié ainsi que je l'ai évoqué précédemment.
On a mentionné, et je vous en remercie, le rapport sur la filière du sang en France, que j'ai remis en 2013.
En ce qui concerne l'éthique des médicaments dérivés du sang, il est vrai que le code de santé publique prévoit qu'on doit toujours utiliser un médicament produit dans ces conditions éthiques « à la française », sauf s'il n'y a pas l'équivalent, auquel cas on peut recourir à des médicaments produits à l'étranger dans d'autres conditions. Les associations d'usagers, en particulier les associations d'hémophiles, dont j'avais interrogé les représentants, étaient favorables au principe de pluralité. Nous avions néanmoins fait adopter par la quasi-unanimité des députés, contre l'avis du Gouvernement, un amendement établissant une fiscalité différente pour les industriels produisant des médicaments dérivés du sang dans des conditions éthiques « à la française » – je pense au LFB. On nous avait à l'époque promis les feux de la guerre de la part de l'Union européenne ; or personne n'a saisi la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE).
De la même manière, l'amendement sur le label éthique, qui visait à informer les prescripteurs, les acheteurs mais également les bénéficiaires de médicaments dérivés du sang, avait été lui aussi adopté contre l'avis du Gouvernement. Or il a été bloqué par l'exécutif, ce que je regrette.
J'en viens au don de sang qui serait permis aux jeunes âgés de dix-sept ans : les fédérations de donneurs et les acteurs de la santé publique n'y étaient pas favorables et c'est pourquoi, à l'époque, nous n'avions pas retenu cette mesure. Vous avez rappelé la fragilité du public concerné, adolescent, plus exposé aux malaises, ainsi que le risque comportemental, avec des risques accrus d'instabilité des couples, instabilité de nature à favoriser des surinfections virales. Enfin, associations et acteurs se demandaient quel message serait dès lors envoyé à la jeunesse de la part d'une société qui aurait besoin de faire appel à des mineurs, alors qu'il suffirait que nous soyons un peu plus de majeurs à donner de notre sang.
Quoi qu'il en soit, je remercie les auteurs du texte pour le travail qu'ils ont réalisé.
Je salue à mon tour le travail réalisé par Damien Abad.
L'autosuffisance nationale en produits sanguins est fragile et le sang reste une ressource rare. En juin dernier, l'Établissement français du sang alertait sur les faibles réserves de sang en France et lançait un nouvel appel d'urgence aux dons. On l'a mentionné, 10 000 dons de sang sont nécessaires chaque jour pour répondre aux besoins des malades et pour renouveler régulièrement les stocks afin de prévenir toute pénurie.
La présente proposition de loi vise donc à répondre à ces besoins en consolidant les institutions relatives au don du sang. Plusieurs mesures sont mises en avant : l'aménagement de deux heures par semestre pour permettre aux salariés de donner leur sang ; l'abaissement à seize ans de l'âge légal pour donner son sang et la mise en oeuvre de campagnes de sensibilisation à destination du public.
Rappelons que seulement 4 % de la population donne son sang – or un don contribue à sauver trois vies. Il est important de favoriser des conditions du don et de sensibiliser à l'importance de ce don. Les Français sont par nature généreux et fraternels et je ne doute pas qu'avec des conditions plus favorables, nous puissions accroître les dons.
Je m'associe aux collègues qui ont salué le travail réalisé par Damien Abad. J'apprécie la clarté de son rapport et les éléments de compréhension qu'il propose. Ce texte est important, on l'a dit. Les transfusions sanguines ou de plasma permettent de sauver des vies, de guérir des malades. Aussi est-il nécessaire de tout faire pour améliorer la sensibilisation de la population au don du sang.
Je suis très favorable à la baisse de l'âge des donneurs à dix-sept ans, d'autant plus que c'est la norme européenne, même si l'autorisation des parents m'apparaît indispensable puisque l'autorité parentale s'exerce jusqu'à la majorité. On voit bien, en effet, qu'en cas d'hospitalisation, d'intervention ou d'actes un peu invasifs, l'autorisation des parents est nécessaire.
L'inscription du groupe sanguin d'un individu sur sa carte d'identité est par ailleurs une très bonne idée mais doit relever de la liberté de chacun même si, en effet, on n'a pas toujours sa carte de donneur de sang sur soi alors qu'on a le plus souvent sa carte d'identité.
Enfin, en ce qui concerne le contrôle sanitaire des médicaments dérivés du sang qui sont importés, la priorité doit être donnée aux produits recueillis sur le sol national et ensuite seulement, quand on se trouve vraiment dans une situation de pénurie, avoir recours aux produits étrangers.
Mettons donc l'accent sur la sensibilisation et l'encouragement de nos concitoyens à donner.
Olivier Véran a évoqué la fiscalité différenciée en fonction de la provenance du don : nous pourrons en discuter avec la ministre.
Nous avons appris pendant les auditions qu'un avis circonstancié de la Commission européenne considérait que le projet de décret envisagé par le ministère de la santé pour rendre le label éthique effectif n'était pas conforme au droit communautaire. Il conviendra donc d'en informer le Parlement – ce sera l'objet d'un amendement –, ce qui est la moindre des choses, et de trouver des solutions.
L'abaissement de l'âge autorisé pour faire un don n'est pas en contradiction avec la nécessité d'effectuer le tri des donneurs dans le cadre de la consultation pré-don.
Je remercie Mme Dubié pour son jugement positif sur le texte. Je suis d'accord avec elle sur la nécessité d'assortir d'une autorisation parentale le don de sang d'un jeune de dix-sept à dix-huit ans. Je l'approuve également sur le fait qu'on doive laisser à la libre appréciation de chacun l'inscription du groupe sanguin sur sa carte d'identité.
La commission passe à l'examen des articles.
Je rappelle aux députés non-membres de la commission – auxquels je souhaite la bienvenue et que je remercie pour leur apport au débat – que seuls les commissaires des affaires sociales peuvent voter.
Article 1er : Généralisation d'une autorisation d'absence pour effectuer un don de sang
La commission examine l'amendement AS21 du rapporteur.
Le présent amendement vise à récrire l'article 1er et en particulier à en préciser l'objet : favoriser le don du sang.
Le droit en vigueur prévoit la possibilité d'une autorisation d'absence pour les salariés à la discrétion de l'employeur. L'article proposé ne fait que systématiser ce principe en le prévoyant expressément pour les salariés du secteur privé et les agents publics et militaires.
L'objectif est de fidéliser les actuels donneurs. Nombre d'entre eux sont âgés de dix-huit à vingt-cinq ans et de plus de quarante-cinq ans avec un déficit réel de donneur âgés de vingt-cinq à quarante-cinq ans. À ce jour, en effet, une personne effectue 1,85 don par an, moyenne qu'il faudrait porter à deux par an pour que nous soyons autosuffisants.
La commission rejette l'amendement.
Elle examine ensuite l'amendement AS5 de M. Paul Christophe.
L'article 1er permet de libérer du temps pour que le salarié puisse aller donner son sang à raison de deux heures par semestre.
L'amendement vise à rendre cette possibilité facultative, et non obligatoire. Dans le cadre d'une petite ou très petite entreprise, l'absence d'un salarié pendant deux heures peut en effet être problématique et perturber son bon fonctionnement.
Il corrèle également la possibilité d'absence à l'accord préalable de l'employeur.
Cet amendement ne fait que réaffirmer le droit en vigueur au terme duquel l'autorisation d'absence est délivrée à la discrétion de l'employeur. J'insiste sur le fait que maintenir de trop fortes contraintes n'est pas de faire pas de faire peser sur l'employeur. Avec votre proposition, on en revient au texte réglementaire. Avis défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Elle en vient à l'amendement AS8 de M. Paul Christophe.
Cet amendement de clarification vise à préciser que le dispositif s'applique bien à l'ensemble des agents de la fonction publique et non pas aux seuls contractuels
La commission rejette l'amendement.
Elle examine ensuite l'amendement AS6 de M. Paul Christophe.
L'article 1er propose une mesure louable en permettant de sécuriser une pratique déjà en vigueur, en garantissant le maintien de la rémunération pour le salarié absent. Si ces dispositions accordent au salarié un nouveau droit, il convient toutefois de l'assortir d'une obligation d'information auprès de l'employeur. L'amendement précise donc que l'employeur doit être au préalable informé de l'absence de son employé.
Dans le souci d'équilibre entre, d'une part, la nécessité de créer un droit et l'établissement d'un statut du donneur et, d'autre part, la nécessité d'éviter d'ajouter des contraintes en particulier aux petites et moyennes entreprises, j'émets un avis défavorable. On instaurerait en effet un formalisme superflu : par quelles dispositions cette information préalable devra-t-elle se traduire ? De surcroît, toute autorisation d'absence suppose que l'employeur soit averti…
La commission rejette l'amendement.
Elle en vient à l'amendement AS7 de M. Paul Christophe.
Dans le cadre d'une petite ou très petite entreprise, l'absence d'un salarié pendant deux heures peut en effet être problématique et venir perturber le bon fonctionnement de l'entreprise.
Pour que la date et l'heure choisies pour le don du sang conviennent aux exigences et contraintes de l'entreprise, cet amendement vise à ce que l'employeur et le salarié s'accordent au préalable sur les modalités de l'absence.
Dans le même esprit que les précédents, le présent amendement vise à mettre des bornes destinées à éviter des autorisations d'absence considérées comme abusives. Il a néanmoins le mérite de préserver la souplesse de l'article 1er. Aussi, dans un esprit d'ouverture, j'émets un avis plutôt favorable même si je reste prudent sur l'excès de formalisme qui peut peser sur nos entreprises.
La commission rejette l'amendement.
Elle examine ensuite l'amendement AS4 de M. Vincent Descoeur.
Les associations de donneurs de sang bénévoles que j'ai consultées ont exprimé des réserves sur la possibilité offerte aux salariés de s'absenter de leur lieu de travail sans interruption de salaire, considérant que le caractère obligatoire de cette disposition remettrait en cause le principe du caractère bénévole du don.
Aussi le présent amendement vise-t-il à inciter les entreprises à favoriser l'accès de leurs salariés au don, en particulier en autorisant leurs absences, plutôt que de les imposer.
Plusieurs associations se sont en effet interrogées sur le respect des principes éthiques par l'article 1er. Il s'agit, je le rappelle, de créer un statut de donneur tout en préservant le principe éthique de la gratuité du don de sang. Nous prévoyons une autorisation d'absence qui ne serait plus à la libre appréciation de l'employeur mais qui serait un droit pour le salarié, cela, bien entendu, sans que le don soit rémunéré. Le texte ne contrevient donc pas au caractère gratuit et bénévole du don. Nous souhaitons seulement que le don n'entraîne pas de perte de rémunération. Je comprends le souci que vous exprimez en défendant cet amendement d'appel, mais je vous suggère de le retirer puisque vous avez satisfaction sur le fait que, j'y insiste, il n'y a ni rémunération, ni paiement, ni indemnisation pour le don et que la gratuité en est préservée.
Je m'étonne quelque peu du présent amendement. Au motif en effet qu'on ne voudrait pas laisser penser qu'on rémunère le don du sang, on pénaliserait le salarié qui irait donner son sang. Il est évident que si cet amendement était adopté, il serait totalement inefficient. En outre, j'ai moi aussi, comme d'autres ici, j'imagine, le souci de faciliter la vie des entreprises ; or s'il faut dire à des employeurs qu'il faut retirer deux heures de salaire à chaque fois que quelqu'un va donner son sang, cela ne va pas leur faire plaisir.
Le but de cet amendement n'est pas de retirer des heures de salaire mais de relayer les interrogations des associations de donneurs sur le caractère systématique du maintien de la rémunération. J'entends toutefois les arguments du rapporteur et je pense que ses propos sont de nature à la fois à satisfaire les associations et à faciliter le don des salariés. C'est pourquoi je retire mon amendement.
L'amendement est retiré.
La commission rejette l'article 1er.
Après l'article 1er
La commission examine l'amendement AS10 de Mme Michèle de Vaucouleurs.
Le présent amendement vise à intégrer la promotion du don du sang dans la déclaration extra-financière réalisée par les entreprises prévue par l'article L. 225-102-1 du code de commerce.
Cela aura pour effet de sensibiliser fortement les entreprises à la nécessaire promotion du don du sang, via l'organisation de collectes au sein de l'entreprise par exemple, mais aussi en permettant aux salariés d'effectuer un don durant leur temps de travail.
Les entreprises prennent conscience de cet enjeu sanitaire et de société puisque, en leur sein, près de 180 000 dons par an sont réalisés. L'objectif est d'accroître ce chiffre en intégrant la promotion du don du sang dans leur stratégie de RSE (responsabilité sociale des entreprises).
Je suis favorable à cet amendement à condition qu'on n'alourdisse pas les charges sociales des entreprises. Reste qu'il semble revêtir un caractère plus contraignant que le texte – que je suis prêt à compléter. Quand nous l'avons auditionné, M. Toujas nous a parlé du don du sang de droite et celui de gauche, le premier s'effectuant à la sortie de la messe et le second étant assuré le dimanche par les syndicats ouvriers ; or je suis disposé à ce qu'on prenne l'ensemble des dons pour favoriser la situation des donneurs en France…
Les députés du groupe La République en Marche ne peuvent être favorables à votre amendement, madame de Vaucouleurs, dans la mesure où les acteurs concernés – les entreprises et le ministère de l'économie – n'ont pas été consultés alors qu'il s'agit de modifier le code de commerce. Reste que votre proposition est intéressante dans le cadre de la stratégie du RSE. Nous en rediscuterons en séance.
Une telle consultation pourrait en effet être utile. J'espère que nous parviendrons à un consensus afin que l'amendement soit adopté en séance où, de toute façon, je le présenterai à nouveau.
On peut en effet examiner à nouveau l'amendement en séance même s'il est possible de l'adopter dès à présent afin d'avoir la certitude que le débat aura bien lieu dans l'hémicycle et afin que nous obtenions des réponses. C'est pourquoi si, stratégiquement, vous tenez beaucoup à votre amendement, il serait préférable de l'adopter dans un premier temps en commission.
L'amendement est retiré.
La commission examine l'amendement AS16 de M. Hervé Saulignac.
Je tiens au préalable à rappeler qu'il y a seulement trente-cinq ans de cela, en France, les homosexuels étaient exclus à vie du don du sang. Fort heureusement les choses ont progressé mais l'égalité ne prévaut toujours pas en la matière même si depuis 2016 le code de la santé publique prévoit que nul ne peut être exclu du don du sang en dehors de contre-indications médicales et que nul ne peut être exclu du don du sang en raison de son orientation sexuelle. Néanmoins, l'arrêté du 5 avril 2016 prévoit un ajournement spécifique de douze mois pour les hommes homosexuels contre quatre mois pour les hétérosexuels…
Je me permets de vous interrompre, monsieur Saulignac, car vous n'êtes pas en train de défendre l'amendement AS16.
Vous avez raison, madame la présidente, je vous présente mes excuses. Je serai donc bref.
L'amendement AS16 vise à faciliter la collecte de sang par l'Établissement français du sang. Il est à cette fin proposé aux entreprises d'au moins 200 salariés de mettre à disposition de ces derniers, à raison d'une fois par an au moins, une salle ou tout au moins les moyens matériels indispensables pour prélever le sang dans de bonnes conditions. Je rappelle que 81 % des dons du sang sont réalisés lors de collectes mobiles de l'EFS ; c'est dire s'il faut renforcer ce mode de collecte.
Avis défavorable. L'amendement traite de santé et de sécurité au travail alors que le texte porte sur le don du sang.
La commission rejette l'amendement.
Article 2 : Abaissement de l'âge minimal permettant de donner son sang
La commission examine l'amendement AS14 de M. Sébastien Cazenove.
Le présent amendement vise à supprimer l'article, mais j'entends le consensus qui se dégage autour de l'âge minimal de dix-sept ans – qui au reste correspond à la norme européenne. C'est pourquoi, tout en appelant votre attention sur la fidélisation des jeunes qui ont fait un malaise pendant un don de sang et sur la nécessité de travailler avec les associations de don du sang, je retire mon amendement.
L'amendement est retiré.
La commission en vient à l'amendement AS22 du rapporteur.
L'amendement AS22 répond à la volonté exprimée par les représentants de plusieurs groupes d'abaisser l'âge minimal requis pour donner son sang, cela afin d'augmenter le nombre de donneurs. Il s'agit, ce faisant, de respecter le droit communautaire et de prendre en compte la situation de mineur du donneur de sang. Il est donc prévu de porter cet âge de seize ans – comme le fixe le texte – à dix-sept ans. Au moins convergerions-nous sur ce point même si j'ai bien compris que la proposition de loi ne serait pas forcément votée. C'est en effet important, en particulier dans la perspective des débats sur les questions bioéthiques.
Nous vous rejoignons en effet sur ce point, monsieur le rapporteur, non seulement parce que, vous l'avez évoqué, l'abaissement de l'âge minimum pour donner son sang renforce le nombre de donneurs mais aussi parce que la disposition proposée s'inscrit dans le cadre de la solidarité collective. En outre, les étudiants de santé interviendront précisément sur la prévention et sur la dimension « citoyenne » du don. Les députés du groupe LaREM voteront donc l'amendement AS22.
Monsieur le rapporteur, vous avez bien pris en compte les contraintes de la directive européenne. Toutefois, le fait d'abaisser l'âge à partir duquel on peut donner son sang pose un problème d'ordre éthique : un jeune mineur pourrait ne pas être honnête lors de l'entretien de pré-don, de peur de se voir refuser le don en présence de ses parents. De plus, l'acte de donner son sang est une décision éclairée d'adulte et qui ne doit pas être prise sous la pression familiale. Enfin, on sait que les malaises vagaux sont plus courants chez les donneurs les plus jeunes. Or un jeune victime d'un malaise vagal lors de son premier don risquerait de ne pas revenir donner son sang dans les années qui suivent. L'abaissement de l'âge légal risquerait donc de se révéler contre-productif. Aussi semble-t-il nécessaire de prendre un peu de recul afin d'établir un rapport entre le bénéfice de la mesure envisagée et le risque qu'elle présente. C'est pourquoi les députés du groupe MODEM s'abstiendront.
Je suis d'autant plus sensible à vos questions que nous nous les sommes nous-mêmes posées.
Rappelons toutefois que la fixation de la limite d'âge à dix-sept ans a fait l'objet d'une directive européenne. Dans la plupart des pays européens, des personnes n'ayant pas atteint l'âge de dix-huit peuvent donner leur sang. L'âge de dix-sept ans, contrairement à l'âge de seize ans, semble apporter des garanties suffisantes sur le plan médical et psychologique.
Lors des auditions, nous avons eu des échanges sur les risques de malaise vagal chez les jeunes donneurs. Il est certain que la personne qui serait victime d'un tel malaise lors du premier don ne sera pas encline à revenir. L'objectif est d'éviter cela.
Les représentants de la direction générale de la santé, rattachée au ministère chargé de la santé, ont souligné lors de leur audition que l'abaissement de l'âge minimal présentait des avantages qui l'emportaient sur les inconvénients. Il permet de sensibiliser le plus tôt possible le jeune public au don, et à terme de favoriser une fidélisation, et s'inscrit dans la philosophie d'une société d'engagement souhaitée par les pouvoirs publics.
La commission adopte l'amendement.
Elle en vient à l'amendement AS17 de M. Pierre Dharréville.
Cet amendement prévoit que les mineurs, pour donner leur sang, doivent avoir l'autorisation du ou des représentants légaux pour participer au don du sang.
Votre amendement est satisfait par le droit communautaire : le don est autorisé à partir de l'âge de dix-sept ans « moyennant le consentement écrit d'un parent ou d'un tuteur légal selon les termes de la loi ».
Je vous demande donc de bien vouloir le retirer.
L'amendement AS17 est retiré.
La commission examine ensuite l'amendement AS2 de M. Vincent Descoeur.
Chaque année, 170 000 donneurs sont atteints par la limite d'âge fixée à soixante-dix ans révolus. Par cet amendement, nous prévoyons de porter l'âge maximal à soixante-quinze ans afin d'augmenter le nombre de donneurs. Nous savons que l'état de santé de nombre d'entre eux leur permettrait de continuer à donner leur sang et que l'exclusion systématique à l'âge de soixante-dix ans contrarie des donneurs très motivés, souvent engagés de longue date.
Compte tenu de l'augmentation de l'espérance de vie, un relèvement à soixante-quinze ans répond à une logique certaine. Toutefois, je vous demanderai de bien vouloir retirer votre amendement car nous n'avons pas encore suffisamment approfondi la question de l'âge maximal, nous concentrant sur celle de l'âge minimal, compte tenu de la pénurie de donneurs chez les personnes de vingt-cinq ans à quarante-cinq ans. Nous pourrons y revenir en séance afin d'examiner plus précisément l'impact du déplacement de la limite d'âge, notamment sur l'état de santé des donneurs.
Je ne suis pas médicalement compétent, cela me semblait être une mesure de bon sens. J'accepte de retirer mon amendement pour le redéposer en séance.
L'amendement AS2 est retiré.
La commission adopte l'article 2 modifié.
Après l'article 2
La commission examine, en discussion commune, les amendements AS11 de Mme Caroline Fiat et AS15 de M. Hervé Saulignac.
Pour augmenter le nombre de donneurs, il nous semble primordial de prendre en compte les modalités du don des hommes homosexuels. Notre droit prévoit que « nul ne peut être exclu du don de sang en raison de son orientation sexuelle ». Toutefois, l'arrêté du 5 avril 2016, qui impose notamment une période d'abstinence de douze mois aux hommes ayant des relations sexuelles avec d'autres hommes, les exclut du don de sang. Nous devons résoudre la contradiction qui existe dans la loi en supprimant cette disposition qu'aucune raison médicale ne justifie. Le virus du VIH pouvant être détecté dans le sang douze jours après l'exposition, pourquoi imposer une période d'attente trente fois supérieure ?
De nombreux pays comme l'Espagne, le Portugal, l'Italie, et même la Russie ont mis en place un protocole de don de sang non discriminatoire envers les hommes homosexuels.
Il est important de ne pas exclure de la solidarité collective les personnes homosexuelles : le don du sang est un acte citoyen, bénévole et gratuit. Donnons un signal dans le combat pour l'égalité des droits et revenons sur cette disposition de 2016.
Force est de constater qu'une discrimination demeure. Ce qui constitue un risque dans le don de sang, c'est le comportement du donneur et non son orientation sexuelle. Une personne peut être hétérosexuelle et irresponsable dans ses pratiques sexuelles comme elle peut être homosexuelle et parfaitement responsable. Notre amendement vise à assurer une égalité de traitement, à l'instar de pays comme l'Espagne, l'Italie, la Pologne ou même la Russie peu connue pour ses bonnes intentions à l'égard des homosexuels.
Notre amendement pose le principe que « pour tout homme donneur et toute femme donneuse, aucune distinction ne doit être faite en fonction du genre et sexe du ou des partenaires avec qui il ou elle aurait entretenu des relations sexuelles. ».
Vos amendements visent à faire évoluer la législation pour établir une égalité de traitement en supprimant la condition établie dans l'arrêté de 2016. Comme je l'ai dit dans la discussion générale, je suis favorable à cette modification de notre droit car j'estime qu'il faut mettre fin à une rupture d'égalité qui ne se justifie plus. C'est un débat que nous ne voulions pas forcément aborder dans le cadre de cette proposition de loi mais puisque vous l'avez fait, tranchons-le. Pour de simples raisons de rédaction, je précise que j'ai une préférence pour l'amendement AS15 de M. Saulignac.
Je remercie M. le rapporteur pour sa prise de position. En 2018, il y a quelque chose de choquant à ce que l'accès au don de sang soit soumis pour certains hommes de notre pays à une abstinence sexuelle d'un an. Je voterai donc en faveur de l'un de ces amendements.
En tant que membre titulaire du Comité consultatif national d'éthique, je peux vous renvoyer à l'avis 123 qu'il a émis. Dans le principe éthique, il y a bien sûr la justice et la bienveillance. Cela étant, les modalités de sélection des donneurs en vue d'assurer la sécurité maximale des produits utilisés dans les transfusions sont prévues par des arrêtés, notamment celui du 5 avril 2016. La non-discrimination en fonction de l'orientation sexuelle est déjà établie dans l'article L. 1211-6-1 du code de santé publique. Ces amendements ne m'apparaissent pas apporter de plus-value à la législation en vigueur. Nous y serons donc défavorables.
J'étais curieuse d'entendre la position de La République en marche : l'intervention qui vient d'être faite ne me paraît pas répondre aux arguments que nous avons développés. Le fait que la loi prévoie la non-discrimination en fonction de l'orientation sexuelle n'est pas suffisant. Nous avons bien vu que ce principe ne pouvait être effectif du fait de l'arrêté qui impose une période d'abstinence de douze mois aux homosexuels alors que pour les personnes hétérosexuelles, d'autres dispositions prévalent. C'est la raison pour laquelle nous devons inscrire explicitement les modalités de cette non-discrimination dans notre droit. Nous ne pouvons laisser perdurer une situation que rien ne justifie.
Aujourd'hui, un principe d'ajournement de quatre mois peut s'appliquer aux donneurs hétérosexuels. S'il apporte une sécurité suffisante, alors il doit valoir aussi pour les donneurs homosexuels. C'est la raison pour laquelle il faut corriger l'ineptie que constitue la persistance de cette discrimination dans notre droit.
Il importe en effet de supprimer une discrimination qui n'a pas lieu d'être. Notre groupe sera favorable à ces amendements.
C'est moins la question de l'orientation sexuelle qui compte en matière de don de sang que les pratiques sexuelles. Il serait donc souhaitable de revenir, d'une manière ou d'une autre, sur cette discrimination sans fondement.
Nous n'avons pas eu ce débat pendant les auditions et il sera sans doute nécessaire de préciser certaines choses. Cela dit, je suis favorable sur le principe à ces amendements, avec une préférence pour l'amendement AS15 pour des raisons de rédaction, je le répète.
La commission rejette l'amendement AS11.
Puis elle adopte l'amendement AS15.
La séance est levée à douze heures cinquante-cinq.
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Présences en réunion
Réunion du mercredi 3 octobre 2018 à 9 heures 30
Présents. – M. Damien Abad, M. Joël Aviragnet, Mme Delphine Bagarry, Mme Ericka Bareigts, M. Belkhir Belhaddad, Mme Gisèle Biémouret, M. Julien Borowczyk, Mme Brigitte Bourguignon, Mme Marine Brenier, Mme Blandine Brocard, M. Sébastien Chenu, M. Gérard Cherpion, M. Guillaume Chiche, M. Paul Christophe, Mme Christine Cloarec, Mme Josiane Corneloup, M. Marc Delatte, M. Pierre Dharréville, M. Jean-Pierre Door, Mme Jeanine Dubié, Mme Audrey Dufeu Schubert, Mme Nathalie Elimas, Mme Catherine Fabre, Mme Caroline Fiat, Mme Agnès Firmin Le Bodo, Mme Emmanuelle Fontaine-Domeizel, Mme Albane Gaillot, Mme Carole Grandjean, M. Jean-Carles Grelier, M. Brahim Hammouche, Mme Monique Iborra, M. Cyrille Isaac-Sibille, Mme Caroline Janvier, Mme Fadila Khattabi, M. Mustapha Laabid, Mme Fiona Lazaar, M. Gilles Lurton, M. Sylvain Maillard, M. Thomas Mesnier, M. Thierry Michels, M. Patrick Mignola, M. Bernard Perrut, M. Laurent Pietraszewski, Mme Claire Pitollat, M. Alain Ramadier, M. Jean-Hugues Ratenon, Mme Stéphanie Rist, Mme Mireille Robert, Mme Laëtitia Romeiro Dias, Mme Marie Tamarelle-Verhaeghe, Mme Élisabeth Toutut-Picard, M. Boris Vallaud, M. Pierre Vatin, Mme Michèle de Vaucouleurs, M. Olivier Véran, M. Francis Vercamer, Mme Annie Vidal, Mme Corinne Vignon, M. Stéphane Viry, Mme Martine Wonner
Excusés. – Mme Justine Benin, Mme Claire Guion-Firmin, M. Jean-Philippe Nilor, Mme Michèle Peyron, Mme Nadia Ramassamy, Mme Nicole Sanquer, M. Jean-Louis Touraine, Mme Laurence Vanceunebrock-Mialon
Assistaient également à la réunion. – Mme Emmanuelle Anthoine, M. Thibault Bazin, M. Philippe Berta, M. Sébastien Cazenove, M. Vincent Descoeur, Mme Geneviève Levy, Mme Frédérique Meunier, M. Maxime Minot, Mme Mathilde Panot, M. Hervé Saulignac