Commission d'enquête chargée d'identifier les facteurs qui ont conduit à la chute de la part de l'industrie dans le PIB de la France et de définir les moyens à mettre en œuvre pour relocaliser l'industrie et notamment celle du médicamenT
Jeudi 4 novembre 2021
La séance est ouverte à neuf heures trente.
(Présidence de M. Guillaume Kasbarian, président)
La commission d'enquête chargée d'identifier les facteurs qui ont conduit à la chute de la part de l'industrie dans le PIB de la France et de définir les moyens à mettre en œuvre pour relocaliser l'industrie et notamment celle du médicament procède à l'audition des représentants de France industrie.
Nous entamons une journée d'auditions de la commission d'enquête chargée d'identifier les facteurs qui ont conduit à la chute de la part de l'industrie dans le PIB de la France et de définir les moyens à mettre en œuvre pour relocaliser l'industrie et notamment celle du médicament.
Nous accueillons les représentants de France Industrie, organisation qui rassemble vingt-six fédérations sectorielles de l'industrie et les présidents de quarante-cinq grandes entreprises, privées et publiques, intervenant dans tous les secteurs industriels.
Je souhaite donc la bienvenue à :
– M. Alexandre Saubot, directeur général d'Haulotte Group, président de France industrie, vice-président du Conseil national de l'industrie, ancien président de l'Union des industries et métiers de la métallurgie (UIMM), et de l'opérateur de compétences inter-industriel (Opco 2i),
– M. Vincent Moulin Wright, directeur général de France industrie,
– M. Jérôme Breysse, directeur des affaires publiques de France industrie.
Messieurs, je vous saurais gré de nous tenir informés d'éventuels intérêts publics ou privés qui pourraient être de nature à influencer vos déclarations.
Je vous rappelle que l'article 6 de l'ordonnance du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires impose aux personnes auditionnées par une commission d'enquête de prêter le serment de dire la vérité, toute la vérité, rien que la vérité. Je vous invite donc à lever la main droite et à dire « Je le jure ».
M. Alexandre Saubot, M. Vincent Moulin Wright, et M. Jérôme Breysse prêtent serment.
Je vous remercie de prendre le temps de nous écouter sur un sujet qui passionne les industriels.
France Industrie rassemble environ 99 % de l'industrie française, une trentaine de fédérations et une cinquantaine de grandes entreprises industrielles, ce qui nous permet de détenir une très bonne connaissance de l'ensemble des enjeux, des difficultés, des opportunités rencontrées par l'industrie. Je suis également vice-président du Conseil national de l'industrie (CNI) qui anime dix-neuf filières et qui s'efforce également, par un travail collectif, de comprendre les enjeux et de collaborer avec les organisations syndicales et le gouvernement sur les meilleurs outils et les meilleures opportunités de développement de ces filières.
L'activité de l'industrie française a globalement retrouvé un niveau très proche de ce qu'il était avant la crise, mais nous observons des situations diversifiées. L'aéronautique a été très frappée par la diminution des déplacements et la fragilisation des compagnies aériennes. Les perspectives s'améliorent et certains indicateurs conduisent à un optimisme raisonnable. L'industrie automobile fait face à des pénuries de composants et à la transition écologique. Malgré cela, la situation de l'industrie s'avère relativement satisfaisante, sans pour autant masquer les fragilités et les tensions constatées sur les matières premières, sur les recrutements ou sur les pénuries de composants. Ces phases de forte reprise et les chocs que nous avons connus ces dernières années démontrent la fragilité de l'industrie. Le soutien et l'accompagnement d'une véritable réindustrialisation, la définition des secteurs clés des chaînes d'approche stratégique, s'avèrent essentiels pour réduire la dépendance.
Les principaux facteurs de la désindustrialisation remontent la fin du siècle dernier, au tournant des années 2000, quand certains évènements ont modifié le cadre dans lequel fonctionnait l'industrie française, avec ses forces et ses faiblesses. La Chine est entrée dans l'Organisation mondiale du commerce (OMC) quasiment concomitamment à la mise en place de l'euro et à l'élargissement de l'Union européenne aux pays de l'Est. Le monde industriel était jusqu'alors composé de moins d'une dizaine de grands pays qui présentaient des niveaux de vie assez proches et qui régulaient leur compétitivité relative par des variations de change. On a régulièrement évoqué une dévaluation de la lire ou du franc qui permettait, à travers un indicateur de commerce extérieur, de stabiliser les situations des pays, chacun ayant ses domaines de force. Au cours de cette période, le commerce extérieur de la France était raisonnablement équilibré.
Dans les années 2000, nous sommes entrés dans un monde qui a gelé l'outil de change en Europe et élargi considérablement le champ de la concurrence avec des pays qui n'avaient absolument pas le même environnement, le même niveau de vie, les mêmes coûts salariaux et dont certains, la Chine notamment, affichaient une véritable volonté de reprendre leur place dans le concert des nations, en s'appuyant sur le soutien de l'État et sur les outils dont un grand pays comme la Chine peut disposer pour retrouver une place dominante. Le monde a donc évolué et des outils qui permettaient à l'industrie de rétablir régulièrement sa compétitivité par le change ont été gelés sans être remplacés, notamment en France. Nous avons poursuivi des politiques dans lesquelles la compétitivité ne constituait pas une préoccupation et dans lesquelles le niveau de taxation du travail ou des entreprises posait peu de difficultés instantanées. L'industrie évolue sur le temps long et les conséquences des décisions négatives ont conduit à un très lent et très régulier déclin industriel. La part de l'industrie dans l'économie française a finalement été réduite de moitié en deux ou trois décennies.
Après analyse, nous constatons que si le reste du monde a exercé une pression identique sur la France, l'Allemagne, les États-Unis et l'Italie, il s'avère que la situation de la France est finalement plus dégradée que celle de ses grands voisins européens. Le lien avec le gel des parités monétaires semble incontestable. Il a fallu attendre le rapport Pacte pour la compétitivité de l'industrie française remis par Louis Gallois le 5 novembre 2012, le crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE) et l'ensemble des mesures prises depuis, y compris par les gouvernements successifs d'Emmanuel Macron, pour voir apparaître des mesures remettant le sujet de la compétitivité au cœur des préoccupations du gouvernement et redonnant progressivement des marges de manœuvre et des outils nécessaires à la réindustrialisation de la France.
Nous avions d'ailleurs observé avant la crise sanitaire, pour la première fois depuis de nombreuses années, les premiers signes positifs : solde net d'implantations industrielles, évolution légèrement positive de l'emploi industriel dans cette période, etc. Ces premières manifestations, bien entendu tout à fait insuffisantes à l'aune d'un grand chantier de réindustrialisation, montrent que lorsque les stimuli sont positifs, la réponse l'est également. Il convient d'inscrire dans le temps ces actions de soutien, de compétitivité, d'accompagnement et de mettre en place des indicateurs de suivi de sorte à suspendre les aides dès lors que nous aurons retrouvé la parité avec nos voisins européens. Nous avons pris du retard et il nous appartient de nous donner les moyens de le rattraper et pour ce faire, il importe que nous soyons meilleurs que les autres.
L'énergie représente un sujet majeur de la compétitivité et je déplore notre incapacité à préserver un atout. En effet, je pense que notre capacité à défendre une énergie bon marché, à nous appuyer sur nos forces, constitue un des leviers qui nous permettraient à l'avenir de participer à la réindustrialisation parmi d'autres domaines de force tels que le TGV. Le nucléaire et le TGV constituent deux formidables atouts dans une économie décarbonée. La France est le pays industriel d'Europe, voire du monde, le plus décarboné.
Des actions positives ont été lancées : la priorité industrielle du plan France Relance, le plan d'investissements France 2030, la diminution des impôts de production, etc. En outre, elles interviennent alors que de nombreux enjeux liés aux différentes transitions apparaissent (écologie, numérique, 4.0, etc.) et constituent de formidables occasions de rebattre les cartes. La qualité de nos ingénieurs et le savoir-faire français dans ces domaines représentent des atouts. Reste à savoir comment, au-delà des échéances électorales et des alternances politiques, s'inscriront dans le temps le soutien à l'industrie et le projet de réindustrialisation.
La définition d'indicateurs pertinents et l'inscription d'une action dans le temps constituent des éléments clés autour de trois enjeux majeurs.
Premier enjeu : le sujet de notre compétitivité n'est pas encore épuisé.
Le second enjeu réside dans les compétences dont la France a besoin pour construire son avenir dans l'innovation et dans la montée en gamme. Il conviendra d'accompagner nos collaborateurs non seulement dans leur formation initiale, mais également par le biais de la formation continue. Il est donc impératif d'initier une réflexion autour du compte personnel de formation (CPF) et de son utilisation de sorte que l'effort collectif attribué à un droit individuel – qu'il n'est pas question de remettre en cause - soit bien aligné avec les réels besoins du monde économique, en particulier celui qui est exposé à la concurrence internationale.
Nous sommes engagés dans une compétition très forte non seulement avec nos voisins européens, mais également avec l'Amérique du Nord et la Chine. Dès lors, la bonne intelligence de travail avec l'État, le bon niveau de soutien et son ciblage vers des objectifs clairs constituent des éléments clés de succès, indispensables notamment pour accompagner la transition écologique. Les décisions prises dans le plan de relance et dans le plan d'investissements France 2030 s'inscrivent dans la durée.
Troisième enjeu : nous savons décarboner l'industrie française. La plupart des technologies sont connues, mais elles sont beaucoup plus onéreuses que les technologies carbonées. Si nous souhaitons pérenniser notre présence sur un marché, il importe soit de renchérir le coût du carboné dans une zone du monde ou dans le monde entier, via des dispositifs tels que la taxe carbone ou le mécanisme d'ajustement carbone aux frontières (MACF), soit de soutenir les industriels qui fabriquent des produits décarbonés de sorte à diminuer le coût du décarboné jusqu'à ce que les volumes et les technologies permettent à l'ensemble de converger.
Ces dernières années, en France, nous avons réduit les émissions de carbone, mais augmenté notre empreinte carbone. En effet, fabriquer des produits qui consomment beaucoup d'électricité en Chine, en Inde ou en Pologne, pays dont les électricités sont très carbonées, n'est pas bénéfique à la planète. Si nous fabriquons les mêmes produits en France avec de l'électricité nucléaire décarbonée, les effets environnementaux sont plus positifs.
Il nous appartient donc de définir l'échéance à laquelle un soutien à l'industrie sera nécessaire et possible de sorte que les technologies et le marché nous permettent de répondre aux besoins. Il est indispensable que les impulsions positives données depuis 2015 s'inscrivent dans la durée afin de nous permettre, à l'horizon d'une quinzaine d'années, de retrouver une industrie française proche de la moyenne européenne (environ 17 % du PIB).
Je rejoins votre constat relatif à la compétitivité. Il est en effet utile de rappeler les initiatives lancées depuis 2017 qui contribuent à la compétitivité. Elles ne sont pas encore suffisantes, mais n'oublions pas d'où nous partions et les actions mises en œuvre ont relevé d'un véritable combat.
Nous avons été récemment informés de l'arrêt de production de certaines entreprises électro-intensives, notamment dans le zinc, dans les aciéries électriques ou dans l'ammoniac, produit utile pour certaines productions importantes telles que les engrais azotés. Pensez-vous que cette crise des industries électro-intensives est susceptible de perdurer ?
La ministre a annoncé un amendement au projet de loi de finances (PLF) visant à compenser une partie de l'augmentation des coûts de l'énergie, via l'attribution de cent cinquante millions d'euros aux industries électro-intensives. Que pensez-vous de ces dispositions ?
La particularité de cette crise par rapport à un choc pétrolier réside dans son effet très différencié selon les zones du monde. En effet, le pétrole et le charbon relèvent d'un prix mondial. Les prix de l'électricité et du gaz présentent des écarts très significatifs, notamment du fait des règles adoptées en Europe. Le prix du gaz est resté très raisonnable aux États-Unis alors qu'il s'est envolé sensiblement en Chine et très fortement en Europe. Les écarts de prix génèrent des difficultés puisque les Américains, notamment, sont capables de produire à un prix inchangé et que, dès lors, le prix de marché n'a pas augmenté. Certaines industries sont donc obligées d'arrêter leurs installations parce que le prix de marché est inférieur au prix de revient en raison de l'explosion des coûts de l'énergie. Dès lors, les dispositifs de soutien sont bienvenus, mais leur efficacité dépendra de la durée de la crise. Comme tous les industriels, j'espère que nous retrouverons une situation normale et, surtout, équilibrée, au printemps prochain, après la période hivernale, alors que nous aurons reconstitué les stocks. Cependant, nous n'en avons pas la certitude, notamment parce que la crise sanitaire a généré une accélération des sujets transitionnels, numérique et écologique, qui met en œuvre des modifications structurelles. Quoi qu'il en soit, force est de constater que les choix opérés par les Américains leur permettent de disposer d'énergies fossiles à bas coûts alors que l'Europe, plus dépendante, a pris de plein fouet les évolutions des coûts de certaines matières premières.
Nous nous réjouissons donc de l'amendement déposé par le Gouvernement. Nous en mesurerons la portée complète lorsqu'il sera voté, mais il constitue clairement un geste opportun que nous soutenons.
Il est complexe de quantifier l'écart entre la composante structurelle et la composante conjoncturelle. Toutefois, nous avons la certitude qu'il existe une composante structurelle dans l'augmentation du coût de l'énergie en Europe. En effet, entre un quart et un tiers de l'augmentation actuelle provient de la compensation du coût du quota carbone qui a triplé (soixante euros la tonne versus vingt euros dans le passé). Au regard de l'évolution de la contrainte carbone que l'Europe s'est imposée, ce coût ne diminuera pas. Cette composante, minoritaire actuellement, est quasiment structurelle et donc un choc des prix structurel s'installe sur l'énergie. Au-delà, le choc de marché est essentiellement lié au gaz.
La mesure proposée par le gouvernement est analogue à celle qu'il a initiée au profit des ménages. Cette mesure pour les entreprises repose sur trois leviers : prix régulé de la charge de l'électricité, contrats à long terme réservés à vingt-cinq entreprises électro-intensives et fiscalité énergétique qui représente évidemment un levier important, mais qui ne sera jamais à la hauteur, puisque le marché est plus rapide que la fiscalité. Néanmoins, toute mesure visant à alléger la fiscalité est bienvenue.
Des sous-traitants et des fournisseurs de l'industrie automobile nous ont fait part de la situation extrêmement difficile qu'ils vivent actuellement en raison de la baisse des volumes, des stocks qu'ils doivent supporter, du refus d'augmentation des coûts matière et des révisions de prix qui les place dans une situation extrêmement fragile. Disposez-vous également de ces informations ? Que pouvez-vous nous dire sur la question de la sous-traitance ?
Nous partageons ce diagnostic, mais je ne voudrais pas empiéter sur les responsabilités de la Plateforme automobile (PFA), cette magnifique filière qui disposera de plus amples informations. Toutefois, il convient de rester lucide sur la situation actuelle, conséquence normale du choix d'une transition écologique dans ce secteur qui est extraordinairement rapide. La disparition du moteur thermique en Europe en 2035 représente une échéance extraordinairement proche parce que le temps de l'industrie est très différent du temps politique et de celui du ressenti de l'opinion publique. Dès lors, il convient d'inciter les industriels à évoluer vers cette transition numérique et écologique, et ils sont pleinement mobilisés pour apporter leur écot et leur contribution à ces enjeux majeurs. Le conservatisme qu'on leur a reproché dans le passé n'est plus d'actualité.
Cette transition rapide aura des conséquences d'autant plus lourdes sur le secteur automobile et le tissu industriel français, notamment la sous-traitance automobile, que le moteur thermique représentait un domaine d'excellence de la France, ce qui n'est pas encore le cas de la batterie.
Par ailleurs, l'industrie automobile, comme tous les autres secteurs, souffre des pénuries et il semble que cette période complexe de pénuries majeures, notamment sur les composants électroniques, doive durer entre douze et dix-huit mois. Les assembleurs passent des commandes et ils s'aperçoivent que certains fournisseurs ne peuvent les livrer que partiellement. Parfois, ils régulent leur stock, mais ils finissent par atteindre leurs limites. Entre les fournisseurs qui ont pu livrer le nominal et ceux qui n'y sont pas parvenus, on atteint un point bas qui limite la capacité de tous. L'ensemble de la chaîne devra donc s'adapter à un niveau plus bas pour un temps indéterminé. Ce phénomène se cumule à la question structurelle que j'évoquais précédemment.
Par ailleurs, la fabrication d'une voiture électrique est sensiblement plus onéreuse que celle d'une voiture à moteur thermique. Je n'ai pas l'impression que les utilisateurs, en France ou ailleurs, soient naturellement prêts à payer la fonction mobilité 50 % plus cher au seul prétexte qu'elle sera électrique. L'ensemble de la chaîne subit donc une extraordinaire pression afin de faire en sorte que le coût d'un véhicule électrique approche celui d'un véhicule à moteur thermique.
Dès lors, le cumul de la transformation qui fragilise en particulier le tissu français, de l'agitation conjoncturelle liée à la diminution forcée de la production et de l'environnement qui impose une transition rapide à laquelle l'industriel assembleur doit apporter sa contribution explique que le phénomène soit particulièrement exacerbé dans l'industrie automobile.
Je comprends parfaitement le mécanisme et j'adhère à votre analyse. Cependant, si à court terme, un sous-traitant sur deux s'effondre et si nous perdons notre savoir-faire français, nous nous retrouverons sous la dépendance de fournisseurs étrangers et nous perdrons notre souveraineté. En outre, les sous-traitants qui survivront, parce qu'ils seront peu nombreux sur le marché, augmenteront leurs prix. La pression exercée par le consommateur est compréhensible, mais elle présente des risques.
Le consommateur exerce une pression parce qu'il sait que dans un futur proche, il n'aura plus le droit de rouler avec un moteur thermique. La décision politique, au sens collectif et réglementaire, enclenche ce phénomène. Il convient de ne pas occulter qu'elle constitue le point d'entrée. Face à une injonction de cette ampleur, chaque acteur se trouve confronté à la nécessité de s'organiser et d'assurer sa propre pérennité. Si la certitude est acquise que l'injonction n'est pas amendable et qu'elle sera pérenne, elle devient une contrainte. Le constructeur ou l'entreprise s'interroge alors sur sa capacité à y faire face et sur les moyens dont il dispose pour accompagner ou préserver tout ou partie de ses sous-traitants, partenaires et fournisseurs dans cette transformation.
Cela renvoie vers des problématiques de filières dont le bon fonctionnement et la préservation du tissu dépendent de la puissance et de la rentabilité des têtes de filières. Si elles s'interrogent quant à leur propre survie, leur capacité à animer et à faire fonctionner une filière sur un territoire comme la France, alors que le marché est au moins européen, est forcément amoindrie.
Quel regard portez-vous sur les annonces du Président de la République relatives au plan d'investissements France 2030 ?
Nous portons un regard positif sur le plan France 2030, pour deux raisons. Ce plan apporte sur l'ensemble des sujets, notamment la transition écologique, une première réponse au besoin de soutien au-delà de fin 2022. En effet, si l'État n'est pas doté d'un outil d'accompagnement de l'ensemble des entreprises engagées et qui font face à des problématiques de compétitivité, la dynamique s'arrêtera très rapidement. Dès lors, nous n'émettrons plus de carbone soit parce que nous arrêterons de décarboner, soit parce que nous ne produirons plus. Aucune de ces deux hypothèses n'est satisfaisante.
Par ailleurs les grandes priorités du plan France 2030 sont très en phase avec ce que nous avions souhaité dans le cadre du plan France relance et dans le cadre de l'ensemble des initiatives visant à relancer l'industrie. Le plan France 2030 a été également inspiré par le rapport du collège d'experts présidé par Benoît Potier Faire de la France une économie de rupture technologique et les priorités d'innovation qu'il proposait. Le rapport Gallois et le rapport Potier constituent des travaux formidables qui posent bien les termes du débat. Ces rapports ont rassemblé une intelligence collective et une réflexion dont la France est capable et qui est inspirante.
La gouvernance et l'exécution demeurent des enjeux importants. De nombreux sujets concernent l'innovation de rupture qui, par définition, comporte des risques. Certains projets ne se passeront pas comme prévu. Dès lors, la capacité à écouter le terrain, à financer davantage lorsque cela s'avère nécessaire, soit parce que l'effort a été sous-estimé, soit parce que nos grands voisins y consacrent un budget très supérieur, sera essentielle. Si nous voulons être compétitifs, il sera indispensable de dégager des budgets ou encore de ne pas s'acharner dans des voies sans issue. Il sera donc nécessaire d'articuler efficacement les actions du secrétariat général pour l'investissement (SGPI), du programme d'investissements d'avenir (PIA), et de l'ensemble des dispositifs que nous avons progressivement sédimentés de sorte que les entreprises qui portent un projet ne se perdent pas dans le labyrinthe des guichets, des autorisations et des demandes. Force est de constater en effet que la France a développé un certain talent pour la complexité administrative.
Vous avez évoqué le côté conservateur de certains industriels et ce fut votre unique référence à l'entreprise en tant qu'acteur. Ne pensez-vous pas que la structure capitalistique de l'entreprise, son mode de gouvernance, son propre écosystème financier et, éventuellement, la formation de son personnel, aient influé sur la désindustrialisation ?
Je pense avoir eu la prudence d'évoquer le conservatisme de l'industriel au passé. Il me semble avoir dit clairement que si nous avions pu l'être sur certains points, notamment face aux enjeux, nous en sommes désormais conscients et nous voulons apporter notre contribution.
Il convient de remettre ce mot « conservateur » en perspective et ne jamais oublier que la première préoccupation d'un chef d'entreprise, et sa première responsabilité envers ses actionnaires, ses fournisseurs et ses collaborateurs, réside dans la pérennité de son entreprise. Une entreprise est d'autant plus encline à prendre du risque, qu'elle est capable d'en assumer les conséquences sans que sa pérennité soit mise en cause.
S'agissant de la structure capitalistique que vous évoquez, le sujet n'est en effet pas anodin. L'industrie fonctionne sur le temps long. Notre capitalisme familial a été fragilisé par une rentabilité insuffisante et une taxation du capital sensiblement supérieure à celle des autres pays. Pendant de nombreuses années, seule la fiscalité de la dette était plus avantageuse que nos grands voisins. Ce constat a généré une propension à disposer de fonds financés par la dette, tels que les rachats à effet de levier ou Leverage Buy Out (LBO), qui étaient devenus en France, l'un des grands acteurs de la gestion de la transmission et du développement. Cependant, ce financement par la dette est réalisé à un horizon de temps qui se raccourcit parce qu'il est plus court que celui d'un fonds de pension, notamment. Dès lors, les règles fiscales et les choix collectifs conduisaient à une gestion du capital sur des horizons de cinq à dix ans alors que, dans l'industrie, un horizon de vingt à cinquante ans est probablement beaucoup plus pertinent.
Une entreprise industrielle est une matière vivante, mais très plastique, qui s'adaptera aux contraintes pour assurer sa survie. Si les contraintes s'avèrent trop fortes en France, l'entreprise ira produire à l'étranger. Elle se localisera également dans des pays qui lui proposeront des conditions favorables de financement. Les effets ont probablement fragilisé notre industrie et favorisé son déclin pendant une trentaine d'années.
Devons-nous considérer que, finalement et paradoxalement, le rachat à effet de levier (LBO) a été destructeur de valeur ?
Non, si le LBO n'avait pas existé, la situation aurait été pire encore. Il a pris la place qui fut la sienne parce qu'il était compatible avec l'ensemble des règles imposées à notre environnement. Néanmoins, plus l'industriel est financé à travers le capitalisme familial ou un actionnariat de très long terme, plus il a de chances de réussir.
Préserver et construire l'avenir imposent de prendre des décisions et d'investir. Au-delà du positionnement sur de moyennes gammes et des contraintes de la pression sur les marges, comment expliquez-vous la faiblesse de l'investissement dans la recherche et le développement (R&D) de nos entreprises françaises par rapport aux concurrents européens ?
L'entreprise prend les risques dont elle estime qu'ils ne sont pas susceptibles d'affecter sa pérennité. S'agissant de l'innovation et de la montée en gamme, la première explication réside dans l'insuffisance des marges qui se traduit par une moindre accumulation de fonds propres et donc une moindre capacité à prendre des risques. Le crédit d'impôt recherche (CIR) a permis d'enrayer une certaine dégradation. Cependant, l'écart de prélèvements entre les entreprises françaises et allemandes s'élève à six points de produit intérieur brut (PIB), ce qui représente plus d'une centaine de milliards d'euros et environ sept milliards d'euros pour le CIR.
Dans certains secteurs, des efforts ont été portés pour limiter les conséquences d'une taxation supérieure de nos entreprises par rapport à celle de nos grands voisins européens.
S'agissant de la montée en gamme, les schémas japonais et coréen montrent que c'est l'accumulation du capital qui permet d'investir dans l'image de marque, le marketing et qui positionne une entreprise dans le haut de gamme. Cela ne se décrète pas. Le niveau de gamme est le résultat du travail, notamment la maîtrise de la qualité de produits. Un produit de meilleure qualité se vend plus cher. Cela nécessite des marges solides qui assurent la profitabilité de l'entreprise et lui permettent d'investir dans l'innovation, l'image de marque et le marketing. Aujourd'hui, le Made in Germany est reconnu dans le monde entier, grâce à un travail permis davantage par la profitabilité des entreprises que par des choix stratégiques.
Ne pensez-vous pas qu'il existe différents modèles de capitalisme ? Le capitalisme familial des entreprises de taille intermédiaire (ETI) allemandes est patient.
Je pense que le capitalisme familial d'une ETI française est aussi patient que celui d'une ETI allemande. Cependant, les ETI françaises sont plus fragiles. Leur capacité à croître constitue le meilleur garant de la pérennité de notre tissu industriel.
Je rappelle d'ailleurs qu'à l'aube des années 80, la France comptait autant d'ETI que l'Allemagne. Après trente ans de désindustrialisation et d'une politique défavorable à l'industrie, les ETI françaises sont trois fois moins nombreuses que les ETI allemandes. Les ETI qui nous manquent aujourd'hui sont des PME qui n'ont pas su grandir. Les sujets de la taille, des seuils sociaux, de la rentabilité, de la capacité à lever du capital, de la fiscalité, ont constitué des éléments essentiels de notre situation actuelle.
De nombreuses actions ont été engagées en vue de notre redressement et il nous appartient d'investir dans nos compétences et notre capital humain. La réforme de 2018 n'a pas épuisé le sujet, malgré l'effort porté sur l'apprentissage, dynamique qu'il convient de poursuivre. Il demeure néanmoins essentiel de renforcer les compétences dont nous avons besoin afin d'affronter les défis futurs. Je regretterais vivement que l'engagement conjoint des industriels et des gouvernements achoppe sur une problématique de ressources humaines parce que nous ne serions pas parvenus à nous doter des compétences et des hommes capables de mettre en œuvre les formidables opportunités que nous créons actuellement. Ce serait désespérant.
Vous représentez dix-neuf filières. Cette diversité de filières présente-t-elle des points particuliers d'inquiétude ou de satisfaction ?
Je ne représente pas les filières. Je les anime, je les coordonne et je les fais vivre, mais je respecte les présidents de filière, car ce sont eux qui portent chacune des filières, ses contrats stratégiques et les entreprises qui la composent.
Pour autant, nous observons en effet des situations très différentes, liées à l'histoire des filières, à la nature de leurs grands acteurs, aux enjeux auxquels elles sont confrontées, à leur positionnement dans l'économie, etc.
La construction d'un nouveau système énergétique a conduit à réunir autour d'une même table des entreprises telles que Schneider, Total, Engie et EDF, dont la capacité à travailler ensemble est encore à construire en raison de leurs histoires respectives. A contrario, la filière aéronautique présente une culture centrée sur la collaboration et un faible niveau de concurrence frontale entre les grands acteurs. Les différences entre ces deux filières sont évidentes.
Nous avons récemment créé une nouvelle filière sur les solutions industrielles du futur afin de redonner toute leur place aux solutions industrielles françaises et les articuler avec le plan France Relance et le plan d'investissements France 2030. Les situations progressent avec des enjeux et des niveaux de maturité et de collaboration très différents.
La filière Santé présente d'extraordinaires enjeux. Pendant trop longtemps, la France a déployé une approche comptable dans ce secteur, autour de la maîtrise des dépenses de santé, objectif au demeurant légitime. Souhaitons-nous que notre industrie de santé soit forte ? Souhaitons-nous lui attribuer les moyens de se développer dans les enjeux futurs (bioproduction, anticorps monoclonaux, etc.) ? Nous assistons à une transformation profonde d'une santé autour de la chimie vers une santé autour de la biologie. Ces mutations nécessiteront des investissements considérables, des choix à opérer en Europe et de la mutualisation. Si la France ne prend pas sa place dans les grands outils de la santé de demain, il ne faudra pas s'étonner que sa situation se dégrade dans ce secteur.
Nous faisons également face à des enjeux autour de l'électronique. Autour de STMicroelectronics et de ce que nous avons mis en œuvre à Grenoble, nous devrons traiter des sujets très lourds. Nos amis allemands ont déployé une stratégie très claire autour de leur centre à Dresde afin d'en faire un domaine d'excellence. Il importe que nous soyons capables de nous défendre et de faire valoir nos points d'excellence. Nous disposons d'une très belle entreprise franco-italienne dans ce domaine sur laquelle nous pouvons nous appuyer.
Il convient de s'interroger quant à l'avenir des grands champions d'hier (automobile, aéronautique, luxe, cosmétiques, etc.). Seront-ils encore les moteurs de l'économie française et de l'exportation à l'avenir ? Nous avons moins de doute quant à l'industrie de la santé, qui semble sur la bonne voie, de l'agroalimentaire, qui a néanmoins beaucoup régressé, de la chimie, qui se stabilise et du tourisme. Les nouvelles filières créées ces dernières années prendront-elles le relais de ces filières-là suffisamment rapidement pour transformer notre économie, marquer de nouveaux points et créer de nouvelles filières leaders ? Nous avons évoqué le nouveau système énergétique autour notamment de l'hydrogène. Le nucléaire, les infrastructures numériques, les technologies intelligentes, la robotique, l'électronique de puissance, le maritime, etc., deviendront-ils de nouvelles filières ? Il conviendra donc de trouver un équilibre entre les champions du passé et les nouveaux champions que nous ferons émerger grâce au plan d'investissements France 2030 notamment. Ces forces s'additionneront-elles ?
Vous avez évoqué la nécessité de soutenir et d'accompagner l'écosystème industriel français dans son développement en assurant la pérennité des entreprises. Ce soutien et cet accompagnement doivent-ils être conditionnés ?
Le plan France 2030 repose dans de nombreux domaines sur des appels à projets. Le projet constitue donc la condition. La France n'est pas en retard dans la transposition des directives européennes et dans la production de normes. Son niveau d'exigence est équivalent, voire supérieur, à celui qu'appliquent certains de ses voisins. Dès lors, la conditionnalité ne s'impose pas. Il importe surtout d'élaborer un projet commun de réindustrialisation de la France et si les industriels réussissent dans un engagement commun, la France réussit. La contrepartie au soutien et à l'accompagnement réside naturellement dans la réalisation du projet, la production, la création d'emplois et dans la revitalisation de l'écosystème alentour.
Les trois quarts des emplois industriels en France sont situés en dehors des métropoles. L'industrie constitue donc la meilleure réponse à la fracture territoriale et au sentiment d'abandon manifesté par certains territoires.
Il ne serait pas souhaitable de rajouter des conditions dans un secteur qui n'en manque pas. En revanche, il conviendra de veiller à ce que cet effort se traduise par des implantations dans notre pays, de la réindustrialisation dans des territoires qui en ont besoin ou qui ont des compétences et des capacités d'accueil.
Les Allemands sont Européens, mais ils sont d'abord Allemands et ils ont raison. La défense de l'industrie allemande, de l'ancrage des centres de décision, des centres de R&D et des capacités de production dans leur pays s'avère absolument fondamentale. Il nous appartient d'évoluer dans cette direction. Notre objectif commun doit consister à inciter les industriels à fabriquer en France.
La diminution des impôts de production et autres mesures transverses ne peuvent pas être assujetties à contrepartie puisqu'elles consistent à rapprocher la fiscalité française de celle de ses voisins.
Il arrive que la puissance publique aide fortement la R&D d'une entreprise qui, finalement, ira produire à l'étranger. Dès lors, on peut s'étonner de l'absence totale de conditionnalité, voire en être choqué.
Il convient de fixer un objectif temporel et de choisir des secteurs dans lesquels on peut aller jusqu'à l'industrialisation en France. Il nous appartient de faire réussir l'industrie française avec des centres de production en France.
Les grands groupes industriels français appuient leurs forces sur une présence internationale. Il convient que nous nous assurions qu'ils produisent autant que possible en France. Lorsque la localisation d'un projet en Europe a du sens, il nous appartient de créer collectivement les conditions pour que l'industriel s'établisse en France. En effet, l'essentiel de la désindustrialisation française réside dans de nouveaux projets que nous n'avons pas su réaliser en France parce que l'environnement économique, social et réglementaire français ne permettait pas aux industriels d'être durablement compétitifs sur leur activité en étant localisés sur notre territoire. De nombreux industriels en ont exprimé des regrets parce qu'ils sont attachés à leur pays. Force a été de constater que s'ils voulaient réussir dans un monde très concurrentiel, l'implantation en France n'était pas pertinente. Il nous appartient de faire évoluer cette situation et de lever les obstacles.
Des actions ont été menées depuis 2015 : le crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE), le pacte de responsabilité, la transformation en baisse de charges, le plan de relance, la diminution des impôts de production, la réforme de la fiscalité du capital. Elles produisent des résultats, mais il importe de poursuivre ce travail, projet par projet, sujet par sujet, de sorte à identifier, améliorer et pérenniser les conditions d'implantation en France. La France dispose d'infrastructures, d'énergies décarbonées, de compétences, de belles écoles d'ingénieurs, de formidables bureaux d'études, etc. La France sait également faire preuve de souplesse et d'imagination. Il convient de capitaliser l'ensemble de ces atouts.
Les industriels français ne sont pas plus exigeants que les autres et ils souhaitent surtout une harmonisation européenne des dispositions réglementaires et fiscales.
Je suppose que l'industriel français souhaite également disposer d'une chaîne d'approvisionnement stabilisée. Selon vous, la sécurité des approvisionnements constitue-t-elle un enjeu et un critère de politique économique, voire de politique fiscale ? Une cartographie des secteurs et des produits vitaux présenterait-elle un intérêt ? Qui devrait l'établir ? Comment définir un secteur stratégique ?
Cette question est complexe. Je rappelle la définition que Louis Gallois a donnée de la souveraineté. La souveraineté n'est pas l'autarcie qui consiste à tout faire tout seul. La souveraineté consiste à faire suffisamment de choses suffisamment bien pour que personne n'ait envie de vous couper les vivres ou d'interrompre une chaîne d'approvisionnement ; c'est l'interdépendance. Notre niveau d'excellence doit nous permettre d'être dépendant de ceux qui sont également dépendants de nous.
Il convient également de ne pas s'arrêter au premier niveau de la dépendance. À titre d'exemple, il n'est pas souhaitable de fabriquer des voitures électriques dont l'intégralité des batteries provient de Chine, mais encore faut-il savoir les fabriquer en Europe à un coût compétitif et encore faut-il que la dépendance ne soit pas seulement décalée de quelques produits. Il convient donc de procéder à des analyses stratégiques, secteur par secteur.
Au-delà, il importe que nous soyons prêts à exercer notre souveraineté et à mettre en œuvre le pouvoir qui permet, lorsque notre indépendance et notre souveraineté sont menacées, d'actionner les leviers qui sont les nôtres.
Cette question est donc complexe parce que, si elle est centrale, il n'existe pas de réponse unique. La période actuelle nous a rappelé que l'univers industriel reste compétitif, concurrentiel et que les intérêts nationaux priment. C'est légitime.
Qui doit être garant des objectifs stratégiques industriels nationaux ? Comment créer un consensus autour de ces objectifs ?
Il est essentiel que nous travaillions ensemble, car il n'existe pas de responsabilité exclusive. Le dialogue permanent et en confiance entre les acteurs économiques et leur État nous conduira à identifier des réponses à nos difficultés. Certains sujets plus géopolitiques nécessiteront une collaboration européenne afin de protéger l'Europe contre des visées de domination, de prise de contrôle de marchés.
La crise a contribué à la réhabilitation de la question industrielle dans le monde économique. Comment rendre les métiers industriels suffisamment attractifs ? Comment éviter la pénurie de savoir-faire, de compétences ?
Les industriels ont un rôle central à jouer, mais ils ne pourront pas agir seuls. La matière scientifique fait la spécificité du domaine industriel. Elle nourrira ses bureaux d'études et innovera. Il convient de faire en sorte que les jeunes s'y intéressent le plus tôt possible et cela relève de l'enseignement.
Nos fédérations professionnelles sont mobilisées, tout comme l'Union des industries et métiers de la métallurgie (UIMM), qui est très présente sur les territoires et qui représente un interlocuteur naturel des recteurs, notamment.
En travaillant ensemble, nous parviendrons à élaborer des contenus autour de la formation des enseignants, autour du matériel pédagogique, autour des classes en entreprise, autour de l'ouverture de l'industrie qui demeure un secteur trop fermé. Il importe de créer des occasions d'éveiller la curiosité, l'intérêt et le rêve pour le monde industriel, mais notre mobilisation nécessite le concours de l'Éducation nationale, du ministère du Travail, du ministère de l'Enseignement supérieur, etc.
Un projet de loi relative à la féminisation du secteur industriel est en discussion et le monde de l'industrie y souscrit pleinement. Nous souhaitons qu'un plus grand nombre de femmes rejoigne l'industrie et y prenne des responsabilités. Il convient donc d'identifier des solutions pour les attirer.
Selon vous, les engagements réciproques relatifs aux contrats stratégiques de filière ont-ils été tenus ?
Un engagement réciproque impose la clarté de l'objectif. La réindustrialisation de la France représente un projet collectif. Le contrat stratégique de filière constitue un outil pour atteindre cet objectif dans une filière donnée. Dès lors, les engagements réciproques résident dans la façon de construire les contributions de chacun et le chemin à parcourir afin de progresser ensemble dans la bonne direction.
Nous vous transmettrons des éléments complémentaires par écrit.
Les contrats stratégiques de filière existent depuis 2018. Ils sont donc récents. Ils représentent dix-neuf contrats stratégiques, près de deux cents projets contractualisés et plusieurs centaines d'actions ou d'engagements volontaires réciproques. Des bilans sont établis régulièrement. La dynamique de ces contrats montre la mobilisation des industriels. Cet outil est déjà une réussite. Les dernières analyses réalisées sont plutôt favorables, mais elles montrent une certaine hétérogénéité selon les filières.
Nous constatons également une hétérogénéité dans les actions. Certaines actions sont de très grande portée (décarbonation, etc.), d'autres sont plus micro-économiques ou modestes.
Je vous remercie. Je vous propose donc de compléter nos échanges par la transmission des documents annoncés à notre secrétariat.
L'audition s'achève à onze heures.
Membres présents ou excusés
Commission d'enquête chargée d'identifier les facteurs qui ont conduit à la chute de la part de l'industrie dans le PIB de la France et de définir les moyens à mettre en œuvre pour relocaliser l'industrie et notamment celle du médicament
Réunion du jeudi 4 novembre 2021 à 9 h 30
Présents. - M. Frédéric Barbier, M. Guillaume Kasbarian, M. Gérard Leseul
Excusés. - M. Bertrand Bouyx, M. Éric Girardin, Mme Véronique Louwagie, M. Jacques Marilossian