La réunion débute à 9 heures 30.
Présidence de Mme Yaël Braun-Pivet, présidente.
La Commission examine le projet de loi organique, adopté par le Sénat après engagement de la procédure accélérée, modifiant la loi organique n° 2010-837 du 23 juillet 2010 relative à l'application du cinquième alinéa de l'article 13 de la Constitution (n° 4188) (Mme Laetitia Avia, rapporteure).
Je souhaite à Mme Lamia El Aaraje la bienvenue à l'Assemblée nationale, et plus particulièrement à la commission des Lois. Nous y accomplissons un travail passionnant et considérable, avec une grande qualité d'écoute et de dialogue, dans une ambiance très chaleureuse. Nous sommes ravis, chère collègue, de vous accueillir pour cette dernière année de la législature.
Nous examinons à présent le projet de loi organique, adopté par le Sénat, après engagement de la procédure accélérée, modifiant la loi organique n° 2010-837 du 23 juillet 2010 relative à l'application du cinquième alinéa de l'article 13 de la Constitution.
Le projet de loi organique a pour principal objet d'actualiser la liste des fonctions soumises à la procédure de nomination prévue par le cinquième alinéa de l'article 13 de la Constitution. Il tire les conséquences des évolutions apportées par le projet de loi ordinaire relatif à la régulation et à la protection de l'accès aux œuvres culturelles à l'ère numérique. Celui-ci vise à créer l'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (ARCOM) en fusionnant le Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) et la Haute Autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur internet (HADOPI).
Pour mémoire, l'article 13 de la Constitution soumet les nominations effectuées par le président de la République à certains emplois ou fonctions publics à l'avis des commissions parlementaires compétentes, « en raison de leur importance pour la garantie des droits et libertés ou la vie économique et sociale de la Nation ». Cette procédure, qui constitue l'une des innovations issues de la révision constitutionnelle de 2008, permet d'assurer une meilleure transparence sur les nominations effectuées par le Président de la République. Elle donne au Parlement les moyens de les contrôler et de s'y opposer, en exprimant clairement son avis.
Actuellement, cinquante-cinq fonctions figurent en annexe de la loi organique du 23 juillet 2010. Elles concernent des organismes de différentes natures : il peut s'agir d'établissements publics, d'autorités administratives ou publiques indépendantes, d'entreprises publiques ou de structures sui generis, telles que la Caisse des dépôts et consignations ou la Banque de France.
Le Parlement a eu l'occasion de se prononcer sur plus d'une centaine de nominations depuis 2010. Si aucune nomination du Président de la République n'a été refusée sur le fondement de cet article, cette procédure a pris de l'importance dans le fonctionnement institutionnel des assemblées et dans leurs relations avec le pouvoir exécutif. Elle conforte aussi la légitimité des personnes nommées : l'audition, publique, éclaire leur parcours professionnel et personnel, et garantit l'adéquation de leurs compétences à la fonction concernée.
Par ailleurs, en dehors du strict champ de l'article 13, le Parlement a déjà eu l'occasion d'émettre des avis négatifs, concernant notamment certaines nominations proposées par les présidents des chambres. Enfin, le Conseil constitutionnel exerce son rôle de contrôle.
Avec le projet de loi ordinaire relatif à la régulation et à la protection de l'accès aux œuvres culturelles à l'ère numérique, examiné par la commission des affaires culturelles, saisie au fond, le Gouvernement a engagé une réforme visant à accompagner les internautes dans leurs pratiques numériques vers des usages responsables, notamment au regard des règles de propriété intellectuelle.
Le projet de loi s'articule autour de trois axes : fusionner le CSA et la HADOPI au sein d'un organe unique, l'ARCOM, notamment pour renforcer la lutte contre la contrefaçon et le piratage sur internet ; consolider les missions du nouveau régulateur, en lui octroyant des pouvoirs de contrôle plus importants que ceux dont dispose actuellement le CSA ; créer une protection de l'accès du public aux œuvres cinématographiques et audiovisuelles françaises lors d'opérations internationales d'acquisition de catalogues.
Outre la rationalisation des autorités administratives indépendantes et les synergies de moyens administratifs et logistiques, la création de l'ARCOM tient compte de la proximité croissante entre les objectifs et les modalités de régulation des deux autorités. En outre, elle permet de veiller au développement de la production et de la création audiovisuelles. La fusion s'inscrit dans une démarche de renforcement de la régulation du numérique et des contenus, engagée par la loi relative à la lutte contre la manipulation de l'information, loi « fake news », et poursuivie par le projet de loi confortant le respect des principes de la République, qui anticipe les nouveaux cadres et champs de régulation proposés par la Commission européenne avec le Digital Services Act. L'ARCOM devrait ainsi se voir confier des pouvoirs étendus dans la régulation des contenus et des acteurs du numérique.
Il me paraît naturel que la nomination à la présidence de la nouvelle autorité soit soumise au contrôle parlementaire, comme l'était celle du président du CSA. Aussi, je vous proposerai d'adopter l'article unique sans modification. Je présenterai un amendement de coordination qui tire les conséquences de la nouvelle dénomination du régulateur de l'audiovisuel.
La rapporteure a bien résumé les enjeux du projet de loi organique, associé à un projet de loi ordinaire que la commission des affaires culturelles a examiné. Ces réformes étaient attendues par le groupe La République en marche ; il votera en faveur du projet de loi organique.
Outre les nominations au Conseil constitutionnel et au Conseil supérieur de la magistrature, la loi organique du 23 juillet 2010 contient une liste des emplois pour lesquels, en raison de leur importance pour la garantie des droits et des libertés ou pour la vie économique et sociale de la Nation, la nomination est précédée d'un avis public des commissions compétentes, donné au terme d'une audition publique. Selon la décision du Conseil constitutionnel du 14 novembre 2013, cette liste, plusieurs fois modifiée, ne peut s'étendre sans limite. Mais la nomination à la présidence du CSA étant retirée de cette liste, celle à la présidence de l'ARCOM peut y être insérée, en conformité avec la décision du Conseil.
Le projet de loi organique recueille donc l'avis favorable du groupe Mouvement démocrate et démocrates apparentés. J'appelle cependant votre vigilance sur la récente décision de la Cour de justice de l'Union européenne, dans les arrêts Quadrature du Net et Prokuratuur, sur la conservation des métadonnées. L'ARCOM intégrant la HADOPI, nous devrons tenir compte de ces positions lorsque nous examinerons dans l'hémicycle le projet de loi ordinaire.
Madame la présidente, je vous remercie de votre accueil. Élue députée à la suite de la démission de Mme George Pau-Langevin et de l'élection législative partielle qui s'est tenue à Paris, je suis ravie de siéger à la commission des Lois.
Le projet de loi ordinaire examiné lundi par la commission des affaires culturelles prévoit de fusionner le CSA et la HADOPI en une nouvelle autorité de régulation et de contrôle, l'ARCOM, ce que salue le groupe Socialistes et apparentés, notamment en son article 5 qui concerne la désignation du président de l'ARCOM. Le projet de loi organique que nous examinons le complète. Alors que l'ARCOM remplacera le CSA, il semble naturel que son président soit désigné selon les mêmes modalités, qui garantissent l'indépendance de l'autorité.
Notre groupe votera en faveur de ce projet de loi organique. Nous regrettons toutefois que, s'agissant de la désignation des membres de l'ARCOM, la majorité ait encore affaibli le Parlement : conformément aux souhaits du Gouvernement, la commission des affaires culturelles a supprimé deux nominations par les présidents de chambre, alors qu'un compromis avait été trouvé au Sénat.
Le projet de loi organique tire les conséquences du projet de fusion du CSA et de la HADOPI en une seule autorité, l'ARCOM. Celle-ci deviendra le gendarme de la régulation des médias et du numérique, doté de moyens renforcés pour lutter plus efficacement contre le piratage de biens culturels et mieux protéger les droits d'auteur sur internet.
L'alinéa 5 de l'article 13 de la Constitution renvoie au législateur organique le soin d'arrêter, parmi ceux qui ne relèvent pas de l'autorité hiérarchique directe du Gouvernement et qui ne sont par ailleurs soumis à aucune règle particulière, la liste des emplois et fonctions concernés par la procédure de contrôle parlementaire, eu égard à leur importance pour la garantie des droits et libertés ou pour la vie économique et sociale de la Nation. La nomination des membres d'autorités indépendantes dont le rôle est important pour la garantie des droits et libertés, comme le président du CSA, est ainsi soumise à l'avis des commissions permanentes compétentes.
Deux éléments motivent le groupe Agir ensemble à voter en faveur de ce texte. D'une part, le projet de loi relatif à la régulation et à la protection de l'accès aux œuvres culturelles à l'ère numérique modifie la dénomination du CSA en ARCOM, pour tenir compte de l'évolution des missions qui lui sont confiées : il convenait de mettre à jour le tableau de la loi organique du 23 juillet 2010 pour retenir la nouvelle dénomination. D'autre part, le projet de loi organique permet une meilleure lisibilité de la loi, en l'actualisant et en inscrivant les bons termes, modifiés par le projet de loi ordinaire.
Mon groupe prend acte de la fusion de deux autorités administratives indépendantes pour créer l'ARCOM et de la procédure de désignation prévue pour son président. Nous soutenons ce projet de loi organique.
Article unique (tableau annexé à la loi organique n° 2010-837 du 23 juillet 2010 relative à l'application du cinquième alinéa de l'article 13 de la Constitution) : Avis des commissions parlementaires sur la nomination à la présidence de l'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (ARCOM )
Suivant l'avis de la rapporteure, la Commission rejette l'amendement de suppression CL1 de M. Ugo Bernalicis.
Elle adopte l'article unique sans modification.
Après l'article unique
La Commission adopte l'amendement de coordination CL2 de la rapporteure.
La Commission adopte l'ensemble du projet de loi organique modifié.
La Commission examine, en troisième lecture, la proposition de loi, modifiée par le Sénat en deuxième lecture, visant à améliorer la trésorerie des associations (n° 4183) (Mme Elodie Jacquier-Laforge, rapporteure).
Cette proposition de loi, déposée le 17 octobre 2018 par Mme Sarah El Haïry, aujourd'hui secrétaire d'État, nous revient à la suite d'une très longue navette. Le texte sera examiné en séance publique le 24 juin, selon la procédure d'examen simplifiée.
Cette proposition de loi, déposée au nom du groupe Mouvement démocrate et démocrates apparentés, très attendue par les associations, vise à améliorer la trésorerie des associations. Je suis heureuse de prendre le relais de Sarah El Haïry en tant que rapporteure pour cette troisième et, je l'espère, dernière lecture.
En l'absence d'engagement de la procédure accélérée, l'examen de la proposition de loi a été long, peut-être trop, mais cela a permis d'enrichir le texte et d'aboutir à un consensus avec nos collègues du Sénat. Je les remercie pour leur travail, en particulier la rapporteure, Jacqueline Eustache-Brinio, qui a œuvré main dans la main avec Sarah El Haïry pour trouver un texte de compromis en deuxième lecture. Leurs échanges ont montré la volonté des deux chambres d'adopter un texte ambitieux au service des associations et des collectivités territoriales qui les accompagnent. On peut s'en féliciter.
Du fait des nombreuses contraintes qui ont pesé sur l'ordre du jour des assemblées en 2020, le Sénat n'a pu examiner à nouveau le texte qu'au mois de mai dernier. Une adoption conforme en deuxième lecture n'était alors plus possible, car il était devenu nécessaire de procéder à des coordinations. Il fallait notamment supprimer l'article 4, qui prévoyait la possibilité de confier à une association un bien saisi au cours d'une procédure pénale, cette disposition ayant été adoptée grâce à un autre véhicule législatif. Je vous propose aujourd'hui une adoption complètement conforme du texte afin qu'il puisse entrer en vigueur rapidement, pour le bien des associations.
En premier lieu, la proposition de loi permet de renforcer la relation de confiance que les associations entretiennent avec les collectivités territoriales et les autorités administratives qui les financent. L'article 1er les autorise ainsi à conserver une partie d'une subvention non dépensée, et l'article 1er bis fixe un délai pour le versement des subventions, ce qui sécurisera leurs finances. En contrepartie, la transparence des comptes est renforcée. L'article 5 ter B, issu des travaux du Sénat, confie aux commissaires aux comptes le soin de veiller à la publication sincère des comptes des structures recevant des dons de montants élevés.
En second lieu, la proposition de loi permet de diversifier les sources de financement des associations. L'article 2 tend à autoriser les prêts entre associations d'un même réseau, tandis que les articles 3 bis A et 3 bis B, judicieusement ajoutés par le Sénat, permettent de faire don de l'excédent d'un compte de campagne aux associations, quelle que soit leur forme.
Troisièmement, la proposition de loi vise à accompagner la montée en charge du Fonds pour le développement de la vie associative (FDVA). La version initiale du texte prévoyait de verser à ce fond le solde des comptes bancaires inactifs. Il s'est avéré que cette disposition relevait exclusivement du domaine des lois de finances, raison pour laquelle elle a été adoptée dans la loi de finances pour 2020. Le FDVA a ainsi été doté de 15 millions d'euros supplémentaires cette année – c'est un apport indirect de la proposition de loi.
Pour soutenir le FDVA, l'article 3 facilite l'identification des comptes inactifs par la Caisse des dépôts et l'article 3 bis associe les parlementaires à la gouvernance du fonds, ce qui semblait nécessaire dès lors que ce dispositif avait remplacé la réserve parlementaire. Par ailleurs, les articles 3 bis A et 3 bis B prévoient de reverser au FDVA les soldes des comptes de campagne qui n'auront pas été attribués à une fondation ou à une association dans les délais prévus.
Enfin, l'article 5 prévoit que le Gouvernement remettra un rapport sur la fiscalité des associations et des fondations ainsi que sur les dons qui leur sont faits. Nous aurons ainsi un bilan exhaustif des moyens mis à la disposition du tissu associatif.
Ce texte s'inscrit pleinement dans l'ambition du Gouvernement et de la majorité de consolider le modèle de philanthropie à la française. Les nombreux efforts déployés depuis le début de la législature ont notamment permis d'augmenter les crédits du FDVA de 20 millions d'euros et de renforcer l'accompagnement des associations au niveau local.
La crise sanitaire accroît encore la nécessité d'adopter cette proposition de loi pour venir en aide au secteur associatif, durement touché : il rassemble 21 millions d'adhérents, 12,5 millions de bénévoles et 1,8 million de salariés.
Selon une enquête menée auprès de 10 000 associations cette année, seulement 27 % des dirigeants jugent bonne ou très bonne la situation de leur association, alors que cette proportion était de 68 % avant la crise. Le confinement a entravé de nombreuses activités et 61 % des associations disent avoir perdu contact avec certains de leurs bénévoles. La situation financière s'est également dégradée : 25 % des associations ont engagé des dépenses à perte et 18 % ont vu leurs coûts augmenter. Au total, 62 % des associations déclarent des pertes de revenus significatives.
Néanmoins, d'autres chiffres ont de quoi nous rassurer : 66 % des associations estiment qu'elles sortiront de la crise à l'équilibre et 55 % ont indiqué qu'elles avaient pu compter sur le soutien, renforcé, des autorités publiques.
En effet, le Gouvernement a tout mis en œuvre pour soutenir les associations. Les salariés de ce secteur et leurs employeurs ont pu bénéficier du chômage partiel et de mesures d'aide générales ou sectorielles. Grâce au Fonds de solidarité, 141 000 aides ont été octroyées au début du mois de juin à plus de 27 000 associations, pour un montant total de 535 millions d'euros. Le plan de relance consacre un milliard aux associations, auquel s'ajoutent 100 millions pour renforcer leur trésorerie et leurs fonds propres. Enfin, le Gouvernement a annoncé la création de 2 000 postes dans le cadre du Fonds de coopération de la jeunesse et de l'éducation populaire (FONJEP), en vue de soutenir l'emploi associatif.
Nous poursuivons cet engagement en donnant de nouveaux outils aux associations pour trouver des financements. Je vous propose d'achever ce travail parlementaire en adoptant le texte en l'état. Ainsi, il entrera en vigueur rapidement et permettra de soutenir les associations en une période où la solidarité et l'engagement sont plus que jamais nécessaires à la cohésion de notre société.
La proposition de loi que nous examinons est tout à fait essentielle pour le monde associatif, dont il faut rappeler qu'il représente 10 % de la richesse nationale, 10 % des emplois et qu'il exerce des missions d'intérêt général, financées par les collectivités territoriales et l'État.
Lorsque les subventions tardent à venir, les associations rencontrent des difficultés de trésorerie, alors même qu'elles ont rempli les missions prévues dans le contrat avec les collectivités territoriales ou l'État. Il est très important de fixer un délai de versement des subventions pour assurer la pérennité des associations et pour leur donner un peu plus de sérénité. Il est rare qu'elles disparaissent, compte tenu de leur utilité, mais elles doivent souvent déployer beaucoup d'efforts pour maintenir leur trésorerie.
J'en profite pour dire que beaucoup d'associations attendent, pour s'engager sur plusieurs années, que les collectivités territoriales et l'État leur donnent davantage de visibilité. Les subventions sont certes annuelles, mais devoir déposer un dossier chaque année sans savoir si les crédits seront renouvelés est un facteur d'instabilité, une gêne pour l'activité exercée. Il est important que des contrats de trois ou quatre ans entre associations et collectivités territoriales se développent.
Les associations attendent avec impatience les avancées prévues par cette proposition de loi, très concrète. Il serait sage de l'adopter conforme, comme Mme la rapporteure l'a préconisé, par respect pour l'autre chambre – le texte vient de l'Assemblée mais il faut se mettre d'accord avec le Sénat – et pour éviter une navette encore plus longue.
Nous pouvons le constater sur le terrain, la vie associative a repris. La situation des associations diffère selon leur dimension. Les collectivités ont, la plupart du temps, maintenu leurs subventions aux petites associations et ont souvent institué des dispositifs destinés à atténuer les effets de la crise sur leur trésorerie. Il faut distinguer ces petites structures, qui ne repose exclusivement sur le bénévolat, des associations qui emploient des salariés. Celles-ci ont éprouvé des difficultés particulières, qui ont justifié l'attribution d'aides dans le cadre des projets de loi de finances rectificative successifs.
Je salue les avancées du texte, sans revenir sur la suppression de la réserve parlementaire – que, vous le savez, nous regrettons – et l'action du FDVA. J'ajoute que la séparation entre l'ordonnateur et le comptable retarde parfois le versement d'une subvention votée par la collectivité. La possibilité offerte aux associations de dépenser une subvention sur plusieurs années, si elle s'écarte du principe de l'annualité budgétaire auquel sont soumises les collectivités et peut nuire à la clarté des comptes, offre une meilleure visibilité à l'association, particulièrement précieuse lorsqu'elle emploie des salariés.
Sherry Anderson, championne canadienne de curling a affirmé que « si le bénévolat n'est pas payé, ce n'est pas parce qu'il ne vaut rien, mais parce qu'il n'a pas de prix ». De fait, sans les 13 à 16 millions de bénévoles que compte notre pays, de nombreuses activités – qui pour beaucoup, constituent un soutien à la vie quotidienne – n'existeraient pas.
Il est particulièrement important de soutenir les associations dans le contexte actuel. Elles ont évidemment souffert de la pandémie d'un point de vue financier, parce que certaines recettes ne rentraient plus – la kermesse, par exemple, procure quelques milliers d'euros bienvenus pour le budget d'un club de football. Mais, au-delà de cet aspect, les associations sont des lieux essentiels de convivialité, de rencontres ; que celles-ci n'aient pu avoir lieu n'est pas sans conséquences.
Le groupe du Mouvement démocrate et démocrates apparentés se réjouit de l'examen en troisième lecture de cette proposition de loi, fruit d'un long travail, engagé à l'origine par Sarah El Haïry. Ce texte fait partie du fil rouge de notre mandat, l'action en faveur de la vie associative – Sylvain Waserman et Michel Fanget ont rédigé une proposition de loi en faveur de l'engagement associatif, adoptée à l'unanimité par la commission des affaires culturelles et de l'éducation.
Le Sénat, qui entendait améliorer l'équilibre entre acteurs du monde associatif et collectivités territoriales, a enrichi le texte. Certaines dispositions du texte ont été supprimées car elles ont été adoptées dans d'autres textes – je pense en particulier à l'article 4, qui visait à confier à des associations d'intérêt général la gestion d'immeubles saisis lors de procédures pénales, des biens mal acquis. Il faut rendre hommage ici au travail de Sarah El Haïry. Par ailleurs, à l'article 5, la période de référence de l'état des lieux qui a été demandé sur la fiscalité liée aux dons a été ajustée.
Nous espérons que les dispositifs que nous avons affinés au fil de la navette permettront de redynamiser le secteur et d'éviter la disparition de nombreuses associations. Vous pouvez compter sur notre soutien ; nous poursuivrons notre action en faveur des associations car, comme l'a dit Sarah El Haïry le 24 mars, « l'engagement des bénévoles fait de notre pays ce qu'il est : un pays où chacun de nous est considéré et peut apporter sa pierre à l'équilibre de notre société ». Alors que nous allons célébrer le 120e anniversaire de la loi de 1901, je ferai miens les mots de François Bayrou : elle est un des trésors de notre démocratie et constitue aussi une des plus belles avancées démocratiques dans les nombreux pays qui s'en sont inspirés.
Plusieurs dispositions de ce texte ont fait l'objet d'une adoption conforme, parmi lesquelles on peut citer les prêts entre associations et l'identification des comptes inactifs. Il est largement temps de conclure cet examen législatif particulièrement long. C'est ce que souhaite, d'ailleurs, le Mouvement associatif.
La crise sanitaire place les associations dans de grandes difficultés financières ; elles subissent une baisse sans précédent du nombre de leurs salariés et bénévoles. Notre volonté d'amplifier l'engagement dans notre pays, de simplifier la vie des bénévoles et de faciliter l'accès aux financements ne constituera qu'un élément de réponse à la crise, qu'il conviendra de compléter.
En 2020, selon le Mouvement associatif, 30 000 associations étaient menacées de disparition et 55 000 déclaraient ne pas pouvoir maintenir les salaires ; on déplorait une baisse de 60 000 emplois. Les déclarations d'embauche ont chuté de 45 %, et les créations d'associations de 40 %. Enfin, les adhésions ont décru de 25 à 50 % dans les associations sportives, culturelles et de loisirs, alors que les 16 millions de bénévoles et de salariés sont une richesse exceptionnelle pour notre démocratie. C'est l'hécatombe, douloureux reflet des difficultés qui, je le crains, restent à venir. Nous devons freiner l'hémorragie avant qu'elle n'entraîne de graves conséquences sociales et psychologiques, en particulier pour les publics et les territoires les plus fragiles. La situation est d'autant plus inquiétante que la vitalité d'un grand nombre de quartiers et de territoires est liée au dynamisme du secteur associatif.
Nous soutenons cette proposition de loi en la prenant pour ce qu'elle est : un tout petit pas pour prendre en compte les attentes d'un secteur en proie à des difficultés croissantes.
L'examen du texte intervient dans un contexte de crise inédit, mais aussi – ne l'oublions pas – de désengagement complet de l'État, qui met à mal le secteur associatif. La suppression de 250 000 contrats aidés en deux ans, la réduction de la dotation globale de fonctionnement et, plus largement, la baisse générale de la collecte auprès du grand public ont provoqué un processus de délitement. Les structures ont été privées de leurs capacités d'embauche et certaines personnes n'ont pu bénéficier d'une réinsertion sociale par l'emploi.
La proposition de loi ne remédiera pas à ces difficultés. Le secteur associatif, les réseaux de l'éducation populaire et les clubs sportifs, renforts du service public de l'éducation, doivent être soutenus pour irriguer l'ensemble des territoires et apporter, par leur présence, un cadre et des repères aux jeunes, notamment aux enfants et aux adolescents. J'ai à l'esprit la déclaration d'un secrétaire d'État à l'encontre des associations, lesquelles ont pourtant joué un rôle crucial, sur le plan de l'accompagnement social, lors de la crise sanitaire.
Nous espérions une grande loi pour le secteur associatif. Nous n'oublions pas, cependant, qu'il a grandement besoin de ces premières mesures. Elles doivent être adoptées sans tarder, nous ne ralentirons donc pas leur adoption.
Notre pays compte environ 1,3 million d'associations, au sein desquelles sont engagés 16 millions de bénévoles et 1,8 million de salariés. Elles constituent un tissu national et local indispensable dans les secteurs de la culture, du sport, de la santé et, évidemment, dans le secteur social. Elles sont donc l'un des moteurs du quotidien de nos concitoyens. Cependant, au cours des quinze dernières années, les sources du financement public crédité aux associations ont diminué et changé de nature.
Dans ce contexte, la proposition de loi vise à faciliter le fonctionnement et le développement des associations sur le plan financier, en reprenant certaines préconisations formulées dans le rapport remis au Premier ministre par le Mouvement associatif au mois de mai 2018. Au travers de l'amélioration de la trésorerie des associations, c'est l'augmentation du financement du monde associatif qui est recherchée.
Plusieurs éléments qui découlent de la navette parlementaire doivent être soulignés. Tout d'abord, l'article 1er, qui tendait initialement à permettre aux associations de conserver un bénéfice raisonnable résultant d'une subvention non dépensée, a fait l'objet d'une concertation entre les députés et les sénateurs. En effet, le Sénat avait relevé que la notion d'« excédent raisonnable » était trop imprécise et que la contrainte imposée aux collectivités publiques serait trop importante. À la lumière de ces remarques, nous nous sommes mis d'accord sur une définition des conditions dans lesquelles l'association « peut conserver tout ou partie d'une subvention n'ayant pas été intégralement consommée ». Cette version, approuvée par le Sénat, ne crée pas de droits à la conservation de crédits non consommés et préserve l'autonomie des collectivités publiques en ce domaine.
L'article 4 tendait à permettre à l'État de confier à des associations, des fondations reconnues d'utilité publique ou des organismes concourant aux objectifs de la politique d'aide au logement la gestion de biens immeubles dont il est devenu propriétaire à l'occasion d'une instance pénale. Vous le savez, ce dispositif a été adopté dans la loi du 8 avril 2021 améliorant l'efficacité de la justice de proximité et de la réponse pénale, que j'ai eu l'honneur de défendre lors de la niche parlementaire du groupe Agir ensemble. Sur proposition d'Alain Richard, la commission des lois du Sénat l'avait entièrement repris dans cette proposition de loi, compte tenu de l'incertitude entourant l'examen du texte qui nous est soumis aujourd'hui.
Afin qu'un même dispositif ne figure pas deux fois dans la loi, l'article 4 a été rappelé, conformément aux dispositions de l'article 44 bis du règlement du Sénat, pour assurer la coordination avec le texte de la loi du 8 avril 2021. En conséquence, la commission des lois du Sénat a adopté, à l'initiative de sa rapporteure, un amendement de suppression de l'article 4.
Enfin, l'article 6 du projet de loi confortant le respect des principes de la République et de lutte contre le séparatisme vise à rendre obligatoire la signature d'un contrat d'engagement républicain par les associations et fondations qui bénéficient d'une subvention publique ou en sollicitent une. Ce contrat permettra d'éviter que des associations qui prônent le séparatisme sous couvert d'une action sociale ou de soutien scolaire ne puissent recevoir de l'argent public. Dans ce contexte, les mesures tendant à faciliter la gestion de la trésorerie des associations qui respectent les principes de la République paraissent d'autant plus appropriées et justifiées.
Cette proposition de loi est nécessaire en raison des problèmes de financement public rencontrés par les associations. Son adoption est très attendue. Compte tenu des éléments que j'ai rappelés, le groupe Agir ensemble la votera.
La proposition de loi visant à améliorer la trésorerie des associations nous est soumise ce matin en troisième lecture. La quasi-totalité de ses articles ont été adoptés conformes : cela démontre une volonté commune de l'Assemblée nationale et du Sénat d'aboutir sur ce sujet, qui me semble très consensuel. Nous sommes en effet tous conscients du rôle primordial du secteur associatif dans de multiples domaines – sanitaire et social, culturel, sportif, environnemental –, mais aussi sur le plan économique, avec plus de 85 milliards d'euros de budget, 16 millions de bénévoles et 1,8 million de salariés.
Or les associations connaissent de plus en plus de difficultés de trésorerie et de gestion, car la part des financements publics et des subventions baisse peu à peu. Le secteur privé représente désormais leur première source de financement, alors que, souvent, elles œuvrent en complément de l'action étatique ou publique, voire en l'absence de celle-ci, ainsi que notre groupe le souligne depuis la première lecture. Il est donc opportun de moderniser les règles de trésorerie et de gestion des associations pour leur permettre de fonctionner efficacement et d'agir avec le moins de contraintes et le plus de soutien possible.
Nous sommes donc parvenus, avec le Sénat, à un texte que nous approuvons. Le Sénat a veillé à ne pas imposer de contraintes disproportionnées ou inutiles aux collectivités dans leurs relations avec les associations. Il a par ailleurs enrichi le texte de plusieurs articles additionnels – je pense notamment à l'extension de la liste des associations pouvant bénéficier de l'excédent d'un compte de campagne ou encore à la clarification des règles de publication des comptes des associations.
Soulignons également le contexte particulier dans lequel intervient cette troisième lecture : la pandémie, survenue au cours de la navette parlementaire, nous conforte dans la volonté d'adopter rapidement ce texte pour soutenir le secteur associatif, qui a une nouvelle fois démontré son importance en temps de crise. Je tiens à saluer toutes les associations, qui font preuve d'organisation, de détermination et d'inventivité afin de maintenir une activité nécessairement affectée par la situation sanitaire.
L'enquête menée par le Mouvement associatif démontre à quel point la crise a un impact économique sur les associations. Les pertes subies par le secteur associatif ont été évaluées à environ 1,4 milliard d'euros. Cette étude nous indique aussi que 21 % des associations ont moins de trois mois de trésorerie devant elles. En outre, plus d'un tiers d'entre elles, tous secteurs confondus, disent craindre une baisse des aides financières publiques et privées.
Cette recherche a ainsi mis en exergue que le premier type de soutien dont nos associations ont besoin est financier. Nous espérons que cette proposition de loi permettra de leur apporter tout l'appui dont elles ont besoin. Je souligne néanmoins que de nombreuses associations ont témoigné de la nécessité d'aides d'une autre nature pour s'adapter à un contexte difficile et inédit, par exemple d'une assistance et protection juridique ou d'un accompagnement dans le maintien de la vie associative à distance.
Nous devons soutenir notre secteur associatif, coûte que coûte. La navette parlementaire a été longue, alors que le sujet fait globalement consensus. Nous souhaitons qu'elle aboutisse désormais le plus rapidement possible. Le groupe UDI et indépendants votera donc ce texte, qui lui paraît aujourd'hui complet et équilibré.
Je vous remercie de vos interventions et de votre accord pour procéder à un vote conforme.
Je précise qu'un fonds d'urgence – nommé « UrgencESS » – a été créé pour soutenir les structures de l'économie sociale et solidaire. Celles qui emploient 1 à 3 salariés peuvent obtenir une subvention de 5 000 euros ; celles qui emploient 4 à 10 salariés, une subvention de 8 000 euros.
Je suis bien consciente que nous ne pouvons pas accorder de nouveaux moyens financiers aux associations dans le cadre de cette proposition de loi. Nous nous inscrivons bien évidemment dans le cadre budgétaire fixé, qui relève de la commission des finances. Nous ne pouvons donc pas résoudre toutes les difficultés des associations, mais nous avons essayé, avec les outils dont dispose la commission des lois, d'apporter des réponses concrètes à leurs problèmes de trésorerie.
Mon collègue Erwan Balanant l'a souligné, la vie associative et les moyens des associations ont été, depuis le début de la législature, au cœur des préoccupations du groupe Mouvement démocrate et démocrates apparentés, en particulier de Sarah El Haïry. Tel sera le cas jusqu'à la fin de la législature.
Même si son examen a été long, cette proposition de loi arrive à point nommé, puisque nous célébrerons dans quelques jours les 120 ans de la loi de 1901, texte majeur pour la vie associative. En outre, dans ce contexte de sortie de crise, il était grand temps que la proposition de loi aboutisse. Je salue le travail remarquable fourni par Sarah El Haïry sur ces questions, notamment sur celle du financement et de la trésorerie des associations. Certes, me direz-vous, on n'est pas nommé secrétaire d'État par hasard !
Je termine par un point qui est pour moi un leitmotiv. On a intitulé FDVA le fonds par lequel l'État aide les associations dans les territoires, notamment dans les départements. Nombreux sont ceux qui pensent qu'il s'agit d'un « fonds départemental » et s'adressent au président du conseil départemental. Or les départements ont souvent leur propre politique : ainsi, il existe en Saône-et-Loire le FDAVAL, fonds départemental d'aide à la vie associative locale. Vous imaginez à quel point il est difficile, pour les présidents ou cadres des associations, de frapper d'emblée à la bonne porte ! Nous devons clarifier ces intitulés, rappeler les sources de financement possibles et, peut-être, orienter davantage les associations vers le secteur privé, notamment vers les fondations ; beaucoup passent à côté de possibilités de financement.
Un gros travail reste à réaliser mais, indéniablement, cette proposition de loi est une avancée importante. Merci, donc, à Sarah El Haïry.
La Commission adopte l'article 3 bis A non modifié.
La Commission adopte l'article 3 bis B non modifié.
La Commission maintient la suppression de l'article 4.
Suivant l'avis de la rapporteure, la Commission rejette successivement les amendements CL1 de Mme Emmanuelle Ménard et CL2 de M. Ugo Bernalicis.
Elle adopte l'article 5 non modifié.
Elle adopte l'ensemble de la proposition de loi sans modification.
La réunion se termine à 10 heures 30.
Membres présents ou excusés
En raison de la crise sanitaire, les relevés de présence sont suspendus.