Commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi confortant le respect des principes de la république

Réunion du lundi 4 janvier 2021 à 8h30

Résumé de la réunion

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  • catholique
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La réunion

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COMMISSION SPÉCIALE CHARGÉE D'EXAMINER LE PROJET DE LOI CONFORTANT LE RESPECT DES PRINCIPES DE LA RÉPUBLIQUE

Lundi 4 janvier 2021

La séance est ouverte à huit heures trente-cinq.

La commission spéciale procède à l'audition de Monseigneur Eric de Moulins-Beaufort, président de la Conférence des évêques de France accompagné de Monseigneur Luc Ravel, archevêque de Strasbourg, et du Père Hugues de Woillemont, secrétaire général.

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Notre commission spéciale se penche sur l'un des textes les plus importants de cette rentrée 2021. Cela nous contraint à commencer nos auditions des représentants des cultes dès ce lundi 4 janvier assez tôt dans la matinée et je remercie notre premier invité, Mgr Éric de Moulins-Beaufort, président de la conférence des évêques de France, d'y avoir consenti. Nos débats, qui se déroulent pour partie en visioconférence, sont retransmis en direct sur le site internet de l'Assemblée nationale.

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Éric de Moulins-Beaufort

, président de la conférence des évêques de France. Je vous remercie d'avoir avancé à une heure qui convient à tous cette audition initialement prévue pour se tenir mercredi prochain.

Au moment de vous faire part de notre impression d'ensemble sur ce projet de loi, je suis assez embarrassé. On entend répondre par ce texte à certaines préoccupations relatives à la sécurité et à l'unité nationale que je peux comprendre. Lorsque j'avais rencontré le Président de la République à la fin du mois d'août 2019, il avait déjà évoqué ces sujets avec beaucoup de vigueur. Nous comprenons les inquiétudes que suscitent les actions de groupes généralement qualifiés d'islamistes – ce que le terme de « séparatisme » voulait mentionner au départ. Mais l'on se trouve finalement devant un texte qui modifie, ou qui risque de modifier, l'équilibre général de la loi de 1905 et ainsi la manière dont les catholiques, les protestants, les orthodoxes et les juifs ont trouvé à vivre en France d'une manière qui nous paraît plutôt harmonieuse et sur laquelle nous ne souhaitons pas particulièrement revenir. Autant dire que nous ne sommes pas demandeurs de ce projet de loi, même si nous comprenons certaines nécessités relatives à l'ordre public.

Le problème majeur est que le texte est essentiellement répressif et qu'à tous les inconvénients d'un projet de loi répressif il ajoute des mesures de contrôle à différents niveaux. Certaines sont légitimes, mais l'on peut se demander pourquoi elles s'appliquent spécifiquement aux cultes et pas à des associations œuvrant dans d'autres secteurs, au risque, même si ce n'est pas l'intention du législateur, de donner l'impression que l'État considère les religions et par ricochet les croyants comme des gêneurs ou des individus qu'il faudrait particulièrement surveiller.

Cela étant dit, nous avons pu réagir à l'avant-projet de loi après qu'il nous a été exposé et il a été tenu compte de certaines de nos remarques. Aussi, notre principale préoccupation aujourd'hui est de savoir dans quelle mesure les dispositions qui seront prises s'appliqueront aux associations diocésaines, dont le Conseil d'État a reconnu qu'elles correspondent aux associations cultuelles prévues par loi de 1905 même si elles n'ont pas exactement le même régime, et, surtout, s'il sera réaffirmé clairement que ces associations, avec leur statut type, correspondent bien aux associations cultuelles telles que les définira la loi de 1905 en passe d'être révisée.

Voilà pour le fond. Je pourrai faire des remarques sur certaines formulations du texte relatives à des mesures de police ou de contrôle si vos rapporteurs me le demandent.

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Quelle appréciation portez-vous sur l'obligation de déclaration préalable de la qualité cultuelle des structures associatives qui serait imposée par le texte s'il était adopté en l'état ? Que pensez-vous du contrôle des financements étrangers introduit par le projet de loi pour ce qui concerne le culte catholique ? Quelle est votre opinion sur les dispositions relatives aux immeubles de rapport, aux conditions de création des associations, au nombre de membres, à l'exemption du droit de préemption pour les associations cultuelles ? Quelle est votre position sur l'un des objectifs clés du titre II de ce projet de loi, la clarification de ce qui relève des activités proprement cultuelles, dans l'esprit de la loi de 1905 et des accords Poincaré-Cerretti, pour dissiper la confusion entretenue par la création d'associations mixtes mêlant activités cultuelles, culturelles, socio-économiques ou caritatives ?

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J'aimerais savoir quelle incidence auront pour le fonctionnement du culte catholique l'article 35 du projet de loi, qui impose des obligations nouvelles relatives aux financements étrangers des cultes, et l'article 39, qui vise à prévenir la provocation à la haine dans les lieux de culte et à leurs abords en renforçant les peines pénales prononcées pour sanctionner la commission de telles infractions. J'aimerais aussi connaître les mesures de police interne prises par le culte catholique pour prévenir les infractions de cette nature.

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En France, la liberté d'enseignement offre à chaque parent le choix de faire instruire son enfant dans une école publique, dans une école privée sous contrat, dans une école privée hors contrat ou en famille. L'article 21 du projet de loi remplace la procédure de déclaration d'instruction en famille par une autorisation délivrée en fonction de motifs qui seront édictés dans la loi sans que les convictions politiques, philosophiques ou religieuses des parents puissent être invoquées. Les articles 22 et 23 prévoient la fermeture administrative des établissements d'enseignement privés hors contrat en cas de constat de manquements graves ou réitérés à la réglementation. L'article 24 prévoit une condition supplémentaire pour la passation d'un contrat entre l'État et un établissement d'enseignement privé : celui-ci devra, si la loi est adoptée en sa rédaction actuelle, démontrer pouvoir dispenser un enseignement conforme aux programmes de l'enseignement public ou sa capacité d'organiser l'enseignement par référence à ces programmes. Quel est votre avis sur ces articles ?

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Je rappelle, au nom du groupe La République en marche, les fondements de ce texte : il s'attaque au radicalisme religieux qui entend placer les normes religieuses au-dessus des lois de la République. Son objet est bien d'améliorer notre arsenal juridique pour mieux prévenir la dynamique séparatiste, renforcer la transparence des conditions de l'exercice de culte et préserver l'ordre public. Comment garantir les libertés de conscience et de culte quand le risque de dérives insidieuses est patent ? Quels moyens utilisez-vous pour les prévenir ? Concernant les écoles confessionnelles, les outils juridiques prévus par le texte vous semblent-ils suffisants pour éviter de telles dérives ? S'agissant spécifiquement des jeunes, comment, selon vous, trouver le juste équilibre entre liberté de conscience et appropriation des principes républicains, de manière à prévenir la radicalisation ?

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Je prends la parole au nom du groupe Les Républicains. Vous vous êtes déclaré, Monseigneur, embarrassé par ce projet de loi que vous jugez répressif mais le ministre de l'intérieur, que nous avons entendu, le tient pour un texte « de liberté et non de contrainte ». Comment expliquer ces points de vue contradictoires ? Plus généralement, craignez-vous que cette loi conduise à entamer la liberté religieuse, l'un des fondements constitutionnels de notre pays ? Ce texte peut-il être un facteur d'apaisement comme devrait l'être toute loi ou va-t-il réveiller d'anciennes querelles en revoyant le sens de la laïcité à la française telle que l'entendaient Jean Jaurès et Aristide Briand ?

Un tiers des établissements hors contrat sont des établissements catholiques. Le choix par les parents d'un établissement hors contrat est un choix de liberté en matière de pédagogie ; craignez-vous qu'elle soit remise en cause ? D'autre part, l'article 1er du projet de loi impose la neutralité religieuse aux délégataires de service public. Or, depuis la « loi Debré », les écoles sous contrat sont reconnues comme exerçant une mission de service public. La neutralité religieuse peut-elle être imposée aux enseignants, ce qui contreviendrait fondamentalement à l'organisation actuelle ? Avez-vous abordé ces sujets dans vos entretiens préalables avec le Président de la République et peut-être avec le ministre de l'intérieur ?

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Je m'exprime au nom du groupe du Mouvement Démocrate et Démocrates apparentés. Vous considérez le texte comme trop répressif ; quelles propositions feriez-vous pour atténuer cet aspect ? Vous avez dit votre inquiétude relative au statut des associations diocésaines ; avez-vous fait des propositions tangibles tendant à protéger leur statut, qui a permis à la religion catholique de s'exercer en France ? Le texte prévoit, pour les écoles sous contrat et hors contrat, des proposition d'évolution importantes ; avez-vous des craintes particulières à ce sujet, et avez-vous formulé des propositions précises visant à ce que leur statut actuel ne soit pas remis en cause ?

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Je prends la parole au nom du groupe Socialistes et apparentés. L'obligation de déclaration préalable n'introduit-elle pas une forme de reconnaissance par l'État de la nature cultuelle d'une association, contrevenant de ce fait à l'esprit de l'article 2 de la loi de 1905 ainsi qu'à la loi de 1901 sur les associations qui dispose leur reconnaissance de plein droit après dépôt de déclaration ?

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Le groupe Libertés et territoires s'interroge : le très fort durcissement de la réglementation prévue par ce texte pour l'instruction en famille et les établissements hors contrat ne va-t-il pas entraîner un durcissement, non mentionné dans le texte, pour les autres formes d'enseignement ? Pour ce qui est de la liberté des cultes, la multiplication des contraintes, notamment en matières fiscale et comptable, permettra-t-elle de maintenir la paix religieuse en France ?

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Le groupe Agir ensemble aimerait connaître votre vision de la laïcité et de ses enjeux, savoir comment vous modifieriez le projet de loi si vous étiez dans la position du législateur et quels éléments vous semblent importants en matière de liberté d'enseignement.

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Éric de Moulins-Beaufort

Sur le plan général, je ne doute pas de l'intention qui préside à ce texte. L'inquiétude que j'ai exprimée tient à ce que le projet de loi peut, qu'on le veuille ou non, créer un effet d'entraînement à moyen et long termes. Pour lutter contre des groupes dont l'action, en tous points condamnable, mérite d'être poursuivie et interrompue mais qui sont minoritaires dans notre pays, on risque de faire porter le poids de ces modifications à l'ensemble des citoyens croyants, à l'ensemble des cultes en France. On ne valorise peut-être pas suffisamment l'apport positif que ces citoyens apportent ou tentent d'apporter au bien commun. L'obligation de déclaration préalable, à la suite de de l'intervention du Conseil d'État, est une relative amélioration par rapport à l'écriture initiale du texte ; cependant, le préfet est censé recevoir tous les cinq ans cette déclaration préalable qui conditionne l'éligibilité à certaines facilités fiscales. Il est certes légitime que l'État contrôle les bénéficiaires de ces avantages fiscaux, mais outre que le délai de cinq ans est relativement bref – je me suis laissé dire que pour les fédérations sportives ce délai est de huit ans –, quel sera le statut des associations entre le moment de la déclaration et le terme du délai dans lequel le préfet est censé avoir reconnu ou reconduit cette qualité ? Le statut d'association cultuelle sera-t-il remis en cause tous les cinq ans ? Quelle sera la garantie de traitement ? Cette disposition donne le sentiment d'une surveillance renforcée plutôt que d'un accord d'autorisation générale d'exercer. Nous avions de longue date prévu une réunion à ce sujet ce soir ; je pourrai vous transmettre nos propositions ultérieurement.

Le financement étranger ne concerne pas les catholiques de France : c'est nous qui finançons le Saint-Siège et non le Saint-Siège qui nous finance. Nous aidons beaucoup de structures ecclésiales dans des pays d'Afrique et d'Asie, ce ne sont pas eux qui nous aident – grâce à Dieu, nous n'en sommes pas encore là. Si la question se posait, ce serait de manière vraiment très marginale, et concernerait un projet précis. Le renforcement du contrôle des financements est légitime et nous n'y avons pas d'objection de principe. Toutefois, le projet de loi alourdit des procédures déjà pesantes et crée des contrôles spécifiques aux associations cultuelles qui n'existent pas pour toutes sortes d'autres domaines de la vie publique, dont les sports et les arts, qui peuvent éventuellement être financés par l'étranger, et l'on en vient à se demander pourquoi les associations cultuelles sont l'objet d'un traitement spécial.

Le texte prévoit aussi des assouplissements relatifs aux immeubles de rapport. Comme je vous l'ai dit, nous n'étions pas spécialement demandeurs de ce projet, mais le ministre, en nous le présentant, a fait valoir que c'est peut-être l'occasion d'un peu de souplesse. Pour l'instant, nos associations diocésaines ne peuvent pas détenir d'immeubles de rapport. Nous ne cherchons pas spécialement à nous transformer en promoteur immobilier, mais certains de nos immeubles, s'ils sont un peu trop grands pour un usage strictement pastoral, pourraient être utilisés à usage mixte et une partie pourrait être louée. L'Église de France vit de la générosité des fidèles, et c'est le modèle que nous préférons. Si cette disposition est maintenue, nous en profiterons raisonnablement, mais, je le répète, nous n'en sommes pas spécialement demandeurs.

Nous sommes favorables aux dispositions permettant de clarifier ce qui relève du cultuel et ce qui relève du culturel, mais est-il vraiment nécessaire de renforcer cette distinction si précisément alors que l'objet des associations diocésaines est de soutenir le culte ? Cet objet social très limité présente des inconvénients et complique un peu notre action, mais nous sommes habitués à vivre ainsi et ce régime nous convenait.

J'espère que dans les lieux de culte catholique il n'y a pas de provocation à la haine car ce n'est pas l'objet de la religion chrétienne. Si un ministre du culte se laissait aller à des propos de ce genre, un dispositif de sanctions internes permettrait d'aller jusqu'à lui retirer la possibilité de prêcher ou de célébrer – mais je ne connais pas de cas de ce type au sein de l'Église catholique. Peut-être y en a-t-il dans d'autres groupes qui se disent catholiques mais qui se sont écartés de l'autorité des évêques ; je l'ignore.

Le problème de ces dispositions, dont nous approuvons le principe, est de déterminer pourquoi il est nécessaire de les renforcer pour les cultes au regard de la loi d'application générale qui interdit ou qui devrait interdire la provocation à la haine dans tous les domaines d'expression des citoyens. De nombreux débats ont déjà eu lieu à ce sujet, notamment pour ce qui relève de la haine en ligne. Ce sujet ne relève pas seulement de la répression mais de l'éducation, de la formation des esprits et des cœurs, travail de l'école et des familles, et d'un élan national. Que l'on en vienne à devoir réprimer par la loi la provocation à la haine, c'est dire que, malheureusement, la cause est déjà quelque peu perdue, puisque s'abstenir de tels propos fait tout simplement partie de la vie civilisée. Il faut un engagement plus général dans l'apprentissage du respect mutuel ; des débats complexes et utiles ont eu lieu à ce sujet en octobre après l'assassinat de Samuel Paty et le triple assassinat commis à Nice.

Quand le Président de la République a réuni, début octobre, les responsables des cultes en France pour les informer de la teneur du discours qu'il allait prononcer aux Mureaux, il a évoqué son projet de rendre obligatoire la scolarisation, et non simplement l'instruction. Enfant de l'école laïque et républicaine, je n'ai pas vu immédiatement de difficultés à une telle disposition ; mais, assez vite, en écoutant réagir autour de moi, je me suis rendu compte que l'enseignement en famille relève de nécessités nombreuses que l'on ne peut effacer d'un trait de plume. Finalement, le projet de loi tient compte de cette diversité et se propose de dresser la liste des motifs qui rendraient possible l'enseignement en famille, mais en prévoyant de nombreux contrôles des intentions des parents, avec une sorte de suspicion de base. Je comprends l'inquiétude qu'éprouve le Gouvernement face à la déscolarisation de certains enfants, notamment de filles, ou plutôt leur prétendue scolarisation en famille, avec le risque qu'elles soient en réalité formées dans des structures clandestines. Cela doit certes être empêché pour le bien des enfants et de notre société mais faut-il pour autant revenir sur le principe de la liberté des parents dans le choix du mode d'éducation et d'instruction de leurs enfants, alors que tout ce qui se passe hors contrat ou en famille fait déjà l'objet de beaucoup de contrôles ? Une fois encore, mieux vaut donner envie à tout le monde de participer à la construction de la communauté nationale plutôt que se limiter à réprimer ceux qui veulent de s'y soustraire car ils trouveront d'autres moyens de le faire.

Comment promouvoir la liberté de conscience et la liberté de culte et, en même temps, le respect des principes de la République ? Mais c'est le régime dans lequel vit le pays actuellement – un régime qui permet la liberté de culte et qui permet à l'immense majorité des citoyens et notamment des croyants de participer à la vie publique et à la vie sociale d'une manière positive. On se satisfait plus ou moins de la législation, mais cela participe de la vie démocratique, et je ne pense pas que l'immense majorité des croyants envisage de se soustraire aux lois de la République. Or c'est ce que le projet de loi, tel qu'il est formulé, donne à penser.

Le contrôle de ce qui s'enseigne dans les écoles confessionnelles est-il suffisant ? Jusqu'à présent, j'avais ce sentiment, en tout cas pour ce que je connais de l'enseignement catholique en France : il me semble contribuer de manière positive au dynamisme de l'éducation nationale dans notre pays, avec une certaine émulation par rapport à l'Éducation nationale au sens strict qui me paraît tout aussi positive.

Le projet de loi porte-t-il atteinte à la liberté religieuse ? Mon propos n'est pas aussi dramatique. Je n'ai pas de doute sur l'intention du Gouvernement et, a priori, encore moins sur celle du Parlement qui va débattre. Si ce texte m'inspire des sentiments mêlés, c'est que l'on peut craindre qu'il ait des prolongements : quand on entre dans la voie du contrôle et de la répression de la liberté, où s'arrête-t-on ? Quand l'État prend l'habitude, même si c'est en raison de nécessités, d'encadrer la liberté, il peut en venir à durcir cet encadrement jusqu'à étouffer la liberté. Ce fut un grand combat de l'Église catholique en Italie, au moment du fascisme, de préserver la liberté de l'Église d'enseigner les enfants, de ne pas les faire entrer dans une Éducation nationale qui aurait été celle de l'État fasciste. La situation ne se présente pas de la sorte en France aujourd'hui mais il faut veiller à ce que notre législation ne prépare pas le terrain à des pratiques de ce genre.

Ce texte peut-il être un facteur d'apaisement ? Je suppose qu'il veut l'être – en tout cas, c'est ainsi qu'il a été présenté par le Président de République et par le ministre de l'intérieur. Cependant, le Président de la République, dans le discours qu'il a prononcé aux Mureaux, a abordé plusieurs volets de la vie sociale et, malheureusement, le projet de loi porte sur un seul. Aussi ma principale proposition ne serait pas tant d'améliorer un point particulier du texte que de l'inscrire dans un travail global propre à renouveler le désir de former une communauté nationale. Si l'on a des raisons de penser que des parties de la population ne souhaitent pas s'intégrer totalement à la communauté nationale, il faut essayer de faire croître ce désir.

On peut supposer que la neutralité religieuse imposée aux délégataires de services publics ne s'applique pas à l'école catholique, mais ce n'est pas limpide. L'école catholique doit pouvoir le rester ; son caractère propre est pour le moment garanti par la loi et s'exerce dans le cadre du contrat de service public. C'est évidemment un sujet auquel nous sommes très attentifs et que nous ne souhaitons pas voir modifier. L'éducation catholique peut être vue comme un enrichissement de toute la société plutôt que la simple culture d'un particularisme qui détacherait de la communauté nationale. Une certaine culture catholique est aussi une manière d'entrer dans la longue histoire de notre pays.

Quelle que soit l'intention du texte, les mesures qu'il énumère sont de nature répressive, à la légère exception de l'assouplissement concernant les immeubles de rapport.

J'ai dit ce que je pensais de la déclaration préalable. Je laisserai à des juristes plus compétents que je ne le suis le soin de déterminer si ce serait une manière pour l'État de reconnaître les cultes contrairement à ce que dispose la loi de 1905, mais il me semble que cette mesure vise simplement à vérifier le caractère cultuel d'une association pour lui ouvrir le bénéfice de certaines dispositions fiscales ; elle peut donc se comprendre, et je ne suis pas certain qu'elle tende à la reconnaissance d'un culte au sens où elle impliquerait que la République lui octroie une valeur particulière. Il reste à savoir quels critères permettront à un préfet de déterminer qu'une association est de nature cultuelle. On peut aussi s'interroger sur la capacité des préfectures à traiter ces questions en termes de personnel : il me semble que l'on est revenu il y a quelque temps sur une disposition de loi parce que les préfectures ne parvenaient pas à faire face. Cela nous soucie.

Doit-on craindre que les règles très strictes prises au sujet de l'enseignement en famille et dans les écoles hors contrat dérivent vers l'enseignement sous contrat ? Ce risque est toujours possible. Bien entendu, ce n'est pas un argument pour ne rien faire, mais cela suppose une grande vigilance. D'une manière générale, je sais que le Parlement s'attache, dès que des libertés sont limitées, à ce que cela soit fait de façon très rigoureuse et très restreinte au risque, sinon, d'attenter aux libertés elles-mêmes.

S'agissant de la multiplication des contrôles en matière fiscale et comptable, je sais, pour en avoir discuté avec d'autres responsables des cultes en France, que notre interrogation est commune : pourquoi faisons-nous seuls l'objet d'une telle sollicitude ? N'y a-t-il pas d'autres secteurs de la société auxquels elle devrait être étendue ? Est-ce vraiment justifié ?

Il m'a été demandé quelles propositions je ferais, serais-je législateur ; ne l'étant pas, je suis heureusement dispensé de ce travail. Je dirai seulement que l'article 6 mentionne la sauvegarde de « l'ordre public » et que l'on gagnerait peut-être à substituer à ce terme celui de « sécurité publique », à la fois plus précis et plus limité. Rappelons-nous : il y a quelques années, le Conseil constitutionnel a censuré une loi qui créait une sorte de « délit de fraternité » : quand quelqu'un venait en aide à un migrant sans papiers en le transportant dans sa voiture ou en lui donnant un repas, il pouvait tomber sous le coup de la loi alors qu'il exerçait un acte d'humanité. Il faut accepter, de temps en temps, que l'on fasse des actes d'humanité non prévus par la loi. En l'espèce, parler de « sécurité publique » plutôt que d'« ordre public » suffit : on voit bien que venir en aide à un terroriste n'est pas exactement la même chose que de venir en aide à une personne en train de grelotter, mourant de faim, au bord d'une route.

La laïcité « à la française » nous permet de vivre ensemble dans la liberté. C'est une heureuse manière de vivre les libertés fondamentales de l'être humain. La liberté de l'enseignement fait partie de cet ensemble, ce qui explique les quelques inquiétudes que j'ai exprimées.

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Luc Ravel, archevêque de Strasbourg

Je m'exprime pour le diocèse de Metz et pour le diocèse de l'Alsace, autrement dit un département et une collectivité européenne qui représentent ensemble quelque trois millions de personnes. Je remercie les auteurs de ce projet de loi car, pour une fois, notre droit local n'a pas été oublié. J'ai pris attache avec Jean-Marie Woehrling, qui préside l'Institut du droit local alsacien-mosellan et nous étions très satisfaits que l'on parle un peu de notre intéressant particularisme. La commission du droit local d'Alsace-Moselle, placée sous l'égide du garde des sceaux, n'a pas été renouvelée en 2019. Alsaciens et Mosellans ont le souhait profond qu'elle le soit et le chef de l'État comme le Premier ministre en sont d'accord, car cette commission avait pour tâche d'examiner avec vous les projets de loi du type de celui-ci pour éviter qu'ils ne mettent à mal le droit local. En l'espèce, nous craignons l'introduction dans notre droit local des cultes les dispositions des lois de 1901, 1905 et 1907 qui s'appliquent aux cultes ailleurs en France. L'Institut de droit local est prêt, si vous le souhaitez, à s'atteler à une rédaction qui n'affaiblisse pas le droit local des cultes, non pour garder des privilèges mais parce que les questions que pose ce projet de loi sont celles qui ont conduit à la loi française de 1802 qui s'applique toujours dans nos trois départements. On constate que, deux siècles plus tard, les mêmes problèmes demeurent, qu'il s'agisse de financement ou d'influences extérieures, et que l'on est toujours palpitant et hésitant. Le code du droit local alsacien-mosellan contient des articles organiques organisant les cultes catholique, protestant et juif depuis la Révolution française. Il s'agissait déjà de savoir comment gérer la laïcité, sachant que la France est quasiment le seul pays au monde où la liberté de culte est une disposition d'ordre constitutionnel.

En réalité, le projet de loi nous concerne très peu – mise à part la crainte que j'ai exprimée et qui nous conduirait volontiers à proposer de réécrire les articles 31 et 32 pour rénover simplement notre droit local des cultes – car nos associations, qui ont la pleine capacité juridique, peuvent déjà avoir des immeubles de rapport. Seulement, l'adoption de la mesure relative aux immeubles de rapport créera une petite injustice pour les établissements public du culte : les religions concordataires relevant du droit public, ces établissements ne peuvent pas, pour l'instant en tout cas, avoir des immeubles de rapport qui ne soient pas directement liés à leur mission. Cette question de droit public devra être étudiée précisément : ainsi, l'archidiocèse de Strasbourg a pour support un établissement public du culte, la mense archiépiscopale, et quand des legs ou des donations sont faits, c'est le diocèse qui les reçoit.

D'autre part, il me semble qu'en droit français le cultuel n'est jamais défini. Il va de soi, et l'on peut lui donner l'extension que l'on veut. L'absence de définition ne simplifie pas les choses. Le cultuel n'est pas seulement le liturgique : en font aussi partie l'enseignement, la catéchèse, l'humanitaire, le caritatif… Réciproquement, une association qui n'est pas déclarée cultuelle peut toucher au cultuel à un moment donné – il en va ainsi des associations mixtes. Quand je crée une association destinée à gérer un nouveau lieu d'accueil à Mulhouse, tel est son objet, mais le projet est porté par les entrepreneurs et dirigeants chrétiens et par l'Église catholique en Alsace. Même si l'objet de l'association n'est pas directement cultuel, tout est lié. Il faudra peut-être accepter cette zone grise.

Enfin, notre régime particulier faisant que la loi de 1905 ne s'applique pas à nos trois départements, l'État et les collectivités publiques peuvent financer les cultes non-concordataires. La presque totalité des communautés musulmanes ont créé des associations cultuelles de droit local et peuvent ainsi obtenir de la mairie de Strasbourg par exemple jusqu'à 15 % du financement de la construction de leurs mosquées en subvention.

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Pour la communauté juive de France, la loi de l'État prime la loi religieuse et chaque samedi la prière pour la République française est dite dans toutes les synagogues. Mon souhait est qu'une telle prière soit aussi récitée dans toutes les lieux de culte et en particulier dans toutes les mosquées de France. C'est un grand défi, parce que si la grande majorité des Français musulmans respecte les lois, une minorité significative considère que la loi islamique, la charia, doit primer. C'est là tout le problème et c'est pourquoi des gens ont été tués, victimes du terrorisme en France.

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Je souhaite vous rassurer : les écoles privées de confession catholique sous contrat ne font pas partie des organismes privés visés à l'article 1er ; je vous renvoie à ce sujet à l'avis du Conseil d'État. Je comprends la gêne que vous avez exprimée : « l'entrisme communautariste » mentionné dans l'exposé des motifs du projet de loi est d'inspiration essentiellement islamiste. Comme vous l'avez indiqué, la liberté de conscience peut s'exercer aujourd'hui en France en même temps que le respect des principes républicains, mais qu'en serait-il si un projet politique en venait à faire primer la religion sur les lois républicaines ?

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Le projet de loi contient des dispositions visant à lutter contre les discours de haine visant l'appartenance ou la non-appartenance à une religion déterminée et les contenus illicites en ligne. Avez-vous connaissance de discours en ligne haineux à l'égard de personnes de confession catholique ? Avez-vous constaté une évolution à ce sujet ? Les dispositions envisagées auront-elles un écho dans la communauté catholique ?

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Ce texte est inspiré par les drames que le terrorisme islamiste a fait vivre à notre pays et dont l'Église catholique a elle-même été victime : chacun a en mémoire l'assassinat du père Jacques Hamel et des trois morts à la basilique Notre-Dame-de- l'Assomption de Nice. Quel est l'état du dialogue inter-religieux, notamment entre l'Église catholique et le culte musulman ? Selon vous, y a-t-il une continuité entre l'islam et le terrorisme islamiste ou bien une rupture – ce qui signifierait que ce texte qui vise à conforter les principes républicains ne devrait pas aborder les questions de religion mais les questions politiques de radicalisation, qui sont d'un autre ordre ?

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Je considère moi aussi que l'entrisme islamiste est l'objet premier d'un texte dont on a le sentiment qu'il est écrit au préjudice de l'ensemble des cultes qui ne posent pas de problème à la République. L'article 6 conditionne l'octroi d'une subvention à toute association qui la sollicite par la signature d'un contrat d'engagement républicain ; ne serait-il pas préférable de s'engager sur la voie d'une déclaration d'engagement au respect des principes républicains ? S'agissant de l'ordre public et de la sécurité publique, des associations diocésaines prennent remarquablement en charge des personnes en situation irrégulière qui attendent le soutien des pouvoirs publics ; craignez-vous qu'elles se trouvent dans l'impossibilité d'agir ?

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Les associations diocésaines ont pour fondement juridique un accord international qui a une force supérieure à la loi nationale. Partagez-vous mon interprétation selon laquelle le présent projet de loi n'a donc a priori pas d'incidence sur l'organisation du culte catholique ?

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Par l'effet de la loi de 1905, les églises sont gérées par les collectivités locales. La réforme rendant possible la détention d'immeubles de rapport par les associations diocésaines permettrait-elle de décharger les collectivités de l'entretien des églises pour les redonner au culte catholique ? D'autres idées sont-elles possibles pour régler la question du financement des établissements des autres cultes, telles les mosquées ?

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Bien que les équipes de football entraînent de grandes passions, je suis assez surpris que vous ne distinguiez pas la participation à la vie des religions, qui est de l'ordre du spirituel, du reste des activités humaines. Surtout, on a le sentiment que pour vous ce texte ne sert pas à grand'chose et que l'on pourrait très bien gérer à droit constant les problèmes qui se posent à nous. Cela semble en décalage avec l'opinion étant donné l'actualité.

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Je vous remercie pour la clarté de votre propos et j'irai plus loin que Guillaume Vuilletet : est-ce déformer votre pensée de dire que vous n'êtes pas demandeurs de cette loi, que vous considérez qu'elle restreint les libertés et que le ministre de l'intérieur pour, en quelque sorte, apaiser vos doutes, vous a indiqué la possibilité d'assouplir les dispositions relatives aux immeubles de rapport, ce que vous ne demandiez pas ? Votre réponse m'intéresse puissamment, car je suis contre la modification de la loi de 1905. Sur un autre plan, comment la conférence des évêques a-t-elle traité l'existence et donc la gestion de lieux de culte parisiens où des appels à la haine ont eu lieu et où des terroristes ont été célébrés, notamment l'église Saint-Nicolas-du-Chardonnet où de nombreux propos antisémites et racistes ont été tenus sans que ce lieu de culte soit fermé ? Des interventions ont eu lieu par moments, mais cet exemple ne démontre-t-il pas la complexité d'avoir sous sa responsabilité des lieux extrêmement préoccupants pour la sécurité publique et l'ordre public, et qui échappent à votre contrôle ?

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Éric de Moulins-Beaufort

Au cours de chaque messe dominicale, les catholiques prient pour les autorités de notre pays. Je remercie Mme Vichnievsky d'avoir précisé que le projet de loi ne concerne pas les écoles catholiques sous contrat et je m'en réjouis. Internet étant un grand réservoir de haine, on doit pouvoir y trouver de la haine contre les catholiques sans beaucoup chercher, mais je ne tiens pas à m'inscrire dans la ligne de la victimisation ; pour autant, un travail de fond doit être fait au sujet de la parole, notamment sur Internet, dans toutes les sociétés modernes.

Y a-t-il continuité entre l'islam et le terrorisme islamiste ? Il est très difficile de répondre à cette question car la violence est dans le cœur des hommes, qui sont capables de tout utiliser pour la nourrir. L'islam a un rapport à la force politique qui n'est pas tout à fait celui du christianisme, même si les chrétiens, eux-mêmes violents, n'ont pas toujours été exemplaires. Un travail constant doit donc être fait dans toutes les religions pour opérer une transformation. Notre modèle est le Christ mort sur la croix.

Les juristes discutent du statut juridique exact des associations diocésaines au regard de l'accord international signé par la France. Pour nous, le point crucial est que le Conseil d'État ait reconnu que les associations au statut type établi par l'accord Briand-Cerretti correspondent aux associations cultuelles prévues par la loi de 1905.

Comme beaucoup d'autres responsables de cultes, je considère que la notion de contrat d'engagement républicain est discutable car tout ne relève pas de la loi ou du contrat. Ce qui nous gêne le plus en cette matière, je vous l'ai dit, est la référence à l'ordre public plutôt qu'à la sécurité publique.

J'ai conscience que le spirituel n'est pas tout à fait du même ordre que la passion footballistique, encore que pour certains la deuxième soit en passe de remplacer le premier. Mais la difficulté tient précisément à ce qu'en conséquence de la loi de séparation des Églises et de l'État, la République ne connaît pas le cultuel : elle l'organise, lui permet d'exister mais ne prétend pas le régenter. Le texte nous paraît-il utile ? Son objet premier est important : il convient de lutter contre des comportements inspirés par le radicalisme islamiste. Mais par l'ampleur de son champ, le projet de loi me paraît faire courir le risque d'abîmer l'équilibre général dans lequel nous vivons. Telle n'est pas l'intention de ses auteurs, j'en suis certain, et je pense que le débat parlementaire peut aider à revenir à l'intention initiale de la loi sans déborder. Plus largement, je le redis, ce texte n'a de sens que s'il s'inscrit dans un travail plus global tendant à renforcer le désir de vivre au sein de la communauté républicaine.

Il y a beaucoup à dire sur le statut des édifices cultuels communaux et je crains de ne pouvoir le faire dans le temps qui m'est imparti, sinon pour souligner que, contrairement à l'idée reçue selon laquelle 90 % des églises catholiques sont à la charge des communes, une grande partie de nos dépenses concerne les églises qui n'appartiennent pas à ces collectivités. C'est que depuis 1905 la population s'est accrue, on a beaucoup construit, les villes se sont agrandies et nous assumons dans tous les diocèses la charge de bon nombre d'églises, singulièrement en beaucoup de lieux où se trouvent des églises appartenant à la commune et où la population locale est très réduite, et de ce fait la communauté catholique. Il convient de réfléchir encore à ce problème patrimonial très délicat.

La séance est levée à neuf heures cinquante-cinq.

Membres présents ou excusés

Commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi confortant le respect des principes de la République

Réunion du lundi 4 janvier 2021 à 8 heures 30

Présents. – Mme Caroline Abadie, M. Saïd Ahamada, Mme Stéphanie Atger, Mme Laetitia Avia, Mme Géraldine Bannier, M. Belkhir Belhaddad, M. Yves Blein, Mme Anne-Laure Blin, M. Florent Boudié, M. Pierre-Yves Bournazel, M. Xavier Breton, M. Jean-Jacques Bridey, Mme Anne Brugnera, Mme Émilie Chalas, M. Francis Chouat, Mme Fabienne Colboc, M. Alexis Corbière, M. François Cormier-Bouligeon, M. Charles de Courson, M. Éric Diard, Mme Nicole Dubré-Chirat, M. Jean-François Eliaou, M. Christophe Euzet, Mme Isabelle Florennes, Mme Laurence Gayte, Mme Annie Genevard, Mme Perrine Goulet, Mme Florence Granjus, Mme Marie Guévenoux, M. Meyer Habib, M. Yves Hemedinger, M. Pierre Henriet, M. Sacha Houlié, Mme Marietta Karamanli, Mme Sonia Krimi, Mme Anne-Christine Lang, M. Jean-Paul Mattei, M. Ludovic Mendes, M. Jean-Baptiste Moreau, Mme Valérie Oppelt, M. Patrice Perrot, M. Éric Poulliat, M. François Pupponi, M. Bruno Questel, M. Robin Reda, Mme Laurianne Rossi, M. François de Rugy, Mme Cécile Untermaier, M. Boris Vallaud, Mme Laurence Vichnievsky, M. Guillaume Vuilletet