COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES
Mercredi 20 janvier 2021
La séance est ouverte à onze heures.
La commission procède à l'audition de Mme Laetitia Buffet, responsable de la task force interministérielle vaccination covid-19.
Notre commission des affaires sociales a pour devoir d'assurer un suivi de la crise sanitaire dans toutes ses dimensions. Nous avons auditionné la semaine dernière M. Olivier Véran puis le professeur Alain Fischer sur la stratégie de vaccination. Nous poursuivons en entendant Mme Laetitia Buffet, en charge depuis peu de la task force interministérielle pour la vaccination contre la covid-19.
Je souhaite que vous vous situiez dans le paysage administratif de la vaccination où les intervenants sont nombreux. De quelle autorité relevez-vous ? Sur quels services avez-vous autorité ? Quelles sont les équipes dont vous disposez ? En quoi consiste la task force interministérielle ? Comment s'articule sa mission avec celles d'autres organes ou autorités, à commencer par le conseil d'orientation de la stratégie vaccinale dont nous avons entendu le président la semaine dernière ?
La task force interministérielle dont je suis le pilote depuis début janvier préexistait à mon arrivée. Elle est interministérielle donc répond au Gouvernement dans son ensemble. Elle est placée géographiquement au ministère de la santé et, comme elle a vocation à porter en majorité sur des questions de santé, elle est de manière privilégiée sous le pilotage de M. Olivier Véran.
Elle interagit en permanence avec les directions qui sont compétentes de manière usuelle et classique sur des stratégies vaccinales : la direction générale de la santé, la direction générale de l'offre de soins la direction générale de la cohésion sociale pour tout ce qui relève de l'offre médico‑sociale ainsi que la direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques) pour tout ce qui est statistiques et recul sur la mise en œuvre de la stratégie vaccinale.
Nous sommes une grosse vingtaine de personnes et la task force est structurée autour de deux principaux pôles : un pôle d'anticipation et un pôle de gestion des opérations. En ce qui concerne l'anticipation, nous avons un pôle chargé de l'approvisionnement – achat de vaccins – en lien avec les autorités européennes et les autres États membres. Ce pôle existe depuis assez longtemps puisqu'il source les vaccins depuis le début de cette « aventure » et il est évidemment très actif.
Nous avons aussi un pôle portant sur la stratégie vaccinale, même si nous ne définissons évidemment pas la stratégie vaccinale : nous suivons l'avis de la Haute Autorité de santé (HAS). Ce pôle fait de l'expertise, c'est-à-dire qu'il récupère toutes les données émises par les scientifiques et les rend accessibles à tous les acteurs de terrain en émettant des protocoles, des fiches techniques... Ce pôle répond aussi à leurs interrogations, sur le plan médical, sur le plan organisationnel et sur le plan juridique puisque de nombreuses questions juridiques se posent.
La task force a également un pôle de conception logistique qui joue évidemment un rôle très important. Plusieurs militaires font partie de ce pôle : je le dis tout de suite car la question « Pourquoi n'y-t-il pas de militaires pour faire de la logistique ? » m'est souvent posée. Je réponds donc d'emblée que la task force comprend même beaucoup de militaires. Nous avons un général, spécialiste de la logistique, qui suit les questions de logistique, ainsi que plusieurs hauts gradés qui nous permettent de définir les grands flux logistiques et de répondre aux grandes questions qui se posent pour chaque vaccin. Nous avons déjà fait le travail pour le vaccin Pfizer puis pour le vaccin Moderna et nous sommes actuellement en phase d'anticipation pour le vaccin AstraZeneca notamment. Ce pôle de conception logistique interagit étroitement avec Santé publique France, qui met en œuvre la logistique prévue par la task force.
Nous avons également un pôle « Indicateurs et suivi de la situation » très important pour savoir où nous en sommes, un pôle d'accompagnement des acteurs locaux qui permet de répondre toute la journée aux questions des agences régionales de santé (ARS), des préfets et des médecins, et un pôle d'accompagnement des pilotes. Chaque fois que nous lançons une nouvelle initiative, une nouvelle manière de vacciner, nous accompagnons les pilotes qui effectuent cette vaccination.
Enfin, nous avons un pôle de communication en articulation avec le comité d'orientation du professeur Fischer. Nous sommes en interaction très étroite avec ce comité d'orientation qui a deux grandes missions : conseiller le Gouvernement sur ces sujets pluridisciplinaires, le comité regroupant des personnalités médicales, des anthropologues, des sociologues ; assurer la communication grand public. Nous discutons beaucoup de ces deux aspects, des besoins et des actions qui peuvent être entreprises.
Depuis le 27 décembre dernier, les Françaises et les Français vivent au rythme de la campagne de vaccination contre le covid. Commencée dans les établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) pour protéger nos concitoyens les plus fragiles, elle s'est ensuite étendue et intensifiée depuis début janvier avec l'ouverture de la vaccination à quatre catégories : professionnels de santé, aides à domicile, pompiers de plus de 50 ans, personnes âgées de plus de 75 ans.
Cette accélération entraîne des résultats positifs sur les chiffres et les Français ne s'y trompent pas, particulièrement les plus de 75 ans, qui sont nombreux, dans les différents territoires, à exprimer un avis positif sur cette vaccination.
Si ces progrès sont visibles sur nos territoires, c'est avant tout grâce à la mobilisation sans faille de nos décideurs locaux, élus et professionnels de santé ou préfets et sous‑préfets qui n'ont de cesse de concerter et d'organiser cette campagne vaccinale en lien avec les ARS.
Ce déploiement du vaccin démontre également l'impérieuse nécessité d'un changement de paradigme dans nos méthodes de travail. En effet, les centres de vaccination sont généralement implantés dans des lieux où se trouvent des maisons de santé ou des pôles de santé pluridisciplinaires. La bonne entente et les intelligences collectives bien coordonnées en synergie démontrent toute l'efficacité mais qu'en est-il dans les zones dépourvues de cette coordination médicale ?
Nos territoires sont prêts, les doses doivent suivre. La répartition doit être équilibrée entre nos régions pour permettre un maillage territorial fin jusque dans les zones les plus rurales. Rien que pour ma circonscription de Gironde, ce sont 14 000 personnes de plus de 75 ans qui sont éligibles à la vaccination ; aujourd'hui, seules 800 sont vaccinées.
Même si la campagne se veut progressive et continuera à s'intensifier, la différenciation géographique ne doit pas conduire à une différence de traitement. C'est une question d'égalité. Aujourd'hui, les prises de rendez-vous affluent et nous devons permettre à toutes et tous d'avoir un parcours vaccinal bien accompagné. La prise de rendez-vous pour l'administration de la seconde dose doit se faire. C'est pourquoi je souhaiterais avoir plus de précisions concernant la répartition des doses dans nos différentes régions et plus particulièrement dans les territoires ruraux. Comment assurez-vous un maillage territorial équilibré et égalitaire pour assurer la vaccination de tous ?
Enfin, l'arrivée que nous espérons tous très prochaine du vaccin AstraZeneca permettra-t-elle une montée en charge de la campagne de vaccination et une accélération du parcours des personnes souhaitant se faire vacciner ?
L'Union européenne a appelé mardi les États à vacciner au moins 70 % de leur population d'ici fin août, 80 % des professionnels de santé et des personnes âgées d'ici le mois de mars. En s'en tenant au calendrier de vaccination prévu par le Gouvernement en France, seuls 14 millions de personnes seront vaccinées avant l'été soit 28 % de la population, très loin des 70 %. J'aimerais avoir votre avis sur ce sujet.
Un journal fait état cette semaine de stocks stratégiques constitués par l'État et les ARS et conservés par prudence. Le ministère comptait recevoir cette semaine au minimum 315 900 doses de Pfizer mais ne prévoyait pas plus de 333 700 injections supplémentaires, à peine en fait de quoi entamer les réserves. Pourquoi ce rationnement observé par certains hôpitaux et les ARS ? Pourquoi laissons-nous, si c'est vrai, des vaccins sur nos étagères alors qu'il est urgent de vacciner ?
Que pensez-vous du besoin de clarté et de transparence de l'organisation de la campagne de vaccination ? L'Association des maires de France s'est exprimée cette semaine pour dénoncer le décalage entre les appels du Gouvernement, qui incite la population à se faire vacciner, et les possibilités réelles de vaccination dans les centres, souvent trop peu approvisionnés. Chaque jour, nous parlementaires sommes submergés, comme les élus sur le terrain, de messages de personnes qui n'arrivent même pas à avoir un contact téléphonique et ne peuvent pas se faire vacciner. Quelle réponse apporter ? Ne faut-il pas plus de transparence et, en tout cas, une information en temps réel ?
Les parlementaires et les élus sur chacun des territoires auraient besoin de connaître le nombre de vaccins qui arriveront et le calendrier de la vaccination de façon à pouvoir inspirer cette confiance nécessaire. Le mécontentement des Françaises et des Français, notamment des personnes âgées qui ne peuvent pas se faire vacciner, monte aujourd'hui dans notre pays. Nous devons vous le dire.
Depuis peu, les auxiliaires de vie de plus de 50 ans peuvent demander à se faire vacciner en priorité afin de protéger au mieux les personnes âgées. Qu'en est-il des aidants familiaux ? Ils effectuent les mêmes missions auprès des personnes vulnérables et sont exclus de cette phase de vaccination. Serait-il envisageable de réviser ces perspectives de vaccination pour les aidants familiaux ?
Je vous félicite, madame Buffet, du rôle que vous avez accepté de jouer. Nous sommes loin de la Cour des comptes ; ce rôle est à la fois très complexe, compliqué et assez unique dans l'histoire de l'humanité puisque vous allez participer d'une certaine façon à la vaccination des 7 milliards d'habitants sur cette planète. Nous savons tous aujourd'hui que c'est ainsi que nous sortirons de cette pandémie. Ce n'est pas un problème purement hexagonal mais bien un problème mondial. Vous arrivez de plus à un moment où, depuis le début de l'hydroxychloroquine jusqu'à nos jours, nous avons vu tellement d'avis autorisés qu'il est assez difficile de naviguer au milieu.
Je voudrais savoir si vous avez eu des contacts avec Pfizer depuis votre nomination. Pfizer m'avait expliqué, voici déjà un bon moment, qu'ils essayaient de tester la possibilité de maintenir leur vaccin à – 20 °C seulement, ce qui simplifierait la tâche de tout le monde.
Je voudrais aussi insister sur le courage consistant, selon l'ordre de la HAS, à vacciner en priorité les EHPAD. Nous savions que ce serait périlleux puisque ce sont des milliers de sites différents, avec à chaque fois peu de patients, une interdiction de vacciner des personnes en phase d'infection ou cas contacts. J'aimerais avoir votre sentiment, surtout, sur les autres personnes âgées à domicile. Attendons-nous le vaccin AstraZeneca ? Attendons‑nous l'intervention des médecins ?
Enfin, certaines entreprises internationales sont prêtes à participer bénévolement. Je vous avais fait transmettre les coordonnées du président de Salesforce Europe, qui souhaite participer à l'aspect logistique, sachant que c'est le numéro 1 mondial dans le domaine de la mise en relation. Ce contact vous est-il parvenu ? Avez-vous pu le traiter ? Salesforce Europe mène cette action de façon totalement bénévole dans les autres pays européens et met 1 % de son budget et de sa task force au service des États.
Faire face à une pandémie mondiale n'est pas simple, nous pouvons le comprendre, mais l'incapacité chronique du Gouvernement à anticiper et à organiser la campagne vaccinale s'apparente à une faute. La France se retrouve ainsi, aujourd'hui, trente-cinquième sur cinquante et un pays au niveau mondial en nombre de vaccinations pour 100 habitants. Pire, elle se positionne vingt-cinquième sur vingt‑sept en Europe, alors que les pays ont reçu un nombre équivalent de doses, en fonction de leur population. C'est un déclassement.
Nous avons besoin d'un calendrier clair, d'une information fiable et d'une véritable transparence. Avons-nous suffisamment de doses ? 42 % des doses réceptionnées au 12 janvier, soit 1 651 000 doses, ont été utilisées. Or, à part des tweets des membres du Gouvernement comme celui de Mme Pannier-Runacher avant-hier qui nous indique que plus de deux millions de doses auraient été livrées, nous ne savons pas de combien de doses dispose la France. Nous avons selon elle de quoi vacciner un million de personnes d'ici la fin du mois mais, d'après les données officielles, nous n'avons assez de doses que pour vacciner 825 500 personnes puisqu'il faut deux doses espacées de trois semaines.
Comment pouvez-vous expliquer que certaines régions soient deux fois plus vaccinées que d'autres ? À titre d'exemple, dans le Gers, nous avons un stock de doses suffisant pour quatre semaines de rendez-vous mais, ensuite, c'est le flou. Nous ne savons pas si nous aurons les doses et nous ne sommes pas les seuls d'après l'article du Monde paru hier sur l'inquiétude des maires et présidents de département face au trop faible nombre de doses livrées. Il manque de la transparence sur les procédures.
Pourquoi n'existe-t-il pas de campagne publique du Gouvernement pour la vaccination ? Pourquoi les chiffres de la vaccination en France n'ont-ils été mis à la disposition que d'une seule personne privée du 30 décembre au 11 janvier et uniquement parce que la personne en question a fait pression publiquement sur le ministère de la santé ? Pourquoi, encore à ce jour, le seul endroit pour consulter les chiffres de la vaccination est-il le site mis en place par cette personne, covidtracker.fr/vaccintracker ? Aussi appréciable que soit le travail de cette personne, comment se fait-il qu'il n'existe pas de plateforme de l'État ou d'information au Parlement ? Ce site est d'ailleurs le seul permettant de consulter une carte des centres de vaccination.
Pourquoi n'existe-t-il pas de page d'information sur ce qui est connu et ne l'est pas sur les vaccins afin de dissiper les doutes de la population sceptique voire de lutter contre la désinformation vaccinale ? La seule page d'information est celle bien maigre présente sur ameli.fr.
L'adhésion au vaccin se fera à mon sens selon le triptyque confiance, proximité, transparence. Chacun a sa vision de la transparence mais je remercie tout de même le Gouvernement de nous donner un maximum d'informations sur le sujet.
La confiance et la proximité sont à mon avis très liées. Je fais partie de ceux qui pensent que les médecins généralistes, les pharmaciens, les infirmiers, les laboratoires de biologie auraient pu vacciner, même avec le vaccin Pfizer, notamment les plus de 75 ans.
La deuxième question qui remonte le plus souvent porte sur la seconde injection. Les personnes qui ont pu bénéficier de la première injection n'arrivent pas à avoir une date pour la seconde ou ont parfois des dates bien au-delà des trois semaines et même au-delà de six semaines. Cela inquiète et l'adhésion qui commençait à monter dans la population est remise en question. Certains s'interrogent sur ce schéma vaccinal.
Une autre question remonte des territoires sur l'engagement des médecins retraités qui souhaitent pouvoir apporter leurs bras pour vacciner et auxquels est parfois opposé un refus parce qu'ils n'ont plus de numéro Ameli. Comment faciliter la participation de ces professionnels de santé qui veulent apporter leur contribution dès maintenant et encore plus quand nous pourrons vacciner en population générale ? Nous aurons besoin de bras pour vacciner.
La stratégie vaccinale est une préoccupation centrale de tous nos groupes politiques car, en l'état de nos connaissances sur cette épidémie, elle constitue la seule porte de sortie de la crise sanitaire.
Je vous remercie pour les éléments d'information sur le rôle et les missions de la task force. Beaucoup de nos concitoyens semblent un peu perdus dans l'organisation des différentes institutions, cabinets de conseil et strates administratives qui nous sont présentés.
Je souhaite me concentrer sur l'approvisionnement des centres de vaccination, qui sont en première ligne pour répondre à l'attente grandissante des Français, notamment des plus exposés au virus. La task force est chargée de l'approvisionnement en vaccins et de la distribution dans les centres de vaccination. Or, de nombreux élus dénoncent une différence très importante entre le nombre de vaccins promis et le nombre de vaccins effectivement distribués, alors même que les rendez-vous sont déjà pris.
Dans mon département du Nord, l'effort de diminution à réaliser rien que cette semaine est de 5 600 doses, ce qui représente 29 % de la quantité initialement attribuée. Ainsi, dans les centres, les professionnels de santé et les élus locaux se voient dans l'obligation de revoir totalement leur organisation de la vaccination et nos concitoyens sont en attente. Nous avons même eu pour mission de diminuer les heures d'ouverture des centres de vaccination et de prendre le temps, avec les personnes de plus de 75 ans, de mettre au moins 15 à 20 minutes pour faire la vaccination de manière à diminuer le nombre de personnes vaccinées par jour. Que pouvez-vous nous dire à ce sujet ?
Chère Laetitia Buffet, recevez mes meilleurs vœux pour votre nouvelle mission à la task force interministérielle pour la vaccination contre la covid-19 ! Nous avons vraiment besoin que vous réussissiez.
Vous avez évoqué les achats de vaccins. Nous souffrons du faible nombre de doses disponibles pour la vaccination. Pourriez-vous en acheter davantage ? Les retards de Pfizer ont-ils un impact en termes d'annulations de rendez-vous déjà pris ? Des rendez-vous ont-ils déjà été pris pour des doses non reçues à ce jour ?
Nous constatons localement une vaccination à deux vitesses. Dans mon département de Meurthe-et-Moselle, 4 600 vaccinations avaient été réalisées mardi pour le grand public mais seulement 700 avaient concerné des habitants hors métropole du Grand Nancy. La métropole qui représente près d'un tiers de la démographie départementale a concentré près de 80 % des personnes vaccinées. Cela interpelle fortement dans nos territoires.
Préfets et ARS travaillent à une vérification à six semaines pour assurer une lisibilité des doses. Certains centres de vaccination dans des territoires encore dépourvus n'ouvriront que la semaine prochaine. Il faudra donc les intégrer à la répartition des doses. Votre task force porte-t-elle ce souci de l'équité territoriale ?
Le Royaume-Uni est confronté à un variant dit anglais, le VoC, responsable de la majorité des cas de covid à Londres, en Irlande, en Écosse et malheureusement au Danemark. Le conseil scientifique a rendu le 12 janvier aux autorités nationales un avis intitulé Entre vaccins et variants : une course contre la montre.
Dans tous les scénarios, la vaccination domine l'impact de l'épidémie. Face à la contagiosité du variant VoC, évaluée entre 40 et 70 %, l'Institut Pasteur a rendu ses travaux de modélisation en évoquant un temps de doublement du virus dépendant de cette vaccination et des mesures réactives et préventives que nous prenons.
La problématique porte d'abord sur les tests antigéniques puisque ce variant entraîne une négativation de la détection de la protéine spike de surface du coronavirus. Qu'en est-il, dans notre stratégie, concernant les choix de kits antigéniques afin de détecter ce variant anglais ?
Heureusement, il semblerait que le variant soit sensible à la vaccination. La première dose qui confère une immunité contre les risques de complication au quatorzième jour nécessite la présence d'un médecin. Or, nous avons aussi besoin des médecins dans les services et pour d'autres traitements médicaux. Pourrions-nous déléguer pour la seconde dose cette vaccination aux paramédicaux, infirmières, pharmaciens... ? Le vaccin AstraZeneca dont nous espérons rapidement la mise sur le marché permettra de plus d'accélérer cette stratégie vaccinale.
Pour répondre à la question de Mme Hammerer sur les doses, nous avions reçu au début de la semaine quasiment 1 600 000 doses du vaccin Pfizer. Il s'y est ajouté au début de cette semaine une livraison de 325 000 doses en comptant cinq doses par flacon, donc 385 000 doses en comptant six doses par flacon. Cela signifie que nous avons reçu au total environ 1 900 000 doses depuis le début.
Un grand nombre de ces vaccins sont déjà dans les bras de personnes qui ont été vaccinées. D'après les derniers chiffres en date d'hier soir, nous avions vacciné 692 777 personnes dont 164 000 résidents d'EHPAD. En tout, 600 000 personnes résident en EHPAD : environ 28 % des résidents d'EHPAD étaient donc vaccinés hier soir. Par ailleurs, 404 000 professionnels de santé ont été vaccinés et 112 370 personnes de plus de 75 ans.
Parmi les doses reçues, près de 700 000 ont donc déjà été administrées et, au rythme actuel, nous faisons plus de 100 000 vaccinations par jour. Nous en avons fait 105 000 hier. Cela avance donc assez vite.
À l'heure actuelle, 430 000 doses se trouvent dans les stocks des dépositaires. Il existe six plateformes sur le territoire national, réparties de façon à couvrir l'intégralité du territoire. Elles stockent le vaccin Pfizer à – 80 °C et permettent d'alimenter le flux A, c'est‑à‑dire un flux qui passe par les officines et touche les EHPAD partout en France. Ce flux A monte en charge de manière extrêmement importante durant cette semaine du 18 janvier et touchera 160 000 résidents d'EHPAD. Ce stock de 430 000 doses permettra de couvrir cette semaine et les deux semaines suivantes : tout début février, une première injection aura donc été administrée pour l'intégralité des résidents d'EHPAD volontaires. Aujourd'hui, nous enregistrons 80 % de demande de vaccination chez les résidents, ce qui veut dire que nous sommes au niveau de notre hypothèse maximale. C'est un succès assez extraordinaire. Vous voyez que ce stock n'en est pas vraiment un puisqu'il permettra en deux semaines et demie de vacciner tous les EHPAD de France.
Par ailleurs, entre 750 000 et 800 000 doses sont réparties partout dans les établissements de santé pivots de chaque territoire. Dans chaque département, un établissement de santé pivot a un congélateur à – 80 °C et nous le livrons en vaccins pour lui permettre de disposer d'un stock et d'enclencher les vaccinations. Ces établissements pivots alimenteront les centres de vaccination. Le stock présent dans ces établissements a vocation à être consommé très rapidement puisque nous faisons plus de 100 000 vaccinations par jour.
Un principe logistique majeur est que nous ne pouvons pas tout consommer en permanence ; il faut avoir quelques jours de stock pour faire face en cas de rupture d'approvisionnement telle que la petite « surprise » de Pfizer cette semaine. Nous avons fixé comme principe que chaque établissement pivot dispose en permanence d'une demi-semaine de stock. Entre les vaccinations que nous faisons tous les jours et cette demi-semaine de stock, il n'existe donc pas de stock caché. Nous utilisons vraiment tous les vaccins qui nous ont été livrés.
Un point important est qu'il n'existe pas de stock national à la main du Gouvernement qui serait un tas d'or que nous ne libérerions pas. Le stock national est actuellement de 8 000 doses que nous gardons pour éteindre un incendie si jamais un centre ou une région manquait vraiment de doses ou en cas d'urgence absolue.
Enfin, si vous additionnez ce que je viens d'indiquer, il vous manquera environ 60 000 doses. Ces doses correspondent aux stocks déjà décongelés qui se trouvent dans les réfrigérateurs des centres de vaccination. Ils sont stockés entre 2° et 8° et seront bientôt injectés. Il s'agit d'une sorte de stock circulant.
Plusieurs députés ont demandé comment est faite la répartition entre les territoires. Le premier élément est que le vaccin Pfizer doit être transporté de manière très particulière. Quand il nous a été livré, il était conditionné dans de gros caissons isothermes appelés thermal shippers de 4 975 doses, soit cinq plateaux qui, eux-mêmes, contiennent les flacons. Ces gros paquets ne pouvaient pas être découpés pour les premières livraisons. Pour couvrir tout le territoire conformément à la demande du Président de la République que tous les établissements pivots de tous les départements reçoivent le vaccin Pfizer, nous avons envoyé des thermal shippers partout. Au début, il arrivait donc qu'un territoire très peu peuplé dispose de beaucoup de vaccins par rapport à sa population mais nous l'avons assumé puisque l'objectif était d'avoir du vaccin Pfizer partout pour démarrer la campagne vaccinale.
Le second élément est que, à partir de lundi prochain, nous procéderons progressivement à un rééquilibrage en fonction de la population. La répartition entre les établissements pivots sera effectuée sur une base strictement populationnelle. Nous avons déterminé l'effectif de la population cible – personnes de plus 75 ans, professionnels de santé de plus de 50 ans et/ou avec comorbidités – selon les départements et nous avons alloué les doses proportionnellement. Par exemple, dans la région d'Île-de-France se trouve environ 14 % de la population cible et cette région recevra à compter de la semaine prochaine 14 % des doses. C'est déjà presque le cas car nous avons rééquilibré progressivement.
Nous envoyons les doses département par département en suivant les clés de répartition que je viens de donner, le but étant de respecter une absolue équité territoriale. Localement, les préfets, les ARS et les comités territoriaux de la vaccination sont chargés de la création des centres et de la répartition des doses entre les centres. Nous ne décidons pas de tout au niveau central. Nous maximisons les chances d'équité territoriale et le reste dépend de l'échelon local.
Le calendrier du vaccin AstraZeneca s'accélère ; nous attendons une autorisation de mise sur le marché (AMM) vers le 28 janvier, sous toutes réserves puisque nous ne pouvons jamais vraiment prévoir les AMM. Un avis de la HAS sera rendu dans la foulée vraisemblablement et les premières livraisons interviendraient durant la première quinzaine de février. Le vaccin devrait donc être disponible à un horizon de deux semaines ou deux semaines et demie. Ce sera très rapide et nous anticipons déjà le circuit logistique.
Les vaccins Pfizer et Moderna nous ont obligés à inventer des flux logistiques, à mettre en place des solutions très spécifiques car ils se transportent de manière très spécifique. Le vaccin AstraZeneca au contraire se transporte beaucoup plus facilement et se conserve à une température beaucoup plus classique ce qui nous permettra de le réinjecter dans des circuits classiques : grossistes répartiteurs et officines. Nous anticipons sa distribution dans des circuits de droit commun.
Je m'empresse de dire toutefois que nous avons une incertitude forte sur l'indication vaccinale du vaccin AstraZeneca. D'après les données dont nous disposons, même si nous attendons l'AMM et l'avis de la HAS, nous ne savons pas si ce vaccin sera centré sur les mêmes populations que les vaccins Moderna et Pfizer ou s'il sera centré plutôt sur les 18-65 ans. Il faut que nous anticipions les deux possibilités et nous ne le saurons que lorsque l'Agence européenne des médicaments (EMA) et la HAS auront rendu leurs avis.
M. Perrut m'a interrogée sur les cibles. Les objectifs officiels sont d'avoir vacciné un million de personnes à la fin janvier – nous devrions y arriver voire dépasser largement la cible – et la seconde cible est d'avoir vacciné 15 millions de personnes à horizon de l'été. Nous avons pris connaissance des engagements de la Commission. Une discussion aura lieu aujourd'hui ou demain au Conseil européen. La position de la France est la suivante : nous voulons aller le plus vite possible et vacciner le plus vite possible mais cela dépendra de nos approvisionnements. Tout dépend en réalité de la capacité des laboratoires à tenir l'engagement pris et à le tenir dans les délais. Ce qui s'est produit cette semaine avec Pfizer doit tous nous conduire à beaucoup de prudence.
Nous avons en effet perdu 200 000 doses du vaccin Pfizer pour la semaine qui vient de s'écouler par rapport à ce que nous aurions dû recevoir. Ce n'est pas du tout négligeable dans notre gestion actuelle et cela a été très compliqué. Ils nous ont assuré que nous aurions à partir de la semaine prochaine des livraisons baissées en nombre de plateaux mais que cette baisse serait compensée par un passage du calcul du nombre de doses par flacon de cinq à six. Nous attendions 520 000 doses et nous les aurons mais cela équivaudra à moins de flacons parce qu'ils considèrent que chaque flacon contient six doses au lieu de cinq.
Cela nous interroge car tout le monde n'arrive pas à trouver cette sixième dose dans le flacon. Il faut avoir un geste spécifique, il faut s'approprier toute une technique. Les établissements doivent se l'approprier mais ce n'est pas simple.
Nous avons une grande ambition et un achat complémentaire de 30 millions de doses du vaccin Pfizer a été fait. Il arrivera à partir d'avril et devrait nous permettre d'augmenter nos objectifs. Nous attendons la confirmation et d'être sûrs du calendrier avant de faire des promesses.
La transparence est un point absolument majeur. Nous communiquons actuellement sur les chiffres par une conférence de presse par jour. Ce n'est évidemment pas suffisant et nous devons aller beaucoup plus loin dans la communication des données. Nous y travaillons. Deux grands types d'informations seront accessibles dans les jours qui viennent en open data : d'une part, où sont les doses au niveau national, au niveau régional et, dès que nous y parviendrons, où sont les doses au jour le jour dans les centres – le nombre de doses disponibles dans chaque centre, le nombre de rendez-vous pris, le nombre de rendez-vous encore à prendre ; d'autre part, qui sont les vaccinés, par tranche d'âge, par sexe, par catégorie vaccinale...
Ces données seront communiquées très rapidement et je précise à Mme la députée Biémouret que la carte des centres de vaccination est accessible sur le site sante.fr depuis jeudi matin, avec les coordonnées des plateformes téléphoniques et des plateformes de prise de rendez-vous.
Côté rendez-vous, il ne reste plus beaucoup de créneaux disponibles pour les quatre semaines qui viennent. Je crois que nous sommes le seul pays européen à avoir réussi à programmer ainsi les rendez-vous. Le système a été ouvert jeudi et, alors que nombre de personnes nous disaient que la population concernée n'était pas forcément très à l'aise avec Internet, deux millions de rendez-vous ont été pris pour la première et la seconde injections, ce qui signifie qu'un million de personnes ont réussi à prendre rendez-vous. Le rythme actuel de vaccination est vraiment important et il faut aussi voir le verre à moitié plein.
Sur la partie vide du verre, nous constatons des difficultés pour prendre rendez-vous. La raison majeure est à mon avis liée à un choix de gestion : n'ouvrir que quatre semaines à la réservation pour les premières injections dans un premier temps. La plupart des centres – pas tous – ont fait le choix pour sanctuariser totalement la seconde dose au regard des incertitudes que nous avions cette semaine sur les approvisionnements. Cela signifie que nous avons voulu ouvrir les rendez-vous sur quatre semaines pour savoir combien de doses nous devions sanctuariser pour la seconde dose. En fonction de ces données et de nos perspectives d'approvisionnement, nous calons le nombre de premières injections possibles pour les futures semaines.
Nous communiquerons très prochainement sur l'ouverture de nouvelles plages de rendez-vous. Nous le ferons en fonction des informations de Pfizer sur l'approvisionnement et de manière glissante : nous ouvrirons périodiquement des plages de rendez-vous, l'objectif étant vraiment de sanctuariser la seconde dose.
Les aidants constituent une population estimée entre 4 et 11 millions de personnes. Ils ne sont aujourd'hui pas dans la cible vaccinale. Je le dis en ayant conscience de la difficulté mais la cible vaccinale contient déjà 8,4 millions de personnes. Au regard de la progressivité nécessaire pour vacciner ces 8,4 millions de personnes et de nos approvisionnements, nous ne pouvons pas créer un appel d'air supplémentaire. L'objectif du Gouvernement est de tenir la ligne de la priorisation par la HAS et c'est très important pour ne pas vacciner avant des personnes qui ont des risques très graves des personnes qui ont des risques moins graves. Cela provoquerait une perte de chance pour des personnes très à risque de formes graves de covid et des personnes très âgées.
Je remercie M. Berta pour ses encouragements. Nous avons des échanges très fréquents avec Pfizer et, pour l'instant, les modalités de stockage n'ont pas changé.
Nous espérons vacciner 160 000 résidents d'EHPAD cette semaine. Nous en avons déjà vacciné environ 28 %. La question des personnes âgées à domicile est un point majeur. Nous savons que certaines ont des difficultés à se déplacer. Les collectivités territoriales sont en première ligne, surtout les départements au titre des fichiers de l'allocation personnalisée d'autonomie et de l'accompagnement des personnes âgées et les mairies au titre de leurs registres « canicule », que nous utilisons en fait depuis le début de la crise covid pour accompagner les personnes très âgées à domicile. L'objectif est de repérer les personnes concernées, de trouver toutes les solutions pour les amener vers la vaccination.
De nombreuses initiatives ont été prises. Des mairies ont réservé des créneaux de manière massive et accompagnent les personnes jusqu'aux centres de vaccination dans ces créneaux sécurisés. Des dispositifs mobiles sont également en cours de création pour apporter les vaccins Pfizer et Moderna à ces personnes. Nous accompagnons les quelques initiatives très intéressantes qui commencent à se structurer en répondant à leurs questions concrètes, en particulier sur la stabilité du médicament.
J'ai vu votre question sur le prestataire et nous l'étudions. Je vous remercie de nous avoir donné cette information.
J'ai déjà répondu à la plupart des questions de Mme Biémouret. Je précise que, en nombre de personnes vaccinées pour 100 000 habitants, nous sommes actuellement au-dessus de quasiment tous les pays européens, depuis plusieurs jours, à l'exception du Royaume-Uni. Nous sommes depuis un moment au-dessus de l'Allemagne, de l'Italie, de l'Espagne... En stock, nous avons l'ambition de les rejoindre très vite et, en flux, nous progressons.
La priorisation de la plupart des pays européens prévoyait d'aller toucher les EHPAD ou équivalents. Nous avons tout mis en œuvre pour que cette priorité soit réelle. La question à se poser dans quelques semaines sera aussi de savoir qui les pays ont vacciné en réalité. Il est à peu près certain que nous aurons atteint notre cible sur les EHPAD, et c'était la cible la plus difficile. Il faudra voir la différence entre nous et les autres en termes d'évitement de formes graves, de vaccination des plus à risques et je pense que nous ne situerons pas mal dans le classement.
Mme Firmin Le Bodo posait la question de la place des généralistes. Beaucoup de généralistes vaccinent en centre de vaccination, sont intervenus dans les EHPAD et continuent à y intervenir. Les généralistes sont en première ligne dans l'organisation de la participation à la campagne. Ils ne vaccinent pas dans un exercice classique mais de manière massive néanmoins.
L'arrivée du vaccin AstraZeneca nous permettra évidemment de repenser l'organisation de manière beaucoup plus classique. En fonction des approvisionnements réels de Pfizer et Moderna, nous pourrons peut-être envisager des changements mais, pour l'instant, les quantités dont nous disposons nous conduisent à les flécher vers les centres de vaccination parce que nous y avons besoin d'un très grand nombre de doses. Si les approvisionnements augmentent fortement, la situation pourra changer.
La seconde injection reste bien à vingt‑huit jours. Des débats ont suivi l'avis de l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé et la recommandation reste à vingt‑huit jours et à vingt et un jours pour les EHPAD. Tout le système a été pensé ainsi et nous ne voulons pas le déstabiliser. L'objectif est de sanctuariser la seconde dose.
Je suis intéressée, madame la députée, par le détail de vos remontées d'informations concrètes parce que, dans le système mis en place, dans la plupart des cas, le rendez-vous pour la seconde injection se prenait automatiquement en même temps que le premier. Nous l'avions demandé aux prestataires de prise de rendez-vous. Si cela n'a pas été le cas, voire si prendre le rendez‑vous pour la seconde injection pose vraiment problème, n'hésitez pas à nous le faire remonter. Ce n'est pas normal.
Nous travaillons sur la question des médecins retraités. Nous avons eu ces mêmes remontées d'informations et nous encourageons évidemment la mobilisation des médecins retraités. Nous calons actuellement les questions de rémunération et de responsabilité. Des consignes ont été visiblement données sur le territoire, pas par l'État mais par des sources que je ne parviens pas vraiment à identifier.
En ce qui concerne la question de Mme Six sur les annulations, nous avions demandé de créer des centres de vaccination avec un horizon, fixé par le Premier ministre, de 700 centres à la fin du mois de janvier. À l'heure où je vous parle, le 21 janvier, nous en avons déjà plus de 1 000. L'enthousiasme et la mobilisation sur le terrain ont donc été extraordinaires mais cela a pu par endroits engendrer des frustrations lorsque la communication n'a pas été extrêmement claire sur le nombre de doses que nous pouvions effectivement délivrer.
Il existe donc, nous le savons, des endroits dans lesquels nous avons des difficultés. En regardant le verre à moitié plein, nous voyons l'enthousiasme extraordinaire et en regardant le verre à moitié vide, dans certains endroits mais pas la majorité, nous voyons les difficultés. C'est effectivement le cas dans le Nord, madame la députée mais, dans la majorité des centres, le nombre de doses correspond au nombre de rendez-vous pris. Nous n'avons pas donné de consigne nationale d'annuler les rendez-vous ; notre objectif est d'éviter au maximum l'annulation de rendez-vous et de procéder à des reports si, vraiment, même en utilisant les stocks et en faisant des transferts intrarégionaux de doses, il manque des vaccins.
M. Bazin demande s'il est possible d'acheter plus de vaccins. Nous souhaitons avoir le maximum de vaccins et une commande complémentaire du vaccin Pfizer a été passée pour « avoir de l'air » à partir d'avril. Par ailleurs, il ne faut pas seulement acheter plus mais aussi acheter bien, en achetant des vaccins qui arrivent le plus tôt possible. Les vaccins qui nous sont proposés arrivent souvent beaucoup plus tard et notre objectif est d'avoir les vaccins au plus tôt.
Concrètement, nous avons essayé de lisser la perte liée aux retards de Pfizer de manière fine pour éviter l'impact cette semaine sur le nombre de rendez-vous. Nous avons optimisé les stocks et fait le maximum pour lisser la perte sur plusieurs semaines. Il faut maintenant que Pfizer tienne ses promesses. Nous leur parlons beaucoup, avec vigueur.
Sur la question de la ruralité, le problème est à la main en partie du national, en partie du local. Le département de la Meurthe-et-Moselle présente une petite spécificité : vu la circulation épidémique, il a aussi reçu des vaccins Moderna. La répartition doit se faire au niveau local. Il faut que le préfet, les collectivités et les ARS y réfléchissent car nous ne faisons pas au niveau central cette répartition très fine.
Sur la planification à six semaines, la visibilité que nous avons donnée aux ARS est précisément sur six semaines pour que les ARS puissent elles-mêmes, avec les préfets, donner de la visibilité sur six semaines. Nous allons redonner demain ou en fin de semaine de la visibilité sur six semaines au regard des nouvelles informations que nous venons d'avoir sur les approvisionnements en vaccin Pfizer. Nous travaillons donc sur six semaines glissantes.
M. Delatte a posé des questions sur les variants. Je ne peux pas vous répondre sur les tests antigéniques, que je ne regarde pas trop, ayant assez à faire avec les vaccins. Cette question des vaccins et des variants est importante. Des études sont en cours et la littérature n'est pas encore très fournie. Se pencher sur le sujet pour faire un bilan de la littérature est le travail du comité vaccin présidée par le docteur Marie-Paule Kieny. Le conseil scientifique du professeur Fischer se saisit également du sujet pour accompagner la communication, essayer d'expliquer tout ce que nous savons aujourd'hui. A priori, l'impact n'est pas le même selon qu'il s'agit du variant anglais, brésilien ou sud-africain. Je ne peux pas vous en dire plus.
Enfin, nous saisirons la HAS sur la simplification du parcours vaccinal pour, notamment dans la perspective du vaccin AstraZeneca, être capables de simplifier encore plus ce parcours vaccinal au regard des caractéristiques de ce vaccin, de l'AMM et de l'avis de la HAS.
Vous avez expliqué que chaque établissement pivot doit avoir une visibilité sur une demi-semaine au moins. J'ai entendu ce matin sur France Info que, à Strasbourg, la vaccination a dû être arrêtée pour lundi et mardi prochains. Des cas de ce type sont-ils dus aux livraisons ou à une mauvaise gestion d'un centre de vaccination ?
Vous avez par ailleurs dit que nous aurons des flacons de vaccin Pfizer contenant six doses. Jusqu'à présent, considérions-nous bien que les flacons ne contenaient que cinq doses ? Je sais que, dans mon centre de vaccination, ils ne peuvent en tirer que cinq doses ou un peu plus de cinq doses. Ils n'ont en fait jamais de sixième dose. Je sais que d'autres centres parlent de six doses. Les doses de Pfizer dont vous parlez correspondent-elles à des flacons de cinq doses ou de six ? Pour les prochaines arrivées, parlez-vous de manière établie de six doses ?
Enfin, si l'indication du vaccin AstraZeneca diffère de celle des vaccins Pfizer et Moderna, cela suppose que votre stratégie de vaccination évolue puisque vous ne vaccinerez pas les plus de 75 ans avec ce vaccin mais les moins de 65 ans. Vous aurez donc un flux C après le flux A et le flux B. Je vous souhaite du courage ! Quels seraient les indications des autres vaccins à suivre ? Sont-elles les mêmes que celles du vaccin AstraZeneca ou des vaccins Pfizer et Moderna ?
Je regarderai exactement ce qu'il s'est passé à Strasbourg. Il existe deux situations : soit l'établissement ou les établissements autour ont suffisamment de stock pour permettre d'honorer les rendez-vous en s'organisant de manière locale lorsque trop de rendez-vous ont été pris par rapport aux doses prévues, soit nous essayons de décaler les rendez-vous. Les annulations n'ont jamais été recommandées par le niveau national et il faut que je me penche sur le sujet.
S'agissant du nombre de doses, nous comptions jusqu'à présent cinq doses par flacon, depuis le début, et nombre d'équipes se sont habituées à faire cinq doses par flacon. Depuis quelques semaines, avec ce débat sur la sixième dose, nous avons informé les acteurs territoriaux et nous avons fait des fiches techniques et des webinaires en demandant d'anticiper et d'extraire au maximum la sixième dose. Beaucoup ont réussi à le faire. C'était mieux pour eux : cela leur permettait d'augmenter leur stock de 20 % ce qui constituait une forte incitation à le faire.
Cette semaine, nous avons fait un sondage qui nous a montré qu'il existe encore de nombreuses situations dans lesquelles les équipes ne parviennent pas à faire la sixième dose. Les trois facteurs importants pour réussir sont : une question de geste, qui n'est pas très évident ; une question d'organisation et de rapidité, car il est plus difficile dans les endroits qui massifient la vaccination et c'est lié à la difficulté du geste ; un matériel spécifique, qui facilite l'obtention de la sixième dose.
Sur les deux premiers points, nous essayons de mobiliser les territoires pour qu'ils s'aident entre eux. Ils organisent des webinaires et nous avons préparé des fiches techniques. Si vous voulez les diffuser, elles se trouvent sur le site du ministère de la santé, dans l'onglet « Vaccination » puis « Je suis un professionnel ». Vous y trouverez un portfolio de fiches techniques pour les professionnels, notamment sur ce sujet.
En ce qui concerne le matériel, nous avons été obligés de revoir notre stratégie d'approvisionnement en aiguilles et seringues. Nous avons fait de nombreuses commandes en urgence pour avoir le bon matériel. Une partie a commencé à arriver cette semaine et nous l'avons directement distribuée dans les établissements. De nouveaux approvisionnements sont prévus en fin de semaine ou début de semaine prochaine puis un gros approvisionnement en février. Nous faisons tout pour approvisionner les établissements avec un matériel qui leur permettra d'obtenir cette sixième dose.
Les sorties hospitalières ont-elles fait partie des réflexions sur la stratégie vaccinale ? En effet, nous vaccinerons les gens en EHPAD mais qu'en est-il des personnes hospitalisées qui seront admises en EHPAD ? Une stratégie particulière est-elle prévue, par exemple en vaccinant dans le flux A les personnes de plus de 75 ans hospitalisées ce qui permettrait qu'elles soient déjà vaccinées lors de l'admission en EHPAD ? Cela me semble important puisque, compte tenu de la durée moyenne de séjour en EHPAD, nous aurons assez rapidement deux populations, l'une vaccinée et l'autre non.
Par ailleurs, avez-vous une remontée d'informations sur les tutelles, notamment les tutelles hospitalières ? Je le dis parce que, souvent, elles ne se déplacent pas pour voir les résidents et donnent des avis pas toujours très éclairés. Elles ouvrent le parapluie, ceinture et bretelles, mais je ne suis pas sûr que ce soit toujours très déontologique.
Mon troisième sujet concerne les résidences autonomie, qui sont toujours un peu les parents pauvres de ces stratégies. Vous avez évoqué les équipes mobiles, idée que je trouve excellente. Ne pourrions-nous pas aller un peu plus loin, avec la Fédération nationale des établissements d'hospitalisation à domicile (FNEHAD) ou des organismes de ce type qui ont l'habitude des circuits froids ? Ne pourrions-nous avoir une dynamique plus nationale ?
Quels retours d'expérience avez-vous en ce qui concerne la collaboration avec les collectivités locales et territoriales, notamment un certain nombre de maires, en particulier sur l'organisation des flux de personnes âgées de plus de 75 ans ? Quelles sont les difficultés rencontrées et comment faire face à la volonté de certains maires de créer à tout va – et cela peut se comprendre – des centres de vaccination ? Certains maires ne souhaitent pas forcément organiser des circuits de déplacement. Quel est le « plan B » pour amener les personnes à être vaccinées ?
Nous avons une incertitude sur l'indication du vaccin AstraZeneca et, concrètement, nous ne pouvons rien faire avant l'avis de l'EMA et de la HAS. Nous anticipons les deux options, avec deux grandes familles de questions.
Si l'avis rendu cible le vaccin AstraZeneca sur la cible vaccinale actuelle, ces personnes auront le choix entre trois vaccins, Pfizer et Moderna étant très comparables en termes d'efficacité mais AstraZeneca ne l'étant pas. Nous aurions donc toute une série d'interrogations sur l'accès aux différents vaccins et c'est typiquement un sujet pour le conseil d'orientation du professeur Fischer. Ce sujet est vraiment entre le grand public et la médecine et il s'agit de savoir que dire aux personnes pour répondre à leurs questions.
La seconde famille de scénarios se place dans l'hypothèse où l'avis cible le vaccin AstraZeneca sur la population des 18-65 ans. La bonne nouvelle est que la HAS s'occupe à la fois de la stratégie de priorisation et de l'avis sur le vaccin. Elle réconciliera donc vraisemblablement les deux hémisphères et nous proposera une manière de placer le vaccin AstraZeneca dans la stratégie de priorisation. Il serait probablement ciblé non pas sur toute la population des 18-65 ans mais sur ceux qui ont des risques particuliers.
Nous n'avons actuellement pas de données sur les vaccins suivants. Nous savons que les prochains vaccins qui arriveront sont Janssen et CureVac. Nous ne savons pas quand ils arriveront.
En ce qui concerne les personnes hospitalisées, nous nous sommes fait exactement la même réflexion que vous. Elles font partie des indications vaccinales actuelles, à charge pour les établissements de les vacciner, même si ce n'est pas très simple quand ces personnes sont en cours séjour car il faut les reconvoquer pour le rappel.
S'agissant des résidences autonomie, les territoires ont la charge de s'organiser selon les modalités qu'ils souhaitent. L'organisation est très variable selon les territoires. Certains utilisent des équipes mobiles, d'autres ont de grosses procédures de liens entre les communes référentes et les centres de vaccination afin de réserver des créneaux pour les personnes vivant dans les résidences autonomie. Je pense qu'il faut vraiment laisser la liberté aux territoires car cela dépend des structures, du degré de perte d'autonomie des gens. Les collectivités sont en première ligne sur ce sujet.
En ce qui concerne l'hospitalisation à domicile (HAD), nous essayons d'accompagner les acteurs locaux pour leurs prototypes d'équipes mobiles et en particulier pour la HAD. Nous avons discuté cette semaine avec la FNEHAD pour travailler ensemble sur les grandes lignes du protocole. Je partage votre intérêt pour ce sujet et le fait que la HAD se mobilise.
Ce qui paraît une très bonne pratique aujourd'hui est lorsque le département, en première ligne sur le sujet des personnes âgées et notamment des personnes âgées en perte d'autonomie, se mobilise pour repérer les personnes à vacciner, grâce à ses fichiers et aux personnels des équipes sociales qui accompagnent les personnes âgées. Nous voyons des pratiques très spécifiques, des systèmes de transport organisés par les départements ou les communes vers les centres de vaccination. Des communes ont créé des systèmes centralisés de réservation pour toutes les personnes d'un territoire. Des courriers ont été envoyés. De nombreuses initiatives locales extrêmement intéressantes nous sont remontées.
Sur la question centrale du nombre de centres de vaccination, nous assumons le fait que nous ne pouvons pas les multiplier à l'infini. C'est impossible, cela engendrerait beaucoup trop de frustrations sur les territoires. La règle que nous avions donnée, qui est une référence plutôt qu'une règle, était d'essayer de prévoir un centre pour 100 000 habitants. Cela n'a pas vraiment fonctionné puisque nous avons plus de 1 000 centres, nous en avons trop. C'est malgré tout un peu naturel que certains territoires soient allés au-delà, d'une part parce que certains départements ont moins de 300 000 habitants et cela faisait trop peu de centres pour une grande surface, d'autre part parce que certains endroits sont ruraux, enclavés, montagneux et nécessitaient beaucoup plus de centres. Il ne faut néanmoins pas multiplier les centres à l'infini sinon cela serait trop dur à gérer.
La personne en première ligne pour dialoguer avec les élus sur ce point est le préfet. Le partage des tâches entre l'ARS et le préfet n'est pas toujours simple vu de l'extérieur. Le préfet a la charge du dialogue avec les élus et de l'agrément des centres. C'est un arrêté du préfet qui fixe la liste des centres autorisés à devenir centres de vaccination. Le préfet, en lien avec les élus et les ARS qui gèrent la partie médicale, doit réguler le nombre de centres pour éviter une trop forte dispersion sur le territoire. Un grand nombre de préfets jouent ce rôle de manière très efficace.
Je vous remercie pour toutes ces réponses claires et précises qui auront certainement éclairé les députés.
La séance est levée à douze heures vingt-cinq.