Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Réunion du jeudi 6 juin 2019 à 16h15

Résumé de la réunion

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La réunion

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Présidence

La commission, réunie en commission d'évaluation des politiques publiques, entend M. François de Rugy, ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire.

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Les éoliennes coûtent-elles un « pognon de dingue » ?

Si je n'ai pas la paternité de l'expression, je revendique, en revanche, une forme d'antériorité sur le sujet. Comme vous le savez, je m'intéresse depuis plusieurs années à l'énergie et aux questions posées par les éoliennes, et je préside actuellement la commission d'enquête sur l'impact économique, industriel et environnemental des énergies renouvelables, la transparence des financements et l'acceptabilité sociale des politiques de transition énergétique.

Avant d'en venir aux éoliennes, je dois vous dire quelques mots de l'exécution budgétaire 2018 des crédits que j'ai la charge d'examiner pour le compte de la commission des finances. Les crédits du programme 174 Énergie, climat et après-mines, du programme 345 Service public de l'énergie et des comptes d'affectation spéciale Transition énergétique et Financement des aides aux collectivités pour l'électrification rurale ont été exécutés pour un montant légèrement inférieur aux prévisions, en raison notamment de prix de marché de l'électricité supérieurs à ce qui était attendu.

Alors que l'on parle beaucoup du chèque énergie, son taux de recours est de 69,52 %, soit le même que lors de l'expérimentation. Le dispositif ne manquerait-il pas de lisibilité ou de simplicité ?

Par ailleurs, comme un récent rapport du Conseil général de l'environnement et du développement durable l'a relevé, le risque financier attaché aux contrats de soutien aux énergies renouvelables ne semble pas figurer pas dans les engagements hors bilan du compte général de l'État annexé au projet de loi de règlement. Il serait pourtant utile de compléter en ce sens la comptabilité générale de l'État. Le rapporteur général pourra se prononcer à ce sujet.

Enfin, je ne reviendrai pas sur mes observations sur la maquette budgétaire en 2017 et 2018, qui demeurent valables : la présentation de ces programmes n'est pas très logique du point de vue d'un citoyen qui voudrait comprendre l'action de l'État.

Mais venons-en aux éoliennes. Avant d'aborder le fond, quelques mots sur la forme : dans le cadre de la préparation de mon rapport, comme l'année dernière à propos des certificats d'économies d'énergie, j'ai utilisé les pouvoirs conférés aux rapporteurs spéciaux de la commission des finances pour effectuer un contrôle sur pièces et sur place dans les locaux du ministère de la transition écologique et solidaire, afin de récupérer en main propre des documents qu'on ne m'avait pas transmis dans les délais requis. Les résultats de ce contrôle ont été intéressants – j'y viendrai.

Je précise, en outre, que la préparation de ce rapport s'est faite en collaboration avec la Commission de régulation de l'énergie (CRE) qui, à la demande de la commission des finances, a accepté de réaliser une étude ad hoc sur le soutien à l'éolien. Je remercie la CRE et son président, Jean-François Carenco, d'avoir accédé à la demande de la commission des finances et me réjouis que, pour la première fois, l'évaluation d'une politique publique effectuée dans le cadre du Printemps de l'évaluation ait pu reposer sur l'expertise d'une autorité administrative indépendante.

Pour ce qui est du fond, monsieur le ministre, comme vous le savez, en 2018, les éoliennes ont représenté 5,1 % de la production électrique nationale, une proportion que le projet de programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE) ambitionne de porter à 15 % en 2028. Pour cela, l'éolien terrestre et marin seront soutenus et le nombre d'éoliennes terrestres passerait d'environ 8 000 à environ 15 000.

Quel est le coût de cette politique ? L'étude de la CRE en distingue trois : depuis 2001, 9 milliards d'euros ont été dépensés au profit des éoliennes terrestres ; 45 milliards d'euros supplémentaires – 22 milliards pour l'éolien en mer et 23 milliards pour l'éolien terrestre – seront dépensés en application de contrats déjà signés mais non encore complètement exécutés ; enfin, entre 18,7 et 36 milliards d'euros seront dépensés pour atteindre les objectifs de la PPE.

Monsieur le ministre, pour le seul budget de l'État, l'addition totale représente entre 72,7 et 90 milliards d'euros. À titre de comparaison, en 2012, la Cour des comptes a estimé le coût de la construction initiale de l'ensemble du parc nucléaire français à 72 milliards d'euros, en valeur 2010, soit environ 80 milliards d'euros, en valeur 2019. Rappelons qu'en 2018 ce parc a produit 71,7 % de l'électricité française. Autrement dit, la France risque de payer plus cher des éoliennes destinées à produire 15 % de l'électricité française en 2028 qu'un parc nucléaire assurant les trois quarts de notre production électrique.

Monsieur le ministre, il est encore temps d'arrêter les frais et de revoir votre politique, ce qui ne veut pas dire tout casser ! Si certaines formes d'éolien posent particulièrement problème, d'autres méritent, sous certaines conditions, d'être soutenues. L'éolien le plus problématique est l'éolien terrestre, qui produit peu – son facteur de charge est environ deux fois inférieur à celui de l'éolien en mer –, suscite des polémiques avec les défenseurs des paysages, fait travailler essentiellement des entreprises étrangères, multiplie les points de raccordement et est moins compétitif que le photovoltaïque. En 2018, un appel d'offres a mis en concurrence l'éolien terrestre et le photovoltaïque. Le résultat est sans appel ! Sur seize projets sélectionnés, il y a seize projets photovoltaïques et aucun projet éolien. Pour l'éolien terrestre, je crois qu'il y a urgence à cesser les frais et à suspendre les soutiens publics. Le secteur éolien se dit compétitif. Très bien ! Dans ce cas, qu'il se débrouille tout seul et que les éoliennes terrestres cessent leur addiction aux subventions publiques.

Mon jugement diffère, en revanche, sur l'éolien en mer. L'éolien en mer peut poser des problèmes, notamment aux pêcheurs, dont les pertes d'activité doivent être mieux prises en compte. Mais il présente certains avantages : son facteur de charge est deux fois plus élevé que celui de l'éolien terrestre, les sites sont moins nombreux, une industrie française est en train de naître et les prix déposés au récent dialogue concurrentiel du parc de Dunkerque sont compétitifs, autour de 50 euros du mégawattheure. L'éolien en mer flottant est financièrement moins compétitif, mais nos industriels sont en pointe et doivent être soutenus. Je crois qu'il est possible de développer l'éolien en mer, sous réserve de l'éloigner à plus de 50 kilomètres des côtes, afin de favoriser son acceptation sociale, comme cela se fait dans bon nombre de pays. Quant à savoir si c'est la bonne politique pour l'environnement, c'est un autre sujet.

Sur l'éolien en mer, je crois aussi, monsieur le ministre, qu'il est nécessaire de rouvrir les discussions avec les titulaires des six premiers contrats éoliens attribués entre 2011 en 2013. Une première renégociation est intervenue, à la va-vite et dans l'opacité, en 2018. Elle est prétendument une bonne affaire, puisque le Président de la République a dit qu'elle avait permis une économie de 15 milliards d'euros : le soutien public passant de 38 à 23 milliards d'euros. À mon sens, c'est le syndrome Canada Dry : ça ressemble à une bonne affaire, ça a le goût d'une bonne affaire, mais ce n'est pas une bonne affaire.

Monsieur le ministre, à l'automne 2018, vous avez signé les offres sur ces six contrats pour un prix moyen de 144 euros du mégawattheure. Par comparaison, le montant moyen des offres remises sur le dialogue concurrentiel de Dunkerque est de 50 euros du mégawattheure. Si vous souhaitez acheter une maison à 200 000 euros, que vous l'achetez, après négociation, à 150 000 euros, et que, six mois plus tard, la maison voisine est vendue à 50 000 euros, vous avez peut-être manqué une bonne affaire...

Pour vous convaincre, monsieur le ministre, je vais vous citer un court extrait d'une note adressée au cabinet du Premier ministre sur le résultat de cette renégociation. J'y ai eu accès, après avoir effectué un contrôle sur pièces et sur place dans les locaux de votre ministère. Je cite le négociateur de Dunkerque : « Le Gouvernement, s'il conserve pour priorité de faire évoluer le mix énergétique, décidera logiquement de confirmer les six projets […]. S'il privilégie sa politique de redressement des finances publiques et de stabilisation de la dette publique, le Gouvernement assumera la responsabilité politique d'annuler les appels d'offres et de relancer la procédure en escomptant de meilleurs prix. » En d'autres termes, le Gouvernement a fait son choix : oui aux éoliennes, non à la politique de redressement des finances publiques !

Monsieur le ministre, dans ce dossier, il faut rouvrir les discussions. L'éolien en mer mérite d'être soutenu, mais en renégociant les contrats passés, en éloignant des côtes les prochains parcs et en prenant soin de nos pêcheurs. Monsieur le ministre, l'éolien terrestre est une folie budgétaire et environnementale, à laquelle il convient de mettre un terme. Les chiffres que j'ai donnés ne sont pas les miens, mais ceux d'une autorité administrative indépendante. Un débat serein et objectif d'évaluation des politiques publiques doit s'ouvrir.

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Merci, monsieur Aubert. Nous allons retrouver notre sérénité et donner la parole au rapporteur général.

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La CRE, dans l'étude fournie, et la Cour des comptes, dans un rapport de 2018, appellent à améliorer le pilotage budgétaire du Parlement sur les engagements pluriannuels en matière d'énergies renouvelables. Il est vrai qu'à l'heure actuelle, il approuve la tranche annuelle des contrats, mais jamais la durée totale des engagements. Des réformes sont-elles envisagées ? Faudrait-il s'inspirer de l'exemple britannique, qui voit le parlement fixer chaque année un plafond de dépenses annuelles de soutien aux énergies renouvelables ?

Par ailleurs, la Cour des comptes a considéré qu'en matière d'énergies renouvelables, c'est l'État qui prend le risque de prix, en garantissant une rémunération sur la base d'une variable, le prix du marché, qu'il ne maîtrise absolument pas. Comment circonscrire ce risque financier ?

Enfin, la CRE appelle à renforcer ses pouvoirs pour assurer un meilleur contrôle sur les énergies renouvelables. Elle souhaiterait recevoir le plan d'affaires des candidats aux appels d'offres, pour effectuer des études de coût plus fines, et que le ministre rende publiques l'appréciation sur ses avis ainsi que les suites qu'il souhaite leur donner. Y êtes-vous favorable ?

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François de Rugy, ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire

Je suis très heureux d'être devant vous pour cette séance d'évaluation budgétaire, dont je revendique une part de paternité, en tant qu'ancien Président de l'Assemblée nationale. Je souhaite que nous ayons des débats d'évaluation fondés sur des chiffres, qui ne soient pas, pour paraphraser M. Aubert, des chiffres « de dingue ». Nous devons être les plus rigoureux possible, en plus d'être sereins et objectifs.

Concernant le taux de recours au chèque énergie, celui de 70 %, que vous avez cité, est déjà important, en comparaison du taux de recours à beaucoup d'aides sociales. Qui plus est, nous avons simplifié le dispositif, si bien qu'en 2018 le taux de recours est d'environ 80 %, comme nous pourrons le confirmer dans les semaines qui viennent. Les Françaises et les Français ont en effet déjà reçu leur chèque, et en sont très contents. Je tiens à le préciser, car j'entends dans des débats, y compris à l'Assemblée, que cette aide serait nulle et non avenue. Recevoir un chèque énergie, dont le montant peut aller jusqu'à 277 euros, allège concrètement la facture énergétique. Contrairement au précédent dispositif des tarifs sociaux du gaz et de l'électricité, le chèque énergie s'adresse aussi à ceux qui se chauffent au fioul.

S'agissant du risque financier attaché aux contrats de soutien aux énergies renouvelables, depuis cette année, son montant est donné dans la loi de règlement, après une analyse comptable poussée. Les travaux de chiffrage ont été présentés en comité de gestion des charges de service public de l'électricité : ce sont 107 milliards d'euros s'étalant sur une vingtaine d'années, sachant que la méthode d'inventaire des contrats, les hypothèses de chiffrage et le modèle financier ont été présentés à l'équipe de certification de la Cour des comptes. Ce chiffre est bien intégré au compte général de l'État, comme l'a d'ailleurs relevé la Cour des comptes dans son acte de certification, pour s'en féliciter et approuver les travaux menés – « Les engagements pris par l'État dans le cadre de sa politique de soutien aux énergies renouvelables électriques (§ 148) et à la cogénération sont correctement mentionnés en hors bilan. »

Mais, pour que vous ne fassiez pas de ce chiffre une utilisation un peu « dingue », pour reprendre un mot que vous aimez bien, ...

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François de Rugy, ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire

..sachez qu'il va évoluer tous les ans ! La courbe d'évolution des engagements liés aux contrats d'énergies renouvelables en France, qui ne tient certes pas compte des futurs contrats, est décroissante. Cela variera aussi en fonction des conditions économiques qui jouent sur le stock, puisque, lorsque les prix de l'électricité augmentent, la compensation baisse – et inversement, une baisse des prix du marché augmentera le stock.

Monsieur Aubert, vous avez agité plusieurs chiffres et mélangé des données qui ne sont pas comparables. Vous dites que 80 milliards d'euros, en valeur 2019, ont été investis dans la construction du parc nucléaire, pour assurer plus de 71 % de la production d'électricité, et que 72 à 90 milliards d'euros seront investis dans la filière appelée à produire 15 % de l'électricité, ce qui vous permet de conclure que l'éolien coûte cinq fois plus cher que le nucléaire. Mais vous ne comptez pas tous les coûts d'un côté, alors que vous les comptez intégralement de l'autre. En effet, pour le nucléaire, vous ne tenez compte que des investissements initiaux, sans intégrer les coûts de fonctionnement et la rémunération du capital.

Par ailleurs, pour comparer les prix de l'électricité, il faut raisonner en coût complet du mégawattheure. Le prix de l'accès régulé à l'énergie nucléaire historique a été fixé à 42 euros du mégawattheure. Comme vous le savez sans doute, EDF demande de façon récurrente, voire un peu pressante, que ce tarif soit réévalué à la hausse, afin de couvrir ses coûts. Avec le grand carénage, la Cour des comptes estime que l'on se rapproche des 60 euros du mégawattheure. Or l'éolien retenu dans les appels d'offres en 2018 était en moyenne à 66 euros, et à 63 euros dans le dernier, dont les résultats n'ont pas encore été annoncés – on peut même estimer qu'il tombera à moins de 60 euros dans certains cas. L'éolien du passé était à 82 euros du mégawattheure en moyenne. Entre le nucléaire historique et le premier éolien, le facteur est donc seulement de deux et non pas de cinq.

Qui plus est, vous le savez et devez le dire à celles et ceux à qui vous vous adressez, députés ou citoyens, la courbe du coût des énergies classiques, thermique ou nucléaire, est à la hausse, tandis que celle de l'énergie solaire ou éolienne est à la baisse. Vous avez un raisonnement étrange, qui ne me surprend pas de votre part, concernant l'éolien terrestre. Il faudrait l'arrêter quand il marche et que les coûts ont baissé ! C'est l'inverse : profitons du fait que les industriels aient réussi à mettre au point des machines plus performantes pour continuer. Quant à l'éolien en mer, on tenait déjà le même discours il y a dix ans, au moment du Grenelle de l'environnement, mais pas une seule éolienne n'est sortie de mer. Vous proposez d'ailleurs de le renvoyer à plus tard, au risque de produire encore moins d'énergie éolienne, et plus loin, alors que notre pays est celui où les éoliennes sont installées le plus loin des côtes, ce qui coûte plus cher. Vous savez bien, à moins de ne jamais vous être intéressé à la moindre politique industrielle, que le lancement d'une filière impose des coûts de démarrage, qui sont peu à peu amortis.

Quant à votre comparaison avec les maisons, monsieur le député, vous savez pertinemment qu'elle est totalement infondée. Les parcs éoliens en mer dont vous parlez ne sont pas comme deux maisons voisines : ils sont implantés dans des endroits où l'on n'avait pas recours aux mêmes techniques de construction, ni aux mêmes matériaux et où la rentabilité n'est pas toujours la même. Vous auriez plutôt dû comparer une maison construite en haute montagne dans un endroit isolé avec une maison en plaine, dans un lotissement déjà équipé en eau, en assainissement et en électricité. Comparons des choses comparables !

Monsieur le rapporteur général, fixer un plafond annuel de dépenses relatives aux énergies renouvelables, étant donné la variabilité des prix de l'énergie, risquerait de créer un effet de stop and go, alors que les filières ont besoin d'une grande visibilité. Par ailleurs, le Gouvernement agit pour encadrer la dépense, en généralisant les appels d'offres sur le solaire et l'éolien en mer, avant de le faire bientôt pour l'éolien terrestre, ce qui permet de réduire les coûts, sachant que la proposition de guichet ouvert intègre des limitations largement inférieures aux exigences de la CRE. Les impacts financiers ont été exposés avec la plus grande transparence dans les documents budgétaires transmis au Parlement. Je tiens à insister sur le fait que cette politique d'appels d'offres permet de faire baisser les prix. Ce qu'a dit M. Aubert sur Dunkerque n'engage que lui ; la CRE n'ayant pas, à ma connaissance, transmis son analyse des offres, nous verrons quels sont les coûts des futurs projets.

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Le changement climatique est commencé. Selon le Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC), il ne reste que douze ans pour tenter d'en limiter les graves conséquences. Le récent rapport des experts de la Plateforme intergouvernementale scientifique et politique sur la biodiversité et les services écosystémiques (IPBES) acte le début de la sixième extinction de masse des espèces. C'est dire l'urgence de la situation ! La multiplication des événements climatiques extrêmes nous montre que nous ne pouvons ni ne devons rester spectateurs. Une action publique ambitieuse au service d'une transition écologique qui modifie radicalement nos modes de consommation, de production et d'échanges est indispensable. Elle doit être menée par un État stratège. C'est en ce sens que nous avons récemment demandé au Parlement de déclarer l'état d'urgence écologique et climatique, ce qui nous a été refusé.

Analyser l'exécution des crédits de la mission Écologie en 2018, c'est constater que le Gouvernement n'a pas pris la mesure de l'urgence. Les crédits votés fin 2017 montraient clairement que les enjeux écologiques et climatiques passaient au second plan. Plus grave, les crédits de la plupart des programmes ont été rognés et sous-exécutés. Les opérateurs de l'écologie sont particulièrement maltraités, avec des crédits budgétaires en baisse et des coupes dans leurs effectifs qui ne répondent qu'à une logique comptable. Ainsi que je l'avais indiqué lors de l'examen du projet de loi de finances (PLF) pour 2018, ils apparaissent comme des variables d'ajustement. Or ces établissements publics si négligés devraient au contraire être confortés et renforcés. Ce sont des outils indispensables à une politique publique de transition écologique et solidaire qui ne se limiterait pas à un intitulé ministériel.

Parmi les bizarreries dont les opérateurs ont été victimes en 2018, je voudrais citer : la mise en place d'un circuit de financement de l'Agence française pour la biodiversité (AFB) et de l'Office national de la chasse et de la faune sauvage par le biais des ressources fiscales des agences de l'eau (281 millions d'euros en exécution contre 294 millions prévus au budget initial), ces ressources se substituant à la subvention pour charges de service public ; la mise en place du « plafond mordant » sur les ressources des agences de l'eau (2,28 milliards d'euros en 2018, puis 2,105 milliards à partir de 2019), assortie d'une ponction de 200 millions d'euros sur la trésorerie des agences ; le rattachement au programme 159 des crédits de l'économie sociale et solidaire, soit 12,9 millions d'euros consommés en 2018, et du Commissariat général au développement durable (CGDD), à hauteur de 13,7 millions d'euros, ce qui nuit fortement à la lisibilité de ce programme auparavant constitué des seules subventions pour charges de service public de Météo France, de l'Institut national de l'information géographique et forestière (IGN) et du Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement (CEREMA).

La désinvolture avec laquelle vous traitez les crédits de l'écologie s'est fait jour dès la discussion du PLF en séance publique. En effet, ces crédits ont été, comme à l'habitude, mis à contribution par les amendements présentés par le Gouvernement en seconde délibération. Ces amendements, je le rappelle, taillent à l'aveuglette dans les crédits, afin de compenser les mesures nouvelles adoptées au cours de la discussion. Entre le PLF et la loi de finances rectificative (LFR) pour 2018, ce sont quelque 12 millions d'euros qui ont été escamotés sur l'ensemble de la mission, dont 4,7 millions pour le seul programme Prévention des risques.

En gestion, ces crédits ont de nouveau fait l'objet d'annulations, qui représentent, en crédits de paiement hors titre 2 : – 2,4 % pour le programme Paysages, eau et biodiversité ; – 1,1 % pour le programme Expertise, information géographique et météorologie ; – 5,3 % pour le programme Prévention des risques ; – 2,6 % pour le programme Conduite et pilotage des politiques de l'écologie, du développement et de la mobilité durables.

Vient ensuite la sous-exécution proprement dite. Monsieur le ministre, comment justifiez-vous que les crédits du programme Paysages, eau et biodiversité n'aient été exécutés qu'à hauteur de 88 %, et les crédits du programme Prévention des risques à hauteur de 94 % ? Pourquoi l'autorisation budgétaire délivrée par le Parlement est-elle prise, j'insiste sur le mot même s'il ne vous plaît pas, avec tant de désinvolture ? Pourquoi les politiques publiques de l'écologie ne sont-elles pas au rendez-vous, alors que personne ne conteste leur absolue nécessité ?

Puisque l'heure est au « conseil de défense écologique », je vous invite à prendre exemple sur votre homologue chargée de la défense. Elle, au moins, ne prend pas à la légère les crédits qui sont affectés à son département ministériel et peut se prévaloir d'un taux d'exécution proche de 100 %. Mais il se peut que vous soyez contraint par d'autres règles.

J'en viens au thème de mon évaluation, qui porte sur les réductions d'effectifs au sein du ministère de la transition écologique et solidaire et de ses opérateurs. Alors que ce ministère est essentiel, il subit depuis des années des coupes gravissimes.

La principale de ces règles s'énonce simplement : moins 2 %. C'est le rythme annuel de la baisse des effectifs du ministère : 801 équivalents temps plein annuel travaillé (ETPT) exécutés en 2018, pour arriver à un effectif de 40 250 ETPT, soit 3 300 de moins qu'en 2015. Le plafond d'emplois fixé en loi de finances initiale est systématiquement sous-exécuté, année après année. Entre 2009 et 2018, les effectifs du ministère de la transition écologique et solidaire sont passés de 67 261 ETPT à 40 250 ETPT, ce qui représente plus de 27 000 ETPT perdus. Si vous n'êtes pas responsable d'une situation dont vous avez hérité, je constate que vous n'inversez pas cette tendance malheureuse.

En outre, la Cour des comptes relève, en 2018 comme en 2017, une tendance à la déqualification des personnels du ministère. Entre 2014 et 2018, par rapport aux schémas d'emplois initiaux, le ministère a détruit 521 emplois de catégorie A, au-delà des cibles, tandis qu'il créait 873 emplois de catégorie C. Monsieur le ministre, comment expliquez-vous cet extravagant malthusianisme ? Comment comptez-vous faire sans l'appui d'ingénieurs et de techniciens hautement qualifiés et expérimentés ? En matière de prévention des risques, le nombre d'inspections des sites classés a été divisé par deux en quinze ans. Le ratio moyen est actuellement d'un inspecteur pour 420 sites.

Moins 2 %, c'est également la règle d'airain à laquelle sont soumis les opérateurs. Pourtant, dans les agences de l'eau, à l'AFB, à Météo France, à l'IGN, au CEREMA, à l'Institut national de l'environnement industriel et des risques (INERIS), les plafonds d'emplois en baisse sont souvent sous-exécutés pour préserver un minimum de crédits d'investissement. Ce qui est en jeu ici, c'est un capital humain et intellectuel inestimable – il suffit d'aller visiter ces opérateurs pour le savoir –, c'est la préservation et la transmission des savoirs et des compétences, c'est aussi leur maintien dans la sphère publique.

S'il est un domaine où le tout-marché a démontré qu'il ne pouvait absolument rien réguler, c'est bien celui de la biodiversité, de la pollution et du dérèglement climatique, qui ne peuvent pas obéir à la logique du court-termisme. En la matière, l'intérêt général est entièrement tributaire de l'engagement des pouvoirs publics. Au regard de l'exécution des crédits de l'écologie en 2018, vous conviendrez, monsieur le ministre, que nous sommes très loin du compte ! Notre maison brûle de plus en plus vite, et vous n'apportez que des seaux d'eau – dont vous avez pris le soin de vérifier qu'ils ne coûtent pas trop cher – pour tenter d'éteindre l'incendie. Comme c'est insuffisant pour répondre à l'urgence que vous dénoncez vous-même !

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Chaque année, la commission des affaires étrangères examine, à l'occasion du projet de loi de finances, les instruments, les objectifs et les modalités de la diplomatie environnementale.

En tant que rapporteur pour avis, j'ai fait le choix à l'automne dernier de consacrer mes travaux à la lutte contre l'érosion de la biodiversité mondiale et à la préservation des espèces sauvages menacées. Les experts de l'IPBES et les services écosystémiques ont confirmé, au début du mois de mai, à l'issue de leur septième session plénière, ce que nous redoutions tous. L'effondrement de la diversité biologique mondiale en cours est sans précédent dans l'histoire de l'humanité par sa vitesse et l'ampleur de ses impacts. Une espèce sur huit, animale ou végétale, serait ainsi menacée de disparition à brève échéance.

La question de la lutte contre l'érosion de la diversité biologique à l'échelle européenne et internationale est l'un des six grands axes du plan biodiversité présenté par le Gouvernement au mois de juillet 2018.

Monsieur le ministre d'État, dans quelle mesure cette ambition s'est-elle traduite dans les faits, et de quelle manière la question de la protection de la nature est-elle portée par le Gouvernement à l'échelle internationale ?

Le projet de pacte pour l'environnement a connu très récemment un sérieux revers puisque l'idée d'un texte juridiquement contraignant a été repoussée à Nairobi le 23 mai dernier, ce que je regrette profondément. Il existe donc un dangereux décalage entre l'urgence écologique d'une part, et l'inertie onusienne d'autre part. Que compte faire la France sur ce dossier, avec en ligne de mire la conférence internationale de 2022 pour les cinquante ans du premier sommet de la terre qui s'était déroulé à Stockholm en 1972 ?

De même, comment le Gouvernement se prépare-t-il aux prochains rendez-vous internationaux sur la biodiversité que sont d'abord le Congrès mondial de la nature, qui se déroulera à Marseille en 2020, et la Conférence des parties de la convention des Nations unies sur la diversité, qui se tiendra en Chine, en 2020 également ?

J'avais suggéré dans mon rapport une mise sous tension accrue de notre réseau diplomatique sur ces questions spécifiques, comme cela avait été le cas à la veille de la COP21 en 2015 sur la problématique du dérèglement climatique. La présence d'agents du ministère de la transition écologique et solidaire dans les différentes représentations françaises à l'étranger a-t-elle été renforcée ? Si oui, pourriez-vous nous préciser quels postes diplomatiques ont été ciblés en priorité ?

De quelle manière le Gouvernement compte-t-il impliquer les acteurs du secteur privé dans la lutte en faveur de la protection de l'environnement ? Comment pouvons-nous mobiliser l'ensemble de la société civile afin de provoquer un changement réel dans nos comportements quotidiens et adapter notre modèle économique aux exigences environnementales ?

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Le programme 174 comporte trois finalités : avoir une politique énergétique qui répond aux impératifs de coûts, de sécurité d'approvisionnement et d'utilisation rationnelle de l'énergie ; lutter contre le réchauffement climatique ; garantir la préservation des droits pour les anciens mineurs. Il comprend seize dépenses fiscales pour un montant estimé de 2 581 millions d'euros en 2018. Cela concerne le crédit d'impôt pour la transition énergétique (CITE) pour 60 % de dépenses, mais également des taux réduits de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE), notamment pour les installations intensives en énergie. Cependant, dès l'automne 2017, j'avais souligné dans mon rapport budgétaire que l'aide apportée aux industries gazo-intensives n'était pas compatible avec le respect de la trajectoire du prix du carbone. Les mouvements de protestation récents, à la suite de la prévision d'augmentation de cette taxe, montrent à quel point le sujet est sensible.

Les Français ne sont pas en majorité opposés à la transition écologique – et je pense que les dernières élections européennes l'ont démontré encore une fois –, mais ils veulent une transition juste et équitable. Ces exonérations sans contrepartie qui existent depuis plusieurs années, sans parfois une réelle volonté de trouver des solutions plus respectueuses de l'environnement, posent réellement question. Il me semble opportun de sortir de cette politique d'aide ponctuelle – en la matière, le chèque énergie en est une – pour investir en se projetant dans l'avenir, par exemple grâce à des mesures en faveur de la rénovation énergétique des bâtiments, et en soumettant les exonérations de TICPE à des efforts réels d'engagement vers une transition aux énergies vertes. C'est d'ailleurs ce que soulignent le CGDD et la Cour des comptes dans leurs rapports respectifs.

Certes, apporter une aide à des secteurs économiques faisant état de difficultés dans un contexte de concurrence internationale comme l'agriculture s'avère légitime, mais des mesures pour améliorer leurs performances énergétiques pourraient apparaître plus rentables à long terme. C'est pourquoi, je souhaiterais savoir si une réflexion concrète a déjà été engagée et, le cas échéant, en connaître le résultat.

Il est nécessaire que notre action soit davantage visible en termes de transition écologique. S'agissant du développement durable, vous connaissez mon attachement à l'Agenda 2030, qui me semble constituer un narratif extrêmement clair pour tous les Français.

Le forum politique de haut niveau se déroulera une nouvelle fois au mois de juillet prochain. La France sera-t-elle présente et à la hauteur pour cet événement ? Au mois de septembre, nous fêterons les quatre ans de l'Agenda 2030 où les chefs d'État sont normalement attendus. Le Président de la République y présentera-t-il le livret politique en cours de rédaction par plusieurs organisations non gouvernementales, entreprises et parlementaires ?

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C'est moins le rapporteur général de la commission des finances que le président du Conseil national de la montagne qui va s'exprimer. Mais comme la montagne couvre une grande partie du territoire, cela revient exactement au même...

Je souhaite vous interroger sur le « fonds Barnier », dont les recettes sont plafonnées à 137 millions d'euros en 2018. Les dépenses engagées en 2018 se sont élevées à 174 millions d'euros, ce qui représente une baisse importante par rapport aux années précédentes. La trésorerie de ce fonds est-elle suffisante pour maintenir un niveau de dépenses acceptable dans les années à venir, ou faut-il au contraire prévoir un amenuisement de ses dépenses ?

Comme j'habite dans ces régions et que je connais les effets du réchauffement climatique, j'ai un doute. Je vois de plus en plus de phénomènes géomorphologiques qui sont liés à ces problèmes-là et je m'inquiète un peu de cette situation qui a d'ailleurs été très bien analysée dans le récent rapport de la Convention alpine consacré à l'état des Alpes.

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François de Rugy, ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire

Monsieur Coquerel, je crois que nous pouvons être d'accord sur le constat. Vous avez fait référence aux documents des scientifiques de l'IPBES sur la biodiversité, qui sont l'équivalent de ceux du GIEC sur le climat. C'est d'ailleurs la France qui a souhaité accueillir cette année cette rencontre des scientifiques sur la biodiversité pour mettre le projecteur sur cette réalité, souvent moins connue, moins perçue par nos concitoyens, et pas simplement en France, que la question du climat. J'ai souhaité par ailleurs que ces scientifiques, comme les représentants du GIEC d'ailleurs, viennent présenter leur rapport et leur alerte devant les ministres de l'environnement du G7 que j'ai réunis à Metz – un certain nombre d'entre vous étaient présents du reste. Il s'agissait de commencer nos travaux par la réalité du constat scientifique sur l'écologie. Je suis attaché à une approche scientifique de l'écologie. J'en appelais tout à l'heure à une certaine rigueur sur les chiffres budgétaires, et bien il convient de faire de même sur les réalités scientifiques de l'écologie. Comme moi, vous savez que, bien souvent, dans les débats politiques, médiatiques, on s'envoie à la figure des anathèmes qui ont peu à voir avec les réalités, et cela ne nous permet pas toujours de faire les bons choix.

Le taux d'exécution du budget de l'écologie est très élevé. Je ne sais pas ce qui vous permet d'affirmer le contraire. S'agissant du programme Paysages, eau et biodiversité dont vous avez parlé, le taux de consommation des crédits est de 97 %, ce qui est assez élevé. Concernant la loi de finances rectificative qui, on le sait, fait toujours les ajustements, 278,4 millions d'euros supplémentaires ont été ouverts, dont 115,5 millions d'euros sur le programme 198 Régimes sociaux et de retraite des transports terrestres, dont vous n'avez pas parlé.

C'est pour moi l'occasion de vous dire, car c'est un élément d'évaluation budgétaire extrêmement important, que dans le budget de mon ministère, qui s'élève à 34 milliards d'euros, 5 milliards d'euros sont consacrés au financement des déficits des régimes de retraite, principalement les régimes liés aux transports – ceux des cheminots de la SNCF, de la RATP, et dans une moindre mesure ceux du transport routier et de la mer. Peu de gens savent que ces chiffres ne sont pas intégrés dans le déficit général du régime de retraite.

J'imagine, monsieur Coquerel, que vous n'êtes pas défavorable à ces mesures et au fait qu'on n'a pas d'autre choix que de débloquer 115,5 millions d'euros, sans quoi les retraités ne percevraient pas leur pension. Ce sont donc des dépenses obligatoires, qui vous l'imaginez bien, rendent les choix politiques sur ce budget beaucoup plus limités que dans d'autres secteurs. Cela montre, mais nous ne serons sans doute pas d'accord sur ce point, combien il est urgent de faire converger nos régimes de retraite vers un véritable régime de retraite universel et solidaire qui permette à tous les retraités, qu'ils soient dans un régime démographiquement et structurellement déficitaire ou pas, d'avoir les mêmes règles de calculs – intégrant bien sûr, en toute transparence, des critères de pénibilité dans le secteur des transports et dans le secteur de l'énergie. Il faut éviter que les régimes de retraite soient différents pour des personnes qui font exactement le même métier, selon qu'elles sont par exemple chauffeurs de bus à la RATP ou dans un réseau de transports urbains en province. Je souhaite que l'Assemblée nationale ait bien cela à l'esprit lorsque nous discuterons, dans les mois qui viennent, du budget et des retraites.

Le programme 174 Énergie, climat et après-mines dont a parlé Mme De Temmerman s'élève à 88,5 millions d'euros – ce sont essentiellement des sujets liés aux anciens mineurs. Par ailleurs, 77,4 millions d'euros ont été débloqués pour financer la prime à la conversion. Nous assumons. Il a fallu abonder ce programme parce que la mesure a eu davantage de succès que prévu. Mais des financements ont pu être annulés. Ce sont ainsi 594,6 millions d'euros qui l'ont été sur le programme Transition énergétique. Vous me répondrez peut-être, monsieur Coquerel, que c'est le signe qu'on fait moins pour la transition énergétique. Non, on n'a jamais fait autant, ce qui déplaît d'ailleurs à M. Aubert qui n'a pas la même lecture que vous des mêmes crédits, et qui trouve qu'on dépense trop.

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François de Rugy, ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire

En l'occurrence, on a pu dépenser moins, non parce qu'on a fait moins d'éoliennes ou qu'on en a fait tomber...

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François de Rugy, ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire

..mais parce que les subventions étaient moins élevées du fait des prix de marché.

S'agissant des effectifs du ministère de la transition écologique et solidaire, oui ils baissent en moyenne de 2 % par an depuis un certain temps. Au passage, je regrette d'ailleurs que ce ministère change souvent de nom car cela ne permet pas d'éclairer les Français sur ses domaines de compétences. En l'occurrence, il recouvre l'énergie, les transports, la mer, l'environnement, la prévention des risques, etc. Autrefois, on parlait du « ministère de l'équipement », voire de l'Hôtel de Roquelaure. À l'origine, c'était le ministère des travaux publics. Nous assumons, comme d'autres gouvernements avant nous, qu'on dépense moins dans notre pays pour les routes, contrairement à ce qu'on a fait à une certaine époque, qu'on dépense moins pour construire des aéroports, des ports, des voies fluviales parce que l'on considère que notre pays est bien équipé et que la priorité aujourd'hui doit être donnée à l'entretien. Il y a donc moins de personnels qui s'occupent des routes, et vous pouvez le vérifier. De même, Voies navigables de France a vu ses effectifs baisser.

En revanche, je ne peux pas vous laisser dire qu'on aurait baissé la garde sur le contrôle des installations classées. En 2014, les effectifs étaient de 1 615, et ils sont de 1 597 en 2018. Oui, il y a une petite baisse de dix-huit postes, mais 19 750 contrôles ont été effectués en 2014, contre 18 196 en 2019 ; 697 procès-verbaux ont été dressés en 2014, et 828 en 2019 ; le nombre de mises en demeure était de 2 167 en 2014, et de 2 109 en 2019. Vous le voyez, nous n'avons pas du tout baissé la garde, mais seulement fait quelques gains de productivité. Je considère que la productivité n'est pas un gros mot. On devrait se féliciter que les gens soient plus productifs. D'ailleurs, je crois que les agents sont fiers de pouvoir travailler mieux et plus efficacement.

Grâce au numérique, nous avons développé des outils de télédéclaration qui accélèrent et facilitent grandement le travail des instructeurs. Nous avons également optimisé les processus d'instruction. Croyez-moi, cela n'intéresse pas beaucoup les agents du ministère de faire des tâches très répétitives, de devoir donner des réponses à la chaîne sur des dossiers qui s'accumulent en raison de procédures non adaptées. En revanche, ils sont attachés à faire leur travail de contrôle dans de bonnes conditions.

Par ailleurs, nous avons eu recours à des contrôles délégués sur les installations les plus modestes réalisés par des organismes agréés. Peut-être cela ne vous plaît-il pas que l'on fasse appel à des organismes extérieurs, mais nous l'assumons. Ainsi, 6 200 contrôles ont été effectués, qui s'ajoutent aux contrôles dont j'ai parlé tout à l'heure.

M. Mbaye a évoqué de très nombreux sujets relatifs à la politique internationale de l'environnement, et je l'en remercie parce que c'est un engagement extrêmement fort de la France, et pas simplement du ministère de la transition écologique et solidaire.

Je sais que je ne convaincrai peut-être pas tout le monde. Nul n'est prophète en son pays : c'est un vieux principe qui se confirme dans le monde entier en matière d'écologie, et particulièrement en Europe. Nous sommes vus comme le pays leader des pays ambitieux, mais on ne peut rien faire seul. Je n'ai jamais cherché à dire que nous sommes les meilleurs, que nous sommes exemplaires, que nous sommes les champions, mais je dis seulement que nous sommes le leader des pays ambitieux. Je me suis battu dans une vie antérieure pour que l'environnement soit un axe fort de la diplomatie française ; aujourd'hui, c'est une réalité. Cela a commencé dans le précédent mandat avec la COP21 sur laquelle se sont beaucoup engagés François Hollande, le Président de la République de l'époque, et Laurent Fabius, son ministre des affaires étrangères, ainsi que ma prédécesseure Ségolène Royal. Ce mouvement s'est poursuivi, et le Président de la République Emmanuel Macron a souhaité que l'environnement soit plus que jamais un axe fort, ce qui se confirme aujourd'hui. C'est pourquoi nous allons faire de cette question un axe important du G7 réunissant les chefs d'État et de gouvernement à Biarritz, à la fin du mois d'août, comme nous l'avons déjà fait du G7 Environnement.

C'est nous qui avons souhaité organiser le congrès mondial de l'Union internationale pour la conservation de la nature en 2020 à Marseille, et nous sommes le premier pays d'Europe à avoir adopté une stratégie nationale de lutte contre la déforestation importée. Comme je l'ai dit tout à l'heure, c'est nous qui avons accueilli l'IPBES pour la présentation de son rapport mondial sur la biodiversité, et c'est le Président de la République qui a pris l'initiative des One Planet Summits auxquels nous continuons à participer – il y en a eu encore un récemment à Nairobi. Nous avons souhaité que tous les pays soient impliqués, et pas seulement les pays du Nord.

C'est encore nous qui avons défendu, au niveau européen, la mise en d'une forme de veto climatique sur les accords commerciaux. Nous le reconnaissons, nous n'avons certes pas été suivis par la majorité des pays européens, mais le Président de la République a voté, au nom de la France, contre la reprise de négociations commerciales avec les États-Unis en vertu de ce principe que nous avions édicté et que nous mettons en oeuvre. Il en ira de même avec le Mercosur si le Brésil vient à se retirer de l'accord de Paris, comme le président Bolsonaro, nouvellement élu, en a manifesté l'intention. Nous demandons d'ailleurs au Brésil de clarifier sa position par rapport à l'accord de Paris sur le climat.

Je pourrais vous donner d'autres exemples concernant notre action diplomatique en vue de la COP15 sur la biodiversité qui aura lieu en Chine. Avec Brune Poirson, nous sommes d'ores et déjà très mobilisés sur ces échéances.

Mme De Temmerman m'a interrogé sur les exonérations et les taux réduits de différentes taxes, comme la TICPE. Nous avons proposé, à l'automne dernier, de supprimer le taux réduit sur le gazole non routier. Souvenez-vous de tous les débats qui ont eu lieu à l'Assemblée nationale et dans le pays sur cette mesure et des mouvements de contestation. Nous avons souhaité stopper ce rattrapage. Je pense que cette question sera à nouveau débattue lors de l'examen du budget de l'année prochaine, car on ne peut pas justifier éternellement que le même carburant utilisé par d'autres engins soit moins taxé. Je souhaite, et je le dis en toute transparence, qu'on ne fasse pas les choses brutalement, car cela risque de susciter des réactions vives conduisant à des reculs. Il vaut mieux faire les choses par étapes, mais les faire durablement.

S'agissant du transport aérien, nous menons la bataille au niveau européen en faveur d'une taxation du kérosène à l'échelle internationale. Si nous ne parvenons pas à le faire à l'échelle mondiale dans le cadre de la révision de la convention de Washington, qui date de 1944, époque où on ne parlait pas, bien évidemment, de l'effet de serre, il convient qu'on puisse le faire au niveau européen.

S'agissant des industries électro-intensives qui sont parfois, disons-le, des industries « carbo-intensives », c'est-à-dire des utilisateurs intensifs d'énergies fossiles – et vous êtes élue d'un département où l'on sait ce que le mot sidérurgie veut dire –, il faut un système harmonisé, ou en tout cas convergent à l'échelle internationale. Il faut éviter de détruire notre industrie sur le sol européen, car cela reviendrait à délocaliser nos émissions de CO2, non à les baisser. C'est déjà le cas quand on importe de l'acier d'Asie : on importe aussi les émissions de CO2 qui d'ailleurs sont en général plus élevées que lorsqu'on produit de l'acier en Europe ou en France. Il en va de même avec l'aluminium ou d'autres produits industriels dont la fabrication est très énergivore.

Quant au chèque énergie, il faut reconnaître que c'est davantage une mesure de solidarité qu'une mesure écologique. Elle ne fait pas baisser les consommations, elle n'oriente pas vers les énergies les moins polluantes. Mais nous assumons ce dispositif – et je remercie le Parlement de l'avoir voté l'année dernière – qui permet de faire face aux augmentations du prix de l'énergie. Il est évident qu'à terme, nos engagements et nos moyens doivent être tournés principalement vers la transformation, et donc vers la baisse de nos consommations d'énergie. L'énergie qui coûte le moins cher, et celle qui pollue le moins, c'est celle qu'on ne consomme pas. Nous travaillons d'arrache-pied pour réduire les consommations, notamment celle des ménages.

Enfin, s'agissant des objectifs du développement durable, nous aurons l'occasion d'y revenir. Ils s'inscrivent effectivement dans la politique internationale que j'ai décrite en répondant à M. Mbaye.

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Monsieur le ministre, je vous remercie pour votre présence, car je sais qu'il n'était pas simple pour vous d'être là. Il est très important que vous viviez avec nous ce Printemps de l'évaluation, exercice que nous allons essayer d'améliorer année après année.

Je vous poserai trois questions.

La première porte sur une recommandation de la Cour des comptes dans sa note d'exécution budgétaire sur les fonds sans personnalité juridique, dont elle a fait un sujet majeur de son rapport de 2018. Que pensez-vous de la rebudgétisation de ces fonds ? Je pense notamment au programme Service public de l'énergie ou encore au compte d'affectation spéciale (CAS) Transition énergétique.

Ma deuxième question concerne l'indicateur 2.1 Émissions de gaz à effet de serre par habitant du programme 174 Énergie, climat et après-mines. Si les résultats ne sont pas trop mauvais, j'aimerais avoir des précisions sur cet indicateur qui mentionne le fait qu'en 2018 la consommation d'énergie primaire a diminué de 3,1 %, mais que les émissions liées à ces consommations ont augmenté de 3,5 %. Est-ce parce que l'énergie utilisée est différente ?

Ma troisième question a trait aux dépenses fiscales. Mme De Temmerman a évoqué celles qui sont défavorables à l'environnement. Pour ma part, je parlerai de celles qui sont utiles et très importantes dans votre ministère car elles atteignent près de 2 milliards d'euros, et plus particulièrement du CITE. Actuellement, c'est le nombre de ménages qui en bénéficient qui sert d'indicateur pour évaluer le CITE. Même si un excellent rapport sur l'obligation assimilable du Trésor « verte » a évalué de manière positive le CITE, votre ministère mène-t-il des travaux pour apprécier d'année en année l'efficacité de cette dépense fiscale ainsi que des autres dépenses fiscales de votre ministère, afin que les objectifs soient en adéquation avec nos objectifs environnementaux et l'impact environnemental de ces dépenses fiscales ?

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Ma question concerne la répartition de cette niche. On voit en effet que le CITE profite massivement aux classes moyennes et aux très hauts revenus, mais que les ménages à petits revenus ne l'utilisent pas beaucoup. Peut-être est-ce parce que le dispositif n'est pas assez incitatif pour ce public ou que celui-ci compte moins de propriétaires. Comptez-vous le rendre plus incitatif pour cette catégorie de population, qui habite souvent dans ce qu'on appelle les « passoires énergétiques » ?

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Le chèque énergie est attribué selon des critères de ressources. Il permet aux ménages les moins favorisés de payer leurs dépenses énergétiques. Ce dispositif, en forte augmentation à la suite des décisions du Gouvernement à l'automne 2018, avec plus de 3,6 millions d'euros de chèques envoyés, représente un montant programmé de 539 millions d'euros. Je souhaite appeler l'attention sur plusieurs points.

Premièrement, son taux d'usage semble assez faible, puisqu'à la fin de 2018, à peine 70 % des chèques ont été utilisés. Si ce n'est pas encore un taux d'utilisation définitif, ce chiffre est en deçà de ce que nous pourrions espérer compte tenu de la conjoncture, d'autant que nous ne connaissons pas la répartition de ce taux d'utilisation. Est-ce que ce sont les ménages les plus fragiles qui ont le taux d'utilisation le plus élevé, ce qui serait à mon avis souhaitable, voire rassurant, ou est-ce l'inverse ?

Deuxièmement, pour améliorer l'appropriation de ce dispositif par la population, où en sont vos réflexions sur la transformation du chèque énergie en une prime directement versée aux bénéficiaires ?

Troisièmement, le chèque énergie peut aussi être utilisé pour des travaux de rénovation énergétique. Si c'est le cas, il me semble que c'est une bonne chose, car cela permet in fine de baisser de façon pérenne les factures de chauffage des ménages. Sur les 384 millions d'euros payés, quelle part a servi à financer des travaux de rénovation énergétique ?

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Je souhaite vous interpeller sur la problématique de la transition énergétique dans les pays dits d'outre-mer.

Je commencerai par un élément de satisfaction et de soulagement – comme quoi tout arrive ! Il s'agit du maintien garanti de la péréquation tarifaire. Vous avez compris que l'électricité est un vecteur de développement économique et que son coût constitue un facteur déterminant de progression des zones non interconnectées. Je dois dire que je ne suis pas surpris que vous ayez été convaincu, compte tenu de votre passé de militant écologiste. Je vous demande solennellement aujourd'hui de vous engager sur la pérennisation de cette péréquation tarifaire sur le long terme.

Vous insistez avec force raison sur l'ampleur des moyens mobilisés en matière de transports afin de réduire l'empreinte carbone, en privilégiant notamment le train et le fluvial par rapport au transport routier. Dont acte. Mais alors, éclairez-moi sur la faiblesse structurelle des moyens dévolus à des objectifs aussi nobles dans nos territoires micro-insulaires pourtant fortement carbonés. Aujourd'hui, il est urgentissime et logiquissime d'affecter des moyens significatifs à l'émergence et au développement de transports maritimes bas-carbone dans nos territoires, pour une économie bleue – mais bleu propre et non bleu sale ! Ne pas saisir une telle opportunité historique constituerait une faute grave au regard du potentiel exceptionnel de nos régions potentiel qui pourrait faire de nous des territoires pilotes et d'excellence en la matière. Par exemple, nous devons encourager concrètement le développement de navettes et de petits caboteurs à motorisation électrique rechargés par photovoltaïque. Enfin, le stockage de l'énergie est vital dans nos territoires non interconnectés, et nous devons, nous pouvons nous inscrire dans le développement des stations de transfert de l'énergie par pompage grâce à des retenues collinaires hautes et basses, avec un pompage de l'eau alimenté par l'éolien et le photovoltaïque et une restitution optimisée par le turbinage.

Vous le voyez, nous ne sommes plus au stade des lamentations ou du constat, mais à un stade avancé de propositions intelligentes, pertinentes et adaptées à notre contexte – je vous prie de m'excuser pour ce manque d'humilité mais c'est le cas. Il est grand temps de passer de la parole aux actes, notamment dans nos territoires.

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Si j'en avais eu le temps, j'aurais eu à coeur d'aborder avec vous l'enjeu et l'urgence d'une loi foncière. Je souhaite que le ministère de l'environnement soit vraiment partenaire et proactif sur les enjeux d'artificialisation et de partage des terres. Il est grand temps de prendre des mesures d'urgence pour prévenir les dérives qui précéderont forcément l'adoption future d'une loi.

Si j'en avais eu le temps, j'aurais parlé de ce que je trouve scandaleux, et aussi de votre indifférence. En effet, je n'ai pas obtenu de réponse ni à mes courriers ni à mes questions écrites sur l'abandon pur et simple des certificats d'économie de produits phytopharmaceutiques, seule mesure contraignante du plan Écophyto 2 que vous avez laissée en rade dans une ordonnance que j'ai dû attaquer en Conseil d'État.

Si j'en avais eu le temps, j'aurais parlé de mon désarroi de ne pas avoir pu faire adopter au moins l'expérimentation d'un label public de la responsabilité sociétale des entreprises pour faire des entreprises un des moteurs de la transition sociale et écologique.

Mais je concentrerai mon propos sur le TICPE et sur ces 37 milliards d'euros dont seuls 20 milliards sont vraiment consacrés à la transition énergétique. Nous avons vu que l'acceptabilité de la TICPE était liée à sa réaffectation majoritaire en faveur de la transition énergétique. Je pense que son développement, son redéploiement, sa réaffectation multiple supposent également que nous justifiions son utilité pour cette transition, étant donné l'urgence que nous constatons tous. Je prendrai un exemple : votre majorité vient de refuser une avancée qui avait été adoptée au Sénat, qui prévoyait qu'une fraction très modeste de la TICPE vienne abonder les variations du versement transport – bientôt rebaptisé « versement mobilité » – pour les territoires à faible cotisation foncière des entreprises (CFE). « Vous n'avez qu'à augmenter la CFE », nous a répondu la ministre, ce qui est une sorte d'insulte aux territoires les plus déshérités, les plus ruraux et les plus périphériques. Nous aurions pu avoir une vraie solution en matière de péréquation, car il s'agit là de leviers importants. Je citerai un autre exemple : nous savons qu'aujourd'hui une véritable politique de rénovation de l'habitat qui permette de régler à la fois des problèmes de fin de mois et de fin du monde doit se chiffrer à environ 5 milliards d'euros.

Bref, il faut réaffecter complètement la TICPE pour au moins un tiers des recettes. Notre proposition, vous la connaissez déjà : le rétablissement de l'impôt de solidarité sur la fortune (ISF). Personne ne pourra expliquer que nous ayons rendu 5 milliards d'euros de flat tax et d'ISF aux privilégiés alors que nous sommes confrontés à une urgence qui concerne le commun de notre société.

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Monsieur Potier vous avez parlé 19 secondes de trop, ce qui vous a permis de recourir à un argument que je trouve très éloigné du sujet... mais je vous ai laissé le temps de poser votre question.

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Je voudrais évoquer l'impact de la contribution au service public de l'électricité (CSPE) sur le coût de l'énergie pour les ménages. La compensation est calculée sur le prix final de marché et l'État peut mal mesurer le niveau des charges de service public. La loi de finances prévoit une augmentation de 35 % des charges de dépenses de soutien aux énergies renouvelables électriques pour la période 2019-2022. Depuis la création de la CSPE en 2003, son taux n'a cessé d'augmenter ; la dépense représente aujourd'hui 154 euros en moyenne par foyer. Comment limiter la dégradation du pouvoir d'achat des ménages liée au poids de la CSPE ?

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Monsieur le ministre, est-ce l'effet du contrôle sur pièces et sur place ou le signe d'une certaine allergie au contrôle de l'exécutif par le Parlement ? Vous vous êtes montré particulièrement sensible à mon argumentation ! Je note avec satisfaction que vous n'avez pas cédé à la tentation de contester les chiffres de la CRE – sans doute faut-il y voir votre attachement à l'existence des autorités administratives indépendantes.

Vous avez esquivé ma question sur l'appel d'offres, lancé en 2018, qui a retenu seize projets photovoltaïques, éliminant tous les projets éoliens, ce qui prouve le manque de compétitivité de ce secteur. Je ne trouve pas que vous dépensez trop, mais que vous dépensez mal : la note pour l'éolien s'élève déjà à 9 milliards d'euros et il faudra dépenser encore 90 milliards d'euros. À ce stade, un diagnostic s'impose, d'autant que la facture d'électricité a augmenté de 40 % en dix ans et que les prix du carburant ne vont pas sans causer quelques problèmes.

Le coût de l'énergie éolienne que vous donnez est selon vous global. C'est faux. Vous ne prenez pas en compte le coût du raccordement des installations, que vous « turpisez », en le faisant prendre en charge par le tarif d'utilisation des réseaux publics d'électricité (TURPE) – un cadeau aux producteurs qui apparaît sur l'une des lignes de la facture des consommateurs. Par ailleurs, vous n'intégrez pas le coût du stockage de cette énergie intermittente – coût qui n'existe pas dans le nucléaire. Enfin, vous ne tenez pas compte des prix négatifs qui sont pratiqués lorsqu'il y a surproduction d'électricité éolienne et que vous êtes obligés de payer les personnes pour qu'elles l'achètent. Et je passe sur l'impact de l'éolien sur la valeur paysagère et patrimoniale, qui ne représente pas un coût budgétaire, mais financier.

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Il est vrai que les centrales nucléaires s'intègrent beaucoup mieux dans le paysage !

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Les rapports consacrés aux énergies intermittentes sont bien moins nombreux que ceux qui ont été publiés sur le nucléaire. Vous remarquez qu'il faut intégrer aux calculs le coût du grand carénage, mais dans ce cas, parlons des durées : l'estimation du coût du nucléaire se fait sur quarante ans de production, alors que les chiffres sur les électricités intermittentes portent sur vingt ans. Il convient donc de rapporter ces 55 milliards d'euros sur vingt ans aux 60 à 80 milliards d'euros sur quarante ans, sachant que l'éolien permettra de produire cinq fois moins d'électricité que le nucléaire.

La différence de prix de l'éolien en mer tient selon vous à des raisons géographiques. Mais le rapport étant de un à trois, j'estime qu'il fallait refuser de renégocier et déplacer l'ensemble des projets dans la zone de Dunkerque.

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Monsieur le ministre, vous ne m'avez pas convaincu en citant des augmentations de crédits, dont certaines ne relèvent d'ailleurs pas de ma mission. Le taux d'exécution du programme Paysages, eau et biodiversité est bien de 88 %, les crédits atteignaient en LFR 150,8 millions d'euros – vérifiez vos chiffres ! Les annulations en crédits de paiement sont bien respectivement de 2,4 %, 1,1 %, 5,3 % et 2,6 % pour les quatre programmes qui m'intéressent.

Vous ne pouvez tout expliquer par la productivité et la question des retraites, dont toute la fonction publique est redevable. Vous avez poursuivi la diminution des ETP dans un ministère où les besoins augmentent. Ce n'est pas la productivité qui est en cause dans la baisse des effectifs de Météo France : la réalité, c'est que vous fermez des centres départementaux. Je vous invite à rencontrer la direction, qui vous tiendra sans doute le même discours qu'à moi. De la même manière, les effectifs à l'INERIS sont en baisse – votre ex-directeur m'a donné les chiffres – et l'on ne compte plus qu'un inspecteur pour 420 sites. Les responsables vous ont alerté sur les risques encourus.

S'agissant de l'éolien en mer, je précise que je ne pense pas que le nucléaire soit une solution. J'estime, monsieur Aubert, qu'il faut, pour comparer les prix des deux énergies, tenir compte du coût du démantèlement des centrales. Vous expliquez que l'on peut développer l'éolien en mer sous réserve que les éoliennes soient installées à plus de 50 kilomètres des côtes ; cela est exclu pour les éoliennes posées, qui doivent l'être à moins de 50 mètres de profondeur.

Pourquoi atteint-on dans les appels d'offres un prix de 144 euros le mégawattheure, alors qu'il est de 60 euros le mégawattheure ailleurs en Europe ? Parce que nous n'avons pas de filière industrielle, à la différence d'autres pays où l'État a pris ses responsabilités, repéré les zones, planifié l'usage maritime. De ce point de vue, le fait que General Electric s'apprête à abandonner le secteur, mettant en péril quatre des huit sites aujourd'hui repérés, sans qu'une filière industrielle puisse faire face à cette défection m'inquiète considérablement. Le Grenelle de l'environnement prévoyait une capacité de 6 gigawatts en 2020, elle sera de zéro l'an prochain : le bilan est très mauvais.

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Nous n'avons pas tous la même analyse que M. Aubert. Il convient d'intégrer dans les coûts du nucléaire celui du démantèlement, mais aussi ceux de la prolongation des centrales et des modifications « post-Fukushima », ceux liés à la mise en oeuvre des recommandations de l'Autorité de sûreté nucléaire et à la gestion des déchets. Ce sont tous ces coûts, pour lesquels existent différents chiffrages, qu'il convient de prendre en compte. Mais c'est un débat en soi, qu'il serait difficile d'ouvrir à ce stade.

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Je profite de cette opportunité pour remercier les collègues qui m'ont accompagné dans le combat contre le projet de la Montagne d'or – il fut difficile, mais le résultat en valait la peine. Je tiens aussi à remercier le ministre, qui s'est engagé à nos côtés, comme d'autres membres du Gouvernement.

Nous devons désormais assurer le service après-vente. Je vous invite, monsieur le ministre, à vous pencher sur les rapports qui proposent des solutions alternatives. Je pense notamment à l'exploitation de nos ressources en eau – la Guyane est l'un des trois territoires au monde les mieux dotés en eau douce renouvelable disponible par habitant. Cette ressource pourrait constituer un levier de développement économique, à condition que nous respections l'obligation de labelliser les eaux de Guyane, en les débarrassant des pollutions de toute nature. Je compte sur votre prochaine venue pour annoncer une action de l'État visant à éradiquer l'orpaillage illégal. Le mercure déversé dans les eaux devient du méthylmercure, qui provoque chez les Amérindiens des comportements suicidaires.

Il conviendrait de mieux encadrer la chimie des industries minières. J'ai notamment proposé que l'on remplace les techniques utilisant le cyanure par la lixiviation au thiosulfate, laquelle ne permet certes pas de récupérer autant d'or, mais est moins polluante. Il faut repositionner les intérêts de la Guyane dans le cadre de la future révision du code minier, et bien sûr accompagner ce territoire dans l'exploitation de ses ressources naturelles – forêt, eau, biodiversité –, qui pourrait en faire un carrefour mondial d'excellence.

Je n'entends pas vous imposer une feuille de route, monsieur le ministre, mais vous suggérer quelques pistes de réflexion. Il ne faut pas que la trajectoire 5.0, lancée par la ministre des outre-mer, reste un voeu pieux ; nous devons joindre le geste à la parole.

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Lutter contre les inégalités, faire face aux défis climatiques, mettre fin à l'extrême pauvreté sont trois objectifs de l'agenda 2030 autour desquels les citoyens peuvent se rassembler. Il se trouve que le Conseil national de l'information statistique a publié à la mi-mai 2018 un tableau de bord comportant 98 indicateurs de suivi des 17 objectifs de développement durable. Ceux-ci me semblent plus pertinents et plus lisibles que nos indicateurs budgétaires actuels. Leur utilisation permettrait de renouer le dialogue sur la taxe carbone : ne serait-il pas judicieux de creuser cette piste ?

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François de Rugy, ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire

En m'interrogeant sur le « fonds Barnier », le rapporteur général a posé une question qui dépasse la problématique montagnarde qui lui est chère, car elle soulève celle de l'évaluation budgétaire.

Le « fonds Barnier », alimenté par une taxe sur les contrats d'assurance – la garantie catastrophes naturelles – permet de financer, non pas la réparation des dégâts, mais la prévention des risques. Celle-ci peut prendre des formes très variées, elle est essentielle. Selon les chiffres consolidés des compagnies d'assurance, on dépense en France dix fois plus pour réparer que pour prévenir, alors que l'intérêt général voudrait que l'on soit dans un rapport inverse. Nous devons renforcer la lutte contre les causes du dérèglement climatique, mais hélas nous adapter aussi à ses effets déjà visibles.

Les recettes du fonds sont plafonnées à 131,5 millions d'euros : cet écrêtement vers le budget général est dû au fait que, pendant longtemps, les dépenses étaient inférieures aux recettes et que la trésorerie était importante. La tendance s'est inversée, avec la hausse des dépenses permettant de financer les projets de prévention, mais aussi les programmes d'actions de prévention des inondations, cofinancés par les collectivités locales. J'invite le Parlement à travailler et à faire des propositions sur les besoins de financement de la prévention des risques.

Cela soulève la question récurrente des taxes affectées, abordée par M. Potier à propos de la TICPE. J'ai été moi-même membre de cette commission pendant cinq ans, et je connais le débat opposant à l'universalité budgétaire l'affectation des taxes. Bien que les Français soient attachés au principe de l'universalité, les taxes affectées sont nombreuses et ont un aspect pédagogique que nos concitoyens apprécient. C'est ainsi que les taxes d'aéroport financent l'ensemble du fonctionnement des aéroports, jusqu'aux aiguilleurs du ciel. Elles sont plus élevées qu'ailleurs : 50 % du billet contre 30 % du billet en Suède, pour prendre cet exemple... Il semble fort probable que les impôts et les taxes affectées continueront longtemps de coexister.

La TICPE, monsieur Potier, ne sera jamais totalement affectée, elle a d'ailleurs été créée bien avant toute politique écologique visant à réduire la part des énergies fossiles. Elle abonde le budget général, finançant ainsi l'éducation nationale ou la police. Comme l'a noté le Président de la République à Gréoux-les-Bains, comment ferait-on pour financer l'éducation nationale ou la police s'il ne devait plus y avoir que des taxes affectées ? Les justiciables devraient-ils payer directement la justice ? Il faut, dans ce domaine, garder raison et accepter qu'il existe des taxes affectées et d'autres qui abondent le budget général.

Mme Auconie m'a interrogé sur le chèque énergie. Le taux de recours, assez faible en 2018, devrait être de 80 % en 2019. Dans la mesure où le chèque énergie sert d'abord à payer les factures, les montants consacrés aux travaux sont peu élevés. Mais d'autres dispositifs existent en la matière.

Je dirai à M. Nilor que je me réjouis de voir les propositions l'emporter sur les lamentations. C'est souvent ce dernier discours qui prévaut dans l'écologie : c'est bien dommage, car il finit par décourager d'agir.

Les dépenses consacrées aux zones non interconnectées par mon ministère représentent 1,6 milliard d'euros. C'est là un effort de solidarité nationale que je trouve normal. Les Français sont attachés à ce que tout le monde, sur tout le territoire, paie le même prix, quels que soient les coûts de production ou de raccordement. M. Aubert a évoqué le TURPE : le réseau sert bien à tous, aux producteurs comme aux consommateurs. Autrefois, on faisait payer le coût du raccordement de l'installation d'énergie renouvelable au réseau. C'était absurde. Si le coût de raccordement pour l'habitat isolé n'était pas mutualisé, le montagnard, cher au rapporteur général, verrait le coût de son abonnement grimper en flèche ! M. Castellani n'a pas soulevé la question, mais nous en avons déjà discuté tous deux : si l'on faisait payer aux Corses le coût réel de production d'électricité – l'île serait de ce point de vue indépendante –, la facture serait multipliée par cinq, bien loin des 5,9 % de hausse récente ! La politique énergétique doit être une politique nationale, avec une solidarité à l'égard des territoires, notamment insulaires. Nous maintiendrons durablement ce système de péréquation tarifaire.

En revanche, il ne faut pas que cela incite à reconduire ad vitam æternam les schémas du passé. Les centrales thermiques – au fioul, au charbon ou même au gaz – dominent dans les îles. Nous devons trouver des solutions pour y développer les énergies renouvelables, grâce, là encore, à la solidarité nationale.

Je suis prêt à examiner la situation des transports en commun outre-mer. Je crois savoir qu'en Martinique, l'État a subventionné un site propre.

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François de Rugy, ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire

Il pourra être utilisé demain par des bus roulant au gaz, ou même à l'électricité. Les choix qui sont faits dans d'autres territoires ne vont pas sans poser question.

Madame Peyrol, le CAS Transition énergétique était autrefois alimenté par la CSPE. Ce n'est plus le cas, ce qui me permet d'inviter M. Aubert à effacer son tweet d'il y a quatre jours : « + 40% de facture dû aux #ENR en 10 ans ». Une telle erreur ne peut s'expliquer par sa méconnaissance du sujet... La CSPE ne finance plus les énergies renouvelables depuis plusieurs années ; le CAS Transition énergétique est financé, M. Potier s'en réjouira, par une partie des recettes de la taxe carbone, ce qui est vertueux du point de vue écologique.

Nous avons eu le débat sur l'éolien – une obsession de M. Aubert ; j'assume la politique de développement des énergies renouvelables. Je ne veux pas mentir aux Français. On ne peut pas leur dire d'un côté que nous devons avoir une politique industrielle dans le domaine de l'énergie et ne pas assumer que des emplois seront supprimés dans certaines filières. Effectivement, General Electric se voit contraint de supprimer des emplois en raison de la forte contraction du marché mondial des turbines à gaz ; voulez-vous voir le territoire couvert de turbines à gaz ? Ne mentons pas aux ouvriers ou aux ingénieurs de Belfort ! Mais ce que personne ne dit, c'est que General Electric a choisi la France pour produire les éoliennes à destination de l'Europe et de l'Amérique du Nord. Lorsqu'il y aura un projet éolien offshore, que cela plaise ou non à M. Trump, les éoliennes seront produites à Cherbourg et à Saint-Nazaire !

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François de Rugy, ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire

Votre collègue Mme Panot a menti dans l'hémicycle.

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François de Rugy, ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire

Renseignez-vous ! L'usine de fabrication de pales d'éoliennes installée à Cherbourg crée des emplois. Il est certain que moins d'emplois seraient créés si nous devions mener la politique voulue par M. Aubert ! L'éolien fait vivre 18 000 personnes, cette filière industrielle compte de nombreux sous-traitants, dont certains travaillaient autrefois pour l'automobile et se sont diversifiés. L'usine de Saint-Nazaire est en difficulté car les projets offshore n'ont pas pu sortir ; lorsque ce sera le cas, elle redémarrera, et de nombreux emplois seront créés dans cette région industrielle, fière de fabriquer, au même titre que des bateaux, des éoliennes. Les Chantiers de l'Atlantique n'ont-ils pas une unité spécialisée dans les constructions offshore, qu'elle exporte, notamment en Allemagne ?

Madame Peyrol, les comptes créés à la Caisse des dépôts et consignations seront soldés et clos lorsque les dernières opérations seront finalisées. Nous y travaillons. Il y aura bien une rebudgétisation, comme vous le souhaitez. Mais cette simplification du circuit de paiement nécessite en amont une « purge » des flux financiers résiduels. Elle est programmée et engagée.

Alors qu'elles étaient en hausse en 2017 – nous l'avons déploré –, les émissions de CO2 ont diminué en France en 2018, et pas uniquement par habitant, mais également globalement. Nous en aurons la confirmation en juillet, mais un institut statistique européen a déjà publié ses conclusions pour toute l'Europe. Je vous laisse juge, madame Peyrol, de l'origine de ces fluctuations – la hausse était-elle de notre faute ? La baisse est-elle liée à notre action ? Je laisserai également MM. Aubert et Coquerel y réfléchir...

Madame Cariou, vous le savez, le CITE a été légèrement recentré. Il a donc un peu baissé en volume. Nous ne disposons pas encore des données pour 2018 – nombre de bénéficiaires et montants – car les Français viennent tout juste de finaliser leur déclaration de revenus. Ce crédit d'impôt n'est pas une niche fiscale, c'est-à-dire un dispositif permettant d'échapper à l'impôt ou de bénéficier d'un taux très réduit d'impôt au regard de son niveau de revenu. C'est une aide aux travaux d'efficacité énergétique, qui représente en moyenne environ 1 000 euros par demandeur hors foyers modestes et très modestes, pour lesquels la moyenne est de l'ordre de 9 000 euros. C'est donc un outil important de justice fiscale.

Vous avez raison, nous devons rendre le système encore plus juste socialement et plus efficace écologiquement. Le travail interministériel est en cours, mais il est plus facile de le dire que de le faire ! Actuellement, deux dispositifs cohabitent : les aides de l'ANAH, qui représentent 400 millions d'euros à destination exclusive des ménages modestes, et le CITE. Une solution – qui n'est pour l'instant qu'une hypothèse de travail – pourrait consister en une prime pour les ménages modestes et très modestes : cela permettrait de déclencher les travaux sans avoir à avancer les fonds, contrairement au crédit d'impôt, qui contraint les contribuables qui en bénéficient à faire cette avance. La prime serait octroyée sous conditions de revenus, ce qui donne lieu à de nombreuses discussions – on se considère toujours comme le pauvre de l'autre. Qu'est-ce qu'un ménage modeste ou très modeste ? Qu'entend-on par classe moyenne ? Nous devons y être attentifs, afin de ne pas réduire l'engagement des travaux d'efficacité énergétique.

Monsieur Potier, sur la loi foncière, comme sur les certificats d'économie de produits phytopharmaceutiques, je vous ai entendu, mais nous sommes loin de l'évaluation budgétaire ! Je suis tout à fait prêt à discuter à nouveau avec vous de nos efforts pour réduire l'utilisation des produits phytosanitaires. Mais je vous rappelle que nous avons réformé la redevance pour pollutions diffuses et que ce n'est pas passé comme une lettre à la poste... Beaucoup de députés de la majorité ont fait l'objet de très fortes pressions des organisations agricoles. Je ne sais pas si vous avez soutenu cette mesure, car vous avez voté contre le budget – ce qui peut se comprendre, compte tenu de votre position politique. La réforme visait à réduire l'utilisation des produits phytosanitaires et à financer des actions en faveur de l'agriculture biologique et de la biodiversité.

Concernant la taxe carbone, je vous ai, en partie, répondu.

Puisque Mme la présidente vous a laissé 20 secondes supplémentaires pour en parler, et même si le sujet est assez éloigné de ceux que traite le ministère de l'écologie, j'aborderai l'ISF, Je n'avais pas compris que les recettes de l'ISF étaient fléchées, et encore moins qu'elles alimentaient le ministère de l'écologie ! Arrêtons de nous jeter des affirmations à la figure... Ces 3,5 milliards – et non 5 milliards comme vous le dites – ne peuvent pas tout financer. Je ne sais pas si vous étiez solidaire de votre présidente de groupe, mais elle a milité avec acharnement contre la taxe carbone, alors qu'il s'agissait de recettes concrètes pour alimenter le budget de l'État, et notamment les actions de transition écologique. Son rendement ne progresse donc plus depuis 2013. C'est celui voté par deux majorités différentes, dont une à laquelle vous apparteniez. Nous en débattrons à l'occasion de la Convention citoyenne.

En outre, dans le cadre du projet de loi d'orientation des mobilités, actuellement débattu à l'Assemblée, nous soutenons le développement du versement mobilité. Les petites communautés de communes ne vont pas mettre en place des transports en commun – cela n'aurait pas de sens dans des zones où les densités de population sont faibles et l'habitat dispersé. Mais doivent-elles pour autant s'interdire de financer des services de transport adapté, du transport solidaire, par minibus, à la demande, par le biais de systèmes de covoiturage ou de voitures partagées ? Ainsi, en Corrèze ou dans les Ardennes, les expériences menées sont très intéressantes et fonctionnent bien. Les dépenses ne sont pas très importantes, mais les collectivités concernées doivent pouvoir les financer. Le projet de loi leur ouvre la possibilité de le faire et de prélever un versement mobilité.

Monsieur Castellani, j'ai compris que vous contestiez les taxes et les tarifs de l'électricité. Malheureusement, vous avez été mal renseigné. Ce chiffre a beaucoup circulé ; je ne suis donc pas étonné... L'électricité n'est pas taxée à 55 %, ce n'est pas sérieux ! Madame la présidente, messieurs les rapporteurs, vous le savez, je soutiens vos travaux d'évaluation budgétaire, mais notre travail serait plus efficace si nous pouvions disposer des rapports en amont, afin que je vous fournisse des réponses plus précises. Nous pourrions ainsi confronter nos données en toute transparence, sans être en permanence dans le débat.

Le prix de l'électricité se décompose en trois tiers : en moyenne, un tiers pour la production du fait de la mutualisation nationale – les prix seraient bien différents si l'on faisait payer l'électricité en fonction du lieu d'habitation ! –, un tiers pour le réseau et un tiers pour les taxes. Certains enlèvent le prix du réseau de leur calcul, comme si ce n'était pas un coût constitutif du prix de l'électricité ! Mais comment voulez-vous que les lumières s'allument à l'Assemblée nationale si aucun réseau n'amène l'électricité ? L'institution n'a pas de centrale nucléaire, n'en déplaise à M. Aubert, même s'il existe un petit générateur thermique utilisable en cas de coupure électrique – ou de révolution. Nous sommes bien heureux que ce réseau distribue l'électricité partout ; nous y sommes tellement habitués et c'est tellement simple qu'on l'oublie, sauf dans certains territoires – M. Serville pourrait sans doute évoquer certaines zones de Guyane.

Il faut entretenir et, parfois, étendre ce réseau. M. Aubert dans le Vaucluse, M. Coquerel en Seine-Saint-Denis, moi-même en Loire-Atlantique, nous le savons : la population augmente et le réseau électrique – comme l'assainissement – doit suivre, sous peine de constater assez rapidement des dégâts et des coupures. Les investissements sont donc constants et l'implantation de nouveaux transformateurs n'est pas du goût de tout le monde. Monsieur Aubert, vous n'imaginez pas combien de moratoires nous pourrions décréter sur l'implantation de lignes électriques... Savez-vous combien on compte de pylônes par rapport aux mâts d'éoliennes ? Je vous transmettrai les chiffres, c'est intéressant !

Pour en revenir aux taxes sur l'électricité, on peut toujours décréter une baisse de taxe chaque fois que les coûts de production augmentent dans un secteur, mais ce n'est pas sans risques : dans certains secteurs, les acteurs n'augmenteraient-ils les prix pour ensuite réclamer une baisse de taxe aux politiques ? Ce n'est pas possible ! M. le rapporteur général nous le rappelle souvent : les recettes et les dépenses doivent converger et s'équilibrer dans la durée. Évidemment, j'aimerais vous annoncer une baisse des taxes sur l'électricité, mais quand certaines personnes – et non des moindres – expliquent qu'il faut la financer en augmentant les taxes sur l'énergie fossile, je leur réponds : « sur le principe, pourquoi pas, mais soyez concrets ! » Il faudra expliquer aux Français qui se chauffent au fioul, au gaz ou qui roulent avec une voiture thermique que leur facture va augmenter. Soyons cohérents et ne mentons pas à nos concitoyens.

Monsieur Aubert, concernant l'éolien et le photovoltaïque, je suis contre les monopoles et pour la diversité – c'est valable dans tous les domaines, d'ailleurs. Nous ne devons pas être économiquement dépendants d'une technologie ou d'une source d'approvisionnement. La France est dépendante à 100 % pour le pétrole, le gaz, le charbon et l'uranium, qu'elle importe. Notre objectif est clairement de réduire cette dépendance. Dans le secteur de l'électricité, nous assumons totalement cette réduction. Même si certains m'ont critiqué pour l'avoir rappelé, la loi du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte ou la programmation pluriannuelle de l'énergie présentée fin 2018 ne vise pas à sortir du nucléaire. Avec Emmanuel Macron, nous n'avons pas été élus sur un tel programme ; nous n'avons donc pas menti aux Français. En revanche, nous prônons la diversification et la réduction de la dépendance au nucléaire. Cela passe par une utilisation raisonnable – et une analyse de l'impact environnemental – de l'éolien, du solaire, mais aussi du biogaz, des réseaux de chaleur, de la biomasse, de la forêt, etc.

Actuellement, seuls l'éolien terrestre et maritime, et le solaire photovoltaïque nous permettent de développer l'électricité renouvelable sans dégagement de CO2 ni utilisation du nucléaire. Monsieur Aubert, n'allons pas raconter n'importe quoi à nos concitoyens : dans le Vaucluse, par exemple, il y a beaucoup de soleil, mais peu de terres pour accueillir des panneaux solaires photovoltaïques de grande taille au sol. Nous devons utiliser les surfaces disponibles, tout en respectant les terres agricoles.

Je vous ai répondu concernant le TURPE et ne vous laisserai pas dire que l'électricité est vendue à prix négatif dans notre pays ! C'est le cas dans d'autres pays, et les rares fois où nous avons été dans cette situation, c'est parce que nos centrales nucléaires étaient en situation de surproduction. Monsieur Aubert, vous le savez, une centrale nucléaire ne s'arrête pas en appuyant sur un bouton...

Je ne sais pas si c'est votre cas, mais nous sommes attachés à la construction européenne et l'interconnexion des réseaux est une belle réussite. Ces derniers font l'objet d'investissements publics, mais on en parle peu, alors que même M. Coquerel pourrait sans doute s'en féliciter. L'interconnexion nous permet notamment de gérer la variabilité – et non l'intermittence – de la production solaire photovoltaïque, assez prévisible compte tenu de la météo, et celle de la production éolienne, ainsi que la variabilité de la consommation. En effet, production et consommation d'électricité sont très rarement de même niveau.

Mme De Temmerman a relancé le débat sur les indicateurs de développement durable. Je partage sa préoccupation, nous en reparlerons. M. Serville a évoqué le projet Montagne d'or en Guyane – le contraire m'aurait étonné – mais le sujet est assez éloigné de l'évaluation budgétaire. Il a raison, et je me rendrai en Guyane dans moins de deux semaines. Je suis à l'écoute des différents projets dans cette région, notamment dans le secteur de l'énergie.

M. Coquerel, je l'ai dit à d'autres occasions, je n'accepte pas que l'on fasse peur aux Français en prétextant que le Gouvernement sacrifie Météo France. Au contraire, nous avons réalisé un investissement de 148 millions d'euros dans un supercalculateur, qui sera opérationnel dès 2020, ainsi que dans cinq nouveaux radars, déployés d'ici 2021 – notamment dans le sud de la France – afin de mieux prévoir les phénomènes de pluies cévenoles. Nous assumons la rationalisation de l'organisation territoriale : elle découle de l'amélioration de la prévision et fait l'objet d'un dialogue avec les collectivités locales.

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On peut ne pas avoir les mêmes avis et débattre, mais on ne peut traiter une députée, en l'occurrence Mathilde Panot, de menteuse ! J'insiste : General Electric abandonne deux des trois parcs éoliens attribués à Alstom, alors qu'il avait repris cette activité. C'est un fait, étayé par les articles du Monde de l'économie et des Échos !

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François de Rugy, ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire

Les choses doivent être claires pour ceux qui nous regardent ou liront le compte rendu : General Electric a simplement rétrocédé la fourniture d'éoliennes pour deux parcs éoliens sous gestion EDF à Siemens, qui a prévu un investissement sur le port du Havre, dont le financement est en cours de bouclage. Cela permettra de créer 750 à 1 000 emplois au Havre, dans une région industrielle.

En outre, il est faux de dire que General Electric a abandonné les éoliennes. Venez avec moi, ainsi que Mme Panot, à Cherbourg et à Saint-Nazaire ! Vous constaterez que l'activité est confortée, et c'est tant mieux.

En outre, lorsque l'éolien offshore a été lancé il y a dix ans – j'étais député, je me souviens très bien des débats – en construisant les équipements non pas à 500 mètres, mais à 15 kilomètres des côtes ; l'objectif était de limiter les nuisances pour les riverains – il aurait été intéressant que M. Aubert l'entende – afin d'éviter les recours. Pourtant, les associations d'habitants du littoral font des recours et ont été récemment reconnues par le Conseil d'État dans leur intérêt à agir. Les freins et les retards pris en matière d'éolien offshore sont donc uniquement dus à ces recours. Ni vous, ni moi n'en sommes responsables ; dire le contraire aux Français, c'est leur mentir.

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Je vous remercie. Chacun a pu exprimer son point de vue. Le débat ne prendra pas fin dans cette salle...

Il s'agissait de notre dernière commission d'évaluation des politiques publiques. Le Printemps de l'évaluation se poursuivra en séance publique du lundi 17 au mercredi 19 juin prochain.

Membres présents ou excusés

Réunion du jeudi 6 juin 2019 à 16 heures 15

Présents. - M. Julien Aubert, Mme Émilie Cariou, M. Michel Castellani, M. Éric Coquerel, M. Joël Giraud, M. Alexandre Holroyd, Mme Cendra Motin, Mme Bénédicte Peyrol, M. Benoit Potterie, Mme Marie-Christine Verdier-Jouclas

Excusés. - M. M'jid El Guerrab, M. Daniel Labaronne, M. Marc Le Fur, Mme Valérie Rabault, M. Olivier Serva, M. Philippe Vigier, M. Éric Woerth

Assistaient également à la réunion. - Mme Sophie Auconie, M. Jean-Charles Colas-Roy, Mme Jennifer De Temmerman, M. Jean François Mbaye, M. Jean-Philippe Nilor, M. Dominique Potier, M. Gabriel Serville

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