Commission d'enquête Chargée de rechercher d'éventuels dysfonctionnements de la justice et de la police dans l'affaire dite sarah halimi et de formuler des propositions pour éviter le cas échéant leur renouvellement
Mardi 19 octobre 2021
La séance est ouverte à dix-sept heures cinq
Présidence de M. Meyer Habib, président
Mes chers collègues, Me Szpiner, nous avons le plaisir de vous auditionner concernant la triste affaire dite Sarah Halimi (Lucie Attal). Nous avons précédemment auditionné vos confrères.
Avant de débuter cette audition, j'aimerais signaler qu'en votre qualité de maire du 16e arrondissement, vous avez inauguré une plaque à la mémoire de notre collègue Claude Goasguen, que nous aimions et qui nous manque beaucoup. J'étais présent à cette inauguration, avec quelques collègues de cette commission. Claude a été un immense député, ministre et serviteur de la République. Il nous manque énormément, y compris dans nos travaux. Je vous remercie d'avoir pris cette initiative et de lui avoir rendu hommage.
Je rappelle que l'article 6 de l'ordonnance du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires impose aux personnes auditionnées par une commission d'enquête de prêter serment de dire la vérité, toute la vérité, rien que la vérité. Je vous invite donc à lever la main droite et à dire : « Je le jure ».
(Me Francis Szpiner prête serment).
Cette affaire est extrêmement triste. L'objectif de cette audition n'est pas d'effectuer un nouveau procès. En effet, le procès a déjà eu lieu en première instance, deuxième instance ainsi qu'en cassation. Cependant, il nous revient de pointer du doigt les éventuels dysfonctionnements de la justice et de la police dans cette affaire.
Les policiers étaient présents sur les lieux après trois ou quatre minutes et ne sont pas intervenus. En outre, le caractère antisémite a été reconnu tardivement. Par ailleurs, nous avons conscience de l'importance des expertises psychiatriques puisque, très vite, cette affaire a dévié dans un domaine médical plutôt que vers une cour d'assises. Une première expertise a eu lieu quelques heures après le crime.
Vous représentez Mme Lekover, la sœur de la victime, qui habite en Israël. Avec votre confrère Gilles-William Goldnadel, vous avez décidé de saisir la justice israélienne, à la demande de Mme Lekover.
, avocat au barreau de Paris. Le but de cette audition n'est pas d'effectuer un nouveau procès.
Je ne reproche rien aux policiers. Effectivement, pendant quarante minutes, les policiers ont assisté aux violences infligées par M. Traoré. Néanmoins, je ne vois pas comment, en si peu de temps, les policiers auraient pu monter un assaut et intervenir. Les policiers ne savaient pas si M. Traoré était armé, ne connaissaient pas le plan des lieux et n'étaient pas expérimentés. Les policiers du RAID ou du groupe d'intervention de la gendarmerie nationale (GIGN), spécialistes de ce type d'intervention, vous diront qu'un tel assaut est impossible en quarante minutes.
La reconstitution a été abondamment évoquée. Je tiens à rappeler que la reconstitution n'est pas obligatoire dans le code de procédure pénale. De surcroît, les juges d'instruction à Paris sont peu favorables aux reconstitutions car ces dernières sont des procédures très lourdes. En effet, elles nécessitent des extractions, des conditions d'horaires similaires et un grand déploiement des forces de police. Or, à partir du moment où la culpabilité de M. Traoré ne fait aucun doute, la reconstitution avait un intérêt limité.
Certains de vos confrères, y compris l'avocat de la famille Diarra, ont affirmé qu'une reconstitution aurait été éclairante sur cette question.
Je serais ravi d'entendre les arguments en faveur d'une reconstitution. Lorsque M. Traoré décide de franchir le balcon, il sait qu'il se rend chez Mme Halimi et a choisi sa cible.
J'ai eu le triste privilège d'être l'avocat de la famille d'Ilan Halimi. Il existe chez certains, notamment parmi la magistrature, une réticence à reconnaître l'antisémitisme quand ce dernier n'est pas l'œuvre de l'extrême droite. Lorsque l'antisémitisme est le fait de populations qui, à leurs yeux, sont elles-mêmes victimes de racisme, ces personnes peinent à l'admettre. J'ai rencontré cette réticence dans un certain nombre d'affaires, y compris celle-ci. Un vrai problème existe concernant l'appréhension de l'antisémitisme venant d'une certaine culture antisémite de certaines banlieues. Je ne stigmatise pas toute la banlieue. J'avais évoqué ce sujet au moment de l'affaire dite Ilan Halimi, ce qui m'avait été reproché. Malheureusement, les faits m'ont donné raison.
Cette affaire pose le problème de l'utilisation de la psychiatrie dans le processus judiciaire.
Tout d'abord, la magistrate instructrice n'a pas attendu une demande de contre-expertise pour décider de l'ordonner elle-même. Nous aurions pu nous attendre à ce que l'avocat du mis en examen formule cette demande. Or c'est en réalité la juge d'instruction qui a spontanément ordonné cette contre-expertise.
Je ne pense pas que nous puissions poser cette question, qui relève de l'indépendance de la justice. Je note simplement un fait qui m'interpelle et m'étonne.
Ensuite, le choix des experts pose question. En effet, à partir du moment où la justice pénale délègue, ou abandonne, son pouvoir d'appréciation à des experts, encore faut-il s'assurer de la qualité de ces derniers. Or il existe une obscurité absolue dans le choix, le recrutement et l'évaluation des experts.
Souvent, les juges font appel à leurs experts. Ainsi, une promiscuité se crée entre le corps d'expertise et les juges. Je ne dis pas que l'expert veut déplaire au juge ou ne souhaite pas aller dans le sens éventuellement souhaité par le juge dans un dialogue, qui n'est pas scandaleux, entre les deux. Néanmoins, cette situation constitue un réel problème.
Si j'observe cette affaire sur le plan purement psychiatrique, il existe deux questions auxquelles les experts n'ont jamais répondu de façon satisfaisante.
Premièrement, comment serait-il possible d'être dans un état d'absence de conscience de ses actes tout en choisissant une victime parce qu'elle est juive ? Choisir une cible consciemment, c'est ne pas être irresponsable pénalement.
Deuxièmement, au moment où M. Traoré défenestre Mme Sarah Halimi, il dit aux policiers placés en bas de l'immeuble qu'elle vient de se suicider. Une personne qui tente de maquiller son crime en suicide a bien conscience d'avoir commis un crime. Aucun expert n'a répondu sur ce point, si ce n'est cette phrase merveilleuse : « ça n'est pas incompatible ». Les magistrats ont démissionné.
Par ailleurs, aucun des experts n'a vu M. Traoré immédiatement après le crime. La première expertise de M. Zagury a eu lieu plus de cinq mois et demi après le crime tandis que celle de l'inénarrable Dr Bensussan a eu lieu plus d'un an après. Ces deux experts ne pouvaient donc pas se baser sur des signes cliniques. Ces expertises sont des reconstitutions de l'état mental du mis en examen à partir des auditions des familiers de M. Traoré. La bouffée délirante serait donc définie cliniquement par les témoignages de proches de celui qui est accusé du crime.
Notons que les experts de l'unité médico-judiciaire (UMJ) ont indiqué que la garde à vue n'était pas compatible avec son audition, ce qui n'était pas forcément l'avis des policiers. Je pense que, si la commission auditionne les policiers ayant procédé à l'interpellation et à la garde à vue, ils auront peut-être une opinion différente de celle des experts de l'UMJ.
Enfin, bien que le crime ait été jugé, j'aimerais ajouter un élément qui montre que les métiers de magistrat et d'expert sont parfois confortables car, même en cas de grande méprise, aucune sanction n'est appliquée. M. Bensussan avait décidé que M. Traoré souffrait de troubles laissant présager une schizophrénie. Lorsque M. Bensussan a témoigné devant la chambre de l'instruction, il était difficile et même insoutenable, compte tenu de l'état de M. Traoré, de dire que nous avions affaire à un schizophrène. L'expert a alors dit qu'il s'était trompé, tentant de passer pour un homme formidable prêt à reconnaître ses erreurs, qui devenaient par ailleurs très visibles. Cet aveu n'a pas empêché la chambre de l'instruction de recopier intégralement dans l'arrêt, avec un manque d'imagination et peut-être une facilité de plume, un rapport d'expertise stipulant que M. Traoré était dangereux car il présentait des problèmes de schizophrénie, alors que l'expert avait affirmé le contraire quelques jours auparavant à la barre.
L'importance accordée à l'expertise psychiatrique constitue un problème. Concernant les affaires criminelles, une multitude de questions se pose. Qui établit la liste des experts ? Comment pouvons-nous être certains que ces derniers sont bien formés ? Comment pouvons-nous être sûrs qu'ils se tiennent à jour ? Comment le choix de l'expert par le juge peut-il être problématique ?
J'imagine que la commission auditionnera M. Bensussan. Je ne peux que vous inviter à regarder son site Internet, assez étonnant puisque M. Bensussan y indique toutes les affaires criminelles dans lesquelles il a été expert — ce qui m'apparaît déontologiquement discutable. Nous voyons bien qu'être expert dans des affaires criminelles est, pour certains, une source de notoriété et de médiatisation. Cela permet à la chaîne BFM, qui est une cour de justice et un Parlement parallèles, d'inviter régulièrement les experts médiatiques des affaires criminelles sur son plateau. Être désigné par les juges d'instruction présente un intérêt pour certains experts. Se pose alors la question de l'impartialité et de l'indépendance de celui qui dépend du juge qui le désigne régulièrement. Dans cette affaire, je pense que M. Bensussan n'a pas été choisi par hasard. Notons, en outre, les conflits personnels qui peuvent l'opposer à M. Zagury, dans une sorte de querelle d'égo. Ce contexte donne la catastrophe judiciaire que nous connaissons.
Si, à l'issue de vos travaux, la commission pouvait s'interroger sur le recrutement, la formation en matière criminelle, le contrôle régulier et la désignation par le juge des experts criminels, la justice aura fait un grand progrès.
J'ai dit qu'on avait volé la justice aux enfants de Sarah Halimi. Je le maintiens.
J'ai lu que nous voulions juger les fous. Il n'est aucunement question de juger les fous.
L'expression « juger les fous » n'a pas de sens médicalement ou juridiquement. Il est hors de question de juger un individu qui n'est pas conscient de mal agir lorsqu'il commet un crime.
Je pense que cette question aurait dû être à l'appréciation d'une cour d'assises. Cette dernière aurait pu entendre les policiers. Elle aurait pu questionner la famille afin de savoir si celle-ci donne de la crédibilité ou non à certains diagnostics. Elle aurait pu interroger la réalité de son engagement religieux et d'une éventuelle radicalisation, qu'on a toujours voulu écarter et sur laquelle on n'a pas beaucoup travaillé. Finalement, la justice s'est dessaisie au profit de psychiatres dont je rappelle qu'ils n'exercent pas une science exacte. Les mêmes psychiatres, tout aussi savants, expliquaient il y a à peine un demi-siècle qu'il fallait inscrire l'homosexualité parmi les maladies mentales. Ils devaient le dire avec la même arrogance que ceux qui déposent aujourd'hui. Les experts devraient peut-être faire preuve de davantage d'humilité. C'est pour ces raisons que je pense que le pouvoir de trancher sur l'existence d'une abolition du discernement revient aux jurés et à la cour d'assises.
J'ajoute que faire comparaître devant une cour d'assises une personne incapable de se défendre et de comprendre l'accusation portée contre elle serait choquant. Or personne ne conteste que M. Traoré était parfaitement en capacité de répondre à toutes les questions et de s'expliquer sur les faits qui lui étaient reprochés.
Je vous remercie de vos propos. La radicalisation a été écartée alors que nous savons que l'assassin fréquentait assidument une mosquée, en particulier les trois derniers mois pendant lesquels il s'y rendait trois fois par jour. Nous savons également que, pendant que la police était derrière la porte, il a récité des sourates du Coran, dans lesquelles on compare manifestement les Juifs à des singes et on appelle à tuer des Juifs. Par ailleurs, « Allahu akbar » a été entendu par tous les témoins. La veille, il a manifestement déposé des affaires. Or le parquet antiterroriste et le procureur de la République François Molins ne se sont pas emparés de cette piste. À votre avis, quelle en est la raison ?
. Il y a toujours la volonté de minimiser ces actes. Quand des attentats se produisent, des expressions telles que « camion fou » — qui semble décrire un objet autonome — sont utilisées plutôt que d'évoquer clairement un attentat terroriste.
Le parquet antiterroriste aurait en effet pu se pencher sur cette affaire, quitte à ne pas retenir le caractère terroriste. On préfère écarter de nombreux dossiers lorsqu'il existe ce que nous appelons des signaux faibles. J'ignore les raisons de ce choix même si j'ai un sentiment.
. Je pense qu'il existe une volonté de minimiser le terrorisme islamiste lorsqu'il est antisémite. Je rappelle que, dans cette affaire, à partir de l'ouverture de l'information judiciaire, il a fallu cinq mois et demi au parquet pour prendre des réquisitions sur le caractère de la circonstance aggravante du crime antisémite, alors que les éléments que vous avez rappelés figuraient dans la procédure dès le départ.
Selon vos dires, l'assassin savait parfaitement qu'il se dirigeait vers le balcon de Mme Lucie Attal (Sarah Halimi). Je rappelle qu'il avait sans doute apporté des affaires la veille. Selon vous, le crime était-il prémédité ?
. Je ne suis pas juge et je pense que personne ne pourra jamais répondre à cette question. Toutefois, M. Traoré a reconnu la Torah et le chandelier. Lorsqu'il s'attaque à Sarah Halimi, il sait qu'il s'attaque à elle parce qu'elle est juive. Il n'a pas été violent envers ses voisins.
Les photographies permettent de constater qu'il n'y avait pas de chandelier à sept branches dit Menorah, mais des bougeoirs de shabbat. En outre, Mme Halimi possédait bien des livres mais je défie qui que ce soit d'identifier les ouvrages d'une bibliothèque à quatre heures du matin. Accessoirement, la Torah ne se trouve que dans une synagogue. Ces éléments montrent que M. Traoré savait manifestement que Mme Halimi était juive.
J'ai entendu vos propos sur le délai d'intervention nécessaire pour un assaut de la police. Je le réfute, Maître Szpiner, si vous me le permettez. Trois ou quatre personnes, en ligne avec les services de police, ont indiqué que l'assassin n'était pas armé et n'utilisait que ses poings. La brigade anticriminalité (BAC) était présente derrière la porte, manifestement avant le premier coup, mais elle n'est pas intervenue.
. J'ai été l'avocat du fondateur et de plusieurs patrons du GIGN. J'ai également connu de nombreuses affaires terroristes. Je maintiens que le délai était trop bref pour monter une opération. Vous évoquez des témoins or ces derniers ne savent pas si M. Traoré ne dispose pas d'armes, de grenades ou d'une ceinture explosive à côté de lui. En outre, le plan de l'appartement n'était pas connu. Les policiers de la BAC ne sont pas formés aux interventions de prise d'otages. Je ne jette pas l'opprobre sur la police. Je comprends l'émotion car il est insupportable d'imaginer des policiers impuissants face à une femme rouée de coups. Je ne crois malheureusement pas que la police aurait pu véritablement agir.
Le ministre de l'Intérieur de l'époque Bernard Cazeneuve a modifié, à ma demande, la doctrine d'intervention afin que les policiers aillent au contact des assaillants, encore faut-il qu'ils reçoivent les ordres à cette fin.
Ceux qui interviennent dans les affaires criminelles sont experts auprès de la cour d'appel. Deux questions se posent. Qui choisit les experts ? Qui les évalue ? Les mêmes experts sont toujours retrouvés dans les affaires criminelles. Nous assistons à une sorte de professionnalisation, mais pas dans le meilleur sens du terme. Je dis donc en effet que les personnes ne se retrouvent pas par hasard. Si vous voulez une expertise de qualité, vous choisissez un certain expert. Si vous voulez une expertise de tout-venant, vous en choisissez un autre. Nous savons à peu près quel expert réalise quel type d'expertise. Certains experts, comme M. Bensussan, se bousculent pour être experts dans les affaires obtenant un certain retentissement médiatique. Un mécanisme chez les juges consiste à choisir les experts en fonction des précédentes affaires sur lesquelles ces derniers ont réalisé des expertises.
Je rappelle que ce même homme a été expert en Suisse à titre privé pour l'une des parties et qu'il a conclu que les victimes ne disaient pas la vérité sans les avoir rencontrées. La cour d'appel de Genève s'est étonnée de cette démarche, qu'elle jugeait peu déontologique. Ces faits n'ont jamais été portés à la connaissance d'un pôle qui serait responsable de nos experts, ce qui aurait peut-être engendré une interrogation sur la qualité des experts et sur leur rigueur déontologique.
Les experts judiciaires sont choisis sur un tableau de la cour d'appel après l'instruction. La commission revérifiera évidemment ces éléments mais votre remarque est judicieuse.
Le jeune médecin de l'infirmerie psychiatrique de la préfecture de police (I3P) n'a pas été désigné comme expert mais a semblé, pour la commission, assez déterminant. Pendant la garde à vue, ce médecin est dans le temps de l'action, contrairement aux experts intervenus longtemps après.
Lorsque nous avons posé la question du délai d'intervention des experts, on nous a répondu que le délai est normal et permet de mieux comprendre la réalité. Nous n'ouvrirons pas ce débat expertal avec vous.
Dans notre schéma, que pensez-vous de l'importance de ce médecin qui considère que M. Traoré ne peut pas être maintenu en garde à vue ? Vous semble-t-il cohérent de baser une évolution procédurale sur cette seule vision ?
Par ailleurs, cette analyse du médecin constitue-t-elle un élément déterminant, inscrivant l'affaire dans un schéma psychiatrique plutôt que dans un schéma normal d'analyse des faits de droit commun ? A-t-elle pu entraîner des conséquences assez lourdes ?
Cet élément a évidemment faussé toute la procédure. Si vous êtes en garde à vue, vous avez le droit de demander à consulter un médecin. Le médecin doit déterminer si votre état de santé est compatible avec la garde à vue. La question de la définition d'un état de santé non compatible avec la garde à vue se pose. Si vous êtes inconscient parce que vous avez été blessé ou que vous avez subi un choc, vous n'êtes évidemment pas en état d'être en garde à vue.
Néanmoins, dans le cas de l'affaire, la question qui importe est de savoir si le médecin a jugé que M. Traoré ne pouvait pas tenir un discours cohérent. Nous ne sommes alors plus dans le domaine de la médecine. Les policiers auraient pu poser des questions et noter les réponses semblant incohérentes ou fantaisistes. S'ils avaient eu le sentiment qu'ils n'avaient pas affaire à un simulateur, des experts auraient pu effectuer une analyse. À partir du moment où il n'existe pas de raison médicale rendant l'état de M. Traoré incompatible avec la garde à vue, je considère que le médecin est allé au-delà de sa mission.
Évidemment, cet élément a pesé sur la suite des événements. En effet, si vous entendez, juste après les faits, que cet homme est en incapacité de répondre, la question de son incapacité mentale peut trouver quelques crédits. Cet élément est donc l'un des tournants du dossier, ce qui est regrettable.
La question qui nous anime porte sur les types de recommandations que nous pouvons effectuer.
Par ailleurs, la juge d'instruction a demandé une contre-expertise d'office sans attendre que celle-ci lui soit demandée. Dans un dossier de cette nature, aurait-il été concevable d'envoyer M. Traoré devant la cour d'assises avec l'avis d'un seul expert ?
Je suis désolé de vous dire que la question ne se pose pas en ces termes. M. Traoré dispose d'un avocat.
Par ailleurs, connaitre la motivation de la demande de contre-expertise aurait été intéressant. Les parties civiles peuvent avoir le sentiment désagréable que le juge s'est substitué à la défense de M. Traoré. L'impartialité est attendue d'un juge. Il n'aurait pas été problématique que Me Bidnic, qui est un excellent avocat, demande une contre-expertise après la réception de l'expertise du Dr Zagury puis que la juge désigne un expert. Nous aurions alors été dans l'exercice normal des droits de la défense.
Nous pouvons reprocher au corps judiciaire d'être quelque peu dépendant des expertises. En l'occurrence, la juge prend une décision en autonomie sans attendre d'autres éléments.
L'un des problèmes est celui de la reconnaissance tardive du fait antisémite. La commission souhaite savoir si vous seriez favorable à un système de présomption d'antisémitisme lié à la nature de la victime elle-même, comme dans certains pays anglo-saxons.
Le parquet a demandé la requalification cinq mois après la mise en examen. Notons l'existence d'autres péripéties. Au moment du règlement du dossier, le juge d'instruction n'était pas favorable à retenir l'antisémitisme, contrairement au parquet qui l'a retenu. Finalement, la chambre de l'instruction a retenu l'antisémitisme, ce qui a constitué le lot de consolation accordé à la famille.
La question que vous posez est beaucoup plus grave et intéressante. Je suis avocat depuis 46 ans. J'ai été membre de la Ligue internationale contre le racisme et l'antisémitisme (LICRA), avocat de l'association La voix de l'enfant ainsi que membre et vice-président de la commission nationale consultative des droits de l'homme (CNCDH). Je suis contre le communautarisme. Je pense que l'individu est dans sa dignité totale. Qu'il existe une infraction spécifique pour telle ou telle catégorie m'apparaît une dérive dangereuse, qui ne changerait d'ailleurs rien au niveau des peines. Nous risquons que chacun se replie sur son pré carré.
L'antisémitisme est une circonstance aggravante car le choix de la victime dépasse le simple racisme. Ce sujet concerne une tradition et une histoire que je n'évoquerai pas ici.
La force d'un État de droit est de ne jamais céder ses principes face à l'ennemi ou face au crime. Notre force est toujours de garder nos valeurs. Je ne suis donc pas en faveur de la présomption de culpabilité et l'inversion de la charge de la preuve.
Non, je dis que la décision qu'il a prise n'est pas dans l'esprit du code de procédure pénale. Expliquer que l'état de santé de M. Traoré n'était pas compatible avec un interrogatoire et une mesure de garde à vue me semble une erreur d'appréciation.
Vous soulevez un autre problème plus vaste, celui de l'effectivité du contrôle des gardes à vue. La vérité est que la garde à vue — qui constitue une mesure grave et attentatoire aux libertés — est censée être contrôlée, soit par le parquet soit par les magistrats instructeurs. Je n'accable pas les magistrats mais, en raison des conditions dans lesquelles ils travaillent, ils sont souvent dans l'impossibilité matérielle de pouvoir contrôler les gardes à vue. Le monde rêvé décrit par le code de procédure pénale est à distinguer de la réalité de misère du monde judiciaire.
Lorsque M. Traoré a quitté l'appartement pour se rendre chez Mme Halimi, tout le quartier a entendu les cris effrayants d'une femme violentée. M. Traoré ne se trouvait alors plus dans le même appartement ni dans le même immeuble. Les policiers avaient la possibilité d'intervenir. Venus pour une séquestration, ils ont entendu qu'une femme était frappée dans un autre appartement. Je suis d'accord avec vous quant à la première intervention mais j'aimerais évoquer la seconde. Je ne souhaite pas remettre en cause le travail des policiers. Je note néanmoins qu'ils ont dû entendre les cris.
Assister aux faits a dû être un drame et un traumatisme pour les policiers. Toutefois, comprenons la complexité des questions posées par l'éventualité d'une intervention. Encore une fois, je ne suis pas sûr que les policiers de la BAC soient formés à ce type d'intervention. Même pour des policiers formés, les assauts peuvent être difficiles, comme dans le cas de l'assaut du RAID contre Mohammed Merah.
Mohammed Merah était seul et l'assaut a duré des heures.
Une intervention contre un individu nécessite de trouver l'immeuble, disposer des plans, monter les escaliers, casser éventuellement la porte, être sûr que l'individu n'est pas armé et qu'il n'y a pas d'autres otages. En l'état des forces présentes ce soir-là et dans cette situation, je refuse de rejeter la faute sur la police. Les policiers seront plus à même d'expliquer les raisons de l'impossibilité ou du retard de leur intervention. L'absence d'assaut des policiers n'est pas le scandale de cette affaire, qui est qu'un mis en cause a échappé à un jugement sur des bases d'expertises contestables et contestées avec une démission de l'autorité judiciaire.
Je ne commenterai pas l'arrêt de la Cour de cassation.
Par quelle procédure pouvons-nous concilier le principe selon lequel un « fou » ne doit pas être jugé et l'exigence de reconnaître la souffrance des victimes et le besoin d'un procès afin d'effectuer son deuil ? Je rappelle que, dans ce cas précis, l'assassin a été condamné une vingtaine de fois. Il est resté en prison près de deux ans cumulés. Il n'a jamais pris le moindre traitement psychiatrique. Il est vrai qu'il fumait du haschich comme des millions ou des centaines de milliers de personnes malheureusement. Comment un basculement s'est-il soudainement produit, après une visite plusieurs heures après le crime, avant les expertises ? Quels changements pouvons-nous opérer ?
La loi a suivi l'évolution. Auparavant, l'article 64 du code pénal stipulait qu'il n'y a ni crime ni délit lorsque le mis en cause était en état de démence au moment des faits. Dans ce cas, un non-lieu était ordonné. Cet article était choquant pour les victimes, qui ne comprenaient pas. Une procédure bâtarde, utilisée dans l'affaire dite Halimi, a été créée. Le juge d'instruction rend une ordonnance d'irresponsabilité pour cause pénale, qu'il transmet à la chambre de l'instruction. Cette dernière rend un arrêt, après un débat public en réalité tronqué. Cette audience est censée éclairer et calmer les familles.
À partir du moment où quelqu'un est capable de comprendre l'accusation qui est portée contre lui et de s'en expliquer, statuer sur l'irresponsabilité pénale appartient à la cour d'assises et à elle seule.
J'ajoute que les dernières rédactions sur la responsabilité pénale sont très dangereuses. J'ai plaidé deux affaires d'assise où, indépendamment de l'irresponsabilité, la notion d'altération de la responsabilité a été introduite. Cette notion entraîne une diminution de peine.
Aujourd'hui, certains experts — les amis de ceux que j'évoquais tout à l'heure — disent que la dépression est une cause d'altération de la responsabilité. Or quand vous connaissez le nombre de personnes dépressives en France, vous imaginez le débat à venir dans les cours d'assises.
Dans une affaire à la cour d'assises de Bobigny, l'expert avait conclu à l'altération, ce que n'avait pas retenu la cour d'assises. Si on restait dans ce système où seul l'expert décide de l'altération du discernement, vous imaginez ce qu'il pourrait se produire. Le juge doit prendre ses responsabilités. Il serait scandaleux de juger une personne incapable de se défendre. En revanche, à partir du moment où quelqu'un comprend l'accusation et est capable de se défendre, c'est à la cour d'assises de se forger une opinion après avoir entendu les experts. La psychiatrie n'est pas une science exacte et les jurés sont, eux aussi, à même de juger, après l'étude des faits, si une personne est consciente ou inconsciente.
Votre remarque est très intéressante. Cette idée est l'une des pistes de réflexion de la commission. Votre réflexion prend d'ailleurs du relief par rapport au texte auquel vous avez fait référence, ne faisant pas l'unanimité entre nous.
L'analyse effectuée sur une éventuelle irresponsabilité ne concerne pas le moment du jugement mais le moment de l'acte, ce qui est tout à fait différent. Si une personne n'avait aucune conscience de ses actes au moment des faits, une conséquence définitive est tirée pour le traitement judiciaire. Ces éléments vous paraissent-ils sécables ?
Vous m'avez mal compris. Il serait intolérable de juger quelqu'un qui ne comprendrait pas ce qui lui arrive. Cela n'empêche pas de juger une personne comprenant les accusations portées contre elle, ce qui ne veut pas dire qu'elle était responsable au moment des faits.
Dans le cas qui nous intéresse, vous pouvez faire le choix de laisser la question de la détermination de la responsabilité aux experts, entérinés par les juges, ou à la cour d'assises, après avoir entendu les experts.
La psychiatrie n'est pas infaillible et l'environnement autour du crime est important. Lorsqu'un homme dit qu'une femme s'est suicidée alors qu'il l'a défenestrée, ce fait entraîne des conséquences sur le plan psychiatrique que nous devons tirer.
M. Traoré est considéré sur le plan psychiatrique — avec toutes les réserves que vous évoquez et que nous pouvons partager — comme sujet à une bouffée délirante ayant annihilé sa perception des événements, ce qui le rend irresponsable. Ce fait est judiciairement acquis dans une Cour de cassation.
Pensez-vous que si, au cours de l'instruction, l'expertise médicale stipule que, passée cette bouffée délirante, M. Traoré est capable de comprendre les faits qui lui sont reprochés et d'organiser sa défense, une comparution devant une cour d'assises pourrait avoir lieu ?
C'est la juridiction du jugement qui doit déterminer s'il y a effectivement une irresponsabilité, si la personne est en état de se défendre. Cette décision ne peut pas être prise par un collège d'expert. Le collège d'expert est une information donnée au juge, qui ne peut pas le lier.
Dans le cas que vous évoquez, vous imaginez un processus en deux temps. Le premier temps est la reconnaissance de l'irresponsabilité pénale. Le deuxième temps est le jugement. Je vous dis que c'est le jugement qui décide de l'irresponsabilité pénale.
Le cas que vous évoquez pourrait se produire si quelqu'un, jugé irresponsable pénalement par les experts, n'est pas en état d'être jugé. Nous ne le ferons pas revenir trois ans après en disant que son état de santé s'est amélioré donc qu'il doit être rejugé.
Oui. D'ailleurs, l'un des responsables d'une société nationale de psychiatres disait que ce point pourrait constituer une question de dignité pour l'accusé. Il rappelait qu'Althusser regrettait toujours de ne pas avoir été jugé.
Par ailleurs, comment peut-on parler d'abolition du discernement pour un acte reconnu comme antisémite ? M. Traoré a préparé ses affaires. Le matin même du crime, il a dit « ce soir, ce sera terminé » à sa famille. Il a fait des prières. Il s'est également changé. Manifestement, il existe un processus indiquant qu'il sait ce qu'il fera. La reconnaissance de l'abolition du discernement a permis que l'affaire soit classée alors que la justice a reconnu le caractère antisémite.
M. Traoré est actuellement placé dans un hôpital psychiatrique. Néanmoins, de nombreux experts expliquent qu'il sortira très rapidement parce qu'il ne prend pas de traitement. Nous connaissons le triste exemple de Sébastien Selam, tué par son voisin rue Louis Blanc en 2003. Mme Selam croise tous les jours l'assassin de son fils, même si la reconnaissance, quinze ans après les faits, du caractère antisémite du crime par le Président de la République a apporté un certain soulagement à la famille. Dans le cas de l'affaire dite Halimi, la famille Halimi (Attal) pourrait croiser très prochainement l'assassin si ce dernier venait à sortir de l'hôpital psychiatrique.
Avec Me Goldnadel, vous avez décidé, à la demande de la famille, de saisir la juridiction israélienne, compétente pour juger des actes antisémites, y compris en dehors de son territoire. J'aimerais des précisions à ce sujet.
Je conteste la notion de bouffée délirante en raison du maquillage du crime en tentative de suicide et du choix de la cible. Si vous auditionnez les experts, ils vous expliqueront ce qui les a amenés à penser qu'on pouvait concilier le choix délibéré d'une cible pour des raisons antisémites et la bouffée délirante. J'ai déjà dit mon scepticisme sur ce point.
Concernant l'état de M. Traoré, je ne sais officiellement rien. En effet, le secret médical s'impose. Si la commission a quelques pouvoirs d'investigation, elle pourra certainement apprendre que M. Traoré ne prend pas de traitement particulier car il ne souffre d'aucune maladie mentale. M. Zagury pourra vous le confirmer. L'inénarrable M. Bensussan avait diagnostiqué une potentielle schizophrénie puis avait reconnu son erreur. M. Traoré se porte donc comme un charme aujourd'hui. Le seul problème qui se pose est de savoir, s'il revenait à consommer du cannabis, si cette consommation pourrait déclencher quelque crise. Je pense que, si M. Traoré a un bon avocat et si les psychiatres qui le suivent sont indépendants d'esprit et courageux, ils seront obligés de reconnaître que M. Traoré n'a rien à faire dans un hôpital psychiatrique. M. Traoré devrait pouvoir retrouver rapidement sa liberté.
J'ai été le premier avocat à faire condamner un étranger pour un crime commis à l'étranger sur un ressortissant français. En effet, j'ai été l'avocat des sœurs Alice Domon et Léonie Duquet, enlevées en Argentine. J'ai déposé plainte contre le capitaine Astiz, qui sévissait à l'école supérieure de mécanique de la marine argentine (ESMA). Bien qu'Astiz soit Argentin, qu'il ait bénéficié dans son pays de l'amnistie et que le crime ait été commis en Argentine, il a été condamné à la réclusion criminelle à perpétuité par la cour d'assises de Paris. D'ailleurs, les Argentins sont revenus par la suite sur la loi d'amnistie.
J'ai entendu certains dire qu'il existe une loi spécifique pour les Juifs. La loi israélienne ne fait que reprendre ce que notre code de procédure pénale et un certain nombre de législations reprennent, à savoir qu'un pays protège ses ressortissants, lorsque le crime, commis par un étranger, a lieu à l'étranger. La loi israélienne a introduit une modification qui m'apparaît judicieuse : elle est compétente pour tout Juif tué à l'étranger à raison du caractère antisémite de ce crime. Nous sommes donc tout à fait dans ce que prévoit la loi française. Mme Lecover, citoyenne israélienne, ne fait qu'utiliser la faculté que n'importe quel citoyen français aurait si l'un de ses proches était tué à l'étranger dans un pays où la justice ne lui a pas été rendue.
J'ajoute que la règle « non bis in idem » ne s'applique pas, parce que M. Traoré n'a pas été acquitté. Ce dernier bénéficie d'un non-lieu, ce qui n'est pas, par définition, une décision de justice définitive.
La loi israélienne a considéré que lorsqu'une personne tue en état de démence, la consommation de drogues est une circonstance aggravante. Ainsi, la prise de cannabis par M. Traoré constitue une circonstance aggravante et non une circonstance exonératoire. La règle « non bis in idem » ne saurait s'appliquer.
Enfin, je dois dire que la décision de la Cour de cassation est hallucinante. Tous les jours, la Cour de cassation complète, invente, crée et tord le droit pour prendre des décisions. Lorsque vous prenez consciemment des produits qui entraîneront un effet sur votre organisme, vous ne pouvez pas demander à être exonéré de cette responsabilité. La Cour de cassation dit que la loi est restrictive et que nous ne pouvons pas demander à procéder à des ajouts. Or c'est une pratique courante. Tout le droit de la responsabilité civile a été construit ainsi. C'est « se moquer du monde » que d'avoir demandé à changer une loi inutilement parce que les magistrats de la Cour de cassation n'ont pas voulu prendre leurs responsabilités.
Une évolution des textes a eu lieu. Quand une personne est hospitalisée sans son consentement, l'intervention du juge des libertés et de la détention est obligatoire tous les six mois pour statuer sur le cas. Dans le cas de M. Traoré, cet encadrement vous paraît-il suffisamment protecteur des intérêts de la société ?
À l'audience de la chambre de l'instruction, j'avais dit avec humeur que M. Traoré sortirait peut-être plus rapidement que ne le pensait la Cour et que les magistrats ayant rendu cette décision auraient possiblement une responsabilité morale. Je sais bien que le mécanisme est lourd et que ce n'est pas parce qu'un Dr Bensussan de passage expliquerait que, brusquement, M. Traoré va bien, qu'il se retrouverait en liberté. Je connais les mécanismes, qui sont censés être protecteurs.
La vérité est que nous passerons d'une injustice à une autre. Nous risquons qu'une personne soit gardée en hôpital psychiatrique, non pas parce qu'elle est dangereuse mais parce qu'on craindra de braver l'opinion publique.
Rappelons que je ne suis pas psychiatre. Toutefois, à l'Institut de criminologie et de droit pénal de Paris (ICP), j'ai eu un grand professeur de psychiatrie criminelle, le Dr Roumajon, qui ne prenait que deux expertises par an. Il m'a bien formé et habitué à lire les revues et à m'informer sur l'évolution de la psychiatrie criminelle. Sur certains points, je serais parfois meilleur expert que certains.
Certains individus commettent un crime parce qu'ils sont schizophrènes. Ils souffrent d'une maladie. Cette dernière peut être traitée et évolue. Dans le cas de cette affaire, il est question d'une bouffée délirante et de quelqu'un qui n'est pas atteint d'une affection psychiatrique. En utilisant les ressources de la loi, il est possible de retarder la sortie de M. Traoré. Toutefois, je pense qu'il sortira car la cause de l'abolition du discernement et du crime n'est pas une maladie mentale.
Nous pourrions nous demander si une bouffée délirante constitue réellement une abolition du discernement. Il s'agit d'un autre sujet dans le catalogue des causes d'exonération.
Je ne veux pas me prononcer sur le sort de M. Traoré, qui est suivi par des médecins traitants. Je ne sais pas quels traitements médicamenteux et psychologiques lui sont donnés. Je ne porterai donc aucun jugement. Cette responsabilité sera celle des médecins, du juge des libertés et de la détention et du préfet.
Les témoins, l'assassin et les experts sont en France. Pensez-vous réellement que votre plainte auprès de la juridiction israélienne peut aboutir à un procès avec une condamnation et une exécution de la peine ?
Je constate tout d'abord que, dans le cas du capitaine Astiz, les Argentins sont revenus sur la loi d'amnistie et qu'il a été incarcéré.
J'ai été l'avocat des familles des policiers de la direction de la surveillance du territoire (DST) tués par Carlos. Ce dernier était derrière le rideau de fer. Or il a comparu devant une cour d'assises.
Que la justice israélienne se prononce. Je ne sais pas ce qui arrivera demain. Néanmoins, mon devoir est de tout entreprendre pour que la justice soit rendue à la famille. Dans le pire des cas, cette justice sera symbolique, ce qui interrogera l'institution judiciaire française. Si des miracles ou des imprudences surviennent, cette justice sera peut-être effective. Toutefois, mon rôle est de dire à la famille que je n'abandonne pas ce combat.
La réunion se termine à dix-huit heures dix Membres présents ou excusés
Commission d'enquête chargée de rechercher d'éventuels dysfonctionnements de la justice et de la police dans l'affaire dite Sarah Halimi et de formuler des propositions pour éviter le cas échéant leur renouvellement
Réunion du mardi 19 octobre 2021 à 17 heures
Présents. - Mme Sandra Boëlle, M. Victor Habert-Dassault, M. Meyer Habib, Mme Constance Le Grip, M. Sylvain Maillard, M. Didier Paris, M. François Pupponi
Excusés. - Mme Lamia El Aaraje, M. Julien Ravier