La réunion

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Commission d'enquête chargée d'identifier les facteurs qui ont conduit à la chute de la part de l'industrie dans le PIB de la France et de définir les moyens à mettre en œuvre pour relocaliser l'industrie et notamment celle du médicamenT

Jeudi 28 octobre 2021

La séance est ouverte à dix heures trente-cinq.

(Présidence de M. Guillaume Kasbarian, président de la commission)

La commission d'enquête chargée d'identifier les facteurs qui ont conduit à la chute de la part de l'industrie dans le PIB de la France et de définir les moyens à mettre en œuvre pour relocaliser l'industrie et notamment celle du médicament procède à l'audition des auteurs du référé de la Cour des comptes sur la mise en œuvre du programme d'investissements d'avenir (PIA).

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Nous poursuivons nos auditions en entendant deux magistrats de la Cour des comptes, auxquels je souhaite la bienvenue :

– M. Christian Charpy, président de la première chambre,

– M. Marc Fosseux, conseiller référendaire à la première chambre,

Dans un référé publié le 14 octobre dernier, la Cour des comptes s'est penchée sur la mise en œuvre du programme d'investissements d'avenir (PIA) et a notamment critiqué « le caractère limité de la démarche d'évaluation des actions financées ». Selon elle, « le moment est venu pour ouvrir une réflexion de fond sur le devenir de cet instrument, ainsi que sur sa place dans la stratégie globale d'investissement de l'État ». Votre audition permettra donc de tirer les leçons sur ce sujet.

Je vous remercierais de bien vouloir déclarer tout intérêt public ou privé de nature à éventuellement influencer vos déclarations.

L'article 6 de l'ordonnance du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires impose aux personnes auditionnées par une commission d'enquête de prêter le serment de dire la vérité, toute la vérité, rien que la vérité. Je vous invite donc à lever la main droite et à dire : « Je le jure ».

M. Christian Charpy et Marc Fosseux prêtent serment.

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Christian Charpy, président de la première chambre de la Cour des comptes

Je précise que nous n'avons à ma connaissance l'un et l'autre aucun intérêt particulier qui entacherait notre jugement et nos propos.

Le référé que vous avez cité et les observations définitives sur ce rapport que nous avons publiées hier sont le fruit d'une enquête conduite par cinq des chambres de la Cour des comptes et pilotée par Marc Fosseux, qui en était le rapporteur général. Nous nous sommes appuyés sur un certain nombre de rapports, notamment un rapport sur le rôle de la Caisse des dépôts et consignations dans la mise en œuvre du PIA, un rapport sur les véhicules et transports du futur de la deuxième chambre de la Cour des comptes encore non publié, un rapport sur les laboratoires et équipements d'excellence, un rapport sur le Secrétariat général pour l'investissement (SGPI) et un rapport sur la mise en œuvre du plan d'investissement dans les compétences (PIC) ayant donné lieu à la publication d'un référé en avril 2020. Nous nous sommes également appuyés sur d'autres travaux, tels que ceux de la première chambre de la Cour des comptes sur le PIA numérique en 2020 et le rapport sur les politiques en faveur de l'innovation demandé par la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire de l'Assemblée nationale rendu en mars 2021, ainsi que sur des travaux effectués dans le cadre du plan d'investissement pour l'Europe, dit « plan Juncker », réalisés également par Marc Fosseux et ayant abouti à la publication d'un référé.

Voici nos constats principaux et nos remarques sur le PIA.

Depuis 2010, nous observons que le PIA, dans ses trois versions successives – nous n'avons pas examiné la quatrième version dans le cadre de ce rapport – a permis une mobilisation de moyens importants dans le cadre d'une gestion budgétaire initialement dérogatoire, cadre critiqué par la Cour des comptes pour être ensuite ajusté et ne posant plus aujourd'hui de difficulté particulière.

Les priorités définies dans le rapport « Investir pour l'avenir : priorités stratégiques d'investissement et emprunt national » de MM. Alain Juppé et Michel Rocard remis à la présidence de la République le 19 novembre 2009, dit rapport « Juppé-Rocard », ont été dans l'ensemble respectées. Pour rappel, elles concernaient la recherche et l'enseignement supérieur, l'innovation en entreprise, les réseaux numériques, la diffusion numérique dans les usages techniques et sociaux et la transition écologique, notamment dans les lieux d'habitat et les transports.

Le Grand plan d'investissement (GPI), engagé en 2018, a intégré le PIA 3 et a ensuite été lui-même intégré au plan de relance, ce qui peut susciter des confusions. Ceci a permis la mobilisation de moyens complémentaires dans un cadre budgétaire de droit commun pour certains des crédits budgétaires, concernant notamment le PIC. Le contrôle parlementaire a été plutôt renforcé, même si des améliorations nous apparaissent encore nécessaires, en particulier sur la question des investissements en fonds propres, sur l'appréciation des impacts mesurables du PIA sur le bilan de l'État ainsi que sur les effets réels du PIA.

Il existe, en dehors du PIA, d'autres programmes de soutien à l'investissement que celui-ci a en partie inspirés, ce qui a pu contribuer à effacer sa spécificité et à diluer quelque peu la notion d'investissement stratégique. La plupart de ces plans poursuivent en effet des objectifs très proches, mobilisent des moyens qui s'empilent les uns sur les autres et s'appuient sur des opérateurs en général identiques : la Caisse des dépôts et consignations, la Banque publique d'investissement (Bpifrance), l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME). Il en résulte parfois une réelle difficulté pour appréhender l'ensemble des moyens consacrés à une action donnée, ce qui peut conduire à accorder moins d'importance dans les discussions et les suivis budgétaires aux préoccupations des ministères et aux crédits budgétaires de droit commun. Nous nous préoccupons particulièrement de la distinction entre ce qui relève d'une politique d'investissement ordinaire et ce qui relève d'une politique d'investissement exceptionnel.

Nous considérons que le pilotage est plutôt bien assuré par le SGPI, qui a succédé au Commissariat général à l'investissement. Ce pilotage est assez souple. Les opérateurs chargés de la mise en œuvre du PIA ont désormais acquis un savoir-faire, qu'il convient sans doute de capitaliser, et dont il faudrait surtout assurer la transition vers les administrations qui, au terme des conventions, devront prendre en charge le dispositif. Lorsqu'un opérateur du PIA dispose d'une compétence spécifique, comme l'ADEME, on considère que le suivi et le pilotage sont assez efficaces, comme a pu le montrer la montée en puissance des programmes « Laboratoires d'excellence » (LabEx) et « Équipements d'excellence » (EquipEx) s'agissant de l'ADEME ou de l'Agence nationale de la recherche (ANR).

Les investissements en fonds propres nous paraissent insuffisamment suivis. Une amélioration serait nécessaire à ce niveau, notamment par la présentation plus rigoureuse d'informations homogènes. De manière générale, nous considérons comme positif le renforcement du rôle du comité de surveillance des investissements d'avenir dans le cadre de la loi n° 2020-1721 du 29 décembre 2020 de finances pour 2021.

Il est clair que le PIA génère un réel effet d'entraînement sur d'autres financements publics et privés. Cependant, nous considérons que l'effet de levier de financement affiché doit être relativisé dans la mesure où de nombreux cofinancements, présentés comme privés, proviennent en fait d'institutions financières publiques.

Le PIA a vraisemblablement joué un rôle de catalyseur d'énergies. C'est surtout le cas dans le monde de la recherche, mais aussi, de façon moins évidente, dans certains domaines industriels comme les transports. Il n'a toutefois pas permis de régler certaines difficultés structurelles pour lesquelles les réponses ne résident pas seulement dans un apport de financement, mais également dans des actions plus profondes, par exemple en matière de structuration de filières ou de formation.

Perfectionner le PIA passe selon nous par une amélioration de son suivi et de son pilotage, aujourd'hui encore trop marqués par une approche administrative et budgétaire et insuffisamment par des outils de performance et de contrôle interne. Nous sommes par conséquent très favorables à la création d'outils d'évaluation, de même que nous estimons nécessaire de suivre et de retracer l'impact des PIA sur l'actif de la Nation afin de vérifier si celui-ci a une incidence sur la croissance effective et potentielle.

Nous avons donc proposé quelques orientations dans notre référé.

La première de ces propositions serait de renforcer l'évaluation qui, bien qu'inscrite dès le départ au cœur des PIA, reste encore partielle et inégale. Inégale selon les actions et les opérateurs, malgré des recommandations formulées sur ce point par la Cour des comptes, notamment dans son rapport de décembre 2015 sur le PIA. Nous sommes conscients que les tâches d'évaluations sont malaisées, surtout lorsque les actions sont encore loin d'être achevées. Il n'en demeure pas moins que compte tenu de l'ampleur des financements mobilisés, à savoir 57 milliards d'euros sur l'ensemble de la période hors PIA 4, l'évaluation est indispensable. Nous avons certes reçu des évaluations ex ante au moment de l'instruction, à mi-parcours dans certains cas, comme pour les programmes LabEx et EquipEx, mais il est nécessaire de généraliser les évaluations à mi-parcours, notamment parce que les projets s'avèrent souvent plus longs qu'on ne le pense et peuvent nécessiter des réorientations en cas d'échec. En effet, les investissements d'avenir ne se soldent pas systématiquement par des succès sinon nous ne serions pas sur des secteurs porteurs. L'effet du PIA comme du GPI sur le niveau d'investissement de l'État reste difficilement perceptible. Il sera probablement au final assez faible. Nous n'avons pas bien su apprécier les effets macroéconomiques du PIA. Cette tâche est en effet plutôt délicate, dans la mesure où le PIA s'ajoute à d'autres dispositifs comme des subventions ou des mesures fiscales et réglementaires. La plupart des évaluations rendues étaient donc d'ordre microéconomique et par conséquent rarement généralisables. En dépit de ces difficultés, il nous semble vraiment indispensable d'évaluer davantage et de s'appuyer sur les travaux du Comité de surveillance des investissements d'avenir, dont le rapport établi en 2019 était particulièrement éclairant.

La deuxième orientation consisterait à préciser davantage le rôle du PIA dans la stratégie globale d'investissement de l'État et de conforter les fonctions stratégiques du SGPI. Les gouvernements successifs, quelle que soit leur appartenance politique, ont fait le choix de poursuivre le PIA, mettant en œuvre en parallèle de nouveaux dispositifs quand de nombreuses actions du PIA n'étaient pas encore achevées. Il n'appartient pas à la Cour des comptes de se prononcer sur l'opportunité de ces choix. Cependant, selon nous, il apparaît nécessaire de disposer d'une stratégie claire, ce qui n'est pas complètement le cas aujourd'hui. S'agissant du PIA lui-même, nous devons dès à présent anticiper la question de sa réintégration dans les politiques d'investissement de droit commun. La réflexion doit également porter sur l'articulation du PIA avec les autres programmes nationaux d'investissement : le GPI, le Fonds pour l'innovation et l'industrie (FII), outil difficile à appréhender et dont la Cour a demandé à plusieurs reprises la rebudgétisation, ou encore le plan « France 2030 », que nous n'avons pas encore examiné. L'articulation avec l'ensemble des dispositifs mis en œuvre à l'échelle européenne doit également être examinée à travers le plan d'investissement pour l'Europe (« plan Juncker ») et le programme InvestEU. La similitude des visées stratégiques propres à l'ensemble de ces plans engendre des problèmes de cohérence et d'affichage qu'il convient de traiter.

Plus largement, la réflexion doit s'engager sur la stratégie globale d'investissement de l'État. La notion d'investissement stratégique, considérée comme vertueuse par principe, risque en effet de se diluer si la poursuite du PIA et la juxtaposition de nouveaux plans ne sont pas précédées par la définition d'une doctrine globale d'investissement. De notre point de vue, certaines évolutions positives ont été amorcées. Il s'agit notamment de la création du comité interministériel de l'innovation, présidé par le Premier ministre. De même, le fait que le comité de surveillance des investissements d'avenir se soit vu accorder des missions supplémentaires telles que le conseil du gouvernement sur les choix d'investissement nous paraît favorable. Cependant, dans une période marquée à la fois par un besoin d'investissement et par une situation dégradée des finances publiques, on redoute un risque important de voir se poursuivre deux tendances à l'œuvre aujourd'hui : la prolongation du PIA d'une part et le développement parallèle d'outils nouveaux nationaux et européens de soutien à l'investissement, d'autre part. Ce double mouvement fait peser un risque sur la cohérence globale de l'action publique, sur l'adéquation aux priorités collectives du pays et sur l'efficience de l'effort financier consenti par la collectivité nationale en matière d'investissement. Pour nous en prémunir, il nous semble nécessaire que soit adoptée une approche plus stratégique et plus globale de la politique de soutien aux investissements, qui s'appuierait notamment sur les dix années de mise en œuvre du PIA et sur les enseignements que l'on peut en tirer, afin d'adapter la politique de gouvernance et de choisir judicieusement les instruments financiers de diverses natures à mobiliser.

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Vous critiquez le manque d'évaluation globale du PIA, mais plus largement des actions entreprises et de la cohérence des politiques publiques en la matière. De votre point de vue, qui devrait évaluer les actions de l'État en matière de politique industrielle, et à quelle échéance ?

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Christian Charpy, président de la première chambre de la Cour des comptes

À notre sens, le PIA ne constitue pas véritablement un instrument de politique industrielle. Certes, il agit en matière industrielle, mais il assure surtout une mission économique transversale, notamment à travers le transfert de l'innovation du monde de la recherche vers les entreprises ou le développement de la numérisation. Nous reconnaissons toutefois que le PIA 4 marque une rupture significative en la matière en introduisant les notions d'innovation dirigée, de rupture (« deep tech ») ou structurelle.

L'évaluation s'est renforcée au cours des dernières années notamment grâce au comité de surveillance des investissements d'avenir et à la Commission nationale d'évaluation des politiques d'innovation (CNEPI) qui a achevé en 2021 un cycle d'études consacrées à l'évaluation du crédit d'impôt au titre des dépenses de recherche (CIR) sous l'égide de France Stratégie. La Cour des comptes contribue elle aussi à cette évaluation. Toutes ces activités doivent être poursuivies, surtout si l'on souhaite mieux mesurer l'impact des nouveaux secteurs industriels d'avenir sur la croissance potentielle et si l'on veut éviter la dispersion des priorités. Nous devons non seulement disposer d'évaluations ex ante, comme c'est déjà le cas, mais surtout, et nous insistons sur ce point compte tenu de la longueur des projets, d'évaluations en cours de programme, dans le but de corriger si nécessaire l'orientation des projets ou de les arrêter s'ils ne fonctionnent pas. En matière de politique d'innovation, de recherche, de politique industrielle, il y a des paris technologiques qui peuvent réussir ou échouer : il est préférable de pouvoir les réorienter ou de les arrêter à temps.

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De votre point de vue, quels secteurs industriels ont le plus bénéficié des PIA jusqu'à présent ?

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Christian Charpy, président de la première chambre de la Cour des comptes

Les priorités du rapport « Juppé-Rocard » ont été plutôt respectées pour les trois premiers PIA, qui répondaient davantage à une logique de recherche et de diffusion de l'innovation qu'à une logique sectorielle. Certains projets sectoriels n'ont d'ailleurs pas fonctionné, à l'image de l'action « véhicules du futur » orientée autour du moteur thermique. Le PIA 4 introduit une véritable nouveauté en mettant l'accent sur les secteurs d'importance stratégique du point de vue de la souveraineté économique française, cohérente avec l'assouplissement – temporaire ou durable – de la doctrine de la Commission européenne en matière d'aides d'État. Nous notons par ailleurs la création du fonds d'investissement Ace Aéro Partenaires, mis en œuvre par un organisme privé.

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Marc Fosseux, conseiller référendaire à la première chambre

De mémoire, il me semble qu'il s'agit de Tikehau Capital. Le fonds Ace Aéro Partenaires ne fait pas partie du PIA. Il a été créé en septembre 2020 et a été financé pour l'État sur des crédits du compte d'affectation spéciale « Participations financières de l'État » (CAS PFE), tout comme le fonds Definvest dans le secteur de la défense. Il s'agit donc d'un fonds sectoriel, alors que tous les autres fonds, dans le cadre du PIA, n'en sont pas spécifiquement. Ce fonds a été créé à l'initiative des industriels du secteur aéronautique, abondé financièrement par l'État comme je l'évoquais plus haut, par les régions concernées et par Bpifrance.

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Christian Charpy, président de la première chambre de la Cour des comptes

Une évaluation du fonds Ace Aéro Partenaires est en cours, dans le cadre d'un travail que nous réalisons pour la commission des finances du Sénat sur le plan de soutien à l'industrie aéronautique.

Pour revenir sur la question du PIA et des priorités sectorielles, le PIA 4 traduit un véritable changement, avec 12,5 milliards d'euros sur l'innovation dirigée, donc avec une politique sectorielle affirmée. Ce travail s'appuie notamment sur le rapport « Faire de la France une économie de rupture technologique » du collège d'experts présidé par Benoît Potier dit « rapport Potier » remis en octobre 2020, qui fixe un certain nombre d'orientations sur des marchés clés prioritaires. La difficulté, me semble-t-il, repose sur deux points. D'abord, on peut se demander si l'État est le mieux à même d'effectuer les choix de politique industrielle. Si certains succès sont incontestables, on relève également des échecs. Ensuite, lorsqu'on fixe des priorités sectorielles, les secteurs exclus des choix prioritaires ont le souhait de devenir prioritaires. À une première liste définie, vient donc s'ajouter une seconde, voire une troisième. Selon nous, faire de l'innovation dirigée nécessite de rester strict sur les projets et les priorités que l'on se fixe.

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Avez-vous pu constater un développement de nouvelles entreprises, et notamment de « jeunes pousses » (start-ups), grâce au PIA ?

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Christian Charpy, président de la première chambre de la Cour des comptes

Le PIA a en effet permis de financer la création et le développement de start-ups françaises : il y a beaucoup d'exemples dans ce domaine, notamment avec le rôle joué par des entreprises de capital-investissement, Bpifrance ou l'ADEME. Mais le capital-investissement n'est pas le seul instrument financier possible et on observe souvent un cofinancement d'origine publique, le PIA jouant plutôt un rôle de catalyseur en envoyant un signal de participation à d'autres investisseurs. Ce système semble donc plutôt bien fonctionner, bien que l'on constate un certain nombre de limites.

Premièrement, des entreprises souvent très bien médiatisées bénéficient de financements publics cumulés de toutes origines, ce qui pose la question de la captation d'un certain nombre de financements et de la manière dont l'évolution est possible vers un financement de droit commun.

Deuxièmement, nous ne disposons pas de suivi détaillé, à jour, effectif, des investissements et des risques portés par l'État ainsi que des retours financiers lorsque celui-ci finance directement, ou par le biais de fonds ou de fonds de fonds, des entreprises ou des start-ups. Il nous semble que le suivi devrait être renforcé sur ce point.

Enfin, il arrive que quelques jeunes entreprises financées par le PIA soient revendues, ce qui signe un succès économique, mais peut aussi poser problème lorsque les acheteurs sont des acteurs étrangers. Nous abordons à ce titre un travail sur le contrôle des investissements étrangers en France, notamment pour vérifier que la crise n'a pas été propice à des captations problématiques de start-ups françaises par des acteurs étrangers.

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Marc Fosseux, conseiller référendaire à la première chambre

Je ne suis pas en mesure de vous indiquer le nombre précis d'entreprises créées. En effet, les interventions en fonds propres s'effectuent souvent à travers des fonds de fonds et, par conséquent, nous ne disposons pas du détail des investissements réalisés par eux. Par ailleurs, de nombreuses jeunes entreprises innovantes préexistaient et avaient déjà bénéficié d'aides à travers d'autres dispositifs, certaines d'entre elles pouvant aussi être adossées à des opérateurs industriels importants.

Le rapport d'observations définitives de la Cour des comptes relatif au programme d'investissement d'avenir publié en octobre 2021 comporte par exemple un tableau des investissements effectués par le fonds Ecotech sur 16 entreprises :

(image non chargée)

Malgré ces réserves, on peut incontestablement considérer que le PIA a bénéficié à la création d'entreprises nouvelles et de start-ups.

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Pensez-vous que la création des sociétés d'accélération du transfert de technologies (SATT) financées par le PIA se soit montrée efficace ? A-t-elle permis la transmission d'innovations au secteur industriel ? Participe-t-elle finalement au développement de filières innovantes ? Le cas échéant, est-ce suffisant ? Sinon, quelles améliorations peut-on apporter ?

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Christian Charpy, président de la première chambre de la Cour des comptes

Ces sociétés diverses du type des pôles de compétitivité et des SATT ont bénéficié de près de 5,6 milliards d'euros, soit près de 10 % du PIA sur la période. Cet investissement est donc loin d'être négligeable. Néanmoins, si l'effort en faveur de l'innovation augmente sur la période 2010-2020, les résultats en matière de transfert étaient insuffisants d'après le constat de la Cour des comptes en 2021 dans son référé. Une augmentation de l'activité était toutefois observée en période récente et lorsque nous avons interrogé le SGPI au cours de cette enquête, ce dernier a insisté sur le fait que les derniers résultats étaient plus favorables que les précédents. Nous devrons donc procéder à une vérification de l'ensemble de ces éléments.

En 2021, la Cour des comptes a recommandé de resserrer le périmètre des outils financés par les PIA, notamment les SATT, les consortiums de valorisation thématique (CVT), les instituts de recherche technologique (IRT), ou encore les instituts hospitalo-universitaires (IHU), mais également de renforcer l'insertion de ces structures dans l'écosystème de l'innovation, de mieux mesurer leur impact socio-économique et de renforcer la circulation des compétences entre recherche publique et secteur privé. Diverses démarches sont en cours, qui gagneraient à privilégier des outils simples et homogènes, davantage visibles et duplicables. On peut notamment évoquer les boîtes à outils des accords de partenariat des instituts Carnot, du Réseau C.U.R.I.E., de l'Alliance nationale pour les sciences de la vie et de la santé (Aviesan) ou de l'Alliance PI. La simplification des dispositifs constitue en effet un enjeu massif de renforcement des liens entre la recherche, l'université et l'industrie.

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Je suis sincèrement troublé par votre affirmation selon laquelle le PIA ne serait pas un outil de politique industrielle. Si ce n'est pas le cas, qu'est-ce que le PIA ?

J'ai pour ma part expérimenté le PIA très en amont au niveau de la recherche. J'ai été invité à quelques réunions d'un LabEx et j'y ai été très choqué par l'utilisation de cet outil. Effectivement, celui-ci a eu comme vertu de permettre aux scientifiques d'acquérir de nouveaux équipements, de nouveaux moyens, de recruter des doctorants sur une voie nouvelle ou des post-doctorants sur une autre voie. Toutefois, il a été utilisé à destination d'équipes de très haute renommée qui disposaient déjà d'autres moyens, par exemple avec le Conseil européen de la recherche. On a donc rendu très riches un petit nombre d'équipes qui ont peu raisonné en termes de valorisation et de transfert et qui ont peut-être affaibli de surcroît notre tissu industriel. En effet, à travers l'acquisition de plateformes et d'outils de plateformes permis par le PIA, ils se sont retrouvés en concurrence directe avec des entreprises de services, qui n'étaient plus compétitives, ne serait-ce que parce qu'elles devaient payer des salaires.

Le modèle des SATT est intéressant. Cependant dans la santé, qui est mon domaine, si l'on est obligé de mettre en place l'agence de l'innovation en santé (AIS), c'est bien la preuve que les SATT ne sont pas parvenues à régler le problème. Ces dernières sont ainsi venues s'ajouter comme la feuille supplémentaire d'un millefeuille, sans soustraire quoi que ce soit au préalable, pour aboutir à une complexification de l'écosystème. Les collègues scientifiques qui auraient le souhait de valoriser se trouvent toujours dans l'attente de la mise à disposition d'un guichet unique. Là encore, on n'a parcouru que la moitié du chemin, en créant des SATT reposant sur des modèles économiques improbables. Ainsi, les SATT doivent gagner de l'argent ce qui, me semble-t-il, n'est pas du tout l'objet d'une structure de valorisation.

En revanche, un outil qui me paraissait vraiment pertinent, le Fonds unique interministériel (FUI) a disparu. Celui-ci permettait, à grande échelle, sur une vraie durée, avec de beaux partenariats entre le public et le privé, d'aboutir à des projets importants tels que la vaccination contre la leishmaniose grâce à la collaboration d'équipes du Centre national de la recherche scientifique (CNRS), de l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) et de l'industriel Virbac.

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Christian Charpy, président de la première chambre de la Cour des comptes

Affirmer que le PIA n'était pas un outil de politique industrielle était peut-être abusif de ma part. En fait, il aurait été préférable de préciser que le PIA n'était pas un outil de politique industrielle à visée sectorielle et verticale.

Dans les semaines à venir, nous allons publier une note stratégique sur la politique industrielle dans laquelle nous décrirons les deux volets qui la composent selon notre approche. Il s'agit d'une part d'un volet horizontal qui touche au sujet de la compétitivité-coût ou de la compétitivité hors coût et d'autre part d'un outil vertical qui consiste à choisir les secteurs.

La compétitivité-coût regroupe le coût salarial et la fiscalité. Notre sentiment sur ce point est que nous avons connu une amélioration au cours des dernières années, les écarts de coût s'étant réduits, tant en matière salariale qu'en matière de fiscalité entre la France et ses partenaires, bien que l'écart de coût résiduel s'avère problématique dans la mesure où nous ne produisons pas des produits de même gamme que nos amis allemands par exemple. Selon nous, c'est dans la compétitivité hors coût que le PIA dans ses premières versions a le mieux fonctionné, à savoir la recherche et développement, l'innovation et le transfert vers l'industrie. Il s'agit donc bien à ce niveau d'un outil de politique industrielle, mais plutôt sur l'aspect horizontal de compétitivité hors coût.

Ce n'est que récemment que cet aspect a été plus affirmé, avec le PIA 4 et la publication de rapports tels que le rapport « Potier » et le rapport « Financer la quatrième révolution industrielle : lever le verrou du financement des entreprises technologiques » de Philippe Tibi remis au Premier ministre en juillet 2019, que les secteurs industriels dans lesquels nous devons investir en termes de politique industrielle ont mieux été définis.

L'une des difficultés observables par ailleurs est la frontière assez nette entre les acteurs qui promeuvent une politique industrielle de manière générale, soit horizontale comme la direction générale du Trésor, soit verticale comme la direction générale des entreprises (DGE), et les priorités sectorielles essentielles en matière d'innovation prônées par les ministères dans les domaines du transport, de l'énergie ou de la santé. La connexion ne se fait pas toujours très bien, voire très mal, entre des priorités politiques industrielles sectorielles que peuvent partager les services du ministère de l'économie, des finances et de la relance et les préoccupations propres des autres ministères.

Ainsi, le PIA a bien une vocation industrielle en matière horizontale sur la compétitivité hors coût et il n'a pris que récemment une dimension plus verticale.

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Marc Fosseux, conseiller référendaire à la première chambre

Concernant LabEx et EquipEx, je partage assez votre point de vue. On observe des effets de structuration et de massification liés à la procédure de mise en compétition. Les lourdeurs engendrées par la mise en place des dispositifs ont pu provoquer des tiraillements entre les équipes retenues et celles qui ne l'étaient pas. Le choix de recourir à des jurys internationaux indépendants a également parfois conduit à omettre certains thèmes qui auraient pourtant pu s'avérer stratégiques. Cette difficulté a d'ailleurs été relevée dans les évaluations en cours de route de ces deux programmes.

Notre rapport mentionne lui aussi la valorisation insuffisante de la recherche. Un indicateur se révèle à ce propos assez intéressant : les cofinancements privés pour les LabEx et EquipEx se sont avérés assez faibles. En mars 2018, la Cour des comptes avait déjà publié un rapport sur les outils du PIA consacrés à la valorisation de la recherche publique et mis en évidence une difficulté dans le passage vers un financement privé, ce qui traduit probablement un problème de valorisation de la recherche.

Dans d'autres secteurs que la recherche, il peut arriver que des actions financées par le PIA, en favorisant la concentration importante de moyens et de compétences sur un projet, conduisent à dégarnir quelque peu des entreprises existantes. C'est en effet ce que la Cour des comptes avait observé au moment de la tentative de création d'un « nuage informatique » (cloud) souverain, qui n'a d'ailleurs pas abouti.

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Finalement, doit-on comprendre que le programme budgétaire 421, qui était consacré à l'enseignement supérieur et à la recherche, n'a pas permis le développement d'une réelle offre de formation ou que cette offre n'a pas été suffisamment accompagnée par l'entreprise elle-même ?

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Christian Charpy, président de la première chambre de la Cour des comptes

Le programme budgétaire 421 a permis la mise en place d'offres de formation dans le cadre d'actions relativement diversifiées. Le rapport d'évaluation du PIA remis au Premier ministre en décembre 2019 par le Comité de surveillance des investissements d'avenir notait que certaines d'entre elles avaient eu un impact très favorable sur l'écosystème de la recherche et la formation.

Des opérations restent néanmoins à renforcer. Dans le PIA 3, notamment, plusieurs actions sont destinées à développer l'offre de formation :

– l'action « Nouveaux cursus à l'université », dont l'objectif est le soutien des universités, des écoles et des regroupements d'établissements qui souhaitent diversifier leur offre de formation en licence ;

– l'action « Grandes universités de recherche », qui permet aux établissements d'exploiter leur potentiel de recherche pour construire des dispositifs innovants de formation par la recherche au niveau des masters et des doctorats ;

– les sociétés universitaires et de recherche (SUR), qui visent à renforcer l'autonomie des universités ;

– l'action « Territoires d'innovation pédagogique ».

Néanmoins, l'impact de l'ensemble de ces actions a été jugé variable. Si le Comité de surveillance des investissements d'avenir porte une appréciation assez favorable sur les LabEx, les EquipEx, et sur les équipements d'excellence qui ont contribué à structurer l'écosystème universitaire français, nous ne sommes pas certains pour autant que leur impact soit mesuré ni même mesurable dans la remontée de nos universités au sein des classements internationaux.

Il faut donc continuer d'investir dans la formation et le programme budgétaire 421 est utile de ce point de vue mais son adéquation avec l'innovation est plus difficilement mesurable.

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Le PIA 3 a participé au financement de plusieurs projets importants d'intérêt européen commun (PIIEC) acceptés par la Commission européenne. Deux projets notamment permettent la construction d'une usine de batteries à Douvrin. Quel regard portez-vous sur les PIIEC ? Comment peut-on les évaluer et qui en est chargé ?

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Marc Fosseux, conseiller référendaire à la première chambre

Nous n'avons pas spécifiquement examiné les projets que vous évoquez. L'action sur laquelle nous nous sommes penchés dans le domaine industriel est le programme « Véhicules et transports du futur » qui remonte déjà à quelques années et qui concernait le moteur thermique s'agissant de la partie automobile, action dont nous avons indiqué précédemment qu'elle n'avait pas abouti.

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Christian Charpy, président de la première chambre de la Cour des comptes

S'agissant des PIIEC, nous sommes particulièrement attentifs à l'équilibre des investissements ou des efforts réalisés par les pays participants. Concernant le projet d'usine de batteries que vous évoquez, l'Allemagne investit bien plus d'argent que ne le fait la France. Si nous sommes totalement favorables à l'idée d'avoir des PIIEC, propices à la coopération, nous pensons qu'il ne faut pas faire preuve de naïveté excessive. Nos capacités à mobiliser des financements doivent ainsi se hisser à la hauteur de nos ambitions. Si nous allons sur des projets sur lesquels l'un de nos partenaires met dix fois plus, nous risquons d'avoir des difficultés au bout du compte. Il faut faire des PIIEC mais aussi être attentif à l'équilibre entre les différents partenaires.

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Vous avez cité les pôles de compétitivité, pur produit du PIA, modèle que je défends par ailleurs. Cependant, au même titre que ma question sur les FIU, à laquelle vous n'avez pas répondu, je pense qu'il s'agit vraiment d'un exemple de dispositif initié par l'État. Ce dispositif s'est organisé et donne lieu à des évaluations assez régulières, mais se solde finalement par un désintérêt et même un désengagement de l'État, qui ne verse pratiquement plus un centime à ces pôles de compétitivité et s'est retourné vers les régions qui jouent le jeu de façon assez disparate.

Que représente l'Aviesan aujourd'hui ? Il s'agit d'une structure qui ne se réunit quasiment pas. En la faisant vivre, dans la mesure où nous nous trouvons toujours en situation de pandémie, nous aurions peut-être été en mesure d'identifier un peu plus rapidement les compétences des acteurs du domaine de la virologie dans notre pays parmi la douzaine d'organismes censés étudier la virologie humaine. Nous initions ainsi de nombreux outils de ce type qui me paraissent pertinents, mais nous ne les accompagnons pas assez et leur feuille de route n'est pas suffisamment déterminée par l'État. Qu'en pensez-vous ?

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Christian Charpy, président de la première chambre de la Cour des comptes

Nous avons travaillé avec Marc Fosseux au sein du cabinet d'un Premier ministre qui a lancé les pôles de compétitivité en 2004, assez largement avant le PIA. Dans mon souvenir, le nombre de pôles de compétitivité était assez restreint, de l'ordre d'une dizaine, nécessitant d'ailleurs la création de sous-pôles. Ensuite, nous avons probablement perdu un peu d'élan sur cette politique et l'État s'est quelque peu désengagé de ces pôles de compétitivité au profit des régions. Nous nous situons dans le cas typique où l'on crée un plan et où l'on fixe des priorités que l'on a ensuite du mal à appliquer, car beaucoup d'acteurs ne sont pas considérés comme prioritaires, se sentent lésés et demandent un élargissement du dispositif. Par conséquent, la recommandation permanente de la Cour des comptes sur ce sujet reste la fixation d'un nombre limité de priorités, leur maintien dans la durée et la mise en place d'une gouvernance qui assure ce maintien.

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Marc Fosseux, conseiller référendaire à la première chambre

Pour défendre un peu le PIA, celui-ci visait précisément à éviter une trop grande dispersion des moyens publics. Sur la question de la répartition territoriale, sujet qui a d'ailleurs été intégré au PIA 4, on observe pour les trois premiers PIA une concentration géographique très forte, notamment concernant la recherche, émanant d'une volonté allant dans ce sens comme l'exprime le rapport « Juppé-Rocard ».

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Christian Charpy, président de la première chambre de la Cour des comptes

La question de la concentration territoriale se pose de façon permanente. Souhaite-t-on créer des pôles d'innovation, ce qui implique une concentration ? Souhaite-t-on au contraire œuvrer pour l'aménagement du territoire ? Faut-il mêler ces deux sujets ?

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Faut-il maintenir le PIA ? Si non, comment en sortir et comment revenir au droit commun ?

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Christian Charpy, président de la première chambre de la Cour des comptes

Même si au départ la Cour des comptes s'est montrée assez réticente face au PIA, essentiellement pour des raisons de principe d'unité budgétaire, nous considérons désormais qu'il s'agissait d'un bon outil qu'il convient de maintenir en évitant les effets de saupoudrage et en exerçant une gouvernance rigoureuse. Néanmoins, il me semble que concentrer une politique d'investissement sur quelques priorités sectorielles ou transversales bien définies constitue une bonne solution.

A-t-on investi trop d'argent au départ et insuffisamment maintenant ? L'effort a-t-il été régulier ? Nous le verrons par la suite. À titre personnel, je suis plus inquiet face à la succession et à l'empilement de présentations politiques qui complexifient la compréhension des dispositifs et les capacités de pilotage. Le fait que le PIA 3 ait initialement été considéré pour lui-même, puis intégré au GPI, lui-même ensuite intégré au plan de relance, tout ceci dans l'optique actuelle du plan France 2030 dont l'articulation avec les autres plans reste floue, me laisse assez perplexe. Notre outil est bon, la gouvernance doit être renforcée et gagner en efficacité. Nous avons le sentiment que les sujets de la politique industrielle et de la politique de recherche sont absolument majeurs, ce qui n'était pas le cas il y a dix ans. Entre 2000 et 2020, la place de la France en matière industrielle est passée du sixième au neuvième rang, ce qui n'est pas négligeable. Certains secteurs, tels l'industrie pharmaceutique qui était un des fleurons de notre politique industrielle et de notre politique d'exportation, ont décroché significativement. Nous devons donc maintenir notre effort et poursuivre une dynamique de structuration permanente. La Cour des comptes jouera donc régulièrement son rôle en critiquant les dispersions en la matière.

Le second problème qui nous préoccupe est l'arrivée à échéance prochaine de conventions qui nous lient à des opérateurs. Si certaines ont été reportées, il convient de s'organiser pour préparer le retour de certaines des actions du PIA dans le droit commun.

Enfin, se pose la question de savoir comment procéder pour que les priorités des politiques industrielles soient pleinement partagées par l'ensemble des ministères en charge. Pour avoir longtemps travaillé au ministère de la santé et pour avoir été longtemps secrétaire général de la Commission des comptes de la sécurité sociale, le médicament était à mes yeux quelque chose qui coûtait cher. La régulation prix-volume me semblait donc tout à fait pertinente. Il arrive néanmoins un moment où l'on perçoit les limites du dispositif. Jean-Pierre Raffarin avait à cette époque créé le conseil stratégique des industries de santé (CSIS), qui essayait de donner un peu plus de contenu industriel et non pas seulement un contenu de régulation budgétaire à l'objectif national de dépenses d'assurance maladie (ONDAM). Il convient donc de réussir à concilier les priorités d'équilibre des finances publiques et les priorités de développement économique.

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Je vous remercie de vos réponses et du temps que vous nous avez consacrés. Si vous le souhaitez, je vous propose de compléter vos réponses en nous transmettant des documents complémentaires et des réponses écrites aux questions préalablement transmises.

L'audition se termine à onze heures trente.

Membres présents ou excusés

Commission d'enquête chargée d'identifier les facteurs qui ont conduit à la chute de la part de l'industrie dans le PIB de la France et de définir les moyens à mettre en œuvre pour relocaliser l'industrie et notamment celle du médicament

Réunion du jeudi 28 octobre 2021 à 10 h 30

Présents. - M. Frédéric Barbier, M. Jean-Noël Barrot, M. Philippe Berta, M. Guillaume Kasbarian, M. Gérard Leseul

Excusés. - M. Bertrand Bouyx, Mme Véronique Louwagie, M. Jacques Marilossian