La réunion débute à 14 heures 35.
Présidence de Mme Yaël Braun-Pivet, présidente
La Commission poursuit l'examen du projet de loi, adopté par le Sénat, portant report du renouvellement général des conseils départementaux, des conseils régionaux et des assemblées de Corse, de Guyane et de Martinique (n° 3812) (M. Rémy Rebeyrotte, rapporteur).
Mes chers collègues, nous poursuivons l'examen du projet de loi portant report du renouvellement général des conseils départementaux, des conseils régionaux et des assemblées de Corse, de Guyane et de Martinique. Nous reprenons à l'article 2.
Article 2 : Remise au Parlement d'un rapport sur la situation sanitaire
La commission examine l'amendement CL42 du rapporteur.
L'amendement vise à faire la synthèse entre ce que souhaite le Sénat et la proposition de Jean-Louis Debré. Ce dernier proposait que le conseil scientifique rende un rapport directement au Parlement, quand les sénateurs prévoient que le rapport ne porte que sur les éventuelles adaptations du scrutin en fonction du contexte sanitaire.
L'amendement maintient le principe de la remise d'un rapport du Gouvernement au Parlement sur la base de l'analyse du conseil scientifique – les éventuelles propositions visant à aménager le mode de scrutin ne pouvant venir que de l'exécutif sur la base, bien sûr, du rapport du conseil scientifique. Cette rédaction laissera au conseil scientifique sa liberté de parole sur l'état sanitaire du pays, au moment où il rendra son rapport, qui sera en outre ponctuel.
Je rebondis sur vos propos, monsieur le rapporteur : ce n'est pas un rapport sur l'opportunité de la tenue du scrutin. Ce dernier se tiendra en juin, quelle que soit la situation sanitaire. Le rapport vise simplement à décrire les risques et la façon dont il faudra les prendre en compte pour la campagne électorale et durant le scrutin.
Vous faites donc le choix d'un rapport sur les modalités de l'élection, et non sur son opportunité. Je m'en félicite. Néanmoins, la rédaction que vous proposez me semble moins opérationnelle que celle du Sénat. À partir du moment où l'on décide que le scrutin aura lieu, il faut certes faire en sorte de réfléchir aux « risques sanitaires attachés à la tenue du scrutin et de la campagne électorale précédant celui-ci », mais il serait également intéressant que le Gouvernement et le conseil scientifique se penchent sur les modalités permettant de les réduire et les mesures à prendre.
Je ne veux pas vous contredire, monsieur Schellenberger mais, si le conseil scientifique doit rendre un rapport sur l'état sanitaire du pays le 1er avril avec, éventuellement, des éléments prospectifs, ce n'est pas son rôle de dire comment on organise un scrutin. Le Gouvernement, et notamment le ministère de l'Intérieur, est chargé depuis toujours de cette mission et il s'adapte aux circonstances.
Dans ce cadre, quel sera le rôle de la représentation nationale ? L'Assemblée nationale et le Sénat devront s'emparer de l'analyse et des propositions du Gouvernement, rédigées sur la base du rapport du conseil scientifique, et adapter en tant que de besoin l'organisation et la mise en œuvre du scrutin.
Lors de son audition, le professeur Delfraissy l'a souligné : à partir de ses conclusions, il ne pourra pas dire quelle est la meilleure manière d'organiser le scrutin, mais seulement s'il est raisonnable ou non, d'un point de vue sanitaire, de l'organiser et quelles sont les précautions à prendre. Les modalités concrètes de son organisation seront du ressort de l'exécutif et du pouvoir législatif.
Monsieur le rapporteur, votre réponse suscite chez moi un peu d'incompréhension. Certes, le conseil scientifique va émettre un avis, puis le Gouvernement prévoir l'organisation des élections en conséquence. En revanche, je ne comprends pas quel rôle jouera le Parlement puisque le présent projet de loi, lorsqu'il sera adopté, fixera les modalités des élections locales de 2021. Le Parlement n'aura donc plus rien à dire, le décret prévoyant à la fois les dates et les modalités du scrutin. Suggérez-vous qu'il faille adopter une nouvelle loi ?
Mon amendement ne fait que préciser le fait que, sur la base du rapport du conseil scientifique, le Gouvernement nous transmet un rapport qui nous permettra ensuite de l'interroger sur les modalités du scrutin.
En cela, je suis fidèle à la position de Jean-Louis Debré, qui écrit très clairement dans son rapport que la remise de l'avis du Conseil scientifique n'aura pas « le caractère d'une clause de revoyure automatique ». Il s'agit simplement de donner au Gouvernement et au Parlement la possibilité d'adapter les conditions d'organisation du scrutin.
Je comprends bien la nuance. Ce dispositif me paraît effectivement louable, mais je me demande quand nous disposerons du rapport du Conseil scientifique – j'espère que nous l'aurons rapidement ! Nous avons les moyens d'interroger l'exécutif, en particulier dans le cadre des questions au Gouvernement ; un groupe parlementaire pourrait également proposer d'inscrire à l'ordre du jour d'une semaine de contrôle un débat relatif à la tenue des élections et à la possibilité d'organiser ces dernières sans contribuer à la propagation du virus.
Monsieur le rapporteur, vous ne dites pas toujours la même chose. J'essaie de m'attacher au texte que nous examinons : aux termes de l'article 2, c'est le Gouvernement qui remet au Parlement un rapport construit sur la base d'une analyse du Conseil scientifique. Cela me semble de bon aloi. Ce n'est donc pas le Conseil scientifique ni le Professeur Delfraissy qui nous dira quelles modalités pratiques devront être mises en œuvre pour l'organisation du scrutin. Puisque c'est le Gouvernement qui nous remettra ce rapport, il ne me semble pas illogique qu'il y ajoute quelques éléments pratiques sur la façon dont il tiendra compte du risque sanitaire dans l'organisation des opérations électorales. Cette question est incluse dans la rédaction adoptée par le Sénat alors qu'elle est absente de celle que vous proposez. Du fait de la distinction entre le domaine de la loi et celui du règlement, qui relève uniquement du Gouvernement, ce n'est pas le Parlement qui déterminera les modalités concrètes d'organisation des bureaux de vote, ni la liste des établissements recevant du public (ERP) qui pourront être ouverts pour faire campagne ou des espaces publics qui pourront être occupés dans ce cadre. Eu égard aux enjeux de ces élections, il ne me semble pas incongru de demander au Gouvernement d'évoquer ces questions dans son rapport. C'est pourquoi la rédaction du Sénat me paraît plus précise que la vôtre.
C'est justement parce que le Conseil scientifique ne peut pas se prononcer sur l'organisation concrète du scrutin que le Sénat prévoit que le Gouvernement rédige son rapport « au vu » de cet avis. Le rapport que nous remettra le Gouvernement portera évidemment sur les modalités d'organisation des opérations électorales.
La commission adopte l'amendement.
Elle adopte ensuite l'article 2 modifié.
Après l'article 2
La commission examine l'amendement CL35 de M. Paul Molac, qui fait l'objet du sous-amendement CL43 du rapporteur.
Nous souhaitons que la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (CNCCFP) publie, au plus tard le 30 avril, un guide du candidat et du mandataire spécifique aux élections régionales et départementales de juin 2021 en tenant compte de la situation sanitaire liée à l'épidémie de covid-19. Cette précaution est nécessaire car il faut absolument que les choses soient claires avant le début de la campagne. Lors des élections législatives de 2012, les préconisations de la CNCCFP relatives aux circonscriptions des Français de l'étranger avaient été émises très tard, et certains candidats qui avaient déjà commencé leur campagne s'étaient trouvés particulièrement ennuyés.
Je suis favorable à l'amendement sous réserve de l'adoption de mon sous-amendement CL43, qui vise à supprimer la date butoir donnée à la CNCCFP – cette dernière a parfaitement compris le message – et à préciser que le guide doit être actualisé. Il ne s'agit pas de republier un guide existant, mais bien de fournir aux candidats et à leurs mandataires des indications très précises adaptées aux conditions particulières du scrutin.
Cette disposition me semble très importante. Quand on a un peu d'expérience en politique et qu'on a été candidat à de nombreuses élections, on sait à peu près comment les choses fonctionnent, mais quand interviennent des changements importants liés à un contexte particulier, il ne faudrait pas se laisser piéger par l'habitude.
Par ailleurs, ces guides gagneraient à être rendus plus lisibles et plus compréhensibles, car pour des gens qui n'ont aucune expérience électorale, ils ne sont pas si simples. Je ne parle pas forcément des élections régionales, qui sont un peu différentes puisqu'elles ont lieu au scrutin de liste ; en revanche, un primo-candidat à une élection départementale doit avoir une compréhension claire et précise des règles auxquelles il est soumis. La même démarche pourrait être entreprise pour les élections municipales, par exemple. Nous sommes nombreux ici à avoir participé à ces élections : nous pouvons donc attester qu'il n'est pas évident, la première fois, de déchiffrer les guides fournis à cette occasion.
Au risque de passer pour un ancien combattant, je précise que j'entamerai dans quelques semaines ma cinquième campagne pour les élections départementales. À l'échelle départementale, justement, nous sommes le plus souvent membres d'un collectif, que nous appartenions à la majorité ou à l'opposition : les choses sont alors quelque peu organisées. Quant aux candidats indépendants, ils ont parfois une notoriété non dissimulée, qu'ils doivent assumer – je ne parle pas forcément pour moi. Je m'interroge donc sur l'utilité de l'amendement présenté par M. Molac ; je ne sais pas dans quelle mesure un outil élaboré par la CNCCFP serait plus lisible qu'un guide proposé par les partis politiques.
Une fois n'est pas coutume, je me retrouve dans l'intervention de M. Questel. Pour qu'une démocratie soit effective, il faut évidemment garantir au plus grand nombre la possibilité d'accéder aux mandats électifs, mais cela ne veut pas dire que les candidats doivent faire campagne en méconnaissant la loi. Quand on aspire à exercer des responsabilités publiques, la première responsabilité doit être de s'intéresser aux règles en vigueur pour y accéder.
J'entends souvent que les partis politiques seraient un outil désuet, dépassé, démodé – ce n'est pas ce qu'a dit M. Questel, alors qu'il a un long passé d'indépendant –, et que chacun devrait pouvoir se présenter librement à une élection. Les partis politiques n'en ont pas moins un rôle à jouer, qui leur est d'ailleurs reconnu par la Constitution, dont l'article 4 dispose qu'ils « concourent à l'expression du suffrage ». Leur rôle est d'aider nos concitoyens à se porter candidats et à accéder aux mandats électifs.
Que je sois candidat ou non à une élection, je lis toujours avec attention les guides de la CNCCFP. Mais je lis avec encore plus d'attention les guides édités par les différents partis politiques, et je tombe parfois sur des pépites. Les guides électoraux de La République en marche pour les élections municipales expliquaient même ce qu'il fallait dire aux électeurs, alors que cela relève normalement de la liberté du candidat ! Je vois en tout cas que même les nouveaux partis politiques comme La République en marche sont capables d'éditer des guides électoraux à destination des candidats : je fais donc confiance à l'ensemble des parties prenantes de la démocratie, y compris aux partis politiques, pour faciliter l'accès aux mandats.
La CNCCFP change parfois d'avis alors que la campagne a déjà commencé. C'est arrivé en 2012, pour l'élection des députés représentant les Français de l'étranger. Certains d'entre eux, dont des personnes bien briefées par des partis, ont fait l'objet d'une invalidation.
Si, car je demande que l'on fasse bien attention au fait que nous sommes en période de pandémie et que l'on amende le guide.
L'amendement, tel que le rapporteur propose de le sous-amender, apportera un complément intéressant. Cela n'enlèvera rien aux partis politiques mais cela permettra à chacun et à chacune – dans les partis et chez les candidats – d'être aussi bien éclairé, informé, que possible. Ce sera un plus pour la démocratie.
De quoi est-il question ? D'un document donnant une information actualisée et émanant de l'autorité qui fixe les règles. Cela sécurisera les élections : plus l'information est précise et récente, moins on est exposé à des recours, qui prennent du temps et mobilisent la justice. Ce sera donc forcément positif. Les partis politiques joueront également leur rôle, comme l'a très bien dit Mme Karamanli. Le dispositif n'entrera pas en opposition avec leur action.
Les partis politiques pourront ensuite diffuser une information précise, étayée et actualisée. Et j'espère que l'on distribuera, en plus, des tongs chez Les Républicains, comme l'avait fait l'UMP à une époque (Sourires). Avec la commission dont nous parlons, il n'y aura pas de produits dérivés : on aura toujours un avantage si on passe par un parti.
Que cette commission mette à la disposition des candidats une analyse claire des conditions juridiques, surtout quand il s'agit des élections départementales, qui sont de proximité et auxquelles se présentent des notables, des maires, qui n'appartiennent à aucun parti et qui n'en ont pas envie, cela me paraît être la moindre des choses et je ne vois pas en quoi cela pourrait constituer une atteinte aux partis. On peut parfaitement être candidat à une élection, et même être élu, sans être membre d'un parti. On peut aussi en rejoindre un après avoir été élu, ou on peut s'en retirer.
Mais non, c'est tout simplement suivre un chemin, avoir une démarche citoyenne qui peut ne pas être liée à un parti.
Je pense aussi, même si c'est peut-être hors sujet, aux élections municipales. Beaucoup de listes citoyennes extrêmement intéressantes se situent en dehors de tout parti, ou bien elles peuvent être très différentes des partis auxquelles elles se rattachent.
Je trouve que l'amendement et le sous-amendement sont donc très pertinents.
La commission adopte le sous-amendement.
Puis elle adopte l'amendement sous-amendé.
Elle examine l'amendement CL36 de M. Paul Molac.
Nous proposons qu'un comité de liaison entre le Gouvernement, les groupes parlementaires et les principaux partis politiques se réunisse au moins toutes les deux semaines en vue de délibérer sur les conditions d'organisation des élections départementales et régionales prévues en 2021. Il s'agit d'institutionnaliser la concertation et la transparence qui sont nécessaires pour obtenir la confiance des citoyens dans les processus électoraux auxquels ils seront appelés à participer.
Le Gouvernement mène des concertations régulières : un comité de liaison avec les groupes parlementaires et les partis politiques existe déjà. Il n'est pas nécessaire d'institutionnaliser cette pratique en l'inscrivant dans la loi. Je vous suggère donc de retirer l'amendement, à défaut de quoi j'émettrai un avis défavorable.
Il est vrai que le Gouvernement mène des concertations avec les représentants des groupes et des partis politiques, mais pas comme c'est écrit dans l'amendement, qui fait référence aux « principaux partis politiques » : il y a des grand-messes, qui ne respectent pas toujours les contraintes liées au covid, car ce ne sont pas les partis politiques qui manquent en France – il arrive parfois que le nombre de leurs adhérents ne soit pas supérieur à celui de leurs dirigeants. Les réunions rassemblent vraiment beaucoup de monde… Les nuances et les subtilités des idéologies politiques sont très intéressantes mais la situation est parfois un peu compliquée, notamment en matière de pilotage, quand on met absolument tout le monde autour de la même table. Cet amendement a l'avantage de mettre en lumière un mode de fonctionnement discutable.
Il n'y est pas question des micro-partis, dont l'existence est notamment liée aux conditions de financement de la vie politique, ce qui ne manque pas de poser quelques questions.
La commission rejette l'amendement.
Article 3 (art. 3 et 11 de l'ordonnance n° 2020-1304 du 28 octobre 2020 portant diverses mesures institutionnelles relatives à la création de la Collectivité européenne d'Alsace) : Adaptation des mesures transitoires applicables à la Collectivité européenne d'Alsace
La commission adopte l'article 3 sans modification.
Article 4 : Adaptation des règles de propagande électorale et de financement de la campagne pour les élections régionales et départementales
La commission est saisie de l'amendement CL45 du rapporteur.
Cet amendement tend à apporter quelques précisions rédactionnelles et à supprimer l'interdiction prévue par l'article L. 50-1 du code électoral aux termes duquel aucun numéro d'appel téléphonique ou télématique gratuit ne peut être porté à la connaissance du public par un candidat, une liste de candidats ou à leur profit.
Cette interdiction, datant de 1990, est un peu anachronique. Elle ne paraît pas opportune compte tenu des circonstances dans lesquelles la prochaine campagne électorale se déroulera. La mise à disposition d'un numéro d'appel gratuit, qui serait, le cas échéant, prise en charge par les candidats eux-mêmes, permettrait aux électeurs de se renseigner sur les programmes en l'absence de réunions électorales physiques : on pourrait appeler un candidat ou son équipe grâce à un numéro vert et ainsi se renseigner.
La disposition en vigueur est un peu curieuse. Je ne sais plus très bien quelle en était la raison, mais je crois qu'on craignait en particulier un démarchage. Or ce n'est pas ce qui se produira, puisque ce sont les électeurs qui pourront appeler pour en savoir plus sur tel ou tel point.
Je suis partagé sur cet amendement. Comme vous, je pense qu'il est désuet de prévoir des affiches électorales sans numéro vert. De toute façon, de nombreux candidats y font figurer un numéro de portable ou de ligne fixe pour être appelés. Que le compte de campagne puisse prendre en charge les coûts des appels au candidat de la part d'électeurs intéressés ne me pose pas de problème. En revanche, que le candidat puisse disposer d'un numéro vert m'interpelle : si je suis d'accord pour considérer comme une dépense électorale des frais de téléphonie, quel que soit le sens de l'appel, je ne suis pas certain que le numéro vert, qui est un outil de politique publique, doive devenir un outil de conquête électorale et être mis à disposition d'une campagne.
À son origine, le numéro vert était réservé aux campagnes d'intérêt national – campagnes d'appel au don, à la solidarité. C'est moins le cas à présent : le dispositif s'est élargi.
Par ailleurs, la démocratie est aussi une grande cause nationale. Donner à l'électeur la capacité d'interroger le candidat sur un point du programme, voire de lui poser des questions directement, si tel est le choix du candidat, fait partie de ces causes qui sont légitimes. Le numéro vert permet même à un électeur qui n'a pas des moyens considérables d'échanger avec un candidat.
Le candidat est naturellement libre de recourir ou non à un tel numéro, mais si cela élève la démocratie, notamment locale, au rang des grandes causes nationales, ce n'est pas plus mal dans le contexte actuel.
Je partageais les remarques de Raphaël Schellenberger, mais les précisions du rapporteur me convainquent aussi. Il faut en finir avec ce tabou selon lequel un candidat ne peut pas disposer d'un numéro vert. Le téléphone est tout de même un outil intéressant.
S'agissant de l'argument financier, la plupart des électeurs paient non pas leurs communications, mais des forfaits qui leur permettent d'appeler largement. Il est intéressant de disposer enfin de numéros de téléphone sur lesquels les électeurs peuvent appeler pour obtenir des renseignements sur le programme, auprès du candidat ou de son équipe. Aujourd'hui, nous le faisons indirectement puisque nous sommes interpelés sur nos programmes par d'autres voies, notamment celle des réseaux sociaux. Cela signifierait que l'on n'aurait pas le droit de répondre au téléphone à propos de notre programme, mais que l'on pourrait répondre par mail ou par un site. Faire sauter cet interdit semble de bonne politique.
Monsieur le rapporteur, sur quelles expériences et analyses vous appuyez-vous pour faire cette proposition ? Je comprends la volonté de permettre à chacun d'accéder facilement à l'information, mais il me semble que nous manquons de recul pour justifier la proposition.
Les circonstances de la pandémie la justifient. La question est posée à chaque fois que nous débattons de la loi électorale. Nous étions restés à la situation de départ car nous n'avions pas rencontré d'enjeux aussi majeurs que ceux que nous connaissons actuellement.
Les numéros de cette nature existent dans tous les pays européens : l'électeur peut appeler librement pour obtenir une information, un élément de programme ou une précision sur un rendez-vous donné par le candidat, y compris en visioconférence.
Les prochaines campagnes électorales seront très compliquées. Dans un contexte où il sera difficile d'organiser des réunions publiques, disposer d'un tel numéro de téléphone semble important, même si l'on peut utiliser les réseaux sociaux ou organiser des campagnes. Avec un numéro de téléphone gratuit, une personne qui souhaite rencontrer son candidat aura une possibilité d'échanger et de faire vivre la démocratie. Nous y sommes donc favorables.
Mon problème n'est pas qu'il y ait un numéro de téléphone, un numéro d'appel ou qu'il soit gratuit. Je m'interroge sur le fait que l'on confonde un jour ce numéro, qui peut être un outil de communication institutionnelle, avec un numéro de priorité. Mettre sur les affiches un numéro semblable aux numéros d'appel pour un danger particulier, par exemple pour l'enfance en danger, pourrait entraîner une confusion discutable.
Le Gouvernement pourra peut-être répondre techniquement à cette question, en nous assurant que les numéros d'appel gratuit que l'on pourrait faire apparaître sur les affiches ou les documents de propagande, ne soient pas des 0800 ou des 3919, mais des numéros classiques, dont la prise en charge dans les comptes de campagne serait organisée. Cela me semble être un point d'équilibre, pour faciliter l'accès au candidat, tout en évitant de confondre candidature politique et institutions.
L'indicatif 0800 était en effet prévu pour les appels prioritaires de l'État. Il est différent, aujourd'hui : il y a souvent quatre chiffres, ce qui permet d'éviter la confusion. Ce n'était pas le cas en 1990.
La commission adopte l'amendement.
Puis elle adopte l'amendement rédactionnel CL46 du rapporteur.
Elle en vient à l'amendement CL29 de Mme Marietta Karamanli.
Il vise à réduire de six à trois mois le délai donné à la CNCCFP pour valider les comptes de campagne des candidats, en l'absence de contentieux. La date limite est actuellement fixée au 10 mars 2022, ce qui rendrait le remboursement des frais de campagne concomitant avec le premier tour de l'élection présidentielle. Cette situation pourrait porter préjudice à certains candidats ou partis politiques ayant contribué au financement d'un candidat et amenés à le faire de nouveau. Il apparaît souhaitable de finaliser ces opérations avant la fin de l'année 2021, si les élections se tiennent en juin.
Avis défavorable. Les représentants de la CNCCFP, que nous avons auditionnés la semaine dernière, nous ont dit qu'ils n'avaient pas trop de six mois pour valider les comptes de campagne des milliers de candidats aux élections régionales et, surtout, départementales. Il paraît donc irréaliste de diviser par deux la durée au terme de laquelle la commission devra se prononcer sur les comptes de campagne : tout contrôle deviendrait impossible.
Cela étant, nous avons essayé de négocier avec la commission. Nous avons proposé qu'elle dispose d'un mois de plus pour traiter les cas donnant lieu à un contentieux mais qu'elle traite plus rapidement les situations qui ne posent pas de problème. Il est vrai que le délai nécessaire à la validation des comptes et au remboursement des frais de campagne est souvent trop long et que c'est un frein à la démocratie.
Je ne crois pas qu'il faille négocier avec la commission, mais fixer certaines limites. Les délais sont souvent trop longs, alors que rien ne le justifie. Et, en 2022, cela pourrait mettre en difficulté certains candidats ou certains partis concernés par les élections présidentielles.
La commission rejette l'amendement.
Puis elle adopte l'article 4 modifié.
Après l'article 4
La commission examine, en discussion commune, l'amendement CL22 de Mme Élodie Jacquier-Laforge et les amendements identiques CL47 du rapporteur et CL38 de Mme Yaël Braun-Pivet.
Cet amendement vise à allonger de douze à dix-neuf jours la durée de la campagne officielle régie par le code électoral avant le premier tour des élections régionales. Cela facilitera l'accès des électeurs aux messages des candidats dans une période de crise sanitaire où la campagne électorale ne pourra pas être menée sous sa forme habituelle.
Je suis tout à fait favorable à l'amendement du groupe du Mouvement démocrate et Démocrates apparentés mais je propose de l'élargir aux élections départementales.
L'amendement CL38, identique à celui du rapporteur, est celui du groupe La République en marche.
J'ai juste une petite question technique : cette disposition aura-t-elle un effet sur le délai qu'ont les candidats pour remettre leurs circulaires à la préfecture, afin qu'elle les diffuse ?
L'idée est vraiment d'allonger les délais pour tous les aspects de la campagne. La campagne officielle sera plus longue et le délai de dépôt des candidatures le sera aussi. Il s'agit d'adapter le rythme de la campagne à la situation si particulière que nous connaissons.
L'amendement CL22 est retiré.
La commission adopte les amendements identiques.
Elle examine l'amendement CL48 du rapporteur.
Cet amendement répond à la question que vous venez de poser, monsieur Schellenberger, au sujet du dépôt des candidatures.
L'extension de la durée de la campagne électorale de douze à dix-neuf jours rend nécessaire, par coordination, l'avancement d'une semaine de la date limite de dépôt des candidatures. Pour le premier tour des élections régionales de juin 2021, le présent amendement prévoit donc que les déclarations de candidature sont déposées au plus tard le cinquième lundi qui précède le jour du scrutin, à midi – le guide sera particulièrement utile pour préciser toutes ces dates. S'agissant du premier tour des élections départementales, la détermination de la date limite de dépôt des candidatures relève du pouvoir règlementaire, puisqu'il dépend d'un arrêté préfectoral. Cela dit, le ministère de l'intérieur nous a indiqué qu'il demanderait aux préfets d'harmoniser les deux campagnes, pour ne pas créer de confusion.
La commission adopte l'amendement.
Article 4 bis : Règles d'organisation des bureaux de vote équipés de machines à voter
La commission examine l'amendement CL30 de Mme Marietta Karamanli.
Le déploiement des machines à voter fait l'objet d'un moratoire depuis 2008. Il va de soi que l'article 4 bis, qui a été ajouté par le Sénat en séance publique, mais qui a vocation à être pleinement satisfait par un décret au cours des prochaines semaines, ne concerne que les communes qui utilisent à ce jour des machines à voter, soit environ une soixantaine. Je vous invite donc à retirer votre amendement ; à défaut, j'émettrai un avis défavorable.
Nous reparlerons de ces machines à voter, car l'amendement CL24 du groupe du Mouvement démocrate et Démocrates apparentés demande un rapport sur la question. Il paraît tout à fait essentiel de faire le point sur ces machines et les évolutions technologiques qu'elles ont connues.
Nous avons déjà débattu de ces machines à l'occasion de l'examen d'un autre texte. Le moratoire empêche de les renouveler, elles suscitent parfois des doutes, mais il paraît important que les communes qui en disposent puissent les utiliser lors des prochaines élections. Espérons que le rapport ne tardera pas trop.
J'ai le même problème, puisque les deux plus grandes communes de ma circonscription, qui comptent 10 000 et 7 000 habitants, ont des machines à voter. Or leur population augmente et elles ne peuvent pas racheter de machines, parce qu'il n'est plus possible de les faire homologuer. J'ai d'ailleurs écrit au ministère de l'Intérieur à ce propos.
Les moratoires, c'est bien, à condition d'en sortir. Le rapport devra être rendu au Parlement avant le 1er octobre 2021. Les communes qui disposent des machines ne peuvent pas les actualiser et alors que de nouvelles machines permettraient de sécuriser le vote, il est impossible de les installer. L'exécutif et le législateur doivent définir une stratégie commune sur l'avenir de ces machines et de ce type de vote.
La commission rejette l'amendement.
Elle adopte l'amendement rédactionnel CL49 du rapporteur.
Elle adopte l'article 4 bis, modifié.
Après l'article 4 bis
La commission examine l'amendement CL24 de Mme Isabelle Florennes, sous‑amendé par le sous-amendement CL50 du rapporteur.
Après douze ans de moratoire sur l'installation des machines à voter, il est temps d'avancer. J'ai d'ailleurs saisi le ministère de l'Intérieur il y a deux ans, sans obtenir de réponse satisfaisante. Il est nécessaire d'aller de l'avant, d'une part, pour les communes qui utilisent ces machines et d'autre part, parce que dans la période sanitaire actuelle, leur utilisation peut être précieuse. Cela fait plus de seize ans que soixante communes les expérimentent, si l'on peut encore appeler cela une expérimentation ! Se pose désormais le problème du renouvellement des machines, de leur vieillissement et du remplacement de leurs pièces. Nous avons été saisis par les soixante maires, et je suis heureuse de vous présenter un amendement qui permettra au ministère de clarifier sa position sur ces machines que plusieurs pays européens utilisent depuis de nombreuses années. Je rappelle qu'il n'existe aucun contentieux à leur propos et qu'aucune fraude n'a été signalée.
Le sous-amendement vise à repousser la date de rendu du rapport au 1er octobre 2021 au plus tard. Nous vous suivons, madame Florennes, et le ministère de l'Intérieur est également très favorable à votre demande de rapport.
Les attentes sont réelles. Plusieurs groupes soutiennent notre démarche. Je vous remercie, monsieur le rapporteur.
Vous pouvez compter sur notre vigilance collective pour que le rapport soit remis, car on nous en doit encore un certain nombre…
La commission adopte le sous-amendement.
Elle adopte l'amendement sous-amendé.
Article 5 : Délai supplémentaire applicable au dépôt des comptes de campagne des candidats
La commission étudie l'amendement CL51 du rapporteur.
Il vise à reporter d'une semaine la date limite de remise des comptes de campagne, au 17 septembre 2021.
La commission adopte l'amendement.
Elle est saisie de l'amendement CL52 du rapporteur.
L'article L. 118‑2 du code électoral prévoit que, lorsqu'une élection dans une circonscription fait l'objet d'un recours contentieux, la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (CNCCFP) doit se prononcer sur les comptes de campagne des candidats à cette élection dans le délai de deux mois suivant la date limite de leur dépôt. En 2021, l'examen des comptes de campagne des candidats aux élections régionales devra être effectué dans le même délai que celui des comptes des candidats aux élections départementales, dans des circonscriptions sensiblement plus nombreuses. Enfin, il ne peut être exclu qu'un contexte sanitaire dégradé accroîtrait les difficultés pour les candidats concernés à réunir et à transmettre les pièces justificatives supplémentaires sollicitées par la CNCCFP. Il est donc proposé de porter à trois mois le délai de contrôle des comptes par la CNCCFP en cas de contentieux contre les opérations électorales, pour les seules élections régionales.
La commission adopte l'amendement.
Elle adopte l'article 5, modifié.
Article 6 : Campagne audiovisuelle des candidats aux élections régionales
La commission examine l'amendement CL53 du rapporteur.
Cet amendement tend à supprimer l'article 6 adopté par la commission des lois du Sénat. Celui-ci impose aux chaînes audiovisuelles du service public d'organiser la diffusion sur leurs antennes de clips de campagne des candidats aux élections régionales.
Si l'objectif de cette disposition s'avère louable, elle se heurte à plusieurs obstacles techniques majeurs qui empêchent, compte tenu des délais applicables, sa mise en œuvre effective. Nous avons auditionné lundi après-midi France Télévisions et le Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA), ce qui m'a permis de mesurer le bien-fondé de leurs arguments.
Premièrement, la diffusion de tels clips s'effectuerait au détriment des programmes déjà en place sur les décrochages régionaux de France 3, c'est-à-dire les éditions d'informations régionales qui devraient ainsi être raccourcies, ce qui ne favoriserait pas le débat démocratique et la bonne information des téléspectateurs. Surtout, ce temps de diffusion rognerait sur celui des débats alors qu'il faudrait plutôt privilégier ces derniers.
Deuxièmement, s'agissant de la production de ces clips, au-delà du surcoût important que cette évolution entraînerait, l'organisation d'une telle campagne ferait peser sur les équipes régionales un surcroît d'activité et une complexification de l'organisation des activités des stations régionales. Je pense en particulier à la vérification par France 3 du nécessaire respect des règles entourant la production de ces clips. Soit France 3 les réalise elle-même, soit elle en délègue la production à des extérieurs, au risque d'en compromettre la qualité ou l'homogénéité.
Troisièmement, si le périmètre défini pour les régions de France 3 correspond bien aux régions administratives, la réception des offres TV par la TNT ne recoupe pas toujours parfaitement ces territoires, contraignant certains téléspectateurs à recevoir programmes et informations conçus pour la région voisine. Ce n'est pas exceptionnel. Une partie des citoyens recevrait ainsi des spots officiels de candidats qui ne les concernent pas.
Pour toutes ces raisons, il me semble nécessaire de supprimer l'article 6, indépendamment des indispensables réflexions que nous devrons mener dans les prochaines années autour des campagnes électorales audiovisuelles.
Le groupe Les Républicains votera contre cet amendement. Nous sommes capables de faire campagne autrement, y compris en temps de crise, et nous pourrions moderniser les campagnes électorales. Il est invraisemblable que cet espace d'expression publique ne soit pas accessible aux candidats aux élections. Vos arguments, monsieur le rapporteur, ne me satisfont pas. Celui concernant la diffusion par la TNT se comprend mais on ne peut pas considérer non plus qu'une minorité puisse l'emporter sur l'information de la majorité et, surtout, qu'elle serait incapable de comprendre, si elle habite dans le Grand Est, les informations qui concernent la Bourgogne Franche-Comté par exemple. C'est le cas pour le journal télévisé et, au passage, les téléspectateurs du Grand Est concernés doivent passablement s'agacer de recevoir le journal régional de la Franche-Comté.
Quant à la différence de la qualité des clips entre les candidats, on pourrait tout aussi bien parler de celle des circulaires que la préfecture distribue ou du manque d'homogénéité entre les clips des candidats à la présidentielle qui, eux, ont ce droit de tirage sur la télévision. Tous les clips ne se valent pas et je ne parle pas de l'appréciation subjective que l'on pourrait porter en fonction du candidat. Qui serait qualifié pour juger, en toute objectivité, de la valeur d'un clip ?
Enfin, la diffusion de ces clips ne saurait rogner sur le temps actuel consacré aux décrochages régionaux mais il me semble assez facile d'augmenter le temps de décrochage régional de France 3, ce qui satisferait tout le monde. Pourquoi ne pas saisir l'occasion de cette campagne électorale ?
Je suis d'accord avec une bonne partie des arguments de Raphaël Schellenberger. Pour avoir été responsable d'une campagne audiovisuelle à l'élection présidentielle, je comprends très bien pourquoi France 3 et France Télévisions vous ont opposé de tels arguments. Cette situation, ne le cachons pas, est une conséquence de l'abandon progressif des antennes régionales, dont certaines ont été tout bonnement sacrifiées. Nous aurions pu saisir cette occasion pour réarmer ces antennes car nous avons besoin de télévisions régionales fortes, qui délivrent des informations claires et précises.
Cela étant, les arguments que vous nous opposez ne tiennent pas. Ce sont exactement les mêmes que l'on entend quand on monte une campagne audiovisuelle pour la présidentielle. Avez-vous une idée des contraintes qui pèsent sur les réalisateurs des clips officiels de campagne présidentielle ? Ils sont loin de faire ce qu'ils veulent ! Le problème n'est pas le message à délivrer mais les moyens techniques de le réaliser. Il faut travailler pour moitié avec les équipes de France Télévisions, pour l'autre avec celles de la campagne, sous prétexte d'uniformiser. Pourtant, aujourd'hui, pour tourner des clips qui se tiennent, on n'a pas besoin de s'appeler Steven Spielberg, ni de disposer de moyens disproportionnés.
Il est dommage de supprimer cet article car l'audiovisuel permet de transmettre des messages. Quant aux décrochages TNT, l'argument n'est pas plus valable. Dans mon territoire, certains captent les décrochages de Vannes à cause de la direction de leur antenne, d'autres les décrochages de Brest. Lors de la diffusion de la chaîne local du groule Le Télégramme, qui est notre quotidien régional, ils captent l'un ou l'autre. Cependant, Internet permet de regarder les programmes que l'on veut tandis que le câble et les offres ADSL offrent l'accès à toutes les chaînes. Si j'avais envie de regarder les prestations de Raphaël Schellenberger sur une chaine locale d'Alsace, je le pourrais. Ces arguments ne tiennent pas.
J'ai bien l'impression que s'organise une coalition des Français de l'extérieur ! Je trouve dommage, moi aussi, que cet article soit supprimé. Je comprends bien que France 3 préférerait organiser ses grilles de programmes sans qu'on lui impose de passer des clips mais il me semble important, pour la démocratie, que l'on autorise la diffusion de clips de campagne des candidats aux élections régionales, comme cela existe pour l'élection présidentielle ou les élections syndicales. Ce serait d'autant plus nécessaire que la région prend de plus en plus d'importance.
Bien sûr, il y aurait des effets de bord mais seraient-ils si importants ? Voyez-vous, alors que j'habite dans le Finistère, je capte mieux, pour des raisons qui tiennent à la géographie, la télévision de Rennes, en Ille-et-Vilaine. Si je veux regarder les programmes du Morbihan, j'ai d'autres moyens pour le faire. Ce n'est pas un problème.
Je voudrais rendre hommage à France 3. Lors du second tour des élections municipales, ils ont mis l'accent sur les débats et ils ont su s'adapter très rapidement pour organiser des débats qui n'étaient pas prévus initialement. Pas moins de 240 débats ont été diffusés sur France 3 pour le seul second tour des municipales.
J'ai demandé à France 3 si l'on pouvait prévoir des clips et des débats. Ils m'ont répondu par la négative : s'il y a des clips, le temps consacré aux débats sera réduit, tout simplement parce que France 3 est organisée comme l'a décrit Erwan Balanant. Si, demain, nous menons la réforme voulue par Delphine Ernotte, pour faire de France 3 une chaîne beaucoup plus régionale avec des décrochages nationaux, la donne en sera totalement changée et nous pourrons autoriser clips et débats. En attendant, je préfère privilégier le débat à la succession de clips.
J'ai aussi l'expérience du monde de l'audiovisuel – bien qu'en des temps plus anciens – et j'en retiens que les clips institutionnels des syndicats et des partis politiques, trop longs, battaient les records de décrochage des téléspectateurs. Quand les gens voyaient arriver à l'antenne ces programmes dont la réalisation n'était pas toujours formidable, c'était le signal pour changer de chaîne. Et s'il y avait relativement peu de chaînes à l'époque, nous avons maintenant l'embarras du choix pour zapper.
Ces clips ne doivent pas consommer du temps d'antenne qui serait plus utile aux débats. Pour dynamiser une campagne dans les conditions de crise sanitaire, il est préférable d'organiser des débats au premier et au second tour. Ils permettront de confronter les points de vue et les programmes, et de présenter les projets pour la région.
La commission adopte l'amendement et l'article 6 est supprimé.
Après l'article 6
La commission est saisie de l'amendement CL25 de Mme Élodie Jacquier-Laforge.
Il s'agit encore des clips de campagne, mais sur les réseaux sociaux plutôt qu'à la télévision. Pour aller chercher les électeurs où ils se trouvent, il faut communiquer sur les réseaux sociaux.
Nous proposons d'autoriser la diffusion de clips de campagne sur les réseaux sociaux, dans des conditions définies par le Conseil supérieur de l'audiovisuel. Cette mesure permettra d'organiser la campagne des élections régionales dans les meilleures conditions possibles compte tenu de l'impossibilité des rencontres et des réunions publiques, tout en maintenant le contrôle du CSA.
Nous parlons fréquemment de la régulation des réseaux sociaux au sein de cette commission, ce ne sont pas des espaces de non-droit et les différents courants politiques doivent s'y exprimer dans le respect des règles du CSA.
Je vous demande de retirer cet amendement, à défaut j'y serais défavorable, pour deux raisons.
Le sujet soulevé est pertinent, mais il est compliqué d'attribuer au CSA un nouveau rôle de régulation des clips de campagne diffusés sur les réseaux sociaux pour les prochaines élections régionales et départementales. Le respect du code électoral me semble suffire pour réguler efficacement la campagne électorale. Chacun peut publier ce qu'il souhaite sur les réseaux sociaux, mais vu les volumes en jeu, les moyens nécessaires pour réguler toutes les publications sont tels qu'il serait très difficile au CSA de le faire.
Une réflexion globale doit être menée sur la propagande électorale dématérialisée au XXIe siècle. Ce travail est mené par le ministère de l'intérieur, il serait bon qu'il aboutisse avant la fin de l'année pour nous permettre d'ouvrir par étapes nos modes de campagne électorale et nos scrutins aux nouvelles technologies.
Je comprends que cette proposition entraînerait un surcroît de travail pour le CSA, mais personne ne contrôle les clips que les candidats publient sur internet. Certains flirtent avec la limite des règles électorales, ou ne s'embarrassent pas de la moindre politesse, voire sont diffamatoires. Il est dommage qu'il n'y ait pas de régulation, ou au moins une possibilité de faire retirer rapidement ces éléments lorsqu'ils sont diffamatoires. Le texte sur les fake news permettra peut-être d'arranger les choses, c'est pourquoi j'y suis attentif.
En plus des règles de présentation des circulaires papier, il faut rapidement que le ministère de l'Intérieur diffuse un « paquet numérique » pour fixer un format de clip dont la durée serait déterminée, et qui devrait respecter une charte.
Nous débattons de la régulation des réseaux sociaux dans plusieurs textes. Les candidats sont libres de diffuser ce qu'ils veulent sur les réseaux sociaux, mais il est interdit d'y acheter de la publicité. Cette règle permet de limiter l'impact de ces messages, et d'écarter un outil qui permettrait de diffuser massivement de fausses informations. L'existence de cette réglementation en France nous préserve partiellement d'un déferlement de messages diffusant des contre-vérités, ou très éloignés des valeurs républicaines que chaque candidat à une élection devrait respecter.
Nous devons mener ce travail, et je comprends l'appel à une meilleure régulation, mais je partage le scepticisme du rapporteur sur la capacité du Conseil supérieur de l'audiovisuel à traiter ce sujet. Il faudrait un CSA dédié à l'espace numérique.
Nous partageons le constat et le souhait d'avancer. Le rapporteur explique que le CSA n'est pas la bonne entité, M. Rupin appelle à la création d'un CSA spécialisé sur les réseaux sociaux. Nous devons avancer sur ce sujet ; nous ne pouvons pas tout régler dans ce projet de loi sur le report des élections, mais nous constatons à quel point il faut rénover et moderniser nos systèmes d'information, de campagne électorale et de vote.
Cette question appelle un projet de loi ad hoc valable pour toutes les élections, qui adapterait notre façon de faire de la politique aux réalités du XXIe siècle. Avançons !
Madame la présidente, je suis entièrement d'accord avec vous. Nous sommes au point de rencontre de trois domaines : la régulation des réseaux sociaux – Dieu sait si nous y travaillons dans cette assemblée ! – ; la question de savoir s'il faut conserver des professions de foi sur papier – M. Balanant a soulevé le problème des volumes en jeu – ou réfléchir à un format numérique ; …
En effet. Le troisième domaine de réflexion est la possibilité de diffuser des clips publicitaires, tels que des contenus sponsorisés sur Facebook. À l'heure actuelle, cette pratique est sanctionnée, assez sévèrement, par la CNCCFP. Faut-il modifier cet état de fait ? Sur ce point, je suis assez sensible aux arguments de Pacôme Rupin.
Dans le cadre d'un groupe de travail composé de membres de chaque sensibilité politique représentée en commission des lois, nos collègues sénateurs ont publié un rapport d'information au mois de décembre 2020. Il portait uniquement sur le vote à distance et n'abordait pas le sujet des campagnes électorales. Notre débat a une portée plus globale. Nous poursuivrons la réflexion.
L'amendement CL25 est retiré.
Article 6 bis : Communication audiovisuelle sur le rôle des conseils départementaux
La commission examine l'amendement CL54 du rapporteur.
Le présent article a été introduit par le Sénat en séance publique. Il prévoit l'organisation, sur les chaînes publiques de radio et de télévision, d'une campagne de communication audiovisuelle détaillant le rôle et le fonctionnement des conseils départementaux. Un tel outil me semble utile pour faire œuvre de pédagogie auprès des électeurs.
Le présent amendement étend le champ de la communication institutionnelle des chaînes du service public aux élections régionales. Il apporte également une précision quant à la délimitation de son objet, s'agissant des dates des scrutins régionaux et départementaux, ainsi que des modalités de vote afférentes à ces élections. Il s'agit de diffuser trois informations institutionnelles : l'encouragement à aller voter – en précisant, en sus des campagnes du ministère de l'Intérieur, leur importance dans la lutte contre l'abstention ; ce pour quoi on est encouragé à aller voter – le rôle des conseils départementaux et des conseils régionaux ; les modalités du vote, notamment les jours et la façon dont le scrutin se déroule.
La commission adopte l'amendement.
Puis elle adopte l'article 6 bis modifié.
Article 7 : Mention des marges d'erreur dans les sondages publiés ou diffusés
La commission adopte l'article 7 sans modification.
Article 8 : Délai supplémentaire applicable à l'adoption du budget primitif des régions et des départements
La commission examine l'amendement CL55 du rapporteur.
Il vise à supprimer l'article. Raphaël Schellenberger et moi-même avons eu l'occasion d'en débattre dans le cadre d'une audition de l'Assemblée des départements de France (ADF) : il ne nous semble pas souhaitable de reporter le vote du budget primitif et de modifier le code général des collectivités territoriales à cet effet, dès lors que la plupart des conseils départementaux et régionaux ont adopté leur budget primitif, ou peuvent le faire. Une telle démarche nous semble un peu spécieuse.
Une fois acquis, un mandat électoral commence au premier jour et prend fin au dernier jour. Du premier au dernier jour, les élus doivent se consacrer au fonctionnement de leur collectivité locale. L'acte principal et essentiel qu'ils accomplissent est le vote du budget, sans lequel aucune action de la collectivité n'est possible. Nous avons débattu de la question de savoir s'il faut ou non voter en période de crise, et si le processus électoral est une façon de mettre entre parenthèses l'action de la collectivité renouvelée. Tel n'est pas mon avis. Une fois élue, l'assemblée travaille jusqu'au dernier jour de sa légitimité. Pour ce faire, elle a besoin d'un budget. Ne prenons pas l'habitude de voter des budgets au mois de juillet, d'autant qu'ils sont d'envergure départementale et régionale, soit plusieurs centaines de millions d'euros, et servent à financer l'investissement et la commande publics, ainsi que des stratégies de relance économique et sociale des territoires ! Ce n'est pas le moment, pour les collectivités locales – moins encore pour les départements, qui exercent la compétence sociale dans les territoires –, de baisser les bras et de ne pas travailler, bien au contraire ! J'espère que la plupart d'entre elles ont adopté un budget au mois de décembre, et qu'à défaut elles le feront dans les plus brefs délais.
La commission adopte l'amendement. En conséquence, l'article 8 est supprimé.
Article 9 : Délai supplémentaire applicable à l'adoption du compte administratif des régions et des départements
La commission examine l'amendement CL56 du rapporteur.
Il s'agit également d'un amendement de suppression de l'article, qui vise à modifier le code général des collectivités territoriales. Je n'exclus pas que nous en débattions avec le Sénat le moment venu. Le délai accordé aux conseils municipaux et communautaires lors du report du second tour des dernières élections municipales l'a été dans le cadre d'une loi relative à l'état d'urgence sanitaire. Il me semble que les dispositions du présent article relèvent d'une telle loi. Qu'une loi électorale modifie le fonctionnement des collectivités locales ne me semble pas satisfaisant. Nous en débattrons avec les sénateurs, ce qui, au demeurant, ne serait pas nécessaire si le second tour avait lieu le 20 juin prochain. Nous ferons preuve de pragmatisme.
La commission adopte l'amendement. En conséquence, l'article 9 est supprimé.
La commission adopte le projet de loi modifié.
La réunion se termine à 16 heures.
Membres présents ou excusés
En raison de la crise sanitaire, les relevés de présence sont suspendus.