Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

Réunion du mercredi 11 décembre 2019 à 10h05

Résumé de la réunion

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La réunion

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La Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire a auditionné, en application de l'article 13 de la Constitution, M. Pierre Dubreuil, dont la nomination est proposée par M. le Président de la République aux fonctions de directeur général de l'Office français de la biodiversité.

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Mes chers collègues, en application de l'alinéa 5 de l'article 13 de la Constitution et de la loi organique du 23 juillet 2010, nous auditionnons ce matin M. Pierre Dubreuil, que le Président de la République propose de nommer aux fonctions de directeur général de l'Office français de la biodiversité (OFB).

Concernant la procédure, je rappelle que le Président de la République ne peut procéder à la nomination si l'addition des votes négatifs dans chaque commission compétente de l'Assemblée nationale et du Sénat représente au moins trois cinquièmes des suffrages exprimés.

L'audition d'aujourd'hui, qui est publique, sera suivie d'un vote à bulletin secret, effectué par appel nominal et hors la présence de la personne auditionnée. Aucune délégation de vote n'est possible. Des bulletins vous seront distribués à cet effet.

Le dépouillement sera fait après l'audition de M. Pierre Dubreuil par la Commission de l'aménagement du territoire et du développement durable du Sénat qui aura lieu mercredi prochain. Nous dépouillerons donc le scrutin en même temps que nos collègues du Sénat, le mercredi 18 décembre, vers onze heures quinze.

Je rappelle enfin que nous avons nommé Mme Sophie Auconie rapporteure sur cette proposition de nomination. Elle a élaboré, pour notre commission, un questionnaire qui a été préalablement envoyé à M. Pierre Dubreuil, dont les réponses ont été rendues publiques sur le site internet de l'Assemblée nationale et vous ont été diffusées.

Monsieur Pierre Dubreuil, c'est avec plaisir que nous vous retrouvons après vous avoir entendu, au mois de novembre 2018, dans le cadre de nos travaux préparatoires à la discussion du projet de loi portant création de l'Office français de la biodiversité.

Vous connaissez bien le sujet puisque vous êtes actuellement chargé de la préfiguration de l'OFB et directeur général par intérim de l'Office national de la chasse et de la faune sauvage (ONCFS).

Notre rapporteure vous ayant déjà posé un certain nombre de questions écrites auxquelles vous avez répondu, je serai donc brève. La création de ce nouvel établissement, qui me tient particulièrement à coeur, a permis d'enfin concrétiser le rapprochement de l'Agence française de la biodiversité (AFB) et de l'ONCFS. L'OFB doit permettre de réunir les acteurs de la nature autour de l'objectif central de préservation et de reconquête de notre biodiversité, dont on connaît l'érosion alarmante. Ce rapprochement, que j'ai longtemps appelé de mes voeux, doit permettre de créer un opérateur puissant qui comptera près de 3 000 agents répartis sur tout le territoire, car c'est bien sur le terrain que sont menées les actions en faveur de l'eau et de la biodiversité. C'est un point qu'il faut rappeler systématiquement : la biodiversité se joue sur le terrain et en lien avec les acteurs.

Installer cet établissement suppose de rapprocher des personnels aux statuts divers, dont la catégorie et le corps ne correspondent pas toujours à la réalité des missions effectuées, en particulier pour les inspecteurs de l'environnement et les chefs de service. Cela suppose aussi de la vigilance, pour s'assurer que les moyens dont l'OFB disposera seront bien à la hauteur des enjeux. En la matière, je crois que vous pouvez compter sur toute notre attention.

Pouvez-vous nous présenter vos perspectives sur ces deux sujets essentiels pour la réussite du nouvel opérateur et nous éclairer sur votre conception de la gouvernance de l'OFB, dont nous avons souhaité qu'elle permette d'associer tous les acteurs de la nature ?

Enfin, comment envisagez-vous la sélection et le financement des actions prévues à l'article 13 de la loi portant création de l'OFB, conduites par les fédérations des chasseurs et- qui concourent à la protection et à la reconquête de la biodiversité ?

J'aurai certainement quelques questions supplémentaires à vous poser après vous avoir écouté. Je vous cède la parole pour une quinzaine de minutes.

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Pierre Dubreuil

Madame la présidente, madame la rapporteure, mesdames, messieurs les députés, je vous remercie de votre accueil. J'ai l'honneur de me présenter devant vous aujourd'hui en tant que candidat aux fonctions de directeur général de l'OFB, conformément à l'article 13 de la Constitution. J'ai été nommé il y a un peu plus d'un an directeur général en charge de préfigurer la fusion de l'AFB et de l'ONCFS. À cette occasion, votre commission m'avait auditionné au mois de novembre 2018.

Avant d'évoquer mes motivations et ma vision de l'OFB, ce qui a été fait et ce qui reste à faire pour lui permettre d'être le grand établissement public de protection de la nature et de la biodiversité, je souhaite remercier les directeurs généraux des deux établissements, MM. Christophe Aubel et Olivier Thibault, et leurs équipes, avec lesquels j'ai travaillé très étroitement pendant un an. Ce fut une année de travail intense et productive, avec un état d'esprit collectif solidaire remarquable. Leur implication à mes côtés a permis d'atteindre les résultats que je vais évoquer devant vous.

Ma candidature est une candidature de convictions et d'expériences.

Les convictions que j'avais lorsque j'ai mené cette mission de préfiguration continuent de m'animer. Vous l'avez dit, l'érosion accélérée de la biodiversité et la dégradation des milieux naturels nous obligent à passer à la vitesse supérieure en matière d'action publique. Ce sentiment d'urgence, que j'avais déjà, a été renforcé par le rapport de l'Intergovernmental science-policy platform on biodiversity and ecosystem services (IPBES), remis il y a quelques mois au Président de la République. Ce rapport a livré un constat scientifique accablant, sans précédent pour l'humanité : 1 million d'espèces animales et végétales aujourd'hui menacées d'extinction, 75 % des écosystèmes terrestres dégradés, 50 % pour l'eau douce, 40 % pour les milieux marins. Ces chiffres se déclinent dans vos territoires : 30 % d'oiseaux des milieux agricoles en moins en trente ans, 50 % des zones humides en moins depuis 1960.

Mes fonctions précédentes de directeur général délégué du Muséum national d'histoire naturelle (MNHN) m'ont déjà permis d'être instruit et sensibilisé à cette situation, à ces enjeux et, surtout, à la nécessité de mobiliser la société autour des questions liées à la biodiversité. Il y a donc une continuité dans mon parcours professionnel, un engagement, une cohérence qui m'amènent aujourd'hui à souhaiter devenir directeur général de l'OFB, après en avoir posé les fondations en tant que préfigurateur.

Les fonctions de direction d'établissements publics, au MNHN bien sûr, ainsi qu'à l'Institut national de recherches archéologiques préventives (INRAP), établissement national réputé pour sa complexité économique et sociale, me confèrent une expérience et un savoir-faire que je compte mettre au service de l'OFB pour le structurer, le piloter, le gérer et le promouvoir. Tout cela doit bien sûr s'appuyer sur une vision équilibrée, au service de l'intérêt général, de ce que devra être l'OFB, nouvel opérateur dans le paysage institutionnel et dans la société.

J'ai bien conscience que l'OFB vient de loin. L'idée de réunir les forces des établissements chargés de la gestion de la nature et de la biodiversité en un seul établissement public doté de compétences et de missions élargies n'est pas nouvelle : le Grenelle de l'environnement en 2007, puis la loi du 8 août 2016 pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages, qui a créé l'AFB, ont été des étapes décisives avant la décision de fusionner les deux établissements publics en 2018. L'OFB se situera dans la continuité des missions exercées par l'AFB et l'ONCFS, il continuera de marcher sur ses deux jambes régaliennes : police, expertise, appui aux politiques publiques et sociétales, appui aux acteurs, gestionnaires d'espaces naturels, mobilisation de la société à partir des contrats d'objectifs et de performance (COP) des deux établissements qui, je le rappelle, seront toujours en vigueur en 2020.

L'OFB suscite des attentes fortes de la part des citoyens, de l'État, de la représentation nationale ainsi que des acteurs et des élus locaux que j'ai rencontrés tout au long de ma mission de préfiguration. S'agissant des citoyens, les sondages que vous connaissez montrent que huit Français sur dix considèrent la biodiversité comme une question importante, et l'environnement est sur le podium des principales préoccupations des Français, qui font d'ailleurs de plus en plus le lien entre santé, alimentation et biodiversité. Le sujet monte dans la société et je pense que ce n'est pas fini.

Pour être à la hauteur de ces attentes, l'OFB devra, selon moi, suivre les orientations et principes d'action suivants.

D'abord, il s'agira de rassembler tous les acteurs de la biodiversité sans exclusive autour d'une vision intégrée. Cela reflète d'ailleurs l'interdépendance – mot-clé en matière de biodiversité – entre les milieux – terre, mer, aquatique – et entre l'homme et la nature. Cette interdépendance des acteurs est au coeur de la vision que je porte parce que je pense que chacun devra avoir sa place au sein de l'OFB, au service de la même finalité : protéger le vivant et réduire la pression sur les écosystèmes.

Toutes les activités qui ont un impact sur la nature doivent être présentes au sein de l'OFB : associations de protection de la nature, agriculteurs, chasseurs, pêcheurs, entreprises, agences de l'eau, etc. Tous les usagers de la nature doivent avoir leur place et seront présents notamment dans la gouvernance, au travers du conseil d'administration qui comprendra quarante-trois membres environ – on attend les textes définitifs. Comme vous le savez, il n'y aura qu'un seul comité d'orientation au sein de l'OFB, celui-ci pouvant avoir des déclinaisons, et un conseil scientifique. Les instances de gouvernance rassembleront donc toutes les parties prenantes.

Rassembler tous les acteurs, cela veut dire surtout les rassembler autour de projets, ceux qui existent déjà et qui sont portés par les deux établissements – Agrifaune et Ecophyto. Dans le domaine de l'agro-écologie, l'AFB et l'ONCFS ont déjà initié des projets que j'ai bien l'intention de poursuivre. En outre, de nouveaux projets seront lancés, notamment grâce à l'éco-contribution qui, j'en suis convaincu, permettra de rassembler tous ces acteurs autour de projets au service de la nature, et dont le financement est d'ores et déjà assuré. À cet égard, je crois avoir démontré ma capacité à rassembler, autour de projets communs, des gens qui ont parfois des sensibilités différentes et des intérêts divergents. Cela est fondamental, c'est même la clé de la réussite de l'Office français de la biodiversité.

Ensuite, il conviendra d'être présent et visible dans les territoires, au service de tous les territoires, car la biodiversité s'incarne dans les territoires métropolitains et ultramarins, comme vous l'avez souligné, madame la présidente. Cela suppose de renforcer la capacité opérationnelle et les pouvoirs des inspecteurs de l'environnement dans les services départementaux, dont la taille sera plus importante du fait de la fusion. Chaque service départemental comprendra entre quinze et vingt-cinq agents qui effectueront des missions de police, de sensibilisation et d'appui aux acteurs. Plus de 1 700 agents de terrain, en particulier dans les territoires ruraux, pourront ainsi garantir un partage équilibré des usages, des espaces et des espaces naturels, le respect des règles de protection de la biodiversité et le maintien d'un environnement de qualité.

Cela suppose aussi un appui aux collectivités territoriales. J'ai pu mesurer, lors de mon « tour de France » de la préfiguration, les attentes des élus locaux et l'intérêt manifesté pour les agences régionales de la biodiversité (ARB) qui continuent de se construire, certaines existant déjà, pour l'initiative « Territoires engagés pour la nature » ainsi que pour les atlas de la biodiversité communale – j'ai encore pu le vérifier très récemment lors du Congrès des maires de France.

Il conviendra également d'accroître les effectifs en direction de l'outre-mer et des parcs naturels marins. L'OFB portera son effort sur ces territoires où la biodiversité est très riche puisque l'outre-mer concentre 80 % de la biodiversité nationale. Il faudra aussi mettre la connaissance au service de la société pour mieux la mobiliser. L'Office français de la biodiversité sera le vecteur majeur de la connaissance sur la biodiversité, parce que j'ai la conviction que cette mission nourrit toutes les autres. En effet, il n'y a pas de police sans connaissance. La connaissance, c'est aussi la collecte des données de toute nature et la recherche à partir de ces données, en lien bien sûr avec les organismes de recherche. L'objectif est de mettre cette connaissance à la disposition de tous les acteurs : élus, services de l'État, associations et professionnels.

Il faudra veiller à mettre en oeuvre de manière cohérente, coordonnée et lisible les stratégies nationales des politiques publiques de l'eau et de la biodiversité, sous l'égide évidemment des services centraux des tutelles – ministère de la transition écologique et solidaire et ministère de l'agriculture et de l'alimentation – mais aussi des directives européennes – la directive-cadre sur l'eau et la directive-cadre « stratégie pour le milieu marin » – et en lien avec les services déconcentrés – préfet, directions régionales de l'environnement, de l'aménagement et du logement (DREAL), directions départementales des territoires (DDT) –, avec lesquels les deux établissements travaillent déjà beaucoup.

Il faudra également veiller à la neutralité et à l'autonomie de l'établissement, avec l'appui de ses tutelles. Je suis convaincu que l'OFB sera d'autant plus respecté qu'il aura un positionnement clair vis-à-vis des parties prenantes et reconnu dans son rôle d'expert au service des politiques publiques.

Je ne détaillerai pas tous les chantiers qui ont été menés depuis un an pour créer l'OFB. Au regard de l'ampleur de la mission, ce fut court. Lors de mon audition, l'année dernière, je vous avais indiqué que la priorité était de sécuriser les paramètres vitaux du nouvel établissement afin qu'il puisse fonctionner et remplir sa mission dès le 1er janvier 2020. Alors que nous sommes à moins de vingt jours de la création de l'établissement, et sous réserve des textes réglementaires qui doivent paraître d'ici à la fin de l'année, je peux vous dire que les conditions de l'existence de l'OFB – ressources humaines, budget, organisation – sont réunies.

En matière de ressources humaines, des avancées statutaires et une atténuation du schéma d'emplois permettront à l'établissement de fonctionner normalement. Comme j'ai pu le constater depuis un an, l'OFB est d'abord une histoire d'hommes et de femmes, d'agents reconnus pour leur compétence, leur engagement et leur passion pour les missions qui sont les leurs au service de la biodiversité. Ces agents avaient des attentes fortes et assez anciennes d'évolution statutaire que j'ai entendues – elles ont d'ailleurs également été portées par les organisations syndicales avec lesquelles j'ai eu un dialogue constant. Le chantier sur les ressources humaines était particulièrement lourd. Nous avons obtenu des résultats dans un contexte difficile pour tous les établissements publics. Je pense d'abord à la requalification des agents techniques de l'environnement en techniciens de l'environnement qui sont ainsi passés de la catégorie C à la catégorie B. Un plan de requalification de 150 agents avait déjà eu lieu lors de la création de l'AFB ; la requalification portera maintenant sur l'ensemble des agents techniques de l'environnement. Le plan est prévu sur cinq ans. En réalité, 80 % des agents techniques seront promus techniciens en trois ans, de 2020 à 2022 – 300 agents le seront dès 2020.

Par ailleurs, l'OFB ne devait pas échapper au schéma d'emplois qui touche tous les établissements publics. Lorsque j'ai pris mes fonctions, il était prévu de supprimer 127 emplois en trois ans. Grâce aux efforts conjugués de beaucoup, et notamment de certains d'entre vous, ce dont je vous remercie vivement, et du soutien des ministres Mmes Élisabeth Borne et Emmanuelle Wargon, nous avons obtenu qu'il n'y ait pas de suppressions d'emplois en 2020. En 2021, nous perdrons vingt emplois, et quarante en 2022. Au total, la perte sera donc de soixante emplois au lieu de 127.

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Pierre Dubreuil

C'est un effort notable dont le préfigurateur, candidat à la direction générale, se félicite : l'OFB sera donc créé sans suppression d'emploi.

Par ailleurs, l'OFB bénéficiera d'un budget stabilisé de 423 millions d'euros, en intégrant la dotation que l'établissement reverse aux parcs nationaux, avec une compensation de la perte de recettes liée à la baisse de la redevance cynégétique et au transfert de missions vers les fédérations des chasseurs et à l'éco-contribution. Cette perte de recettes initiale de 41 millions qui pesait dans la construction budgétaire de l'OFB devrait être compensée, dans le cadre du projet de loi de finances pour 2020, par une dotation budgétaire de 41 millions sur le programme 113 du ministère de la transition écologique et solidaire.

J'ai instauré une organisation que j'espère lisible et opérationnelle, avec trois échelons territoriaux – national, régional et départemental – correspondant à l'organisation de l'État et des collectivités territoriales, une direction générale adjointe chargée des territoires et de l'outre-mer directement rattachée au directeur général et trois directions générales déléguées reflétant la vision intégrative des missions, notamment une direction générale déléguée police-connaissance-expertise pour décloisonner l'exercice des missions au sein de l'établissement, une direction des outre-mer, avec la création de délégués territoriaux dans chaque bassin ultramarin, un délégué mer auprès du directeur général, porte-parole du milieu de la mer. Certes, je plaide pour l'interaction des milieux marins, terrestres et aquatiques, mais le milieu marin m'a interpellé : ses missions et son écosystème particulier nécessitent un relais permanent auprès du directeur général. Le délégué mer, qui a d'ailleurs pris ses fonctions en termes de préfiguration, sera basé à Brest.

Évidemment, tout n'est pas terminé et beaucoup reste à faire pour structurer et développer l'établissement : 2020 sera l'année de la construction de l'OFB. Il conviendra de poursuivre dans la voie de la culture commune et de mettre en place les différentes instances – conseil d'administration, comité d'orientation et conseil scientifique. Je souhaite qu'il y ait une interaction très forte entre ces trois instances, notamment dans la fixation des ordres du jour avec les présidents et le directeur général. Elles doivent travailler davantage ensemble que cela a été le cas jusqu'à présent.

Quant à l'harmonisation des procédures et les nouveaux schémas, il y aura un nouveau contrat d'objectifs et de performance, un règlement intérieur et un schéma pluriannuel de stratégie immobilière ainsi que la revue des missions et la priorisation, en lien avec les tutelles parce qu'il n'est évidemment pas possible de tout faire au vu des moyens dont nous disposerons. Il faut donc prioriser, parvenir à une adéquation entre les missions et les moyens : ce sera un chantier de 2020 avec la construction d'une stratégie nationale de contrôle élaborée en lien avec la tutelle.

L'année 2020 sera aussi une année décisive pour la biodiversité, avec le Congrès mondial de la nature à Marseille au mois de juin et la COP15 sur la biodiversité à Kunming, en Chine, au mois de novembre. Autrement dit, nous devrons être opérationnels dès le début de l'année pour être au rendez-vous. Nous allons commencer par élaborer une stratégie des aires protégées. Il s'agit d'une priorité politique, et nous allons appuyer en ce sens l'action du ministère de la transition écologique et solidaire. Cette stratégie doit permettre d'atteindre les objectifs fixés par le Président de la République, à savoir 30 % d'aires protégées, dont 10 % en protection forte. Il faudra également mobiliser l'ensemble de la société autour de la biodiversité. Il n'y aura pas de réponse à la hauteur des enjeux d'érosion de la biodiversité que vous signaliez, madame la présidente, sans mobilisation des acteurs, et surtout de l'ensemble des citoyens individuellement et collectivement, sur tout le territoire national.

En conclusion, je suis convaincu que nous vivons un moment de transition sans précédent et que, du fait de l'implication et de l'intérêt grandissants des citoyens pour la biodiversité, sans d'ailleurs que ceux-ci sachent précisément la définir, rien ne sera plus comme avant. Je veux donc faire de l'OFB le levier de cette mobilisation en faveur de la préservation du vivant pour qu'un jour la devise de l'Office, « Tous engagés pour la biodiversité », devienne aussi celle de tous les Français.

Je suis à présent à votre disposition pour répondre à toutes vos questions.

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Je vous remercie, monsieur Pierre Dubreuil, pour la précision des réponses que vous avez apportées aux questions que je vous ai adressées en tant que rapporteure sur votre nomination. Il y a toutefois quelques éléments que j'aimerais approfondir.

La préservation de la biodiversité outre-mer est un sujet important pour mon groupe, qui compte notamment des députés ultramarins de Polynésie et de Nouvelle-Calédonie – mais j'imagine que c'est vrai aussi pour l'ensemble de mes collègues. Vous indiquez dans vos réponses que les moyens humains de la future direction des outre-mer seront consolidés. Je me réjouis qu'une telle direction soit créée, consacrant la spécificité des enjeux liés à la biodiversité ultramarine. Quels moyens humains lui sont aujourd'hui dédiés et quelle hausse à venir envisagez-vous, compte tenu des enjeux majeurs de la biodiversité dans ces secteurs ?

Vous indiquez vouloir maintenir les effectifs dans les services départementaux, et nous nous en félicitons. Cet engagement vaut-il également pour les territoires ultramarins ?

Par ailleurs, il me semble particulièrement important d'évoquer avec vous les enjeux de sécurité de la chasse. Sur la saison de chasse 2018-2019, le nombre des accidents de chasse a en effet augmenté, passant de 113 l'an passé à 131 cette année, les accidents mortels étant également en hausse. Comment se traduira sur le terrain, pour les services de police, la priorité que vous comptez donner à la sécurité de la chasse ? Cela permettra-t-il d'assurer un contrôle effectif des mesures de sécurité que nous avons votées dans la loi en créant l'OFB ?

Plus généralement, la question des accidents de chasse soulève celle du partage de la nature et de la forêt entre les différents usagers, notamment pour des usages de loisir. Comment appréhendez-vous ces formes de conflits d'usage, qui sont de plus en plus nombreux ?

En lien avec cette question, vous indiquez vouloir renforcer, voire élargir, les partenariats de l'OFB avec d'autres établissements publics, notamment avec l'Office national des forêts (ONF). Quelles sont plus précisément les perspectives de collaboration avec l'ONF que vous envisagez ? Comment, sur le terrain, souhaitez-vous que les services de l'OFB travaillent avec ceux de l'ONF ?

S'il est prématuré d'envisager une fusion entre l'OFB et l'ONF, les agents de l'AFB ayant vécu deux périodes de fusion ces dernières années, cette perspective vous semble-t-elle néanmoins intéressante ?

Nous sommes cette semaine en plein examen du projet de loi relatif à la lutte contre le gaspillage et l'économie circulaire. C'est un enjeu majeur attendu par nos concitoyens qui a un impact sur la biodiversité. Je pense notamment à la résorption des dépôts sauvages, à la dépollution des sols ainsi qu'à l'impact des déchets, notamment plastiques, sur l'environnement. Comment envisagez-vous ces enjeux et les missions de l'OFB dans ce cadre ?

Un grand parc animalier de qualité, le zoo parc de Beauval, est situé à proximité de ma circonscription. Mènerez-vous une action auprès des parcs animaliers ? Certains sont des modèles d'observation scientifique, de pédagogie, d'intégration dans les milieux naturels et de protection d'espèces animales mais il y a aussi des modèles plus discutables.

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Nous en venons aux questions des orateurs des groupes.

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Monsieur Pierre Dubreuil, si les parlementaires valident votre nomination aux fonctions de directeur général de l'Office français de la biodiversité, vous arriverez aux responsabilités dans un contexte particulièrement complexe. Vous l'avez dit, l'érosion de la biodiversité et les pressions croissantes qui pèsent sur tous les milieux naturels, au premier rang desquels les changements climatiques, sont une réalité scientifique. Vous allez surtout prendre vos fonctions dans une année déterminante pour la biodiversité, avec le Congrès mondial de la nature en juin 2020 où les parlementaires seront certainement présents, suivi à l'automne de la COP15 de la convention sur la diversité biologique à Kunming, en Chine. Quelle est votre vision de ce nouvel établissement face à l'ampleur de la tâche ? Quelle vision le futur Office devrait-il lui-même porter face au triste bilan futur de la France face aux objectifs d'Aichi ?

La création de l'OFB doit en effet permettre de faire face au double défi de la protection de la biodiversité et des ressources en eau tout en sauvegardant l'équilibre subtil que l'homme doit entretenir avec son environnement, lui permettant d'en récolter les fruits sans nuire aux besoins des générations futures.

Votre future tâche est donc d'une ampleur sans précédent, d'autant que vous présiderez la structuration d'un nouvel office dont il est nécessaire de sécuriser, pour le 1er janvier 2020, à la fois le financement, les ressources humaines ainsi que les questions foncières et logistiques. Comment avez-vous et allez-vous encore travailler pour réussir en si peu de temps le mariage de l'AFB et de l'ONCFS, chacune de vos missions – connaissance, appui aux politiques publiques, police, etc. – étant interdépendantes des autres ?

Comment maintiendrez-vous l'animation, au plus près du terrain, d'une culture commune, l'AFB étant elle-même le fruit d'une union récente ? Cela se fera-t-il par des objectifs partagés et communs ou par des comités de suivi ? Comment comptez-vous faire face à tous ces défis après l'adoption d'un budget 2020, qui certes augmente les dotations de l'OFB mais entérine la suppression d'équivalents temps plein (ETP) au sein de ces structures réunies à partir de 2021 ?

Dans ce contexte contraint, vous avez très certainement des priorités en matière de soutien des politiques publiques. Pouvez-vous rapidement nous les présenter pour 2020 ? À ce titre, quelle place accorderez-vous aux solutions fondées sur la nature dans votre stratégie ? Ces solutions consistent à protéger, à gérer durablement et à restaurer les écosystèmes naturels pour faire face aux changements sociétaux – climatiques, sécurité alimentaire, pollution de l'eau – tout en assurant le bien-être des populations et en soutenant la biodiversité.

Comment comptez-vous mettre en oeuvre, à partir du 1er janvier 2020, le fichier national du permis de chasser, géré conjointement par l'OFB et la Fédération nationale des chasseurs ? Quelles mesures ont été prises à ce jour afin de préparer cette mise en oeuvre ?

Le ministère de la transition écologique et solidaire soumet à la consultation du public, jusqu'au 26 décembre prochain, un projet de décret qui précise les procédures relatives à la mise en oeuvre de la gestion adaptative des espèces, et un second décret doit fixer la liste des espèces concernées par la gestion adaptative. Comment voyez-vous concrètement la future application sur le terrain de la gestion adaptative, alors que le concept tel qu'il est prévu aujourd'hui est déjà contesté par des associations environnementales ? Comment sera assurée la remontée d'informations à l'OFB concernant les prélèvements sur les espèces soumises à gestion adaptative ?

Je vous remercie pour vos réponses à ces nombreuses questions. Je souhaite vivement, comme vous, que, pour la biodiversité, rien ne soit plus comme avant.

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Nous nous félicitons de la mise en place définitive, dans quelques jours, de l'OFB dont la construction a été un long parcours du combattant. Si ce parcours fut semé d'embûches, c'est sans doute en raison d'une certaine méfiance. Aujourd'hui, nous sommes dans la logique du partage de l'objectif. Pensez-vous que les différentes composantes qui formeront l'Office français de la biodiversité pourront travailler efficacement ensemble ? Envisagez-vous un conseil d'administration un et uni ? Faudra-t-il au contraire travailler en sous-groupes ?

Nous nous inquiétons également pour l'avenir. Vous avez évoqué la baisse du nombre de personnels, même si celle-ci sera moins importante que prévu. Pensez-vous disposer des capacités humaines permettant d'assurer toutes les missions, notamment en outre-mer ?

Vous avez dit que toutes les composantes avaient leur place et rappelé que les collectivités territoriales devaient trouver un appui auprès de l'Office. Nombre d'entre elles, en effet, n'ont pas l'ingénierie nécessaire en matière de biodiversité. Pensez-vous qu'il puisse y avoir un lien très fort entre les élus et les agents de l'Office sur le territoire, notamment quand il s'agit de donner des orientations ? Vous l'avez dit, il n'y aura pas de biodiversité sans un engagement des territoires. Il semble que l'échelle de la commune soit la plus pertinente. Comment envisagez-vous ce lien entre les maires, les communes et l'Office ?

Le financement des actions conduites par les chasseurs a fait beaucoup parler lors de l'examen du projet de loi. Les fédérations départementales des chasseurs, notamment celle du Jura, mènent d'ores et déjà des actions intéressantes en matière de biodiversité. Les actes de candidature seront-ils étudiés territoire par territoire, ou plutôt au niveau national ?

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Au nom du groupe MODEM et apparentés, je tiens d'abord à saluer la qualité du travail préparatoire à cette audition conduit par notre collègue Mme Sophie Auconie en sa qualité de rapporteure. C'est un exercice nouveau dans lequel nous prenons peu à peu nos marques. Il s'avère précieux et nous sommes résolus, compte tenu de l'importance des sujets, à faire de celui-ci bien plus qu'une simple formalité.

Monsieur Pierre Dubreuil, vous avez apporté aux questions qui vous ont été posées par la rapporteure des réponses particulièrement étayées et précises qui attestent de l'intérêt réel que vous portez, non à la seule fonction de délégué général mais aux missions essentielles de ce nouvel organisme qu'est l'OFB. Vous le savez sans doute, mon groupe a été particulièrement impliqué dans le texte qui a présidé à la création de l'OFB. Il partage donc une large partie de la vision stratégique que vous avez portée durant la phase de préfiguration de cet organisme.

À ce stade, pourriez-vous nous apporter des précisions sur les mesures et actions prises et à venir concernant la gestion des ressources humaines de l'OFB ? Comment vous êtes-vous assuré que la fusion entre l'AFB et l'ONCFS a été acceptée des agents et conduite avec leur concours ? Quid des cas les plus sensibles, notamment de ceux qui auraient pu émettre le souhait de quitter leurs fonctions ? Nous croyons en effet que la question du dialogue social, et plus largement celle de la gestion des ressources humaines, est l'une des conditions de la réussite du projet de l'OFB.

Nous rejoignons par ailleurs votre souhait de maintien des effectifs dans les services départementaux pour une déclinaison, au plus près du terrain, de l'action de l'OFB.

Enfin, à l'heure où les élus locaux demandent fortement davantage de moyens, notamment en matière de police de l'environnement pour répondre au mieux aux aspirations de leurs administrés et aux problématiques récurrentes rencontrées au niveau local, comment concevez-vous l'action future commune de l'OFB avec les collectivités territoriales ?

Estimez-vous que les moyens financiers de l'OFB sont suffisants pour remplir avec efficacité les missions que le législateur a entendu lui confier ? Quoi qu'il en soit, pourriez-vous nous préciser les priorités que vous entendez assigner aux services de l'OFB et les sujets que vous jugeriez moins prioritaires dans l'immédiat ?

Enfin, mon groupe avait fait adopter la possibilité pour l'OFB et les régions de créer par convention des agences régionales de la biodiversité, agences auxquelles je suis très attaché puisque je préside celle d'Île-de-France. Comment envisagez-vous ces conventions et l'appui que peuvent représenter ces agences pour l'OFB ?

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Monsieur Pierre Dubreuil, vous avez déjà répondu en partie à mes interrogations avec vos réponses au questionnaire. Par ailleurs, je félicite à mon tour Mme la rapporteure pour son excellent travail.

La biodiversité est en péril partout dans le monde. Il y a donc plus qu'urgence à agir et à maintenir tous les acteurs concernés en tension pour répondre au défi que nous devrons relever tous ensemble ces prochaines années, à savoir trouver des réponses adaptées et, autant qu'il est possible, en adéquation avec chacun de nos territoires. L'Agence française pour la biodiversité, qui se transformera dans quelques jours en Office français de la biodiversité, semble être évidemment une réponse adaptée à cet enjeu crucial, tant elle fonde sa dynamique sur l'expertise et l'action collective.

Nous nous étions également félicités, au groupe UDI, Agir et indépendants, de la création d'une agence qui tend par ailleurs vers toujours plus de rationalisation des opérateurs de l'État, thématique à laquelle notre groupe est très attaché. S'il s'agit de simplifier sur le long terme, il n'en demeure pas moins que la complexité risque d'être au rendez-vous de la création de l'OFB en janvier. Cette agence va continuer à réunir des acteurs issus d'horizons différents, chacun ayant ses habitudes de fonctionnement et de gestion. Chapeauter l'ensemble risque d'être, au début, assez périlleux. Qu'en pensez-vous ? Quelle méthode comptez-vous utiliser pour mettre cette nouvelle agence sur les meilleurs rails possible ?

Un autre point qui nous tient particulièrement à coeur concerne les liens de cette agence avec les territoires – il vient d'en être question – et ceux qui les font vivre. Il nous apparaît en effet indispensable de travailler toujours avec les acteurs locaux et au plus près d'eux : par leur expérience et leur connaissance approfondie du terrain, ils sont évidemment de précieux alliés pour mener à bien vos missions. Je pense aux élus, mais également aux associations, qui font souvent un travail remarquable. J'aurai, à ce sujet, plusieurs questions. Tout d'abord, quel bilan faites-vous des actions menées jusqu'à présent par les agences régionales de la biodiversité et du rythme de création de ces organismes ? Pourriez-vous nous indiquer si vous avez décelé des freins à leur bon fonctionnement ? Vous-même, au sein de la nouvelle agence, comment comptez-vous les faire prospérer dans les mois et les années à venir ? Enfin, il n'aura échappé à personne que l'intégration de l'Office national de la chasse et de la faune sauvage dans cette agence a fait grincer quelques dents, alors que les chasseurs, dont je fais partie, sont aussi des acteurs incontournables de la biodiversité sur le territoire. Quelle réponse apportez-vous aux sceptiques dans ce domaine ?

J'évoquais les acteurs de terrain, mais il ne faut pas oublier d'autres acteurs comme l'ONF ou le Conservatoire de l'espace littoral et des rivages lacustres, pour ne prendre que ces deux exemples. Comment envisagez-vous de coordonner vos travaux avec ceux de ces établissements ? Comment faire en sorte que les actions des uns et des autres se complètent sans se faire de l'ombre ou constituer des doublons ? Comment comptez-vous travailler en la matière ? Il y aurait encore bien des choses à dire, mais le temps m'est compté.

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Quant à moi, je suis privilégiée : le temps ne m'est pas compté. Je vais donc compléter la question de M. Guy Bricout, qui est très pertinente : comment articulerez-vous votre travail avec celui des autres établissements publics et services qui sont, d'une manière ou d'une autre, chargés de la biodiversité ? Outre le MNHN, évidemment, il y a l'Institut national de la recherche agronomique (INRA), l'Institut français de recherche pour l'exploitation de la mer (IFREMER), l'Institut de recherche pour le développement (IRD), ou encore la direction de l'eau et de la biodiversité (DEB). Quels partenariats allez-vous créer ?

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Alors que se multiplient les études scientifiques alarmistes sur le déclin de la biodiversité, nous avons plus que jamais besoin d'unir nos forces, d'améliorer les outils de sa préservation et de mieux coordonner les acteurs engagés. C'est pourquoi nous nous réjouissons de la création de l'OFB. Je regrette tout de même l'absence de cogestion des parcs marins entre l'Office et les exécutifs locaux : voilà qui, selon moi, ne traduit pas une vision girondine. Dans la même logique, on peut regretter la désignation d'un commissaire du Gouvernement doté d'un droit de veto : cela risque de brider l'ambition et l'autonomie de l'OFB.

Je souhaite vous interroger sur plusieurs aspects : le financement, les moyens humains et, bien évidemment, le lien avec les territoires et les régions. Vous avez déjà en partie répondu en ce qui concerne cet aspect, mais je voudrais avoir votre avis sur un point particulier : comment allez-vous collaborer avec l'Office de l'environnement de la Corse sans vous marcher sur les pieds ni dépenser inutilement l'argent public ?

S'agissant du financement, nos inquiétudes concernaient la sanctuarisation des ressources des agences de l'eau. Le projet de loi de finances pour 2020 fixe leur contribution annuelle entre 316 et 343 millions d'euros. Vous évoquez une contribution de 331 millions. Quelle sera l'évolution après l'année 2020 ? Le montant prévu est-il suffisant pour pérenniser les actions de l'AFB et de l'ONCFS et pour faire face aux conséquences de la réforme de la chasse ?

En ce qui concerne les moyens humains, le schéma d'emplois fait apparaître une diminution des ETP entre 2020 et 2022. Au-delà des économies d'échelle, argument souvent avancé dans ce genre de fusion, quels services seront mis à contribution ?

Ma dernière interrogation concerne la gestion adaptative des espèces. Un projet de décret fait actuellement l'objet d'une consultation publique. Au-delà de cette procédure, comment entendez-vous garantir un travail partenarial avec les fédérations des chasseurs ? Comment garantir qu'une gestion adaptative ne conduira pas à une expansion importante du nombre d'espèces dont la chasse est autorisée ?

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Vous avez indiqué, dans votre propos liminaire, que vous entendiez que l'Office soit présent « y compris en territoire métropolitain », ce qui est intéressant car l'urbanisation se poursuit. Les enjeux propres à la biodiversité se situent donc au coeur des grandes agglomérations, en ce qui concerne aussi bien les causes que les conséquences de ce que nous observons. Je pense notamment à des enjeux comme la gestion de la ressource en eau – il faut continuer de surveiller les captages et de protéger les nappes phréatiques – ; les forêts urbaines, qui sont une dimension tout à fait déterminante de la qualité de vie des citadins ; la faune et la flore des villes, avec la fin de l'utilisation des désherbants, par exemple, pratique que les villes ont vite appliquée, mais il faut poursuivre cette démarche essentielle ; les plateformes et les espaces industriels majeurs, dont le fonctionnement et les incidences posent question, en particulier en cas d'accident – le site de Lubrizol est ainsi situé dans ma circonscription. Je ne suis pas un spécialiste des missions dont vous aurez la charge : pourriez-vous préciser, pour un élu d'un territoire urbain dense tel que moi, quelles actions vous entendez mener concrètement ?

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Pierre Dubreuil

Je répondrai aux questions en les regroupant, si vous me le permettez, car un certain nombre d'entre elles portent sur des enjeux et des thèmes communs.

En ce qui concerne l'outre-mer, madame la rapporteure – mais c'est là, manifestement, une préoccupation partagée par beaucoup d'entre vous –, je vais être plus précis que dans mon propos liminaire. J'ai rencontré de nombreux acteurs ultramarins, même si, vous l'imaginez bien, je n'ai pas eu le temps, en un an, de me rendre dans tous les territoires d'outre-mer. L'OFB va déployer davantage de moyens humains. Dans le contexte que j'ai évoqué, cela représente un effort substantiel. J'ai créé une direction des outre-mer, rattachée au directeur général et à la directrice générale adjointe chargée des territoires, laquelle sera donc également en charge des outre-mer. Cette direction rassemblera plus de cent agents. Nous allons renforcer ses effectifs outre-mer de dix-huit ETP, dont trois dans le parc naturel marin de Martinique, pour lesquels les recrutements ont d'ores et déjà été lancés ; ils devraient avoir lieu très rapidement. À cet égard, comme je vous le disais, nous faisons parallèlement des efforts en faveur des parcs naturels marins en général – pas seulement, donc, dans les outre-mer –, qui n'étaient pas très bien dotés. Nous allons augmenter les effectifs de trente-six ETP sur trois ans.

Les ETP sont évidemment une chose très importante, car ils témoignent de l'intention et de la présence sur le terrain, mais il faut aussi être organisé. Or les partenaires ultramarins m'ont dit qu'ils voulaient que l'organisation de l'établissement soit lisible. En effet, celui-ci exerce plusieurs missions – en matière de police, de connaissance, ou encore d'appui aux politiques publiques et aux acteurs. J'ai donc décidé de créer des postes de délégués territoriaux dans les bassins ultramarins. Il y en aura cinq – je ne peux pas faire mieux, mais c'est déjà beaucoup. Le recrutement de trois d'entre eux est en cours, tout en sachant que deux existaient déjà. Il y en aura un – ou une, évidemment – en Guyane, un à la Guadeloupe et à la Martinique, un à La Réunion et à Mayotte, un en Polynésie et un en Nouvelle-Calédonie. Ces cinq délégués territoriaux seront les référents, en ce qui concerne l'outre-mer, pour l'ensemble des partenaires. En effet, tous m'ont dit qu'ils voulaient savoir qui était le « Monsieur OFB » sur le territoire. Ce sera donc le délégué territorial, à charge pour lui d'assurer ensuite le relais auprès de l'ensemble des services et agents dans les différents territoires. Il s'agit là, du point de vue de l'organisation, d'une nouveauté. Les acteurs ultramarins comptent beaucoup dessus. Les délégués seront opérationnels très rapidement : comme je le disais, leur recrutement est en cours.

Plusieurs d'entre vous m'ont interrogé sur les effectifs dans les services départementaux et m'ont indiqué qu'ils y seraient vigilants. Pour moi, comme je vous le disais, le mot « cohérence » a du sens. Or j'affirme une vision territoriale de l'OFB, c'est-à-dire fondée sur la proximité avec les territoires, sur une méthode de dialogue et sur une présence des agents dans les territoires. Évidemment, 1 700 agents sur tout le territoire métropolitain et outre-mer, c'est à la fois beaucoup et peu. J'ai parlé d'une sanctuarisation. Il y aura un schéma d'emplois en 2021 et 2022. La diminution du nombre d'emplois, inéluctable, ne devra pas porter sur les services départementaux, afin de ne pas enlever de la présence sur le terrain, alors même que c'est là notre priorité.

Certains m'ont demandé comment j'allais faire. D'abord, nous allons pratiquer le dialogue social. L'année 2020 sera une année de construction. Nous allons définir les priorités et comme, heureusement, nous ne perdrons pas d'emplois en 2020, nous aurons le temps de réfléchir à la manière dont les effectifs seront redéployés en 2021. La fusion permettra de dégager des marges de manoeuvre. La présence sur le terrain est fondamentale, et la sanctuarisation des effectifs dans les services départementaux marque la cohérence avec la vision territoriale, que plusieurs d'entre vous évoquaient, notamment M. Bruno Millienne : cela permettra de répondre aux attentes des élus au niveau régional et départemental, mais aussi communal puisque, certains l'ont dit, la commune est évidemment le « noyau ». À cet égard, la publication de l'atlas de la biodiversité dans les communes répond à une commande du maire et de son équipe municipale. Je ne doute pas, d'ailleurs, qu'après les prochaines élections municipales et le renouvellement des équipes qu'elles entraîneront, l'Office français de la biodiversité doive répondre à de nouvelles sollicitations. Nous serons présents sur le terrain, à la mesure de nos moyens, bien entendu. L'avantage de l'AFB et de l'ONCFS est que ces deux organismes ont assuré un maillage territorial, avec 300 implantations sur l'ensemble du territoire. Même si nous allons sans doute en regrouper certaines – car, chacun le comprendra, ce sera nécessaire pour rationaliser l'organisation –, nous articulerons les implantations départementales avec une présence dans certains territoires, notamment les territoires très ruraux et très reculés, qui nécessitent la présence d'inspecteurs de l'environnement. Tout cela va se construire, mais je vous confirme mon intention de veiller tout particulièrement à cet aspect : pour moi, la présence dans les territoires et l'écoute de tous les acteurs qui s'y trouvent sont des priorités.

Madame Frédérique Tuffnell, l'année 2020 sera en effet très particulière, parce que nous devons construire l'OFB. Tout ne pourra pas être fait tout de suite, notamment l'élaboration d'une culture commune ; bâtir un tel établissement, cela prend du temps. Néanmoins, nous devrons être tout de suite opérationnels. En ce qui concerne la mobilisation, et puisque vous m'interrogez sur les objectifs de développement durable et la capacité de l'OFB à se hisser à la hauteur du niveau d'exigence qui est celui de la société – il s'agit même d'exigences internationales –, nous viendrons, modestement, en appui des missions des ministères. Au congrès mondial de la nature, il y aura un pavillon de la France et un stand de l'OFB ; ils seront évidemment articulés, pour proposer des événements à destination du grand public, mais aussi d'acteurs plus spécifiques de la biodiversité. De la même manière, s'agissant de la COP15 sur la biodiversité, nous interviendrons en appui. Elle sera le grand rendez-vous mondial de la biodiversité, l'équivalent de la COP21. Je pense d'ailleurs, à cet égard, que le lien entre climat et biodiversité doit être beaucoup mieux souligné. En effet, les causes de l'érosion de la biodiversité sont connues et identifiées – certains d'entre vous, notamment M. Hubert Wulfranc, ont d'ailleurs évoqué l'artificialisation des sols, qui en est une cause majeure et détruit les habitats. On parle beaucoup du climat : l'OFB doit agir pour faire comprendre le lien qui existe entre les changements climatiques et la perte de biodiversité, car les deux phénomènes s'accélèrent et sont interdépendants. Il y a là un enjeu de connaissance et de communication, qui appelle la mobilisation des équipes de l'OFB.

Vous m'avez interrogé sur les liens avec les organismes de recherche mais aussi avec les autres établissements, notamment le Conservatoire de l'espace littoral et des rivages lacustres. J'ai rencontré des représentants de tous ces établissements pendant l'année de préfiguration. Il existe déjà des conventions avec les uns et les autres. En outre, le contexte est particulier : l'ONF va avoir un nouveau directeur général, le Conservatoire du littoral a d'ores et déjà une nouvelle directrice générale, et l'INRA, qui fusionne avec l'Institut national de recherche en sciences et technologies pour l'environnement et l'agriculture (IRSTEA), va donner naissance à l'Institut national de recherche pour l'agriculture, l'alimentation et l'environnement (INRAE). J'ai déjà prévu des collaborations particulières avec tous ces organismes. L'OFB et l'INRAE auront une tutelle commune, à savoir le ministère de l'agriculture. L'OFB ne sera pas un organisme de recherche stricto sensu ; néanmoins, il aura une unité mixte de service avec le Muséum national d'histoire naturelle, comme c'est le cas actuellement de l'AFB : l'unité PATRINAT continuera à exister. Les missions de l'OFB suffisent déjà à l'occuper, et il ne doit pas faire de recherche, mais la coordination entre le monde de la recherche, celui de la connaissance et les missions opérationnelles de gestion doit être mieux assurée. J'ai déjà discuté de tout cela avec la direction de l'eau et de la biodiversité, avec laquelle je pense que nous devons collaborer, chacun étant à sa place, c'est-à-dire que la tutelle fixe des orientations stratégiques, tandis que l'établissement est dans le domaine opérationnel et accomplit ses missions sur le terrain, aux différents échelons que j'ai cités – national, régional et départemental.

En ce qui concerne le lien avec les collectivités territoriales, au sujet duquel j'ai notamment été interpellé par M. Bruno Millienne, l'OFB doit continuer à leur fournir un appui : cela fait partie de ses missions. Il est difficile de faire le bilan des ARB, d'abord parce qu'elles sont assez récentes. Mon avis personnel, que je vous livre, et que je me suis forgé pendant la phase de préfiguration, est que la souplesse du modèle des agences régionales de la biodiversité, sur lequel je m'interrogeais au départ, me paraît en définitive assez utile, puisque chaque région – la région étant la collectivité chef de file en matière de biodiversité – a son appréhension du sujet et son rythme de création. Cela permet d'entraîner les acteurs, ce qui est le rôle de l'OFB, mais sans les brusquer, dans une trajectoire vertueuse. Le représentant de l'OFB régional est généralement le vice-président de l'ARB. De plus, l'OFB met des moyens – environ 300 000 euros – pour la création d'une agence régionale de la biodiversité. J'ai rencontré des représentants de toutes les régions, monsieur Guy Bricout, y compris, récemment, le conseiller délégué à l'environnement de la région Hauts-de-France. Ils font des choses, même si, pour l'instant, la trajectoire n'est pas aussi ambitieuse que celle conduisant à la création d'une ARB. Quoi qu'il en soit, l'OFB sera là pour accompagner toutes les initiatives qui vont dans le même sens.

Notre rôle n'est pas de prononcer des injonctions : il est d'accompagner, de conseiller, d'appuyer et de financer. C'est ce que nous ferons. En définitive, je trouve qu'une démarche à géométrie variable permet aux élus d'avancer à leur rythme et de rassembler les acteurs. Vous m'interrogez sur ce qui se passe dans vos territoires. Je suis convaincu que ces initiatives ne peuvent fonctionner que si elles rassemblent tous les acteurs. Il faut procéder sans exclusive, sans mettre de côté certains acteurs ; c'est là ma première priorité. Les chasseurs, par exemple, sont évidemment des acteurs de la biodiversité. J'ai la conviction, d'ailleurs étayée par la réalité, que nous n'aboutirons que si nous développons des projets communs. Agrifaune, par exemple, dont j'ai parlé tout à l'heure, fonctionne bien ; le projet réunit tous les acteurs que vous avez cités, notamment les agriculteurs, les chasseurs et les usagers de la nature. Nous parlions des haies et des chemins ruraux : tout cela permet de restaurer les milieux. Au final j'observe que les divers acteurs n'ont pas forcément la même posture quand ils sont associés à des projets et quand ils siègent dans un conseil d'administration. Ce sont les projets qui réunissent les acteurs, au service d'une même finalité. On s'aperçoit d'ailleurs qu'en dépit des apparences, ils partagent souvent, en réalité, un certain nombre d'intérêts. L'OFB est là pour les réunir, les faire travailler ensemble ; cela paraît simple, mais ne l'est pas tant que ça. En tout cas, je m'attacherai à le faire.

L'éco-contribution est, à cet égard, un dispositif vertueux. Il faut savoir que l'Agence française pour la biodiversité a signé une convention avec la Fédération nationale des chasseurs. Le texte a été adopté lors de la dernière réunion du conseil d'administration de l'AFB. L'OFB poursuivra évidemment le dispositif. Vous me demandez si ce seront des projets locaux ou des projets nationaux. Il y aura, en réalité, une articulation entre les deux. Il faudra du temps pour que la machine soit lancée. Pour l'instant, nous étudions les projets. Beaucoup sont intéressants ; d'autres méritent d'être étudiés plus attentivement. Une commission spécifique examinera ces projets et travaillera en partenariat avec les fédérations des chasseurs pour les faire remonter. Le critère essentiel est qu'ils doivent favoriser la biodiversité. J'y serai extrêmement vigilant, en tant que directeur général, de manière que le dispositif ne soit pas dévoyé. En effet, celui-ci ne sera vertueux qu'à condition que son sens initial, tel qu'il a été établi dans la loi, soit respecté.

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Pierre Dubreuil

Vous le pouvez.

La sécurité à la chasse pose effectivement problème : depuis le début de la saison de chasse, un certain nombre d'accidents liés à des défauts de sécurité ont eu lieu. Cela me préoccupe évidemment, même si, lorsque l'on étudie les statistiques, on constate que le nombre des accidents de chasse a baissé. C'est même une tendance lourde. Il faut aussi avoir une vision objective sur le sujet. Il n'en demeure pas moins que des accidents liés à un non-respect des règles de sécurité continuent à se produire. La secrétaire d'État, Mme Emmanuelle Wargon, a envoyé récemment un courrier au président de la Fédération nationale des chasseurs pour lui rappeler les exigences en matière de sécurité. Dans ce contexte évolutif des relations avec le monde cynégétique et des transferts de responsabilité, l'OFB – en plus, évidemment, de délivrer le permis de chasser –, assurera la mission régalienne consistant à contrôler le respect des règles de sécurité à la chasse. J'ai donné des instructions, conformément à ce que la secrétaire d'État a écrit et demandé, pour mener des opérations de contrôle. Pour entrer dans le détail, c'est le week-end que les accidents se produisent. Or, le week-end, le régime de travail des agents des deux établissements n'est pas le même. J'ai déjà fait en sorte, en liaison avec les organisations syndicales et les personnels, de programmer des opérations de contrôle de la sécurité pendant certains week-ends.

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Pour contrôler, encore faut-il qu'il y ait des agents sur le terrain !

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Pierre Dubreuil

Il y en a 1 700, et nous veillons à ce qu'ils soient actifs là où nous en avons besoin. La sécurité est donc pour moi une priorité, et c'est en effet la mission de l'OFB que de l'assurer sur le terrain. La redéfinition de la stratégie nationale de contrôle, par exemple, intégrera cette dimension. La mobilisation sera plus importante car, du fait de la fusion entre les deux établissements, il y aura plus d'agents dans les services départementaux, et ce dans tous les départements – si tel n'est pas le cas, vous me le signalerez.

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Pierre Dubreuil

En ce qui concerne la gestion adaptative, comme vous l'avez signalé, un texte est en cours d'examen. Il est déjà passé devant le Conseil national de la chasse et de la faune sauvage (CNCFS). Une application sur smartphone, qui s'appelle Chassadapt, permet de monter en puissance en termes de données ; nous allons l'évaluer. L'outil est très intéressant, car il permet aux chasseurs eux-mêmes de renseigner les données. C'est ensuite l'établissement qui les récupère – je suis très ferme à cet égard – et les exploite. Comme vous l'avez dit, la gestion adaptative n'est pas simple à mettre en place. C'est une nouveauté en France : le modèle vient plutôt des pays anglo-saxons, notamment les États-Unis et le Canada.

J'ai une conviction, que j'ai déjà partagée avec les ministres en charge de la question et les acteurs du monde de la chasse : cela ne peut fonctionner que si chacun respecte l'indépendance de la connaissance scientifique et de l'expertise. Il faut qu'il y ait un débat entre les parties prenantes, mais celui-ci doit être fondé sur des données scientifiquement avérées, à partir de constats objectifs, faute de quoi le débat est biaisé. Ensuite, une décision est prise par le ministre, qui indique, pour telle ou telle espèce, quel est le quota de prélèvement. Cela dit, encore une fois, la décision doit être fondée sur des constats scientifiques et évolutifs, que tous les acteurs peuvent nourrir – voilà pourquoi j'ai cité Chassadapt. Le dispositif doit être construit. J'attends le texte, tout comme vous. L'OFB jouera évidemment un rôle fondamental. Je compte beaucoup dessus. J'en profite pour vous signaler qu'un colloque international, co-organisé avec la direction de l'eau et de la biodiversité, sera consacré à la gestion adaptative au mois de mai. Des scientifiques de niveau international y participeront pour nourrir la réflexion sur le sujet.

S'agissant des instances de l'établissement, l'organisation sera effectivement celle qui a été décrite, avec le conseil d'administration, le comité d'orientation et le conseil scientifique. Certains m'ont demandé comment cela fonctionnerait concrètement, s'il y aurait des commissions spécialisées. La réponse est oui. Il n'est pas concevable qu'un conseil d'administration composé de quarante-trois membres, qui se réunit trois à cinq fois par an, suffise à assurer la gouvernance d'un tel établissement et son fonctionnement, et surtout à permettre à tous les acteurs de s'exprimer ; un comité d'orientation seul non plus. Il faudra donc des formations spécialisées du comité d'orientation, notamment concernant les domaines marin et ultramarin : les acteurs doivent se réunir pour évoquer un certain nombre de questions, ce que le seul comité d'orientation ne permettra pas.

Pour le reste, tout n'a pas été décidé. Il faudra évidemment en parler avec les membres de ces instances. Quoi qu'il en soit, il importera d'assurer une certaine interaction et de ne pas trop séparer les milieux – par exemple, le monde de l'eau et les enjeux de la biodiversité terrestre. Je souhaite donc qu'il y ait, au-delà de formations spécialisées dans les domaines de la mer et des outre-mer, une formation qui permette de faire interagir les membres du comité d'orientation autour de questions particulières.

Enfin, le conseil scientifique est très important. Il devra être de haut niveau. Il comptera vingt-cinq membres, selon la loi et le décret qui devrait prochainement être publié. Je souhaite qu'il se réunisse très rapidement, pour délivrer au directeur général des orientations de politique scientifique à l'horizon de cinq ans. En effet, en matière de biodiversité, la science doit pouvoir anticiper et être utilisée, mais pas trop tard : certains membres du futur conseil scientifique m'ont dit qu'ils avaient besoin de directives pour guider leur travail et de disposer de temps, de manière à ne pas être mobilisés trop en aval, quand le besoin d'un discours scientifique se fait sentir. C'est la raison pour laquelle je souhaite qu'une politique scientifique à un horizon de cinq ans soit élaborée très rapidement. Le conseil scientifique devra également être associé en amont par le conseil d'administration aux choix structurants d'orientation de l'établissement. L'instance que je veux créer entre les présidents et les bureaux des trois instances permettra d'améliorer la coordination entre ces niveaux.

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Monsieur Pierre Dubreuil, vous nous avez rappelé l'importance des défis à relever pour protéger l'environnement et la biodiversité. Vous venez de nous dire votre volonté de rassembler tous les acteurs et de déconcentrer l'Office au niveau régional et départemental. Comment entendez-vous accompagner les territoires au plus près – qu'il s'agisse des communes, des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI), ou encore des pays – dans leur projet de territoire, les plans locaux d'urbanisme, les schémas de cohérence territoriale et les plans climat-air-énergie territoriaux (PCAET), de façon à intégrer les enjeux de la biodiversité dans ces documents d'aménagement ? Concernant les communes littorales, votre périmètre d'action s'arrête-t-il au domaine public maritime, ou bien prenez-vous en compte le milieu marin proche ?

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La pratique de la chasse est essentielle pour la vie de nos territoires ruraux et représente un patrimoine immatériel que nous souhaitons tous, je crois, perpétuer. Pourtant, ce patrimoine est régulièrement contesté, vous le savez. Je pense, par exemple, à la question des oies cendrées, dont la chasse a été limitée en janvier, alors qu'elle pouvait, au vu de la prolifération de cette espèce, se poursuivre en février, comme autrefois. Vous souhaitez accéder à la fonction de directeur général de l'OFB : pourriez-vous nous détailler un peu plus encore que vous ne l'avez fait votre vision de la chasse à moyen terme, notamment des périodes de chasse, au regard des différents mouvements de société que l'on observe ?

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Restaurer et protéger la biodiversité, c'est votre mission, mais c'est aussi l'affaire de tous, vous l'avez dit : il faut mobiliser l'ensemble de nos concitoyens. Comment entendez-vous toucher le grand public ? Vous avez un logo mais, dans les départements, on constate que le grand public connaît surtout la fédération départementale des chasseurs et les associations communales de chasse agréées (ACCA).

Par ailleurs, nous sommes en train d'examiner le projet de loi relatif à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire. Nos concitoyens sont fortement sensibilisés à la gestion des déchets ; les chasseurs aussi, en particulier dans le Jura, où l'on collecte les cartouches de chasse et où une association d'insertion a bricolé artisanalement une machine destinée à séparer le plastique du métal. Que pensez-vous d'une éco-contribution sur les cartouches de chasse ? Êtes-vous prêt à soutenir cette initiative ?

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Monsieur Pierre Dubreuil, vous avez déjà répondu partiellement à ma question, qui concerne la gouvernance du nouvel établissement. Un conseil d'administration (CA) est prévu, restreint à une vingtaine de membres et composé de cinq collèges, dont la composition devrait être précisée prochainement par décret. Le CA sera doté d'un conseil scientifique et devra interagir avec un comité d'orientation, dont la composition sera plus large. Pourtant, cette gouvernance reste une interrogation de fond : pouvez-vous nous en dire plus en la matière ?

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Dans son rapport spécial sur l'océan et la cryosphère, publié en septembre 2019, le Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC) a souligné la perte d'oxygène dans les océans et les conséquences néfastes de ce phénomène sur la vie aquatique. En parallèle, un rapport de l'Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) a alerté les dirigeants de la planète sur les causes et l'ampleur des impacts de ce phénomène, appelé « désoxygénation » des océans. La diminution de la teneur en oxygène des océans bouleverse l'équilibre de la vie marine, favorisant les espèces tolérantes, au détriment d'autres espèces, plus précisément un grand nombre d'espèces de poissons. Cette menace pour la biodiversité marine dans son ensemble aura des conséquences néfastes pour les écosystèmes, les économies côtières et bien évidemment les personnes qui en dépendent. La santé des océans est un thème majeur du congrès de l'UICN qui se tiendra à Marseille. Les chercheurs attendent des décisions fortes de la part des États pour protéger la biodiversité et les ressources marines. Face à cet enjeu, l'OFB mènera-t-il des actions pour préserver nos espaces maritimes, notamment outre-mer ? Soit dit en passant, je me félicite de la nomination de cinq délégués territoriaux dans nos territoires ultramarins.

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Je suis élue du Cher, et ma circonscription comprend une partie de la belle forêt de Sologne. Le ministère de la transition écologique et solidaire semble vouloir être ferme concernant le problème de l'engrillagement en Sologne, qui va de pair avec certaines pratiques de chasse indignes et qui apportent leur lot de maladies pour le grand gibier. Pourra-t-on un jour empêcher la chasse en terrain clos ? Selon vous, quel rôle peut jouer l'Office français de la biodiversité pour faire reculer la pratique de l'engrillagement ?

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L'OFB est issu de la fusion de l'AFB et de l'ONCFS, comme vous l'avez précisé. Avec la création de l'Office français la biodiversité, la chasse est donc retenue comme une activité essentielle à la régulation de notre biodiversité. Pourtant, toutes les semaines, des incidents ont lieu sur notre territoire, avec des militants anti-chasse de plus en plus radicaux, qui n'hésitent pas à vandaliser régulièrement des rendez-vous de chasse.

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Pour preuve, le week-end dernier encore, des militants du Front de libération des animaux ont tagué et incendié un de ces espaces dans mon département des Landes.

Monsieur Pierre Dubreuil, alors que vous vous apprêtez à devenir directeur général de l'OFB, j'aimerais que vous précisiez les objectifs que vous vous fixez pour tenter de redorer l'image des chasseurs. Surtout, quel travail allez-vous mener avec les fédérations des chasseurs et, dans nos territoires, avec les ACCA ?

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Ma question sera très courte, car je partage en tout point la philosophie de mon prédécesseur. Je reprends donc à mon compte la question qu'il vient de poser.

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La France accueillera en juin 2020 le Congrès mondial de la nature à Marseille, dans le département des Bouches-du-Rhône, un des cinq départements français où la chasse à la glu – piégeage non sélectif et cruel – est autorisée, même dans le parc national des Calanques, alors qu'elle est illégale et qualifiée de braconnage partout ailleurs en France. Cette pratique a été dénoncée comme non sélective par la directive du 2 avril 1979 relative à la conservation des oiseaux sauvages, dite directive Oiseaux.

L'État français est le dernier à l'autoriser en Europe : c'est pourquoi la Commission européenne a engagé une procédure d'infraction à son encontre. Je suis choqué par la dissonance du message envoyé en juin 2020. Je serais curieux de connaître votre sentiment sur ce paradoxe, et sur la chasse à la glu.

À titre personnel, je suis favorable à son interdiction. Elle pourrait par exemple prendre la forme de quotas dégressifs sur plusieurs années. Mais l'OFB, censé contrôler strictement cette activité dérogatoire, connaît-il précisément les sites de piégeage ? Si, demain, la pratique est enfin interdite partout en France, disposerez-vous des moyens humains et financiers pour contrôler la bonne application de cette interdiction ?

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La France abrite une riche biodiversité, avec près de 10 % des deux millions d'espèces connues dans le monde. Il est important de se doter d'outils pour protéger cette richesse, en partenariat avec nos chasseurs, car 1 242 espèces sont menacées d'extinction dans notre pays. 590 000 hectares de milieux naturels et de terrains agricoles artificialisés entre 2006 et 2015 sont en grande partie responsables de la dégradation des écosystèmes.

Pour engager les citoyens à protéger la biodiversité, des actions comme la sensibilisation et l'éducation à la nature des publics scolaires sont indispensables. Pensez-vous que l'Office français de la biodiversité sera doté de moyens suffisants pour mener ces actions ?

Quelle est votre position sur l'éolien ? En effet, de nombreux projets suscitent une opposition légitime.

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En tant que futur directeur général de l'Office français de la biodiversité, disposerez-vous uniquement d'un mandat à portée nationale ou pourrez-vous prendre position sur la perte de biodiversité causée par nos importations ou nos exportations dans d'autres pays ? Ainsi, dresserez-vous une liste de nos importations et de nos exportations destructrices de biodiversité ? Pourrez-vous alerter et faire évoluer les acteurs économiques et le Gouvernement, afin de limiter ces flux ?

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Il y a quelques mois, nous nous sommes inquiétés car le nouvel organisme n'évoque plus la chasse dans son intitulé. J'espère que vous aurez l'occasion de rassurer le monde de la chasse. J'insisterai sur la sécurité : j'ai eu la chance de passer mon permis de chasser il y a un mois et j'ai pu constater la façon dont se déroulent les épreuves avec l'Office national de la chasse dans le département des Ardennes, mais aussi avec les agents de l'ONCFS, qui sont d'une rigueur absolue sur la sécurité dans la manipulation des armes et les parcours. Je tenais à en témoigner.

Par ailleurs, comment allez-vous combler la baisse de la redevance cynégétique ? Ces deux cents euros étaient très utiles pour financer certaines actions.

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Il me semble que M. Pierre Dubreuil a déjà répondu à cette question… Mais il répondra à nouveau !

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Monsieur Pierre Dubreuil, vous avez parlé des élus. Les 25 000 maires de villages de moins de 1 000 habitants, qui représentent 70 % des maires français, sont aux premières loges en matière de biodiversité et de chasse : communes forestières, communes de parcs nationaux, dotées de sociétés de chasses communales, etc. Les maires de ces villages, parfois agents techniques de l'environnement qui s'inquiètent pour leur statut – j'en ai dans ma circonscription – sont très concernés par les actions de l'OFB. Ils sont les premiers à faire face aux incivilités environnementales – pesticides domestiques dans les jardins, mini-décharges sauvages – ou aux conflits d'usage.

Comment l'OFB va-t-il collaborer avec ces élus pour développer un soutien mutuel, afin d'atteindre les objectifs de développement de la biodiversité, de pédagogie et de police ?

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Je vous remercie pour votre présence au sein de notre commission. Au-delà des missions confiées à l'OFB – surveillance, préservation, gestion et restauration de la biodiversité terrestre, aquatique et maritime –, quels liens tisserez-vous et quel dialogue engagerez-vous avec le ministère de l'agriculture, alors que vous dépendez également d'un autre ministère ? Comment l'OFB, fort de son ancrage dans les territoires, notamment ruraux, participera-t-il à la mise en oeuvre opérationnelle et au développement de l'agroécologie dans notre pays ?

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Les élus de la montagne ne cessent d'alerter les pouvoirs publics sur la cohabitation de plus en plus problématique entre les éleveurs qui pratiquent le pastoralisme – bénéfique pour la biodiversité – et les prédateurs, au premier rang desquels le loup, dont la population ne cesse de croître. J'aimerais connaître votre position. Comment l'OFB peut-il éventuellement s'impliquer dans ce dossier ?

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Je tiens à souligner le volontarisme de votre intervention liminaire. Vous souhaitez mobiliser la société autour de la biodiversité. Vous avez aussi évoqué l'idée de faire de l'OFB un vecteur de la connaissance. Je me réjouis évidemment de cette volonté affichée. Toutefois, pour alimenter le partage de la connaissance, il faut sans cesse renforcer l'élaboration des connaissances et donc soutenir la recherche en matière de biodiversité. Selon vous, de quelle manière l'OFB doit-il travailler avec les organismes de recherche, ainsi qu'avec la Fondation pour la recherche sur la biodiversité (FRB) ? Quel sera le rôle du conseil scientifique de l'OFB ?

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Vous le savez, nous aurons l'honneur et la chance de recevoir à Marseille, en juin 2020, le congrès mondial de la nature. C'est le plus grand événement de conservation de la nature au monde. L'OFB participera-t-il à l'organisation de cet événement exceptionnel ?

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Je me réjouis de la mise en place de l'Office français de la biodiversité. Au cours des dernières années, La Réunion a connu de nombreux drames liés aux requins. Quelles mesures pourrait-on prendre pour que cette situation, dramatique, évolue ? Nous ne pouvons plus nous baigner à La Réunion. Je ne pense pas que l'on accepterait une telle situation dans l'Hexagone…

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Nous avons beaucoup parlé de chasse ce matin, mais c'est en tant que président du groupe d'études sur la pêche que je souhaite vous interroger. Vous l'avez dit dans vos propos liminaires, le pêcheur est un acteur majeur de la biodiversité, mais il est confronté à une double problématique : des espèces piscicoles en danger et des contrats de gestion rejetés par différents tribunaux. Les fédérations départementales se désespèrent et la grogne monte dans nos territoires. Monsieur Pierre Dubreuil, comment l'OFB peut-il apporter son soutien à nos pêcheurs ?

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En conclusion de vos propos liminaires, vous avez affirmé votre volonté de préserver le vivant. Je suppose, et j'espère, que vous avez une définition large et transversale de cet objectif ambitieux et forcément systémique. Tout ce qui est vivant sur cette planète – et notamment l'espèce humaine, qui n'en est qu'une des manifestations – vit en interaction permanente avec l'écosystème planétaire.

Comment envisagez-vous cette nécessaire approche globale, au-delà de l'habituel fonctionnement en silo ? En effet, la biodiversité a des conséquences sur la santé humaine : elles peuvent être positives – trame verte et bleue, patrimoine des plantes médicinales, collaboration des insectes et autres micro-organismes dans nos écosystèmes – ou négatives – antibiorésistance, gestion des dangers liés à la faune et la flore sauvages. Avec le réchauffement climatique, les grands équilibres faune-flore et espèce humaine sont remis en question.

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Monsieur Pierre Dubreuil, vous nous avez annoncé la création d'un poste de délégué à la mer. Je m'en félicite. Quel sera son rôle ? De quels moyens disposera-t-il ? Sera-t-il associé au prochain Comité interministériel de la mer (CIMer) dont les grandes orientations ont été communiquées hier ? Sera-t-il également associé à l'établissement des documents stratégiques de façade, importants outils de planification ?

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Vous avez parlé de l'UICN et de nos engagements internationaux. Vous avez également parlé de la préparation des objectifs post-2020. Comment l'OFB participera-t-il concrètement à leur élaboration ?

Par ailleurs, avez-vous l'intention de poursuivre à leur niveau actuel les activités de l'OFB relatives au comptage des oiseaux d'eau en Afrique du Nord et en Afrique de l'Ouest ?

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Pierre Dubreuil

Je ne pourrai pas répondre aux questions qui ne sont pas de mon ressort : l'interdiction de la chasse à la glu, l'engrillagement, les oies cendrées, etc. Certes, je peux avoir un avis, mais l'OFB applique la loi et c'est cette dernière qui doit se prononcer sur ces sujets… Alors qu'il est déjà compliqué de remplir nos missions et d'appliquer la loi, vous comprendrez que je ne me prononce pas sur de tels sujets – d'autres interlocuteurs le feront.

Pour ce qui est du ressort de l'OFB, beaucoup de questions concernent la chasse ! Je le répète, les chasseurs sont des acteurs de la biodiversité, avec lesquels je travaille. Monsieur Pierre Cordier, j'ai également passé mon permis de chasser il y a cinq mois, considérant que c'était normal comme dirigeant de l'Office national de la chasse et de la faune sauvage.

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Pierre Dubreuil

Absolument. Comme vous, j'ai pu constater à quel point la sécurité est au coeur du permis de chasser. Nous sommes particulièrement exigeants en France, il faut le savoir. C'est pourquoi l'OFB aura cette mission régalienne de contrôle du monde de la chasse et doit être absolument intransigeant sur le respect des règles de sécurité enseignées lors du passage de l'examen du permis de chasser. En outre, le fichier du permis national est en cours de finalisation dans les délais prévus – j'ai répondu à une question écrite sur le sujet. Il permettra de disposer de données précieuses, transmises par les fédérations des chasseurs.

Évidemment, l'OFB sera à sa place au congrès mondial de l'UICN : il aura un stand, participera au pavillon de la France et est membre du comité d'organisation de ce grand événement, qui constituera un moment de mobilisation majeure du grand public. Nous devons nous servir de cet événement pour embarquer tous les citoyens qui ne comprennent pas ou ne connaissent pas la biodiversité et ses interactions avec le climat et les changements climatiques. La pédagogie est fondamentale en la matière.

Ainsi, vous avez parlé des océans : peu de gens savent qu'une respiration sur deux est liée à l'océan, grâce aux phytoplanctons et aux organismes qui vivent au fond des océans. Nous devons faire comprendre à quel point notre vie, et la vie de tout organisme sur cette planète, dépend du bon état de la biodiversité qui, malheureusement, se dégrade. Il s'agit d'une mission qui me dépasse, d'une cause plus grande que nous. L'OFB la portera et je ne serai satisfait que lorsque tous les citoyens que je rencontrerai seront sensibles à cette exigence.

Pour ce faire, nous devons notamment collaborer avec l'IFREMER. Monsieur Yannick Haury, vous souhaitez savoir si nous serons présents en mer, au-delà du trait de côte. Bien sûr, puisque les parcs naturels marins sont des services de l'Office français de la biodiversité. Néanmoins, pour répondre à M. Paul-André Colombani, leur gouvernance demeurera la même : leurs prérogatives, prévues par le code de l'environnement, sont préservées. Ainsi, en Corse, nous travaillons avec l'Office de l'environnement et avec tous les élus au sein des conseils de gestion. En effet, les parcs naturels marins sont présidés par un président, élu par le conseil de gestion, et dirigés par des agents de l'OFB. Cela permet d'entretenir le dialogue entre les élus locaux, en métropole et outre-mer, et l'OFB.

L'OFB est un établissement public national, qui n'a pas vocation à intervenir à l'international. Pour autant, il participe à la lutte, fondamentale, contre le trafic international d'espèces sauvages menacées. Ainsi, l'établissement abrite une brigade chargée de faire respecter la Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d'extinction, dite brigade CITES, et travaille en lien avec le Muséum national d'histoire naturelle. Le trafic d'espèces sauvages est le cinquième trafic mondial en volume. C'est considérable ! En liaison avec le ministère de la justice et celui de l'intérieur, les inspecteurs de l'environnement dont les pouvoirs de police judiciaire ont été renforcés…

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Pierre Dubreuil

… peuvent désormais procéder à des enquêtes qui permettent de démanteler de véritables trafics internationaux. Des procédures sont en cours, je n'en dirai donc pas plus. Sachez cependant que certaines ont déjà permis de mettre fin à des trafics très lucratifs d'espèces particulièrement menacées.

Nous intervenons également en Afrique, pour les oiseaux notamment, dans le cadre de projets de coopération. Mais nous ne sommes pas l'Agence française de développement (AFD). Nous travaillons avec elle, et avec les gouvernements qui nous sollicitent, afin de fournir notre expertise et nos connaissances. Nous continuerons à le faire avec les pays avec lesquels nous avons déjà des relations, dans le cadre de conventions bilatérales ou multilatérales.

Le ministère de l'agriculture est une des tutelles de l'établissement. Si je suis nommé, en tant que directeur général, je respecterai bien évidemment cette nouvelle tutelle. Cette double tutelle doit être considérée comme une chance. J'ai la conviction que la transition agroécologique doit être une absolue priorité car l'agriculture a un impact sur la biodiversité – pollution ou artificialisation des sols, haies ou chemins ruraux. Tous les projets qui favorisent la transition agroécologique, comme Agrifaune ou Ecophyto, devront être davantage encouragés et soutenus. Il faudrait les démultiplier. Depuis le début de ma mission, je travaille avec le monde agricole, les chambres d'agriculture et les organisations professionnelles agricoles : la prise de conscience est croissante. Je sens que le monde agricole évolue fortement, tant au niveau national que local, puisque j'ai aussi rencontré des acteurs locaux. J'espère que le ministère de l'agriculture, en tant que tutelle, va accompagner et amplifier ce mouvement.

Monsieur Vincent Descoeur, vous m'interrogez sur le loup. L'ONCFS pilote le Plan national d'action sur le loup. Le sujet est extrêmement sensible et je me suis beaucoup impliqué récemment. Nous travaillons avec M. le préfet Pascal Mailhos, préfet coordonnateur des différents dispositifs relatifs au loup. Vous le savez, le seuil des tirs de défense a été réévalué. Des mesures de protection permettent également de préserver l'agropastoralisme qui est une priorité, notamment dans les départements très durement touchés comme le vôtre – j'ai également été saisi récemment par le département des Alpes-Maritimes. J'ai créé, dans l'organigramme de l'OFB, une direction des grands prédateurs au sein de la direction en charge de la mobilisation de la société. Il s'agit seulement des grands prédateurs terrestres, j'en suis désolé, monsieur Jean-Luc Poudroux !

J'ai été sollicité par le préfet de La Réunion et des élus concernant la problématique des requins. Je n'ai pas de réponse spécifique car l'OFB n'a pas encore traité le sujet et n'a donc pas de connaissances particulières en la matière. Mais nous allons travailler avec des organismes de recherche, puisque le requin pose désormais un véritable problème à l'usage de la nature côtière à La Réunion.

Monsieur Jean-Luc Fugit, vous m'interrogez sur nos liens avec la Fondation pour la recherche sur la biodiversité et d'autres organismes. J'étais trésorier de la FRB. Je rappelle que l'OFB n'est pas une organisation non gouvernementale ; c'est un établissement public fondé sur la connaissance scientifique. Nous devons donc nous appuyer sur tous les réseaux – et la FRB en est un puisqu'elle rassemble des organismes de recherche afin de coordonner la connaissance. Les données doivent être mieux partagées et coordonnées entre organismes. Nous allons y travailler avec la FRB, que nous finançons déjà. Ce sera un sujet de discussion avec son futur président.

La pêche est également un sujet extrêmement sensible. J'ai rencontré toutes les organisations de pêche de loisir et professionnelle. Les pêcheurs ont parfaitement conscience de leur impact sur la biodiversité. Ils savent que la pêche permet aussi de restaurer la biodiversité, en métropole et outre-mer. Ils seront très présents dans le conseil d'administration, qui comptera quarante-trois membres. Toutes les parties prenantes seront donc représentées. Nous travaillerons également avec eux au sein du comité d'orientation, où le dialogue sera plus approfondi, et au sein du conseil scientifique.

Madame Élisabeth Toutut-Picard, comment va fonctionner l'Office français de la biodiversité ? Il n'y aura pas de cloisonnement, ni de fonctionnement en silo – terrestre, aquatique, marin, etc. – même si nous avons prévu un délégué pour la mer, par exemple. Nous ferons en sorte de mieux articuler et décloisonner nos actions nationale, régionale et départementale, au service des projets territoriaux des élus locaux. Ce décloisonnement rendra l'organisation plus lisible, afin qu'il y ait beaucoup moins d'interlocuteurs par sujet qu'actuellement. Le chef de service départemental sera le représentant de l'OFB dans le département et le directeur régional sera l'interlocuteur pour toute la région. Il pourra ensuite orienter vers le service connaissances, le service police, le service d'appui technique aux gestionnaires, etc. C'est un pari organisationnel fort, auquel je me suis attaché depuis un an. L'OFB ne peut pas se permettre de diluer ses moyens dans des complexités administratives ou organisationnelles.

S'agissant de la santé, j'ai commencé à travailler avec l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (ANSES) qui a un rôle émergent, mais de plus en plus important, sur l'impact des produits sur la biodiversité. J'ai décidé de renforcer nos liens avec M. Roger Genet, son directeur général, et son équipe car, vous avez raison, santé, alimentation et biodiversité sont étroitement imbriquées et, là encore, nous avons besoin de connaissances. L'OFB a sans doute un rôle plus prospectif car nous sommes compétents sur la biodiversité terrestre, aquatique et marine. En tant qu'établissement public, opérateur de l'État, nous devons éclairer les pouvoirs publics sur l'impact de la biodiversité sur la santé.

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Monsieur Pierre Dubreuil, je vous remercie d'avoir répondu aux questions qui étaient de votre ressort. Je remercie également Mme la rapporteure pour ce travail innovant.

——²——²——

Après le départ de M. Pierre Dubreuil, il est procédé au vote sur la proposition de nomination par appel nominal à la tribune et à bulletins secrets, les scrutateurs d'âge étant MM. Jean-Marc Zulesi et Ludovic Pajot.

Les résultats du scrutin qui a suivi l'audition sont les suivants (le dépouillement des votes ayant été réalisé le mercredi 18 décembre 2019, concomitamment avec le Sénat) :

Nombre de votants31
Abstention, bulletins blancs ou nuls8
Suffrages exprimés23
Pour23
Contre0
——²——²——

Membres présents ou excusés

Réunion du mercredi 11 décembre 2019 à 10 h 05

Présents. - Mme Bérangère Abba, Mme Sophie Auconie, Mme Valérie Beauvais, M. Jean-Yves Bony, M. Guy Bricout, Mme Danielle Brulebois, M. Stéphane Buchou, M. Lionel Causse, M. Jean-François Cesarini, M. Jean-Charles Colas-Roy, M. Paul-André Colombani, Mme Yolaine de Courson, M. Vincent Descoeur, M. Loïc Dombreval, Mme Nadia Essayan, M. Jean-Luc Fugit, M. Yannick Haury, Mme Stéphanie Kerbarh, M. Jacques Krabal, M. Pascal Lavergne, M. Jean-Claude Leclabart, M. Patrick Loiseau, Mme Laurence Maillart-Méhaignerie, M. Emmanuel Maquet, M. Gérard Menuel, Mme Marjolaine Meynier-Millefert, M. Bruno Millienne, M. Adrien Morenas, M. Jimmy Pahun, M. Ludovic Pajot, Mme Sophie Panonacle, Mme Zivka Park, M. Patrice Perrot, M. Pierre Person, Mme Barbara Pompili, M. Jean-Luc Poudroux, Mme Véronique Riotton, Mme Laurianne Rossi, Mme Nathalie Sarles, M. Jean-Marie Sermier, M. Vincent Thiébaut, Mme Élisabeth Toutut-Picard, Mme Frédérique Tuffnell, M. Pierre Vatin, M. Michel Vialay, M. Hubert Wulfranc, M. Jean-Marc Zulesi

Excusés. - Mme Nathalie Bassire, Mme Gisèle Biémouret, Mme Valérie Lacroute, M. François-Michel Lambert, Mme Sandrine Le Feur, M. David Lorion, Mme Aude Luquet, Mme Claire O'Petit, Mme Mathilde Panot, Mme George Pau-Langevin, M. Alain Perea, M. Damien Pichereau, M. Martial Saddier, M. Gabriel Serville, Mme Hélène Vainqueur-Christophe

Assistaient également à la réunion. - M. Pierre Cordier, Mme Bérangère Couillard, M. Vincent Rolland, M. Jean-Luc Warsmann