La réunion débute à 9 heures.
Présidence de M. Jean-René Cazeneuve, président
Les débats sont accessibles sur le portail vidéo du site de l'Assemblée nationale à l'adresse suivante :
Conformément aux décisions de la Conférence des présidents du 31 mars 2020, cette réunion donne lieu au relevé d'échange suivant :
, a rappelé que la Délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation a déjà réalisé plusieurs réunions depuis le début de la période de crise sanitaire, avec son groupe de travail chargé de mesurer les impacts de la crise sanitaire sur les collectivités territoriales. Le deuxième groupe de travail, réuni aujourd'hui, a pour objectif de réfléchir aux enjeux auxquels seront confrontés les collectivités territoriales pendant la période de déconfinement et de leur rôle dans le cadre de la relance. Mme Patricia Lemoine et M. Éric Poulliat en sont les rapporteurs. Les réflexions engagées par ces deux groupes de travail donneront lieu à la publication d'une contribution transpartisane.
, a précisé que les travaux de ce groupe étaient issus de réflexions menées avec un certain nombre de maires, de présidents d'intercommunalités, de conseillers départementaux et régionaux afin de connaître les attentes et les besoins des collectivités territoriales. Elle a relevé que les attentes étaient souvent communes au sein du bloc communal - entre communes et intercommunalités - mais différaient des attentes des départements et des régions. Nous avons pu observer pendant la crise une coopération territoriale organisée en binôme avec d'une part, les départements et les régions et d'autre part, les communes et les intercommunalités.
Dans le cadre du plan de déconfinement, les attentes des collectivités portent sur des enjeux de court terme à l'image de la réouverture des écoles le 11 mai qui nécessite la définition d'un cadre clair. Les collectivités expriment également des attentes concernant des enjeux de moyen terme comme la mise en œuvre de solutions pour résorber les pertes financières engendrées par la crise. Enfin, certaines de leurs attentes sont davantage liées à des problématiques de long terme comme les questions d'aménagement du territoire et de répartition de compétences.
Elle a souligné l'importance de définir des dispositifs gouvernementaux clairs qui permettent toutefois aux élus de faire preuve de souplesse. Cela sous-entend la mise en œuvre de mesures territorialisées et progressives. Patricia Lemoine a finalement mentionné les attentes des élus en matière de concertation. À titre d'exemple, de nombreuses communes ont souffert du peu de temps à leur disposition pour mettre en œuvre le protocole sanitaire permettant la réouverture des écoles. Un temps de concertation doit être laissé aux élus pour qu'ils puissent déterminer, en collaboration avec tous les acteurs de leur territoire, le fonctionnement de leur organisation à moyen terme.
a précisé la démarche de ce groupe de travail. Il a rappelé que l'objectif n'était pas de se focaliser sur une thématique en particulier mais bien de proposer des solutions pour une relance globale sur les territoires. Il a également souligné la nécessité que les adaptations locales des mesures de déconfinement n'engendrent pas de rupture d'égalité. Une forme de porosité entre les compétences de chaque échelon territorial s'est installée pour que chacun puisse contribuer à la relance. Il convient toutefois de veiller à ce que ne se perpétuent pas dans le temps certains prises de compétences rendues nécessaires par l'urgence. Ce constat appelle à une réflexion plus générale sur les manières de poursuivre la décentralisation. À ce titre, la nouvelle version du texte de la loi 3D qui sera présentée à l'issue de cette crise ne pourra pas être la même que celle prévue initialement.
a souligné que cette crise avait confirmé la capacité des collectivités territoriales à être réactives. Il a notamment insisté sur la capacité des « collectivités de l'ancien monde », le couple « commune-département » à mettre en œuvre des solutions de proximité du fait de leur connaissance du terrain. Ce constat doit conduire à ce que le socle commune-département soit préservé, consolidé et doté de moyens pour l'avenir.
a précisé que la tendance aux partenariats entre les communes et les intercommunalités, d'une part, et les départements et les régions, d'autre part, n'est pas vrai partout. Dans certains territoires, les métropoles ont davantage coopéré avec les régions du fait du contexte politique local, mais également de l'exercice de compétences communes en matière économique. Ce constat invite à une réflexion plus globale sur la redéfinition des schémas de répartition de compétences après la crise.
a confirmé qu'en fonction des territoires, les collectivités territoriales se sont organisées différemment, selon les habitudes et les partenariats établis. Les départements et les communes ont été très réactifs pendant la crise, mais ce partenariat s'est exprimé de manière différente sur chaque territoire.
, a confirmé l'importance de redéfinir le schéma de répartition des compétences entre chaque collectivité territoriale à l'issue de cette crise. La crise sanitaire a confirmé le besoin d'un droit à la différenciation. Elle a ainsi confirmé l'importance de réfléchir d'ores et déjà au contenu du futur projet de loi « 3D » qui ne pourra pas être le même que celui envisagé initialement.
Elle a rappelé que toutes les collectivités ont été confrontées, du fait du confinement, au besoin d'établir un plan de continuité d'activité. Elles doivent désormais élaborer un plan de reprise d'activité dont les modalités seront très différentes selon la taille de la collectivité et le nombre d'agents concernés. Elle a également rappelé que les collectivités territoriales demeurent dans l'attente de nombreuses précisions s'agissant du temps de travail de leurs agents. À titre d'exemple, de nombreux employeurs se demandent quel traitement réserver, après le 11 mai, aux agents jusqu'alors en congés pour assurer la garde de leurs enfants. Face à ces attentes, elle a souhaité l'élaboration d'un cadre clair de la part du gouvernement.
La crise sanitaire a suscité des besoins beaucoup plus importants en matière de mutualisation. À titre d'exemple, les groupements de commandes entre les départements et les régions se sont multipliés pour l'achat de matériel de protection. Il apparait nécessaire d'élaborer des règles plus souples afin d'encourager ce type de pratiques après la crise.
Il demeure de nombreuses interrogations pour collectivités territoriales s'agissant de l'organisation des vacances scolaires. Il convient de mentionner, à cet égard, l'inquiétude des maires concernant la programmation estivale des activités de plein air. Certains d'entre eux souhaitent pouvoir anticiper. Face à ce besoin, il est nécessaire de déterminer rapidement une feuille de route permettant aux élus de prévoir les recrutements et d'accompagner les structures concernées.
, est revenu sur la question de la réouverture des écoles. S'il s'agit d'un bon exemple de différenciation, cette situation génère de l'angoisse parmi les élus qui doivent décider seuls de la réouverture ou non des établissements.
a confirmé le besoin de redéfinir, après la crise, le schéma de répartition des compétences entre les collectivités territoriales . S'agissant du recours à la différenciation, il a mentionné l'existence d'une fracture entre les élus locaux, certains étant volontaires pour prendre eux-mêmes la décision de rouvrir leur école tandis que d'autres ne se sentent pas capables d'exercer une telle responsabilité. Il existe également de maires qui, bien que volontaires pour rouvrir les établissements scolaires, se retrouvent face à l'impossibilité de le faire car la superficie du bâtiment ou les moyens à leur disposition ne leurs permettent pas.
a évoqué la situation des petites communes de moins de 3500 habitants qui rencontrent des difficultés spécifiques pour assurer la réouverture des établissements scolaires et l'organisation des activités périscolaires .
a souligné la difficulté de permettre à chaque territoire de trouver des modalités adaptées à son environnement pour organiser la reprise des cours tout en garantissant à chaque enfant un égal accès à l'enseignement. C'est un défi difficile à relever.
a fait remarquer que les possibilités de mutualisation pendant la période où s'appliquaient les PCA ont été difficiles à mettre en œuvre entre communes et EPCI car les nouveaux exécutifs n'avaient pas été mis en place. Une forme d'attentisme a donc bien souvent prévalu.
La libre administration des collectivités territoriales assure une meilleure appréciation des besoins de la population tels qu'ils s'expriment localement, mais il faut avant tout préserver l'universalité des droits. Cet équilibre est parfois difficile à trouver comme on peut le voir pour la préparation de la réouverture des écoles. La diversité des modes d'organisation ne résulte pas toujours de choix librement consentis par les maires, certaines décisions sont en effet prises en raison de fortes contraintes financières ou de faible capacité d'encadrement. La différenciation territoriale ne doit pas être un facteur d'aggravation des inégalités sociales, c'est pourquoi il faut souligner l'importance des mécanismes de péréquation financière entre les collectivités, c'est le seul moyen de préserver l'égalité républicaine et de garantir par exemple, un accès à un enseignement de qualité pour tous les enfants.
a rappelé que les citoyens ne devaient pas être pénalisés par des ruptures d'égalité dans l'accès aux services publics locaux selon qu'ils habitaient dans des communes rurales isolées ou dans des métropoles.
En ce qui concerne la gestion des ressources humaines par les collectivités territoriales, la mise en œuvre des plans de continuité d'activité (PCA) s'est bien déroulée. Les collectivités ont réussi à réorganiser leurs services et ont généralisé le télétravail. Bien évidemment, les collectivités qui l'avaient déjà introduit de manière ponctuelle, ont été avantagées par rapport à celles où le télétravail n'était pas institutionnalisé. Les agents territoriaux ont fait preuve d'une forte réactivité et se sont adaptés à des modes d'organisation improvisés.
Cette période de crise a amené de nombreux agents territoriaux à changer d'attribution pour exercer des fonctions qui n'étaient les leurs habituellement. Cette faculté de mobilité interne doit être encouragée et pérennisée pour permettre à des agents des services culturels ou des équipements sportifs par exemple, de pouvoir être affectés à d'autres tâches prioritaires durant la phase de transition.
Elle a également fait apparaitre l'utilité des modalités de coopération entre les différents échelons de collectivités. La mutualisation des ressources humaines a été une réussite notamment entre EPCI et communes. Certaines collectivités ont mis en place dans l‘urgence des mises à disposition de personnels pour permettre aux collectivités en première ligne de remplir des tâches qu'elles ne pouvaient accomplir en raison de ressources humaines propres insuffisantes ou indisponibles.
Ces expériences novatrices de gestion des ressources humaines devront être analysées dans le cadre du dialogue social avec les organisations représentatives des personnels, pour déterminer si certains éléments de souplesse peuvent être maintenus dans un cadre de droit commun. Il ne s'agit pas de vouloir remettre en cause des éléments du statut des fonctionnaires territoriaux mais plutôt de capitaliser à partir de cette expérience inédite.
Il a attiré l'attention sur certains points de vigilance pour réussir la reprise d'activité, par exemple l'organisation du travail et le planning des congés pour la période estivale, ce qui suppose que les directives gouvernementales soient connues suffisamment à l'avance pour permettre aux employeurs territoriaux d'anticiper les cycles de travail. Les collectivités devront aussi anticiper les recrutements temporaires d'animateurs de centres de loisirs, sujet particulièrement important cette année car de nombreuses familles risquent de réduire leurs congés et de recourir plus massivement à ces services communaux ou associatifs.
a souligné que selon les collectivités, les plans de continuité de d'activité avaient été fortement différenciés, les maires décidant librement selon les caractéristiques de leur territoire des services qui devaient être assurés en priorité.
a abordé la question de la réorganisation des collectivités territoriales dans la phase transitoire de sortie du confinement.
Les collectivités vont devoir définir des « plans de reprise d'activité » après avoir élaboré des plans de continuité des services. Les exécutifs devront prioriser les services qui ne doivent plus fonctionner en mode dégradé et qu'il faut faire fonctionner à un rythme normal alors que d'autres peuvent durant une période de transition continuer à fonctionner de manière allégée. Ces modalités de reprise viseront à rattraper le retard accumulé.
Elle a indiqué que si certains délais administratifs avaient été aménagés dans le cadre d'ordonnances, comme par exemple pour les autorisations d'urbanisme, certaines questions devaient faire l'objet d'une attention particulière. Il semble nécessaire que les exécutifs locaux fassent le point pour lister leurs missions obligatoires qui ont été suspendues pendant le confinement et qui doivent être à nouveau exercées, comme par exemple les commissions de sécurité pour contrôler les conditions d'accueil pour les établissements recevant du public. Les collectivités doivent déterminer si elles peuvent réaménager certains délais pour organiser ces missions de contrôle sans risquer d'engager la responsabilité de leur exécutif. La question de la responsabilité des maires a pris une nouvelle acuité avec la préparation de la réouverture des établissements scolaires. Beaucoup d'élus voudraient être rassurés et ont besoin d'une clarification sur les prérogatives respectives des maires et des services de l'Éducation nationale.
Les communes devront se rapprocher de leurs partenaires pour déterminer comment aménager les délais obligatoires pour fournir des éléments statistiques ou comptables. C'est le cas, par exemple, pour le versement des dotations des contrats « enfance –jeunesse » par les CAF, qui sont subordonnés à la production de statistiques de fréquentation des structures d'accueil.
Pour certains secteurs d'activité spécifiques, des circulaires ministérielles ont prévu un décalage dans l'année 2020 des formalités comptables et financières, comme par exemple pour les établissements médico-sociaux qui pourront retarder la fourniture d'éléments statistiques servant de base à la fixation de leurs tarifs. En pleine crise sanitaire, les EHPAD n'avaient pas le personnel suffisant pour mener ce travail complexe de préparation de la campagne budgétaire.
La crise sanitaire doit être une occasion pour améliorer les méthodes d'organisation des collectivités. Parmi les leçons à tirer de cette crise, on peut citer la nécessité de disposer des outils opérationnels de gestion de crise. À ce titre, il conviendrait d'étendre l'obligation des plans de sauvegarde communaux aux autres échelons de collectivités, en prévoyant un volet « crise sanitaire », en complément des dispositions relatives aux risques naturels.
Concernant le fonctionnement des institutions locales, plusieurs aspects doivent retenir l'attention.
a fait part de sa préoccupation au sujet des relations entre collectivités du bloc communal. Les EPCI ne fonctionnant pas avec leur nouveau conseil communautaire, il faut laisser du temps pour le vote des taux de fiscalité locale, les exonérations et abattements, les pactes financiers. Dans le contexte inquiétant de la baisse des recettes des collectivités, la question se posera également de la révision des attributions de compensation en lien avec la baisse des impôts économiques (CVAE, CFE) et de l'organisation des commission locale d'évaluation des charges transférées (CLECT).
a témoigné de la situation des maires de sa circonscription où les communes sont de très petite taille avec seulement cinq bourgs ayant plus de 5 000 habitants. Ces communes connaissent une organisation scolaire comprenant de nombreux regroupements pédagogiques intercommunaux (RPI). Les maires subissent de fortes pression pour parvenir à une réouverture de tous les établissements mais n'en n'ont pas toujours les moyens. La question de la responsabilité des maires est cruciale pour garantir une reprise des services publics dans les meilleures conditions. Elle a indiqué avoir déposé un amendement au projet de loi relatif à la prolongation de l'état d'urgence sanitaire pour restreindre les possibilités de mettre en cause la responsabilité des maires, cet aménagement n'étant valable que pour la durée de la crise sanitaire. Il faut vraiment un signal de réassurance pour permettre aux maires de gérer au mieux cette sortie de crise.
a constaté que la question de la responsabilité des maires était très discutée, comme le prouvent les débats en Commission des lois lors de l'examen du texte sur la prolongation de l'état d'urgence sanitaire. Le point d'équilibre est difficile à trouver car les arguments juridiques ne suffisent pas à calmer le climat d'inquiétude très prégnant chez les élus locaux. Il faut donc permettre une clarification pédagogique de cette question juridique complexe, sans donner l'impression que la solution trouvée conduit à une amnistie par avance des maires. Les textes régissant cette responsabilité sont équilibrés, il faut donc les retoucher a minima.
Concernant le fonctionnement des EPCI, on ne peut que déplorer les fortes entraves existantes actuellement et souhaiter une installation rapide des nouveaux conseils communautaires. Le rôle des EPCI sera déterminant pour la réussite de la reprise économique car pour l'instant toutes les décisions relatives aux investissements sont suspendues. La commande publique est en panne ce qui est très préoccupant pour les acteurs économiques locaux.
a estimé que la responsabilité des maires était déjà très encadrée par une jurisprudence allant dans le sens de son atténuation si des circonstances particulières peuvent expliquer certaines prises de risques. Pour rassurer les élus des clarifications sont peut-être utiles mais il convient de pas aller trop loin et laisser croire que les élus ne devraient plus rendre compte de leurs décisions.
Concernant les EPCI, il s'est s'interrogé sur l'opportunité de prévoir un mode de gouvernance spécifique une période transitoire, surtout s'il est confirmé que les élections municipales sont renvoyées à l'automne . C'est une question très complexe, notamment pour les EPCI ayant en leur sein une ville importante qui vient de changer de majorité car, dans ce cas, toutes les décisions importantes sont en suspens.
a constaté que la gouvernance des EPCI durant cette période transitoire suscite des appréciations divergentes. Il apparait clairement que la situation actuelle n'est pas satisfaisante car les exécutifs des conseils communautaires manquent de légitimité. Le débat est ouvert entre ceux qui pensent qu'il est préférable de garder les exécutifs en place pour des raisons d'efficacité et d'autres qui soulignent que si les élections sont reportées à l'automne, il faut, dans un souci de légitimité, associer les nouveaux élus au 1er tour de mars 2020 à la gouvernance de l'EPCI.
a souligné que ce choix relatif à la gouvernance des EPCI était très difficile car il revient à arbitrer entre l'efficacité et la légitimité démocratique. Les EPCI exercent des compétences cruciales pendant cette période de crise et il est donc sans doute préférable de laisser les exécutifs actuels, qui sont expérimentés, continuer à gérer la sortie du déconfinement et poursuivre la mise en œuvre de mesures qu'ils ont planifié depuis plusieurs semaines.
a indiqué que son expérience de dix ans à la tête d'une communauté de communes lui avait permis de mesurer combien leurs interventions étaient importantes pour relancer le tissu économique local. Dans le souci de ne pas fragiliser les EPCI actuellement, il est préférable de maintenir les exécutifs en place même si des maires nouvellement installés pourraient prétendre intervenir. Il faut privilégier l'efficacité et ne pas casser la dynamique de coopération qui s'est engagée entre Régions et EPCI dans le cadre des fonds de solidarité régionaux pour soutenir les acteurs économiques .
a reconnu que la gouvernance des EPCI était problématique. Il faut concilier continuité de l'action surtout en cette période de crise, sans méconnaitre les problèmes de légitimité. Les exécutifs actuels des EPCI doivent trouver des moyens informels d'associer les nouveaux maires à leurs travaux.
a formé le vœu que les élus au premier tour puissent entrer en fonction fin mai ou début juin et que le Premier ministre fixe rapidement un calendrier. Pour les cas de second tour, le mieux serait de les organisés également en juin afin de ne pas bloquer le fonctionnement normal des EPCI. La situation actuelle qui voit des maires battus au premier tour ou ne s'étant pas représentés, continuer à siéger au sein des exécutifs communautaires pose un problème de légitimité et ne permet pas de prendre les décisions en matière économique qui sont pourtant nécessaires pour la relance de l'activité locale.
En ce qui concerne l'école, il existe certes des parents hypocondriaques qui reprochent aux élus de vouloirs rouvrir les classes, mais il y aussi des maires battus ou ne se représentant pas qui doivent gérer cette situation alors qu'ils devront bientôt quitter leurs fonctions et qu'ils peuvent se trouver en porte-à-faux vis-à-vis de la nouvelle équipe municipale.
a indiqué que la situation sera compliquée tant que le processus électoral ne sera pas achevé. Pour la période transitoire, on peut imaginer des procédés pour renforcer l'efficacité des exécutifs municipaux. Ainsi les préfets pourraient donner des consignes afin pour associés les nouveaux élus aux décisions. Pour les intercommunalités, la conférence des maires pourrait constituer une instance pour contrebalancer le manque de légitimité des exécutifs lorsqu'une ou plusieurs communes importantes ont basculées politiquement, et ainsi permettre de mieux accompagner le redémarrage de l'économie réelle.
En ce qui concerne le débat sur la responsabilité pénale des maires, notamment pour la réouverture des écoles, il ne faut pas aller dans le sens d'une exonération de cette responsabilité. En revanche, le fait de faire valider les plans de réouverture des écoles par les directeurs académiques des services de l'Éducation nationale (DASEN) conduirait à un transfert de cette responsabilité vers l'État qui solutionnerait le problème.
a estimé qu'il n'y a pas de difficulté à faire cohabiter plusieurs légitimités au seins des conseils communautaires, celle des exécutifs maintenus et celle des nouveaux élus, et que ces conseils mixtes doivent pouvoir fonctionner jusqu'aux élections en automne.
a souligné que le choix opéré par l'État de maintenir les exécutifs en fonction relève d'une préoccupation d'efficacité opérationnelle. Les élus en place, même s'ils ont été battus ou n'ont pas souhaité se représenter, sont les mieux à même de faire fonctionner les procédures et les services pendant cette période de crise. Au-delà des questions de légitimité, le choix a été fait de disposer d'exécutifs immédiatement opérationnels sachant que seuls 165 conseils sont complets après le premier tour.
a souligné le consensus sur le problème posé par la situation des EPCI et la nécessité d'organiser les élections le plus rapidement possible, même si l'on peut s'interroger sur la tenue d'une campagne électorale sur un mode dégradé en raison des risques sanitaires, alors que l'organisation du vote lui-même ne pose de réelle difficulté. Il n'y a en revanche des avis différents sur la composition du conseil communautaire qui pourrait ou non comprendre les nouveaux élus dans l'hypothèse où les élections seraient repoussées à une date plus lointaine.
a considéré que la Conférence des maires pouvait effectivement permettre de contrebalancer le défaut de légitimité de certains conseils communautaires. De même le souci d'opérationnalité pour le fonctionnement des EPCI est tout à fait juste car l'installation de nouveaux élus entraine nécessairement une période d'appropriation des procédures et des circuits décisionnels qui retarde les décisions alors qu'il faut être très réactif.
En ce qui concerne le volet financier, le ministre des comptes publics a estimé que les pertes de recettes pour les collectivités pourraient s'élever à quatre milliards d'euros en 2020 et onze milliards d'euros en 2021, essentiellement liées à la fiscalité économique (CFE et CVAE) mais aussi la taxe de séjour pour les communes touristiques. Quand on sait que les investissements des collectivités représentent 70 % de la commande publique, dont 50 % pour le seul bloc communal, il y a lieu de se préoccuper des moyens mobilisables pour investir et relance l'économie sachant que l'État ne viendra pas compenser toutes ces pertes.
Afin de redonner une marge de trésorerie aux communes, la piste du versement du FCTVA en année N et non pas en année N+1, voire N+2 pour certaines communes, peut être avancée. Pour les communes et EPCI dont les ressources proviennent pour une grande part de la taxe de séjour, il pourrait être envisagé de les exonérer de versement au titre du FPIC si c'est le cas, ou encore de la retenue sur la fiscalité locale opérée par l'État en vertu de l'application de la CRFP aux communes dont la dotation forfaitaire est nulle et aux EPCI dont la dotation d'intercommunalité est également nulle. Certains EPCI font valoir qu'ils auront beaucoup de difficultés à équilibrer leur section de fonctionnement en 2020, et surtout en 2021 et 2022, et qu'il serait donc paradoxal de continuer à participer au redressement des finances de l'État.
Il convient également d'évoquer le risque de voir l'équilibre financier des délégations de service public (DSP) remis en cause, notamment pour ce qui concerne les salles de spectacle, cinéma, piscines (travaux d'entretien nécessaires), mais aussi l'eau et l'assainissement. Les pertes seront contractuellement réparties entre le fermier et la ou les collectivités avec, là aussi, des dépenses conséquentes.
Les élus locaux sont conscients du rôle qu'ils auront à jouer en faveur de la relance économique, ils souhaitent pour cela que des assouplissements soient apportés en matière de délais, notamment en ce qui concerne la commande publique. Le seuil de dispense de procédure de passation des marchés publics a déjà été relevé à 40 000 euros hors taxe à compter du 1er janvier 2020, mais il est sans doute possible de réduire certains délais de publication.
Une autre demande forte qui émerge des territoires consiste à pouvoir favoriser et accompagner l'installation d'activités en lien avec la souveraineté nationale, par exemple dans le cadre des plans État-Régions (CPER) ou au travers du dispositif « territoires d'industries ». Il est souhaitable d'aider les projets de ce type qui respectent les critères de développement durable, via des prêts bonifiés ou des subventions.
a relevé qu'au-delà de ces constats largement partagés, il faut savoir quelles sont les rôles respectifs de l'État et des collectivités dans ce processus. Soit l'on considère que les collectivités doivent porter une partie de l'effort et s'adapter à la nouvelle donne, soit l'on considère que c'est le rôle de l'État de tout soutenir et d'indemniser le cas échéant.
a relevé la force d'entrainement que peut revêtir un dispositif comme les CPER. Si l'État donne rapidement l'impulsion avec les régions, les autres collectivités pourront intervenir plus efficacement en soutien.
a souhaité que le l'État soit au rendez-vous pour la mise en œuvre des CPER, mais aussi des dispositifs ANRU ou du plan « Action cœur de ville ». On peut redouter l'effet domino qui peut intervenir si les régions et les EPCI connaissent des problèmes financiers, ce seront en effet les autres collectivités, et principalement les communes, qui seront impactées par les réductions de subventions et les changements de priorités au sein des contrats de territoire.
Au sortir de cette période, il est nécessaire d'être très attentifs à la santé financière des communes qui vont avoir tendance à diminuer les budgets d'investissement mais aussi de fonctionnement, ce qui a des conséquences non seulement économiques mais aussi sociales, particulièrement les publics les plus fragiles, en termes d'emplois, d'aide à domicile. La situation des départements peut également se dégrader si le chômage augmente, avec la gestion du RSA, mais aussi ne matière de dépendance.
a souligné la situation paradoxale des départements dont une grande part des recettes dépend de l'activité économique alors que leurs dépenses sont de nature sociale. Il y a là une opposition de tendance qui pose question, il faudra un jour trouver des recettes qui soient davantage en phase avec l'évolution des dépenses des départements.
Pour ce qui concerne l'urgence à accompagner les collectivités, il y a lieu de la relativiser, l'urgence n'est pas généralisée et une large part des ressources des communes, impôts fonciers et DGF ne subit pas les effets de la crise. Ce qui ne veut pas dire que certaines communes touristiques ou d'outre-mer notamment ne vont pas connaitre des difficultés très rapidement.
a reconnu que l'impact sur les communes sera sans doute contenu en 2020 et que la situation sera plus délicate ne 2021. Pour autant la baisse des DMTO aura des conséquences dans les petites communes et il à craindre des conséquences en matière de non-renouvellement, ou d'annulation de contrats ou de prestations, dans les secteurs culturel et touristique notamment.
a souhaité avoir des informations sur la mise à disposition des enveloppes DETR pour les nouveaux élus qui seront installés fin mai.
a indiqué que les préfets avaient reçu des instructions pour gérer les enveloppes DETR avec souplesse afin de permettre leur consommation optimale.
a souligné les problèmes financiers rencontrés par les communes du fait de la baisse des DMTO mais aussi des pertes de taxe de séjour, de stationnement, de taxes sur les jeux ou sur les courses hippiques. Pour une ville de 30 000 habitants comme Dieppe, la crise sanitaire engendre un gap financier de l'ordre de 700 000 euros qui est loin d'être négligeable.
a indiqué que, selon les données présentées par Sébastien Lecornu, Ministre auprès de la ministre de la Cohésion des territoires et des Relations avec les collectivités territoriales, chargé des Collectivités territoriales, près de 4 000 communes sont classées « à risque » en raison de la sensibilité de leurs ressources au produit de certaines recettes telles que la taxe de séjour ou les produits issus des casinos, des activités hippiques et autres activités saisonnières.
a souligné que la réflexion autour du rôle des collectivités après le déconfinement ne se limite pas aux sujets financiers et institutionnels.
En matière de réouverture des écoles, l'introduction de la notion de volontariat est un sujet qu'il faudra intégrer dans les futures réflexions sur les plans de reprise. D'une manière générale nous avons besoin de disposer d'un suivi de l'évolution dynamique du retour à l'école, territoire par territoire afin d'établir des comparaisons et disposer d'une vision nationale de l'école de la République.
L'idée de contractualiser avec les DASEN est intéressante. En pratique, cette contractualisation existe déjà pour les activités périscolaires, que le ministre a baptisées 2S2C pour « sport, santé, civisme et culture », et pourrait être étendue au plan de reprise. En ce qui concerne la rentrée scolaire de septembre, le Gouvernement doit être en capacité de fixer le cadre fin juin afin que les établissements scolaires puissent la préparer.
La continuité de l'enseignement a mis en lumière la fracture numérique qui existe entre les territoires, mais qui a aussi une dimension sociale importante. Des initiatives ont été prises sur le terrain, prêt de matériel, accompagnement, mais cette période a clairement remis en lumière la question d'un véritable droit d'accès universel au numérique qui va au-delà de la notion de service comme nous l'avons vu pour l'éducation.
Le sujet des mobilités ouvre sur celui plus large de l'aménagement du territoire. Le besoin de mobilités découle en effet de l'urbanisation, de la métropolisation et de l'éloignement entre lieux de vie et de travail. L'État s'étant largement retiré de la question de l'aménagement du territoire, il appartient aux collectivités de réinvestir ce sujet pour amener de l'activité en milieu rural, développer l'habitat en dehors des zones urbaines et réduire ainsi les durées de déplacements. La politique de métropolisation mène à une impasse puisqu'elle engendre à la fois une qualité de vie dégradée et des besoins impossibles à satisfaire en matière de mobilité. Le sujet des gens du voyage va se poser pour les collectivités avec la reprise des « grands passages » à travers le pays, en direction du littoral Atlantique et du Sud méditerranéen. D'abord en raison des règles limitatives de déplacement durant la phase de déconfinement, ensuite pour l'aménagement des aires d'accueil pour respecter la distanciation sociale.
Dans le secteur culturel, beaucoup a été dit hier par le ministre. Il semble intéressant de s'attacher à la rénovation du patrimoine dans le cadre du programme « Action cœur de ville », mais aussi à la préservation des petits festivals.
En ce qui concerne le sport, la situation est délicate car la reprise de l'activité n'est pas prévue dans l'immédiat. Dans le cadre des activités périscolaires, les maires peuvent être encouragés à associer leurs associations sportives à ces activités.
a souligné que la crise a rendu nécessaires des adaptations dans l'urgence, en matière de numérique notamment, qu'il sera sans doute utile de conserver à l'avenir. Cette crise a servi de révélateur quant à la robustesse de nos politiques publiques et de leur degré d'adaptation, il faut prendre en compte ces données pour adapter nos procédures de réaction aux différentes crises qui pourront survenir.
La réunion s'est achevée à 10 heures 45.
Membres présents ou excusés
Présents. – M. Stéphane Baudu, M. Thibault Bazin, M. Jean‑René Cazeneuve, Mme Yolaine de Courson, M. Christophe Jerretie, M. Sébastien Jumel, Mme Catherine Kamowski, Mme Valérie Lacroute, M. Didier Le Gac, Mme Patricia Lemoine, Mme Monique Limon, M. Didier Martin, Mme Monica Michel, M. Bruno Millienne, M. Bernard Perrut, M. Éric Poulliat, Mme Bénédicte Taurine, M. Stéphane Travert, M. Arnaud Viala.
Excusés. – Mme Véronique Louwagie, Mme Christine Pires Beaune.