La réunion

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La commission spéciale a auditionné Mme Corinne Le Quéré, présidente du Haut Conseil pour le climat, ainsi que M. Olivier Fontan, directeur exécutif.

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Nous avons le plaisir de recevoir Mme Corinne Le Quéré et M. Olivier Fontan, respectivement présidente et directeur exécutif du Haut Conseil pour le climat (HCC). Le projet de loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, issu des travaux de la Convention citoyenne sur le climat, vise à réduire de 40 % nos émissions de gaz à effet de serre d'ici à 2030, dans une optique de justice sociale. L'avant-projet a été l'objet de plusieurs consultations préalables, comme celles du Conseil national de la transition écologique et du Conseil économique, social et environnemental (CESE). En un temps record, le Haut Conseil pour le climat a rendu, hier, un avis sur le projet de loi déposé sur le bureau de l'Assemblée nationale. Il porte plus particulièrement sur certains articles relatifs à l'affichage environnemental et à la rénovation énergétique des bâtiments. Nous vous entendrons avec grand intérêt exposer vos conclusions, qui doivent permettre d'évaluer l'impact du texte sur les émissions de gaz à effet de serre dans notre pays, et nous serons très attentifs à vos recommandations tendant à renforcer la contribution du projet de loi à la stratégie nationale bas carbone (SNBC) de la France.

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Corinne le Quéré, présidente du Haut Conseil pour le climat

Quelques remarques préliminaires me semblent nécessaires. En premier lieu, ceux des membres du Haut Conseil qui ont été associés aux travaux de la Convention citoyenne pour le climat (CCC) n'ont pas participé aux délibérations sur l'avis que nous avons publié hier. Ensuite, nous n'avons pas procédé à une contre-expertise de l'étude d'impact publiée par le Gouvernement, mais utilisé les informations qu'elle contient. Nous n'avons pas non plus jugé l'étendue de la reprise des mesures proposées par la Convention citoyenne pour le climat, mais apprécié l'utilité du projet de loi pour atteindre les objectifs climatiques. Enfin, le court délai depuis la publication du projet de loi et de son étude d'impact limitant la possibilité de conduire une étude approfondie de tous les articles, nous nous sommes concentrés, comme vous l'avez signalé, sur le secteur du bâtiment et l'affichage environnemental.

En élaborant cet avis, nous visions à étudier la contribution du projet de loi à la SNBC, à émettre des recommandations pour s'assurer de l'atteinte des objectifs d'atténuation, et à analyser la qualité de l'étude d'impact et le parcours du projet de loi au regard surtout des recommandations que nous avions formulées en décembre 2019 dans notre rapport déterminant le cadrage préalable des méthodes d'évaluation des projets de loi au regard du climat. C'est ce dont je traiterai successivement.

La première partie de l'avis porte sur l'ambition affichée par le projet de loi. Il convient de rappeler que la France est en retard dans ses objectifs climatiques et d'atteinte de la neutralité carbone d'ici à 2050, et que la décennie en cours est cruciale pour réaliser les changements structurels compatibles avec ces objectifs. Pour mémoire, le premier budget carbone, couvrant la période 2015-2018, n'a pas été respecté, et la dynamique actuelle de réduction des émissions continue d'être insuffisante. Les émissions ont baissé de 1,2 % par an au cours des cinq dernières années, ce qui est vraiment peu : la diminution devrait être de 1,5 % par an sur la période du deuxième budget carbone, de 2019 à 2023. Certes, la baisse de 1,7 % des émissions constatée en 2019 est encourageante et respecte le budget carbone actuel, mais le plafond avait été relevé. Le rythme de réduction des émissions est appelé à tripler après 2024 : c'est l'objectif qu'il faut vraiment avoir en tête.

Il est indiqué dans l'étude d'impact réalisée par le Gouvernement que « ce projet de loi contribue à sécuriser l'atteinte d'entre la moitié et les deux tiers du chemin à parcourir entre les émissions en 2019 et la cible en 2030 ». En d'autres termes, les mesures proposées pourraient constituer une part importante de l'effort à engager, sans que l'atteinte des objectifs climatiques soit pour autant garantie. Ce projet de loi marque donc le début des mesures, efforts et actions nécessaires. Malheureusement, les limites de l'étude d'impact, que je détaillerai, n'ont pas permis au Haut Conseil de s'exprimer sur l'impact global attendu du texte, même si l'on peut déjà dire qu'en son état actuel, l'occasion de rattrapage qui s'offrait n'est pas entièrement saisie.

Aussi le Haut Conseil recommande-t-il que l'examen du texte par le Parlement permette de mieux inscrire les mesures retenues dans l'approche plus large de la SNBC, afin que la France rattrape le retard qu'elle a pris dans la trajectoire de réduction des émissions et respecte les prochains budgets carbone. Une attention particulière devrait être accordée au calendrier de mise en œuvre des actions pour tenir le rythme de baisse des émissions à partir de 2024 et le budget carbone adopté pour la période 2024-2028. L'inscription de ce texte dans la stratégie nationale de décarbonation est d'autant plus nécessaire que le rehaussement de l'objectif européen, tendant à diminuer les émissions de 55 % et non plus de 40 % en 2030 par rapport à 1990, pourrait impliquer un relèvement de l'effort de la France.

Le deuxième volet de l'avis porte sur la pertinence des mesures proposées. Le Haut Conseil en a évalué la portée, qui sera d'autant plus forte qu'elles ciblent les pratiques les plus émettrices, visent un périmètre d'action large et sont déployées dans un délai proche. Les dispositions du texte vont dans le bon sens, mais la portée stratégique n'est pas suffisante : la valeur ajoutée des mesures par rapport à l'existant est globalement peu lisible dans l'étude d'impact et elles ne forment pas un ensemble consolidé avec la SNBC. Il en est ainsi pour le bâtiment, que nous avons analysé en détail : l'apport du projet de loi aux orientations de la SNBC pour ce secteur est très marginal.

Dans l'ensemble, le projet de loi met l'accent sur les mesures de pilotage et de conduite de la transition bas carbone. C'est positif, et c'est d'ailleurs le point le plus fort du texte, en ce que cela devrait renforcer la cohérence entre action publique et objectifs climatiques. Nous l'avions déjà recommandé plusieurs fois, pour faciliter l'application des mesures ambitieuses dont nous avons besoin – par exemple, attribuer de nouvelles compétences aux acteurs régionaux ou rendre certains programmes, tels que la stratégie de recherche et le programme national pour l'alimentation, compatibles avec la stratégie nationale de décarbonation.

Outre les mesures de pilotage, certaines ont en elles-mêmes un potentiel direct de réduction des émissions de gaz à effet de serre, mais ce potentiel est souvent réduit. Cela peut être à cause d'un périmètre d'application restreint – par exemple, l'article 4 interdit seulement la publicité en faveur des énergies fossiles et non la publicité en faveur de l'ensemble de biens et services manifestement incompatibles avec la transition bas carbone –, à cause de délais de mise en œuvre allongés – il en est ainsi pour l'article 60 relatif à la qualité des repas proposés dans les services de restauration collective, qui doit s'appliquer en 2025 seulement – ou encore à cause des conditions d'application dont elles sont assorties.

Dans ses recommandations, sur ce deuxième volet, le Haut Conseil juge important d'intégrer l'approche stratégique de la SNBC dans les diverses mesures proposées par la Convention citoyenne pour le climat. Ainsi, pour le secteur du bâtiment, il faut définir une trajectoire d'obligation de rénovation cohérente avec la trajectoire vers la neutralité carbone contenue dans la SNBC et s'échelonnant jusqu'à 2050, avec des échelles temporelles appropriées.

Pour que les objectifs annoncés soient atteints, le Haut Conseil recommande donc que le Parlement améliore la portée des mesures du texte, y compris celles qui portent sur le pilotage et la conduite de la transition vers le bas carbone. Pour l'affichage environnemental, par exemple, il convient de préciser les critères définissant si une expérimentation s'est conclue avec un bilan favorable ou non. Ainsi, tout est clair : si le bilan est positif, il conviendra de généraliser la mesure. Enfin, après la promulgation de la loi, le Gouvernement devra s'assurer de la compatibilité des décrets d'application avec les budgets carbone de la France et les enjeux de la transition juste.

Dans sa troisième partie, l'avis traite de la qualité de l'étude d'impact. Parce qu'elle analyse une grande partie des articles du projet de loi en se référant à la SNBC, l'étude d'impact va plus loin que l'évaluation du plan de relance ou que les évaluations des précédents projets de loi. Le Haut Conseil note aussi qu'elle porte une attention particulière au secteur du transport, premier émetteur de gaz à effet de serre en France ; qu'elle inclut une évaluation de l'empreinte carbone ; qu'elle fait état des incertitudes en proposant différentes fourchettes. Ce sont autant d'évolutions positives. En revanche, cette étude ne prend pas en compte les budgets carbone de la SNBC : on se place d'emblée à l'horizon 2030, en ne disant rien de ce qui doit se passer dès maintenant. De plus, elle manque de transparence méthodologique et de synthèse, ne discute pas la plus-value stratégique des réformes proposées et n'utilise pas les indicateurs de la SNBC, qui sont pertinents, pour procéder à l'évaluation. Enfin, le texte ne prévoit pas un suivi permettant d'ajuster les dispositifs selon leur effet au fil du temps.

Le Haut Conseil recommande donc de mettre à jour l'étude d'impact une fois la loi promulguée afin de guider la préparation des décrets d'application. Il propose plusieurs pistes pour améliorer sa qualité. Pour la quantification des impacts des émissions, nous recommandons d'expliciter de manière systématique les hypothèses et les méthodes retenues ainsi que la source des données utilisées ; de préciser l'effet attendu non seulement à l'horizon 2030 mais sur les budgets carbone intermédiaires ; de discuter qualitativement l'impact, « significatif mais indirect », ou « catalyseur et accélérateur » lorsqu'une évaluation quantifiée apparaît difficile. L'étude actuelle utilise ce langage mais ne décrit pas, ou très peu, en quoi chaque article est un accélérateur et un catalyseur ni quelle sera l'ampleur de l'impact attendu.

Concernant la contribution du texte aux orientations de la SNBC, le Haut Conseil recommande de discuter la plus-value stratégique des mesures proposées par rapport à l'existant et aux tendances récentes, et de spécifier quelle est leur contribution à la SNBC pour chaque orientation sectorielle et transversale. Pour l'instant, l'étude d'impact se limite à indiquer que « cet article contribue à telle orientation de la SNBC », mais ne donne guère d'informations ni sur ce que l'on attend de cette contribution, ni sur son ampleur, ni si elle permet d'atteindre l'ensemble de cette orientation.

Dans le dernier volet de l'avis, qui porte sur le parcours du projet de loi, le Haut Conseil formule plusieurs recommandations. Il avait déjà publié un rapport en 2019, à la demande du Gouvernement, sur les méthodes d'évaluation des lois au regard du climat. Ces recommandations sont suivies pour partie, mais de gros manques demeurent, ce qui peut être rectifié au cours de la phase parlementaire. Ainsi recommandons-nous de signaler l'impact supposé des amendements quant à l'objectif de neutralité carbone. Il faudra aussi, comme je l'ai déjà dit, une fois la loi promulguée, mettre l'étude d'impact à jour : c'est très important pour guider la préparation des décrets d'application. Nous préconisons encore de prévoir dans le texte un dispositif de suivi et d'évaluation ex post, et de préciser les indicateurs de suivi et les dates d'évaluation. Nous recommandons enfin de renforcer le pilotage de la stratégie nationale vers la neutralité carbone, en prévoyant un pilotage trimestriel assorti d'un point annuel sur les progrès d'ensemble réalisés.

Je conclurai par quelques mots sur le Haut Conseil pour le climat. Vous serez d'accord avec moi, je l'espère, pour dire qu'en ses deux années d'existence il a démontré la rigueur de ses travaux, son utilité et sa capacité à s'inscrire de façon pertinente dans le débat public. On le voit avec l'avis publié hier et aussi, par exemple, avec notre rapport spécial consacré aux enseignements à tirer de la crise sanitaire et aux suites à lui donner pour atteindre nos objectifs tendant à la neutralité carbone, en faisant en sorte que le plan France relance soit le plus cohérent possible avec cet objectif.

Atteindre la neutralité carbone sera un parcours long et difficile. L'évaluation des lois au regard du climat est un enjeu récurrent qui demande de plus en plus de soutien. Le Haut Conseil pour le climat pourrait avoir un statut plus affirmé pour sceller ses missions d'évaluation de la stratégie d'ensemble du Gouvernement en matière de climat et formuler des propositions détaillées beaucoup plus en amont des discussions, afin d'enrichir véritablement les débats au lieu d'arriver à la onzième heure avec des propositions moins utiles qu'elles pourraient l'être. Cela demande bien sûr de renforcer ses moyens et son statut. Le projet de loi pourrait être le véhicule établissant le Haut Conseil pour le climat comme autorité administrative indépendante, pour pérenniser son existence, lui conférer un statut protecteur plus proche de ce qui vaut au Royaume-Uni et confirmer l'avance de la France en termes de gouvernance dans l'Union européenne. Je vous invite à réfléchir à cette suggestion en même temps qu'au contenu des articles du texte et à son évaluation ex post.

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Votre intervention, Madame, montre toute l'utilité du Haut Conseil pour le climat, instance née de la volonté du Président de la République. Vous avez évalué tout le projet de loi mais rien que le projet de loi, dont vous savez qu'il ne constitue qu'une partie des mesures déjà décidées par notre majorité et par le Gouvernement pour lutter contre le réchauffement climatique. Pour répondre aux demandes de la Convention citoyenne pour le climat, il y a eu de précédentes mesures, dont certaines, telle l'interdiction du chauffage au fioul, sont d'ordre réglementaire, mais il y a eu aussi les 30 milliards d'euros qui figurent dans le plan de relance, dont 7 milliards pour la rénovation thermique, et l'action de la France au niveau européen. Sur un plan plus général, notre majorité a voté la loi d'orientation des mobilités, la loi pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous, ou encore la loi relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire. Il faut donc prendre en considération l'action globale de la majorité depuis 2017. Confirmez-vous que le Haut Conseil pour le climat publiera en juin un avis portant sur l'ensemble des dispositifs adoptés par notre majorité ?

D'autre part, vous recommandez de raccourcir les délais d'application des mesures proposées et, parfois, d'en élargir le périmètre. Comprenez-vous que le Gouvernement prenne en compte l'acceptabilité sociale et économique de ces mesures plutôt que de faire le choix d'un « big bang » qui risquerait de provoquer un rejet profond de nos concitoyens ? Et puis, la loi ne fait pas tout : on peut faire confiance aux concitoyens, aux filières, aux entreprises, aux associations pour être quotidiennement mieux-disants – on n'empêche personne d'aller plus vite et plus loin ! Comprenez-vous les arbitrages qui ont été faits ?

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Merci beaucoup pour ce rapport très intéressant, comme le sont souvent les travaux du Haut Conseil. Comme l'a dit le rapporteur général, vous avez examiné tout le projet de loi, rien que le projet de loi : c'est déjà beaucoup, car nous manquons d'outils pour évaluer nos textes au regard de l'enjeu climatique. Par exemple, nous ne pouvons pas évaluer la rédaction telle qu'elle est issue des travaux dans l'hémicycle ; or les amendements adoptés peuvent avoir un fort impact climatique. Auriez-vous, Madame Le Quéré, des propositions à faire sur ce sujet ? Pensez-vous par exemple que le Haut Conseil pourrait jouer un rôle dans ce processus, peut-être avec un autre grand organisme d'évaluation, la Cour des comptes ?

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Merci, Madame Le Quéré, pour le travail réalisé à l'occasion de ce rapport. Vous préconisez l'instauration d´un dispositif national de compensation carbone qui soit à la hauteur des enjeux. Pourriez-vous nous donner des détails ? Existe-t-il dans d'autres pays des dispositifs dont nous pourrions nous inspirer ?

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Merci, Madame Le Quéré, pour votre présentation. Je fais miens les propos du rapporteur général sur l'ampleur globale de notre action en faveur du climat, en particulier s'agissant du logement, puisque c'est le titre dont je suis chargé : nous sommes actifs depuis de nombreuses années dans ce domaine.

Nous avons beaucoup parlé de méthode, abordons le fond. Avez-vous des recommandations précises concernant les articles 39 à 46, portant sur la rénovation des bâtiments et la diminution de la consommation d´énergie ? Je note qu'ils fixent plutôt des échéances en 2028 alors que vous insistez sur la nécessité de se projeter à l'horizon 2050 pour appréhender les grands enjeux climatiques. Qu'en pensez-vous ? Quel serait, selon vous, le rythme à donner à la politique de rénovation énergétique ?

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Madame la présidente du Haut Conseil pour le climat, vous êtes parfaitement dans votre rôle quand vous soulignez les efforts accomplis, mais aussi les marges d'amélioration du projet de loi.

Sur la question des engrais azotés, vous nous avez invités à raccourcir et à clarifier les horizons temporels. Le texte prévoit de traiter ce sujet avant tout de manière communautaire et de n'instaurer une taxe qu'à condition que la trajectoire de baisse ne soit pas respectée pendant deux années consécutives. Cette proposition équilibrée me semble être à même de favoriser l´acceptabilité d´une transition dont les conséquences sont très lourdes pour les agriculteurs. C´est important, car la moitié d´entre eux va partir à la retraite dans les cinq prochaines années, ce qui pose la question du renouvellement et de l'attractivité de ce métier. J´aimerais donc connaître vos recommandations précises pour que nous puissions parvenir à la fois à tenir nos objectifs climatiques, auxquels nous sommes extrêmement attachés, et à rendre la trajectoire acceptable pour nos agriculteurs.

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Comme mes collègues, je tiens à saluer le travail réalisé par le Haut Conseil pour le climat, qui est une des seules institutions à s'être saisie de la question du budget vert, dans son rapport d'évaluation du plan de relance. Nous utiliserons ses remarques pour essayer de faire progresser ce budget vert dans les prochaines années.

Le Haut Conseil, par nature, ne s'intéresse qu'aux enjeux climatiques de la politique du Gouvernement, en particulier au regard de la stratégie nationale bas carbone. Il faut toutefois rappeler qu´il s´agit d´enjeux globaux et qu´il peut être intéressant d´aller un peu plus loin, comme l´a fait la Convention citoyenne pour le climat qui a par exemple traité de la question des déchets, qui a un impact sur les baisses d'émissions de CO2. Le Haut Conseil n'aborde donc pas non plus le sujet de l'acceptabilité des mesures de réduction des émissions de gaz à effet de serre. C´est pourtant un sujet important, on l´a bien vu avec la taxe carbone.

J'aimerais que vous reveniez sur la critique sémantique que vous avez faite du titre même du projet de loi : vous soulignez dans votre avis que le mot « résilience » ne reflète pas le contenu du texte puisque celui-ci ne contiendrait que deux mesures d´adaptation.

Par ailleurs, quels sont les deux ou trois articles du projet de loi qui vous semblent les plus essentiels pour atteindre les objectifs de la SNBC ?

Un mot pour finir sur la compatibilité des documents de planification, question qui a elle aussi fait l'objet d'un rapport du Haut Conseil. Aujourd'hui, personne ne contrôle la compatibilité entre SNBC, programmation pluriannuelle de l´énergie (PPE), schéma régional d'aménagement, de développement durable et d'égalité des territoires (SRADDET) et plan climat-air-énergie territorial (PCAET). On se gargarise de ces documents, mais la somme de leurs mesures ne correspond pas toujours aux objectifs de la SNBC et de la PPE. Pensez-vous que le HCC pourrait se saisir de la question du contrôle de cette compatibilité, ou que ce rôle devrait revenir à une autre autorité, comme l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l´énergie (ADEME) ?

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Le groupe MoDem et Démocrates apparentés est très heureux de vous entendre ce matin, d'abord parce que vos publications, plus particulièrement les deux études récentes sur les émissions de carbone importées et sur les émissions du secteur du bâtiment, nous ont déjà permis de mesurer le chemin qu'il nous reste à parcourir pour atteindre notre objectif de neutralité carbone d'ici à 2050, et ensuite parce que votre avis sur le projet de loi qui nous occupe et les échanges de ce matin nous permettront d'aborder l´examen du texte mieux armés.

Avant d'en appeler à votre expertise, j'aurais souhaité savoir si vous avez été auditionnée, et sous quelle forme, par la Convention citoyenne pour le climat.

Concernant plus spécifiquement le projet de loi, estimez-vous, comme l'étude d´impact, qu'il sécurise la moitié des réductions d'émissions de gaz à effet de serre à réaliser d'ici 2030 ? Quel est votre avis sur les objectifs qui lui sont assignés, par rapport à la SNBC ? Enfin, pensez-vous qu'il réponde à la carence dans le pilotage de la SNBC que vous aviez identifiée dans plusieurs de vos publications ?

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Le groupe Socialistes et apparentés tient à remercier le Haut Conseil pour le climat de ce rapport, qui arrive à point nommé au début des travaux de la commission spéciale. Votre analyse est limpide : la France est en retard et ce projet de loi, au-delà de ses points positifs, comporte de trop nombreux éléments restrictifs.

J'insiste sur les mots que vous avez utilisés : ils ne sont pas anodins et doivent nous pousser à nous interroger. Selon vous, de nombreuses mesures du projet de loi au potentiel significatif de réduction des émissions de gaz à effet de serre sont amoindries par un périmètre d'application limité, des délais allongés de mise en œuvre ou encore de nombreuses conditions d'application. Vous citez à titre d'exemple la publicité, la sortie du diesel ou l'affichage environnemental.

Votre analyse démontre que le texte a besoin d´être complété, amendé et travaillé par le Parlement et j´espère que la règle de recevabilité des amendements permettra un débat ouvert afin de l'enrichir.

Par ailleurs, ne sommes-nous pas en train de manquer quelques occasions ? Je constate par exemple que les mesures de justice sociale les plus structurantes, comme l´obligation de rénovation globale des logements ou le prêt à taux zéro pour les véhicules peu émetteurs, ont été gommées du projet. Je crains qu'en l'absence de mesures fortes de justice sociale, les mêmes causes produisant les mêmes effets, l'instauration de mesures écologiques ne provoque encore une fois l'incompréhension, voire la colère de certains de nos concitoyens.

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Je salue à mon tour le travail réalisé en un temps record par le Haut Conseil. Je constate que l'avis cible certaines parties du projet de loi et qu'il n'approfondit pas par exemple les questions liées au transport. Quelle a été votre méthode pour hiérarchiser les questions à traiter, dans le temps contraint dont vous disposiez ?

Quel est votre avis sur la méthode employée par le Gouvernement, qui a commencé par donner la parole à des citoyens, et s'est inspiré de leur travail pour passer à la phase législative – bref, une méthode pour une fois bottom up plutôt que top down ? J'ai parfois le sentiment d'une pointe de jalousie de votre part.

Dernière question sur l'affichage carbone, notamment sur les produits alimentaires. Les retours de terrain semblent indiquer que certaines filières de production traditionnelles seraient défavorisées par les méthodes de calcul. Qu´en pensez-vous ?

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La position et les critiques du Haut Conseil pour le climat sont claires. Elles ne portent que sur les enjeux climatiques, pas sur les enjeux globaux : c'est bien ce qui lui est demandé. S'il y avait des hauts conseils à la pollution plastique ou à la biodiversité, ils ne manqueraient certainement pas eux non plus de critiquer la faiblesse de l'ambition du Gouvernement.

Je regrette que le rapporteur général s'attache beaucoup plus à défendre un budget qu'à présenter une vision : c'est bien une vision que devrait porter ce texte, ce n'est pas un projet de budget.

Le groupe Libertés et Territoires est très attaché à l'idée qu'une action efficace se mène à l'échelon territorial. Le HCC souligne que les territoires ne sont pas suffisamment impliqués, mobilisés, libérés, pour pouvoir agir à la hauteur des enjeux. Comment améliorer le texte en ce sens ? Qu'on le critique ou qu'on le soutienne, ce texte est celui que nous ne pouvons pas rater. Il nous faut coconstruire ensemble une loi qui aille plus loin, et notamment ajouter des articles confortant la place des territoires, qu'il s'agisse des élus locaux, des associations ou des entreprises locales, afin de prendre en compte les spécificités des territoires d'une France diverse – d'une France aux 250 fromages, comme le dirait le général de Gaulle.

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Merci, Madame Le Quéré, pour la qualité de votre rapport, d'autant qu'il faut signaler à mes collègues de la majorité que le Haut Conseil pour le climat ne compte que six permanents pour un budget de recherche de 500 000 euros par an, contre 25 permanents et 4 millions d'euros de budget pour son homologue britannique.

L'avis du Haut Conseil rejoint le constat de 110 organisations de la société civile, du CESE et du Conseil national de la transition écologique, qui soulignent tous l'insuffisance de ce projet de loi pour répondre aux objectifs climatiques. J´espère que nous pourrons pallier ces insuffisances grâce à nos amendements et je souligne que vous nous y encouragez, en écrivant que « L'examen du texte par le Parlement devrait mieux inscrire les mesures retenues dans l'approche plus large de la stratégie de décarbonation ». J'espère que cela se retrouvera dans l'examen de la recevabilité des amendements.

Je m'étonne de l'absence dans le texte d'un volet sur la forêt, alors qu'elle joue un rôle essentiel d'amortisseur du dérèglement climatique. La Convention citoyenne pour le climat avait d'ailleurs préconisé de nombreuses mesures, comme l'interdiction des coupes rases, le renforcement des effectifs de l´Office national des forêts ou encore la limitation de la récolte de bois.

Que pensez-vous de l´article 38, qui rend obligatoire pour tous les opérateurs aériens la compensation carbone des émissions des vols intérieurs métropolitains ainsi que, sur une base volontaire, des vols depuis et vers l'outre‑mer ? De l'avis de tous les scientifiques, la compensation carbone est une hérésie. Ce projet de loi risque donc de faire de la France un pays qui encouragerait l'utilisation des forêts pour la compensation carbone, alors qu´il faut laisser les arbres vieillir de plusieurs années pour qu'ils puissent stocker suffisamment de carbone.

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Je salue la qualité du travail réalisé par le Haut Conseil pour le climat, malgré les moyens limités dont il dispose. Il porte un regard scientifique très intéressant sur les questions qui nous occupent et il me semble indispensable de lui garantir un statut protecteur dans la durée.

M. François-Michel Lambert a évoqué le pilotage décentralisé de la politique de réduction des émissions. Vous avez évoqué les acteurs régionaux, pouvez-vous être plus précise ? Quelles sont vos propositions en ce sens ?

Votre approche est critique : c´est votre travail, mais, en contrepoint, avez-vous des mesures concrètes à proposer ? Je pense en particulier à la question du bâtiment : quelles sont les insuffisances du projet de loi dans ce domaine, et quelles sont vos suggestions pour rejoindre une trajectoire permettant d'approcher les objectifs fixés aux niveaux national et européen – ce qui, vu d'ici, paraît assez hasardeux ?

Votre appréciation du plan de relance n'est pas très positive. Pensez-vous qu´il faille envisager une prolongation au-delà de deux ans, et, dans ce cas, vers quels investissements et sur quelle durée ? Mais cela soulève la question des moyens budgétaires : il semble que de nombreuses actions du plan de relance soient bloquées car les premiers inscrits sont les premiers servis et que beaucoup d'autres ne pourront obtenir satisfaction.

Enfin, il me semble que vous n'avez pas évoqué la question primordiale des émissions exportées. Déplacer la production dans d'autres pays permet à la France de remplir certains de ses objectifs, mais les émissions demeurent les mêmes au niveau planétaire. Quelle est votre position sur la question ?

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Corinne le Quéré, présidente du Haut Conseil pour le climat

Merci pour ces questions très riches. Je vais apporter certaines réponses et je demanderai à M. Olivier Fontan de compléter mes propos sur la résilience et sur les régions.

Comme cela a été dit plusieurs fois, notre mandat principal est bien axé sur le respect des objectifs climatiques, mais notre évaluation ne se fait pas dans le vide et nous devons également tenir compte, lorsque nous faisons des propositions, et dans la mesure de nos capacités, de leurs impacts socio-économiques et environnementaux. Ainsi, dans notre avis sur le plan de relance, nous avons relevé que les mesures favorables au climat péchaient en termes de justice sociale, et nous avons insisté sur la nécessité de bien les accompagner afin qu'elles n'aboutissent pas à accroître les inégalités.

Vous avez aussi mentionné la question de l'acceptabilité. Nous sommes bien conscients de son importance. Un membre du Haut Conseil et un membre de l'équipe sont des experts en sciences sociales et travaillent à ce que les mesures soient les plus acceptables possible, pour pouvoir aller au plus vite.

Notre avis porte sur le projet de loi, pas sur l'ensemble des mesures qui ont été prises par le Gouvernement pour répondre au réchauffement climatique. En revanche, nous sommes en train de préparer notre rapport annuel pour le mois de juin, qui évaluera cette stratégie d'ensemble. Il faut toutefois noter que, d'après le Gouvernement lui-même dans son étude d'impact, les mesures du projet de loi devraient permettre de réduire les émissions de la moitié ou des deux tiers de ce qui est nécessaire. Des mesures supplémentaires devront donc être prises. C'est à cela que sert l'évaluation : à se rendre compte que réduire concrètement les émissions, c'est vraiment difficile, et que cet objectif doit être mis au centre de l'ensemble des politiques publiques, pas seulement des politiques climatiques comme aujourd'hui.

Certes la loi ne fait pas tout, mais ce que peuvent faire les individus ou les entreprises a une portée limitée. Un individu ne peut pas réduire son empreinte carbone de plus d'un quart, parce qu´il opère dans un cadre et des infrastructures qu´il ne contrôle pas. C'est donc bien au Gouvernement de fixer un cap et d'assurer un soutien, par le biais d'investissements, d'engagements, d'obligations, de la définition du prix du carbone, afin que l´ensemble de la société avance assez vite face au réchauffement climatique. Je rappelle que l'objectif n'est pas seulement de respecter nos budgets carbone, mais de stabiliser le climat et de stopper la croissance des impacts monstrueux du réchauffement climatique.

Nous manquons d'outils pour évaluer nos textes. Le HCC doit sans doute voir son rôle renforcé en la matière, et son statut aussi, mais il a vocation à compléter le travail du Gouvernement, non à s'y substituer. C´est la responsabilité du Gouvernement de placer sa stratégie et ses politiques dans le cadre de l'action pour le climat.

Vous aurez vous-même très vite à évaluer les amendements qui seront proposés sur ce texte. Je vous invite à regarder trois choses. D'abord, l'objet de l'amendement : concerne-t-il des pratiques ayant un effet important sur les émissions, comme le transport routier ou la rénovation des bâtiments ? Pour vous aider dans cette évaluation, nous vous proposons un tableau, qui manquait dans l´étude d´impact, en page 22 de notre rapport. Ensuite, la portée de l'amendement : peut-elle être augmentée ? Par exemple, s'agissant de l'affichage, une mesure concernant les émissions fossiles peut-elle être élargie à l'ensemble des pratiques fortement émettrices – je pense aux grosses voitures telles que les SUV ? Enfin, il faut prévoir un calendrier de mise en œuvre : si la mesure est acceptable et les expérimentations concluantes, il faut veiller à passer immédiatement à l'étape suivante.

J'en viens à la compensation carbone des transports aériens. C'est un sujet difficile. Le Haut Conseil pour le climat n'a pas encore fait de rapport d'ensemble, mais le besoin d'une stratégie beaucoup plus ambitieuse apparaît clairement. Le cadre international est faible et incompatible avec l'atteinte de la neutralité carbone. Les mesures proposées par le projet de loi ne concernent que 10 % du trafic aérien métropolitain, pas plus. Mais quant à l'utilité de la compensation carbone pour le secteur aérien et à la place à lui donner dans le présent projet de loi, je ne peux pas vous apporter d'élément aujourd'hui. Ce qui est sûr, c'est qu'il faut une stratégie d'ensemble et cohérente avec la SNBC.

Si nous avons choisi d'analyser de façon plus approfondie le logement et l'affichage environnemental, c'est parce que nous avons déjà travaillé sur ces deux secteurs. Au mois de novembre, nous avons publié sur la rénovation énergétique des logements un rapport très fourni, que je vous invite à consulter. Quant à l'affichage environnemental, il est étudié dans notre rapport sur l'empreinte carbone.

Le rythme à suivre est celui de la SNBC. Puisque vous souhaitez des recommandations plus précises, l'article 41, en plus d'interdire l'augmentation des loyers des logements loués considérés comme des passoires énergétiques, pourrait aussi prévoir des mesures en direction des propriétaires occupants, qui sont nombreux, et fixer une trajectoire pour s'étendre à d'autres classes énergétiques. L'article 42 pourrait faire de même.

Je comprends bien les problèmes d'acceptabilité que posent les mesures sur les engrais azotés, mais l'article 63 pose vraiment beaucoup de conditions. Le texte ne prévoit l'instauration de la redevance qu'après deux ans de non-respect des objectifs de réduction : il serait bon qu'elle intervienne plus tôt. Des conditions supplémentaires ne sont peut-être pas nécessaires au regard des dispositions européennes attendues.

Parmi les secteurs les plus stratégiques, outre le bâtiment, on trouve les transports. L'article 25 vise à interdire la commercialisation des véhicules neufs très émetteurs, mais avec une échéance fixée à 2030 ! C'est incroyable ! Il faut abaisser le seuil d'émissions corrélativement à la baisse attendue dans le secteur des transports. À l'article 30, l'entrée en vigueur de la diminution du remboursement de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) applicable au transport de marchandises pourrait être avancée à 2023 et se poursuivre jusqu'en 2030, en conditionnant la mesure suivant l'évolution de la fiscalité européenne.

Enfin, si les expérimentations sur la restauration végétarienne, largement traitées dans les médias, donnent de bons résultats, il faudra les mettre en application.

J'en viens à la compatibilité entre la SNBC et la PPE. Nous sommes chargés d'évaluer la première, mais il nous est difficile de bien le faire sans analyser la seconde, autrement dit l'approvisionnement en énergie. On nous pose souvent des questions sur le gaz vert, l'hydrogène et le déploiement des énergies renouvelables, auxquelles nous ne répondons qu'à moitié parce que ce n'est pas dans notre mandat. Il serait plus cohérent que nous puissions assurer une approche générale et devenir une force de proposition aussi pour la PPE.

Je note au passage que plusieurs énergies doivent commencer à être développées, comme le gaz vert et l'hydrogène. Nous avons besoin de connaître le potentiel réel, le coût et le calendrier de développement de ces énergies nouvelles, pour avoir des attentes réalistes et déterminer l'importance de leur impact sur nos objectifs.

Le Haut Conseil pour le climat n'a pas été auditionné en tant que tel par la Convention citoyenne pour le climat, mais un grand nombre de ses membres l'ont été. À ses tout débuts, nous lui avons fourni du matériel informatif, dont un rapport grand public. Certains de nos membres font partie du comité de pilotage de la CCC, et ils se sont retirés des discussions qui ont eu trait à l'avis que nous avons rendu cette semaine.

Nous ne pouvons confirmer l'estimation du Gouvernement selon laquelle le projet de loi permettrait de réaliser entre la moitié et les deux tiers de l'objectif de réduction de 40 % des émissions de gaz à effet de serre d'ici à 2030, faute d'explications dans l'étude d'impact. Nous ferons ce travail dans le calendrier réalisable pour nous : il sera rendu en juin. L'étude du Boston Consulting Group (BCG) commandée par le Gouvernement comporte certainement des éléments d'explication, mais tout n'est pas encore bien clair pour nous. Ce qui est sûr, c'est que cette étude montre que les mesures prévues comportent des risques importants. Beaucoup de travail reste à faire, et le présent projet de loi doit s'intégrer dans un plan d'ensemble.

Nous l'avons vu avec la taxe carbone, si les mesures décidées ne s'inscrivent dans une perspective de justice sociale, le rythme souhaité ne sera pas tenu. C'est pourquoi ce projet de loi doit s'intégrer dans une vision stratégique globale incluant au moins pour partie des éléments de justice sociale, vérifiés en cours de route grâce à des indicateurs. J'invite donc le Gouvernement à compléter le travail engagé en fixant des feuilles de route de décarbonation par ministère et par filière, ainsi qu'une stratégie d'ensemble et une planification, idéalement assortie d'un suivi trimestriel.

S'agissant de la Convention citoyenne pour le climat, nous n'avons pas franchement de position. Nous indiquons dans nos rapports qu'il s'agit d'une entreprise remarquable, montrant que des citoyens venus d'horizons très différents pouvaient s'emparer des enjeux climatiques et formuler des propositions capables de faire progresser la réflexion et l'action. Ses propositions doivent être valorisées – mais c'est le Gouvernement qui reste garant de l'atteinte des objectifs. Il est clair que pour les réaliser, il faudra nombre de concertations et d'échanges avec les citoyens et les parties prenantes, pas seulement la CCC. Des compromis régionaux et dans le temps devront être réalisés. Si les citoyens, les parties prenantes, les entreprises sont impliqués, les mesures seront efficaces. Mais, même avec une loi parfaite, si les responsables politiques nationaux et locaux ainsi que les citoyens ne s'en emparent pas, nous en serons toujours au même point l'année prochaine.

S'agissant de l'affichage carbone, si on le fait, il faut le faire bien. Nous avons étudié la question, et surtout le score carbone, dans le rapport sur l'empreinte carbone que nous avons publié.

J'en viens aux émissions exportées. Oui, des mesures prises sur le territoire français peuvent avoir un effet de déplacement de certaines industries. Il faut s'en préoccuper, et aussi contrôler les émissions associées à nos importations, qui sont importantes. Un grand nombre de productions françaises utilisent des matériaux non produits en France. Ce sont les entreprises qui les importent qui disposent du principal levier pour faire baisser les émissions. C'est pourquoi il faut travailler avec les filières pour influencer leur approvisionnement. Une dynamique européenne doit être impulsée, qui donne lieu à beaucoup de discussions, par exemple sur la taxe carbone aux frontières. Il faut valoriser les efforts réalisés par les filières. C'est ce que font l'affichage environnemental et le score carbone, qui permettent ainsi de pousser la dynamique vers le haut, pour se conformer à la demande des consommateurs qui privilégient toujours l'option environnementale s'ils ont le choix. Il faut donc travailler avec les filières pour leur permettre d'opérer dans un environnement qui soutienne leur compétitivité au niveau national, européen et international.

L'absence de volet forestier est un point important. Les puits de carbone sont nécessaires car certains secteurs, comme l'agriculture et le transport aérien, n'atteindront jamais le zéro émission. C'est pourquoi il faut des forêts saines, et augmenter les capacités de stockage de carbone dans les sols. Si ce n'est pas fait par ce projet de loi, il faudra le prévoir à côté.

Enfin, s'agissant du plan de relance, nous avons fait des recommandations visant à le rendre dans son ensemble cohérent avec la neutralité carbone. Son arrivée à échéance étant prévue vers la fin de 2021, il faudrait qu'il soit prolongé de dix ans – pas obligatoirement au même niveau : c'est la visibilité qui est importante. Le secteur du bâtiment, par exemple, doit multiplier par dix le nombre de rénovations de fond d'ici quelques années et maintenir le rythme dans le temps, afin que les 26 millions de bâtiments français soient entièrement décarbonés d'ici à 2050. De tels acteurs ont besoin d'un horizon à dix ans au minimum, et d'une trajectoire à long terme afin d'investir avec confiance et d'organiser la formation nécessaire.

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Olivier Fontan, directeur exécutif du Haut Conseil pour le climat

. Je commencerai par revenir sur la notion d'acceptabilité, qui a souvent été mentionnée et sur laquelle nous nous sommes penchés – une partie de notre dernier rapport annuel est notamment consacrée à la transition juste. D'abord, nous contestons l'acception et l'usage du terme même d'acceptabilité, qui est bien plus souvent invoqué pour les politiques climatiques que pour les autres. Nous lui préférons celui d'appropriation, par les acteurs, les parties prenantes, les citoyens, voire par les entreprises – et c'est un terme qui convient particulièrement bien à la Convention citoyenne pour le climat. Nous le trouvons moins infantilisant que l'acceptabilité sociale, qui tend à repousser la responsabilité en bout de chaîne, sur les usagers. Nous l'avons souligné dans notre rapport sur la 5G, où nous évoquons une responsabilité de prise de conscience et d'action sur les étapes antérieures, de la part des opérateurs en l'occurrence. Bref, nous appelons à la prudence pour l'usage du terme d'acceptabilité en matière de politique climat.

Le rôle des régions et des collectivités territoriales est un sujet très large, sur lequel nous avons commencé à nous pencher dans notre rapport de 2020. Nous y soulignions le rôle d'impulsion et de chef de file des régions en matière climatique, tout en relevant qu'elles manquaient souvent de prise opérationnelle sur les secteurs les plus directement en lien avec les politiques climatiques. Nous notions aussi que la majeure partie des dépenses d'investissement des régions, qui représentent environ 8 milliards d'euros par an, ont un effet sur le climat. L'enjeu est donc d'aligner ces dépenses sur les objectifs de la stratégie nationale bas carbone, dont les politiques régionales ne tiennent pas assez compte. Cette harmonisation est nécessaire.

Aucun organisme n'est chargé du contrôle de l'adéquation des instruments de planification de l'action locale avec la SNBC. Je ne suis pas certain que ce serait à la portée du Haut Conseil pour le climat, en tout cas dans son format actuel, car cela représente une masse considérable de documentation. De surcroît, ce contrôle s'exercerait plus judicieusement au niveau territorial, pour mieux prendre en compte la réalité des régions. Peut-être faudra-t-il songer un jour à étendre le contrôle de légalité au contrôle d'opportunité climatique. Le chantier vient de s'ouvrir, nous n'y avons pas davantage réfléchi.

Je rappelle que l'article 68 de la loi dite « énergie climat » que vous avez votée prévoit un rapport du Gouvernement sur la conformité de l'action des territoires avec la SNBC. Il est en cours d'élaboration. La balle est dans le camp du Gouvernement.

Par ailleurs, il ne faut pas compter sur les instruments régionaux pour satisfaire l'ensemble de l'ambition nationale. À l'instar de la volonté générale qui est un peu plus que la somme des volontés particulières, la somme des actions régionales ne représente pas l'intégralité de l'obligation à réaliser par la France.

Concernant la résilience, nous avons mis un bémol dans notre rapport. C'est une notion nécessaire, mais limitée, du champ de l'adaptation au changement climatique. Nous avons jugé que le projet de loi abordait très peu la question de l'adaptation et encore moins celle de la résilience, à l'exception de deux dispositions relatives au trait de côte, sujet important mais restreint du projet de loi. L'adaptation est un sujet important, que nous avons encore peu étudié mais que nous traiterons de manière approfondie dans notre prochain rapport annuel.

Je conclurai par une réponse au rapporteur général. Nous n'avons évalué que le projet de loi, nous n'avons pas inclus dans notre avis le plan de relance ni la globalité de l'action menée depuis 2017 ou avant – mais nous le faisons tous les ans dans notre rapport annuel : nous avons tendance à considérer la politique climatique au vu non seulement de l'année écoulée, mais aussi des dispositions antérieures ou des bilans à tirer des grandes lois.

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Il a été rappelé que le mandat de la Convention citoyenne sur le climat l'engageait à définir des mesures concrètes et un esprit de justice sociale. Il s'agit d'un enjeu majeur pour la France et pour l'Europe. Pour reprendre la formule du Commissaire européen à l'action pour le climat M. Frans Timmermans, à l'occasion des négociations sur le Fonds pour une transition juste, « si la transition n'est pas juste, elle n'aura pas lieu ». Cette phrase clé pourrait servir de leitmotiv à nos travaux. C'est l'enjeu du chèque alimentaire, qui doit donner accès à une alimentation de qualité et renforcer le revenu de nos agriculteurs. C'est l'enjeu du plan de relance, quand il finance les petites cantines pour développer des circuits courts de qualité. C'est l'enjeu des prochains contrats de plan État-région, qui ont été largement renforcés pour donner une puissance d'action aux territoires. Quels autres dispositifs identifiez-vous pour rendre cette transition plus juste ?

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C'est au nom du groupe Les Républicains que je remercie la présidente du Haut Conseil, dont le rapport tombe à pic pour l'examen de ce texte.

Le secteur du bâtiment illustre le décalage entre l'ambition affichée et les mesures proposées. Vous l'avez signalé, Madame la présidente, l'article 41 du texte ne concerne que les passoires thermiques. Il n'y a rien sur les autres étiquettes énergétiques, ce qui obère l'objectif d'un parc de bâtiments basse consommation en 2050. Quelle incidence cela pourrait-il avoir en termes de calendrier ?

Le rapport de notre mission d'information sur la rénovation thermique des bâtiments a pointé l'absence d'outils d'évaluation et de suivi des efforts de rénovation. Partagez-vous ce constat, et avez-vous fait des préconisations dans ce domaine ?

Enfin, la question de l'acceptabilité est un vaste sujet. J'ai entendu la remarque sémantique de M. Fontan, alors parlons de la « supportabilité » des travaux de rénovation pour les propriétaires occupants, ce qui soulève la question des aides publiques et du reste à charge. Tout un travail reste à faire sur la question du financement si l'on veut équilibrer les choses entre incitation et obligation, et rendre le dispositif « acceptable ».

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Merci au Haut Conseil pour le climat de son avis. Je regrette qu'il ne soit pas chargé de l'étude d'impact, et qu'il ne dispose pas des moyens pour le faire. Vous recommandez d'ailleurs que tous les amendements soient évalués en fonction de leur impact carbone. Pourriez-vous revenir sur les fautes méthodologiques de l'étude d'impact et particulièrement sur les doubles comptes ? Enfin, dans le cadre de votre travail sur le projet de loi, avez-vous examiné intégralement l'étude du BCG et avez-vous des commentaires à faire sur son contenu et sa méthodologie ?

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L'avis indique que les délais prévus par le texte sont incompatibles avec les rythmes attendus pour lutter contre les changements climatiques, et relève que le périmètre d'application est insuffisant pour couvrir les activités émettrices de gaz à effet de serre. Plusieurs de ces éléments font partie de la programmation pluriannuelle de l'énergie, qui donne aussi corps à la trajectoire bas carbone. Faut-il anticiper sa révision, qui est prévue dans cinq ans, afin de renforcer la trajectoire bas carbone ?

On entend aussi régulièrement parler de « compensation carbone », mais la compensation des émissions de carbone par la plantation d'arbres par exemple prend de nombreuses années avant d'être efficace. Ne serait-il pas plus juste de parler de « contribution à la réduction carbone » ? Ainsi, tout le monde serait acteur, y compris les entreprises.

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Vous avez évoqué le besoin d'élargir la trajectoire de la rénovation énergétique aux propriétaires occupants de passoires énergétiques, de la même façon que des sanctions sont prévues contre les propriétaires bailleurs. Mais bien souvent, le reste à charge des travaux à effectuer est trop important. Comment souhaitez-vous concrètement élargir les sanctions aux propriétaires occupants, s'ils n'ont pas les moyens d'effectuer les travaux ? Ne faudrait-il pas passer par l'incitation et les soutenir plutôt que les pénaliser ?

Par ailleurs, les intercommunalités rurales ou rurbaines sont encore privées d'opérations programmées d'amélioration de l'habitat : soit elles sont oubliées par l'État ou par le département délégataire des aides à la pierre, soit elles n'ont pas l'autofinancement nécessaire pour mener ces opérations. Ces dernières sont d'ailleurs limitées dans le temps et en volume, ce qui empêche les intercommunalités d'accompagner massivement les propriétaires occupants. Actuellement, les programmations s'effectuent sur une période de trois ans prorogée à cinq ans. Ne faudrait-il pas envisager une programmation sur une période plus longue, par exemple de dix ans ?

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La plupart des recommandations du HCC s'adressent finalement au Gouvernement, s'agissant notamment de la mise à jour de l'étude d'impact ou de l'évaluation. Pour ce qui est des débats parlementaires, afin d'accélérer la trajectoire, vous préconisez de préciser certains indicateurs avant 2030. Vous indiquez aussi que la baisse des émissions de gaz à effet de serre en 2020 n'est que conjoncturelle. Outre les propositions que vous avez faites sur le bâtiment, quels leviers structurels devraient figurer dans le projet loi ?

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L'article 30 prévoit de réduire les gaz à effet de serre émis par le transport de marchandises routier. Tout le monde, y compris les fédérations professionnelles, est d'accord sur ce point. Mais ce n'est pas par la recherche et développement qu'il est envisagé de trouver une façon de réduire ces émissions, seulement par une taxation supplémentaire par le biais de la TICPE, à partir de 2030, chiffrée à 1,3 milliard d'euros. Bref, si le parc routier ne change pas, les entreprises de transport routier françaises devront 1,3 milliard d'euros, alors que leurs marges sont d'environ 1 milliard. On assistera donc à une délocalisation des entreprises de transport, sans diminution des émissions de gaz à effet de serre. Ne serait-ce pas plutôt une mesure d'affichage ?

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Corinne le Quéré, présidente du Haut Conseil pour le climat

La justice sociale est essentielle : si la transition n'est pas juste, elle n'aura pas lieu. Mais c'est aussi une notion relative qui dépend des valeurs de chacun. L'an dernier, dans notre rapport annuel, nous recommandions un fort engagement auprès des régions, des acteurs, des citoyens, des entreprises, afin de favoriser l'appropriation des enjeux indispensable pour faire avancer les choses. On peut aussi agir au niveau de la mécanique de la mise en œuvre, en ciblant les actions sur les personnes qui ont le moins de capacité à payer ou n'ont pas d'option spécifique. Des indicateurs sont indispensables pour s'assurer que les mesures prises n'augmentent pas les inégalités.

Concernant le bâtiment, l'objectif est d'atteindre un parc de niveau « bâtiment basse consommation » en 2050. Comme vous, nous constatons le manque d'outils d'évaluation et de suivi. L'Observatoire national de la rénovation énergétique des bâtiments est en train de s'installer, mais ses moyens sont limités. On attend impatiemment ses premiers travaux. Notre rapport de novembre sur la rénovation des bâtiments s'appuie sur des données qui dataient de 2012 à 2016. Il est donc difficile d'évaluer les nombreuses mesures prises depuis cette date et d'en tirer des enseignements.

S'agissant des propriétaires occupants de passoires énergétiques, ce qui est clair, c'est que jusqu'à présent ils n'étaient pas soumis à des obligations et qu'il ne s'est pas passé grand-chose. L'accompagnement est bien sûr indispensable, mais il n'empêche pas la contrainte, qui est elle aussi nécessaire pour avancer. Chaque année, 60 000 à 70 000 rénovations profondes de bâtiments sont réalisées L'objectif de la stratégie nationale bas carbone est d'atteindre 350 000 rénovations par an d'ici peu, puis 700 000 en 2030. Pour passer de 70 000 à 700 000 rénovations profondes par an en dix ans, on a besoin de visibilité sur les financements, d'accompagnement, d'aides pour les propriétaires, d'une réglementation claire dans le temps, qui concerne toutes les classes énergétiques. Cela permet aux gens de voir qu'il faut y aller, et le plus rapidement possible. Cet horizon temporel ne figure pas dans le projet de loi et cela constitue un manque.

Le problème de l'étude d'impact, c'est surtout qu'elle manque de systématisation. Les articles sont traités différemment : pour certains, les méthodologies, les hypothèses et les données sont très claires alors que pour d'autres, on ignore sur quels éléments les responsables se sont appuyés. Surtout, il n'y a pas de tableau de synthèse qui permettrait de voir rapidement si la loi est au bon niveau. Concernant les doubles comptes, je vous renvoie à notre rapport, car c'est une difficulté mineure qui ne concerne que quelques articles.

Nous n'avons pas examiné l'étude du BCG, qui nous est parvenue très tard, car son rôle est différent. Elle évalue l'ensemble des mesures de politique climatique prises depuis 2017, y compris celles prévues dans le projet de loi. Nous, nous avons évalué la pertinence et l'utilité de chacun de ses articles. Oui, il y a beaucoup de mesures utiles, mais non, le texte ne saisit pas pleinement l'occasion offerte : il pourrait faire mieux en termes de calendrier ou de périmètre. En revanche, le rapport annuel du HCC sur l'évaluation des politiques d'ensemble, qui sera publié en juin, étudiera la méthodologie et les conclusions du BCG.

On nous demande si les délais devraient être accélérés : la réponse est clairement oui. Nous recommandons un pilotage trimestriel pour la SNBC, avec un bilan annuel du Gouvernement.

Concernant la compensation carbone, c'est vrai, les plantations d'arbres n'ont pas un effet immédiat, et les forêts sont vulnérables face au réchauffement climatique. Il faut donc supprimer toutes les émissions qui peuvent l'être : c'est celles qui ne le peuvent pas qu'on tente de compenser avec des puits de carbone. Il faut bien sûr avancer dans la gouvernance et la soutenabilité des puits de carbone, du stockage de carbone dans les sols et dans les forêts, mais l'essentiel de la politique de décarbonation, c'est la réduction des émissions.

Il a été question des indicateurs structurels. Par exemple, tout ce qui favorise les transports partagés ou l'électrification complète dans les transports est un bon levier de changement structurel. Ainsi, même si cela sort de l'objet du texte, les bornes de chargement concourent au passage à l'électrification, de même que les actions d'éducation et de formation, ou le lissage des compétences au niveau régional.

Enfin, quand on crée une taxe – ou qu'on supprime une subvention, comme ce sera le cas pour le transport routier – les entreprises et les individus doivent bénéficier d'une option, connaître la trajectoire de long terme, bénéficier d'un accompagnement suivi. C'est nécessaire pour aller vers le changement, de même que la contrainte l'est. Comme cela a été dit, si les entreprises se contentent de déménager, nous n'en retirerons pas de bénéfices, plutôt des dommages. Il faut donc travailler avec l'Union européenne, dont l'objectif environnemental est désormais plus fort que celui de la France. En bref, personne n'aime les obligations, mais elles donnent un signal clair ; en revanche, sans accompagnement, elles peuvent être irréalisables, voire dommageables, et il faut un soutien spécifique à chaque filière. C'est ce qui rendra possibles les changements nécessaires.

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Olivier Fontan, directeur exécutif du Haut Conseil pour le climat

Il a été largement question, à juste titre, de la transition juste. Nous y avons consacré une large partie de notre dernier rapport annuel. Cette notion fait partie des orientations de la stratégie nationale bas carbone, qui prévoit trois critères principaux : l'évaluation des impacts des changements et des politiques climatiques, le maintien du pouvoir d'achat et la préservation de la compétitivité des entreprises. Ces critères sont assortis d'une série d'indicateurs. Cela peut donner un cadre à votre réflexion.

Le rapport du BCG nous est parvenu tardivement et nous ne l'avons pas encore étudié. Néanmoins, à la lecture de ses conclusions, nos positions me semblent converger. Il est ainsi écrit que « Atteindre cet objectif est déjà en soi un défi : cela signifie que l'ensemble des mesures est parfaitement exécuté sans aucune exception […]. Cela suppose aussi de mobiliser des moyens politiques, financiers et humains inédits. Enfin, il s'agit de faire sorte que la contrainte ne soit pas exportée au-delà des frontières ». Dans ce paragraphe, j'ai l'impression de relire ce que nous avons écrit depuis un an et demi que le Haut Conseil existe.

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Je rappelle à chacun qu'une mission a été confiée à M. Olivier Sichel, directeur général délégué de la Caisse des dépôts et consignations, par les ministres M. Bruno Le Maire et Mme Emmanuelle Wargon, sur le sujet du financement de la rénovation globale. Les conclusions en sont à suivre de très près.

Merci à Mme Le Quéré et à M. Fontan pour la précision de leurs réponses.