La Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire a procédé à l'audition de Mme Anne-Marie Couderc, présidente non exécutive du groupe Air France-KLM et du conseil d'administration d'Air France, et de M. Benjamin Smith, directeur général d'Air France-KLM.
Mes chers collègues, je vous prie de bien vouloir excuser notre présidente, Mme Barbara Pompili, retenue par d'autres obligations. Nous sommes réunis pour entendre Mme Anne-Marie Couderc, présidente non exécutive du groupe Air France-KLM, et M. Benjamin Smith, administrateur et directeur général d'Air France-KLM. Je vous informe que M. Smith répondra à vos questions en anglais, mais une traduction simultanée est prévue pour tous ceux qui – comme moi – en ont besoin !
Madame, monsieur, je vous remercie d'avoir accepté notre invitation. Notre commission étant compétente en matière de transport aérien, il est en effet d'usage qu'elle entende, peu après leur prise de fonctions, les nouveaux dirigeants d'Air France, compagnie nationale à laquelle nous sommes tous très attachés.
C'est en mai dernier que M. Jean-Marc Janaillac a présenté sa démission, dans un contexte social tendu au sein de l'entreprise Air France, en raison de négociations salariales difficiles. Vous avez, madame Anne-Marie Couderc, été nommée peu après pour assurer la présidence non exécutive du groupe dans le cadre d'une gouvernance transitoire. Le 16 août, M. Benjamin Smith a rejoint le groupe Air France-KLM en tant que directeur général. Ces fonctions ont été cumulées avec celles de directeur général d'Air France jusqu'au 17 décembre 2018, date à laquelle il a été remplacé à ce poste par Mme Anne Rigail.
Monsieur Benjamin Smith, environ deux mois après votre prise de fonctions, un accord salarial a été signé en octobre par cinq syndicats représentant les trois quarts des voix aux dernières élections professionnelles. Le dialogue social semble s'être apaisé, même si subsistent des revendications, des pilotes notamment.
Ma première question portera sur la période de transition dans la gouvernance d'Air France : comment s'est-elle déroulée ? A posteriori, quelle est votre analyse sur cette période très particulière et pouvez-vous nous présenter la nouvelle gouvernance exécutive ?
Pour ce qui concerne l'avenir, plusieurs questions se posent. Tout d'abord, évidemment, celle des perspectives commerciales et de croissance d'Air France, dont dépend étroitement l'emploi : quels sont les résultats et vos prévisions pour les mois à venir ?
Nous nous interrogeons bien sûr aussi sur le climat social qui règne dans l'entreprise. Confirmez-vous qu'il s'est amélioré et de nouvelles échéances de négociations sont-elles à attendre ?
Pourriez-vous nous présenter l'état des relations entre Air France et son partenaire KLM, ainsi qu'avec les autres membres de Skyteam ? Des évolutions sont-elles à prévoir ?
Le secteur aérien est très concurrentiel. Vous semblez avoir opté pour une réorientation stratégique importante, en annonçant récemment l'absorption de Joon par la compagnie-mère Air France. Pourriez-vous nous préciser ce qui vous a guidé dans cette démarche et ce que vous en attendez ? Pourriez-vous aussi nous préciser les conséquences de cette décision sur les conditions d'emploi des salariés de Joon ?
Toujours concernant les perspectives de court et moyen termes d'Air France, quelles sont vos réactions à la privatisation prévue d'Aéroports de Paris (ADP) ? Selon vous, quelles pourraient en être les conséquences pour Air France ?
Notre commission est aussi compétente en matière d'aménagement du territoire et de développement durable, ce qui me conduit à vous poser deux dernières questions : comment considérez-vous l'avenir de la filiale régionale Hop ! ? Et pourriez-vous nous apporter des précisions sur la mise en oeuvre par Air France du mécanisme Carbon Offsetting and Reduction Scheme for International Aviation (CORSIA), programme de compensation et de réduction des émissions de CO2 de l'aviation internationale ?
Mesdames et messieurs les députés, M. Benjamin Smith et moi-même accordons beaucoup d'importance à notre présence devant votre commission et sommes à votre disposition pour répondre à vos questions. C'est d'autant plus important que la discussion sur le projet de loi relatif à la croissance et à la transformation des entreprises (PACTE) – intégrant les dispositions relatives à la privatisation d'ADP, sujet d'intérêt majeur – est en cours. En outre, les Assises du transport aérien vont bientôt rendre leurs conclusions, également fondamentales pour la compagnie.
Monsieur le président, je vais répondre à votre question sur la période transitoire puisque j'en ai été témoin et actrice pendant quelques mois et que M. Benjamin Smith ne l'a pas connue, son arrivée ayant permis d'y mettre un terme. Comme vous le savez, en mai dernier, le conflit social au sein de la compagnie a conduit au départ de M. Jean-Marc Janaillac. Air France connaissait alors des tensions sociales très fortes. C'est pourquoi le conseil d'administration m'a proposé, en tant que présidente du comité de nomination et de gouvernance, d'assumer la présidence temporaire de la compagnie, avant de procéder au recrutement du futur patron du groupe.
À l'époque, un président-directeur général était à la tête de la structure de gouvernance. Pour cette période intérimaire, le conseil a décidé de dissocier les fonctions de directeur général et de président des conseils – conseil d'administration d'Air France-KLM et d'Air France. Au sein de la direction générale, un comité collégial a été mis en place, comprenant les deux directeurs généraux des deux compagnies aériennes – Air France et KLM – et le directeur financier du groupe, qui a assuré la direction générale du groupe sous mon contrôle pendant cette période transitoire.
Ce dispositif ayant été mis en place, le comité de gouvernance et de nomination a rempli sa fonction. Le conseil d'administration d'Air France-KLM et ses actionnaires – dont l'État français – ont ensuite pris la décision ambitieuse de rechercher un professionnel du secteur aérien pour diriger le groupe, sans se restreindre au marché français, forcément plus étroit que le marché international. C'est ainsi que nous avons notamment noué contact avec M. Benjamin Smith, puis avons réussi à le convaincre de venir nous rejoindre.
Sa passion pour les compagnies aériennes, notamment Air France et KLM, a beaucoup facilité notre tâche, mais il pourra vous en parler ! Le conseil d'administration l'a nommé directeur général le 16 août – une date pourtant compliquée pour organiser un conseil d'administration ! – et a décidé de pérenniser la structure du groupe Air France-KLM testée durant la période transitoire – une gouvernance dissociant la présidence de conseil d'administration de la direction générale.
J'estime que cette structure est extrêmement intéressante car elle permet de mettre autour de la table des représentants des administrateurs, mais également des représentants d'actionnaires, en disposant d'une gouvernance assumée et en permettant au directeur général d'être lui-même plus disponible et de gérer l'opérationnel.
Nous avons également décidé de pérenniser cette structure pour Air France. Nous éprouvons une grande satisfaction d'avoir, sur proposition de M. Benjamin Smith, nommé une femme – Mme Anne Rigail – à la tête d'Air France. C'est la première fois qu'une femme dirigera la compagnie. Elle a fait toute sa carrière chez Air France ; c'est une femme très dynamique qui a assumé avec beaucoup de rigueur, de fermeté, mais aussi de bienveillance, de lourdes responsabilités et un management difficile.
En effet, c'est l'une des priorités de M. Benjamin Smith : apaiser le climat social au sein d'Air France et retrouver les voies du dialogue en rétablissant la confiance et le respect, tout en tirant le meilleur parti des compétences dont dispose la compagnie à tous les niveaux.
Au-delà de ses compétences et de son expérience, nous avons aussi recruté M. Benjamin Smith au regard de son bilan au sein d'Air Canada, où il a passé de nombreuses années : le climat social y est apaisé et les relations entre salariés et direction permettent de partager une même vision de ce que doit être l'entreprise. Cet élément est important dans un secteur particulièrement concurrentiel.
Pour conclure, cette période de transition a été très difficile pour tous et, je le souligne devant la représentation nationale, tous les acteurs du groupe et de la compagnie Air France ont été particulièrement responsables durant ce moment si particulier – il n'y a pas eu de mouvement social. Cela nous rend très optimiste pour l'avenir.
Le secteur aérien international et européen étant extrêmement concurrentiel, nous nous sommes donné les moyens de redevenir leader européen. Nous faisons confiance aux équipes de tous les départements d'Air France et de KLM, sous l'impulsion et grâce au dynamisme et à la passion de M. Benjamin Smith, pour atteindre cet objectif.
Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, je vous remercie de nous avoir donné l'opportunité d'intervenir devant votre commission. C'est un honneur et un privilège de pouvoir m'exprimer devant vous. Je vais faire ma présentation en français, et je vous remercie de me permettre de répondre ensuite en anglais aux questions de la commission.
En préalable, je tiens à remercier l'État, qui occupe une place importante au sein du conseil d'administration d'Air France-KLM, de m'avoir fait confiance pour prendre la direction opérationnelle du groupe. Notre groupe franco-néerlandais est un groupe magnifique, bâti autour de deux marques prestigieuses – Air France et KLM. Vous pouvez compter sur mon expérience et mon engagement total pour qu'Air France-KLM redevienne leader en Europe ; nous avons tous les atouts.
Le conseil d'administration m'a confié trois principales missions : trouver une solution au conflit social au sein d'Air France et nommer un directeur général, dans le cadre d'un dialogue social renouvelé et apaisé ; diriger et développer le groupe Air France-KLM au bénéfice de toutes ses marques autour de valeurs partagées avec tous les salariés du groupe – confiance, respect et transparence ; mettre en place une gouvernance qui permettra d'améliorer l'efficacité et la rentabilité du groupe et d'accélérer son potentiel de développement.
S'agissant de mon premier objectif, des étapes majeures ont été franchies depuis mon arrivée. Il s'agit d'abord de la résolution du conflit salarial qui avait donné lieu au référendum du mois de mai 2018 : le 19 octobre, nous sommes parvenus à un accord salarial pour l'ensemble des catégories de personnel. Cet accord a été approuvé par la très grande majorité des syndicats de la compagnie. Le 10 janvier, nous avons conclu un accord avec les personnels navigants commerciaux. La négociation avec les pilotes se poursuit dans une atmosphère très positive.
La nomination de Mme Anne Rigail, une femme aux compétences remarquables, nous permet de clore positivement cette première étape. Anne a tout mon soutien ; je sais que je peux compter sur elle pour développer le groupe à mes côtés.
Concernant le groupe Air France-KLM, la gouvernance doit favoriser au maximum les synergies entre les différentes compagnies. Chacune a ses atouts, qui doivent être utilisés collectivement pour lutter contre la concurrence. Je crois dans la puissance des marques : nous devons mieux valoriser celle d'Air France. Certaines marques du groupe portent des promesses qui ne sont pas bien comprises par nos clients. C'est pourquoi j'ai décidé de lancer un projet visant à l'abandon de la marque Joon et à l'intégration de ses salariés au sein d'Air France, dans des conditions qui permettent de préserver la compétitivité du groupe.
Après un été 2018 très difficile, la performance opérationnelle de Hop ! – dont le rôle au service des territoires est très important – s'améliore. Nous réduisons le nombre de types d'avions, nous optimisons la maintenance et diminuons nos coûts. Nous étudions la marque et le produit pour nous assurer qu'ils sont bien positionnés sur le marché. Là aussi, je souhaite simplifier notre offre et garantir une meilleure compréhension aux yeux de nos clients.
Le modèle d'Air France-KLM est aussi sa force : il est construit autour de marques globales puissantes et de plateformes de correspondance très bien connectées au coeur de l'Europe. Le potentiel d'attraction touristique et économique de Paris constitue un atout incontestable et Amsterdam a développé une des plateformes de correspondance les plus efficaces au monde. L'aéroport de Paris-Orly est une base idéale pour la desserte des régions françaises et pour le développement de notre compagnie à bas coûts Transavia. Cette dernière est très appréciée de nos clients, ses résultats économiques sont remarquables et nous permettent de combattre très efficacement nos concurrents sur le marché du low cost. Au sein du groupe, Transavia est aujourd'hui bien implantée aux Pays-Bas et en France.
Air France et KLM sont complémentaires et ne pourraient survivre l'une sans l'autre dans un paysage aérien en consolidation. En France, comme aux Pays-Bas, nous célébrons tous avec fierté les histoires de nos deux grandes marques et mon ambition est de les développer. Air France-KLM est le troisième groupe aérien en Europe derrière International Airlines Group (IAG) – comprenant British Airways, Iberia, Level, Vueling et Aer Lingus – et derrière Lufthansa group – comprenant Lufthansa, Austrian Airlines, Swiss, Eurowings et Brussels Airlines.
Mon objectif est que le groupe redevienne numéro un en Europe et une des compagnies les plus puissantes dans le monde. Je suis convaincu que nous pouvons réussir.
La première étape consiste à développer une vision partagée de l'avenir du groupe avec tous nos partenaires. À Air France, cela repose sur le développement d'une nouvelle culture, bâtie sur le respect mutuel et une confiance forte entre les salariés d'Air France et la direction. Une bonne relation, ainsi que le soutien et l'engagement des salariés, sont nécessaires pour réussir, car ces derniers représentent la marque Air France.
Cela repose aussi sur la négociation d'un accord équilibré pour les salariés et l'entreprise sur le long terme. Sur cette base et sur la flexibilité qu'ils nous apportent, je construis les prochaines étapes de la stratégie du groupe.
KLM et Schiphol sont des atouts. Le succès d'Air France et de KLM est une nécessité. C'est ensemble, avec un groupe soudé et performant, que nous pourrons dépasser IAG et Lufthansa.
Sur le plan économique et financier, la première partie de l'année 2018 a été difficile pour le groupe en raison des quinze journées de grève entre le 22 février et le 8 mai, qui nous ont coûté 335 millions d'euros. Le groupe Air France-KLM a réalisé un résultat d'exploitation solide sur le trimestre de l'été 2018 et un résultat cumulé de près d'un milliard trois cents millions d'euros sur les neuf premiers mois de l'année. Les résultats 2018 du groupe seront présentés le 20 février prochain.
Enfin, le niveau de marge opérationnelle d'Air France reste très décalé par rapport à celui de KLM, ainsi que celui de ses principaux concurrents, qui affichent dans leur majorité des marges supérieures à 10 %. La réduction de l'écart est prioritaire pour 2019 et les années suivantes.
En matière d'environnement économique, la concurrence va continuer de se renforcer en 2019. C'est le cas avec le long-courrier low cost, symbolisé par la compagnie Norwegian sur les vols transatlantiques. En outre, la concurrence des compagnies du Golfe ne faiblit pas – leur croissance est supérieure à 10 %. À terme, elles constituent un risque majeur pour le développement de l'économie en France et la connectivité de son territoire.
Les compagnies Ryanair, EasyJet, Vueling ou Volotea poursuivent leur développement en France. En 2019, elles vont augmenter leur offre de près de 10 % sur notre territoire, en y basant une dizaine d'avions supplémentaires. Dans le même temps, la croissance d'Air France-KLM ne sera que de quelques points. Nous perdrons donc des parts de marché.
Mais si j'interviens devant vous aujourd'hui, c'est également parce que le développement du groupe Air France-KLM, et plus particulièrement d'Air France, ne peut se faire sans un alignement total entre les autorités publiques et les différents acteurs du transport aérien. C'est exactement ce que les autres grands groupes ont fait pour réussir : avancer avec le soutien de leur gouvernement au bénéfice de l'industrie de leur pays.
93 % des salariés d'Air France sont basés en France, alors que nous générons la moitié de nos revenus hors du territoire. En 2018, Air France a recruté environ 2 800 personnes et autant de salariés en contrat à durée indéterminée (CDI) que le nombre total d'employés d'EasyJet en France. Ryanair n'emploie aucun salarié en France.
Notre compétitivité dépend étroitement de l'environnement réglementaire et des conditions économiques et sociales prévalant en France. Le groupe Air France-KLM a fait, et poursuivra, d'importants efforts d'adaptation, mais ce n'est pas suffisant et le rôle des pouvoirs publics est essentiel au succès de notre industrie en France et à l'attractivité du pays.
Dans ce contexte, je me suis félicité de l'initiative prise par le Gouvernement français d'organiser des Assises du transport aérien afin d'améliorer la compétitivité du secteur. Le marché du transport aérien va poursuivre son développement dans les prochaines années. Il s'agit d'une opportunité formidable pour l'économie et l'emploi en France. Trois types de mesures peuvent permettre aux compagnies françaises de participer enfin à cette croissance.
Tout d'abord, il faut faire diminuer le niveau des taxes et des cotisations sociales en France. Selon l'Association internationale du transport aérien – International Air Transport Association (IATA), la France est le pays d'Europe continentale où le transport aérien est le plus taxé. Il faut baisser le niveau des cotisations sociales, qui constitue un handicap majeur en termes de compétitivité, avec un écart annuel de 500 millions d'euros avec l'Allemagne et de 700 millions d'euros avec les Pays-Bas.
En outre, en France, la sûreté est entièrement à la charge des compagnies aériennes.
Enfin, le coût d'utilisation des infrastructures aéroportuaires et de navigation aérienne doit être maîtrisé et les performances doivent être améliorées. Les redevances aéroportuaires de Paris sont parmi les plus élevées d'Europe, alors que l'aéroport de Roissy figure en trente-septième place au classement Skytrax des meilleurs aéroports mondiaux en termes de qualité de service – Munich, Londres-Heathrow, Francfort et Zürich sont dans les dix premiers.
Une éventuelle privatisation d'Aéroports de Paris ne peut se faire au détriment de la compétitivité de son principal client, Air France. Elle doit également garantir des infrastructures de qualité et une capacité suffisante pour absorber la croissance sur la plateforme Roissy-Charles de Gaulle. Un projet de terminal 4 est en cours de discussion avec Aéroports de Paris.
Le cadre de régulation doit être renforcé et confié à une autorité administrative indépendante. Les recettes des commerces doivent – comme à Amsterdam et dans la plupart des pays du monde – contribuer à diminuer les redevances facturées aux compagnies aériennes.
Enfin, il faut instaurer une concurrence plus équitable avec les compagnies du Golfe qui bénéficient de subventions considérables de la part de leurs États. Il en est de même pour certains transporteurs low cost qui pratiquent du dumping social et bénéficient d'aides illégales de la part des collectivités locales. Je l'ai déjà mentionné, il s'agit d'un risque majeur pour Air France, mais également pour l'économie nationale et ses emplois. La stabilité et la performance d'Air France et de KLM en dépendent.
Les Assises devraient se clôturer dans quelques semaines. Le Gouvernement doit adopter des mesures ambitieuses qui généreront à leur tour des retombées positives tant en termes économiques, que de tourisme et d'emplois.
Je remercie et compte sur certains d'entre vous, notamment Mme Anne-Laure Cattelot et M. Jean-Baptiste Djebbari, qui ont largement contribué aux Assises en tant que responsables de thématiques, pour convaincre le Gouvernement de cette nécessité.
Je finis mon intervention sur la question essentielle de l'environnement. Air France-KLM s'est fixé pour objectif de réduire de 20 % ses émissions de CO2 par passagerkm d'ici 2020 par rapport à 2011. Nous sommes actifs dans tous les domaines et renouvelons notre flotte avec des appareils plus efficaces. Ces mesures ont permis d'économiser 20 000 tonnes de carburant en 2017, représentant environ 60 000 tonnes de CO2.
Air France-KLM est également très actif dans la recherche de carburants alternatifs durables et fait régulièrement des vols test utilisant du biocarburant. Une éventuelle décision de taxation du kérosène pour les vols domestiques porterait directement atteinte à l'objectif de restaurer la compétitivité du transport aérien français. Cela serait injustifié alors que ce dernier participe déjà au système communautaire d'échange de permis d'émissions pour ses vols européens. Il s'est par ailleurs fixé un objectif de croissance neutre en carbone à compter de 2020 dans le cadre de l'accord CORSIA signé au sein de l'Organisation de l'aviation civile internationale (OACI) en octobre 2016. Le secteur aérien est le premier secteur économique à s'être doté d'un accord mondial pour limiter ses émissions de CO2 et agir concrètement en matière de changement climatique.
Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, je vous remercie pour votre attention, ainsi que pour l'honneur et le privilège de pouvoir m'exprimer devant vous. Nous sommes naturellement à votre disposition pour répondre à toutes vos questions.
Je vous remercie pour ces interventions. Vous avez répondu à certaines de nos questions, tout en ouvrant le débat. Je donne la parole aux orateurs des groupes.
En préalable, permettez-moi de saluer la nomination d'un professionnel de l'aérien à la tête du groupe Air France-KLM. C'était notre souhait. Je remercie également madame la présidente pour la stabilité de la gouvernance, au-delà de la période transitoire de ces derniers mois. Le groupe peut ainsi aborder ses défis plus sereinement.
Vous avez très bien exposé les défis internes et externes du groupe en termes de compétitivité. Par nature, le transport aérien est très ouvert à la concurrence internationale. Vous avez déjà évoqué quelques pistes concrètes à mettre en oeuvre à l'issue des Assises du transport aérien, toujours en cours.
Concernant la gouvernance et la stratégie, pouvez-vous revenir sur le pacte social et le partage de la valeur entre les salariés et les actionnaires ? Les attentes sont fortes sur ce sujet. Pouvez-vous plus précisément nous exposer les éléments de discussion avec le syndicat des pilotes de ligne – nous savons qu'ils sont une des clefs de la stabilité de la vie sociale de l'entreprise, et donc de son développement.
Ma deuxième question portera sur Transavia. Cette compagnie peut constituer un vrai levier de conquête dans l'environnement actuel. Au regard de ses résultats 2018, comment envisagez-vous son développement ?
Ma troisième question concerne Hop ! et le trafic intérieur : quelle est votre stratégie pour les lignes d'aménagement du territoire, importantes pour nous ? Ainsi, à Limoges, deux lignes vont être redynamisées par des obligations de service public (OSP) à destination de Paris et Lyon.
Concernant la compétitivité de Roissy, vous avez très rapidement évoqué le projet de terminal 4, discuté et parfois contesté car il ne serait pas opérationnel et dégraderait l'accès aux points de contact pour le groupe Air France-KLM. Avez-vous proposé des solutions alternatives ? Si oui, quelles sont-elles ? Nous avons entendu parler d'un éventuel terminal S5 à l'est de l'aéroport, qui satisferait mieux les besoins du groupe.
Enfin, concernant le secteur low cost long courrier, vous avez évoqué l'exemple de Norwegian, dont la politique de développement est assez dynamique. Après vos annonces concernant Joon et avec la nécessaire rationalisation de la flotte des avions long-courrier du groupe, quelle est votre stratégie concernant ce secteur émergent et dynamique ?
C'est avec beaucoup de plaisir que nous participons à cette audition afin de mieux connaître vos orientations pour cette grande compagnie, chère au coeur de tous les Français. Nous savons que sa direction n'est pas un long fleuve tranquille. La fraîcheur de vos propositions permettra peut-être de retrouver une certaine sérénité.
Le 4 mai 2018, la majorité de salariés rejetait l'accord proposé par la direction et entraînait la démission de M. Jean-Marc Janaillac. Vous êtes a priori à deux doigts de trouver un accord avec les pilotes, et nous aimerions en savoir davantage sur ce point, sans vous demander pour autant des renseignements qui pourraient vous empêcher d'aboutir. Vous ne ferez rien – je crois que vous l'avez compris – sans l'adhésion de l'ensemble des salariés. Vous avez commencé à travailler dans ce sens, me semble-t-il, avec un certain nombre d'entre eux, notamment les hôtesses. Où en êtes-vous exactement avec l'ensemble du personnel ?
Vous avez réalisé un véritable virage stratégique à votre arrivée : il y a quelques années, M. Alexandre de Juniac avait annoncé qu'il allait réserver 2 milliards d'euros pour le low cost ; vous nous parlez aujourd'hui de premium, de montée en gamme et de conquête de passagers. Vous avez déclaré que la France est le leader mondial du luxe et qu'il n'y a pas de raison, dans ce cadre, qu'Air France ne puisse pas aller chercher du « mieux » et du haut de gamme. Quelle est votre stratégie pour réussir ?
Vous avez parlé d'Orly et de l'ensemble des lignes françaises. Je voudrais évoquer, pour ma part, les lignes ultramarines : quelle est votre stratégie pour la desserte, par Air France, des territoires d'outre-mer ?
S'agissant de la neutralité carbone, que vous avez annoncée pour 2020, en ce qui concerne votre croissance, quels sont vos projets d'acquisition d'appareils ? Comment ferez-vous pour avoir une flotte permettant d'atteindre votre objectif ?
Je vous souhaite à tous une belle année.
Monsieur le directeur général, pouvez-vous nous raconter vos six premiers mois en France ? Comment avez-vous trouvé ce beau pays qu'est la France, les avantages mais aussi, parfois, les complications que l'on y trouve, par rapport au monde anglo-saxon que vous connaissez bien ? Comment avez-vous réussi, en six mois, à rétablir une forme de paix dans l'entreprise ?
Plus globalement, quelle est votre vision du transport aérien ? Je crois que 80 % de la population mondiale n'a jamais pris l'avion. Le secteur aérien est-il appelé à se développer davantage alors qu'il fait partie des modes de transport les plus polluants, avec le transport maritime ? Ce dernier réalise des efforts en mettant ses bateaux aux normes de l'Organisation maritime internationale (OMI) avant 2020. Le transport aérien va-t-il continuer à se développer ou va-t-on arriver à un moment où il faudra faire avec ce que l'on a ?
En ce qui concerne les lignes aériennes françaises, on a décidé il y a un an, à peu près, qu'il y avait suffisamment d'aéroports dans l'Ouest du pays. Comment faire pour continuer à développer l'aéroport de Quimper, s'agissant du trafic métropolitain, pour avoir des avions à l'heure et pour renforcer la ligne Lorient-Roissy ? C'est une demande du Sud de la Bretagne. Enfin, même si ce n'est pas de votre ressort, pourquoi ne pas avoir à Brest un aéroport à vocation aussi internationale que celui de Nantes ?
Je souhaiterais aussi avoir votre point de vue sur le Brexit et les problèmes douaniers : cela contraint-il beaucoup la situation pour Air France ? Vos relations avec Airbus, qui fabrique les ailes de ses avions en Angleterre, constituent-elles à terme un souci pour vous ?
Après son adoption en première lecture par notre Assemblée le 9 octobre dernier, le projet de loi PACTE sera examiné en séance publique au Sénat à partir du 29 janvier. Parmi les points stratégiques de ce texte, il y a bien sûr la cession des parts de l'État au sein d'ADP. Ce sujet a suscité de vifs débats à l'Assemblée nationale, puis, la semaine dernière, au Sénat, lorsque le texte a été examiné par la commission spéciale.
Lors de votre audition par la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable du Sénat, mercredi dernier, vous avez déclaré que peu importe la privatisation, ou non, d'ADP : l'essentiel est la reconnaissance de ce qu'Air France peut apporter, à la fois à ADP, à la région et au pays. Vous avez déploré, me semble-t-il, de ne pas être suffisamment associé aux débats en cours sur la privatisation d'ADP et de voir qu'Air France-KLM n'est pas suffisamment considérée comme un acteur économique majeur dans notre pays. C'est un point qui me paraît particulièrement stratégique pour l'avenir. Je souhaiterais que vous le développiez davantage, et je vais vous y aider en vous posant quelques questions plus précises. Quel est l'état de vos relations avec ADP ? Quels échanges avez-vous avec le Gouvernement, et plus particulièrement avec le ministre de l'économie et des finances, sur la privatisation de ce groupe ? Quelles sont vos propositions et vos attentes ? Selon vous, quel serait le meilleur mode de gouvernance pour ADP ?
Je souhaiterais également évoquer la question des Assises du transport aérien, dont vous avez parlé tout à l'heure, monsieur le directeur général. Lancées officiellement par Mme Élisabeth Borne le 20 mars dernier, elles ont suscité de grandes attentes chez l'ensemble des professionnels concernés. Vous avez souligné, madame la présidente, que cela représente un enjeu majeur pour Air France-KLM. Des conclusions tardent cependant à être présentées et une partie de la presse spécialisée commence à sous-entendre que la montagne est finalement en train d'accoucher d'une souris. Pouvez-vous nous dire ce que vous pensez des Assises, quelles sont vos attentes spécifiques et quelle est votre implication dans cet exercice ?
Je vais être assez direct, comme d'habitude.
Sous l'angle climatique, l'avion est le moyen de transport le plus nuisible, alors qu'il bénéficie le plus des aides publiques, directes et indirectes : il émet entre 14 et 40 fois plus de CO2 que le train par kilomètre parcouru et par personne transportée. Le carburant utilisé pour les vols intérieurs français est totalement exonéré de taxe intérieure sur la consommation de produits énergétiques (TICPE), mais aussi de taxe sur la valeur ajoutée (TVA). Le kérosène est ainsi le seul carburant d'origine fossile dont la consommation ne fait l'objet d'aucune taxe. L'argent public serait mieux investi s'il allait non pas au financement du secteur de l'aviation, mais à des modes de transport plus compatibles avec la lutte contre le changement climatique et au désenclavement ferroviaire de certaines régions françaises.
Les 335 millions d'euros d'exonération de TICPE pour les vols intérieurs vous paraissent-ils justifiés, alors que le train ne bénéficie pas d'une telle exonération ? Voilà un paradoxe auquel il serait temps de mettre fin. Certains pays taxent déjà les vols intérieurs, comme l'Allemagne, la Suède, la Suisse, les Pays-Bas, les États-Unis, le Brésil et le Japon. C'est au tour de la France de mettre ses objectifs de limitation des émissions de CO2 en cohérence avec sa politique fiscale.
La taxation des billets pourrait, par ailleurs, offrir une alternative pour étendre notre fiscalité aux lignes aériennes internationales sans contrevenir au droit européen, qui restreint la possibilité de taxer les consommations de carburant dans ce domaine.
Il est également important que l'allocation gratuite de quotas de CO2 au secteur de l'aviation prenne fin : elle n'est aucunement justifiée car ce secteur n'est pas, par définition, soumis au risque de « fuite » de carbone.
Enfin, on doit souligner que l'avion est utilisé par des personnes qui disposent de davantage de moyens pour prendre des vacances et voyager d'un bout à l'autre de la planète. Les aides publiques bénéficient donc à des ménages qui en ont moins besoin que d'autres. Dans un souci de fixation des priorités pour l'argent public, une réorientation me paraît indispensable. Au lieu d'accorder des aides à des catégories de ménages qui n'en ont pas besoin, comme le Gouvernement semble en avoir pris l'habitude, il serait plus judicieux d'utiliser des recettes supplémentaires pour financer le développement d'alternatives de mobilité durables et accessibles à toutes et tous. La majorité y est sourde, mais c'est bien ce que réclament les citoyens dans la rue depuis des semaines. Il n'est plus défendable de prolonger l'inégalité de traitement qui avantage le secteur aérien par rapport au transport ferroviaire – il est, lui, soumis à des taxes pour sa consommation énergétique et il se trouve en concurrence avec l'avion sur certaines liaisons en France.
Ce ne sont donc pas vraiment des questions que j'ai à vous poser : j'ai plutôt pour envie et pour ambition de mettre en exergue la dissonance cognitive de nos dirigeants, qui se gargarisent de la lutte contre le changement climatique mais continuent à soutenir béatement le transport aérien.
Je voudrais vous remercier, monsieur le directeur général, d'avoir accepté de réduire votre rémunération. C'était un grand sujet de controverse lorsque vous êtes arrivé à la tête d'Air France-KLM. Votre rémunération s'élevait alors à 3,3 millions d'euros par an, soit trois fois plus que celle de votre prédécesseur, M. Jean-Marc Janaillac, alors que le groupe peinait à atteindre l'équilibre financier. Vous avez annoncé que vous investiriez la moitié de votre rémunération fixe dans le capital de la société, et je voudrais vraiment vous remercier pour ce geste qui a permis d'apaiser la situation. Je tiens également à souligner l'accord salarial et l'abandon de Joon, qui ont permis de revenir à un climat beaucoup plus serein pour le fonctionnement de l'entreprise que vous dirigez.
Malgré tout, n'est-ce pas un peu l'arbre qui cache la forêt ? Comment êtes-vous parvenu à cet accord salarial ? Est-ce tout simplement parce que vous avez concédé des augmentations de salaires, alors que ces derniers sont déjà relativement choquants, notamment en ce qui concerne le personnel navigant ? Les salaires avaient précédemment augmenté de 4 %, si mes souvenirs sont bons. N'était-ce pas la voie la plus facile à suivre ? J'aimerais que vous nous éclairiez sur les conditions de la négociation et sur ce qui a subitement permis à tout le monde d'accepter un accord alors que tout était si compliqué.
Je souhaite aussi évoquer la compétitivité, la productivité et la situation particulière d'Air France-KLM dans notre pays. Il est vrai que le secteur aérien français finance seul, a contrario de ce qui se passe dans d'autres pays, ses coûts et ses investissements, qui sont relativement importants. Nous sommes également d'accord sur le fait que la concurrence est particulièrement forte. Cela dit, pouvez-vous nous dire clairement quel est l'écart de rémunération, par heure travaillée, entre le personnel navigant français et celui de vos concurrents ? Si vous ne pouvez pas le dire maintenant d'une manière très précise, vous pourrez nous transmettre des chiffres. On voit bien que la concurrence est compliquée, notamment avec les compagnies du Golfe, mais on ne comprend pas que ce soit le cas avec les autres compagnies européennes.
Enfin, comment voyez-vous la future privatisation d'ADP ? Nous avons soutenu le principe d'une caisse unique et l'idée qu'il faut redonner tout son rôle à l'autorité de supervision indépendante. Nous avons notamment souhaité assortir la privatisation d'ADP d'un mécanisme de garantie : nous proposons de geler les tarifs et les redevances pendant une période de dix ans. J'ajoute que l'autorité de supervision indépendante a rejeté la proposition d'augmentation présentée par ADP. Sur ces sujets, pourriez-vous nous éclairer et nous dire quelles sont vos relations avec le Gouvernement ?
(Interprétation de l'anglais). Les négociations se déroulent très bien avec les pilotes, qui constituent le facteur le plus important pour nos opérations. Ils ont passé une grande partie de leur carrière à investir du temps et de l'argent pour arriver là où ils sont, et ils réalisent un travail extrêmement technique. L'ensemble des négociations repose sur quelques principes très simples : il faut réaliser beaucoup d'efforts en vue de gagner la confiance et le respect, dans une pleine transparence mais aussi un environnement de confidentialité. C'est ainsi que nous avons lancé l'ensemble des négociations, avec toutes nos équipes : cela constitue une très bonne base pour avoir d'excellentes discussions avec tous, en particulier au sein d'Air France. Je pense que c'est un aspect essentiel du succès que nous avons rencontré. Je suis également heureux de dire que les équipes d'Air France sont extrêmement professionnelles. Elles sont très fières de leur entreprise et elles ont beaucoup d'expérience. Elles veulent qu'Air France soit gagnante et qu'elle puisse représenter au mieux l'image de la France.
Je vais essayer de répondre en même temps à plusieurs questions, car elles présentaient des points communs.
J'espère que le travail réalisé au cours des dernières semaines avec les pilotes d'Air France conduira demain à un vote positif du Syndicat national des pilotes de ligne (SNPL). Si c'est le cas, nous saurons dans quelques semaines, après un référendum chez les pilotes, si nous avons un nouvel accord avec eux. Le cas échéant, nous aurons conclu les principales négociations qui devaient être conduites avant de commencer à travailler sur la future stratégie du groupe. Pourquoi procédons-nous dans cet ordre ? Il est très important d'avoir un dialogue social positif et de bonnes relations de travail avec l'ensemble des équipes, afin de nous assurer qu'elles participent à l'avenir d'Air France et à ce qui sera notre stratégie. Dans l'environnement qui est le nôtre, c'est le seul moyen de réussir à développer ensemble notre stratégie future.
Il y a eu dans la presse quelques articles sur la place du luxe et du haut de gamme dans la stratégie d'Air France. Vous savez que c'est un domaine dans lequel la France et Air France excellent, mais aussi que c'est un segment très réduit au sein du transport aérien. Une partie de la flexibilité que nous avons pu obtenir dans le cadre des négociations qui viennent d'avoir lieu, et que nous espérons obtenir également avec les pilotes, devrait nous permettre de participer d'une manière beaucoup plus efficace à ce secteur.
En ce qui concerne la majeure partie du marché, à laquelle Air France participe déjà de façon importante, vous avez notamment demandé quels sont nos projets pour le long courrier low-cost. C'est un segment qui est encore relativement nouveau et qui doit faire ses preuves. Nous examinons la situation très attentivement, afin de voir si nous souhaitons participer à ce secteur du marché. Si nous choisissons de le faire, ce ne sera qu'avec l'accord de l'ensemble du personnel.
S'agissant du court-courrier et du moyen-courrier low cost, nous avons déjà une marque fantastique, Transavia, que j'ai présentée tout à l'heure. Transavia réussit très bien, en France comme aux Pays-Bas. Nous sommes aujourd'hui limités à 40 avions en France, et nous n'en sommes pas encore là, ce qui signifie que nous avons encore de la marge pour nous développer. Une fois que les relations avec les pilotes d'Air France se seront améliorées, grâce à une plus grande confiance et à davantage de respect, nous espérons que nous pourrons développer Transavia d'une manière significative.
Il existe de nombreux segments au sein du marché, je l'ai dit. Air France est déjà très bien positionnée sur beaucoup d'entre eux. Grâce aux nouveaux accords que nous espérons mettre en place, celui avec les pilotes, mais aussi ceux que nous avons déjà conclus avec le personnel navigant commercial (PNC) et avec le personnel au sol, je pense que nous aurons la flexibilité nécessaire pour participer plus largement au marché. Je le répète : nous allons construire notre plan pour l'avenir avec l'ensemble des parties prenantes.
J'ai déjà parlé de Hop ! tout à l'heure. Nous considérons que le marché intérieur français est extrêmement important pour Air France. Nous avons une longue histoire sur ce marché, dans le cadre d'Air France mais aussi d'Air Inter. Hop !, fusion récente de trois compagnies aériennes, continue à rencontrer des défis sur le plan opérationnel. Beaucoup d'efforts ont été engagés pour améliorer les opérations de Hop !, qui ne sont pas au niveau nécessaire. Je consacre beaucoup d'attention à ce sujet, comme le font aussi mes équipes. Je m'attends à ce que les performances s'améliorent, et j'espère que nous pourrons conserver l'ensemble des liaisons que nous desservons avec Hop !. C'est notre souhait, mais aucun d'entre vous ne sera surpris si je dis que nous rencontrons des défis en termes de rentabilité sur certaines lignes. Nous sommes une entreprise, et nous devons trouver un moyen de rendre ces lignes rentables afin d'assurer leur viabilité.
En ce qui concerne Roissy-Charles de Gaulle, quels sont les enjeux essentiels pour Air France à court terme ? Vous savez tous que nous avons un problème important au niveau des accès routiers et autoroutiers au terminal 2, qui sont très limités. Il y a parfois des bouchons de 30 minutes, ce qui est évidemment très gênant pour nos clients. Nous aimerions que davantage d'efforts soient faits pour résoudre cette difficulté à court terme. Ceux qui prennent des vols internationaux savent aussi que le temps d'attente aux contrôles aux frontières, lorsque l'on arrive à Paris, est inacceptable. Les ressources humaines sont insuffisantes pour gérer les flux de passagers entrants, ce qui nuit à Air France, mais aussi à Paris et à la France. Dans l'intérêt de tous, nous aimerions que davantage de ressources soient déployées dans ce domaine.
Nos relations avec ADP sont bonnes. J'ai rencontré ses dirigeants à plusieurs reprises depuis mon arrivée. ADP, et en particulier Roissy-Charles-de-Gaulle, est un élément extrêmement important pour nos opérations. Quand on dirige une compagnie aérienne et que l'on a un « hub » majeur, la plateforme aéroportuaire et les relations avec ceux qui la dirigent sont des aspects fondamentaux. Il faut que nous puissions mener nos opérations d'une manière compétitive, au bon coût et avec le bon niveau d'efficacité.
Nous sommes absolument favorables à l'augmentation des capacités de Roissy. Nous comprenons qu'une grande étude environnementale soit nécessaire dans ce cadre : c'est évidemment important. Mais nous aimerions nous assurer que toutes les options permettant d'augmenter les capacités de Roissy restent ouvertes durant cette phase. Il y a deux options principales à l'heure actuelle : construire un grand terminal T4, mais aussi, et c'est une option qui est également intéressante à nos yeux, étendre les terminaux 2E et 2F – outre les satellites S3 et S4, on pourrait envisager de construire un satellite S5. Cette dernière option aurait un impact très limité pour nous durant la période de transition. Ce que nous avons vu, jusqu'à présent, des projets concernant le terminal 4 aurait, en revanche, un impact important pour nous pendant la phase de transition. Nous travaillons étroitement avec ADP pour trouver une solution à laquelle nous pourrions apporter notre soutien.
Outre la configuration du terminal, les coûts opérationnels sont une question majeure pour nous. Il y a de très grands « hubs » compétitifs en Europe. Notre partenaire KLM opère, à Amsterdam, depuis l'un des aéroports les plus efficaces au monde, et il existe aussi une forte compétition avec les aéroports de Munich, de Zurich, de Londres-Heathrow, de Copenhague et de Madrid. Il est extrêmement important de réussir le nouveau terminal qui doit être construit à Paris pour répondre aux besoins du trafic aérien depuis et vers la France au cours des prochaines décennies. Il y a des aéroports et des villes qui ont répondu à ce défi avec beaucoup d'efficacité, ce qui a contribué au développement des services aériens – et c'est très bon pour le tourisme et pour les affaires. Nous devons également saisir cette opportunité à Paris. Il nous incombe, à tous, de veiller à ce que le projet dont nous parlons soit réalisé au mieux.
Que cherchons-nous à réaliser dans le cadre des négociations et des nouveaux contrats que j'ai évoqués ? Nous voulons nous assurer que nous avons la flexibilité dont l'entreprise et ses employés ont besoin afin de participer à tous les segments du marché où nous sentons que nous pourrons réussir et être rentables, notamment la première, la business class, la premium economy, la classe économique et le low cost – je crois, en revanche, qu'il n'est pas réaliste d'envisager que nous participions au segment de l'ultra low cost. Il y a les court-courriers, les moyen-courriers, les long-courriers, les dessertes régionales et la question de savoir si nous cherchons à investir dans d'autres compagnies, en dehors d'Air France-KLM et de notre participation dans Virgin : il existe beaucoup d'opportunités. Nous devons nous assurer que nous avons des accords qui nous donnent la flexibilité nécessaire pour saisir ces opportunités sans que cela nuise à nos salariés.
Vous m'avez demandé comment nous sommes parvenus à conclure avec succès certaines négociations. Nous l'avons fait d'une manière qui ne met pas en danger l'avenir financier d'Air France, bien entendu : cette compagnie doit être compétitive et elle doit se développer d'une façon soutenable. Toutes les négociations sont conduites de manière à bénéficier à tous nos employés mais aussi à permettre à Air France de se développer et de réaliser des profits. Je le redis : ces négociations reposent sur l'idée qu'il faut gagner la confiance et le respect, dans un contexte de transparence mais aussi de confidentialité, et cela a bien fonctionné. Vous avez remarqué, je l'espère, que la presse parle beaucoup moins d'Air France que par le passé. C'est le fruit d'un effort conscient et délibéré de la part de toutes nos équipes. Cela nous a aidés à avoir de bonnes discussions, sans interférences extérieures.
Vous m'avez demandé de décrire mes six premiers mois en France, alors que je viens d'un environnement anglo-saxon – en réalité, cela ne fait que quatre mois que je suis arrivé. La France est un pays formidable : je n'ai aucun problème à le dire, et c'est bien de l'entendre dans la bouche de quelqu'un qui vient de l'extérieur. La France est un pays extraordinaire. La qualité de vie y est fantastique. Vous pouvez compter sur moi pour faire de la publicité pour la France, et je le ferai sans demander de rémunération. (Sourires). J'ai notamment été très impressionné, je le redis, car c'est une force, par la fierté des équipes d'Air France.
Dans le passé, j'ai travaillé pour une société dont les collaborateurs étaient très fiers, et j'ai eu l'occasion de collaborer avec des dizaines de compagnies aériennes dans le monde entier. Je puis donc le dire : la fierté des salariés d'Air France est vraiment quelque chose de formidable. Nous avons une nouvelle campagne, au sein de la compagnie, qui s'intitule : « J'aime Air France. I love Air France ». Le taux de participation est extraordinaire, car cela correspond à ce que ressentent les salariés. C'est une force extraordinaire dans un secteur où l'objectif est de fournir des services à des clients. Les choses sont très claires lorsqu'il y a une telle cohérence entre les dirigeants et le personnel. Air France a toutes les clés pour réussir ; c'est ce qui m'a poussé à saisir l'occasion qui m'était offerte de la diriger. J'étais persuadé que le succès était possible, en France, en renforçant la compagnie. Je suis donc optimiste quant au fait que, lors de notre prochaine rencontre, j'aurai des résultats substantiels et solides à vous présenter. Je suis vraiment très optimiste quant à l'avenir, et j'espère que je pourrai vous faire partager cet optimisme au fur et à mesure des semaines.
Le Brexit n'aura pas d'impact matériel sur les activités du groupe Air France-KLM. Il y a, bien sûr, un impact potentiel sur les lignes entrant et sortant du Royaume-Uni. Nous avons un partenariat important avec Delta et nous détenons une part du capital de Virgin Atlantic mais, je le répète, en ce qui concerne Air France-KLM, nous ne prévoyons pas d'impact matériel.
J'ai déjà un peu parlé de Paris Aéroport et de la compétitivité de cette société. L'essentiel, pour Air France, est d'avoir de la visibilité quant à la gouvernance future. Ma collègue et moi-même l'avons déjà dit devant le Sénat : pour nous, que la société soit privatisée ou non importe peu tant que l'impact de la situation sur Air France n'est pas négatif. Roissy-Charles-de-Gaulle, et même Orly, sont vitaux pour notre succès, sur le plan financier comme en termes de développement économique. Nous devons avoir de la visibilité quant au coût des prestations et à la capacité offerte par Roissy. Il est impossible d'investir dans un avion qui coûte 150 millions d'euros – voire davantage – et que nous conserverons dans notre flotte pendant quinze ou vingt ans sans savoir quels seront les frais d'exploitation à Roissy. Il serait totalement irresponsable de ma part de recommander à notre conseil d'administration de réaliser de tels investissements s'il n'y a pas de visibilité quant aux frais d'exploitation à Roissy.
En ce qui concerne la question importante du climat et de l'impact du transport aérien, et celle de la fiscalité pesant sur le transport aérien, en comparaison avec le ferroviaire ou les autres modes de transport, nous avons à l'évidence, en tant que compagnie aérienne, des responsabilités ; nous les prenons au sérieux et nous faisons vraiment tout ce qui est en notre pouvoir pour réduire l'empreinte carbone de nos activités. Nous avons commandé un grand nombre d'Airbus A350 et de Boeing 787, qui sont les avions les plus sobres sur le marché en termes de consommation de carburant. Par la suite, à moyen terme, le renouvellement de notre flotte de moyens courriers – composée de 110 appareils – est envisagé. Cela aussi nous permettra de réduire notre empreinte carbone.
Vous m'avez demandé comment j'envisage la responsabilité de notre compagnie et comment nous pouvons concilier les intérêts des différentes parties prenantes. L'activité d'un grand nombre de villes que nous desservons se trouverait affectée si nous mettions un terme à nos activités : cela aurait un impact sur l'activité économique et le tourisme. Par ailleurs, un grand nombre de passagers préfèrent l'avion pour certains trajets. La conséquence de notre activité sur l'environnement est une de nos préoccupations, et elle est partagée par nos partenaires comme par nos concurrents, mais notre secteur est ce qu'il est. Pour tous les moyens de transport, la meilleure manière de réduire drastiquement les émissions est de mettre un terme à l'activité. Ce n'est bien sûr pas ce que nous ferons. Néanmoins, nous prenons la question très au sérieux ; nous souhaitons une démarche équilibrée, prenant en compte tous les acteurs concernés par nos activités. Nous aimons à dire qu'Air France-KLM est à la pointe dans le domaine, et nous entendons y rester.
S'agissant de Joon, la compagnie avait été créée, comme vous le savez, il y a à peine plus d'un an. Le projet d'entreprise était intéressant. L'objectif était de pallier l'incapacité d'Air France à assurer un certain nombre de trajets moyens courriers et longs courriers. Malheureusement, la manière dont la compagnie a été lancée a brisé la confiance entre la direction et les personnels navigants commerciaux (PNC), mais aussi entre Air France et nombre de ses clients. Cela a rendu quasiment impossible le succès de l'entreprise. Nous avons donc pris une décision, car nous devions éviter que cette filiale compromette la réussite future d'Air France. Cet épisode va-t-il accroître les coûts pour Air France ? À moyen et long termes, absolument pas. Nous avons pu revoir nos accords avec les PNC en introduisant une flexibilité importante, et nous avons beaucoup travaillé au rétablissement de la confiance, qui était nécessaire si nous voulions aller de l'avant. Nous avons introduit de la flexibilité et étudié les différentes parties du marché. À court et moyen termes, les économies que nous entendions réaliser grâce à Joon seront obtenues par d'autres moyens au sein d'Air France.
Vous m'avez interrogé au sujet de la compétitivité d'Air France au regard de la rémunération des pilotes. Avec l'accord que nous avons conclu, qui concerne aussi bien les rémunérations des pilotes que leurs avantages, Air France est très compétitive. Là où nous ne le sommes pas, c'est en ce qui concerne les taxes payées sur ces rémunérations, sans oublier les taxes supplémentaires auxquelles Air France est soumise. C'est un désavantage considérable. Si je prends l'exemple de la liaison avec Dubaï – mon itinéraire préféré – opérée par un Boeing 777, le coût du Paris-Dubaï pour Air France est significativement supérieur à celui du Dubaï-Paris pour Emirates. Par conséquent, le prix du billet pour le client n'est pas le même : si nous voulons faire des bénéfices, nous devons lui faire payer davantage. Le principal risque pour Air France tient au fait que, dans la compétition avec les autres compagnies aériennes, nous ne soyons pas à égalité en raison des charges et de la fiscalité. Pour renforcer Air France et embaucher plus en France, pour développer le tourisme et rendre le pays plus attractif pour les investissements étrangers, il est impératif que toutes les parties prenantes – le Gouvernement, les aéroports et les compagnies – y mettent du leur pour trouver des solutions positives. Il en est bien sûr question dans le cadre des Assises du transport aérien, mais Air France, par ma voix et celle de Mme Anne-Marie Couderc, aimerait avoir encore davantage d'occasions d'en discuter car, je le répète, le niveau de la fiscalité est vraiment le principal risque pour notre avenir.
Merci pour ces réponses détaillées.
Douze orateurs sont inscrits, chacun pour une minute. Nous allons donc procéder à deux salves de six questions.
Nice est la deuxième plateforme aéroportuaire de France après Paris. Entre 2008 et 2018, nous sommes passés de 8 millions à 14 millions de passagers, et nous en espérons 18 millions en 2021. La construction d'un troisième terminal est en cours, de même que l'extension du terminal 1. Pourtant, l'activité d'Air France sur la plateforme de Nice est stable. Elle ferme même ses liaisons transversales, lesquelles sont reprises de façon systématique par Easyjet, Volotea et Vueling. Quelle est donc votre stratégie ? Pourquoi Transavia ne pourrait-elle pas assurer les liaisons transversales, voire les vols à destination de Paris ? Par ailleurs, Air France envoie vers New York l'équivalent d'un A330 par jour et, vers la Chine, l'équivalent de trois A330 par semaine au départ de Nice, mais aucun vol n'est direct. Ma question est donc la suivante : à quand l'ouverture, au départ de Nice, de vols directs vers New York et vers la Chine ?
Monsieur le directeur général, vous avez indiqué tout à l'heure que le seul moyen de réussir était de développer une stratégie réunissant toutes les parties prenantes. Vous avez même utilisé les mots « collectif » et « participatif », qui sont importants pour la mise en place d'un dialogue social. Vous avez d'ores et déjà prouvé que vous étiez capable de recréer un début de confiance avec les salariés d'Air France et de nouer le dialogue avec les partenaires sociaux, ce que mes collègues ont salué tout à l'heure. Ces négociations salariales sont un préalable au lancement de votre nouvelle stratégie pour notre compagnie nationale, son recentrage et sa montée en gamme. Cette stratégie implique nécessairement une redéfinition des objectifs et une nouvelle organisation au sein de la compagnie. Le dialogue que vous menez vous semble-t-il être en bonne voie afin d'appliquer cette stratégie ? Vous avez également évoqué quelques pistes s'agissant des Assises du transport aérien, notamment le travail sur les infrastructures. D'une façon générale, comment les autres acteurs du transport aérien peuvent-ils contribuer à la réussite d'Air France ?
Monsieur le directeur général, je voudrais vous dire d'abord que nous, parlementaires, sommes nous aussi très attachés à la compagnie Air France, et que nous faisons sa promotion sans être rémunérés. Nous sommes très attachés au pavillon français. Je voudrais également vous souhaiter, à vous-même, aux directeurs qui vous accompagnent aujourd'hui, à vos équipes – et bien sûr à vous aussi, madame la présidente –, beaucoup de succès dans l'accomplissement de votre mission.
J'aimerais que vous précisiez votre stratégie concernant le low-cost, notamment pour les longs courriers : je ne l'ai pas tout à fait comprise. Par ailleurs, la compagnie Air France, vous le savez, a malheureusement beaucoup fait la une, avec des éléments très négatifs dont je ne ferai pas la liste : vous les connaissez aussi bien que moi. Vous dites qu'il faut un rassemblement autour de valeurs partagées. Si vous voulez réussir, monsieur le directeur général, vous allez devoir faire de la pédagogie en interne, car Air France n'est pas toute seule sur la planète : elle exerce son activité dans un secteur concurrentiel. Quels pourraient être les axes de cette pédagogie ?
Je voudrais revenir sur un point qui a déjà été évoqué concernant la compétitivité de votre entreprise : la question du kérosène et donc de la pollution. Vous ne m'avez pas convaincu. Alors que les avantages fiscaux et la lutte contre la pollution font débat dans l'opinion publique, mais également entre les élus, je voudrais que vous affiniez votre argumentaire.
Par ailleurs, je suis secrétaire général parlementaire de l'Assemblée parlementaire de la francophonie. Je sais que l'anglais n'est plus une langue étrangère, je vous remercie d'avoir su vous exprimer en français dans la première partie de votre propos et je vais vous laisser un peu de temps pour vous perfectionner en français, de manière à ce que vous puissiez nous fournir aussi les explications techniques dans notre langue. Au-delà de cette boutade, j'aurais pu faire comme M. Jacques Chirac, qui avait un jour quitté la salle en entendant le dirigeant d'une entreprise française s'exprimer en anglais… Je voudrais savoir quelle est la stratégie pour développer l'usage du français dans votre entreprise, mais aussi promouvoir la francophonie dans tous les comptoirs des pays francophones et francophiles.
Ma question s'inscrit dans la continuité de celle de M. Jacques Krabal. Comme vous le savez, les questions de justice fiscale et de transition écologique sont très prégnantes en France, et vous n'avez pas manqué de constater qu'en ce moment les gilets jaunes ne se promènent pas uniquement sur les pistes des aéroports pour apporter du carburant…
La taxation du carburant, justement, pose question, mais je voudrais vous interroger plus précisément sur les carburants alternatifs, notamment les biocarburants, puisque vous avez évoqué une action volontariste en la matière. J'aurais donc voulu en savoir un peu plus sur votre stratégie dans ce domaine.
Vous n'êtes pas sans savoir que notre pays est en train de débattre très largement sur de nombreux sujets, et il est vrai que, parmi ces sujets, revient souvent celui de la taxation du kérosène, même si on peut penser que la décision de le taxer nous rendrait moins compétitifs que nos voisins européens. Notre majorité a fait voter, il n'y a pas très longtemps, l'arrêt de la recherche et de l'exploitation des hydrocarbures en France. Cela ne résout pas tout le problème, mais nous voulions montrer l'exemple. Pourquoi ne pas le faire aussi s'agissant de la taxation du kérosène ? Si vous ne partagez pas cet avis, pensez-vous qu'il faille plutôt défendre la taxation au niveau européen, voire, à travers la Conférence des parties (COP), au niveau mondial ?
(Interprétation de l'anglais.) Effectivement, monsieur Loïc Dombreval, le développement de Nice – comme de toute la Côte d'Azur – est vraiment impressionnant. C'est une partie très importante de notre réseau. Comme vous le savez, la concurrence est très vive à Nice ; elle est probablement sans égale dans la région. Nous cherchons tous des stratégies pour mieux desservir la plateforme de Nice. La desserte par Air France et par Transavia est actuellement limitée, et nous réduisons les opérations de Hop !. Cela ne veut pas dire, bien entendu, que Nice ne nous intéresse pas ; simplement, notre modèle ne nous permet pas d'opérer de façon rentable à partir de cette plateforme. Il existe des possibilités d'atteindre l'Amérique du Nord, notamment grâce à la compagnie Delta, avec laquelle nous sommes liés par un joint-venture transatlantique. Nous participons donc aux vols transatlantiques au départ de Nice, mais d'une autre manière.
L'Asie, et particulièrement la Chine, sont des itinéraires très difficiles, notamment en raison de l'importance des compagnies du Golfe. C'est encore plus vrai au départ d'autres villes que Paris. Nous devons être assurés de notre succès au départ de la principale ville de France avant de prendre le risque d'affréter des vols vers la Chine à partir d'autres villes. Au demeurant, il est quasiment impossible d'obtenir des créneaux de décollage ou d'atterrissage dans les grands aéroports chinois – Pékin, Shanghai ou encore Canton.
Nous sommes donc évidemment très intéressés par le développement de Nice, mais il nous faut trouver le bon modèle. Pour ce qui est des itinéraires transatlantiques, nous pouvons compter sur notre partenaire Delta ; s'agissant de la Chine, nous opérerons au départ de Nice dès que nous aurons des occasions. Pour être parfaitement transparent avec vous, il faut que les activités actuelles d'Air France soient plus rentables avant que nous ne développions nos trajets vers la Chine. Nous avons noué un partenariat avec China Eastern, et un nouvel aéroport va ouvrir à Pékin, ce qui nous donnera plus d'espace : ainsi, nous devrions avoir plus d'occasions à l'avenir.
S'agissant des Assises du transport aérien, l'essentiel pour le groupe Air France-KLM est que toutes les parties prenantes – aussi bien le Gouvernement que Paris Aéroport et nos actionnaires – soient sur la même ligne, que nous définissions une stratégie permettant à tout le monde d'être gagnant – je dirais même à toute l'industrie : non seulement Air France, mais toutes les compagnies opérant en France. Nous étudions les modèles qui ont réussi dans le monde, notamment celui d'Amsterdam, du fait de notre partenariat avec KLM qui y est installé. Quand un gouvernement, un aéroport et une compagnie aérienne travaillent ensemble, main dans la main, des choses extraordinaires peuvent être accomplies. On trouve ainsi à Amsterdam des services que l'aéroport ne pouvait fournir seul : non seulement ils sont devenus réalité, mais ce sont des réussites. Amsterdam est devenue l'une des meilleures plateformes de correspondance du monde. La même chose s'est produite à Singapour il y a trente ans, quand de nouveaux services ont été créés. Le phénomène s'observe également avec Emirates, qui l'a d'ailleurs porté à un tout autre niveau. Or, à Paris, il y a d'ores et déjà un marché intérieur et un marché de destination qui sont plus développés que dans les exemples que je citais. Avec l'aide du Gouvernement et de Paris Aéroport, et au vu de nos capacités d'investissement, nous pouvons bâtir quelque chose d'absolument fantastique pour la France, mais cela suppose, une fois encore, que nous nous mettions tous d'accord. Pour l'heure, ce n'est pas le cas. Il nous revient d'expliquer et, nous l'espérons, de convaincre nos partenaires et l'ensemble des parties prenantes que c'est une chance extraordinaire pour la France. Nous espérons que Paris Aéroport développera sa capacité et que la fiscalité et les charges sociales pesant sur l'industrie seront allégées. Si nous sommes tous d'accord sur les objectifs de l'industrie de l'aviation en France et que nous comprenons l'impact de l'ensemble des éléments que j'ai indiqués sur l'industrie du transport aérien, cela peut fonctionner.
En ce qui concerne le low-cost long courrier, si vous vous intéressez de près à notre industrie, vous aurez noté que deux des acteurs du secteur de l'autre côté de l'Atlantique, Wow et Primera, ont mis un terme à leurs opérations il y a quelques mois, parce qu'ils ne dégageaient pas de bénéfices. Norwegian subit également une pression financière considérable. De notre point de vue, pour l'instant, l'efficacité de ce modèle n'a donc pas été prouvée. Avant d'y investir, nous souhaitons nous assurer que le niveau de risque n'est plus celui que l'on constate aujourd'hui. Nous disposons d'autres possibilités d'être présents sur le marché : nous avons trois A380 et soixante-huit B777. Nous pouvons optimiser la gestion de nos revenus pour être compétitifs sur tous les segments du marché. Pour l'instant, je le répète, le marché du low-cost long courrier n'a pas fait ses preuves, mais nous gardons évidemment un oeil très attentif sur ce qui se passe dans ce domaine.
Mon français n'est pas encore parfait, mais je fais de mon mieux. M. Jacques Krabal a posé une question sur la francophonie. J'espère l'avoir bien comprise. (Sourires.)
Je me permets d'interrompre M. Benjamin Smith. Il s'est engagé à pouvoir s'exprimer en français, notamment devant la représentation nationale, dans les semaines qui viennent. C'est aujourd'hui sa seconde prestation, après celle au Sénat la semaine dernière. Il fait effectivement en sorte – sous mon contrôle étroit (Sourires) – que son français soit fluide.
Par ailleurs, et puisque vous nous avez demandé quelle pédagogie pourrait être la nôtre à travers le monde s'agissant de la francophonie, M. Benjamin Smith a rappelé tout à l'heure que 93 % des salariés du groupe Air France sont français. Autrement dit, notre personnel est français. C'est très important. La langue anglaise est évidemment très répandue au sein du groupe ; elle constitue le moyen commun de communication. Certes, nos documents sont rédigés en anglais, pour éviter toute erreur d'interprétation avec nos partenaires – notamment KLM – et nos actionnaires, qui sont chinois et américains, mais ils le sont également en français. Le français reste donc une langue de travail.
En ce qui concerne la pédagogie que nous pourrions déployer dans le monde entier, nous ne sommes peut-être pas suffisamment attentifs à cette dimension. Nous pourrions effectivement la prendre en compte, car c'est quelque chose d'important. Toutefois, la pédagogie passe aussi par le rayonnement de notre groupe et par la présence du pavillon français, y compris à travers KLM ou Transavia. Notre objectif est bien de restaurer la compétitivité de la compagnie française. À cet égard, si je puis me permettre d'ajouter un mot concernant les Assises du transport aérien, auxquelles les équipes d'Air France ont beaucoup participé – aux côtés d'un certain nombre d'entre vous, d'ailleurs –, c'est la perspective que nous y défendons : nous voulons faire en sorte, pour être plus compétitifs au niveau international, que notre compagnie soit moins lourdement taxée qu'à l'heure actuelle. L'enjeu est très important car notre compagnie est assujettie à des taxes et redevances qui permettent notamment de financer la totalité des coûts d'infrastructure. Tout à l'heure, la comparaison était faite avec le train. Or, le fait qu'Air France, elle, paie la totalité de ses coûts d'infrastructure, n'est pas négligeable. Outre les redevances au titre de l'infrastructure aéroportuaire, il y a d'autres taxes, que vous connaissez bien et dont vous avez très certainement eu l'occasion de débattre, à commencer par la fameuse taxe de solidarité finançant l'aide aux pays du Sud, qui est supportée par la seule compagnie Air France : aucun autre secteur, en France, ne la paie. S'ajoutent à cela les dépenses de sûreté. Par ailleurs, et puisqu'il était question tout à l'heure d'environnement, Air France est très impliquée dans la lutte contre les nuisances sonores : nous participons à l'insonorisation des logements des riverains des aéroports. Notre compagnie est donc lourdement taxée et nous insistons, au sein des Assises du transport aérien, sur la nécessité d'alléger ces taxes.
De même, la question du non-plafonnement des cotisations sociales pour le personnel d'Air France est un véritable handicap pour l'entreprise. Je n'ignore naturellement pas le contexte actuel, mais nous tenons à ce que chacun ait à l'esprit ces éléments de compétitivité de l'entreprise. Ce n'est qu'en ramenant la taxation sociale et fiscale à des niveaux comparables à ceux de nos compétiteurs que nous pourrons être tout à la fois plus dynamiques et plus agressifs sur le marché international – et sur le marché français.
Un dernier mot sur le kérosène : j'ai cru entendre dire qu'il était taxé ailleurs, mais ce n'est pas le cas. Il n'existe pas de taxation du kérosène dans les pays voisins. Une taxation française sur ce produit serait donc dramatique pour Air France, puisque tous nos concurrents peuvent aller faire le plein ailleurs qu'en France. Ce serait très préjudiciable à notre compétitivité.
Il n'en demeure pas moins que nous sommes très engagés dans la lutte contre le changement climatique et dans la recherche sur les biocarburants. Nous testons de nouvelles idées et nous nous sommes associés avec des groupes industriels français pour être les plus innovants en recherche comme en expérimentation. En clair, nous sommes très attentifs à cet enjeu majeur et nous reviendrons avec plaisir devant vous pour aborder ces questions plus en détail.
(Interprétation de l'anglais.) Permettez-moi de préciser qu'au bureau, Mme Anne-Marie Couderc ne s'adresse à moi qu'en français et que je suis tenu de lui répondre en français aussi. Je salue sa patience : elle m'aide à progresser et j'espère pouvoir vous répondre en français lors de notre prochaine rencontre. J'ai vécu au Canada où la culture francophone est très présente et son développement largement soutenu. J'ai un peu appris cette langue magnifique étant jeune, mais je dois vous dire que votre grammaire est redoutable et présente quelques difficultés pour une personne de mon âge. Je suis très heureux que la culture et la langue françaises aient pu survivre au Canada. Air France soutient et continuera de soutenir le développement de la francophonie, qui fait partie intégrante de l'identité de notre marque. Le groupe Air France est intimement lié à la France et à la langue française. Chacun de nos 45 000 employés est très fier de sa langue et de la France. Comptez sur moi pour veiller à ce que l'importance du français ne soit jamais amoindrie au sein de la compagnie.
La contribution du transport aérien à la transition écologique est un sujet souvent abordé par le mouvement social des gilets jaunes. Les compagnies d'aviation promettent la neutralité carbone à partir de 2020 : le défi est colossal, sachant que le trafic doublera dans les vingt prochaines années. Air France peut être félicitée de participer au mécénat environnemental et au mécanisme de compensation carbone mais votre flotte importante comprend des avions plus ou moins récents. Quelle est votre stratégie d'investissement ? Participez-vous aux travaux de recherche – Mme Anne-Marie Couderc a déjà répondu en partie – visant à réduire la consommation d'énergies fossiles ? Que pensez-vous des avions hybrides ou électriques, ou encore de l'exploit de l'avion solaire Solar Impulse ? Faut-il y croire et encourager cet esprit pionnier ?
Suite à l'absence d'accord à Paris en 2015, un accord mondial, le CORSIA, a été conclu en 2016 pour réduire l'impact climatique du transport aérien. Il prévoit que les compagnies aériennes achètent des crédits carbone auprès d'autres secteurs à partir de 2021. Ne pensez-vous pas qu'il s'agit pour les pays riches de se donner bonne conscience à l'égard des pays pauvres ? Ne vaudrait-il mieux pas investir davantage dans la transition énergétique ?
J'aimerais appeler votre attention sur la plateforme de maintenance et le centre administratif de Hop ! qui sont situés à Morlaix. Quelle est la stratégie du groupe Air France vis-à-vis de cette filiale, notamment pour ce qui concerne la maintenance et les sites dédiés à cette activité ? Comme vous le savez, un plan de sauvegarde de l'emploi est en cours : des postes seront supprimés à Morlaix tandis que des postes équivalents seront créés à Nantes. Ce chassé-croisé pose à l'évidence des questions sur la stratégie du groupe Air France à l'égard de sa filiale et sur ses intentions concernant la pérennité du site de Morlaix, qui possède pourtant des compétences et un savoir-faire reconnus et enviés. Il existe à mon sens un modèle économique viable dans lequel le site de Morlaix a toute sa place. Quel avenir envisagez-vous pour ce site ? Quelle est votre vision de l'organisation des sites de maintenance de la filiale ? Enfin, j'ai été personnellement contactée par un tiers désireux d'avoir accès à la maintenance aéronautique à Morlaix : seriez-vous disposé à développer cette activité à Morlaix avec des clients tiers ou d'autres compagnies ?
Le transport aérien est ouvert à la concurrence mondiale. Face à l'équation concurrentielle, différentes solutions sont proposées. L'une d'entre elles me semble importante : l'innovation – réinventer la mobilité, le voyage, l'expérience du transport aérien pour se démarquer. C'est pourquoi vous avez lancé Big Blank, la start-up studio d'Air France-KLM. Son rythme de croisière est clair : lancer quatre à cinq start-up chaque année pour construire le voyage du futur. Quelle est votre vision de la mobilité aérienne de demain ? Comment ces start-up enrichiront-elles vos offres ?
Il y a un an, le projet de l'aéroport de Notre-Dame-des-Landes était abandonné au profit du réaménagement de l'aéroport de Nantes-Atlantique. Face à l'augmentation du flux de voyageurs dans cet aéroport – où sont passés 6 200 000 passagers en 2018, soit une hausse de 12,9 % par rapport à l'année précédente – des aménagements importants sont attendus pour adapter les infrastructures en conséquence. L'objectif des travaux serait de porter la capacité de Nantes-Atlantique à 9 millions de passagers en 2025, avec un potentiel d'agrandissement à 15 millions. Pourriez-vous nous présenter les différentes options envisagées, qu'il s'agisse de l'allongement de la piste, de la création d'une nouvelle piste, de son orientation voire de la construction d'une deuxième aérogare ?
En octobre dernier, Air France devait rendre sa décision concernant l'avenir des navettes Bordeaux-Orly, confrontées à la concurrence de la ligne à grande vitesse Paris-Bordeaux. Le directeur régional de la compagnie a indiqué le maintien de ces navettes quotidiennes au moins jusqu'en mars 2019. L'année 2018 a été particulièrement faste pour l'aéroport de Bordeaux : avec 6,8 millions de voyageurs, le trafic a augmenté de plus de 10 % par rapport à 2017, soit 600 000 passagers supplémentaires environ. Cela prouve que le besoin est réel parmi les habitants et les sociétés de la métropole bordelaise et des environs. Le mois de mars arrive : quelle est votre position concernant l'avenir de ces navettes qui effectuent dix vols quotidiens vers Orly et six vols vers Roissy ?
(Interprétation de l'anglais.) Je ne prétendrai jamais, madame Danielle Brulebois, que nous ne croyons pas aux nouvelles technologies, en particulier aux technologies hybrides ou électriques. Qui aurait cru, dans les années 1960, que l'on pourrait déplacer cent personnes de Paris à New York à des vitesses deux fois supérieures à celle du son ? Cela s'est pourtant produit il y a quarante ans déjà. Qui aurait à l'époque imaginé que les voitures hybrides et électriques seraient aussi développées aujourd'hui ? Tout est possible. Cela étant, dans l'état actuel des informations dont nous disposons, il est encore prématuré de croire dur comme fer à ces nouvelles technologies. La compagnie Air France et le secteur de l'aviation civile française dans son ensemble ont une riche histoire en matière d'innovation. Nous participerons de notre mieux au développement des technologies futures.
En ce qui concerne les installations de maintenance de Hop ! dans les régions, madame Sandrine Le Feur, je reconnais que cette filiale présente d'importants défis dans plusieurs domaines dont la maintenance, étant donné le grand nombre d'appareils différents qu'exploite Hop !. Il en résulte de fortes incidences sur la fiabilité et la rentabilité de cette filiale et, par conséquent, d'Air France. Nous nous employons à surmonter ces difficultés et à adapter nos activités en régions. Gardons néanmoins à l'esprit que les parties impliquées sont nombreuses : nos collègues et salariés, avant tout, mais aussi nos clients, naturellement, et nos actionnaires. Nous travaillons à un plan qui, espérons-le, aura des effets positifs pour les uns comme pour les autres, et avant tout pour les employés de la compagnie. Il est encore trop tôt pour que je réponde plus précisément à votre question, car les prochaines étapes de la transformation de Hop ! n'ont pas encore été arrêtées.
En ce qui concerne les start-up, monsieur Jean-Marc Zulesi, nous sommes preneurs de vos idées ! Nous avons en effet constitué une équipe qui travaille sur toutes sortes de nouvelles idées pour innover dans ce secteur dynamique qu'est celui du transport et du voyage. Nous espérons d'ici au mois d'août de premiers résultats concernant les données que nous collectons auprès de nos 100 millions de clients annuels – les types de voyage qu'ils choisissent, leurs préférences tarifaires et horaires et tous les autres choix que les clients font lorsqu'ils réservent un vol – pour leur offrir de meilleures options. À l'évidence, la conception d'outils pour innover dans ce secteur est une priorité : de nombreux innovateurs y travaillent déjà dans le monde entier. Peu d'entre eux, cependant, ont accès à un éventail de données aussi vaste que celui du groupe Air France-KLM. Notre partenariat avec ces entrepreneurs jeunes et doués devrait permettre de combiner les ressources d'un grand groupe avec la souplesse, la créativité et la rapidité d'un laboratoire comme celui-ci. Nous fondons de grands espoirs dans ces équipes. Nous avons commencé par mettre sur pied un laboratoire de petite taille mais nous sommes convaincus qu'il contribuera à rendre notre groupe plus compétitif afin qu'il conserve sa position parmi les meilleurs de ce secteur.
En ce qui concerne les questions environnementales, madame Sophie Panonacle, j'appelle votre attention sur le fait que le groupe Air France-KLM exerce un leadership reconnu. Voilà des années qu'il s'emploie à limiter son impact environnemental avec force et dynamisme. Ce leadership est notamment reconnu par les agences de notation extrafinancières. Nous devons naturellement nous montrer à la hauteur de cette réputation et poursuivre nos efforts.
Nous avons donc participé avec détermination à l'accord CORSIA : il faut en effet que l'ensemble des compagnies aériennes, dans le monde entier, s'engagent résolument en ce sens. Je reconnais néanmoins que cela ne suffit pas. L'accord CORSIA est certes important pour mobiliser et responsabiliser l'ensemble de la communauté aérienne internationale, mais il faut y ajouter toutes les mesures que nous prenons pour améliorer notre impact environnemental. Nous nous employons donc depuis longtemps à améliorer notre efficacité énergétique par passager, avec un objectif d'amélioration de 20 % entre 2011 – date de nos premiers efforts substantiels en la matière – et 2020. Pour ce faire, il faut agir sur plusieurs plans : le renouvellement et la modernisation de la flotte, bien entendu, mais aussi l'amélioration des procédures opérationnelles – la consommation de kérosène dépend aussi de la durée de roulage sur les pistes d'aéroport, par exemple. Il faut donc organiser une collaboration rationnelle entre les différents acteurs concernés. Nous agissons également sur la masse transportée à bord des avions.
D'autre part, je le répète, nous sommes très actifs en ce qui concerne les carburants alternatifs durables – l'huile de palme, par exemple, sur laquelle j'ai été interrogée au Sénat. Nous nous engageons avec force et vigilance, en lien avec nos partenaires industriels, pour conduire des expérimentations en la matière. Nous n'écartons aucun sujet touchant à l'environnement, y compris les nuisances sonores que j'ai évoquées plus tôt, ou encore la qualité de l'air en zone aéroportuaire et la biodiversité.
Encore une fois, nous sommes à votre disposition pour échanger plus en détail sur ces questions. Sachez néanmoins que nous sommes un acteur responsable – dans un secteur qui a ses handicaps environnementaux – et résolument engagé en faveur de l'innovation.
Enfin, s'agissant des territoires ultramarins, il s'agit d'un enjeu majeur et il va de soi que nous entendons conforter nos positions et assumer nos responsabilités dans les outre-mer.
(Interprétation de l'anglais.) En ce qui concerne la modernisation des infrastructures aéroportuaires, il est exact que le nombre de passagers du transport aérien devrait doubler dans les quinze ou vingt prochaines années. Il va de soi que le groupe Air France-KLM entend participer à cette croissance. Nous soutenons donc le développement des infrastructures nécessaires, surtout celles qu'utilise Air France au premier chef, pour répondre à la demande dans l'ensemble du secteur.
J'en viens à l'impact de la ligne à grande vitesse Paris-Bordeaux sur nos activités. Le TGV n'est pas une nouveauté pour nous, non plus que l'Eurostar. Ces dernières années, Air France a dû s'adapter à cette concurrence nouvelle, et elle le fera à Bordeaux comme elle l'a fait ailleurs. Bon nombre de nos clients souhaitent continuer de voyager en avion, et nous continuerons de proposer cette offre tant qu'elle est économiquement viable. Je ne peux pas encore vous répondre sur le type d'appareil et les créneaux horaires prévus, car nous devons définir notre offre en fonction de sa rentabilité pour répondre à la demande de la clientèle de tourisme et d'affaires dans la région bordelaise. Quoi qu'il en soit, le TGV présente des avantages que nous n'avons pas et il va de soi qu'il est un concurrent très sérieux pour nous.
Nous vous remercions d'avoir répondu à un vaste ensemble de questions, depuis votre vision de la France à l'avenir du transport aérien et aux perspectives plus techniques de certaines infrastructures. Je retiens l'optimisme que vous consacrez à cette entreprise et votre fierté de diriger ce fleuron, que vous avez lié directement à l'image de la France. Merci encore pour cette audition instructive et prometteuse !
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Membres présents ou excusés
Réunion du mardi 22 janvier 2019 à 17 h 05
Présents. - Mme Bérangère Abba, Mme Pascale Boyer, Mme Danielle Brulebois, M. Jean-François Cesarini, Mme Bérangère Couillard, M. Stéphane Demilly, M. Jean-Baptiste Djebbari, M. Loïc Dombreval, M. Bruno Duvergé, M. Olivier Falorni, Mme Laurence Gayte, M. Yannick Haury, M. Jacques Krabal, M. Jean-Claude Leclabart, Mme Sandrine Le Feur, Mme Sandra Marsaud, Mme Marjolaine Meynier-Millefert, M. Bruno Millienne, M. Jimmy Pahun, M. Bertrand Pancher, Mme Sophie Panonacle, Mme Zivka Park, M. Alain Perea, M. Patrice Perrot, M. Damien Pichereau, M. Loïc Prud'homme, Mme Véronique Riotton, Mme Nathalie Sarles, M. Jean-Marie Sermier, M. Vincent Thiébaut, Mme Frédérique Tuffnell, M. Jean-Marc Zulesi
Excusés. - M. Christophe Arend, Mme Sophie Auconie, Mme Nathalie Bassire, M. Stéphane Buchou, M. Vincent Descoeur, Mme Jennifer De Temmerman, M. Christian Jacob, M. David Lorion, Mme Barbara Pompili, M. Jean-Luc Poudroux, Mme Laurianne Rossi, Mme Hélène Vainqueur-Christophe
Assistaient également à la réunion. - M. Jean-Charles Colas-Roy, M. Charles de Courson, M. Michel Herbillon