Présidence de M. Éric Woerth, Président
La commission entend M. Jérôme Fournel, directeur général des finances publiques.
Je souhaite au nom de la commission la bienvenue à Monsieur Jérôme Fournel, directeur général des finances publiques.
Nous avons souhaité vous entendre sur le chantier de transformation de la direction générale des finances publiques (DGFiP) que représente le nouveau réseau de proximité. Nous souhaiterions mieux comprendre comment la réorganisation territoriale de votre administration va se mettre en place, selon quel calendrier, avec quelles conséquences en termes d'évolution et de redéploiement de vos effectifs, ceux-ci étant toujours soumis à tension.
Je relève d'ailleurs que les directeurs départementaux des finances publiques rencontrent les parlementaires pour essayer d'expliquer les évolutions à venir, qui sont d'ailleurs sans cesse remises en cause. D'une année l'autre, elles ont tendance à se renforcer.
Je vous remercie de m'accueillir pour répondre à vos questions sur l'évolution de la DGFiP. C'est une maison toujours en travaux : certes, elle se transforme en permanence, mais pendant les travaux le service public continue.
Nous nous intéressons depuis maintenant plusieurs années à la manière dont est perçue la qualité du service public fourni par la DGFiP. Ces résultats sont publics. Tous les indicateurs montrent que nos concitoyens trouvent que la qualité du service public rendu par la DGFiP est en amélioration significative.
Nous avons lancé le 6 juin dernier une évolution lourde de notre organisation territoriale, qui avait été largement préparée en amont. Nous avions auparavant l'habitude de procéder à des réorganisations annuelles, lors desquelles nous fermions une centaine de trésoreries et faisions évoluer un certain nombre de structures. Il y avait également des évolutions plus structurelles, mais ces évolutions étaient peu lisibles pour les agents comme pour les élus. La deuxième conséquence des réorganisations annuelles était que nous atteignions dans beaucoup d'endroits la limite de ce que nous étions capables de faire si nous voulions garder une stratégie réellement multi-canal et multi-service. En effet, chaque fois que nous fermons une petite trésorerie de quelques agents, nous réduisons la présence des services publics de proximité. L'accueil physique de la DGFiP se détériore, de même que se détériore le conseil aux élus locaux qui fait naturellement partie du rôle du comptable public.
Plutôt que de continuer à faire ainsi et de toucher les limites de ce qu'est notre stratégie multi-canal, nous avons fait le choix de procéder autrement et, en particulier, de protéger deux fonctions spécifiques : le conseil aux décideurs locaux, que nous sécurisons, et l'accueil physique, avec différentes façons de faire. Nous n'avons plus simplement des implantations fixes : nous développons des accueils sur rendez-vous et de l'accueil mobile, des permanences quelques heures par semaine ou quelques jours par mois, en prenant en compte les périodes particulières, telles que celles des déclarations d'impôt, du paiement de la taxe d'habitation, de l'émission des avis d'imposition. Nous créons quelque chose de plus flexible, de plus mobile, de beaucoup plus « maillant » sur le territoire en termes de présence physique. L'idée de préserver la fonction d'accueil de proximité rejoint en ce sens d'autres projets du Gouvernement, notamment le dispositif France Service.
Par ailleurs, comme il faut faire des gains de productivité et que notre structure a besoin de centres de gestion comptable structurés et importants pour le traitement des mandats à grande échelle, nous avons créé dans ce domaine quelque chose de plus massif. Cette massification s'organise sans détérioration, ni du conseil aux collectivités, ni de l'accueil de proximité.
Ces orientations ont été traduites dans les cartographies qui ont été dévoilées en juin dernier.
Ensuite, une phase de concertation s'est engagée. Celle-ci a été menée avec les territoires, avec les agents, avec les organisations syndicales quand elles ont accepté d'entrer dans le jeu de la discussion et naturellement avec les élus locaux, pour voir, à partir de cette première esquisse d'évolution du réseau, ce qu'il convenait de modifier, ce à quoi il fallait faire attention et quelles localisations ne convenaient pas pour une implantation de services de proximité. Cette concertation est en cours depuis juin 2019. Nous avons pris le temps nécessaire. Nous avons d'ailleurs dit au cours de l'automne que nous prendrions un peu plus de temps que ce qui était prévu initialement pour mener à bien cette concertation.
Cette concertation a déjà débouché sur la signature d'un certain nombre de chartes avec des départements et avec des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI). Dix-neuf chartes départementales ont été signées et trois ou quatre vont l'être dans les jours qui viennent. D'autres le seront naturellement dans quelques semaines ou quelques mois. En ce qui concerne les EPCI, nous avons signé au moins une charte dans 70 % des départements. Dans plus du tiers des départements, plus de 50 % des EPCI ont signé une charte.
Pour répondre à l'interrogation que formulait le président en introduction, nous cherchons à projeter le réseau, de façon un peu différente de la logique annuelle que nous suivions jusqu'à présent. Dans les chartes que nous signons, nous nous engageons jusqu'en 2026, donc sur une durée relativement longue par rapport à la pratique antérieure des évolutions annuelles. Par ailleurs, nous prenons des engagements, y compris de présence et de qualité de service. Nous aurons l'occasion, au cours des années à venir, de contrôler avec les élus locaux si nous sommes bien au rendez-vous de cette qualité de service, en termes d'accueil, en termes de satisfaction des élus en matière de conseil aux décideurs locaux.
Le contenu des chartes est variable, plus ou moins précis en termes de jours et d'horaires d'ouverture. Nous sommes vraiment dans une démarche qui, de ce point de vue, tranche avec ce qui avait été fait au cours des dernières années.
Parallèlement est intervenu le projet de « démétropolisation », qui consiste à faire sortir un certain nombre de services des grandes métropoles. Nous avons lancé un appel à candidatures et nous avons retenu, après un dialogue avec les organisations syndicales et nos partenaires interministériels, des critères permettant de choisir les cinquante premières collectivités qui bénéficieront d'un nouveau service de la DGFiP. Une deuxième vague, dans quelques semaines, complétera ce premier choix et renforcera notre présence territoriale. Nous sommes ici dans une logique un peu différente, qui n'est pas celle du renforcement de la présence territoriale du service fourni par la DGFiP mais une logique d'aménagement du territoire.
Le troisième point concerne les suppressions d'emplois et les gains de productivité, pour lesquels nous avons choisi, en 2020, de faire exactement le contraire de ce que nous faisions jusqu'à présent. Jusqu'à présent, nous avions des taux de suppression d'emplois de 2,5 à 3 % dans les départements ruraux, et de 1 % dans les grandes métropoles. En 2020, c'est l'inverse : les taux de suppressions d'emplois sont limités à 1 % dans les départements ruraux, et s'élèvent jusqu'à 2 ou 2,5 % dans les grandes métropoles. Nous avons totalement inversé le paradigme de construction de notre répartition des emplois au sein de la DGFiP. Cela montre de façon claire que l'objectif de la réorganisation territoriale n'est pas un objectif de gain de productivité immédiat. Cela accompagne bien sûr des évolutions en termes de dématérialisation, mais nous suivons bien une logique de réorganisation du service, pour avoir demain dans les territoires une qualité de service qui soit supérieure à celle d'aujourd'hui.
Peut-on chiffrer précisément les effectifs qui sont libérés par des réformes fiscales ? Je pense notamment à la suppression de la taxe d'habitation. La taxe d'habitation est conservée pour les résidences secondaires. Je suppose que cela oblige à un certain nombre d'actes administratifs : il faut tenir à jour les fichiers des résidences et des valeurs locatives, parce que toute résidence peut à un moment donné devenir une résidence secondaire.
Il faut y ajouter la collecte de l'impôt sur les particuliers, avec le prélèvement à la source, et quelques modifications sur les impôts des entreprises. Ces modifications fiscales ont-elles, et à quel niveau, un impact sur le volume de travail et les effectifs ? Comment mesurez-vous ces économies ?
Je salue tout d'abord le choix d'une réforme pluriannuelle, pour donner de la visibilité aux usagers ainsi qu'aux agents publics sur l'évolution du réseau et l'évolution d'un certain nombre de missions. Le fait d'obtenir les informations au compte-goutte, année après année, était très anxiogène. Je crois que cet aspect de la réforme a été salué par de nombreux agents.
Je vais commencer par le point de vue des usagers, qu'il s'agisse des particuliers ou des entreprises. Vous l'avez bien indiqué dans votre propos liminaire, mais je voudrais que nous entrions plus dans les détails relatifs aux indicateurs de satisfaction pour les usagers. La direction interministérielle de la transformation publique (DITP) a créé un outil de mesure de satisfaction et de notation des services publics. Avez-vous travaillé avec eux à un indicateur de la satisfaction des usagers ? Je pense que, dans le cadre d'une réorganisation du réseau, il sera très important de voir si les usagers sont satisfaits, au fur et à mesure de la réorganisation.
De la même manière, la DGFiP s'est-elle dotée d'indicateurs de performance spécifiques pour suivre l'avancée de cette transformation, ses succès et les corrections éventuelles à apporter ?
Enfin, je voudrais citer deux cas de plateformes qui ont été créées spécifiquement pour les contribuables : le centre « Impôts service », qui est compétent en matière de fiscalité générale, tandis que les centres « Prélèvement service », situés à Lyon, Lille, Montpellier et Strasbourg, sont compétents pour les questions relatives au prélèvement à la source. Pourriez-vous nous donner des chiffres sur le nombre d'appels reçus ainsi que sur le taux de décroché, c'est-à-dire le taux de retour après un appel de contribuable ?
De plus, comment le projet de transformation s'imbrique-t-il avec le dispositif des maisons France Service ? Comment, en interne, arrivez-vous à anticiper la création de ces maisons France Service ? Combien de trésorerie devraient-elles être mises à disposition pour ces maisons ? Quelles sont les modalités financières de cette participation et quel est l'impact de ce dispositif sur votre administration ?
Concernant les collectivités territoriales, la suppression des indemnités de conseil qui étaient versées par les collectivités ou les établissements publics locaux à leur comptable public a conduit à la minoration des variables d'ajustement, pour 25 millions d'euros, ainsi qu'à la prise en charge de ces indemnités par l'État. Des associations d'élus locaux m'en ont parlé et je voudrais savoir pourquoi la minoration s'élève à 25 millions d'euros.
Concernant les agents des finances publiques, comment a évolué leur perception de la réorganisation ? Lorsque j'étais rapporteur spécial du budget de la DGFiP, j'ai auditionné plusieurs fois les organisations syndicales : j'avais constaté une perception en évolution, souvent prudente mais pas défavorable, et j'avais remarqué un certain intérêt à essayer de repenser les missions. Pouvez-vous nous dire comment les agents publics s'approprient aujourd'hui cette transformation ?
Enfin, lors du dernier Printemps de l'évaluation, j'avais consacré mon rapport spécial aux investissements informatiques de l'administration fiscale. Avez-vous progressé dans l'évaluation du coût nécessaire à la résorption du retard technique de votre administration, qui est important ? Avez-vous renforcé les outils et les indicateurs de pilotage des projets informatiques ? Enfin, de nouvelles dispositions et de nouvelles initiatives pour diversifier et dynamiser la politique de recrutement en matière de compétences informatiques ont-elles pu être prises depuis un an ?
Je souhaite attirer l'attention de notre commission sur la question du management, des compétences et de la formation. Le projet de transformation en cours prévoit la poursuite de la rationalisation des effectifs de l'administration fiscale. Comme le montre le dernier rapport Tax Administrations de l'organisation de coopération et de développement économique (OCDE), le renouvellement des effectifs est en moyenne plus faible en France que dans l'OCDE. Le taux de recrutement s'établit à 3,4 % et le taux de départ à 5,1 %, contre respectivement 6,4 % et 6,8 % en moyenne dans l'OCDE. Un taux de renouvellement raisonnable serait situé entre 5 et 10 % : nous sommes un peu en dessous.
Un niveau trop faible n'est pourtant pas souhaitable, surtout dans une phase de transformation. Cela limite la capacité de l'administration fiscale à se doter de compétences nouvelles. Cela conduit à un vieillissement de la pyramide des âges et contribue à dégrader l'optimisme et la motivation des agents. D'ailleurs, l'enquête de l'observatoire des ministères économiques et financiers, présentée au printemps dernier, a montré un net recul de la satisfaction des agents des finances publiques : seuls 18 % d'entre eux se disent optimistes concernant leur avenir au sein de la direction, soit un recul de 8 points par rapport à l'année précédente. Dans la fonction publique de l'État, ils sont 63 %, soit trois à quatre fois plus. Au sein de la DGFiP, seuls 26 % des agents sont satisfaits des possibilités d'évolution de carrière. En particulier, le moral des managers semble très affecté.
Les transformations que vous portez sont nécessaires et notre groupe les appelle de ses voeux. Il me paraît toutefois important de veiller à préserver la motivation des agents, l'intérêt des carrières et la qualité de vie au travail. Cela passe notamment, à mon sens, par un renforcement de la formation afin de permettre aux agents de se spécialiser, de s'adapter aux transformations en cours et de favoriser les évolutions de carrière indispensables au bien-être au travail.
Compte tenu de ces éléments, je souhaite vous interroger sur l'évolution des métiers et des effectifs de la DGFiP ainsi que sur votre projet en matière de formation. Premièrement, pouvez-vous nous éclairer sur l'évolution de la structure des métiers au sein de la DGFiP ? Quelles sont les missions, les directions, les niveaux hiérarchiques pour lesquels les effectifs ont été le plus renouvelés ?
Depuis quelques années, le schéma d'emploi exécuté respecte fidèlement la prévision à l'échelle du programme. Néanmoins, pensez-vous que cette évolution corresponde aux besoins des transformations en cours ? Dans quelle mesure la prévision du schéma d'emploi pourrait-elle être affinée, par direction et par catégorie ?
Enfin, dans une récente interview à la Revue française des finances publiques, vous relevez que « la spécialisation de certains services, le poids croissant du numérique, le développement du travail à distance ou du mode projet, l'arrivée de nouvelles générations dans la vie professionnelle sont autant d'évolutions qui justifient une réflexion sur la formation » et que « la DGFiP devait être exemplaire dans ce domaine ». Quels sont vos projets concernant la rénovation des parcours de formation initiale et continue des agents de la DGFiP ? En quoi consistera le plan d'action portant sur la formation continue que vous préparez actuellement ?
Notre groupe s'interroge sur trois points.
Tout d'abord, vous indiquez que les réductions d'effectifs sont moindres dans les départements ruraux que dans les départements plus urbains : vous évoquez deux ratios, de 1 % d'un côté et de 3 % de l'autre. Mais la question de fond reste celle de la « démétropolisation ». Nous nous posons régulièrement la question de savoir comment la DGFiP implante ses services : nous avons malgré tout l'impression que vous continuez de jouer la carte de la métropolisation et que, en réalité, les villes moyennes ne profitent pas du tout de votre réorganisation. Je prends l'exemple du département du Bas-Rhin : Strasbourg reste la grande gagnante et les villes moyennes, telles que Sélestat, Saverne ou Haguenau, ne profitent pas de cette réorganisation, bien au contraire. Les services de l'État ont pourtant un discours consistant à dire qu'il faut renforcer les villes moyennes. De toute évidence, la DGFiP n'accompagne pas cette orientation par ses choix stratégiques.
Ma deuxième question porte sur la dématérialisation. En milieu rural, pour beaucoup de nos concitoyens, le tout numérique est évidemment une catastrophe, parce que nombre d'entre eux, notamment âgés, n'ont pas accès à Internet. Quand je dis qu'ils n'ont pas accès à Internet, il ne s'agit pas de l'accès physique : ce n'est pas leur culture, et cela pose énormément de problèmes, y compris dans le paiement de l'impôt. Cela pose aussi énormément de problèmes – on le voit aujourd'hui avec l'évolution du prélèvement à la source – lorsqu'ils sont employeurs particuliers puisqu'on leur demande de remplir des nouveaux formulaires par Internet pour le chèque emploi service universel, le CESU+. Ces contribuables ne sont pas du tout familiers de ce système et c'est un vrai problème. Que fait la DGFiP pour faire en sorte qu'il y ait une équité de traitement, pour pouvoir accéder à l'information et pour pouvoir régler l'impôt sans être embarrassé par toutes ces nouvelles technologies auxquelles nos concitoyens ne peuvent pas ou ne veulent pas avoir accès ?
Enfin, troisième question, vous indiquez que vous êtes dans la logique des maisons France Service. En réalité, la meilleure maison France Service est la commune. Pourrions-nous, à cet égard, avoir votre point de vue sur votre relation avec les communes ?
Ma première question porte sur la restructuration des services et l'ouverture de maisons de services au public. Se pose la question du rapprochement avec les caisses d'allocations familiales (CAF) et les caisses primaires d'assurance maladie (CPAM), rapprochement qui était prévu au niveau interministériel. Cela m'amène également à la question de la lutte contre les fraudes aux prestations sociales. Où en êtes-vous actuellement de cette coopération interministérielle, qui fait également partie de vos prérogatives ? Cette coopération interministérielle, rappelée dans les rapports de l'inspection générale des affaires sociales (IGAS), de la Cour des comptes et de l'inspection générale des finances (IGF), est-elle prise en compte dans le cadre de cette réorganisation ?
Mon deuxième point concerne l'aménagement de notre territoire. Il se trouve que, dans ma région, l'installation de la DGFiP se fait plutôt à Chateaubriant, à Fontenay-le-Comte et à Laval, ce qui pose une question d'équilibre Mais, actuellement, le calendrier de ces déménagements est très flou. Pouvez-vous nous apporter plus de précisions ? Comment accompagnez-vous les agents qui partent dans ces nouveaux territoires et selon quelle procédure ?
Le nouveau réseau de proximité, le NRP puisqu'il est nommé ainsi, ne suscite pas partout l'enthousiasme – c'est un euphémisme. J'ai eu l'occasion de réunir les élus de chaque EPCI de ma circonscription : ces derniers sont loin de l'euphorie. Aussi, lors d'une discussion informelle que j'avais eue avec Monsieur le ministre Gérald Darmanin, je lui avais suggéré de mener des expérimentations par département, avec les territoires qui sont volontaires, parce qu'il y en a quand même. J'avais senti le ministre plutôt intéressé. Je voulais savoir si cette idée de mener des expérimentations uniquement avec des territoires volontaires était à l'étude ou avait été abandonnée.
Pour ma deuxième question, je rejoins mon collègue Hetzel sur la « démétropolisation ». J'ai l'impression que c'est une « démétropolisation » de Paris vers les métropoles ! C'est peut-être un peu caricatural, mais j'aimerais connaître les critères qui vous ont permis de déterminer cette première vague de cinquante implantations.
Je souhaite également savoir si vous avez lu la note de janvier 2020 du Conseil d'analyse économique qui observe le délitement du lien social entraîné par la disparition du tissu des services publics et des commerces, ce qui semble avoir joué un rôle important dans le mouvement des gilets jaunes. Si oui, allez-vous en tenir compte ?
Enfin, ma dernière question porte sur l'évaluation parce que, s'il y a une nouvelle réorganisation, il faut que nous soyons en mesure de l'évaluer. Pour cela, nous devons avoir une vision très claire et très précise de la répartition des effectifs à l'échelle des départements au 31 décembre 2018.
Je souhaite d'abord saluer la volonté du ministre de participer à la déconcentration et à l'aménagement du territoire. C'est un choix qui est, je crois, majeur et qui, comme vous l'avez souligné, n'a pas été fait durant les trois dernières décennies. Notre groupe salue évidemment cette volonté de déconcentrer les services, notamment dans des villes moyennes plutôt que dans des métropoles. Les missions de vos agents sont évidemment amenées à évoluer, notamment avec la modernisation de l'impôt sur le revenu. Savez-vous combien d'emplois deviendront inutiles du fait de la mise en place du prélèvement à la source ?
Par ailleurs, vous nous avez parlé de la réorganisation des services, au profit des élus locaux mais également des usagers. Travaillez-vous sur la modernisation plus globale des services des impôts, pour essayer de créer des services innovants ? Par exemple, mon directeur départemental des finances publiques, dans la Marne, m'a parlé de la mise en place d'une téléconsultation fiscale, ce qui répond à mon avis parfaitement aux demandes des usagers, parce qu'ils n'ont plus besoin de se déplacer au centre des impôts qui se situe à quarante kilomètres. En accédant à ce type de téléconsultation, ils ont quand même quelqu'un en face d'eux et cela répond aux problèmes de mobilité.
En termes d'aménagement du territoire, la DGFiP a accentué ces dernières années la concentration de ses effectifs dans les métropoles. Pourriez-vous nous en dire un peu plus ? Vous nous dites que, maintenant, la diminution des effectifs est seulement de 1 % dans les zones rurales et plutôt de 2,5 % en zone urbaine, mais pendant des dizaines d'années vous avez fait exactement l'inverse. Quelles sont les possibilités de déconcentration d'un certain nombre de vos services ?
Deuxième question : êtes-vous favorable à la généralisation de la présence de vos personnels dans les maisons de services au public (MSAP) ou les maisons France Service pour conseiller les contribuables à deux périodes de l'année, à l'automne pour les impôts locaux et au printemps pour l'impôt sur le revenu ?
Troisième question : pourriez-vous nous dire, en termes d'effectifs, quelles sont les conséquences de la suppression de la taxe d'habitation pour la résidence principale ? Des économies seront-elles dégagées ?
Quatrième et dernière question : dans le cadre du projet de loi de décentralisation, dit « 3D », ne faudrait-il pas revenir sur l'étatisation des comptables publics des collectivités territoriales ? La question se pose aussi pour les hôpitaux publics.
Jean-Paul Dufrègne. Monsieur le directeur général, nous disons non aux fermetures de trésorerie. Dans l'Allier, huit trésoreries sur neuf ferment et le moins que l'on puisse dire c'est que cela se passe plutôt mal ! Ces fermetures sont ressenties comme une mesure répressive contre les territoires ruraux. Avec mon collègue Jean-Paul Mattei, dans le cadre d'un rapport sur la présence des services publics dans les territoires ruraux, nous avons mis en avant que la dématérialisation a accentué la fracture territoriale : ce n'est pas nous qui l'avons dit mais la Cour des comptes dans un rapport préalable à la mission à laquelle je faisais allusion. Comment prenez-vous en compte ces questions ? Comment accompagnez-vous les territoires ruraux particulièrement impactés, notamment pour la population plus âgée ?
Concernant les maisons France Service, nous avons, toujours dans le cadre du rapport auquel je faisais allusion, pris position pour ces maisons, mais à condition qu'elles apportent véritablement un service. Comment la DGFiP participe-t-elle à l'organisation de ces maisons France Service ? Comment assurer dans ces maisons une présence effective et concrète qui puisse apporter des réponses aux questions de nos concitoyens ?
Toujours dans ce cadre, nous avions préconisé un temps d'accès maximum de vingt minutes. Prenez-vous en compte de tels critères permettant de rapprocher effectivement le service de nos concitoyens ? Il a été fait allusion tout à l'heure à la commune, à la mairie et c'est vrai que cette question est essentielle. N'oublions pas que le premier service public de base est la commune.
Concernant les impacts d'un certain nombre de réformes sur les effectifs de la direction générale des finances publiques, le projet de réorganisation territoriale n'a pas pour objectif premier l'amélioration de la productivité. En revanche, effectivement, ces évolutions ont des effets en termes de gain d'effectifs.
La suppression de la taxe d'habitation a été évoquée à plusieurs reprises. Au total, la gestion de cette taxe concerne 3 305 emplois exactement. Selon nos estimations, le fait de supprimer la taxe sur les résidences principales mais de garder la taxe sur les résidences secondaires aura pour effet de supprimer environ 2 000 emplois, dont environ un millier d'ici à 2022, et le reste d'ici la suppression complète de la taxe d'habitation en 2023. Dans les services des impôts des particuliers, 30 à 40 % des visites sont motivées par la taxe d'habitation. La suppression du numéraire dans le réseau, pour laquelle nous sommes dans une phase d'expérimentation avec les buralistes, concerne environ un millier d'emplois. Les évolutions numériques, telles que la télédéclaration, représentent également environ un millier d'emplois.
Une question a été posée sur les comptables publics. Je prendrai l'exemple des offices HLM. Nous avions jusqu'à présent un double système : certains étaient sous comptabilité privée et d'autres sous comptabilité publique. Nous sommes en train de basculer totalement en comptabilité privée. La suppression des comptables publics dans les offices HLM concerne 250 à 300 emplois.
Voici les principaux ordres de grandeur des suppressions d'emplois que nous avons à prévoir. Naturellement, d'autres sont chantiers sont en cours. Puisque je viens de parler de la taxe d'habitation, j'en profite pour vous dire que nous allons reformater complètement la manière de gérer les biens immobiliers au sein de la DGFiP, de façon à bien articuler la taxe d'habitation actuelle et la taxe d'habitation sur les résidences secondaires. C'est un projet qui va tout à fait dans le sens de la question qui a été posée sur l'innovation et la modernisation. Ce projet est, d'une certaine manière, l'équivalent pour les biens immobiliers de ce qui s'est passé pour le prélèvement à la source. Il consiste à demander au contribuable de donner des informations sur son bien. Ce dialogue avec le contribuable, qui donne des informations parce que son intérêt est de les donner, simplifie nos procédures en interne et les alimente. Ce dispositif sera notamment déployé pour les résidences secondaires. Le projet informatique associé s'appelle « Gestimmo ».
Nous suivons de nombreux indicateurs de satisfaction. Plusieurs outils sont utilisés, et non un seul, parce que la satisfaction se mesure à différentes échelles. Ainsi, l'indicateur de satisfaction des décideurs locaux permettra de mesurer la qualité du conseil, la présence territoriale, l'accessibilité du service en période de pointe – lorsque l'on est en phase de déclaration, en phase d'avis, en phase de paiement de l'impôt, par exemple.
Nous connaîtrons également le niveau de satisfaction du public, y compris à un niveau fin : nous faisons désormais des enquêtes, par exemple à la sortie d'un service des impôts des particuliers (SIP) ou d'une trésorerie. Nous allons le faire de la même façon pour les appels téléphoniques.
Lorsque nous concevons un nouvel avis d'imposition, comme les nouveaux avis liés au prélèvement à la source par exemple, nous réunissons des groupes qualitatifs comprenant des usagers pour recueillir en amont leurs souhaits. Nous souhaitons savoir si la présentation n'est pas trop compliquée, si le contribuable obtient l'information, si la réponse est satisfaisante par rapport à ses besoins. Nous travaillons aujourd'hui à cela pour essayer de satisfaire au maximum les usagers.
Les macro-indicateurs qualitatifs sont en progression. Ces indicateurs peuvent provenir d'études externes à l'administration. Nous réalisons régulièrement une enquête par téléphone auprès des usagers et l'Institut Paul Delouvrier réalise également une enquête régulière. Nous avons progressé sur tous les sujets : le taux de satisfaction a augmenté de 3 à 10 points en moyenne, suivant les observatoires. Cela doit rassurer les agents : les transformations qui se déroulent au sein de la DGFiP sont perçues par nos concitoyens comme des transformations qui améliorent le service public et non pas qui le dégradent.
C'est sur les réponses téléphoniques que nos résultats sont les moins bons. Nous avons eu l'année passée un taux de décroché qui était très légèrement supérieur à 50 % – ce qui est insuffisant. Les taux de décroché sont meilleurs sur les plateformes de prélèvement à la source parce que nous avons centralisé la plateforme – ce qui nous donne la capacité de mieux gérer les choses : nous avons ainsi des taux de décroché qui se rapprochent plus de 70 %. Il faut que nous parvenions à monter à 70 % partout. Nous avons étudié le taux de décroché, mais les plateformes ne font pas que du téléphone. Elles font aussi du « chat » et elles répondent aux courriels.
Nous avons en projet de créer un numéro unique pour la France, non surtaxé, qui ne serait pas uniquement lié au prélèvement à la source. Toutefois, nous conserverons une possibilité de contact téléphonique auprès des services. L'idée est que le renseignement général passe uniquement par la plateforme dédiée ; en revanche, quand c'est un problème particulier, parce qu'un contribuable a reçu un courrier de son service des impôts des particuliers, ce contribuable pourra avoir un accès direct à ce service.
Plusieurs questions ont été posées sur l'articulation avec le dispositif France Service. Nous travaillons de façon extrêmement étroite avec France Service, au niveau national en participant au comité de pilotage et au niveau local en nous coordonnant avec les préfets, qui cosignent toutes les conventions départementales. Toutes les évolutions de l'organisation du réseau dans les territoires se font au niveau local en lien avec l'ensemble des services de l'État, dont le préfet est naturellement le garant. Il y a donc un double niveau de concertation.
Nous avons conduit, il y a quelques mois, quelques expérimentations dans certains départements pour visualiser ce que donnera la réforme, avant même de lancer l'opération. Nous allons déployer soixante-dix conseillers aux décideurs locaux durant l'année 2020 et nous n'allons procéder qu'à très peu de fermetures de trésorerie cette année, lesquelles ont à chaque fois fait l'objet d'un accord avec les maires. Nous créons également une cinquantaine de services de gestion comptable et d'accueils de proximité.
Nous sommes donc en 2020 dans une démarche qui, d'une certaine manière, est presque une expérimentation grandeur nature de la démarche plus générale que nous allons poursuivre durant les années à venir. Nous nous sommes donné du temps : nous avons prévu d'aller jusqu'en 2023 pour les évolutions et jusqu'en 2026 pour stabiliser le dispositif.
Je reviens un instant sur France Service. En 2020, nous allons être présents dans les maisons France Service. Nous avons fait des sondages auprès des agents pour demander lesquels voulaient être permanents dans les maisons France Service – y compris dans des fonctions polyvalentes et pas uniquement les fonctions fiscales qui étaient les leurs – et ils sont assez peu nombreux : nous avons une centaine d'agents qui se sont montrés intéressés. Progressivement, au fur et à mesure des réorganisations, il y aura naturellement plus de candidats pour aller dans les maisons France Service. Dans toutes les maisons France Service, nous offrons un service fiscal, et ce service se renforcera aux moments adéquats.
De plus, notre service de proximité va être localisé, très souvent, dans une mairie et non dans une maison France Service, parce qu'il n'y en aura pas suffisamment. Dans un peu plus de 500 maisons France Service, dont 30 ont été labellisées en début d'année, nous offrirons un service multiple : ce sera de la permanence, du télé-conseil grâce à une solution de web conférence que nous avons développée pour pouvoir faire de la visioconférence à distance et du télé-conseil fiscal, y compris s'il y a besoin d'un service de type qualitatif.
Au sujet des indemnités de conseil, nous avions jusqu'à présent un système dans lequel le conseil donné aux collectivités faisait l'objet d'une rémunération directe. Désormais, nous assumons une logique de service public sur ce conseil aux collectivités locales. Ce n'est pas un service public payant, c'est un service public général. 25 millions d'euros y ont été attribués, ce qui correspond exactement à la somme qui était déboursée par les collectivités auparavant, sachant que 97 % des collectivités payaient une indemnité de conseil les années précédentes.
En ce qui concerne l'informatique, nous avons 70 millions d'euros d'augmentation des autorisations d'engagement en 2020, puis un rythme de décaissement sur les années suivantes : cet effort est considérable. Nous subissions une diminution des crédits informatiques qui nécessitait vraiment un rattrapage. Nous sommes une des administrations qui a le champ d'intervention le plus large parmi des administrations équivalentes dans le monde, sur des sujets fiscaux ou comptables ou de gestion cadastrale et foncière, et nous étions parmi ceux qui investissaient le moins en informatique. Nous pouvons maximiser l'utilité de notre investissement ; c'est ce que nous allons essayer de continuer à faire.
Le rattrapage est en cours. Il ne se limitera d'ailleurs sans doute pas aux crédits budgétaires, puisque nous avons beaucoup de projets qui, du fait de leur intérêt, de leur retour sur investissement et de leur pertinence, y compris parce qu'ils sont parfois interministériels, intéressent le fonds de transformation de l'action publique : nous y faisons appel et nous le ferons encore. Nous espérons que cela sera suffisant. Nous essayons, premièrement, d'investir massivement sur la partie retard technique, pour reconstituer notre infrastructure technique au cours des trois prochaines années et ne pas avoir d'obsolescence sur nos matériels, deuxièmement, de réserver les crédits qui nous permettront, dans la durée, d'assurer que nous ne nous retrouvions plus jamais dans une situation d'obsolescence technologique. Nous allons également disposer d'un schéma directeur informatique, qui devrait nous donner des garanties suffisantes, y compris en termes qualitatifs, en termes de suivi des trajectoires, tant sur les matériels que sur les applications.
Les questions de qualité reviennent régulièrement : les agents considèrent que, si le site impôts.gouv.fr développé pour le prélèvement à la source est globalement de bonne qualité, leurs applications ne sont pas au niveau. C'est un sentiment contre lequel il faut impérativement lutter. Nous avons lancé un exercice de démocratie directe sur les applications informatiques : nous avons demandé aux agents de nous dire quelles sont les deux applications les plus problématiques de leur point de vue et nous nous sommes engagés à les traiter dans les six prochains mois. Nous voulons que les agents perçoivent les améliorations et la modernisation de l'administration au moins autant que les usagers : c'est un élément extrêmement important pour les faire adhérer aux transformations en cours.
Les agents ont clairement exprimé des inquiétudes : c'est normal dans des périodes de transformation forte et de diminution des effectifs. Nous essayons tout d'abord de prendre le temps. Nous proposons des mesures d'accompagnement importantes pour les agents, que ce soit de l'accompagnement géographique ou de l'accompagnement fonctionnel. Pour les trois prochaines années, une centaine de millions d'euros environ va servir à accompagner spécifiquement les agents, que ce soit sur des mesures de formation ou sur des mesures d'accompagnement. Par ailleurs, actuellement, la DGFiP dépense plus de 9 % de sa masse salariale en formations. Ce sont des chiffres extrêmement élevés.
Pour finir, parmi les villes qui ont bénéficié de la « démétropolisation », la plus importante est Limoges, avec 130 000 habitants. Notre cible, ce sont les villes de taille moyenne, de 10 000 à 50 000 habitants, mais très rarement au delà. C'est une vraie transformation. Je ne vais pas vous dire que la DGFiP pourra à elle seule résoudre tous les problèmes d'aménagement du territoire, d'organisation territoriale, mais, à son échelle, elle fait un grand effort, qui concerne 2 500 agents.
Je précise que, aussi bien pour la nouvelle géographie de proximité que pour la « démétropolisation », nous n'avons pas recours à la mobilité forcée. Nous accompagnons la montée en puissance de nouveaux métiers, de nouvelles façons de s'organiser. Nous en avons discuté avec les organisations syndicales qui, depuis le début de l'année, sont revenues autour de la table. Par exemple, les métiers de la publicité foncière sont aujourd'hui répartis en une multitude de petits services et les délais de prise en compte des opérations de publicité foncière sont actuellement très longs, parfois de l'ordre d'une année : ce n'est pas admissible. Pour résoudre ce problème, il faut des services plus massifs. Comme il y a eu beaucoup d'opérations immobilières au cours des dernières années, les services sont en surcharge : ils ont une structuration assez vieille et assez émiettée et des capacités différentes. Nous avons donc décidé de réorganiser les services de publicité foncière. Pour cela, nous sommes en train de créer des services d'appui à la publicité foncière, qui seront implantés dans les territoires. Ils vont venir compléter l'offre de services en matière de publicité foncière et être capables de participer à d'autres processus liés à ce métier, y compris d'automatiser la relation avec les notaires.
Lorsque nous avons créé le service partenaire des entreprises, les agents se demandaient s'il était intéressant d'y aller, y compris des enquêteurs ou des vérificateurs de la direction des vérifications nationales et internationales (DVNI). Ce service est devenu attractif. Ce sera la même chose lors de la création d'autres services. Ainsi, grâce à la fois à des mobilités choisies par envie et à de nouveaux entrants, au fur et à mesure de la montée en puissance de ces services, nous arriverons naturellement à remplir nos sites « démétropolisés ».
Je voudrais d'abord vous féliciter pour ce qui a commencé à être fait. J'ai vu la réorganisation de vos services en Haute-Savoie en tant qu'ancien maire des Houches. Pour nous, le fait de réorganiser les services pour avoir un vrai conseil aux collectivités va dans le bon sens.
J'ai une question sur la fin de la taxe d'habitation dont vous nous avez parlé : 2 000 des 3 500 emplois devraient être supprimés. Je voudrais savoir comment votre service va s'adapter au maintien de la taxe pour les résidences secondaires, pour simplifier sa perception et réussir à faire des économies ?
Je suis interpellé par des communautés de communes qui ne vont pas être compensées de la majoration de leurs taux de taxe d'habitation qui a financé à partir de 2018 des transferts de compétence. Pouvez-vous nous dire combien de communautés de communes sont concernées ? N'y aura-t-il pas une correction à faire en 2021 ?
Je voudrais revenir sur un point que vous avez abordé, concernant la fin de la perception du numéraire. L'objectif est de diminuer la charge de travail pour Bercy et il existe également des raisons de sécurité. Mais finalement, ce report va concerner des buralistes ou des épiceries locales qui vont avoir cette charge de travail et aussi prendre ce risque. J'ai une inquiétude en matière de protection des données des personnes. Nous savons que les personnes qui viennent payer en numéraire sont quelquefois des personnes qui ont des difficultés bancaires. Elles viennent payer des cantines, de l'eau, des ordures ménagères, avec quelquefois du retard, parfois beaucoup de retard. Cela va se passer, dans des communes où chacun se connaît, dans des endroits où il n'y a aucune confidentialité. Avez-vous fait une étude sur le sujet ? Quelles mesures avez-vous prises pour garantir la protection des données et la confidentialité concernant ces personnes ? C'est une question extrêmement importante, notamment dans les petites communes.
Le rôle de la DGFiP n'est bien évidemment pas uniquement de faire de l'aménagement du territoire et, monsieur le directeur, l'activité de la DGFiP a fortement augmenté en nombre de tâches entre 2008 et 2018. Notamment, le nombre d'avis d'impôts sur le revenu a progressé de plus de 6 %, le nombre d'avis de TH, de plus de 5 %, et tous les impôts sont concernés. Le nombre d'entreprises imposables à la TVA a augmenté de 49 %, le nombre d'entreprises imposables à l'impôt sur les sociétés (IS) de 54 %. Tous ces chiffres sont issus du rapport de Solidaire finances publiques.
Durant cette même période, de 2008 à 2018, la DGFiP a connu une baisse de ses effectifs sans précédent, de 20 %. On sait que la numérisation des tâches et la déclaration préremplie ont permis de changer les missions de la DGFiP.
Il n'en demeure pas moins que, le tissu fiscal ayant autant augmenté, on se demande comment, avec des baisses d'effectifs qui perdurent, la DGFiP va pouvoir relever de nouveaux défis, notamment celui de la lutte contre la fraude qui est l'axe majeur de notre quinquennat. Comment pouvez-vous répondre à cet enjeu de lutte contre la fraude qui est bien évidemment absolument prioritaire dans un contexte où le tissu fiscal augmente ?
Enfin, beaucoup d'agents dans les services nous font part de leur sentiment d'être débordés par un certain nombre de tâches et d'avoir beaucoup d'échelons hiérarchiques au-dessus d'eux. Dans une période de baisse des effectifs et de changement des métiers, nous pouvons le comprendre. Pourriez-vous nous dire si vous travaillez à rééquilibrer l'organigramme de votre direction ?
Monsieur le directeur général, iriez-vous payer vos impôts dans un bureau de tabac ? Oui ou non ? Je poserai la même question à Monsieur le ministre !
Vous avez dit tout à l'heure que les fermetures ont lieu avec les accords des maires localement. Il se trouve que, dans le Tarn-et-Garonne, huit communautés de communes sur neuf ont délibéré à l'unanimité pour dire non aux fermetures de trésoreries. Pourtant, votre ministre a signé un accord visant à fermer la quasi-totalité des trésoreries, sauf trois. Je pense que les élus locaux doivent être respectés. Quand ils disent non, c'est non. Monsieur le directeur général, je sais bien que vous êtes là pour appliquer les décisions qui sont prises par le gouvernement – ce qui est logique – mais vous ne pouvez pas dire que cela ne se fait qu'avec l'accord des élus locaux, parce que je peux vous citer le cas du Tarn-et-Garonne : c'est faux.
Pourriez-vous vous engager à nous donner les effectifs département par département, au 31 décembre 2018 et au 31 décembre 2019, de tous les agents qui sont dans les trésoreries ? Nous souhaitons voir cette évolution au fil des ans, de façon très précise, y compris pour les agents qui vont avoir vocation à tourner dans les différentes implantations de France Service.
Enfin, vous avez indiqué qu'il n'y avait plus de services payants ou, en tout cas, que vous aviez réduit la part des services payants pour les collectivités territoriales. Il faudrait quand même préciser qu'en contrepartie, les variables d'ajustement sont prélevées de 25 millions d'euros. Cela signifie que ce sont les communes pauvres qui paient puisque ce sont elles qui touchent les variables d'ajustement. Quand on prend sur les variables d'ajustement, on rend plus pauvres les communes qui sont déjà les plus pauvres.
Je voudrais ajouter qu'un certain nombre de services demeurent payants. Par exemple, des élus ont souhaité obtenir un état pour revoir l'évolution des bases dans leur commune et on m'a indiqué que ce service coûtait 600 à 700 euros pour une commune. Je souhaiterais que vous précisiez cela. Je sais que notre collègue Jean-René Cazeneuve doit conduire une mission pour établir la liste de l'ensemble des services payants.
Je voudrais simplement faire une réflexion générale en marge de nos débats. Au moment où l'État déploie des maisons France Service, il serait satisfaisant d'arrêter de vider nos communes de leur substance, de leurs compétences, parce que le premier guichet de proximité de la République se trouve là.
Il y a eu beaucoup de questions sur l'évolution du réseau et la montagne ardéchoise est concernée au premier chef. Je voudrais profiter de notre échange pour vous dire que, sur ces toutes ces questions, il faut vraiment être à l'écoute des élus locaux et respecter leur point de vue, ce qui n'est malheureusement pas toujours le cas.
Sur le numérique, je crois qu'il faut appliquer un principe qui pourrait être une maxime pour l'administration française : dire oui à une société connectée mais non à une société déshumanisée. Les Français veulent de la proximité et cela passe par la présence physique d'hommes et de femmes sur le terrain. C'est vrai pour la DGFiP comme pour tant d'autres services publics.
Ma question portera sur la multiplication des mails et des appels frauduleux. On constate une augmentation des arnaques qui usurpent l'identité de votre administration et de ses agents. Cela prend la forme de renvoi d'appel à des numéros surtaxés ou de tentatives de fraude à la carte bancaire avec la promesse d'une réduction d'impôt. D'ailleurs les escrocs n'ont peur de rien. J'ai reçu moi-même ce week-end, sur ma boîte de l'Assemblée nationale, ce type de mail. Je voudrais simplement savoir quels moyens vous mettez en oeuvre pour contrer ces pratiques frauduleuses et protéger les usagers.
Je voulais vous interroger sur les transferts de compétences portant sur les recouvrements de la direction générale des douanes et droits indirects (DGDDI) vers vos services à compter du 1er janvier 2021 et, en particulier, de toutes les taxes nommées improprement « taxes yacht », qu'il s'agisse des droits de francisation ou du droit de passeport. Les rendements obtenus par ces taxes n'ont pas été à la hauteur des espérances de l'ancien rapporteur général. Il est clair, lors du contrôle sur pièces et sur place que nous avons mené et dont j'ai adressé les conclusions à l'ensemble des commissaires aux finances, que le droit de passeport, en particulier, n'est absolument pas une priorité de cette direction puisque la base de données est stable depuis 2008. Nous avons même constaté des trous noirs particulièrement importants, notamment dans le département du Var, puisque malgré la présence de trois services – deux services de surveillance intérieure et un service régional d'enquête – il n'y a jamais eu de contrôles effectués dans les ports. Pourtant, dans ces ports, il semble qu'il y ait une base taxable. On a essayé de nous faire croire qu'il y avait un problème de compétence juridictionnelle – ce qui n'est pas le cas ; on a aussi essayé de nous expliquer qu'il n'y avait pas assez d'effectifs mais, avec trois services, c'est quand même un peu gênant. J'aimerais savoir ce que vous comptez faire dès que ce transfert aura eu lieu pour qu'enfin les recettes correspondantes rentrent dans les caisses de l'État comme la loi le prévoit.
Monsieur le directeur général, vous parlez d'une réorganisation territoriale et fonctionnelle. Nous l'avons tous compris – nous avons pu nous entretenir avec les directeurs départementaux des finances publiques dans chacune de nos circonscriptions –, les choix que vous faites sont stratégiques. Nous entendons bien qu'il y aura plus de proximité pour les particuliers par rapport à votre réseau actuel de trésoreries. Mais, vous le dites vous-même, il n'y aura que quelques demi-journées par semaine ou par mois et ce sera un peu compliqué pour avoir un accès.
Ce que je déplore aujourd'hui concerne le réseau des collectivités territoriales. Dans le Jura, c'est une catastrophe. Vous avez réorganisé les services pour les collectivités territoriales et cela s'est traduit par un éloignement de ces services. Il y a un vrai problème de proximité pour les collectivités territoriales, particulièrement dans une période de réorganisation et de suppression de la taxe d'habitation. Vous avez parlé d'efforts considérables en matière de moyens mis en oeuvre pour assurer une communication dématérialisée. Le problème est que tous les territoires ne sont pas connectés et tous les gens ne peuvent pas être connectables pour différentes raisons.
Monsieur le directeur général, je comprends parfaitement les deux mouvements que vous avez décrits et initiés. J'encourage les autres ministères à suivre l'exemple du premier, le fait de faire bouger des effectifs des métropoles vers les villes moyennes. Je comprends aussi que, face à la dématérialisation, vous soyez dans une logique de fermeture de trésoreries pour augmenter le nombre de points de contact, mais vous savez que c'est un point extrêmement sensible dans les territoires ruraux. Cela a été dit par de très nombreux collègues et je crois qu'il faut absolument tenir nos engagements en matière de nombre de points de contact.
Pouvez-vous être plus précis sur l'état des chartes départementale : combien de départements aujourd'hui ont-ils signé ces chartes ? Quelle échéance vous est donnée pour signer avec ces départements et que se passe-t-il en cas de refus de signature du département ?
Deuxième question, qui a été également posée par un de nos collègues : pourquoi ne pas apporter un peu de transparence et nous présenter l'évolution des effectifs ? Ce n'est pas spécifique à la DGFiP. Je pense que, de manière générale, nos concitoyens devraient connaître le nombre de fonctionnaires des trois grandes fonctions publiques présents dans les territoires.
Troisième et dernière question : n'y a-t-il pas, au sein de Bercy, d'autres services qu'il faudrait projeter dans ces maisons France Service ? Je pense, en particulier, à la défense des consommateurs, avec la direction générale de la concurrence et de la répression des fraudes (DGCCRF).
Monsieur le directeur général, j'ai une première question qui concerne la formation des personnels. Nous avons évoqué plusieurs fois les relations entre les maisons France Service et les mairies. Peut-on imaginer de former un personnel un peu hybride qui serait à la fois fonctionnaire territorial et conseiller de la DGFiP ? Nous avons eu cette expérience en matière d'agence postale communale, où nous avions un personnel qui dépendait de La Poste tout en ayant en même temps un statut de fonctionnaire territorial. Y a-t-il une réflexion sur ces nouveaux métiers ?
J'ai une autre question concernant l'article 154 de la loi de finances pour 2020 : malgré sa censure partielle, l'administration travaille-t-elle à la rédaction d'un texte d'application ?
Monsieur le directeur général, je souhaite apporter d'abord un témoignage. Je crois que nous étions tous d'accord pour dire que le réseau avait besoin d'adaptations, par rapport à la numérisation et à la fin d'un certain nombre d'activités, notamment la suppression de la taxe d'habitation. Mais, en réalité, la concertation ne s'est absolument pas passée comme vous l'indiquez. Dans mon territoire, en Savoie, on nous a fait des propositions de suppression de services des impôts aux entreprises, dans une vallée qui est la plus longue vallée des Alpes, dans un territoire qui accueille le grand chantier Lyon-Turin, qui est un territoire d'industries. Il a fallu se battre pour que le DDFiP abandonne cette position. Cette concertation ne s'est malheureusement pas passée comme elle nous avait été annoncée. Elle nous a demandé beaucoup d'énergie, beaucoup de mobilisation auprès des ministres pour que nous retrouvions des décisions de bon sens, tout simplement, pour le service aux entreprises, également pour avoir un niveau de contrôle acceptable comme l'a dit ma collègue Émilie Cariou.
Ma question est la suivante : quelle est la stabilité de cette organisation qui a été arrêtée et déterminée ? Nous aimerions que cela ne change pas dans les années à venir.
Deuxième question : un certain nombre de trésoreries ont été fermées, rarement en accord avec les communes. Nous pouvons comprendre qu'une rationalisation soit nécessaire. Toutefois, ces trésoreries assuraient aussi un conseil aux particuliers. La maison France Service apparaît comme l'alpha et l'oméga pour répondre à toutes ces questions, mais je remarque que les maisons France Service constituent un transfert de charge aux communes, puisque l'État apporte seulement 30 000 euros à la commune par maison France Service. On transfère donc une charge, en matière de conseil, de service des impôts, aux communes qui devront assumer notamment l'accueil des personnels bien évidemment mais aussi la gestion. Par ailleurs, vous l'avez dit, nous ne savons pas très bien qui sera dans ces maisons France Service : nous ne savons pas si des agents du réseau seront présents. Si c'est le cas, c'est très bien, mais si ce ne l'est pas, quelle sera la qualité du conseil apporté par ces personnes en ce qui concerne les impôts ?
Monsieur le directeur général, je vais vous mettre un peu de baume au coeur, parce que j'ai entendu beaucoup de critiques. Dans mon département, cela se passe bien. Nous avons déjà des maisons France Service : dans ma circonscription, j'ai déjà trois maisons France Service, dont une qui est itinérante, et la préfecture d'Agen a été choisie pour accueillir un service de la DGFiP, qui reste à préciser. Agen n'est pas une grande métropole : elle compte 35 000 habitants.
Je souhaite vous poser deux questions. Quelles vont être exactement les critères de « démétropolisation » ? Quand saurons-nous le nombre de personnes concernées et quand connaîtrons-nous l'organisation qu'il va falloir mettre en place pour les accueillir?
On demande maintenant aux contribuables d'avoir une adresse mail pour les impôts. Je sais bien qu'on peut encore avoir un service papier et je crois que vous allez le maintenir. Jusqu'à quand le maintiendrez-vous, puisque ce service est quand même performant ? Comme cela a déjà été dit, cela pose aussi le problème de la confidentialité, parce qu'on demande, à défaut, de passer par l'adresse mail d'un tiers de confiance, ce qui est toujours un peu problématique.
Dans le Valenciennois, il y a sept trésoreries menacées de fermeture dans les communes d'Anzin, Bouchain, Condé-sur-l'Escaut, Douchy-les-Mines, Saint-Amand-les-Eaux, Trith-Saint-Léger, et Valenciennes. Il n'en restera qu'une dans un arrondissement de 250 000 habitants. La seule question que je souhaite vous poser est la suivante : si les communes délibèrent unanimement contre la fermeture de ces trésoreries, vous engagez-vous à les maintenir ?
Monsieur le directeur général, je voudrais moi aussi me placer du côté des usagers. Nous savons que les usagers qui doivent payer leurs impôts, leur loyer HLM ou encore leur facture d'hôpital ont à leur disposition des moyens de paiement qui évoluent. On connaît les moyens de paiement traditionnels : les espèces, le chèque, le virement. Je pense également à des moyens de paiement très innovants comme l'instant payment, qui permet, grâce à un « QR code » placé sur une facture, de payer cette facture avec un téléphone. Vous avez évoqué tout à l'heure l'action en direction des buralistes. J'ai trois questions à vous poser. La première : quelle est votre stratégie s'agissant des moyens et des modalités de paiement qui accompagnent votre démarche de proximité ? Deuxième question : comment allez-vous évaluer la satisfaction des usagers concernant ces différentes modalités de paiement ? Troisième question : la DGFiP participe-t-elle à la mise en place du nouveau service appelé « Aidants Connect » qui vient d'être installé ? Ce service permet à un aidant professionnel de réaliser les démarches administratives en ligne à la place d'une personne n'y parvenant pas à seule.
J'avais beaucoup apprécié la circulaire Darmanin qui était assez ambitieuse. Au début, dans le département des Côtes-d'Armor, nous avons eu des soucis, parce que le directeur départemental n'avait pas tout compris. Nous nous sommes expliqués et cela se termine bien : nous progressons ! Quelques questions se posent tout de même. Nous allons obtenir une décentralisation de services nationaux, voire régionaux. Par contre, je ne vois aucun service départemental basé à Saint-Brieuc aller vers la périphérie départementale. C'était pourtant clairement dans la circulaire !
Deuxièmement, où vont s'installer les conseillers aux décideurs locaux ? Nous allons en avoir dix-huit dans le département. Les trésoreries de base disparaissent, et il ne faut surtout pas localiser ces conseillers dans les maisons France Service puisqu'ils n'ont pas de relations avec les particuliers mais des relations avec des élus. C'est très important. Je compte beaucoup sur eux car je vois beaucoup de collectivités qui sont allées, pour la gestion de leur dette en particulier, vers des conseils privés, plus ou moins bons, alors que c'était naguère la tâche du réseau de votre ministère.
J'ai une autre question. Actuellement, selon mes informations, il y a une tolérance pour les contribuables qui réalisent une déclaration papier ou un paiement par chèque : ces contribuables ne sont pas pénalisés. Cette tolérance va-t-elle demeurer ? Je le souhaite parce qu'il y a un certain nombre de gens pour lesquels faire autrement se heurte à des obstacles de natures diverses.
Enfin, le prélèvement à la source poursuit son développement. Il concernera en 2020 les particuliers employeurs pour leurs salariés, notamment les assistantes maternelles. Je voudrais insister sur le problème que cela pose : les assistantes maternelles ont par définition plusieurs employeurs, parfois des dizaines en trois ou quatre ans. Par conséquent, leur taux d'imposition et donc de fait leurs revenus sont dans le domaine public. C'est une difficulté. Je crois que ce n'était pas la logique du prélèvement à la source que de rendre publics les revenus de ces familles.
Ma première question concerne l'externalisation des services. Il y avait eu un début de discussion avec La Poste pour qu'il y ait un accompagnement pour les déclarations d'impôts. Est-ce toujours à l'état de réflexion ?
Ma deuxième question concerne la fiscalité écologique. Dans la loi de finances pour 2020, nous avons voté le transfert du recouvrement de la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) à la douane. Il y a donc un début de réflexion et de réorganisation en matière de fiscalité écologique. Y a-t-il également une réflexion interne à vos services pour rendre plus lisible cette fiscalité écologique, à travers les services qui sont concernés par celle-ci ? Du point de vue des compétences des agents, y a-t-il des formations particulières ? Au sein du ministère, des réflexions sont-elles menées pour une montée en compétences, de façon à ce que nous puissions faire de la fiscalité écologique non plus un débat idéologique mais quelque chose qui nous permette de faire avancer la transition ?
Ma question porte sur le plan de redéploiement du réseau de la direction générale des finances publiques et ses conséquences pour l'accessibilité du service public des impôts. Les évènements récents ont démontré l'importance que revêtent les services publics du quotidien dans le maintien du lien social et de la confiance entre les citoyens et leur État. À ce titre, le projet de réimplantation territoriale de la DGFiP prévoit deux objectifs qui pourraient paraître contradictoires et j'aimerais en connaître les modalités opérationnelles. D'une part, l'objectif affiché est de renforcer la présence de vos services. D'autre part, dans le cadre de la réforme de l'État prévue par le programme Action publique 2022, sont prévues la fermeture de certaines trésoreries et la suppression de certains postes. Enfin, il est précisé que certains services seront désormais fournis par des fonctionnaires territoriaux ou des contractuels.
Comment comptez-vous concilier la réduction des effectifs et le développement de la présence des services fiscaux dans nos territoires ? Enfin, quelle sera la formation des fonctionnaires territoriaux et autres agents polyvalents qui seront chargés de certains services fiscaux ?
Pouvez-vous, monsieur le directeur général, nous faire une présentation du recrutement à venir des agents ? En particulier, disposez-vous de nouveaux leviers de recrutement grâce à la loi de transformation de la fonction publique ? Ces leviers vous permettent-ils de mieux remplir vos missions ?
Je vais d'abord répondre aux questions relatives aux sujets de proximité et de confidentialité. Lors du paiement au sein des débits de tabac, la seule chose qui est vue est un « datamatrix » – ces petits carrés que vous connaissez, et que l'on a par exemple sur les billets de train. Il n'y a rien d'autre. S'il y a un délai de paiement à négocier, ce sont les services fiscaux qui restent compétents, et ces informations restent au sein des services fiscaux. Il ne faut pas s'inquiéter quand on entre dans un bureau de tabac pour payer : il n'y a pas de risque de non-confidentialité. Pour ma part, je paie effectivement plutôt en dématérialisé, mais si je payais en liquide je n'aurais aucune hésitation à le faire chez un buraliste.
L'organisation peut évoluer d'un débitant de tabac à l'autre, mais le plus souvent, le « flashcode » ou « datamatrix » est lu par une douchette et aucune autre information ne transparait.
Nous sommes d'ailleurs extrêmement attentifs à tous les sujets de protection. Il y a beaucoup de tentatives d'escroqueries et nos systèmes d'information sont de plus en plus massifs et gèrent de plus en plus de données. Nos données sont protégées et cela suscite la confiance. Il faut que nous arrivions à assurer cette sécurité dans la durée.
Nous subissons des dizaines d'attaques par jour, comme toute organisation. Certains de nos services sont montés en puissance récemment, pour mieux lutter contre ces tentatives d'intrusion : nous avons ainsi mis en place un centre opérationnel, qui surveille et supervise très finement ces sujets. Par ailleurs, nous luttons contre les tentatives d'arnaques. Nous essayons de faire le maximum de communication sur ce problème, par le biais de communiqués de presse, à chaque fois que nous observons de telles situations. Par exemple, les escrocs peuvent tenter de récupérer un numéro fiscal, essayer de vous faire payer ou de vous demander un numéro de carte bleue, en s'abritant derrière un faux site « impots.gouv », qui ne se termine pas par « .fr » !
Il est vrai que l'activité de la DGFiP a augmenté. Toutefois, et cela répond à plusieurs questions qui ont été posées, nous réalisons un travail important sur les sujets de process : nous nous interrogeons sur la meilleure manière de réorganiser ces process, d'utiliser les technologies modernes telles que l'assistant numérique. La DGFiP est une immense maison de grands processus métier. Nous pouvons arriver à gagner en productivité sur ces processus pour pouvoir redéployer du personnel. C'est ce que nous faisons dans le cadre de la réforme : préserver l'accueil de proximité et le conseil personnalisé aux décideurs locaux pour gagner en productivité sur les processus métier.
Je voudrais vous rassurer par rapport à ce qui a été dit sur l'éloignement du comptable public vis-à-vis des collectivités locales. D'abord, le conseil aux décideurs locaux n'a pas vocation à être hors sol ni positionné très loin du décideur : il a vocation à être au siège de l'EPCI. Sa localisation précise fait l'objet de discussions. Nous ne souhaitons pas opérer de transfert de charge vis-à-vis des collectivités.
Nous avons pour l'instant décidé très peu de fermetures de trésoreries en 2020 : une seule trésorerie a pour l'instant été transformée en maison France Service. Chaque fois que nous pourrons utiliser des bâtiments existants, nous le ferons naturellement.
Le ministre et moi-même avons demandé aux directeurs départementaux des finances publiques d'aller au contact des collectivités au cours des derniers mois : nous leur avons demandé d'être en permanence en discussion et à l'écoute de l'ensemble des collectivités. Nous n'avons pas fini la concertation, même si elle a abouti dans un certain nombre de départements. Nous avons choisi de signer avec les présidents de conseils départementaux, parce qu'ils sont responsables du schéma d'organisation des services publics. Nous aurions pu faire un autre choix, mais nous avons choisi cette modalité : à partir du moment où un président de conseil départemental accepte de signer, nous n'allons pas le lui refuser, puisque c'est la méthode que nous avons choisie ! Je ferai remarquer que, dans le Tarn-et-Garonne, aucune fermeture n'est prévue en 2020, et il y a même sept conseillers de proximité dont six qui vont s'implanter dans des maisons. Nous allons faire une expérimentation de ce qu'est l'accueil de proximité, avant même toute fermeture de trésorerie dans ce département : il va y avoir du service en plus dans ce territoire.
Concernant la projection des effectifs, département par département, nous pouvons vous la fournir sans difficulté.
La concertation n'est pas encore terminée. En Savoie, par exemple, nous n'avons pas encore signé de charte. Je ne souhaite pas, à ce stade, préempter la situation que nous aurons lorsque nous aurons poursuivi la concertation. Les travaux vont se poursuivre, y compris après les élections municipales, et nous ferons le point cet été. Les négociations peuvent parfois conduire à un rapport de force, comme le disait Monsieur Le Fur, mais nous essayons d'être à l'écoute et de trouver un consensus. Ce consensus n'est pas toujours absolu. Nous cherchons une forme de consensus majoritaire, comme le disait il y a quelques jours le signataire d'une charte : nous essayons de trouver un modus vivendi qui permette à l'administration fiscale d'évoluer dans le sens de la rationalisation, afin de mieux desservir le territoire de façon précise, sans accroître les fractures numériques.
Nous faisons partie de l'expérimentation sur les aidants. C'est bien pour cela que nous essayons de maintenir un service multi-canal ainsi qu'un accueil physique. Demain, nous irons peut-être chez les gens pour les aider. Lors des campagnes de déclaration d'impôts, nous accueillons les contribuables, nous mettons à disposition des ordinateurs en libre-service et des agents aident les contribuables à se connecter au site impôts.gouv.fr et à les accompagner dans leurs démarches. Tout n'est pas parfait, mais ce sujet est pour nous une préoccupation importante.
Concernant le paiement non dématérialisé, la loi prévoyait des sanctions, que nous n'avons jusqu'à présent pas mises en oeuvre. Je pense que nous allons encore attendre un peu. Certes, il n'est jamais satisfaisant de ne pas appliquer complètement la loi votée, mais nous essayons de trouver les moyens de faire en sorte que cette transition se passe naturellement.
Nous sommes présents dans les deux tiers des villes entre 10 000 et 100 000 habitants : l'administration fiscale n'est donc pas une administration de métropole, loin de là ! Nous allons renforcer la « démétropolisation ». Ce sujet est réellement un sujet social. Nous avons rencontré un fort mécontentement à l'égard des projets qui consistaient à éloigner les agents des métropoles, car c'est là qu'ils avaient leurs centres d'intérêts économiques. Ces agents vivaient même très mal le fait de s'éloigner à trente ou quarante kilomètres des métropoles. Les agents et les organisations syndicales nous disaient que nous allions contribuer à accroître la congestion urbaine, parce que les agents allaient multiplier les aller-retours pour travailler à trente ou quarante kilomètres de la métropole. Au cours de la phase de concertation, nous avons revu notre ambition à la baisse, tout en maintenant totalement nos objectifs de « démétropolisation » de 2 500 agents, afin de prendre en compte ce mécontentement.
En ce qui concerne le calendrier de la « démétropolisation », des groupes de travail ont été constitués avec les organisations syndicales, métier par métier, pour déterminer la façon dont ces métiers vont évoluer et se réorganiser. Nous avons ainsi créé un groupe de travail concernant le service d'appui à la publicité foncière que j'ai déjà évoqué. À partir de là, nous travaillons à une définition du service nouvellement créé, en nous attachant notamment à tenir compte des compétences déjà présentes sur le territoire ou dans une métropole proche pour faciliter le transfert. Nous avons pris en compte des critères socio-économiques et des critères de taille. Peu de grandes villes sont concernées : la plus importante compte 130 000 habitants ! Nous avons également pris en compte des critères d'équilibre du territoire, en essayant de mailler le territoire, plutôt que de tout regrouper à certains endroits. Nous essayons de prendre en compte naturellement les conditions de vie des agents et les conditions d'accueil. Cela a été fait en transparence avec les organisations syndicales, qui ont souligné l'importance des changements et des transformations.
Le déroulement de ce projet a fait l'objet de peu de critiques majeures. Actuellement, pour les premières villes qui ont été désignées, nous sommes en train de prendre contact avec les maires, y compris pour bien visualiser le lieu d'accueil immobilier du nouveau service. Quand nous serons plus avancés dans la concertation avec les organisations syndicales et que nous connaîtrons les autres collectivités concernées, nous passerons alors à une phase de discussion, portant notamment sur le calendrier d'implantation des services. Comme nous voulons le faire sans mobilité forcée, ce sera forcément un processus progressif, sur plusieurs années, mais ce n'est pas gênant.
Concernant le sujet des agents comptables des collectivités territoriales, qui a été évoqué tout à l'heure par Charles de Courson, nous avions proposé une expérimentation dans la loi de finances pour 2019. Cette expérimentation consistait à avoir des agents comptables dans les collectivités et à localiser les activités comptables au sein de la collectivité, sous la forme d'une agence comptable. Cette expérimentation n'a pas reçu d'accueil favorable de la part des collectivités : nous avons reçu tellement peu de demandes que nous y avons renoncé. L'arrêt de cette expérimentation a été voté en loi de finances pour 2020. Je ne suis donc pas sûr que les collectivités et l'État soient mûrs pour aller vers des statuts intermédiaires : je pense que nous allons en rester à la situation actuelle.
Ce que nous demandent les collectivités aujourd'hui, c'est plutôt de reprendre et d'optimiser la fonction financière au sein de l'État, avec des services facturiers et des centres de gestion financière qui font l'ensemble des activités financières, mais côté État plutôt que côté collectivités territoriales.
Sur le sujet du droit annuel de francisation et de navigation (DAFN) et du droit de passeport, effectivement, un transfert est prévu pour le DAFN le 1er janvier 2022. En fin d'année dernière, le comité interministériel de la mer (CIMER) a décidé que la DGFiP prendrait à sa charge le recouvrement mais que la direction des affaires maritimes, qui immatricule déjà les bateaux, resterait compétente en matière de liquidation et de contrôle. Deux questions différentes se posent : la première porte sur les montages, pour mieux appréhender ce qui est assujetti au droit de passeport, la seconde porte sur l'organisation, puisqu'en réalité, du fait des systèmes de location, nous n'arrivons pas toujours à appréhender correctement la situation.
Les innovations technologiques peuvent nous permettre de travailler sur ce sujet : par exemple, grâce au foncier innovant, nous voyons la totalité du cadastre avec des outils d'aide à la décision automatisés. Ces outils sont des processus qui font gagner beaucoup de temps de visualisation. S'il existe un bâtiment qui n'était pas sur le plan cadastral, la photo aérienne ou la photo satellitaire le visualise et le système le marque en rouge. Je me suis aperçu que ce système fonctionnait aussi pour les bateaux : quand vous photographiez un port, vous pouvez lire jusqu'au numéro d'immatriculation du bateau. On peut imaginer que cette technologie permettra d'aider à réaliser des opérations de contrôle.
Sur les modalités de paiement, l'idée est également de rester multi-outil. Nous avons cherché à « sortir le cash » de la DGFiP, mais cela ne veut pas dire que nous abandonnons le paiement en espèces : ce mode de paiement est de fait bien présent aujourd'hui, avec les buralistes. Nous avons lancé un deuxième appel d'offres sur les régies des collectivités locales, qui n'est pas encore finalisé, mais nous allons être probablement amenés à démultiplier les outils de paiement, avec à la fois des outils modernes et des outils plus anciens. Nous disposons d'une application, PayFiP, qui fonctionne plutôt bien mais qui ne couvre pas forcément l'ensemble des usagers : nous allons être amenés à avoir une stratégie plus complète sur ces outils.
Concernant l'article 154 de la loi de finances pour 2020, le Conseil constitutionnel a prononcé une censure très partielle : il nous a laissé un champ important pour une expérimentation, qui va se dérouler durant trois ans. Les travaux sur les textes d'application se poursuivent, et nous les soumettrons au Conseil d'État et à la CNIL. Dans les prochains mois, nous allons rester à l'intérieur de ce cadre-là. Nous allons nous attacher à démontrer que les contrôles que nous faisons sont suffisants, proportionnés par rapport aux finalités, y compris celles qui sont demandées par le Conseil constitutionnel, que nous avons mis en place les moyens adéquats, que nous avons prévu toutes les garanties vis-à-vis des données des usagers. Une fois que nous aurons fait la démonstration que nous sommes au point sur l'utilisation de ces données, nous pourrons envisager de passer à une nouvelle phase.
Comme je l'ai évoqué dans une tribune, il est extrêmement important pour les administrations publiques de pouvoir tester des choses de cette nature-là. Je reconnais que je ne suis pas certain de la performance des résultats que nous obtiendrons. Je sais en revanche que, si nous ne changeons pas nos méthodes de travail et nos outils, nos capacités juridiques d'intervenir, les fraudeurs prendront du champ, ils prendront le large et nous resterons à quai !
La fiscalité écologique est un sujet sur lequel nous devons travailler. Il sera sans doute plus facile pour nous de structurer notre approche une fois que les transferts seront faits. La DGFiP va récupérer le recouvrement de nombreuses de taxes écologiques, mais je crois que ce sont des sujets qui impliquent à la fois des travaux sur le budget vert – donc des travaux sur la fiscalité verte – et des travaux sur la manière de mettre en place cette fiscalité. Ce sont des chantiers d'ampleur ; nous ne sommes pas encore totalement prêts et ces sujets exigent une forte mobilisation de notre part dans les années à venir.
Informations relatives à la commission
La commission a désigné Mme Stella Dupont comme rapporteure spéciale des crédits de la mission Immigration, asile et intégration, conjointement avec M. Jean-Noël Barrot.
Membres présents ou excusés
Réunion du mercredi 19 février 2020 à 10 heures
Présents. – M. Julien Aubert, M. Jean-Noël Barrot, Mme Émilie Bonnivard, M. Fabrice Brun, Mme Émilie Cariou, M. Gilles Carrez, M. Jean-René Cazeneuve, M. François Cornut-Gentille, M. Charles de Courson, Mme Marie-Christine Dalloz, M. Olivier Damaisin, Mme Jennifer De Temmerman, M. Benjamin Dirx, M. Jean-Paul Dufrègne, Mme Stella Dupont, M. Bruno Duvergé, Mme Sarah El Haïry, Mme Sophie Errante, M. Olivier Gaillard, M. Joël Giraud, Mme Nadia Hai, M. Patrick Hetzel, M. Christophe Jerretie, M. François Jolivet, M. Daniel Labaronne, M. Michel Lauzzana, M. Vincent Ledoux, M. Marc Le Fur, Mme Patricia Lemoine, Mme Marine Le Pen, Mme Véronique Louwagie, Mme Marie-Ange Magne, Mme Lise Magnier, M. Jean-Paul Mattei, Mme Cendra Motin, Mme Catherine Osson, M. Hervé Pellois, Mme Bénédicte Peyrol, Mme Christine Pires Beaune, M. Benoit Potterie, Mme Valérie Rabault, M. Robin Reda, M. Xavier Roseren, M. Fabien Roussel, Mme Sabine Rubin, M. Laurent Saint-Martin, M. Jacques Savatier, Mme Marie-Christine Verdier-Jouclas, M. Éric Woerth
Excusés. – M. Damien Abad, Mme Anne-Laure Cattelot, M. Nicolas Forissier, M. David Habib, M. François Pupponi, M. Olivier Serva
Assistaient également à la réunion. – M. Jean-Louis Masson, M. Jean-Luc Warsmann