La commission entend MM. Bruno Le Maire, ministre de l'économie, des finances et de la relance et Olivier Dussopt, ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la relance, chargé des comptes publics, sur le projet de loi de finances pour 2022 (sous réserve de son dépôt)
Mes chers collègues, nous accueillons M. Bruno Le Maire, ministre de l'économie, des finances et de la relance, et M. Olivier Dussopt, ministre délégué chargé des comptes publics, pour qu'ils nous présentent le projet de loi de finances (PLF) pour 2022, adopté ce matin par le Conseil des ministres. Avec cette audition, qui suit celle, ce matin, du président du Haut Conseil des finances publiques (HCFP), nous entamons le long parcours d'examen des textes budgétaires.
La première partie du projet de loi de finances, la partie fiscale, sera examinée en commission mardi 5 octobre et mercredi 6 octobre. Le délai de dépôt des amendements expirera le jeudi qui précède, soit jeudi 30 septembre, à 17 heures. Ce délai est le plus confortable de la législature, le projet de loi de finances n'ayant jamais, depuis cinq ans, été présenté aussi tôt dans l'année.
En séance publique, la discussion de la première partie commencera lundi 11 octobre et s'achèvera le 18 octobre, ce jour étant celui du débat sur le prélèvement sur recettes au profit de l'Union européenne, en vue d'un vote solennel sur l'ensemble de la première partie mardi 19 octobre, après les questions au Gouvernement.
L'examen de la seconde partie en commission des finances commencera mardi 19 octobre et durera jusqu'au vendredi 22 octobre. La commission se saisira ainsi successivement des missions inscrites à l'ordre du jour de la séance publique à compter du lundi 25 octobre. Je rappelle qu'aucune audition de ministre n'est prévue, car nous avons auditionné ceux-ci dans le cadre du Printemps de l'évaluation, conformément au choix que nous avons fait en accord avec le bureau de l'Assemblée. Nous examinerons les articles non rattachés mercredi 3 novembre et jeudi 4 novembre, en vue d'un examen en séance publique à partir du mercredi 10 novembre.
Le vote solennel sur l'ensemble de la première lecture du projet de loi de finances pour 2022 aura lieu mardi 16 novembre. La commission pourrait être amenée à siéger un samedi, comme l'an dernier, en fonction des circonstances. En outre, deux lundis matin seront consacrés à l'examen des crédits en séance publique.
Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, je suis très heureux de vous retrouver pour la présentation du cinquième projet de loi de finances du quinquennat du Président de la République Emmanuel Macron. J'espère que vous n'êtes pas trop lassés de me voir effectuer cet exercice devant vous – mais nous en reparlerons lorsque nous entamerons le prochain quinquennat, et que nous serons tous repartis pour cinq ans dans un exercice de stabilité sans précédent sous la Ve République.
Quelles sont les lignes de force suivies par cette majorité, depuis le début du quinquennat, en matière de budget et de finances publiques ? La maîtrise des comptes publics, la baisse des impôts et la sincérité.
S'agissant de la maîtrise des comptes publics, j'entends çà et là des critiques, qui sont bien naturelles en démocratie. Il est bon que la majorité réponde, et rappelle au bon souvenir de chacun que nous sommes la majorité qui a sorti le pays de la procédure pour déficit excessif en 2018, que nous sommes la majorité qui a rétabli les comptes publics en 2018, que nous sommes la majorité qui a engagé la baisse de la dette publique, laquelle ne cessait d'augmenter depuis 2008 et avait crû de 30 points de PIB, et que nous sommes la majorité qui a engagé la plus importante réduction d'impôts depuis vingt ans.
Le rétablissement des comptes publics opéré de 2017 à 2019 n'est pas tombé du ciel. Il est le fruit de décisions courageuses, dont la majorité doit être fière, d'autant qu'elles ont été controversées quand elles ont été prises, au motif qu'elles étaient trop dures, alors qu'on nous reproche à présent exactement le contraire. Nous avons supprimé les contrats aidés, pour 2 milliards d'euros. Nous avons réduit les dépenses des chambres de commerce et d'industrie, pour un demi-milliard d'euros. Nous avons engagé la réforme d'Action Logement. Toutes ces décisions courageuses prises par la majorité nous ont permis de parvenir à ce résultat. Ce n'est pas la conjoncture qui a fait la réduction des déficits, c'est la politique du Gouvernement. Ce n'est pas la conjoncture qui nous a permis de revenir sous le chiffre de 3 % de déficit public, ce sont des choix courageux de réduction des dépenses.
Dans un deuxième temps, certes, nous avons fortement augmenté la dépense publique, parce que nous étions confrontés à la crise la plus grave que la France a eu à connaître, en matière économique, depuis 1929. C'est un choix politique revendiqué. Nous avons utilisé la dépense publique à bon escient, pour protéger les salariés et les entreprises. Je le dis à ceux qui multiplient les propositions d'augmentation des dépenses publiques – certains voulant nationaliser les autoroutes pour 40 milliards d'euros, d'autres augmenter de 10 % les salaires aux frais de l'État pour 25 milliards, d'autres encore doubler le salaire des enseignants pour 50 milliards : tout cela me semble très décalé par rapport à la situation, et ne constitue pas à mes yeux une utilisation à bon escient de l'argent public, à l'inverse de ce que nous avons fait pendant la crise.
Enfin, en 2022, nous reviendrons progressivement à la normale. Nous réduisons le déficit public de 8,4 % à 4,8 % du PIB, nous ramenons le niveau de la dette publique de 116 à 114 points de PIB et nous présentons un projet d'amortissement de la dette covid sur vingt ans.
La deuxième ligne de force, que l'on retrouve dans le présent projet de loi de finances, c'est la baisse des impôts, à hauteur de 50 milliards d'euros, soit la plus forte en France depuis vingt ans, répartie à parts égales entre les ménages et les entreprises. Elle inclut la réduction de 5 milliards d'euros de l'impôt sur le revenu, la suppression de la taxe d'habitation (TH) et le début de la baisse des impôts de production – d'ailleurs, je me réjouis de constater que chacun, à présent, trouve des vertus à celles-ci ; certains en parlent, nous, nous le faisons. Quant à la trajectoire de baisse de l'impôt sur les sociétés (IS), nous l'avons tenue. Nous avions promis que toutes les entreprises seraient soumises à un taux d'impôt sur les sociétés de 25 % en 2022. Ce projet de loi de finances concrétise cette promesse : toutes les entreprises, sans exception, ont rejoint la moyenne européenne de l'impôt sur les sociétés, soit 25 %.
Tout cela nous permet de parvenir à un taux de prélèvements obligatoires de 43,5 % en 2022, le plus bas depuis dix ans, mais qui nous permet uniquement de rejoindre la frange supérieure de la moyenne européenne. C'est pourquoi je considère que, dans notre pays, les augmentations d'impôts sont une impasse et que nous devons tenir la ligne de réduction des impôts des Français, pour nous rapprocher de la moyenne européenne et garantir leur niveau de vie.
La troisième ligne de force, c'est la sincérité budgétaire, qui consiste à dire que chaque euro dépensé doit être financé, et à reconnaître, comme Olivier Dussopt et moi-même l'avons fait, que deux objets ne figurent pas dans le projet de loi de finances qui vous est présenté. Le premier, c'est le plan d'investissement, dont l'élaboration prend du temps, consacré à la discussion et à la concertation avec les partenaires sociaux, les élus locaux, les chercheurs et les scientifiques, pour savoir où l'investissement doit être fait. Le second, ce sont les mesures pour les jeunes, dont l'absence s'explique par une raison simple : la conjoncture économique est radicalement différente de ce qu'elle était au début de l'été. Nous sommes confrontés à une pénurie de main-d'œuvre dans certains secteurs, ce qui change la donne en matière d'emploi des jeunes.
Un mot sur la conjoncture économique. La croissance revient ; elle revient partout, en Europe et aux États-Unis comme en Chine, et elle revient fortement. Dans ce contexte, la France se singularise par la puissance de sa reprise économique. Nous prévoyons 6 % de croissance pour 2021. Il y a trois mois, cette prévision aurait été jugée optimiste ; aujourd'hui, elle paraît presque prudente par rapport aux évaluations des organismes internationaux et de la Banque de France. Je maintiens néanmoins nos prévisions de croissance à 6 % pour 2021 et à 4 % pour 2022. Nous avons retrouvé le niveau de chômage d'avant-crise, nous l'avons même amélioré. Le niveau d'investissement dans les entreprises est élevé, et la consommation est dynamique.
Tout cela prouve, me semble-t-il, l'efficacité du plan de relance que nous avons mis en place – je le souligne à destination de la majorité et des membres de la commission qui l'ont aussi adopté. Tout cela prouve aussi que le « quoi qu'il en coûte » était une politique réfléchie, efficace et nécessaire, et que protéger les salariés, les compétences, les entreprises, les savoir-faire, les artisans, les commerçants et les professions libérales était bien moins coûteux que devoir réparer ensuite les dégâts de la crise économique. Ce choix de protection, par la dépense publique et l'investissement de l'État, l'histoire vient de montrer qu'il était le seul choix responsable, celui qui nous permet de retrouver rapidement de la croissance et qui nous épargne le drame du chômage de masse et celui de faillites par centaines de milliers.
Le projet de loi de finances que nous vous présentons fait un choix clair : celui de la relance et de l'investissement. Nous mettons fin au « quoi qu'il en coûte ». Le fonds de solidarité sera supprimé à partir du 1er octobre, sauf dans les départements et les territoires d'outre-mer, qui font encore l'objet de mesures sanitaires restrictives. Les dispositifs forfaitaires tels que le fonds de solidarité seront remplacés par des dispositifs sur mesure, comme le dispositif « coûts fixes ». Le premier coûte plusieurs milliards d'euros par mois, le second 150 millions. Nous accélérons le déploiement du plan de relance, déjà bien engagé, avec 50 milliards d'euros : notre objectif est d'avoir engagé 70 milliards d'euros d'ici la fin de l'année 2021. Enfin, le Président de la République présentera un plan d'investissement, dont l'objectif sera d'accélérer la réindustrialisation de la France et de garantir notre indépendance en matière de technologies clés, telles que l'hydrogène vert, l'intelligence artificielle et les semi-conducteurs.
Ce projet de loi de finances fait, en deuxième lieu, le choix clair d'un réarmement régalien. Les crédits supplémentaires prévus pour les armées – 1,7 milliard d'euros –, pour la justice – 700 millions d'euros – et pour l'intérieur, dans le cadre du Beauvau de la sécurité – 1,5 milliard d'euros – témoignent de l'engagement du Président de la République et de la majorité en faveur de la sécurité des Français et des missions régaliennes de l'État.
J'entends dire çà et là que le Président de la République, le Premier ministre et le Gouvernement multiplieraient les annonces, et qu'ils auraient, depuis plusieurs semaines, sorti le carnet de chèques et arroseraient largement les Français de dépenses publiques.
Je rappelle que toutes les dépenses annoncées par le Président de la République et par le Premier ministre l'ont été en juillet, et que M. le ministre délégué chargé des comptes publics et moi-même avons dit que les dépenses de l'État augmenteraient de 11 milliards d'euros en 2022. Toutes les mesures que je viens d'indiquer seront financées par cette augmentation. Nous avons également fait le choix de réutiliser les crédits non consommés de la mission Plan d'urgence face à la crise sanitaire pour réduire le déficit public de 2021, preuve de notre bonne gestion budgétaire, et pour financer une dépense d'urgence provoquée par l'augmentation du prix du gaz, laquelle nous a amenés, M. le Premier ministre et moi-même, à proposer un chèque énergie de 100 euros supplémentaires, pour 600 millions d'euros au total.
Si certains critiquent ces dépenses, qu'ils assument devant les Français qu'ils ne font pas le chèque énergie ! Il est trop facile d'expliquer sur les plateaux de télévision qu'il y a trop de dépenses et trop d'engagements de l'État, en niant que nous les avions annoncés depuis le début du mois de juillet, et, dans le même temps, de ne pas préciser aux Français quelles dépenses on voudrait couper. Où la hache tombera-t-elle ? Sur le chèque énergie, destiné aux Français les plus modestes ? Sur le recrutement de policiers supplémentaires ? Sur la protection des agriculteurs ? Sur les dépenses d'investissement que nous avons prévues dans les nouvelles technologies ? Sur l'assurance récolte, grâce à laquelle les agriculteurs seront enfin protégés contre les risques de perte de revenus liés aux calamités climatiques ? Que ceux qui dénoncent les dépenses excessives disent lesquelles, parmi celles que nous avons annoncées, ils retrancheraient ! L'honnêteté politique devrait, me semble-t-il, dicter ce type de réponse.
En revanche, je répète que nous avons devant nous un calendrier clair de rétablissement des finances publiques, où figurent toutes les dépenses annoncées depuis le mois de juillet, soit 11 milliards d'euros de dépenses supplémentaires, ainsi que les 8 milliards d'euros du Plan d'urgence, dont la quasi-intégralité sera consacrée à la réduction du déficit public. Y figurent également un calendrier de retour de celui-ci sous 3 % d'ici 2027 et un amortissement de la dette covid d'ici à 2042, sur vingt ans.
Les instruments pour le rétablissement des finances publiques, vous les connaissez. Nous refusons d'utiliser celui auquel ont constamment recouru les gouvernements précédents, toutes majorités confondues, qui est l'augmentation des impôts. Nous lui préférons l'accélération de la croissance, la poursuite des réformes de structure, telles que celle de l'assurance chômage au 1er octobre de cette année, et la pluriannualité des dépenses publiques, telle qu'elle a été proposée par Laurent Saint-Martin et par le président de votre commission, Éric Woerth, et dont j'estime qu'elle devra, le moment venu, prendre un caractère constitutionnel, pour nous permettre de faire de véritables choix démocratiques en matière de dépenses.
Je commencerai par dire le plaisir que j'ai à vous retrouver au début de ce marathon budgétaire, dans la perspective des heures de séance publique que nous aurons à passer ensemble pour examiner le projet de loi de finances pour 2022. Celui-ci a pour objectif de traduire nos orientations et les stratégies en matière de finances publiques et économique que nous avons mises en œuvre depuis le début du quinquennat et pour répondre à la crise.
J'évoquerai trois points.
D'abord, le budget, tel que nous vous le présentons, tient les engagements du Président de la République et du Gouvernement. Il permet un réarmement des fonctions régaliennes. Nous respectons et mettons pleinement en œuvre la loi de programmation militaire, grâce à une augmentation de 1,7 milliard d'euros des crédits du ministère des armées. Nous augmentons les moyens du ministère de l'intérieur à hauteur de 1,5 milliard d'euros, en intégrant les trajectoires que nous avions prévues ainsi que les annonces faites par le Président de la République lors de la conclusion du Beauvau de la sécurité. Nous augmentons de 8 %, pour la deuxième année consécutive, le budget du ministère de la justice. Chacun s'était accordé à dire, l'an dernier, qu'une telle hausse, bienvenue, était historique par son montant. Elle l'est désormais doublement.
Dans le même temps, nous fixons une deuxième priorité : la jeunesse et l'éducation. Le budget du ministère de l'éducation nationale progressera de 1,7 milliard d'euros, dont 700 millions d'euros consacrés à la revalorisation du traitement des enseignants et au financement de la première tranche de la participation de l'État employeur à la protection sociale complémentaire des agents. Ce que je dis pour le ministère de l'éducation nationale vaut pour les autres. Le présent projet de budget permet à chaque ministère de franchir la première étape de la mise en œuvre de cette participation de l'État employeur. Les crédits du ministère de l'éducation nationale permettront aussi de conforter certaines politiques, par la création, par exemple, de 100 000 postes de service civique, et par le recrutement de 4 000 accompagnants des élèves en situation de handicap (AESH), pour conforter les efforts consentis depuis le début du quinquennat en matière d'accueil des enfants en situation de handicap à l'école, dont résulte la création de près de 30 000 postes d'AESH en cinq ans.
Dans ce même domaine de l'éducation, de la recherche et de la préparation de l'avenir, les crédits du ministère de l'enseignement supérieur augmenteront de 700 millions d'euros. 550 millions d'euros correspondent à la marche prévue dans le cadre de la loi de programmation de la recherche. La différence tient à la mise en œuvre d'actions spécifiques, notamment en matière de tutorat, à l'occasion de la crise, dans le cadre de la reprise de cours en présentiel.
Nous maintiendrons les efforts consentis depuis plusieurs années en matière de transition écologique, qui est notre troisième priorité. Nous avons systématiquement augmenté les crédits consacrés au ministère de la transition écologique. Cette année, c'est encore vrai : l'augmentation de ses crédits s'élève à 1,5 milliard d'euros, hors plan de relance – rappelons que l'écologie, en 2021 et en 2022, peut mobiliser un tiers des dépenses engagées dans ce cadre, ce qui constitue le plus fort accélérateur que nous ayons connu en la matière. Dans le même ordre d'idées, en ce qui concerne les mobilités, ce budget permettra de poursuivre la trajectoire de reprise de la dette de la SNCF, conformément aux dispositions que vous avez votées à l'occasion de la réforme de cette entreprise.
Quatrième priorité qui trouve une traduction dans ce budget : le soutien aux publics les plus fragiles, dans toute leur diversité. Nous maintiendrons en 2022 le plus haut niveau de places d'hébergement d'urgence que nous ayons connu, soit 190 000 places. Leur gestion ne sera plus à la saison, mais à l'année. Du point de vue budgétaire, cela se traduit par une augmentation des crédits consacrés à l'hébergement d'urgence, de 2017 à 2022, de 1,8 milliard à 2,7 milliards par an, ce qui démontre notre engagement en la matière.
Nous vous proposons aussi, dans ce projet de budget, de traduire un engagement pris par le Gouvernement devant l'Assemblée nationale, consistant à revaloriser le montant de l'allocation adulte handicapé (AAH) pour les personnes qui en sont bénéficiaires et vivent en couple. Déjà, il y a trois ans, nous en avions revalorisé le montant de 90 euros par mois. Nous vous proposons de créer un système d'abattement, qui permettra à 120 000 couples de bénéficier d'une augmentation de l'AAH à hauteur de 110 euros par mois, pour un montant total de 200 millions d'euros.
Nous poursuivrons les efforts consentis depuis plusieurs années en direction de l'égalité entre les femmes et les hommes et de la lutte contre les discriminations. Les sommes consacrées à cette priorité représentent environ un milliard d'euros, de façon transversale, et le budget piloté directement par notre collègue Élisabeth Moreno augmente systématiquement. Il sera augmenté de presque 25 %, pour atteindre un peu plus de 50 millions d'euros. Certes, ce montant n'est pas comparable à ceux que nous évoquons s'agissant des autres ministères, mais ces crédits permettent plusieurs avancées, notamment l'ouverture vingt-quatre heures sur vingt-quatre du service 3919 depuis le mois de septembre.
Au titre du soutien aux plus fragiles, j'aimerais souligner les efforts que nous consentons, et que vous avez accompagnés, dans un secteur très différent, qui relève de la solidarité internationale : celui de l'aide publique au développement (APD). Le budget de celle-ci représentera en 2022 plus de 0,55 % du revenu national brut, conformément à l'engagement du Président de la République. Il connaîtra une augmentation d'un milliard d'euros. À l'échelle du quinquennat, les crédits consacrés à l'APD auront augmenté de 70 %, ce qui est aussi une démonstration du respect des engagements pris en matière d'accompagnement des projets de développement et de solidarité.
Dernier engagement : celui qui concerne les relations financières entre l'État et les collectivités locales. Ce budget se caractérise, ce qui n'est plus véritablement une surprise, par le maintien du montant de la dotation globale de fonctionnement versée par l'État aux collectivités locales, à hauteur de 26,8 milliards d'euros. Nous avons fait le choix de maintenir, dans un premier temps, les crédits de la DETR, la dotation d'équipement des territoires ruraux, et ceux de la DSIL, la dotation de solidarité à l'investissement local, à hauteur de 2 milliards d'euros, comme les années précédentes. Rappelons que, dans le cadre du plan de relance, nous avons consacré 2,6 milliards d'euros au soutien exceptionnel à l'investissement des collectivités locales, en plus de ces 2 milliards annuels. Par ailleurs, nous avons pris la décision, il y a quelques jours, sous l'autorité du Premier ministre, d'abonder les crédits de soutien à l'investissement des collectivités locales. Ainsi, le projet de loi de finances que nous vous présentons propose d'abonder les crédits de la DSIL de 350 millions d'euros, à destination des projets inscrits dans les CRTE, les contrats de relance et de transition écologique, signés entre l'État et le Gouvernement.
La péréquation verticale continuera sa progression, à hauteur de 95 millions d'euros pour la DSU, la dotation de solidarité urbaine et de cohésion sociale, et autant pour la DSR, la dotation de solidarité rurale. Nous consacrerons certains crédits aux politiques de la ville et de l'aménagement du territoire. Ainsi, 47 millions d'euros permettront le déploiement de 200 cités éducatives, et 35 millions d'euros financeront, au titre du fonds national d'aménagement et de développement du territoire (FNADT), le développement de nouvelles maisons France services sur tout le territoire.
Je tiens à porter à votre connaissance la décision que nous avons prise de ne pas vous proposer une réforme de l'IFER, l'imposition forfaitaire sur les entreprises de réseau. À la demande du Parlement, les services du Gouvernement ont remis au début de l'été un rapport, qui a été rendu public, sur les difficultés soulevées par cette fiscalité. Il nous semble plus sage de consacrer un temps plus long à la concertation avant de proposer une réforme, dans la mesure où il s'agit à la fois d'une question de soutenabilité pour les opérateurs de téléphonie et de dynamique des recettes pour les collectivités territoriales.
Ce projet de loi de finances nous permettra de continuer à mener des réformes en matière de sincérisation budgétaire et d'en ouvrir d'autres. Je pense notamment à des opérations de rebudgétisation, comme celles menées sur le compte d'affectation spéciale (CAS) Contrôle de la circulation et du stationnement routiers, au travail fin mené sur les taux de mise en réserve et aux exercices d'évaluation et d'appréciation des efforts consentis par la dépense publique pour l'environnement et, a contrario, des conséquences négatives que peuvent avoir les actions publiques sur l'environnement : nous publierons dans quelques jours le budget vert, lequel tiendra compte de l'intégralité des remarques formulées par les parlementaires impliqués dans ce dossier l'année dernière, notamment pour élargir la cotation aux budgets annexes et aux dépenses fiscales et affiner la question des dépenses neutres, afin que le budget vert soit un outil approfondi et amélioré d'appréciation de l'effet des dépenses publiques sur l'environnement.
Troisième caractéristique de ce budget, rappelée tout à l'heure par Bruno Le Maire : en matière de fiscalité, il s'inscrit dans la continuité de ce que nous avons fait jusqu'à présent. Il n'ouvre aucun chantier fiscal majeur, ne crée aucun nouvel outil. Nous vous proposerons tout au plus des mises en conformité et certaines modernisations et simplifications, notamment dans le champ des petites taxes, ainsi que de poursuivre la trajectoire d'intégration des biocarburants dans les carburants conventionnels, au titre de la TIRIB, la taxe incitative relative à l'incorporation de biocarburants.
En revanche, sont prévues, dans la continuité de ce que nous avons fait jusqu'à présent, la baisse de l'impôt sur les sociétés, afin que toutes les entreprises soient éligibles au taux de 25 % l'an prochain, et la suppression d'une deuxième tranche de la taxe d'habitation pour les ménages dont la résidence principale est toujours imposée à ce titre. Cela représente environ 6 milliards d'euros, ce qui nous permettra d'atteindre un montant total de baisses d'impôts, à l'échelle du quinquennat, de 50 milliards d'euros. Il s'agit d'un montant important, qui nous permettra d'avoir un taux de prélèvements obligatoires de 43,5 %, soit le même qu'en 2011. Cela signifie qu'avec les suppressions d'impôts que nous vous aurons proposées, nous aurons effacé les augmentations de fiscalité opérées à partir de 2010-2011, à la suite de la crise systémique – puisque, je tiens à le rappeler à ceux qui semblent l'oublier, la hausse de la fiscalité a couvert les deux quinquennats précédents, et non uniquement le dernier.
Associée à la revalorisation des revenus du travail, que nous garantissons et accompagnons chaque année, cette politique fiscale nous permet de rendre du pouvoir d'achat aux ménages français. Je pense notamment à la prime d'activité et à ce que nous avons fait en matière d'exonération de cotisations et de transfert de leur recouvrement. Il faut avoir à l'esprit qu'à l'échelle de ce quinquennat, et en dépit de la crise que nous avons connue en 2020 et en 2021, la hausse moyenne du pouvoir d'achat sera de 1,6 % pour les ménages français, contre 1,4 % pour le quinquennat 2007-2012 et 0,4 % pour le quinquennat 2012-2017. Ce pouvoir d'achat rendu aux Français est utile, comme nous le constatons davantage encore en sortie de crise.
Je terminerai par quelques mots sur les résultats que nous attendons, et qui se traduisent dans les indicateurs macroéconomiques. Le fait que le déficit public soit ramené à 4,8 %, soit la moitié de ce que nous avons connu en 2020 et presque la moitié de celui que nous connaîtrons en 2021, est un point important, qui se mesure aussi en valeur : le déficit public est attendu autour de 125 milliards d'euros, contre 210 milliards cette année et l'année dernière. La dette publique sera stabilisée et diminuera même légèrement, s'établissant à 114 %. Le taux des prélèvements obligatoires, je le disais, atteindra 43,5 %. La dépense publique, quant à elle, représentera en 2022 un peu plus de 55 % du PIB, soit un niveau que nous avons connu avant la crise. Il y a encore un peu de chemin pour retrouver le niveau de 2019, à savoir 53,8 %, mais si nous arrivons à retrouver un niveau comparable à celui d'avant la crise, c'est aussi parce que, hors relance, les dépenses dites ordinaires de l'État n'augmenteront en volume que de 0,8 %, ce qui correspond peu ou prou à l'évolution que nous avons connue au cours des trois premières années du quinquennat et qui nous avait permis de tenir nos engagements européens et en matière de finances publiques.
Le projet de loi de finances doit être appréhendé à l'aune de la crise. S'il n'y avait pas eu de crise, des résultats comme ceux qui nous sont présentés seraient évidemment désastreux. Ils ne le sont pas quand on considère la puissance de la crise et ses effets. Néanmoins, cela rend extrêmement difficile toute comparaison avec les engagements antérieurs – on le voit, par exemple, lorsque le HCFP tente de mesurer les écarts par rapport à la loi de programmation, ce qui est tout simplement impossible, comme cela avait été le cas en 2009, d'ailleurs. S'agit-il, pour autant, d'un PLF de sortie de crise, c'est-à-dire qui tire les leçons de celle-ci et qui donne des perspectives ? Pas tout à fait.
C'est un PLF qui accompagne la sortie de crise. Les dépenses sont en diminution – j'y reviendrai – par rapport au pic de 2021, mais des dépenses courantes se substituent à un certain nombre de dépenses de crise. Les recettes, quant à elles, retrouvent un niveau équivalent à celui que l'on connaissait auparavant, c'est-à-dire de l'ordre de 290 milliards d'euros. Le déficit est presque divisé par deux. Il y a aussi beaucoup moins de croissance en 2022 qu'en 2021. La croissance ne sera-t-elle qu'un feu de paille, comme dans d'autres pays ? Le taux d'endettement diminue, mais son augmentation pourrait reprendre en 2023. On constate une stabilité fiscale, après des baisses importantes, tant pour les ménages que pour les entreprises.
Est-ce suffisant ? Je ne le crois pas. En effet, je vois poindre le risque d'une augmentation structurelle de la dépense ordinaire.
D'abord, vous êtes passés de l'activité partielle au PLF partiel, car vous ne présentez pas la totalité du budget. En effet, vous avez annoncé des amendements qui viendront augmenter les dépenses : il y aura un plan d'investissement, la création d'un revenu pour les jeunes et peut-être d'autres choses encore. Pourriez-vous au moins nous dire de quel type de dépenses il s'agira et à combien elles s'élèveront ? Vous aviez déjà annoncé 11 milliards de dépenses supplémentaires avant l'été, dont un tiers était consacré aux différentes lois de programmation thématiques. Cette nouvelle augmentation va-t-elle modifier les équilibres, notamment le solde ? Le HCFP sera-t-il de nouveau saisi par le Gouvernement ?
Ensuite, au-delà de l'État, quand on raisonne « toutes APU », c'est-à-dire toutes administrations publiques confondues, l'augmentation des dépenses courantes représente 32 milliards d'euros – 100 milliards sur trois ans –, selon les chiffres du HCFP. S'il n'y avait que les 11 milliards d'augmentation pour le budget de l'État, cela correspondrait à peu près au niveau moyen de l'augmentation de la dépense observée année après année ; ces 32 milliards toutes APU, en revanche, représentent une accélération de 25 % par rapport à la norme habituelle d'augmentation des dépenses. Cela va donc bien au-delà des dépenses liées à la crise.
Il est vrai qu'il ne faut pas réduire trop brutalement les dépenses, tout le monde en est d'accord, mais ce que nous a appris la crise de 2008-2009 – à cette époque, du reste, la BCE n'avait pas agi de la même façon –, ce n'est pas qu'il faut accélérer la hausse des dépenses courantes, c'est-à-dire de dépenses que l'on retrouvera chaque année, c'est au contraire qu'il faut privilégier les dépenses d'investissement, éviter les ruptures brutales et, pour ce faire, prévoir des sorties en sifflet. En définitive, le danger est de franchir une nouvelle étape dans la hausse durable des dépenses. D'ailleurs, en 2022, le niveau des dépenses rapportées au PIB se situe à 55,6 %, alors même qu'il s'agissait quasiment d'un sommet avant la crise. En résumé, vous ne pouvez pas gager l'augmentation des dépenses ordinaires par la baisse des dépenses exceptionnelles, parce que cela reviendrait à prolonger ces dernières.
Il me semble urgent d'envoyer un certain nombre de signes. Dans ce PLF, il y en a un, certes un peu timide mais réel : le cantonnement sur vingt ans de la dette covid de l'État – celle du secteur social étant déjà prise en compte par la Caisse d'amortissement de la dette sociale (CADES) –, à hauteur de 165 milliards d'euros. Cela fait beaucoup en valeur absolue, mais c'est peu au regard des 3 000 milliards de dette publique. Vingt ans suffiront-ils, et ce mécanisme nous permettra-t-il de faire face aux autres crises qui surviendront ? Cela mérite évidemment que l'on en discute ; toujours est-il qu'il s'agit d'un signe important. D'autres me semblent indispensables, que ce soit la modification de certaines règles – il a été question de l'évolution de la LOLF, la loi organique relative aux lois de finances, mais bien d'autres choses pourraient changer – ou l'encadrement et la revue des dépenses. La logique de moyens doit laisser la place à une logique d'efficacité de la dépense et la logique d'investissement doit prévaloir sur la logique de fonctionnement.
In fine, notre situation financière est-elle meilleure par rapport à celle des autres pays à la fin de la crise qu'elle ne l'était au début ? Autrement dit, est-ce que nous sortons de la crise dans un meilleur état financier que les autres pays, sachant que nous y étions entrés dans un état de relative faiblesse par rapport à eux ? Dépenser n'est pas réformer. Or ce PLF est bien plus l'expression de dépenses que de réformes.
Le projet de loi de finances pour 2022 s'inscrit dans la continuité de choix politiques forts et assumés, qui ont été faits bien avant le début de la crise. Tout comme M. le ministre de l'économie, je déplore que se fasse entendre la petite musique selon laquelle le Président de la République serait déjà en campagne et utiliserait à cette fin le budget pour 2022. À ce compte-là, mes chers collègues, vous auriez dû être cohérents et nous adresser le même reproche depuis le début de la législature, car en vérité la philosophie de ce projet de loi de finances est la même que celle qui nous guide depuis cinq ans : protéger notre économie, susciter des boosters de croissance, créer de l'emploi et baisser les impôts des ménages ainsi que ceux des entreprises.
Il est ainsi proposé dans ce texte de mettre fin aux aides d'urgence, autrement dit au « quoi qu'il en coûte », exactement comme cela avait été annoncé. Nous proposons également de poursuivre le plan de relance lancé il y a un an et de consommer effectivement l'enveloppe des 100 milliards d'euros, comme prévu, là encore. Nous continuons de financer des politiques publiques prioritaires, notamment dans le cadre des lois de programmation relatives à la défense, à la justice, à la recherche ou encore à l'aide publique au développement, adoptées pour certaines il y a bien longtemps. Nous protégeons les plus fragiles de nos concitoyens – je relève, à cet égard, les efforts consentis en faveur du chèque énergie, du soutien aux étudiants ou encore de l'allocation aux adultes handicapés. Enfin, non seulement nous n'avons pas augmenté les impôts de nos concitoyens, mais voilà cinq ans que nous les diminuons. C'était là un engagement majeur ; nous continuons à le mettre en œuvre, notamment avec la baisse de la taxe d'habitation et de l'impôt sur les sociétés.
Cette stratégie donne des résultats, nous l'avons prouvé. Qui dirait que la forte reprise économique n'a rien à voir avec le soutien massif aux salariés et aux entreprises qui a été déployé depuis dix-huit mois ? Qui dirait qu'elle n'est pas boostée par le plan de relance, auquel il faudra, en effet – nous l'assumons –, adjoindre un nouveau plan d'investissement à l'horizon de 2030 ? Qui dirait qu'elle n'est pas confortée par une politique claire de modération fiscale, qui confirme les baisses sans précédent opérées depuis le début du quinquennat – plus de 50 milliards d'euros –, lesquelles ont permis notamment de voir progresser chaque année le pouvoir d'achat des Français ?
Là où vous avez raison, mes chers collègues, là où nous avons raison collectivement, c'est quand nous disons que tout cela a un coût. Le niveau d'endettement est un sujet d'attention. C'est précisément pour cela que nous voulons, avec Éric Woerth, réformer la loi organique relative aux lois de finances ; il s'agirait, entre autres, d'organiser un débat sur la dette publique dans l'hémicycle, ce qui serait une première.
Cela dit, les prévisions relatives au ratio de dette publique pour 2021 et 2022 figurant dans le projet de loi de finances sont meilleures que celles présentées en avril dans le programme de stabilité. Messieurs les ministres, cette amélioration est-elle de nature à modifier la trajectoire de l'endettement public pour les prochaines années, y compris au-delà de 2022 ? Pouvez-vous nous préciser quelle serait la trajectoire actualisée ?
S'agissant toujours de l'endettement – vous voyez, mes chers collègues, que je tiens à vous rassurer et à vous démontrer qu'il s'agit à nos yeux d'un sujet important –, nous aurons l'occasion de débattre de la proposition du Gouvernement de cantonner la dette covid et d'entamer son remboursement grâce aux fruits de la croissance. Messieurs les ministres, pourriez-vous nous donner plus de détails sur la trajectoire de désendettement retenue ? Si j'ai bien compris, le montant de cette dette est évalué à 165 milliards d'euros et son remboursement s'effectuera sur une vingtaine d'années, ce qui représente 8 milliards d'euros par an environ en crédits de paiement.
Pour en revenir aux dépenses, et bien que les arbitrages soient encore en cours, pourriez-vous nous indiquer certaines des modalités de présentation budgétaire et les ordres de grandeur des mesures qui seront présentées par voie d'amendement – à savoir le plan d'investissement et le revenu d'engagement, qui sont encore les deux inconnues à ce stade ? En tant que rapporteur général, je vous demanderai de vous engager à ce que ces amendements arrivent en première lecture à l'Assemblée nationale – pas dans une autre chambre et pas à l'occasion d'une autre lecture.
S'agissant plus largement de la dépense publique, le graphique qui figure à la page 11 du projet de loi de finances et retrace son évolution à champ courant montre selon moi deux choses : d'une part, que le quinquennat qui s'achève aura vu la dépense publique progresser moins que les trois précédents ; d'autre part, que son augmentation en 2022 sera moindre qu'en 2020 et 2021, contrairement aux déclarations de certains – dont on attend de débattre des amendements qu'ils déposeront pour supprimer certains crédits… Une question se pose toutefois : dans quelle mesure, messieurs les ministres, ces constats pourraient-ils être modifiés à la suite des compléments que vous apporterez par voie d'amendement à ce texte dans les prochaines semaines ?
J'abonderai dans le sens de M. le rapporteur général : le PLF pour 2022 confirme les principales orientations qui sont celles de la majorité depuis cinq ans.
Il confirme que notre majorité est bien celle de la baisse des prélèvements obligatoires : 25 milliards en moins pour les Français, écrasés jusqu'alors par l'impôt, et 25 milliards de baisse pour les entreprises, ce qui permet de regagner peu à peu l'attractivité dont on a tant besoin.
Le PLF confirme aussi que cette majorité est celle qui se soucie des plus fragiles, à travers le chèque énergie, l'hébergement d'urgence, ou encore l'allocation aux adultes handicapés, qui aura connu au cours du quinquennat une revalorisation inédite dans notre histoire.
C'est également une majorité qui renforce le régalien – la justice, les armées, la police –, lequel avait été délaissé par les précédentes.
C'est enfin une majorité qui protège les collectivités territoriales : je note que, pour la cinquième année consécutive, la dotation globale de fonctionnement restera stable.
En outre, le PLF démontre l'incroyable efficacité de la réaction de l'État dans la crise : vingt mois après le début de la plus grande crise que l'on a connue depuis des décennies, le PIB a retrouvé son niveau antérieur à celle-ci, et il en va de même pour le chômage. Le pouvoir d'achat a été lui aussi protégé, malgré une diminution de 8 % du PIB l'année dernière. Quant à l'indice du climat des affaires, l'avis du Haut Conseil des finances publiques, qui nous était présenté ce matin, est très clair : il demeure proche des niveaux les plus élevés que l'on a connus durant la décennie précédant la crise sanitaire. Face à une crise d'une gravité sans commune mesure avec ce que l'on avait connu, la gestion a donc été d'une efficacité inédite.
Cette situation a évidemment des conséquences budgétaires, comme l'a dit M. le rapporteur général. Toutefois, le PLF offre un horizon clair pour le redressement des finances publiques, tout en préservant la compétitivité – il est difficile mais essentiel de trouver un équilibre entre ces deux exigences, puis de le préserver.
Le Haut Conseil des finances publiques note la prudence des prévisions du Gouvernement, ce qui est à mon sens une très bonne façon d'approcher les dépenses publiques. Il suggère d'affecter les recettes supplémentaires, s'il devait y en avoir, à un redressement plus rapide des finances publiques. J'aimerais connaître l'avis des ministres sur ce point.
La présentation du dernier projet de loi de finances d'une législature est une épreuve de vérité. Je me souviens d'avoir entendu dans cet exercice Michel Sapin, et quelque temps après Didier Migaud, alors président du Haut Conseil des finances publiques.
Monsieur le ministre de l'économie, vous et moi nous avons un point commun : nous sommes Normands. En règle générale, nous faisons donc la promotion du camembert. Or, aujourd'hui, vous nous présentez un budget ressemblant à un gruyère, avec des trous de tailles diverses. Il y a des trous concernant les dépenses – ce que vous ne contestez pas, d'ailleurs –, puisqu'il nous manque des informations à propos du revenu d'engagement et du plan d'investissement. Il y a également des trous en ce qui concerne les recettes, comme l'a souligné le Haut Conseil des finances publiques : celles qui sont assises sur les salaires, par exemple, sont sous-estimées.
Vous nous avez parlé d'« honnêteté politique », monsieur Le Maire, et vous, monsieur Dussopt, de « sincérité budgétaire ». Ce budget incomplet traduit pourtant une forme d'insincérité budgétaire – et c'est un expert-comptable qui vous le dit.
Je voudrais souligner, par ailleurs, le caractère abyssal de la dette : celle-ci avoisine les 3 000 milliards d'euros. Or, dans le cadre de ce budget, aucun débat sur la question n'est prévu ; cela devrait nous inquiéter, comme le soulignait ce matin le président Pierre Moscovici.
La majorité a fait des comparaisons avec les législatures précédentes. Quant à moi, je voudrais faire une comparaison avec l'Allemagne, pays avec lequel nous devrions former un tandem – ce qui suppose d'être synchronisés : fin 2021, notre dette a atteint 115 % du PIB, quand elle était de 70 % en Allemagne.
J'aborderai, pour finir, la question du niveau des dépenses publiques. La Cour des comptes a rappelé, en septembre dernier, qu'il était largement supérieur, avant la crise, à la moyenne de la zone euro – de l'ordre de 8,6 points de PIB en 2019. C'est un vrai problème.
Je voudrais marquer notre satisfaction. Nous sommes satisfaits, d'abord, des résultats de la loi de finances et des lois de finances rectificatives que nous avons examinées l'année dernière pendant la crise. Elles ont permis à l'économie française de résister mieux qu'ailleurs. La France est ainsi l'un des seuls pays où le taux de chômage a retrouvé un niveau comparable à celui d'avant la crise.
Nous sommes également satisfaits de la méthode, car le projet de loi de finances est présenté un peu plus tôt que prévu, ce qui nous laissera le temps de l'examiner – ainsi que les amendements que vous nous soumettrez, messieurs les ministres, dans les conditions qu'a indiquées M. le rapporteur général.
Nous sommes satisfaits, enfin, des choix politiques que reflète le texte. Il s'agit d'un budget de continuité et de stabilité ; c'est aussi le budget des promesses tenues. La fiscalité est stable, de même que les dotations aux collectivités. Les baisses d'impôts programmées – celle de la taxe d'habitation et celle de l'impôt sur les sociétés – sont maintenues, tout comme le sont les dépenses qui avaient été programmées bien avant la crise, notamment en matière de défense, d'aide au développement ou encore de transition écologique.
Vous le savez, messieurs les ministres, dans certains secteurs les entreprises rencontrent des difficultés de recrutement, et elles nous interpellent sur l'attractivité et la valorisation du travail. Ces difficultés pourraient ralentir le rebond de l'économie. Quelles sont les mesures votées par le passé ou inscrites cette année dans le budget qui permettraient d'y répondre ?
Nous avons entendu ce matin l'avis du Haut Conseil des finances publiques. Or, pour la première fois de son histoire – récente il est vrai –, celui-ci s'est déclaré incapable de présenter un avis complet, dans la mesure où le PLF lui-même ne l'est pas. De fait, votre PLF est un véritable terrain de golf, tant les trous y sont nombreux : les annonces de plusieurs ministres, du Premier ministre et du Président de la République lui-même n'y sont pas toutes retracées. D'ailleurs, ce n'est pas le dernier budget du quinquennat du président Macron, c'est celui du président candidat à sa réélection.
Ainsi, plusieurs milliards d'euros de dépenses annoncées, à l'image du revenu d'engagement pour les jeunes ou encore du nouveau plan d'investissement, ne figurent pas dans ce PLF et devraient nous arriver par voie d'amendement. Or qui dit amendements dit absence d'étude d'impact et absence du temps pourtant nécessaire aux parlementaires pour mener un travail d'analyse sérieux. Et que l'on ne vienne pas nous répondre que la crise sanitaire explique ces manques : cela fait des mois que le groupe Socialistes et apparentés demande un revenu minimum pour les jeunes ainsi qu'un véritable plan de relance dans des domaines stratégiques comme l'énergie, la recherche biomédicale, l'alimentation, ou encore les transports.
On nous promet un revenu d'engagement. Est-il budgété ? Si oui, à quelle hauteur ? On nous annonce un plan d'investissement de 30 milliards d'euros. Quelle somme sera inscrite en 2022 ? Quels seront les secteurs stratégiques ciblés – à moins que vous ne continuiez le saupoudrage ?
Je voudrais aborder un autre point, selon moi majeur : la masse salariale de l'État. À en croire le HCFP, celle-ci serait minorée, peut-être pour donner à la droite l'image d'un exécutif taillant dans les effectifs. Il est facile d'annoncer des suppressions de postes, mais il est beaucoup moins aisé de les mettre en œuvre – tant mieux, d'ailleurs, si j'ose dire, car la crise aura au moins eu le mérite de révéler le manque criant d'effectifs et de moyens à l'hôpital, entre autres.
En ce qui concerne le financement des dépenses, si l'on peut compter sur la reprise pour augmenter les recettes fiscales et le produit des contributions sociales, on doit aussi regretter que les hauts revenus et les hauts patrimoines ne soient pas mis à contribution. Aucun dispositif de solidarité fiscale n'a été retenu, malgré l'échec du ruissellement, et les baisses d'impôts prévues pour 2022 sont maintenues.
Il a été question de 50 milliards d'euros de baisses d'impôts durant le quinquennat. Pourriez-vous nous fournir des éléments par décile concernant la baisse des impôts pour les ménages, et par catégorie d'entreprises pour la baisse des impôts dont celles-ci font l'objet ?
Je terminerai par une question certes annexe mais importante. Le décret concernant les établissements thermaux exploités en régie n'est toujours pas paru : pouvez-vous nous en expliquer les raisons ?
Ce projet de loi de finances marque, nous l'espérons tous, la sortie de la crise. Le temps a été effectivement à l'urgence en 2020, avec les projets de loi de finances rectificative successifs pour protéger, quoi qu'il en coûte, les ménages, les entreprises et les collectivités locales. Nous sommes convaincus, comme une très large majorité des Français, que l'action du Gouvernement a été massive et bien calibrée.
La loi de finances initiale pour 2021 conciliait tout à la fois l'urgence et la relance, afin de continuer à protéger les catégories les plus touchées par la crise, tout en amorçant la relance pour bâtir l'économie française de demain.
Il est donc effectivement temps de passer à un troisième temps, consacré au renforcement de la relance, à l'intensification de l'investissement et à la poursuite du recentrage de l'effort public sur les missions régaliennes de l'État.
Le groupe Agir ensemble ne peut qu'approuver ces trois priorités défendues à travers le projet de loi de finances pour 2022. Comme vous l'avez dit, elles s'inscrivent dans la continuité de l'action économique menée par le Gouvernement et la majorité depuis quatre ans. Nous saluons également la stabilité fiscale garantie par le texte – tout au moins, c'est l'impression qui émane d'un premier balayage. Cette stabilité est gage de clarté et de lisibilité, ce qu'attendent nos concitoyens et surtout les acteurs économiques.
En ce qui concerne la maîtrise de la dépense publique, vous le savez, notre groupe a toujours plaidé pour le plus grand sérieux budgétaire. C'est ce sérieux qui a permis de faire passer le déficit public sous la barre des 3 % du PIB avant la crise, faisant ainsi sortir la France de la procédure de déficit excessif. Mais la crise a évidemment changé la donne, et a eu un impact inédit sur nos finances publiques, à la hauteur de la réponse massive apportée par l'État. Il convient donc d'analyser le PLF à l'aune du choc massif qu'ont subi les finances publiques. Leur rétablissement est pour nous une nécessité, mais il doit être pensé selon deux critères : la qualité de la dépense publique engagée et le moment opportun pour mener des réformes susceptibles de se traduire par des économies.
En ce qui concerne la qualité de la dépense publique, le réarmement des missions régaliennes, conformément aux lois de programmation, ainsi que le renforcement de la relance et de l'investissement nous semblent pertinents.
S'agissant du calendrier proposé pour le rétablissement des finances publiques, nous devons être très vigilants afin de ne pas compromettre la soutenabilité de la dette publique. Nous saluons l'objectif d'un déficit à 3 % à l'horizon de 2027. Toutefois, pouvez-vous nous indiquer, au regard du budget que vous nous présentez, l'effort budgétaire en valeur qu'il nous faudra fournir dans les cinq prochaines années pour atteindre cet objectif ?
Monsieur le ministre de l'économie, vous indiquez, dans l'exposé général des motifs du projet de loi de finances, que vous avez respecté trois grands engagements au cours des cinq dernières années.
Premièrement, vous dites avoir redressé les comptes publics entre 2017 et 2022. Or c'est faux. Si l'on raisonne en termes de déficit effectif, on en sera à 4,8 % en 2022, contre 3 % en 2017. Ce qui est plus significatif encore – et plus grave –, c'est le déficit structurel. Vous estimez qu'il sera de 3,7 % en 2022 – le Haut Conseil des finances publiques tablant quant à lui sur 4,7 % –, contre 2,4 % en 2017 et 2019. Autrement dit, après avoir été à peu près stable pendant trois ans, le déficit structurel augmente. Or, par définition, on ne compte pas dans ce chiffre les diverses mesures annoncées.
Ma première question est toute simple : avec un tel niveau de déficit structurel, où sont les économies en vue du redressement structurel des comptes publics ?
Deuxièmement, vous annoncez avoir amélioré durablement la compétitivité de la France. Si seulement c'était vrai ! Notre croissance est rognée par le déficit du commerce extérieur, qui est le signe de l'absence de compétitivité, ou à tout le moins d'une compétitivité insuffisante de notre économie. La balance commerciale de la France accuse un déficit croissant : 58 milliards d'euros en 2017 comme en 2019, mais 95 milliards en 2022, selon vos propres estimations, soit une augmentation des deux tiers. Le commerce extérieur coûte 0,3 à 0,4 point de croissance à la France chaque année. Certains de nos partenaires européens, notamment l'Allemagne, ont une balance commerciale structurellement excédentaire.
Ma deuxième question est donc la suivante : où sont, dans le budget pour 2022, les mesures destinées à améliorer notre compétitivité et à redresser notre balance commerciale ?
Troisièmement, vous parlez d'une baisse inédite voire massive des prélèvements obligatoires durant ces cinq ans, aux alentours de 52 milliards d'euros – 26 milliards pour les ménages et 26 milliards pour les entreprises.
D'abord, ces chiffres ne sont pas exacts. Vous estimez le taux des prélèvements obligatoires à 43,5 % en 2022 – chiffre que le Haut Conseil des finances publiques considère d'ailleurs comme sous-évalué –, alors qu'il était de 45,1 % en 2017. Cela fait 1,6 point de moins, ce qui représente 43 milliards d'euros. Si l'on en croit le HCFP, le véritable montant est de moins de 40 milliards.
Qui plus est, nous restons à un niveau nettement plus élevé que celui de l'Allemagne, où le taux est de 38,8 %, et au-dessus de la moyenne des pays de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), qui s'établit à 33,8 %.
La pression fiscale demeure donc extrêmement forte. J'ajouterai qu'il est toujours facile de financer les baisses d'impôts à crédit. En effet, notre déficit structurel est en hausse de 1,3 point – voire 2,3 points –, ce qui veut dire qu'il a augmenté davantage que les prélèvements obligatoires n'ont diminué.
Comment comptez-vous réduire de manière substantielle notre pression fiscale de manière à rapprocher notre situation de celle de nos partenaires européens ?
Depuis cinq ans, Bruno Le Maire est le meilleur propagandiste de la politique du Gouvernement, mais chacun sait que propagande ne vaut pas vérité.
Ce budget dépense à la fois insuffisamment et mal. Il dépense mal, parce que vous avez de nouveau le regard tourné vers la question sacro-sainte du déficit. Vous nous avez d'ailleurs annoncé que, si Emmanuel Macron était réélu, il y aurait une baisse historique des dépenses publiques, de l'ordre de 0,7 % d'ici à 2027, et que les projets de loi de finances fixeraient désormais une sorte d'équivalent de l'objectif national de dépenses d'assurance maladie (ONDAM) des projets de loi de financement de la sécurité sociale – dont on connaît pourtant les résultats en termes de santé publique.
Deuxièmement, vous ne dépensez pas assez, dans la lignée de ce qui a été fait depuis deux ans – je parle des sommes réellement engagées, pas de celles qui ont été annoncées – dans le cadre du plan d'urgence et du plan de relance face au covid. Nous avons dépensé 6 % de notre PIB – quand les Américains investissaient 25 % du leur –, pour un résultat que vous décrivez de façon idéaliste : la relance économique serait là, on aurait retrouvé le niveau de chômage d'avant la crise. Or le nombre d'inscrits à Pôle emploi a augmenté de 5 % en deux ans ! En fait, les 6 % de croissance sont l'effet d'un rebond mécanique ; la réalité, ce sont les 300 000 suppressions d'emplois survenues depuis deux ans, dont 112 000 résultent de plans sociaux, sans parler de l'augmentation de la pauvreté. Selon les économistes Olivier Blanchard et Jean Pisani-Ferry, il faudrait 60 milliards d'euros supplémentaires pour traiter la seule question de la demande et des citoyens les moins favorisés. De plus, pour combler notre retard sur la stratégie nationale bas-carbone, il faudrait 15 à 18 milliards d'euros par an.
Pourquoi dépensez-vous mal ? Parce que vous continuez de réduire les recettes par des baisses d'impôt dont vous faites mine de penser qu'elles vont profiter à tous les Français, alors que tous les chiffres montrent que, jusqu'à présent, ce sont surtout les plus riches qui en ont bénéficié. Vous avez tout de même réussi l'exploit d'augmenter de 100 % le patrimoine des 500 plus grosses fortunes de France, avec une hausse de 30 % pour la seule année 2021 – un record absolu ! En outre, vous continuez de consacrer de l'argent aux entreprises, ce qui est très bien, mais sans condition, de sorte que, l'an dernier, seul 1,4 % de cet argent est allé aux salaires : il a surtout enrichi les actionnaires, qui ont touché 51 milliards d'euros de dividendes.
Enfin, ce budget comprend, pour un tiers – Laurent Saint-Martin estimant à 17 milliards d'euros, au bout du compte, le montant des nouvelles dépenses –, des éléments que l'on découvrira au fur et à mesure. C'est un problème de plus pour un budget qui ne saurait résoudre les problèmes de notre pays ni la crise à venir.
Ce dernier budget du quinquennat sonne l'heure du bilan. La majorité a loué la stabilité de la politique économique depuis 2017 ; je souscris entièrement à ce jugement, et le budget pour 2022 correspond bien aux standards habituels. Ne tournons pas autour du pot : vous êtes la majorité des riches.
Dans ce budget, aucune mesure fiscale nouvelle ; c'était annoncé de longue date, il n'y aura pas d'impôt de solidarité, même temporaire, après la crise. Pourtant, l'énorme stock d'épargne accumulé par les plus riches donnerait des marges de manœuvre ; mais vous êtes restés figés dans votre idéologie. Les baisses déjà votées seront reconduites : il y aura 6 milliards d'euros de prélèvements obligatoires en moins en 2022, du fait de la poursuite de la baisse de l'impôt sur les sociétés pour les plus grandes entreprises et de la suppression de la taxe d'habitation des 20 % les plus riches. Je le redis, vous êtes la majorité des riches.
L'extinction progressive des dispositifs de soutien à l'économie offre de nouvelles marges de manœuvre budgétaires qui vous permettront de distribuer quelques crédits nouveaux à certains ministères, à quelques mois des échéances électorales. Ce procédé et la faible consistance de votre budget ne sauraient cacher votre idéologie néolibérale, tournée vers la réduction des dépenses et de la place de l'État. En laissant planer en permanence le spectre de la dette publique et en refusant d'aller chercher l'argent là où il est, c'est-à-dire chez les plus riches et dans les grandes entreprises, vous ne faites que confirmer que, bientôt, vous irez le prendre chez les plus pauvres grâce aux réformes antisociales prévues de longue date, comme celles de l'assurance chômage ou des retraites.
Les quelques dépenses nouvelles, qui ne sont en fait que des rattrapages et qui sont un élément de la future campagne présidentielle, ne cacheront pas le bilan net d'un quinquennat des riches, marqué par des baisses d'impôts faramineuses pour ces derniers et par une hausse sensible des inégalités économiques comme du nombre de pauvres et d'allocataires des minima sociaux.
Monsieur le ministre, la répartition des richesses dans notre pays est très injuste, reconnaissez-le. Pourriez-vous envisager une contribution exceptionnelle des hauts revenus et des hauts patrimoines, dont le produit serait réservé au remboursement de la dette covid ? Ce ne serait que justice. Mais vous direz sans doute non, puisque vous êtes la majorité des riches.
Pour reprendre votre expression, monsieur le président, le présent projet de loi de finances accompagne la sortie de crise. Il ne laisse pas filer la dépense, il ne revient pas brutalement à l'austérité ; nous réduisons les dispositifs de soutien – la preuve, la mission Plan d'urgence face à la crise sanitaire connaît une sous-consommation de 8 milliards d'euros –, mais nous ne taillons pas massivement dans les dépenses publiques dès 2022, car cela tuerait la croissance, laquelle est la meilleure protection que l'on puisse apporter aux Français, pour leur niveau de vie et pour réduire la dette.
Je suis tout à fait prêt à saisir à nouveau le Haut Conseil des finances publiques ; nous n'avons rien à cacher, nous sommes totalement transparents. J'ai expliqué les raisons pour lesquelles ne figurent dans cette première version ni le plan d'investissement ni les mesures destinées aux jeunes les plus éloignés de l'emploi, mais, je le répète, je suis tout disposé à une seconde saisine.
Concernant la sortie de crise, la situation économique est bien meilleure qu'anticipé : la croissance de retour – plus de 6 % selon les instituts statistiques – est l'une des meilleures de la zone euro. L'objectif est désormais une croissance qui puisse durer : il ne s'agit pas de revenir à la croissance molle d'avant la crise. C'est cet objectif, celui du plan d'investissement, que nous essayons de faire partager à nos partenaires européens.
Concernant la réduction de la dépense, vous connaissez, monsieur le président, ma religion à ce sujet, celle-là même que vous avez présentée avec Laurent Saint-Martin : il faut changer les règles. Il y a des invariants : la croissance, les réformes de structure. Il y a une conviction forte : aucune augmentation d'impôts. Il y a enfin une méthode : la pluriannualité des dépenses. Pourquoi ? Parce qu'un volume global de dépenses sur cinq ans nous obligera tous à faire des choix démocratiques entre telle dépense et telle autre. Je propose depuis deux ans que la règle de pluriannualité des dépenses soit constitutionnelle. J'ai vu que l'un des candidats à l'élection présidentielle, Xavier Bertrand, reprenait cette proposition ce matin dans Les Échos ; tant mieux ! Si elle fait florès et si chacun, en particulier dans cette commission où siègent des spécialistes des comptes publics, comprend que la meilleure façon de tenir la dépense est de s'engager sur cinq ans, nous aurons fait tous ensemble œuvre utile – je tiens à vous en remercier, monsieur le président, ainsi que M. le rapporteur général.
Monsieur le rapporteur général, la dette va passer de 116 % du PIB en 2021 à 114 % en 2022. Sa réduction se ralentira ensuite puisque nous n'aurons plus le même niveau de croissance. Cela rend nécessaire de repasser sous les 3 % de déficit, dont je ne fais pas un fétiche, mais qui est le chiffre à partir duquel le ratio de dette sur PIB commence à baisser. Voilà pourquoi nous avons fixé à 2027 l'objectif de retour sous les 3 % de déficit.
La règle des 60 % de dette publique, qui pouvait avoir du sens à l'époque où un pays était à 55 % d'endettement public et un autre à 70 %, est obsolète aujourd'hui quand un État membre se rapproche des 70 % tandis qu'un autre, l'Italie, atteint presque les 170 %. Il faut donc imaginer – nous y travaillons avec nos partenaires européens, sur le fondement des propositions de la Commission et de manière sereine – la meilleure façon de réduire l'endettement public de chacun des membres de la zone euro sans que la règle s'impose comme un couperet à tous au même moment, ce qui est devenu tout simplement hors de portée. Une bonne politique de finances publiques tient compte de la réalité, et non des rêves de chacun.
D'autre part, il ne peut pas y avoir de zone monétaire commune sans règles communes. Ceux qui pensent que l'on peut s'affranchir de toutes les règles, alors que nous sommes dix-neuf et que nous avons été bien contents de profiter de la solidarité pendant la crise, se trompent. Certaines règles sont dépassées – les 60 % de dette publique –, d'autres restent nécessaires – les 3 % de déficit –, mais, de manière générale, nous avons besoin de règles communes, respectées par tous. La solidarité vaut quand les choses vont mal, mais aussi quand elles vont bien.
La dette covid s'élèvera à 165 milliards d'euros et elle sera isolée : nous avons prévu 1,9 milliard d'euros en crédits de paiement pour commencer l'amortissement en 2022, et nous vous proposons que 6 % des recettes fiscales nouvelles soient affectées chaque année au remboursement de cette dette, afin de tenir l'objectif d'une fin d'amortissement en 2042. Vous voyez que nous ne voulons pas laisser toutes les recettes fiscales partir dans de nouvelles dépenses.
S'agissant enfin des deux éléments qui doivent être étudiés dans la suite de l'examen du projet de loi de finances, le plan d'investissement et les mesures de soutien aux jeunes, je vous confirme qu'ils seront introduits par voie d'amendement en première lecture à l'Assemblée nationale.
Monsieur Holroyd, je partage entièrement votre objectif d'affecter les recettes nouvelles à la réduction du déficit – et le surcroît de recettes nouvelles à l'amortissement de la dette, comme je l'ai dit. On ne peut pas parler de cagnotte quand il y a encore 4,8 % de déficit et 114 % de dette publique : il y a des comptes à rééquilibrer.
Madame Louwagie, au gruyère, je préfère le comté – ce qui paraît aller de soi pour un ministre des finances ! Dans le comté, il n'y a pas de trous ; dans notre PLF non plus. Simplement, deux objets sont mis à part, sur étagère ; nous les étudierons plus tard, pour des raisons sur lesquelles je ne reviens pas. Il y a dans ce budget une sincérité à laquelle nous tenons.
Monsieur Barrot, la pénurie de main-d'œuvre est l'une des deux grandes questions préoccupantes pour l'économie française, avec l'augmentation du coût des matières premières. Remédier à la première suppose d'accélérer le déploiement du mécanisme de formation et celui du PIC, le plan d'investissement dans les compétences, qui doit nous permettre de créer de nouvelles qualifications et formations pour ceux qui en ont besoin – Élisabeth Borne y œuvre. Il faut également maintenir les dispositifs de soutien à l'apprentissage, ce que le Premier ministre a décidé de faire en 2022 pour un demi-milliard d'euros – de l'argent bien employé. L'apprentissage est devenu en France une habitude et un succès, ce qui est une excellente nouvelle.
Il faudra aussi accompagner davantage, sur le modèle de la garantie jeunes, les jeunes les plus éloignés de l'emploi, sans diplôme, sans qualification, en rupture sociale. C'est difficile, mais c'est l'un des chantiers majeurs auxquels nous devrons nous atteler dans les semaines qui viennent.
En revanche, madame Pires Beaune, nous ne croyons pas au RSA pour les jeunes – même s'il est bon que nous ayons à ce sujet un débat démocratique. Selon nous, il faut des contreparties fortes et il faut accompagner avant de fournir un revenu, lequel ne doit être que le complément de l'accompagnement. Celui-ci, et le fait que les jeunes aient un emploi, sont la priorité absolue.
Quant à l'investissement, je veux vous rassurer : il n'y aura aucun saupoudrage. L'objectif est de privilégier quelques filières particulières, qui seront au cœur du plan d'investissement : l'hydrogène vert, pour lequel nous sommes remarquablement bien placés ; les semi-conducteurs, dont la pénurie peut, comme l'a montré la crise, ralentir le fonctionnement de certaines usines automobiles et d'autres usines industrielles partout en France ; les technologies liées à l'intelligence artificielle ; l'espace, domaine dans lequel nous devons rattraper notre retard en matière de lanceurs renouvelables.
Je vous confirme enfin que la baisse de l'impôt sur les sociétés profite à toutes les entreprises, les PME bénéficiant d'un taux réduit à 15 %. Quant à la baisse de l'impôt sur le revenu, elle a été concentrée sur les deux premières tranches, donc sur les contribuables les plus modestes.
Madame Magnier, l'effort budgétaire doit nous permettre, je l'ai dit, de parvenir à 3 % de déficit en 2027. Nous avons préféré cette date à celles de 2025 ou de 2028 et, plutôt qu'une trajectoire brutale, nous avons préféré un retour progressif à l'équilibre budgétaire pour ne pas risquer de casser la croissance. Celle-ci est, je le répète, l'une des plus fortes de la zone euro : il est essentiel de la préserver et de l'alimenter à long terme par le plan d'investissement.
Monsieur de Courson, vous avez dû mal m'écouter : je n'ai jamais prétendu avoir rétabli les comptes publics entre 2017 et 2021, seulement entre 2017 et 2019 – en 2020 et 2021, nous avons géré la crise économique la plus grave survenue depuis 1929.
Concernant le commerce extérieur, je partage votre analyse. Je dis depuis plusieurs semaines que le prochain défi que nous allons tous devoir nous atteler à relever est l'équilibre de la balance commerciale extérieure de la France, qu'il faut rétablir si nous voulons une nation économiquement puissante. Nous avons commencé à prendre des dispositions pour améliorer la compétitivité-coût : les mesures touchant les impôts de production, les charges sociales et l'ensemble des coûts qui pèsent sur les entreprises. Nous avons également entrepris d'améliorer la compétitivité hors coût, en maintenant le crédit d'impôt recherche, en soutenant l'innovation, en préparant le plan d'investissement. Tout cela devrait produire des résultats, mais je dis cela avec humilité : la dernière fois que la balance commerciale française n'a pas été dans le rouge, c'était il y a plus de vingt ans, en 2000, et depuis, elle connaît une lente et incessante dégradation. Soyons honnêtes : ce n'est pas en un an ou deux que l'on redressera la barre. Cela implique des choix stratégiques de long terme.
M. Dufrègne a justement salué notre stabilité, pour mieux la dénoncer – mais je prends cette attaque comme un compliment. Nous faisons en effet preuve de stabilité dans notre politique de l'offre, car je la crois bonne pour créer des emplois et pour la prospérité ; mais nous ne sommes pas « figés dans notre idéologie libérale » – Milton Friedman doit se retourner dans sa tombe en entendant traiter de libéral un ministre de l'économie qui a dépensé autant de milliards d'euros : ce n'est pas la position d'un libéral pur et dur. Je rappelle en outre que la « majorité des riches » a augmenté la prime d'activité des plus modestes, les primes défiscalisées, supprimé les charges salariales, revalorisé l'intéressement et la participation et permis à un salarié rémunéré au niveau du SMIC de toucher en moyenne 170 euros de plus par mois. J'appelle plutôt cela une politique de justice.
Enfin, monsieur Coquerel, quand vous me qualifiez de meilleur propagandiste, venant d'un connaisseur en la matière, le compliment vaut son pesant d'or ! Mais il ne s'agit pas de propagande : 750 000 emplois créés durant le quinquennat, chiffre de l'INSEE ; 6,3 % de croissance, chiffre de la Banque de France ; 6,2 % de croissance, chiffre de l'OCDE ; 6,1 %, chiffre du Fonds monétaire international ; taux de chômage de 8 %, source Pôle emploi ; gain de pouvoir d'achat de 1,4 % l'année dernière, chiffre de l'OFCE, l'Observatoire français des conjonctures économiques. Soit tout le monde est propagandiste, soit personne ne l'est ; je crois que cette dernière option est la bonne.
Monsieur le rapporteur général, les mesures fiscales du plan Indépendants qui sont inscrites dans le PLF sont les suivantes : l'exonération des plus-values pour les cessions individuelles ; la modification des délais d'exercice du droit d'option ; la déduction fiscale, à titre temporaire, des amortissements pour les reprises de fonds de commerce ; le crédit d'impôt pour la formation des dirigeants. Les autres mesures de ce plan seront inscrites dans le PLFSS ou dans un projet de loi dédié.
Madame Louwagie, madame Pires Beaune, il y a deux explications à l'écart constaté dans l'avis du Haut Conseil des finances publiques s'agissant des recettes. Premièrement, nous n'avons pas retenu l'hypothèse de 6,3 % de croissance, nous limitant à 6 % par prudence. Deuxièmement, il me semble, madame Pires Beaune, que vous confondez la masse salariale de la fonction publique et la masse salariale totale. Le Haut Conseil se réfère à l'évolution de la masse salariale totale et à ses effets sur les cotisations sociales. Nous avons arrêté le document transmis au HCFP le 8 septembre, avant la publication des chiffres de l'INSEE sur la reprise de l'emploi, ce qui peut expliquer que le Haut Conseil, travaillant sur des données plus récentes, juge sous-estimées des recettes de cotisations sociales liées à la masse salariale.
Enfin, certaines des mesures annoncées ne relèveront pas du PLF pour 2022. Ainsi, le chèque énergie sera financé dans le projet de loi de finances rectificative pour 2021 par redéploiement de crédits d'urgence non consommés. Quant au décret relatif aux régies thermales – et à d'autres régies –, il sera soumis à l'avis du prochain Comité des finances locales ; les notifications seront faites dans la foulée et la totalité des versements sera effectuée avant le 31 décembre, pour bien respecter l'annualité budgétaire.
Je vous remercie, messieurs les ministres, pour le travail constant qui est fait depuis le début du mandat, n'en déplaise à ceux qui n'y croient pas.
Ma question porte sur le prêt garanti par l'État (PGE). Alors que les vendanges sont en cours, on peut être inquiet pour les viticulteurs, qui ont subi de plein fouet le gel, les inondations, les maladies. Il leur sera très difficile d'amortir le PGE sur une durée de quatre ans ; ils risquent, ce faisant, de mettre en difficulté leur entreprise. Les trois quarts d'entre eux ont utilisé tout ou partie du PGE. J'ai conscience de la difficulté de l'exercice, mais ne peut-on trouver des solutions, par exemple en augmentant la durée d'amortissement du prêt ou en proposant des consolidations des encours bancaires à des taux d'intérêt bonifiés ? Le cas par cas peut fonctionner, mais on connaît les banques : si votre ministère ne prend pas une décision, ne diffuse pas un message fort, je crains qu'en 2022, voire en 2023, les viticulteurs – pour ne citer qu'eux – soient en difficulté.
Je vous poserai trois questions.
Premièrement, ne pensez-vous pas, que, lorsque l'on consacre 9,5 % du PIB à un plan de relance et que la croissance est de 6 points, on est plus en présence d'un diviseur que d'un multiplicateur keynésien ?
Deuxièmement, vous prévoyez 18,4 milliards d'euros de recettes au titre de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques. Compte tenu de l'évolution des prix de l'énergie, ne comptez-vous pas baisser la taxation sur les énergies afin d'accroître le pouvoir d'achat des Français ?
Troisièmement, une diminution d'environ 200 millions d'euros des crédits de la mission Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation est inscrite dans le PLF pour 2022. Je ne comprends pas comment, dans ces conditions, vous comptez appliquer le plan de 300 millions d'euros annoncé en faveur des harkis par le Président de la République. S'agissait-il d'une proposition pour 2023 ?
Nous avons conscience que vous êtes confrontés à des objectifs contradictoires et que cet exercice budgétaire s'apparente à une quadrature du cercle. Nous vous souhaitons bien sincèrement de réussir.
Vous renforcez la fonction régalienne de l'État, ce qui est heureux, mais il conviendrait, parallèlement, de mieux territorialiser France Relance. Le plan apparaît mal calibré pour certains territoires. Il est parfaitement inadapté à la Corse, territoire qui est le plus affecté par la crise mais qui sera, in fine, le moins aidé. Il faut adapter du mieux possible la politique publique à la diversité des réalités territoriales de la France – et je ne parle pas seulement de la Corse.
Les collectivités territoriales ont bien résisté à la crise. Les chiffres sont connus : elles ont supporté, pour faire face à la crise, des coûts de l'ordre de 4 milliards d'euros, contre 160 milliards pour l'État. Leurs dépenses sont restées stables en 2020. Elles ont retrouvé la capacité d'autofinancement qu'elles connaissaient en 2018. Elles ont mieux traversé la période que l'État et la sécurité sociale.
Je voudrais saluer, dans ce contexte, le maintien des dotations de l'État, même si cela est devenu assez banal, puisque cette politique est menée avec constance depuis cinq ans. Lors de la crise précédente, la majorité de droite avait agi tout autrement : l'une des premières décisions de François Baroin, alors ministre du budget, avait été de désindexer les dotations aux collectivités territoriales. Sous la législature précédente, la majorité de gauche a baissé ces mêmes dotations de 10 milliards d'euros par an – 50 milliards sur la durée du quinquennat – pour redresser les comptes de l'État. Nous avons fait un choix différent, et je salue les mesures qui ont été prises. Nous considérons que les collectivités territoriales sont des partenaires pour le plan de relance. Nous les soutenons, pour leurs dépenses tant d'investissement que de fonctionnement.
Quel sera le poids des dépenses des collectivités territoriales dans l'ensemble des dépenses publiques en 2021 et en 2022 ? Quelle sera la part de leur dette dans l'ensemble de l'endettement public ?
Pour faire écho aux propos de Mme Louwagie, je dirais que, si votre budget a l'odeur du maroilles, il a la consistance du gruyère. Il a un certain parfum de campagne : celui d'un président aux abois qui fait chauffer la carte bleue d'un compte à découvert. Le budget est plein de trous. De belles annonces sont faites, dont on ne trouve pas la traduction budgétaire, alors que la présentation du PLF devrait être un moment de vérité.
On peut se demander, par exemple, où sont les crédits du fonds friches : on ne peut parler de réindustrialisation des territoires sans prévoir les moyens correspondants.
Même question pour le fonds d'indemnisation relatif aux aléas climatiques. Les agriculteurs s'inquiètent. Ils veulent savoir si les 600 millions d'euros promis proviennent, ou non, de la ligne budgétaire de la politique agricole commune (PAC). On annonce un projet de loi pour 2023.
Enfin, on peut s'attendre, au cours de nos débats, à des amendements coûteux. Allez-vous, oui ou non, consulter pour avis le Haut Conseil des finances publiques, comme son président l'a demandé ce matin ?
En ma qualité de rapporteure spéciale des crédits des transports – je parle également au nom de ma collègue co-rapporteure, Zivka Park –, je souhaiterais que vous précisiez les modalités pratiques de la fin de la reprise de la dette de la SNCF par l'État – à hauteur de 10 milliards d'euros – en 2022. La hausse des crédits du programme 355, qui porte sur la charge de la dette de SNCF Réseau, est-elle uniquement due à la reprise des 10 milliards d'euros supplémentaires ?
Je reviens également sur l'annonce de la stratégie nationale pour le développement du fret ferroviaire. La pérennité de ce soutien est vitale pour la compétitivité du secteur ; elle renforcera la visibilité des opérateurs. Cette enveloppe est-elle prévue au sein du programme 203, Infrastructures et services de transport ?
Madame Verdier-Jouclas, d'après nos évaluations, en dehors d'exceptions dont il faut tenir compte, il ne devrait pas y avoir de difficultés massives de remboursement des prêts garantis par l'État au printemps prochain. Nous avons déjà offert la possibilité à ceux qui le souhaitaient de reporter le remboursement d'un an, en le faisant débuter en 2022. Il faut être très prudent avant d'envisager une mesure générale, car cela ne rendrait pas service aux emprunteurs. À un moment donné, il faut rembourser les prêts que l'on a contractés. Lorsque la croissance est élevée et la situation économique favorable, c'est le bon moment pour rembourser ses dettes. Repousser sans cesse l'échéance peut être risqué.
Cela étant, je suis favorable à ce que nous apportions des réponses au cas par cas à certaines entreprises en grande difficulté, dans les secteurs particulièrement touchés. Je pense, par exemple, aux agences de voyages, dans un contexte marqué par une très faible reprise du trafic aérien de longue distance. Certains agriculteurs pourraient également rencontrer des difficultés particulières. Je privilégie un traitement au cas par cas. Nous sommes en discussion avec la Fédération bancaire française ; nous souhaitons qu'il soit fait preuve d'un peu plus de souplesse à l'égard de certains. Cela doit toutefois rester l'exception : la règle est le remboursement.
Monsieur Aubert, lorsque nous avons annoncé le plan de relance, on nous a dit : 100 milliards, ce n'est pas assez. À présent, certains nous disent que c'est trop. Je constate qu'au bout du compte, la relance économique est là. Ce qu'on attend d'un plan de relance, c'est une reprise de la croissance économique. Nous connaissons aujourd'hui, à cet égard, un des meilleurs résultats de la zone euro, ce qui montre que le plan de relance a été bien calibré et bien appliqué.
S'agissant du prix de l'énergie, nous avons fait le choix d'une réponse ciblée et massive, à travers le chèque énergie. Alors que celui-ci concernait 3,7 millions de personnes au début du quinquennat, il est aujourd'hui versé à près de 6 millions de personnes. Grâce à l'aide exceptionnelle de 100 euros, son montant moyen va passer à 250 euros. Nous allons faire en sorte qu'il soit attribué d'ici à la fin de l'année 2021, en puisant dans les crédits d'urgence. C'est bien une urgence, en effet, que de permettre aux gens de se chauffer dans de bonnes conditions. Pour l'heure, cela reste la meilleure réponse, mais nous suivons évidemment de très près l'évolution des prix de l'énergie.
Monsieur Castellani, nous nous attachons à territorialiser toujours plus France Relance.
Monsieur Bricout, nous avons presque fait le tour des fromages de France. Je recommanderai, pour terminer, le neufchâtel – qui se présente sous la forme d'un cœur.
Concernant les anciens combattants, la baisse des crédits est liée à la démographie et à la diminution du nombre d'ayants droit et d'ayants cause. La baisse n'est toutefois pas proportionnelle, car nous revalorisons la pension militaire d'invalidité – mesure qui était attendue par le monde combattant. Le Président de la République a annoncé une mesure concernant les harkis, qui n'est pas intégrée dans le PLF. En effet, nous ne savons pas encore si nous la financerons par le collectif budgétaire de fin de gestion ou par le PLF pour 2022. Cela dépendra des modalités choisies et du lien qu'il faudra éventuellement établir entre la loi de réparation annoncée et la budgétisation. Si la loi définissait des critères d'éligibilité, cela aurait nécessairement un impact sur le volume financier.
Pour ce qui concerne la territorialisation du plan de relance, j'abonde dans le sens de Bruno Le Maire. J'ai constaté, il y a quelques semaines, alors que je me trouvais en Corse, que 110 millions d'euros avaient déjà été mobilisés au profit de ce territoire. Cette somme, relativement importante, correspond tout à fait à la moyenne nationale.
Monsieur Cazeneuve, les collectivités territoriales devraient représenter 19,8 % de la dépense publique totale en 2022, soit 285 milliards d'euros sur un total de 1 439 milliards. La contribution des collectivités à l'endettement global, en 2022, devrait être nulle. En effet, nous pensons que le solde, tous comptes confondus, des collectivités en 2022 redeviendra légèrement excédentaire, comme il l'était en 2019 – année où il a atteint 1,2 milliard, avant de devenir nul en 2020.
Monsieur Bricout, le fonds friches relève du plan de relance. Il sera financé par redéploiement au sein de ce plan, à l'occasion du collectif de fin de gestion. Le PLF que nous vous proposons prévoit de premiers redéploiements au sein du plan de relance à hauteur de 1,2 milliard d'euros, notamment du fait d'une moindre mobilisation des garanties à l'export et d'une moindre consommation des primes à la conversion automobile. Le collectif de fin de gestion proposera d'autres redéploiements pour tenir compte des annonces qui ont été faites. C'est le cas, au sein de la mission Plan de relance, du fonds friches. La pérennisation annoncée par le Président de la République concernera l'exercice 2023. C'est le cas également s'agissant de mesures d'urgence : le chèque énergie sera ainsi financé au titre de la mission Plan d'urgence face à la crise sanitaire, par redéploiement, cette mission se caractérisant par une sous-consommation d'environ 8 milliards d'euros, du fait de la bonne reprise de l'activité économique.
Madame Lebec, la dette de la SNCF est bien reprise à hauteur de 10 milliards d'euros. La novation tient au fait que l'État reprend les obligations que la SNCF avait contractées. Cela s'apparente à la reprise d'un prêt. D'autre part, le financement du plan fret est bien prévu dans le programme 203 : il n'y a aucune inquiétude à nourrir à cet égard.
Membres présents ou excusés
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire
Réunion du mercredi 22 septembre 2021 à 15 heures
Présents. - M. Saïd Ahamada, M. Éric Alauzet, M. Patrice Anato, M. Julien Aubert, M. Jean-Noël Barrot, Mme Émilie Bonnivard, Mme Aude Bono-Vandorme, M. Jean-Louis Bricout, Mme Émilie Cariou, M. Gilles Carrez, M. Michel Castellani, Mme Anne-Laure Cattelot, M. Jean-René Cazeneuve, M. Philippe Chassaing, M. Francis Chouat, M. Éric Coquerel, M. François Cornut-Gentille, M. Charles de Courson, M. Benjamin Dirx, M. Jean-Paul Dufrègne, Mme Stella Dupont, M. Alexandre Holroyd, M. Christophe Jerretie, M. François Jolivet, M. Mohamed Laqhila, Mme Marie Lebec, Mme Patricia Lemoine, M. Fabrice Le Vigoureux, Mme Véronique Louwagie, Mme Lise Magnier, Mme Cendra Motin, Mme Catherine Osson, M. Xavier Paluszkiewicz, M. Hervé Pellois, Mme Bénédicte Peyrol, Mme Christine Pires Beaune, M. François Pupponi, M. Xavier Roseren, Mme Claudia Rouaux, M. Laurent Saint-Martin, Mme Marie-Christine Verdier-Jouclas, M. Éric Woerth
Excusés. - M. Damien Abad, Mme Marie-Christine Dalloz, Mme Frédérique Lardet, M. Marc Le Fur, Mme Valérie Rabault, M. Olivier Serva
Assistaient également à la réunion. - M. Lionel Causse, M. Fabien Di Filippo, M. Jacques Marilossian