Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Réunion du mardi 1er juin 2021 à 17h15

Résumé de la réunion

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La réunion

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La commission, réunie en commission d'évaluation des politiques publiques, entend Mme Amélie de Montchalin, ministre de la transformation et de la fonction publiques.

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J'accueille avec plaisir Mme Amélie de Montchalin et M. Olivier Dussopt pour examiner, en deux discussions, les politiques publiques relevant du ministère de la transformation et de la fonction publiques et du ministère de l'économie, des finances et de la relance. Nous sommes attachés à cet exercice. Amélie de Montchalin le sait bien, elle qui a largement participé à la création des CEPP et à l'installation de l'idée que le rôle de notre commission est aussi d'évaluer les politiques publiques, même si nous sommes une institution politique.

Je rappelle rapidement les règles des temps de parole pour chacune des discussions : les rapporteurs spéciaux disposent de dix minutes pour présenter l'exécution et la consommation des crédits ainsi que le thème qu'ils ont choisi de traiter ; les rapporteurs pour avis, s'ils sont présents, ont cinq minutes ; le rapporteur général et le président de la commission ont eux aussi cinq minutes chacun, s'ils veulent les utiliser ; les ministres leur répondent en quinze minutes, suivis des orateurs des groupes et des inscrits, auxquels ils s'efforcent de répondre dans le même laps de temps.

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Les travaux d'évaluation que j'ai conduits cette semaine ont concerné la direction des impôts des non-résidents, qui gère les obligations fiscales des particuliers non-résidents percevant des revenus de source française et les entreprises étrangères sans établissement stable dans notre pays. Mais avant de vous présenter mes conclusions sur ce thème, je vous propose de détailler l'exécution des crédits de la mission Gestion des finances publiques et Actions et transformation publiques dans le contexte inédit de l'année écoulée.

Les administrations de Bercy ont été très fortement mobilisées depuis le début de la crise sanitaire pour assurer la continuité des missions essentielles de l'État et des administrations publiques, pour appliquer les mesures de soutien à l'économie prises par le Gouvernement et pour garantir la protection de nos citoyens, notamment au travers de la surveillance aux frontières au respect des normes applicables et aux produits sanitaires.

La direction générale des finances publiques (DGFIP) et la direction générale des douanes et des droits indirects (DGDDI), ont rapidement adapté leur organisation pour faire face à cette crise sanitaire, et ont montré une remarquable résilience grâce à la mobilisation de leurs personnels que je tiens à souligner. Je salue leur implication sans faille, ainsi que j'ai eu l'occasion de le dire aux organisations représentatives des personnels avec lesquelles j'ai échangé il y a quelques semaines.

L'exécution de la mission Gestion des finances publiques, composée des programmes 156, 218 et 302, s'élève à 10,1 milliards d'euros en autorisations d'engagement (AE) et 10 milliards d'euros en crédits de paiement (CP). Elle est légèrement inférieure à l'autorisation budgétaire, avec un taux d'exécution à 98 %. Cette sous-consommation mineure est portée pour les trois cinquièmes par la DGFIP. Elle s'explique notamment par des difficultés chroniques de recrutement, qui n'ont pas permis de compenser les départs à la retraite. En décalant les concours, la crise sanitaire a mis en exergue la baisse d'attractivité, déjà observée les années passées, des métiers historiques des deux grandes administrations de Bercy, qui accentue la diminution du schéma d'emplois. Il y a là un vrai sujet. Le manque de ressources pourrait avoir, dans les prochaines années, un impact non négligeable sur la capacité de ces administrations essentielles pour l'État à bénéficier de compétences nouvelles en phase avec les besoins liés aux changements des métiers, donc à exercer pleinement leurs missions. Quelles mesures envisagez-vous de prendre pour fluidifier le renouvellement des compétences et renforcer l'attractivité des métiers de la douane et de l'administration fiscale ?

Par ailleurs, dans le cadre de son contrat d'objectifs et de moyens, la DGFIP a poursuivi ses grands chantiers de transformation, avec le déploiement du nouveau réseau de proximité qui se traduit par son engagement dans la démarche France services et l'application du paiement de proximité afin d'offrir à tous les citoyens, quel que soit l'endroit où ils résident sur le territoire, un service public de grande qualité. Cette déconcentration de proximité s'est accompagnée de la constitution du réseau des conseillers aux décideurs locaux et de l'installation des premiers services de gestion comptable, qui facilitent d'ores et déjà le quotidien des élus. À la fin 2020, près de la moitié du chemin est parcourue.

Conformément aux décisions prises en lois de finances 2019 et 2021, le transfert de certaines taxes douanières vers la DGFIP s'est poursuivi en 2020, avec le transfert d'une partie de la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP), après celle des boissons non alcoolisées l'année dernière. Monsieur le ministre, quels constats peuvent être effectués quant au rendement de ces taxes après leur transfert et à leur admission en non-valeur ? Ces transferts ont-ils été accompagnés de transferts d'effectifs ?

J'en viens à la mission Action et transformation publiques, créée en 2018 avec le grand plan d'investissement, et qui retrace les crédits interministériels en matière d'action publique à travers quatre programmes qui fonctionnent suivant une logique d'appels à projets et, mis à part le programme 348, sous forme de cofinancement.

La sous-consommation des crédits de paiement est massive : 113 millions d'euros, soit 26 % seulement des crédits ouverts en loi de finances initiale. Néanmoins, les projets financés dans le cadre de ces programmes paraissent pertinents, innovants, sélectionnés avec méthode et utiles à la transformation des administrations publiques. Le pilotage est rigoureux, mais la programmation initiale excessivement volontariste et les premiers mois de la crise sanitaire ont entraîné des décalages calendaires plus ou moins significatifs selon les programmes. Concernant le programme 348, relatif à la rénovation des trente-huit cités administratives, l'enveloppe d'un milliard d'euros a été totalement affectée aux opérations immobilières. La programmation initiale était particulièrement optimiste et prévoyait l'engagement des travaux en 2020. À partir de mars 2020, le confinement a entraîné des ajustements et a amplifié des décalages déjà constatés en 2019 dans les calendriers de lancement des projets, en reportant à cette année voire au début de l'année 2022 le démarrage effectif des travaux. Les livraisons sont prévues jusqu'en 2024 au moins. Au regard de ces glissements de calendrier, du caractère insolite de l'inclusion de ce programme immobilier dans cette mission budgétaire et de la nature résiduelle des crédits portés, à terme, par le programme, je considère que celui-ci devrait éventuellement être intégré à la mission Gestion du patrimoine immobilier de l'État.

Concernant le fonds de transformation de l'action publique (FTAP), doté de 685 millions euros, 612 millions d'euros ont été engagés en 2020. L'enveloppe sera consommée en totalité en juillet de cette année. Les délais de contractualisation des projets sont assez longs et ralentissent la montée en charge du FTAP s'agissant des crédits de paiement. Le financement de ces projets de transformation devrait durer jusqu'en 2023. Malgré une montée en charge plus lente que prévu, le maintien d'un fonds cofinançant des projets interministériels complexes d'envergure et de nature à générer des gains d'efficience paraît essentiel. Je propose donc, avec un certain nombre d'ajustements, qu'un tel fonds soit pérennisé au-delà de 2022.

La mission comprend également deux programmes de petite taille : le Fonds d'accompagnement interministériel aux ressources humaines (FAIRH), destiné au financement de reconversion et de mobilité des agents dans le cadre de transformation des services ou d'opérateurs ; le Fonds pour l'accélération du financement des start-up État, le FAST, qui finance l'émergence de produits et de services numériques innovants destinés à résoudre des problèmes de politique publique. En ce qui concerne le premier, les dépenses s'élèvent à 15 millions d'euros. Ce fonds souffre d'une incapacité structurelle à se déployer. Dans un souci de clarté et de cohérence budgétaire, je préconise de lancer une réflexion quant à son possible rattachement au programme 148. Pour sa part, le FAST représente 10 millions d'euros en AE. Sa lisibilité budgétaire est restreinte. Je recommande une modification de la maquette budgétaire pour ce programme. Les réflexions relatives à ces deux programmes devraient donc logiquement mener à une refonte de la maquette budgétaire de la mission. Pourriez-vous nous indiquer, madame la ministre, quelles sont les évolutions que vous envisagez pour eux dans le projet de loi de finances ?

J'en viens au thème d'évaluation retenu cette année dans le cadre de mon rapport spécial. La Direction des impôts des non-résidents à compétence nationale de la DGFIP est en charge de la gestion des contribuables non-résidents, au nombre de 306 000 dont 260 000 particuliers 46 000 entreprises. Créée en 2017, la DINR a des attributions très larges, et son budget hors titre 2 est relativement modeste, à 1,3 million d'euros en comptant les loyers. À contre-courant de la tendance de la direction générale dont elle dépend, et pour pallier la sous-estimation conséquente des missions qui lui ont été initialement confiées, la DINR a bénéficié d'importants renforts de personnels, correspondant à une augmentation d'effectifs de 30 % depuis 2018, pour atteindre 453 ETP, équivalents temps plein, fin décembre 2020. Ce renforcement, important mais toujours en cours de déploiement, associé un investissement croissant dans la modernisation des outils de travail commence à porter des résultats. Ils sont particulièrement salvateurs alors que plusieurs contentieux majeurs, notamment les contentieux « OPCVM » et « De Ruyter/Dreyer », mobilisent fortement la direction. Celle-ci doit continuer à bénéficier des ressources nécessaires pour apurer ses contentieux au mieux des intérêts de l'État.

Il convient également de consolider ces progrès, en continuant à investir dans la formation et dans la numérisation. Les chantiers informatiques de la DINR s'inscrivent dans la programmation informatique plus large de la DGFIP. Il est essentiel de redoubler d'efforts en matière de développement de l'outil informatique, pour améliorer in fine la rapidité et la fiabilité du traitement des dossiers, et pour moderniser les outils de travail d'agents confrontés à des cas complexes par nature.

Devant faire face à une croissance annuelle importante du nombre de contribuables non-résidents et mobilisée pour les contentieux d'emploi mentionnés ci-dessus, toute tentative d'évaluation de la DINR est inextricablement liée à la matière que ces agents sont amenés à traiter, à savoir la fiscalité des non-résidents. Au-delà d'une comparaison classique d'indicateurs temporels, et pour établir une base de comparaison, j'ai sollicité douze parlements et administrations fiscales étrangers, dont huit de l'Union européenne. Quatre remarques découlent de cette brève étude comparative qui illustre la diversité des modalités d'imposition des contribuables non-résidents. Premièrement, si la fiscalité des non-résidents est, de façon systématique, distincte de celle des résidents, elle est, dans l'immense majorité des cas, structurée selon les mêmes principes – par exemple avec l'application d'un même barème. Aucun autre État n'établit un taux minimum variable comme c'est le cas en France. Deuxièmement, aucun pays consulté n'intègre ou ne requiert des déclarations de revenus monde pour les contribuables non-résidents. En conséquence, aucune administration fiscale interrogée ne doit composer avec plusieurs modalités d'imposition distinctes comme c'est le cas en France. Enfin, cette simplicité permet au pays interrogé de traiter l'imposition des non-résidents dans le même cadre que celui de l'imposition des résidents et d'appliquer la retenue à la source qui est applicable dans la majorité des pays étudiés.

Ces quatre remarques appellent une conclusion principale. Si les frustrations exprimées par des représentants des contribuables non-résidents à l'encontre de l'administration fiscale ont pu être liées à un manque d'agents et à une dette technologique importante, ils sont surtout et avant tout le reflet d'une complexité de notre droit fiscal applicable aux non-résidents, qu'aucun investissement ne saura résoudre et qui requiert un traitement à part par une direction dédiée, contrairement à la majorité de nos voisins européens. Cette complexité restera un obstacle à la pleine satisfaction du contribuable, difficilement remédiable quels que soient les investissements dans la DINR. En d'autres termes, la conclusion principale de cet exercice d'évaluation est que la solution des problèmes de la DINR est sans doute plus à chercher rue de Bercy ou dans notre commission qu'à Noisy-le-Grand.

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J'apporterai des éléments d'appréciation concernant le programme 148 Fonction publique et la mission Crédits non répartis, qui a été fortement mise à contribution en 2020 pour financer des dépenses imprévues. Dans le cadre du Printemps de l'évaluation, je m'attacherai plus spécifiquement aux moyens affectés à l'action sociale interministérielle. Je ferai également part de certaines orientations pour le budget 2022.

L'exécution du programme 148 Fonction publique et de la mission Crédits non répartis en 2020 est évidemment à regarder sous le prisme de la crise sanitaire. L'exécution 2020 du programme 148 est inférieure à la prévision, avec un taux d'exécution de 95 % en AE et de 94 % en CP. La sous-exécution se concentre principalement sur l'action sociale interministérielle, car l'application de certaines prestations a été perturbée. C'est notamment le cas du chèque emploi service universel (CESU), qui présente une sous‑exécution de 9,6 millions d'euros. La crise sanitaire a également touché les activités de formation des fonctionnaires, dont les crédits diminuent de 6 % par rapport à 2019. Toutefois, malgré l'impact de la crise, le niveau des crédits est similaire à celui de 2019. En outre, le niveau des restes à payer est tout à fait maîtrisé.

Concernant la mission Crédits non répartis, la dotation pour dépenses accidentelles et imprévisibles – le programme 352 – a été, en toute logique et comme indiqué précédemment, fortement mise à contribution dans le cadre de la crise sanitaire. Outre les 424 millions d'euros d'AE et les 124 millions d'euros de CP votés dans la loi de finances initiale, le programme 552 a bénéficié de 1,62 milliard d'euros supplémentaire dans la deuxième loi de finances rectificative (LFR 2), soit une multiplication par quatre en AE. Ces crédits ont permis de financer le fonds de solidarité pour les entreprises, des achats de masques, la compensation des pertes d'exploitation des salles de spectacle et de cinéma et les aides aux plus précaires. La dotation a donc pleinement joué son rôle, en finançant des dépenses manifestement urgentes ou imprévisibles dans un contexte de crise sanitaire, économique et sociale. En outre, pour la première fois depuis 2008, elle n'a pas été utilisée pour financer les fonds spéciaux, signe d'une plus grande sincérité budgétaire. Cette avancée résulte de la hausse des crédits dédiés aux fonds spéciaux que nous avions votés dans la loi de finances pour 2020.

Dans le cadre du Printemps de l'évaluation, il m'a semblé pertinent de porter une attention particulière aux moyens apportés à l'action sociale interministérielle, qui représente 60 % des crédits du programme 148, soit 125 millions d'euros. Pour rappel, l'action sociale interministérielle vient compléter l'action sociale des ministères. Elle s'y ajoute. Elle repose sur des prestations individuelles : le chèque-vacances pour environ 40 millions d'euros, le CESU pour 28 millions d'euros, l'aide à l'installation des personnels pour 7 millions d'euros et l'aide au maintien à domicile pour 3 millions d'euros. Elle inclut aussi des dispositifs collectifs tels que la réservation de places en crèche, la réservation de logements sociaux, l'aide au logement temporaire et la rénovation des restaurants inter-administratifs, laquelle bénéficiera du plan de relance.

En 2019 et 2020, il faut noter une volonté du Gouvernement de mettre fin à une lente mais constante diminution des montants financiers globaux consacrés aux aides individuelles, en particulier pour le CESU. Même si des efforts ont été consentis ces dernières années pour répondre à certaines catégories sociales de fonctionnaires, notamment les familles monoparentales ou celles effectuant leur mission en outre-mer, le nombre global de bénéficiaires a diminué progressivement, en même temps que les seuils d'éligibilité s'érodaient. Il convient donc de souligner l'augmentation des dépenses de l'action sociale interministérielle durant la période récente. En 2020, le chèque-vacances a bénéficié de l'attribution exceptionnelle d'une bonification complémentaire de 100 euros pour les bénéficiaires du dispositif âgés de moins de quarante-cinq ans, engendrant une hausse de 5 millions d'euros en dépenses. En outre, les conditions d'attribution du CESU ont entraîné une hausse du nombre de bénéficiaires et une augmentation des crédits à hauteur de 28,5 millions d'euros.

En parallèle, les aides collectives ont été abondées afin de permettre la réservation d'un nombre supplémentaire de places en crèche. Cette évolution s'inscrit d'ailleurs dans une politique générale d'aide aux familles, avec la volonté d'atteindre 5 000 places en crèche d'ici à 2022 pour toutes les catégories d'agents publics.

En ce qui concerne la réservation de logements conventionnés, le dispositif a été relancé en Île-de-France en 2020, avec la réservation de 150 logements supplémentaires, après des années de stagnation. La création de dispositifs de logement temporaire témoigne d'une bonne dynamique, avec une consommation de 1,4 million d'euros en 2020 pour couvrir les dépenses exceptionnelles liées à la crise sanitaire, notamment dans les régions à forte tension immobilière.

Mes réflexions me conduisent à formuler plusieurs constats, qui sont autant de pistes d'amélioration pour le futur.

L'action sociale interministérielle manque encore de visibilité. Il me paraît nécessaire de la faire connaître davantage auprès des agents publics, pour que tous ceux qui y ont droit puissent en bénéficier. Le non-recours est une réalité.

Les outils d'évaluation de l'action sociale interministérielle sont encore très limités. Il me paraît important de les développer, pour mieux cerner les besoins des agents qui en bénéficient. À cet égard, les enquêtes de satisfaction menées par la DGAFP présentent encore des biais. Leur externalisation prochaine devrait permettre de mieux analyser la performance des dépenses.

Il faut aussi considérer que l'action sociale interministérielle constitue un levier non négligeable pour renforcer l'attractivité de la fonction publique et mener une politique de ressources humaines proactive, notamment pour faciliter les affectations dans des zones géographiques moins attractives ou à des postes impliquant des conditions de travail plus difficiles, mais aussi pour prendre en compte les évolutions de la famille.

En outre, il me semble nécessaire de renforcer la prise en compte du développement durable dans le domaine de l'action sociale interministérielle. Il s'agira notamment d'améliorer le cahier des charges à destination des prestataires en charge des actions collectives. Cette ambition renvoie à la qualité environnementale des bâtiments qui hébergent les crèches ou des logements réservés mis à disposition des agents publics. Le cahier des charges devrait traiter non seulement du bâti, mais aussi du fonctionnement, des usages et de bonnes pratiques – choix des produits alimentaires, produits d'hygiène et d'entretien, gestion thermique, etc. – à l'intérieur de ces bâtiments, en y associant les professionnels, les usagers et les familles.

Par ailleurs, dans la perspective du projet de loi de finances (PLF) pour 2022, je porterai une attention particulière à deux autres sujets fondamentaux pour la pérennité et l'attractivité de la fonction publique. Dans la continuité de mon travail relatif à l'amélioration de la complémentaire santé des agents publics, je tiens à souligner les travaux engagés concernant la prévoyance des fonctionnaires. L'ordonnance du 18 février 2021 récemment publiée, qui impose à l'État de prendre en charge 50 % de la complémentaire santé de ses agents, ouvre aussi la possibilité aux employeurs publics de participer à des contrats de prévoyance couvrant les risques d'incapacité de travail, d'invalidité, d'inaptitude ou de décès. Ce sujet est particulièrement crucial pour les agents dont les rémunérations se situent en bas de l'échelle. L'ordonnance donne aussi un cadre aux employeurs territoriaux en créant une obligation de participation financière à la protection sociale complémentaire prévoyance, qui ne pourra pas être inférieure à un seuil de référence défini par décret. Des discussions sont désormais ouvertes entre le ministère et les organisations syndicales. Madame la ministre, vous êtes très engagée dans ce domaine et vous pourrez nous apporter des précisions utiles quant à l'importance des avancées obtenues.

Enfin, dans la suite des recommandations de verdissement de l'action collective interministérielle évoquée précédemment, je veux insister sur l'enjeu de la formation des agents de la fonction publique d'État au développement durable et à la transition écologique qu'il convient de renforcer. Il est essentiel que tous les fonctionnaires maîtrisent les compétences nécessaires au verdissement de la commande publique et à l'application du « budget vert », qui traverse l'ensemble des missions et actions des ministères, des opérateurs et des prestataires de l'État – et concerne donc l'ensemble des personnels de la fonction publique. En parallèle, il importe d'évaluer l'impact de ces formations sur l'efficience de l'action des agents de la fonction publique dans ces domaines.

Je pense que nous pourrons avancer sur ces sujets d'ici à l'examen du PLF pour 2022.

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Je souhaite profiter de l'exercice d'évaluation qui nous réunit aujourd'hui pour vous interroger à propos de plusieurs sujets touchant la fonction publique, en particulier au regard des réformes issues de la loi du 6 août 2019 dont j'ai eu l'honneur d'être la rapporteure.

L'un des aspects majeurs de cette loi est le développement des leviers managériaux pour renforcer l'efficacité et la réactivité de l'action publique, notamment par l'ouverture à l'extérieur au travers du recours aux contrats. Vous nous avez fourni, mercredi dernier en commission des lois, les chiffres de la part des contractuels dans l'encadrement supérieur : 40 sur 650 postes. Disposez-vous de chiffres plus complets ? A-t-on assisté, comme certains le craignaient, à une explosion du recours aux contrats ?

Toujours s'agissant des contractuels, j'avais porté dans le cadre de ce texte la création d'une prime de précarité dans la fonction publique, consacrée à l'article 23 de la loi et applicable aux CDD conclus à compter du 1er janvier dernier. Avez-vous des premiers retours ou des estimations actualisées quant au nombre de contrats concernées et aux montants annuels associés ?

L'article 34 de cette loi a transféré à la HATVP, la Haute autorité de transparence de la vie publique, l'examen des demandes de cumul d'activités pour création ou reprise d'entreprise et de départ dans le privé directement pour certains emplois, en recourant d'abord au référent déontologue pour le reste. Cette réforme s'applique depuis février 2020. Dix-huit mois plus tard, quels sont les retours concernant son application et son impact éventuel – puisque c'était craint – pour les mobilités des hauts fonctionnaires ?

La loi de 2019 prévoit également, à l'article 37, la publication sur internet des dix plus hautes rémunérations de chaque administration, des plus grandes collectivités et des hôpitaux, complétée par des données dans le jaune budgétaire annexé au PLF. Un guide méthodologique a été diffusé par la DGCL, la Direction générale des collectivités locales, pour assurer l'exhaustivité des données et leur bonne exploitation. Ces données recouvrent un enjeu de transparence, mais aussi de parité. Quelles sont les premières conclusions tirées de cette publication, d'un point de vue méthodologique comme des enseignements de fond ?

Toujours en matière de transparence et d'accès à l'information, l'article 55 prévoit la codification des dispositions relatives à la fonction publique, gage de lisibilité de la norme par et pour tous. Une commission supérieure de codification s'est réunie plusieurs fois depuis novembre dernier. L'habilitation ayant expiré début décembre 2020, où en sommes-nous ? À quelle date le code général de la fonction publique aboutira-t-il ?

Nous avons également mis un terme au régime dérogatoire de temps de travail antérieur à 2001 dans la fonction publique territoriale, mesure prévue par l'article 47 de la loi. Les collectivités disposaient d'une année à compter du renouvellement de leur assemblée délibérante pour définir les règles relatives au temps de travail de leurs agents, soit avant juillet 2021 pour le bloc communal et avant juillet 2022 pour les départements et les régions. S'agissant des communes, où en est l'application de cette mesure ? Quels sont les retours les réactions que vous pouvez recueillir ?

Je souhaite aussi vous interroger sur la suspension du jour de carence prévu par la loi du 23 mars 2020 et que doit prolonger jusqu'au 30 septembre prochain la loi relative à la gestion de la sortie de crise sanitaire. Disposez-vous d'éléments chiffrés et d'informations quant à l'impact de cette mesure, notamment d'un point de vue sanitaire ? Est-il envisagé de la prolonger au-delà du 30 septembre, par exemple jusqu'à la fin de l'année comme je l'avais proposé dans mon avis relatif au PLF 2021 ?

Ma dernière question s'inscrit dans le cadre de l'ambitieuse réforme de la haute fonction publique que vous portez, et concerne l'attractivité des concours et donc de la fonction publique en général. Quelles sont les tendances récentes en matière de candidatures aux concours publics ? Je sais que vous travaillez à renforcer cette activité avec le plan Talents du service public ou encore la campagne « Rejoins le service public » adressée aux jeunes. Pensez-vous pérenniser les allégements et adaptations des concours créés lors de la crise, conformément à l'une des recommandations de mon avis budgétaire ?

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Je poserai à mon tour quelques questions. La première concerne la direction des douanes. On a transféré, en 2019, le recouvrement d'un certain nombre de taxes douanières à la DGFIP – la taxe sur les boissons non alcooliques ou la TGAP. Quel constat faites-vous, monsieur le ministre, de ce transfert ? Se déroule-t-il bien ? Le rendement de ces taxes a-t-il varié depuis ?

Par ailleurs, la Cour des comptes avait remis en cause la pertinence du FAIRH. Recommandez-vous, vous aussi, sa suppression ? Ce fonds a-t-il une utilité ? La même question se pose concernant le FTAP. Certes, il monte en puissance. Mais est-ce bien utile ?

Enfin, s'agissant des règles d'utilisation de la dotation pour dépenses accidentelles et imprévisibles, la Cour des comptes recommande de majorer cette dotation pour réduire à due concurrence les gels de crédits. Quelles sont les intentions du Gouvernement en la matière pour le prochain PLF ?

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Amélie de Montchalin, ministre de la transformation et de la fonction publiques

Vous imaginez à quel point je suis heureuse d'être auditionnée par votre commission, qui m'est chère, et pour la première fois dans cette logique d'évaluation en tant que ministre de la transformation et de la fonction publiques ! Comme députée, j'ai beaucoup poussé pour que la mise en œuvre du Printemps de l'évaluation soit effective. Vous connaissez donc mon attachement à cet exercice. Je considère, plus largement, que le Gouvernement doit avoir cette culture de l'évaluation et du suivi des politiques publiques, pour assurer en permanence leur plus grande efficacité. Il s'agit donc d'un moment important, qui place au cœur des préoccupations l'efficience de l'action publique – objectif au cœur du ministère dont j'ai la charge.

Je remercie les rapporteurs du travail d'évaluation soutenu et précis qu'ils ont effectué et présenté. Cette démarche d'évaluation a permis de redonner au Parlement le pouvoir de s'assurer de l'effectivité des lois votées. C'est aussi l'esprit et le contenu de la création du baromètre des résultats de l'action publique, désormais consultable sur le site du Gouvernement par tous les citoyens et qui vient préciser, depuis janvier dernier, département par département, les résultats des trente-six réformes prioritaires. C'est un outil essentiel pour identifier en transparence les réussites comme les blocages d'application, et ainsi les lever. Cet outil de transparence et de pilotage complète les travaux que vous conduisez.

Je souhaite, pour commencer, vous présenter l'action de mon ministère, qui constitue en quelque sorte une maison commune des services publics, et la mission budgétaire qui doit permettre d'en assurer la lisibilité.

Mon ministère regroupe la direction interministérielle du numérique, la direction interministérielle de la transformation publique et la direction générale de l'administration et de la fonction publique – trois directions qui mettent au service des autres ministères leur expertise dans les domaines suivants : les ressources humaines, le numérique, la conduite de projets et, surtout, le suivi et la compréhension des attentes des usagers, qu'ils soient particuliers ou entreprises. Demain, la délégation interministérielle à l'encadrement supérieur de l'État et l'Institut national du service public viendront compléter cette mission au service de la transformation de notre haute fonction publique.

Concernant l'exécution budgétaire au service de la transformation publique, les crédits courants de mes directions sont répartis entre les programmes budgétaires des services du Premier ministre et du ministère de l'économie, des finances et de la relance, et les crédits d'intervention sont répartis entre les quatre programmes budgétaires qui figurent dans ma mission. Je travaille donc avec le ministre du budget à revoir, dans le cadre de la présentation du prochain PLF, cette architecture. En effet, celle-ci est complexe et nuit à la bonne intelligibilité de l'action du ministère, mais aussi à votre travail d'évaluation et de contrôle. En cela, monsieur le rapporteur, nous avons une vision convergente du sujet.

Vous l'avez dit, l'exécution des différents programmes a été marquée, en 2020, par la crise. Elle s'est également caractérisée par la capacité d'adaptation et d'innovation des agents publics dans l'application des politiques portées. Je tiens donc à saluer, comme vous l'avez fait, l'ensemble des agents publics grâce auxquels l'État a tenu et en sortira, j'en suis convaincue, renforcé après ces mois particulièrement éprouvants pour tous.

Si, lors du premier confinement de mars 2020, les administrations se sont concentrées sur les tâches les plus nécessaires à la continuité du pays, dès l'été 2020 nous avons instauré une organisation qui a permis de retrouver puis de conserver un fonctionnement le plus normal possible de nos services publics pendant les différentes phases de confinement, pour continuer à bien servir les Français. Il était essentiel que la transformation de l'action publique se poursuive, en parallèle.

Le FTAP constitue un vrai levier d'accompagnement de la transformation publique. Il est là pour armer les administrations publiques pour mener à bien leurs projets de transformation. L'objectif est d'investir aujourd'hui pour demain, avec une logique d'efficacité de la dépense publique puisque les projets sélectionnés permettront de dégager, à moyen terme, plus de 700 millions d'économies – c'est-à-dire plus que le montant investi. Ce fonds finance des projets très variés : des projets de mutualisation dans les services déconcentrés, comme un projet de données relatives à la transition écologique dans la région Grand-Est qui permet aux acteurs de travailler ensemble de manière plus efficace et rapide ; des innovations structurantes, comme le portail du recouvrement que nous suivons avec le ministre des comptes publics, et qui permettra un recouvrement fiscal et social unifié, facilité pour les indépendants, les TPE et les PME. C'est un très gros projet, dont vous imaginez aisément les gains en matière d'efficience et de prospérité collective. Grâce à un rattrapage important au deuxième trimestre, dû à la forte mobilisation des équipes, l'exécution de l'année 2020 est en hausse par rapport à l'année 2019. Vous en avez rappelé les contraintes, mais il y a là un progrès.

Pour sa part, le programme Fonds d'accompagnement interministériel aux ressources humaines, le FAIRH, a été fortement impacté par la crise, puisque seulement 7 millions de crédits ont été mobilisés. Dans le cadre du budget 2022, je réfléchis à une évolution de son positionnement, notamment pour l'adapter au contexte post-covid et aux différentes priorités politiques qui ont été posées dans le cadre de la déclaration de politique générale du Premier ministre. Là encore, s'agissant de la nécessité de faire évoluer ce programme, nos constats se rejoignent.

Le programme 352, Innovation et transformation numériques, auparavant dénommés FAST, avait été créé par voie d'amendement en 2018, par Laurent Saint-Martin lorsqu'il était rapporteur spécial de cette mission. L'objectif est de financer l'émergence et le développement de produits numériques innovants pour permettre à l'État d'accélérer sa transformation numérique. Là aussi, la montée en charge progressive de ce programme témoigne de l'accélération de la transformation numérique de nos services publics. Le Plan de relance nous permet d'accélérer, avec une enveloppe de 500 millions d'euros dédiée à l'accompagnement de davantage de projets. Ainsi, 5 000 euros seront accordés aux collectivités locales voulant déployer FranceConnect afin de faciliter les démarches de leurs concitoyens, 5 000 euros également pour faciliter le pré-remplissage des démarches locales avec des API, donc une connexion directe, entre la base de données du revenu fiscal de référence de la DGFIP et le calcul des tarifs des cantines des familles. C'est du numérique. C'est concret. Et cela facilite la vie de nos concitoyens et le travail des agents publics.

Le programme 148 a été consommé à 96 %. Il est plus difficile, dans une telle période, de consommer les fonds relatifs à l'installation des personnels. Mais nous avons bonifié, de manière exceptionnelle, les chèques-vacances. C'est un point important après une période éprouvante pour les agents. Ce programme est aussi le support du programme « Talents du service public », qui permettra de préparer 1 700 jeunes, dans tout le territoire et quel que soit leur milieu social, aux concours de la haute fonction publique dès la rentrée prochaine.

Concernant l'action sociale interministérielle et les actions décidées en faveur des agents ou de leurs familles, nous sommes très attentifs à la qualité du service mais aussi à celle de la gestion et des coûts induits. Nous avons réussi à faire baisser le coût moyen annuel de réservation des places en crèche depuis plusieurs années. Cet outil permet d'accélérer également le réarmement de l'État territorial, notamment pour faciliter l'installation des agents dans les zones qui manquent parfois d'attractivité. C'est une priorité pour moi, ainsi que pour le Premier ministre.

S'agissant de l'exécution et du suivi de la loi de 2019, en particulier la fin des régimes dérogatoires du temps de travail, le calendrier prévoit que la mesure des 1 607 heures soit pleinement appliquée au 1er janvier 2022. La plupart des collectivités concernées ont achevé ce travail ou sont sur le point de le faire. Je salue l'implication des employeurs territoriaux, avec qui nous échangeons de manière rapprochée concernant ce déploiement. C'est parfois compliqué. Parfois, la discussion et le dialogue social amènent des demandes de délibérations avec un délai plus long. Des ajustements peuvent être trouvés dans le cadre d'un dialogue avec le préfet de département, mais la date d'application restera bien le 1er janvier 2022.

Concernant la codification du droit de la fonction publique, les travaux sont très avancés. Mes services ont lancé plusieurs groupes de travail avec les organisations syndicales pour que ce chantier puisse aboutir dans les délais, c'est-à-dire avant la fin de l'année.

Pour conclure, mon rôle est de m'assurer que la fonction publique – et, à travers elle, les hommes et les femmes qui la composent – dispose bien de tous les moyens nécessaires pour remplir le plus efficacement possible ses missions au service de l'intérêt général. À cet égard, les travaux du Printemps de l'évaluation constituent un vrai levier d'amélioration pour porter la dynamique de transformation que nous souhaitons tous, mais aussi défendre l'action de nos agents publics.

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Olivier Dussopt, ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la relance, chargé des comptes publics

À mon tour, je souhaite souligner l'apport majeur de l'initiative de 2018 en matière d'évaluation – une initiative qui nous permet de nous retrouver. Cette démarche engagée depuis plus de trois ans dure et s'installe, même, ce dont nous nous réjouissons. C'est précisément dans la durée que ce type de travaux produit ses effets et, exercice après exercice, les échanges relatifs à l'évaluation des politiques publiques deviennent à chaque fois plus pertinents.

Le bilan 2020 de la mission Gestion des finances publiques et des ressources humaines intéresse l'évaluation des politiques publiques à plus d'un titre. D'abord, la mission est en premier lieu exemplaire pour sa contribution à la maîtrise de la dépense publique puisqu'en 2020, la DGFIP et DGDDI ont respectivement supprimé 1 860 et 168 emplois. Les entités rattachées au programme Conduite et pilotage des politiques économiques et financières, le programme 218 piloté par le secrétariat général de Bercy, ont contribué à hauteur de 60 ETP. Ces économies ont été réalisées grâce à des réformes d'ampleur et des actions de modernisation ou de dématérialisation des processus, comme le prélèvement à la source.

En application d'un contrat signé au début de l'année 2020, plus de 49 millions d'euros de fongibilité asymétrique ont permis d'alimenter des dépenses d'investissement visant à consolider les systèmes d'information de la DGFIP, comme préconisé il y a deux ans dans un rapport de la Cour des comptes effectué à la demande du Parlement. Ce contrat d'objectifs et de moyens présente l'avantage de fixer une trajectoire, tant stratégique que budgétaire, autour de laquelle les acteurs peuvent inscrire leur action dans un horizon qui dépasse le court terme et se donner le temps des réformes. À mon sens, cette pratique devrait se développer davantage. Nous l'encourageons dans tous les services de l'État.

Cette mission Gestion des finances publiques et des ressources humaines présente aussi, pour notre analyse, l'intérêt d'illustrer la façon dont les dépenses publiques ont pu être affectées par la crise sanitaire, laquelle a entraîné le décalage de certaines opérations immobilières ou informatiques, qui n'a pas été totalement compensé par les dépenses supplémentaires supportées par les programmes de la mission – je pense aux achats d'ordinateurs portables ou aux équipements de protection des agents. À la DGFIP, le niveau des dépenses informatiques dans le programme que nous examinons est supérieur à la prévision initiale, à hauteur de 24 millions d'euros supplémentaires en AE et de 15 millions d'euros supplémentaires en CP. Il s'établit ainsi à 280,8 millions d'euros en AE et à 240,3 millions d'euros en CP. Cela s'explique par l'engagement de travaux structurants pour la transformation numérique de la DGFIP, mais aussi par la commande d'ordinateurs portables pour développer le télétravail. Et ce, pour un montant total de 30 millions d'euros en AE et de 15 millions d'euros en CP. Au début du premier confinement, seulement 20 % des effectifs bénéficiaient d'un équipement adapté. Cet effort budgétaire a permis de rattraper une grande partie du retard. Il a aussi permis à l'administration de tenir et de garantir la continuité du service public.

Par ailleurs, la crise a eu un impact aussi impact majeur pour les crédits non répartis. Si le programme 551 relatif aux rémunérations publiques n'a pas été touché, le programme 552 relatif aux dépenses accidentelles et imprévisibles a fait l'objet d'une ouverture de crédits de 1,6 milliard d'euros en CP lors de la LFR2. Cela a permis de pourvoir à des besoins urgents nés de la situation sanitaire, à hauteur de 100 millions d'euros pour le fonds de solidarité pour les entreprises, de 284 millions d'euros pour l'achat de masques par le ministère de l'économie et des finances, de 140 millions d'euros pour le secteur culturel et de 107 millions d'euros pour celui du sport.

Pour répondre à l'interpellation du président Éric Woerth concernant ces dépenses accidentelles et imprévisibles, nous n'envisageons pas à ce stade de donner suite à la recommandation de la Cour des comptes, qui préconise d'augmenter cette enveloppe initiale à due concurrence pour supprimer les crédits gelés par précaution. Nous souhaitons conserver les deux modalités. S'agissant du gel, comme instrument de pilotage, rappelons qu'entre le début du quinquennat et aujourd'hui, le taux moyen de mise en réserve est passé de 8 à 3 %. Cela participe à la fois à la sincérité de l'autorisation parlementaire en matière budgétaire et à une plus grande autonomie des gestionnaires de crédits, auxquels nous déléguons plus de crédits en début d'année pour leur laisser les moyens du pilotage. Nous pouvons conjuguer cet outil du gel avec la création d'une réserve pour les dépenses accidentelles et imprévisibles. Nous avons vu, à l'occasion de la crise, que cet outil pouvait être utile et que les deux objets n'étaient pas incompatibles entre eux.

Je salue le choix d'Alexandre Holroyd d'aborder en particulier la thématique de la Direction des impôts des non-résidents, dans la mesure où celle-ci a fait l'objet de nombreux débats. Elle est née en 2017, de la scission de la Direction des résidents à l'étranger et des Services généraux, avec pour objectif d'intégralement dédier aux contribuables de l'extérieur une vitrine internationale. Il s'agissait avant tout d'améliorer les services rendus, avec un interlocuteur unique, d'arriver à une vision d'ensemble des intérêts et des enjeux fiscaux de chaque contribuable, et de veiller au respect de leurs obligations. La compétence singulière qui est le cœur de métier de la DINR repose sur la maîtrise, par ses équipes, de la combinaison du droit interne et des conventions fiscales internationales. Le traitement des non-résidents nécessite donc un savoir technique, mais aussi un savoir-faire long et difficile à appréhender. Le périmètre d'intervention de la Direction a évolué avec l'intégration de nouvelles missions comme la gestion des entreprises étrangères non établies et ayant des obligations au regard du prélèvement à la source, la taxe sur la valeur vénale des immeubles détenus en France depuis janvier 2021, tandis que d'autres en sortent, comme le MOSS à partir de juillet 2021.

Puisque nous parlons d'évaluation, je souhaite souligner les points suivants concernant la DINR. Depuis 2017, on note une amélioration globale de ses résultats pour ce qui concerne le contrôle des particuliers, l'accueil et le contentieux. La proportion de télédéclarations – 185 827 en 2020 – augmente très régulièrement tous les ans et l'offre de services en ligne semble particulièrement adaptée à l'éloignement géographique des non-résidents. Il faut aussi être transparent quant au fait que la DINR fait face à plusieurs difficultés dans l'accomplissement de ses missions : la complexité de la norme et des processus, notamment pour les particuliers ; les différences en matière déclarative – les mesures que vous avez rappelées concernant les revenus monde s'appliquent pour les contribuables non-résidents qui souhaitent bénéficier d'un taux plus avantageux que le taux moyen tel qu'il est proposé –, une croissance des populations gérer, notamment pour ce qui concerne les entreprises étrangères ; une insuffisante automatisation des particularismes des non-résidents, notamment pour la retenue à la source avec son caractère libératoire. Enfin, l'environnement international est parfois difficile en matière de recouvrement, ce qui contribue aux difficultés de cette Direction.

L'effectif de la DINR, vous l'avez rappelé, s'élevait à 422 ETP et 435 emplois réels au 1er octobre 2020. Globalement, le rattrapage effectué au cours des dix-huit derniers mois a permis de mettre la Direction au niveau souhaitable pour faire face aux enjeux évoqués. Mais tout cela relève d'un chantier de longue haleine pour lequel nous restons mobilisés. Je sais pouvoir compter sur votre acuité pour nous accompagner dans ce domaine.

J'en viens aux transferts de recouvrement de taxes de la DGDDI vers la DGFIP. Chaque opération de transfert donne lieu à une discussion entre les deux Directions quant au périmètre et au nombre d'ETP concernés. Nous travaillons à la question des admissions en non-valeur. Contrairement à ce que j'ai pu lire parfois, il n'y aura pas d'admission en non-valeur ou d'abandon de créances massifs. En revanche, nous travaillons à une harmonisation des modes de recouvrement forcé, puisque ceux de la Douane et ceux des services fiscaux ne sont pas les mêmes.

En matière de performance, il est encore tôt pour dresser un bilan définitif. S'agissant des taxes et des impôts qui ont été transférés de la Douane vers la DGFIP, les premiers éléments montrent que le taux de recouvrement est le même et que l'efficacité est au rendez-vous. Concernant la première échéance déclarative de la TVA pétrole de janvier 2021, par exemple, le taux de recouvrement est de 99,2 %, pour un montant de 880 millions d'euros. Cela correspond à l'objectif que nous avions fixé et démontre qu'il n'a pas de perte en ligne. Les travaux relatifs à ces transferts de recouvrement se poursuivent. Ils doivent être accompagnés d'un travail de dialogue social avec l'ensemble des parties prenantes. Nous avons mené, à titre expérimental, le même type de travaux pour un autre flux, notamment au port du Havre. Les missions assurées par la DGCCRF le seront désormais par la DGDDI, avec un accord entre ces directions concernant les ETP à transférer.

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Après dix-huit mois de recul, je salue la réforme de la fonction publique qui a été engagée par le ministre Olivier Dussopt et qui se déploie avec succès. J'insiste aussi sur la formidable mobilisation des agents, de Bercy en particulier, pour faire face à la crise dans des temps records. La rapidité avec laquelle le chômage partiel, les fonds solidarité et le PGE, le prêt garanti par l'État, ont été déployés apporte un démenti très puissant à ceux, nombreux, qui n'ont eu de cesse de critiquer un État centralisé qui serait impuissant.

Monsieur le ministre, je ne suis pas sûr que vous ayez répondu à la question relative aux moyens instaurés pour améliorer le recrutement et l'attractivité des emplois proposés par la DGFIP et les Douanes.

Celles-ci ont dû faire face non seulement à la crise, mais aussi au Brexit. Comment jugez-vous la coopération transmanche et les moyens dédiés pour s'adapter ?

S'agissant du FAIRH, nous manquons probablement de recul et le fonds a été impacté par la crise. Toutefois, avez-vous vu une mobilité facilitée entre les trois pans de la fonction publique ? C'est particulièrement important dans les territoires ruraux et d'outre-mer.Comment expliquez-vous que la programmation trop volontariste des crédits de la mission Action et transformation publiques ? Est-ce un sujet de périmètre ?

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En PLR 2020, les ressources humaines de l'État représentent 133 milliards d'euros. C'est une somme considérable, qu'il importe d'évoquer car elle témoigne de la capacité de l'État à déployer ses politiques publiques.

Avez-vous dressé le bilan fonctionnel 2020 des nouvelles interventions de la DDFIP et de la DGFIP dans le plan d'urgence, au-delà de la rapidité d'exécution ? Les DDFIP conserveront-elles le même fonctionnement ?

Disposez-vous d'éléments concernant la réforme des DDFIP, des « trésoreries », comme nous les appelons dans les territoires ? À certains endroits, la réforme n'a pas abouti. Elle a pourtant commencé il y a deux ans.

Dans cette mission, une action avait été envisagée concernant le réseau des débitants de tabac et des buralistes. Vous n'en avez pas parlé, alors qu'il s'agissait d'un fonds de soutien important et que de nouvelles missions étaient confiées aux buralistes. Disposez-vous d'éléments à nous fournir à ce sujet, important pour les territoires et qui fait partie de la transformation publique ?

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Enfin, puisque vous êtes en charge de la mission Gestion des finances publiques et des ressources humaines, avez-vous été les ministres de la déconcentration en 2020, ou cela sera-t-il le cas en 2021 ? Je n'aborderai qu'un thème, celui des effectifs de la fonction publique, notamment de la DGFIP. À la lumière de la consommation des crédits de la mission en 2020, on ne peut que constater à regret, une fois encore, la diminution des moyens humains alloués aux administrations publiques essentielles pour les Français et les Françaises, particulièrement au sein de la DGFIP. Les dépenses de personnel exécutées de la mission sont inférieures de 118 millions à la prévision, notamment parce que les suppressions d'emplois ont été plus importantes que prévu. En effet, avec la suppression de 2 050 ETP hors opérateurs, le schéma d'emploi réalisé est supérieur à celui programmé de 397 emplois, dont 360 pour le seul programme 156, celui de la DGFIP. Cela s'explique notamment par le fait que les concours organisés ont attiré un nombre moins important de candidats. Pour l'exercice 2019, nous avions déjà pu constater un écart dans le programme 156, résultant notamment de difficultés de recrutement. Mais en 2020, ce phénomène de désaffection a perduré tout en étant aggravé par le contexte sanitaire. Donc non seulement la baisse des effectifs au sein de la DGFIP se poursuit, mais la situation s'aggrave du fait d'un manque d'attractivité de ces emplois, accélérant la dégradation de l'exercice de ses missions essentielles au fonctionnement de l'État ainsi que les conditions de travail des personnels. Comment faire pour que demain, ces métiers soient de nouveau attractifs ?

D'ailleurs, pour la première fois depuis 2019 et le plan de fermeture de trésoreries, une grève nationale a été organisée par l'intersyndicale au début du mois de mai, afin de dénoncer le fait que les effectifs soient passés sous la barre symbolique des 100 000. Depuis 2002, 40 000 postes ont été supprimés au sein du Trésor public – et 25 000 depuis 2008. Au moment où servir l'intérêt général prend tout son sens pour les fonctionnaires de notre pays, en cette période d'avalanche de crises économique, sanitaire et sociale, il conviendrait d'arrêter enfin cette hémorragie de destructions d'emplois, et plus généralement au sein de la fonction publique.

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La DGFIP, qui emploie environ 100 000 agents, a supprimé près de 35 000 postes en quinze ans et ces coupes continuent, puisque 1 800 postes supplémentaires devraient être supprimés. En Haute-Corse, les effectifs ont connu une baisse de 19 % en une décennie et d'ici peu, il ne pourrait plus que deux trésoreries et deux centres d'impôts. Cette situation rend difficile le travail des agents publics, qui ne peuvent exercer leurs missions qu'avec beaucoup de difficulté. J'ai déjà eu, avec d'autres, l'occasion d'alerter le Gouvernement à ce sujet et je veux redire ici l'importance de ces services publics de proximité, surtout à destination des citoyens les plus isolés et les plus fragiles, et des personnes âgées. On sait aussi que cette logique de rationalisation du réseau ne fait qu'accroître les disparités territoriales. Ne serait-il pas temps de réévaluer cette politique de réduction des effectifs, en prenant en compte ses effets concrets pour la qualité du service public ?

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La réforme de l'État et la rationalisation du champ de l'action publique sont à l'œuvre depuis de nombreuses années. On peut légitimement penser que l'objectif de tout cela, au-delà d'accroître l'efficacité de l'action publique en matière d'accès aux services publics, est bien de faire des économies les plus immédiates possible. La présence du ministre du budget l'atteste.

En attendant, ce sont la qualité et l'accès des services publics qui en pâtissent. La numérisation qui s'opère est, bien entendu, positive. Mais quid des autres canaux d'accès aux services publics ? Nous avions pointé avec Jean-Paul Mattei, dans notre rapport relatif aux services publics dans les territoires ruraux, les problèmes d'accès et l'importance pour le déploiement des maisons France Service du maillage territorial et d'une gestion décentralisée. Où en est ce déploiement, madame la ministre ?

Se pose aussi, plus généralement, la question du fonctionnement de ces maisons France Service ? Au même titre que d'autres services publics ou de Pôle Emploi, elles fonctionnent souvent grâce aux services civiques qui sont devenus une main-d'œuvre bon marché essentielle. Ce fonctionnement s'inscrit dans un processus plus large, dans lequel la place des contractuels et de l'externalisation s'accroît. Monsieur le ministre, quand allons-nous stopper cette hérésie des plafonds d'ETP, qui conduit à des économies au rabot et dégrade le fonctionnement des services publics ?

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Amélie de Montchalin, ministre

Concernant la déconcentration, le réarmement des territoires et l'accès aux services publics, notre Gouvernement mène une action résolue, très soutenue par les services du grand Bercy à de nombreux égards, pour renforcer l'État de proximité. Nous n'allons pas refaire la chronique, mais durant les années 2007-2012, la révision générale des politiques publiques, la RGPP, a très fortement vidé les préfectures et les sous-préfectures, et les années 2012-2017 n'ont pas inversé la tendance. Aussi avons-nous, avec le Premier ministre, pris la décision d'inverser résolument la pratique qui consiste à faire porter les efforts des différents ministères en matière d'effectifs sur les services déconcentrés. Après cette crise sanitaire, et plus largement au regard de notre capacité à déployer les politiques publiques « dans le dernier kilomètre », il nous semble que cette pratique est une erreur.

C'est pourquoi le Premier ministre a annoncé qu'en 2021, 2 500 emplois seraient redéployés dans les départements. Nous avons également renforcé – c'était très nouveau – les compétences des cadres dirigeants des équipes préfectorales, avec notamment le déploiement des sous-préfets à la relance. Nous déployons des experts de haut niveau et des chefs de projets dans un certain nombre de départements, notamment pour faciliter l'application de politiques publiques plus complexes ou qui nécessitent le redéploiement de personnels et d'agents publics très formés et experts dans l'ensemble de notre territoire. Les préfets de vos départements ont été sollicités à ce titre. Plus largement, nous revoyons toute notre culture de la mobilité, à la fois dans l'attractivité géographique et dans un bassin de vie donné, entre les versants de la fonction publique. La circulaire du Premier ministre du 10 mars dernier précise qu'à compter de septembre 2021, nous créerons une « garantie mobilité ». C'est une réelle innovation, qui facilitera le passage d'un ministère à un autre au sein d'un service déconcentré ou entre les versants. Nous nous assurerons qu'il n'y a pas de perte de pouvoir d'achat telle, que cette mobilité, appelée de nos vœux, n'est pas rationnelle et que les agents n'ont pas intérêt à changer de ministère ou de versant. Cette garantie à la mobilité sera une mesure très forte, au sein du périmètre de l'État. Nous voulons encourager la création de dynamiques d'emploi par bassins de vie, plutôt que la nécessité de déménager pour faire carrière alors que des évolutions sont possibles là où l'on vit déjà.

S'agissant des maisons France Service, le site du Gouvernement que je viens de consulter montre que l'Allier comptait dix de ces structures au mois d'avril, contre sept au mois de janvier 2020, pour une cible de vingt-quatre. Au niveau national, nous comptons 1 304 maisons labellisées sur les 2 500 que nous visons à l'horizon de 2022. L'objectif est d'avoir une maison France Service à moins de vingt minutes du lieu de vie de chaque Français. Il y en aura donc au moins une dans chaque canton. Nous allons même un peu au-delà. Plusieurs modèles existent : ces maisons peuvent être hébergées dans les intercommunalités, dans des mairies ou dans des associations, mais elles peuvent aussi être itinérantes. Ce programme a été largement déployé à l'initiative de députés qui avaient fait remonter le besoin d'un lieu unique intégrant non seulement des services publics qui parfois sont partis, mais aussi des services publics qui n'y ont jamais été présents. Ainsi, les 2 500 maisons France Service sont aussi 2 500 agences Pôle Emploi dans lesquelles il est possible d'activer un accompagnement de retour au travail. Ce sont aussi 2 500 caisses primaires d'assurance maladie ou 2 500 caisses d'allocations familiales, avec la possibilité soit d'être accompagné pour effectuer des démarches, soit d'avoir des rendez-vous dans ces lieux, en cohérence avec le plan de redéploiement des trésoreries.

S'agissant des fonctions publiques dans ces espaces, la formation des personnels est très importante. Nous y travaillons avec la ministre Jacqueline Gourault. Pour être labellisée France Service, une maison doit compter deux personnes à temps complet, formées par le CNFPT, le Centre national de la fonction publique territoriale, mais aussi grâce à un complément financier de 30 000 euros que l'État investit pour maintenir ce réseau. Nous avons l'ambition d'humaniser, de rapprocher et d'accompagner. J'ajoute ici un point spécifique concernant le rôle des secrétaires de mairie, en lien avec ces maisons France Service dans les territoires. La première maison France Service de notre pays est la secrétaire de mairie de la commune rurale. Nous déployons, avec Joël Giraud, un programme avec Pôle Emploi et l'ensemble des services pour repérer et former ces 30 000 emplois qualifiés dans chacune des communes de France. C'est un métier à faire connaître, à revaloriser et à rendre attractif pour tenir compte de l'évolution de la pyramide démographique.

Concernant l'enjeu du FTAP, la dynamique de consommation et le décalage entre le moment où les projets sont validés et celui où les fonds sont décaissés, je considère que ce n'est pas une question de périmètre, mais davantage une culture de la transformation de l'investissement et de la gestion de projets qu'il nous faut accompagner. Cette logique, consistant à considérer qu'il faut dépasser l'évolution incrémentale pour refondre profondément des systèmes d'information numériques ou d'organisation, est très nouvelle. Nous déployons, par exemple, un projet de formation à la gestion de projets numériques d'un certain nombre d'agents publics qui ont de grandes ambitions, mais pas nécessairement cette culture et cette formation.

S'agissant du FAIRH, je citerai quelques exemples de projets qui ont été financés en 2020 pour illustrer la façon dont les fonds ont été décaissés. Nous avons aidé la transformation des pôles Entreprises, Emploi et Économie des DIRECCTE au niveau déconcentré. Le FAIRH a accompagné la création du nouveau réseau de proximité des finances publiques, ainsi que l'Institut français du cheval et de l'équitation, Météo France, VNF et d'autres opérateurs dans leur transformation. Il a aussi aidé la mutualisation des services en charge des achats, de l'innovation et la logistique du ministère de l'intérieur, ou encore préfiguré les secrétariats généraux communs dans les différents services départementaux. Ce programme a donc permis d'accompagner un certain nombre de transformations. Il faut désormais pouvoir l'ajuster en fonction des priorités politiques, notamment post-covid et au vu de ce que je viens de dire concernant la déconcentration.

S'agissant de l'attractivité des concours, l'année 2020 a été perturbée. On a aménagé les épreuves et apporté des modifications à ce qui se faisait habituellement. Néanmoins, les indicateurs sont assez positifs. Le concours externe de l'École nationale d'administration (ENA) a compté 604 présents, contre une moyenne de 622 dans la période 2015-2019, et les concours des Instituts régionaux d'administration (IRA) 4 600 présents contre 2 243. Certes, l'instauration de deux sessions annuelles de concours et la rénovation des épreuves amènent à des changements. Mais cela montre qu'on a retrouvé de l'attractivité pour des fonctions essentielles, ainsi que pour la sélectivité et l'excellence. J'y vois un point positif.

J'en viens à la HATVP. En 2020, celle-ci a mené 300 contrôles, dont elle a noté qu'ils n'ont en général pas empêché les évolutions professionnelles mais pu donner lieu à des réserves. Cette responsabilisation plus forte des employeurs en matière de respect des règles déontologiques nécessite une meilleure appropriation des nouvelles règles, notamment en lien avec les référents déontologues. De l'information sera diffusée en la matière.

Enfin, je participe tous les quinze jours à des rencontres avec les organisations syndicales au sujet de l'adaptation du jour de carence. Nous menons donc un dialogue social soutenu. La loi prévoit un maintien jusqu'à fin septembre. Initialement, nous avions plutôt envisagé fin octobre. Je vous remercie pour votre investissement en général, et en particulier concernant l'accompagnement des agents publics dans cette crise sanitaire. Je vous fournirai dès que possible les différents éléments chiffrés que vous m'avez demandés concernant le suivi de l'application de la loi qu'avait portée Olivier Dussopt en 2019 et la manière dont nous avons facilité l'isolement anticipé de ceux et celles qui auraient pu présenter des symptômes et potentiellement contaminer leurs collègues. C'était aussi un enjeu de protection des agents eux‑mêmes.

La semaine dernière, 78 % des agents des administrations centrales, plus de 58 % des agents de l'État au global et 50 % de ceux des services déconcentrés télétravaillaient. C'est le fruit de l'investissement en équipements mais aussi en logiciels. S'agissant de l'adaptation des outils de travail, notamment numériques, des agents publics, nous avons fait en 2020 ce que nous avions prévu de faire en cinq ans. C'est un investissement financier. C'est aussi un investissement de formation, d'accompagnement et de nouvelle organisation du travail. À ce titre, je conduis une négociation ouverte avec les organisations syndicales pour qu'un nouvel accord-cadre autour du télétravail se finalise dans les prochaines semaines.

Pour ce qui est de la protection sociale complémentaire, je signerai jeudi un accord de méthode ouvrant la négociation d'application des principes posés à la fois en matière de prévoyance et en matière de complémentaire santé, afin que l'ordonnance qui a été prise aboutisse aux objectifs formulés.

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Olivier Dussopt, ministre délégué

Monsieur Dufrègne, si ma seule présence dans un débat suffisait à générer des économies, je serais partout ! Ce n'est malheureusement pas le cas, ni pour ma présence ni pour son efficacité en la matière.

Je répondrai aux questions relatives aux difficultés de recrutement de la DGFIP et de la DGDDI en invoquant notre plan de recrutement, notre volonté de diversifier les profils, l'ouverture de classes préparatoires intégrées auxquelles la DGFIP et les Douanes peuvent participer, ainsi qu'une présence accrue dans les différentes filières de recrutement. L'une des explications à la sur-réalisation du schéma de suppressions d'emplois tient aux difficultés de recrutement et de remplacement dans un certain nombre de postes.

Concernant le Brexit, nous avons recruté 600 douaniers supplémentaires. Cette opération doit être soulignée, car elle vient en plus d'une autorisation de recrutement de plus de 300 postes au sein du ministère de l'agriculture, pour les contrôles phytosanitaires. La coopération transmanche s'est améliorée. Un groupe de travail bilatéral existe. J'ai eu l'occasion de rencontrer mon homologue britannique, pour faire en sorte que la fluidité soit la plus importante possible. Mais nous savons qu'il reste des difficultés. Nous estimons même que le trafic de marchandises ne reviendra pas nécessairement au niveau qu'il connaissait avant le Brexit.

Les autres questions ont toutes concerné la réorganisation de la DGFIP. Concernant le nouveau réseau de proximité, 60 % de la population, 62 % des communes, la moitié des départements et 526 établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre sont concernées par la charte signée entre la DGFIP et les élus locaux. La moitié des opérations prévues ont été effectuées. Les deux années qui viennent permettront de poursuivre les opérations restantes à un rythme moins important.

Nous avons mis à profit ce nouveau réseau de proximité pour programmer la mise à disposition des collectivités de 1 500 conseillers aux décideurs locaux, notre objectif étant d'en avoir partout, au plus près des élus. Ces postes sont uniquement consacrés à cette fonction de conseil. Ce dispositif s'articule avec de nouvelles missions données aux débitants de tabac, dans le cadre d'un partenariat, pour permettre aux citoyens de payer leurs créances publiques auprès d'un buraliste agréé. Nous en dénombrons 10 000, dans 5 200 communes. Cela participe aussi à un service supplémentaire.

Enfin, le nouveau réseau nous permettra d'installer des permanences durables à des heures et à des jours fixés par la convention. Cela amènera la DGFIP à accueillir du public, quel que soit le lieu d'accueil, dans 3 000 communes contre 2 000 dans le réseau précédent. C'est en cela que nous considérons que ce réseau participe à un rapprochement et à une proximité accrue. Nous l'accompagnons d'un mouvement de relocalisation. Ainsi, soixante-six communes accueilleront environ 2 500 agents – 700 à 800 agents seront installés dans une partie de ces nouvelles communes au 1er septembre prochain. La totalité des opérations de relocalisation devrait être actée d'ici à 2023.

S'agissant des plafonds d'ETP, nous conserverons cette méthode de gestion en 2022. Toutefois, nous avons la volonté d'avancer en la matière et d'accorder plus de souplesse à nos gestionnaires, y compris en matière de gestion de la masse salariale, même s'il ne s'agit pas encore d'une position totalement arrêtée.

Enfin, concernant le schéma d'emplois de l'État au sens le plus large du terme, nous avons fait en sorte, dans le PLF 2021, qu'il soit stable – avec des ministères qui perdent des emplois et d'autres qui en gagnent. L'objectif que nous poursuivons pour 2022 vise à retrouver cette stabilité dans le PLF 2022.

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Je remercie la ministre de la transformation et de la fonction publiques, qui va nous quitter et nous poursuivons nos travaux avec Olivier Dussopt.

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En 2020, la crise sanitaire a eu un impact important sur les recettes et les dépenses du CAS, compte d'affectation spéciale, Gestion du patrimoine immobilier de l'État – d'autant plus important que cette crise est survenue après une année 2019 particulièrement exceptionnelle pour ce CAS.

Les recettes se sont élevées à 261,5 millions d'euros, soit presque un tiers de moins que ce qui était prévu en loi de finances initiale. Les produits de cession représentent la majorité de ces recettes, à hauteur de 60 %, et le reste est constitué des redevances et des loyers pour l'essentiel. Cette différence entre le réalisé et le prévisionnel résulte principalement des faveurs accordées aux débiteurs en période de crise sanitaire. Je pense notamment aux reports et aux annulations de loyers.

La différence majeure dans l'exécution de 2020 par rapport à celle de 2019 se trouve dans la chute des recettes enregistrées par les ventes des biens immobiliers. Si elles sont considérablement inférieures, de l'ordre de 470 millions d'euros de moins, c'est surtout en raison du caractère exceptionnel de la vente de trois biens en 2019 : l'îlot du boulevard Saint-Germain, l'hôtel de Seignelay et du site de l'ENS Paris-Saclay. Si l'on fait abstraction de ce niveau de ventes exceptionnel en 2019, les recettes du CAS sont finalement assez stables. Toutefois, je ne peux que renouveler mes inquiétudes quant à la raréfaction des biens attractifs pour les années à venir. Ce phénomène risque de compromettre la pérennité du CAS si aucun effort n'est fait pour diversifier ses recettes et mieux valoriser ses biens comme je le préconise depuis plusieurs années.

La crise a également eu un effet sur les dépenses du CAS, lesquelles correspondent aux opérations structurantes – acquisitions, constructions, restructurations – et aux charges d'entretien dites du propriétaire – maintenance, réhabilitation, mise en conformité, remise en état, contrôle réglementaire, audit et diagnostic. Les opérations structurantes représentent les deux tiers des dépenses en ordre de grandeur, les dépenses du propriétaire en constituant le tiers restant. En 2020, le CAS a connu un fort ralentissement de la consommation des AE pour les opérations structurantes, de 11 % par rapport à la prévision de la loi de finances initiale et de près de 50 % par rapport à l'exécution 2019.Deux causes en sont à l'origine. D'une part, l'impact de la crise sanitaire a interrompu ou ralenti les projets et donc les investissements, comme dans le secteur privé. D'autre part, le caractère exceptionnel de l'année 2019 rend ce contraste saisissant par comparaison. En effet, le nouveau site de la Direction générale de la sécurité intérieure, la DGSI, à Saint-Ouen, a été acquis cette année-là. Logiquement, on observe le phénomène inverse pour la consommation des CP, qui sont en augmentation en 2020. Cela résulte du décalage entre l'engagement de la dépense, sa liquidation et son paiement dans des délais naturellement longs dans le secteur de l'immobilier. J'en veux pour preuve le solde combiné des restes à payer et des engagements affectés mais non consommés, qui atteint près de 70 % de la trésorerie disponible du CAS.

L'année 2020 a vu la poursuite des projets déjà engagés, comme le nouveau site de la DGSI, le CHU du Grand Paris-Nord ou encore l'Office national d'études et de recherches aérospatiales.

Pour ce qui est du tiers des dépenses restantes, celles d'entretien à la charge du propriétaire, on observe une stabilité des actions de maintenance et de contrôle technique. Ce n'est pas le cas, en revanche, des dépenses de gros entretien, de réhabilitation et de remise en état qui accusent une certaine baisse par rapport à la prévision et à l'exécution 2019. Là encore, la crise sanitaire a engendré un certain nombre de retards dans la réalisation des travaux, ce qui, je l'espère, ne sera que passager compte tenu de l'importance de maintenir le parc en bon état.

Je souhaite aussi dire un mot de l'avenir du CAS. Celui-ci ne joue malheureusement qu'un rôle mineur dans l'ensemble de la politique immobilière de l'État. En 2020, il représentait à peine 9 % de la totalité des AE dédiées aux dépenses de propriétaire pour les bâtiments de l'État. La politique immobilière de ce dernier s'appuie, en effet, principalement sur les programmes budgétaires des différents ministères – un éclatement que l'on peut regretter pour l'efficacité de son pilotage. Comme le lancement de toute nouvelle opération est conditionné par l'encaissement de recettes équivalentes, il est nécessaire de diversifier davantage les ressources du CAS, donc de mieux valoriser les biens immobiliers inutilisés en sortant de l'impasse du « tout cession » comme je le recommande depuis plusieurs années. Quelle place comptez-vous conférer au CAS dans les années à venir ?

J'en viens au thème d'évaluation auquel j'ai consacré mes travaux de rapporteur cette année : la sélection des projets pour la rénovation énergétique des bâtiments publics, financés par le Plan de relance. Pour les raisons évoquées à l'instant, ce vaste plan d'amélioration des performances thermiques concerne en premier chef le CAS, du fait de ses effets pour la valorisation future du patrimoine immobilier de l'État. J'ai voulu savoir quels avaient été les critères de sélection des dossiers, pour étudier la pertinence de ces investissements dans un horizon d'une cinquantaine d'années. Il importe de s'abstraire du stress de la crise pour véritablement penser la portée à long terme des investissements ainsi financés. Il ressort de mes travaux que ce plan de rénovation constitue un effort bienvenu, mais reste insuffisant au regard des enjeux de long terme. En effet, les projets ont été sélectionnés en fonction de la rapidité et de la facilité de réalisation, afin de soutenir l'économie – notamment le tissu local des TPE-PME et de l'artisanat.

Deux appels à projets ont été lancés en septembre 2020 dans le cadre du Plan de relance, l'un pour les bâtiments de l'État et l'autre pour ceux des universités. Trois mois plus tard, 4 214 projets ont été retenus pour un montant d'environ 2,7 milliards d'euros. Je ne peux que noter le temps très court retenu pour le calendrier d'un plan aussi ambitieux : de septembre à décembre 2020, plus de 6 000 candidatures ont été examinées pour aboutir à ces 4 214 projets. Les dossiers portés par l'enseignement supérieur et la recherche représentent le quart du total en volume et près de la moitié en valeur. Hors universités, le ministère de l'intérieur et celui des armées regroupent la moitié des projets, ce qui est logique compte tenu de leur emprise immobilière. Plus de la moitié des projets ont un coût estimé à moins de 100 000 euros. Seule une centaine concerne des opérations de rénovation globale ou de réhabilitation lourde. Il apparaît donc que l'essentiel des projets relève d'actions à gain rapide : renouvellement des éclairages, amélioration de l'isolation, changement d'équipement de chauffage, de climatisation et de ventilation. Le « relampage », par exemple, représente à lui seul 945 projets et 425 millions d'euros. Je ne peux que saluer cet effort sans précédent de l'amélioration globale des performances énergétiques des bâtiments de l'État, qui devenait urgent. Je constate, néanmoins, que la priorité a clairement été donnée à une multitude de projets rapidement réalisables plutôt qu'à des opérations d'ampleur et de long terme. Cette priorisation apparaît clairement dans les critères de sélection. Si les dossiers ont été bien notés en fonction de la performance environnementale attendue, ils l'ont aussi été en fonction de la capacité des projets à la rendre rapidement effective, entre 2021 et 2023. L'objectif a aussi et surtout visé à relancer l'économie, notamment le tissu entrepreneurial local. On peut considérer que le Plan de relance est venu financer des opérations en réserve ou, si vous me permettez l'expression, « sorties du carton » – opérations qui auraient pu être prises en charge par les programmes ministériels dont ils relevaient, sous réserve de créer les financements nécessaires.

Je m'interroge aussi concernant la capacité des entreprises à répondre rapidement à la demande adressée après des mois de crise sanitaire et de dépendance aux aides publiques. Chacun sait qu'une demande trop élevée par rapport à l'offre disponible peut conduire soit à alourdir la facture, soit à des retards de livraison. Je recommande une vigilance quant au risque de dérapage budgétaire ou aux problèmes de délais. Quelle est l'ambition du Gouvernement en matière de performance énergétique des bâtiments publics pour les cinquante prochaines années ? Comment en pensez-vous l'articulation avec les nouvelles normes introduites par la loi Climat et résilience ?

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Je présenterai d'abord les principaux éléments pour l'exécution 2020 relatifs aux régimes de retraite financés en tout ou partie par l'État. Je ferai ensuite part des conclusions du travail d'évaluation que j'ai mené s'agissant des pensions de réversion dans les régimes spéciaux de retraite et le régime de retraite de la fonction publique d'État.

Les dépenses de la mission Régimes sociaux et de retraite atteignent 6,24 milliards d'euros en CP, légèrement plus qu'en prévision. Cet écart traduit principalement les conséquences de la crise sanitaire. Cette sur-exécution est le fait des régimes de retraite du transport terrestre, notamment celui de la SNCF : les dépenses allouées à ce régime dépassent de 1,2 % la prévision, d'environ 40 millions d'euros. Plusieurs raisons la justifient. Le recours au chômage partiel par les régimes de la SNCF et de la RATP, exonéré de cotisations sociales, a diminué les ressources des caisses. Pour la SNCF, le manque à gagner atteint presque 84 millions d'euros. Par conséquent, leur besoin de financement par l'État a augmenté. Les effets du chômage partiel sur les ressources de la RATP n'ont toutefois pas de conséquences sur la subvention de l'État à ce régime. En effet, la programmation initiale dépassait en réalité les besoins, rendant indolores les 18,8 millions d'euros de moindres recettes tirées des cotisations sociales.

Le régime de retraite des marins a, quant à lui, pleinement respecté l'enveloppe allouée en loi de finances initiale. Les moindres recettes ont été compensées par des moindres versements de pensions.

Enfin, les besoins des régimes de retraite fermés et en extinction rapide sont inférieurs à la prévision et en baisse, en raison de la pente démographique naturelle du régime.

Je renouvelle, cette année encore, deux recommandations concernant la maquette de la mission Régimes sociaux et de retraite. La mission ne retrace pas l'intégralité des subventions de l'État à des régimes de retraite. Les régimes de la Banque de France ou de l'Opéra de Paris, par exemple n'y figurent pas, ce qui altère la complétude de l'autorisation parlementaire. Une évolution de la maquette budgétaire, également recommandée par la Cour des comptes, est-elle à l'étude ?

Le congé de fin d'activité du transport routier, financé par la mission, n'est pas un régime de retraite mais un dispositif de soutien sectoriel. Son financement, très imprévisible, ne devrait donc pas être porté par la mission.

Les recettes et les dépenses du CAS Pensions, qui retrace principalement les flux liés au financement des retraites de la fonction publique d'État, s'avèrent très proches de la prévision. Les pensions versées par le CAS atteignent ainsi 59,55 milliards d'euros. Son solde est positif, à hauteur de 1,3 milliard d'euros, bien qu'un peu moins important qu'anticipé en loi de finances initiale. Il convient de noter que les soldes du CAS décroissent depuis 2017, traduisant l'évolution démographique du régime.

J'en viens à l'évaluation des pensions de réversion des régimes spéciaux et du régime de retraite de la fonction publique d'État.

La pension de réversion est la part de la pension du conjoint décédé reversée au conjoint survivant. Ce dispositif a été créé dans un contexte traditionnel, dans lequel l'épouse ne disposait pas de revenus et les trajectoires professionnelles et conjugales étaient très linéaires. En 2018, 4,4 millions de personnes étaient titulaires d'une pension de réversion, dont 88 % de femmes. Pour un quart des bénéficiaires de réversion, il s'agit de l'unique pension de retraite. Les pensions de réversion représentent 37 milliards d'euros, soit 11 % des prestations de retraite. Il s'agit donc d'un sujet majeur, qui concerne un grand nombre de nos concitoyens.

J'ai structuré mon analyse autour des différents objectifs de la réversion, que j'identifie au nombre de quatre. Le premier objectif vise à maintenir le niveau de vie du conjoint survivant à un niveau proportionnel à celui qu'il était avant le décès de son conjoint. Directement corrélé à cet objectif, un autre but de la réversion est de garantir que le total des droits à la retraite accumulés par le conjoint décédé sera transmis au conjoint survivant, dans une approche patrimoniale. Un troisième objectif, à visée plus distributive, consiste à assurer un revenu au survivant dépendant financièrement de son conjoint, pour le préserver d'une entrée dans la pauvreté.

La réversion remplit également des objectifs indirects, dont celui de compenser les inégalités de carrière entre les hommes et les femmes.

Les différents régimes de réversion répondent à des logiques différentes et reposent sur l'application de règles diverses et complexes. Il n'existe pas d'objectif prioritaire des systèmes de réversion en France. Ceux-ci fonctionnent tous selon des règles différentes, et cumulent parfois même plusieurs logiques. Les règles portant sur les conséquences du remariage et sur le bénéfice de la pension de réversion sont particulièrement complexes et variables selon les régimes, entraînant une forte dépendance des assurés à leur propre parcours conjugal et à celui de leur ex-conjoint. La grande diversité des règles entre leur régime et leur complexité entraîne plusieurs conséquences. Le système de réversion est peu lisible pour les assurés, qui sont également peu informés de leurs droits. Nous connaissons tous un couple convaincu à tort que son PACS permettra de bénéficier d'une pension de réversion.

Par ailleurs, les règles s'avèrent parfois peu protectrices. J'ai ainsi été interpellé par une norme, appliquée dans plusieurs régimes, qui consiste à suspendre ou à annuler le bénéfice de la réversion en cas de PACS et de vie en concubinage du conjoint survivant, quand bien même ces deux modes de vie n'étaient pas suffisants pour lui donner droit à une réversion du conjoint décédé.

Enfin, la diversité des règles entraîne une forte iniquité entre des personnes pourtant placées dans une même condition objective, celle du veuvage. Ces différences de traitement sont d'autant moins compréhensibles que les régimes étudiés sont tous financés en tout ou partie par la puissance publique.

Il existe un seul point commun à tous les régimes de réversion. Pour que le conjoint survivant bénéficie d'une pension de réversion, il doit avoir été marié ou être marié avec l'assuré au moment de son décès. Cette condition, universelle à tous les systèmes de réversion, s'éloigne pourtant progressivement de la réalité des Français. Quelques données permettent d'éclairer ce constat. En 2017, l'INSEE comptabilisait 194 000 PACS et 235 000 mariages en France métropolitaine, soit plus de quatre PACS pour cinq mariages. En 2011, 4 % des personnes résidant en couple en France métropolitaine étaient pacsées, contre 7 % en 2016, soit une hausse de trois points. Or pour la même période, la part des personnes mariées a diminué de trois points. L'union libre se développe également. Dans les années 1960, 3 % des personnes vivant en couple n'étaient pas mariées, tandis qu'en 2011, 24 % des couples cohabitant n'étaient pas mariés. Le PACS et la vie en concubinage représentent un mode de vie en pleine croissance. Nous ne disposons pas encore de suffisamment de recul pour savoir quelle part de ces couples convertira au fil du temps son PACS en mariage, mais nous devons nous rendre à l'évidence : les réversions, financées par les cotisations de tous les actifs, concerneront une part de moins en moins importante de la population. Ce constat doit nous amener à réfléchir pour l'avenir. À cet égard, ce travail d'évaluation de l'efficacité d'une politique publique est totalement indépendant des réflexions ayant pu être menées par le passé concernant les réformes des retraites.

À partir de mes conclusions, je propose quelques pistes d'améliorations, dont l'ouverture de la réversion aux couples pacsés, sous condition de durée de vie commune.

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En 2020, les remboursements et dégrèvements ont atteint un niveau inégalé. Avec 151 milliards d'euros, ils représentent l'équivalent de 37 % du montant des recettes fiscales brutes de l'État. Ce niveau n'a malheureusement rien d'inattendu : il est l'aboutissement d'une progression forte et continue des crédits de cette mission depuis plus de dix ans. Ils ont doublé depuis 2006, alors que le PIB et les recettes fiscales brutes n'ont augmenté que d'un peu plus de 20 % dans le même temps. Ce sont 11 milliards de plus qu'en 2019 et 10 de plus qu'en loi de finances initiale.

Cette hausse a plusieurs causes : la conclusion de plusieurs contentieux fiscaux aux dépens de l'État, la suppression progressive de la taxe d'habitation et la mise en place du prélèvement à la source. La crise sanitaire a aussi joué un rôle important sur le niveau des dépenses. Pensons aux facilités offertes aux entreprises pour obtenir plus rapidement le remboursement de leur crédit de TVA, mais aussi à la mobilisation rapide des créances de report en arrière des déficits pour l'impôt sur les sociétés (IS) ou encore à l'accélération des remboursements partiels de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE). On pourrait aussi y ajouter le report du paiement du premier acompte de l'impôt sur les sociétés voire son remboursement pour les entreprises qui l'avaient déjà payé.

Si ces mesures sont difficiles à chiffrer, comme l'a souligné la Cour des comptes, on constate que cette mission aura permis de soutenir la trésorerie des entreprises en pleine crise sanitaire, ce qui est très bien. Il est néanmoins difficile d'accuser la pandémie d'un tel niveau. Comme je l'ai dit, ces mesures en faveur des entreprises ont surtout consisté à accélérer des restitutions auxquelles elles avaient droit et à concentrer sur un seul exercice budgétaire des dépenses qui auraient normalement dû s'étendre au-delà.

C'est pourquoi je voudrais revenir sur la question des contentieux fiscaux. L'année 2020 a connu plusieurs décaissements particulièrement importants, à la suite de décisions de justice qui ont donné raison à des contribuables contre l'État. Certains de ces conflits ne sont pas nouveaux : les contentieux de série comme l'affaire des organismes de placement collectif en valeurs mobilières (OPCVM) ou l'affaire Précompte. Le contentieux OPCVM a coûté 1,6 milliard d'euros ; le Précompte 800 millions d'euros. Plusieurs contentieux exceptionnels ont coûté près de 1,2 milliard d'euros d'intérêts moratoires. Malheureusement, ces chiffres ne sont pas exceptionnels. En 2019, les contentieux individuels sur l'IS représentaient déjà 2 milliards d'euros ; les contentieux de série 731 millions. Souvenons-nous également de l'affaire des 3 % de dividende, qui a coûté 5 milliards d'euros en 2017, 4 en 2018, pour toucher à sa fin en 2019 avec un coût de 300 millions d'euros.

Bien sûr, je ne remets pas en cause ces décisions de justice, mais je veux appeler votre attention sur les risques que font peser les contentieux sur les finances publiques et, partant, sur l'argent du contribuable. Songeons un instant aux politiques publiques qui pourraient être financées avec de telles sommes, et cela dans un contexte dégradé par le déficit et la dette. La prévention devrait être renforcée afin que ces insécurités juridiques ne se reproduisent pas, d'autant qu'elles trouvent souvent leur source dans une incompatibilité de nos mesures fiscales avec le droit de l'Union européenne. Aussi, monsieur le ministre, quelles mesures pourraient être prises pour limiter les contentieux voire pour mieux estimer leur coût et faire en sorte que les intérêts moratoires soient les moins élevés possible dans les années à venir ?

J'en viens à mon point sur le crédit d'impôt pour l'emploi d'un salarié à domicile. Cette niche fiscale a coûté 5 milliards d'euros à l'État et a profité à un peu plus de 4 millions de bénéficiaires. Une partie de cette somme seulement s'impute sur les crédits dont je suis la rapporteure, notamment lorsque le crédit est supérieur à l'impôt dû et qu'il donne droit à restitution. Ainsi, en 2020, ce sont 900 millions d'euros qui ont été inscrits sur la mission Remboursements et dégrèvements, soit près de 18 % de cette dépense fiscale.

L'idée de mes travaux était d'obtenir une analyse plus précise de la nature des activités qui ouvrent droit à ce crédit d'impôt, leur liste étant assez longue. Les services à la personne, qui ouvrent droit à un crédit d'impôt de 50 % du salaire de l'employé à domicile ou du prix du prestataire qui réalise l'activité, sont listés par le code du travail. Ils recouvrent la garde d'enfant, l'assistance aux personnes âgées et aux personnes handicapées, ainsi que les tâches ménagères et familiales. Outre les activités que je viens d'évoquer, les services à la personne comprennent aussi l'assistance informatique, la surveillance de sa résidence principale ou de sa résidence secondaire ou encore les petits travaux de jardinage ou de bricolage.

Le but affiché du crédit d'impôt est de permettre le développement du secteur de l'emploi à domicile et des services à la personne. Outre la création d'emplois, il vise aussi à lutter contre le travail non déclaré. Dans ce but, il a été étendu en 2017, sous la précédente législature, à l'ensemble des foyers, alors qu'il ne concernait pas, initialement, les inactifs et les retraités. Le travail dissimulé est un phénomène d'ampleur dans le secteur de l'emploi à domicile. Toutefois, il n'en existe aucune mesure assez fiable. Les professionnels du secteur que nous avons auditionnés avancent le taux de 50 % de l'emploi à domicile réalisé illégalement, tandis que les enquêtes officielles reposant sur des sondages tournent autour de 20 %.

À ce titre, je note plusieurs points : l'extension du crédit d'impôt et les facilités offertes aux particuliers employeurs ou aux clients des entreprises prestataires semblent avoir stabilisé la dépense fiscale autour de 5 milliards d'euros et de 4 millions de bénéficiaires depuis 2018. Si l'on en croit les études de la direction de l'animation de la recherche, des études et des statistiques (DARES) et de l'INSEE, le recours à l'emploi à domicile a tendance à stagner autour de 850 millions d'heures rémunérées chaque année, et le nombre d'intervenants autour de 1,3 million. Sur un temps plus long, on observe que les heures rémunérées diminuent légèrement chaque année, passant de 931 millions à 846 millions en dix ans. De même, le nombre d'intervenants s'érode doucement, passant de 1,4 à 1,3 million. Il est donc difficile de savoir si le crédit d'impôt crée réellement des emplois dans ce secteur, s'il empêche le basculement dans le travail dissimulé ou bien s'il n'est pas tout simplement un effet d'aubaine.

Si les statistiques permettent de connaître la part de chaque activité dans le volume horaire global ou le nombre d'intervenants, il ne m'a pas été possible, monsieur le ministre, d'obtenir de l'administration fiscale une évaluation du crédit d'impôt par activité. Il est d'ailleurs impossible de réaliser le calcul à partir de ces données, puisqu'il impliquerait de connaître le coût de chacune d'entre elles et leur mode de tarification, dans un domaine où interviennent aussi bien des entreprises que des professionnels du secteur médico-social et où le reste à payer varie d'un foyer à l'autre – je pense notamment aux personnes qui bénéficient de l'allocation personnalisée d'autonomie (APA) ou de la prestation de compensation du handicap (PCH). En revanche, j'ai pu constater que ce crédit d'impôt bénéficie aux foyers les plus aisés. Le tiers des bénéficiaires font partie du dernier décile du revenu fiscal de référence et bénéficient de la moitié du crédit d'impôt.

Dans ce contexte, je ne peux que regretter que l'administration ne soit pas en mesure de réaliser une étude exhaustive des effets de cette dépense fiscale sur l'économie, le travail non déclaré et les finances publiques. Cela permettrait de réexaminer l'ensemble du dispositif et d'entamer une réflexion sur son assiette, son taux et ses plafonnements. Il ne peut avoir pour seule finalité le soutien à un secteur économique, mais doit être recentré sur les besoins des publics les plus fragiles. Cette réflexion doit être menée dans le cadre plus large du débat sur la prise en charge de la perte d'autonomie. En conséquence, monsieur le ministre, pourriez-vous mener cette étude approfondie sur le crédit d'impôt pour l'emploi à domicile et en communiquer les conclusions au Parlement ?

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Monsieur le ministre, avez-vous une idée du potentiel de ventes immobilières de l'État, alors que les chiffres ralentissent et que les ventes exceptionnelles s'amenuisent voire disparaissent ?

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Olivier Dussopt, ministre délégué

Je vous remercie pour vos trois rapports spéciaux, dont le Gouvernement partage l'essentiel, même si, ici ou là, nous pouvons avoir quelques désaccords, notamment sur les ciblages ou sur l'utilité du crédit d'impôt service à la personne.

S'agissant de la gestion du patrimoine immobilier de l'État, l'exécution budgétaire du compte d'affectation spéciale est marquée par la crise sanitaire. En 2020, la ressource totale du programme 723 s'élevait à un peu plus de 613 millions d'euros en autorisations d'engagement et à 1,13 milliard d'euros en crédits de paiement. La consommation des crédits s'est établie à 392,5 millions d'euros en autorisations d'engagement et à 522 millions en crédits de paiement, laissant un solde par rapport à la ressource disponible d'un peu plus de 220 millions d'euros en autorisations de paiement et 607 millions d'euros en crédits de paiement, soit une consommation des crédits de 64 % en AE et de 46 % en CP. Je ne reviens pas sur les raisons de ce décalage, dont je partage le diagnostic avec le rapporteur.

Consécutivement, le programme Dépenses immobilières a fait l'objet en 2020 d'une annulation de crédits de paiement de 32 millions d'euros, lors de la quatrième loi de finances rectificative, dans le cadre du schéma de fin de gestion. La crise sanitaire a pesé sur l'exécution 2020 des projets immobiliers. Si nos services administratifs sont restés mobilisés pour les faire avancer, les opérations immobilières et les chantiers de travaux engagés ont été massivement interrompus au début de l'année 2020, lors du premier confinement, et l'ensemble des acteurs ont dû s'adapter aux nouveaux modes de travail. Il s'agit pour l'essentiel d'un décalage dans les calendriers de mise en œuvre des projets et des travaux, et non pas d'une réduction de la dépense pluriannuelle en année glissante.

Outre l'effet de la crise, l'activité immobilière est naturellement marquée par la mise en œuvre du Plan de relance. M. Mattei m'a interrogé sur les critères retenus dans le cadre de l'appel à projets pour la rénovation énergétique des bâtiments d'État et de l'enseignement supérieur, soit 4 214 projets sur un peu plus de 6 000 déposés. Comme vous l'avez dit, monsieur le rapporteur, les projets ont été analysés à partir de deux critères principaux de poids équivalent figurant dans les deux avis d'appel à projets publiés le 7 septembre 2020. Le premier concernait la capacité des porteurs de projets à les mettre en œuvre dans un délai compatible avec celui du Plan de relance. L'analyse a porté sur la pertinence et la maturité du projet, son calendrier, la capacité à engager l'opération, en particulier à notifier les marchés publics en 2021 et à livrer les opérations avant 2023, tout en appréciant la robustesse de l'équipe constituée pour conduire l'opération.

Le deuxième critère concernait la performance environnementale. Il a permis d'évaluer la performance globale du projet grâce à l'analyse de son gain en consommation énergétique par rapport à une situation de référence, ainsi que son gain environnemental. La pertinence de l'investissement a été examinée en particulier par le biais des indicateurs d'efficience énergétique. Les délais alloués pour l'instruction des projets ne nous ont pas permis de demander des modélisations économiques sur cinquante ans. L'analyse des dossiers de candidature permet néanmoins d'estimer la réduction de la consommation énergétique, à la fin des travaux, à plus de 400 millions de kilowattheures.

Vous avez également souligné la nécessité de maîtriser les risques liés à l'exécution des projets, impératif que nous partageons. Le principal risque identifié au début de cette année est un risque calendaire lié à des retards pris sur les phases d'études, de diagnostics et de programmation ou à un manque d'anticipation des assistances nécessaires à la passation des marchés. Ce constat a conduit à des demandes d'assistance technique parfois tardives, pour finaliser des programmes ou réorienter des projets en maîtrise d'ouvrage publique classique, dont les délais ne tiendraient plus sur 2021, vers des marchés globaux de conception-réalisation et de performance. Cela nous permettra d'envisager une signature des marchés de travaux avant la fin 2021. Je surveille tous les quinze jours l'état des projets, y compris pour lister ceux qui pourraient faire l'objet d'un risque majeur.

Concernant les coûts, dès le lancement des appels à projets, il a été demandé à tous les porteurs de projets de prévoir une enveloppe d'aléas et de révision de prix dans leur budget. Les délais très contraints ont conduit à établir des chiffrages d'opérations sur la base de ratios de coûts assez larges, y compris en matière d'aléas. La définition plus poussée des opérations au début de cette année impose aux porteurs de projets de les préciser au sein d'une enveloppe maximale octroyée sur le Plan de relance. A contrario, ne sont pas exclues des évolutions à la baisse pour certains projets.

Enfin, vous nous interrogez sur la répartition entre les actions dites à gain rapide, présentant un fort retour sur investissement, et les opérations de plus grande envergure. Cent douze projets concernent une rénovation globale ou une réhabilitation lourde pour environ 600 millions d'euros. Les autres projets comportent pour la plupart des actions à gain rapide, avec des chantiers de relamping, de changements de chaudière ou d'isolation rapide, et des travaux de gros entretien et de réparations. Ainsi, 1 450 projets mentionnent des travaux de rénovation ou de remplacement des équipements de chauffage, de ventilation et de climatisation, pour 844 millions d'euros. Par ailleurs, 945 projets mentionnent des travaux de relamping pour un montant de 424 millions d'euros.

Comme vous l'avez souligné, parmi les lauréats, il y a 2 800 projets de moins de 100 000 euros. Vous avez relevé un écart entre les montants de projets attribués et la moyenne des dossiers initialement déposés. Il résulte directement de l'objectif premier du Plan de relance, qui est de relancer l'économie, de soutenir les artisans, les TPE et les PME, et de favoriser la création d'emplois. Nous avons privilégié la rapidité de mise en œuvre : les 2 800 projets inférieurs à 100 000 euros ont été favorisés dans le classement des projets lauréats, d'autant plus qu'ils s'inscrivent sous le seuil des marchés publics, en application de la loi d'accélération et de simplification de l'action publique (ASAP). Pour ce qui concerne l'avenir du compte d'affectation spéciale, c'est un sujet sur lequel nous travaillons. Nous devons explorer deux pistes : les nouveaux modes de valorisation, y compris le recours à des baux emphytéotiques ou à des valorisations particulières, ce qui nous permettra de compenser la baisse du potentiel de vente, que je ne sais chiffrer, monsieur le président.

Concernant la mission Régimes sociaux et de retraite et les programmes 195, 741, 742 et 743, l'exécution budgétaire 2020 n'appelle pas de point d'attention particulier. Le programme 195 finance quatre régimes spéciaux de retraite – mines, SEITA, caisse de retraite des régies ferroviaires d'outre-mer et de l'ORTF. Il porte les subventions qui équilibrent financièrement cet ensemble de régimes spéciaux, dont la caractéristique est d'être fermés. Les dépenses de ce programme se sont élevées à 1,2 milliard d'euros. La capacité de financement résiduelle du programme en fin de gestion de 3,8 milliards d'euros n'a pas été mobilisée pour combler d'autres besoins éventuels de financement de la mission. Les crédits ont été annulés par la LFR du 30 novembre 2020 et l'exécution 2020 est proche de la LFI.

La dépense du CAS Pensions s'élève à 59,549 milliards d'euros, soit 64 millions d'euros de moins que la prévision de la LFI, avec un écart de 0,1 %. Cette sous-exécution relative de la dépense provient du programme 741 pour 92 millions d'euros et du programme 742 pour 9 millions d'euros. En revanche, les dépenses du programme 743 ont été supérieures de 37 millions d'euros, soit 2,3 %, et couvertes en grande partie par des ouvertures de crédits en LFR dans les programmes supports du programme 743. Les recettes du CAS Pensions se sont élevées à 60,8 milliards d'euros, soit un montant inférieur à la LFI de 216 millions. Cet écart résulte pour 247 millions d'euros du programme 741, du fait d'assiettes de cotisations moins élevées que prévu. Les recettes du programme 742 sont inférieures aux prévisions de 6,5 millions d'euros, quand celles du programme 743 sont supérieures de 37 millions d'euros.

Vous avez étudié plus particulièrement les pensions de réversion dans les régimes spéciaux et les régimes de la fonction publique d'État. Elles représentent 50 % de la pension du fonctionnaire, du magistrat ou du militaire décédé, sans condition de ressources ni d'âge, dans l'objectif de garantir le maintien du niveau de vie antérieur. Elles représentent 9,3 % des pensions civiles et militaires de retraite et 25,1 % des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre. Au 31 décembre 2020, les femmes représentent plus de 80 % des bénéficiaires des pensions de réversion civiles pour un montant mensuel moyen de 993 euros. Le montant moyen perçu par les hommes s'élève, quant à lui, à 879 euros. Pour les pensions de réversion militaires, elles sont versées à 99,3 % à des femmes pour un montant moyen de 794 euros et de 673 euros pour les hommes. Concernant le niveau de pauvreté des bénéficiaires des pensions de réversion, les organismes versant des pensions de retraite et le service de retraites de l'État ne disposent pas de l'accès aux informations, notamment la composition du ménage, les revenus du patrimoine, les transferts ou les autres prestations sociales et impôts directs, ce qui nous permettrait pourtant de calculer le revenu disponible des ménages auxquels appartiennent les pensionnés et d'établir leur niveau de vie.

Deux types de dispositifs contribuent toutefois à réduire les inégalités, l'allocation de solidarité aux personnes âgées et les minima de pension. Nous devons travailler pour améliorer la connaissance statistique, mesurer la précarité, mais aussi le niveau de vie décent.

Concernant l'avenir des pensions de réversion, il m'est difficile de donner une réponse dans cette enceinte. Vous avez précisé qu'il n'était pas lié au débat sur la réforme des retraites ; cependant, nous avons tous en tête qu'il a été proposé de modifier les nouvelles pensions de réversion. Nous verrons cela lors du débat, en lien avec les éléments de votre rapport.

Je termine avec la mission Remboursements et dégrèvements. Ainsi que l'a souligné Christine Pires Beaune, l'exécution budgétaire montre une hausse des dépenses de 5,7 %. Elle est marquée par une augmentation sensible des restitutions d'impôt sur le revenu, à hauteur de 11,5 milliards d'euros – 0,6 milliard en 2019 –, qui s'explique par la mise en place du prélèvement à la source. Les remboursements et restitutions liés à la mécanique de l'impôt ont ainsi augmenté d'environ 10,4 milliards entre 2019 et 2020.

Les remboursements et restitutions liés à la gestion des produits de l'État ont augmenté de 5,7 milliards du fait, notamment, de la très forte dépense liée aux contentieux de série. Vous avez rappelé que ces contentieux constituent un risque budgétaire. Avant tout, nous devons améliorer la qualité des provisions, qui sont soumises à un processus de certification par la Cour des comptes depuis 2007 – celle-ci n'a émis aucune réserve. Il est difficile et incertain de prévenir les contentieux fiscaux, conditionnés par nature à une décision de justice et dépendant du calendrier des procédures juridictionnelles. Vous avez cité plusieurs contentieux, je n'y reviens pas. Lors de chaque PLF, et chaque fois que l'opportunité se présente, nous essayons de « déminer » les contentieux potentiels – cela fut le cas avec la retenue à la source, à la suite de la jurisprudence Sofina.

L'exécution du programme 201 Remboursements et dégrèvements d'impôts locaux est en hausse de 21,4 %, du fait de la suppression de la taxe d'habitation sur la résidence principale, pour 80 % des foyers. Je vous remercie d'avoir souligné que ce programme a permis de soutenir la trésorerie des entreprises pendant la crise ; c'est dans ce but que nous avons accéléré les remboursements.

Nous essaierons d'apporter plus de réponses à vos questions concernant la nature des activités concernées par le crédit d'impôt service à la personne (CISAP). Je rappelle qu'il facilite la vie quotidienne de 4 millions de familles et qu'il constitue un soutien économique à un secteur qui enregistre 20 milliards d'euros de chiffre d'affaires et compte 1,3 million de salariés. L'État consent un investissement public de près de 5 milliards, en forte croissance ces dernières années – le coût du dispositif s'établissait à 2 milliards en 2016. Cette augmentation s'explique par la transformation, en 2018, de la réduction d'impôt en crédit d'impôt, laquelle a permis d'étendre le dispositif aux foyers non imposables.

Nous cherchons à sanctuariser et à clarifier les règles applicables, notamment lorsque certaines activités ont dû être exercées à distance durant les périodes de confinement. Nous tirons aussi les conséquences de la jurisprudence du Conseil d'État en nous assurant que le champ d'application du CISAP n'est pas modifié – nous avons pu en discuter à différentes occasions.

Nous nous attaquons à un chantier d'ampleur, la contemporanéisation du CISAP. Au 1er janvier 2022, nous proposerons aux particuliers employeurs qui ont recours au CESU et au CESU+, ainsi qu'aux parents employeurs ayant un compte Pajemploi de bénéficier d'un crédit d'impôt contemporanéisé et mensualisé. Cela permettra de réduire la facture nette acquittée par ces ménages. En avril 2022, nous étendrons ce dispositif aux particuliers employeurs qui passent par des mandataires ou des opérateurs. En 2023, ce sera le tour des particuliers employeurs bénéficiaires de l'allocation personnalisée d'autonomie (APA) et de la prestation de compensation du handicap (PCH) : nous travaillons avec l'ADF et l'ensemble des départements pour articuler notre dispositif avec leurs systèmes d'instruction des dossiers et de paiement.

En 2022, une partie des particuliers employeurs bénéficieront simultanément du bénéfice du crédit d'impôt au titre de l'exercice passée et du crédit d'impôt contemporanéisé. Cela représente un effort important pour l'État mais nous considérons que la contemporanéisation est de nature à faciliter le recours aux services à la personne et à lutter contre le travail clandestin. Le ticket d'entrée sera moindre puisque les particuliers employeurs n'auront pas à faire d'avance de trésorerie. Aujourd'hui, l'acompte est versé un an plus tard et la régularisation n'intervient qu'au bout de dix-huit mois. Les départements du Nord et de Paris expérimentent le dispositif, les panels s'élargissent. Dans la loi de finances pour 2021, nous avons prévu d'introduire des dispositions spécifiques dans la déclaration de revenus, destinées aux foyers concernés par l'expérimentation.

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Permettez-moi de saluer la qualité des exposés de nos collègues. Monsieur le ministre, la crise sanitaire n'a-t-elle pas eu d'autres effets sur le patrimoine immobilier de l'État que de retarder le lancement ou la réalisation d'opérations financées par le CAS ? Quels seront les effets à moyen terme sur le marché immobilier professionnel, compte tenu notamment des tensions sur les matières premières ?

Concernant les retraites, je veux saluer le travail de notre collègue, très impliqué sur le dossier des retraites agricoles. Il est vrai que, même en dehors de la réforme des retraites, nous devons porter une attention particulière à la question des pensions de réversion, particulièrement inégales en fonction des régimes.

Je me réjouis que le prélèvement à la source ait permis d'adapter l'impôt à la vie quotidienne des Français. La contemporanéisation du CISAP est un outil pour lutter contre le travail au noir et permettra de réduire les dépenses des foyers : l'acompte a déjà permis à certains d'éviter les trous de trésorerie.

Dans sa note d'analyse de l'exécution budgétaire pour 2020, la Cour des comptes précise que les recettes ont pâti d'une hausse significative du coût des contentieux fiscaux, mais que les dépenses sont provisionnées et que celui-ci devrait désormais moins peser sur les finances de l'État. Êtes-vous en phase avec cette analyse ?

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Même si le CAS Gestion du patrimoine immobilier de l'État ne représente que 9 % du volume, il faudra trouver, dans les années à venir, une solution pour une vraie gestion. Quel est le lien entre le CAS et la Conférence nationale de l'immobilier public (CNIP) ? Bien que parlementaire, j'avoue l'ignorer. Pouvez-vous nous donner quelques éléments sur ce point ?

Le document annexe au PLFR indique qu'une partie du parc immobilier de l'État est mise à disposition gratuitement et que, dans le même temps, les services de l'État occupent, à titre gratuit, des immeubles qui ne sont pas propriété de l'État. Il faudrait sans doute rationaliser les choses dans ce domaine. Disposez-vous d'une analyse territoire par territoire ?

S'agissant du CAS Pensions, le rapport renferme un histogramme très parlant, qui laisse entrevoir une explosion dans les prochaines années : travaillez-vous sur cette évolution très rapide du solde ?

Enfin, je dis chaque année la même chose et je ne ferai pas d'exception aujourd'hui : les crédits demandés au titre des remboursements et dégrèvements d'impôts locaux s'élèvent à 23 milliards et sont pris sur des politiques publiques. Y a-t-il des personnes qui travaillent à éviter la stratification des dépenses fiscales ? Ces dépenses sont liées à des choix qui ont été faits collectivement, mais dont certains remontent à plus de trente ans !

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Je partage l'avis de Cendra Mottin sur la faiblesse des montants des pensions de réversion et des retraites perçues par les conjoints d'exploitants agricoles ou les aides familiaux et je l'encourage à voter notre PPL qui sera discutée le 17 juin.

Nous abordons ici la question des retraites dans une temporalité incertaine puisque, malgré l'échec de votre réforme il y a un peu plus d'un an et la crise sanitaire, le projet plane toujours au-dessus de nos têtes. Le CAS Pensions et la mission Régimes sociaux et de retraite retracent les crédits consacrés au financement public des retraites, des fonctionnaires d'une part et des bénéficiaires de régimes spéciaux d'autre part – ceux-là mêmes que vous avez depuis votre arrivée dans le viseur, notamment la RATP et la SNCF. En 2020, pour faire de nouvelles économies, vous avez décidé de désindexer les pensions de ces régimes. C'est très encourageant puisque, malgré la baisse des cotisations des organismes de retraite, l'exécution de la mission s'est faite au niveau. Votre obsession pour la maîtrise des dépenses sociales – qui transparaît dans les crédits votés dans le cadre du PLF 2021 – se traduit par la faible revalorisation des pensions des fonctionnaires. Ce sont ces mêmes pensions que vous voulez baisser drastiquement avec la réforme « universelle » des retraites ; elle affectera durement les fonctionnaires et les régimes spéciaux. Une seule question, monsieur le ministre : ce gouvernement compte-t-il relancer la réforme des retraites avant la fin de la mandature ?

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Je voudrais compléter les propos du rapporteur spécial et de Christophe Jerretie sur le CAS Gestion du patrimoine immobilier de l'État. L'idée qui a guidé la création de ce compte d'affectation spéciale – j'étais alors à Bercy – était d'avoir un État propriétaire avec une politique immobilière définie, plutôt que des ministères tous propriétaires et mal organisés, hormis celui de la défense. N'avez-vous pas le sentiment, monsieur le ministre, d'assister aujourd'hui à une dispersion, avec une direction dotée de peu de moyens d'action par rapport aux ministères ?

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Olivier Dussopt, ministre délégué

Le Plan de relance devrait permettre à notre politique immobilière de faire face aux difficultés rencontrées en 2020. L'un des objectifs est de donner les moyens aux opérateurs et aux administrations de rattraper les retards et de combler ceux qui s'étaient accumulés précédemment. Cela répond d'ailleurs à une observation de Jean-Paul Mattei, qui a expliqué que le Plan de relance permettait le financement de travaux relevant du gros entretien, lequel aurait dû être assuré par les budgets de droit commun. La réalité, c'est que les budgets étaient mobilisés ailleurs ou insuffisants pour permettre la réalisation de ces travaux.

Je ne reviendrai pas sur la question du CISAP, je suis d'accord avec vos analyses. Il est vrai que le prélèvement à la source permet d'engager la contemporanéisation, une avancée immense qui concerne à la fois les impôts, les crédits d'impôt et les prestations. Nous cherchons à faire en sorte que les droits et les devoirs soient calculés au plus près de la réalité des revenus. C'est un travail que nous menons autour de la base de ressources « données de revenus mensuels ».

Concernant le pic de dépenses dû aux grands contentieux fiscaux, vous avez cité la Cour des comptes. J'apporterai, par précaution, une nuance : l'analyse de la Cour ne vaut que s'il ne devait pas y avoir de nouveaux contentieux, notamment de série.

La CNIP est un organisme d'analyse sans lien direct avec le CAS Gestion du patrimoine immobilier de l'État. Nous avons veillé à ce que la gouvernance de la Conférence soit articulée autour du ministère en charge des domaines – celui des comptes publics –, en associant les ministères à qui les patrimoines les plus importants sont attribués.

Monsieur le président Woerth, la DIE poursuit le travail de structuration de la politique immobilière de l'État dans la droite ligne de la réforme que vous avez engagée. Il n'y a qu'un propriétaire, l'État ; les ministères sont attributaires des bâtiments mis à leur disposition. Cela a des conséquences sur l'allocation du fruit des cessions, qui doit profiter à l'État et non aux ministères – quand bien même certains sont plus armés pour faire valoir leurs intérêts.

L'optimisation et la meilleure connaissance du parc sont des enjeux majeurs, aussi bien sur le plan budgétaire que sur celui de la transition énergétique. Nous demandons à la DIE de mieux identifier et connaître le parc pour éviter les doublons – il arrive que des services louent des immeubles alors que des bâtiments domaniaux demeurent inoccupés. Il faut optimiser l'occupation par la densification et le partage des lieux. Nous devons aussi céder ce qu'il est possible de céder et valoriser le patrimoine par des baux emphytéotiques ou des mises à disposition. Nous réfléchissons à des modes de gestion permettant de valoriser les biens et d'assurer les travaux d'entretien. Une des lacunes de la politique immobilière de l'État, notamment pour les sites à multi-occupants, concerne l'entretien : lorsque plusieurs administrations partagent un même bâtiment, aucune ne se considère responsable de son entretien.

Sur la question des dégrèvements, soulevée par Christophe Jerretie, un énorme travail, que je ne peux pas encore détailler, reste à faire. Il doit porter sur la nature des compensations lorsqu'il s'agit de dégrèvements d'impôts locaux – je pense notamment à la taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB). Là encore, il s'agit d'un chantier de longue haleine, mais nous serons persévérants.