Mission d'information de la conférence des Présidents sur l'impact, la gestion et les conséquences dans toutes ses dimensions de l'épidémie de Coronavirus-Covid 19
La réunion commence à dix-sept heures quarante-cinq.
Présidence de Mme Brigitte Bourguignon, présidente de la mission d'information
Mes chers collègues, nous auditionnons Mme Geneviève Chêne, directrice générale de Santé publique France depuis le 29 octobre dernier. Elle est accompagnée de Mme Marie-Anne Jacquet, directrice générale adjointe.
Madame Chêne, nous vous avions entendue le 15 avril dernier. Deux mois plus tard, alors que le pic de la crise est derrière nous, nous avons souhaité faire un nouveau point et reprendre certaines questions restées en suspens. Il s'agit de replacer le système de réponse aux crises sanitaires dans son contexte pour mieux comprendre son fonctionnement.
Nous venons d'auditionner votre prédécesseur. Nous serons amenés à aborder la question des stocks stratégiques, mais aussi tactiques, d'équipements de protection individuelle, celle des commandes de masques et, plus globalement, la question sensible des approvisionnements dans un contexte de concurrence internationale. Nous reviendrons également sur le sujet crucial des établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD).
L'article 6 de l'ordonnance du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires impose aux personnes auditionnées de prêter le serment de dire la vérité, toute la vérité, rien que la vérité. Je vous invite donc à lever la main droite et à dire : « je le jure ».
Mme Geneviève Chêne et Mme Marie-Anne Jacquet prêtent successivement serment.
J'ai conscience du moment très solennel que représente une audition par une commission d'enquête.
Entre autres missions, Santé publique France est chargée de la synthèse des statistiques relatives au coronavirus – personnes atteintes, patients hospitalisés, en réanimation et victimes. Mais l'agence est pleinement consciente qu'avant d'être des chiffres, ce sont des pères, des mères, des enfants, des amis, des collègues. À titre personnel et en ma qualité de directrice générale, je m'associe à leur peine.
Nous sommes réunis pour analyser la gestion de la crise. Si la gestion administrative des crises peut parfois paraître désincarnée, ou lointaine, elle ne l'est évidemment pas. Nous sommes solidaires, respectueux de tous ceux qui ont souffert ou souffrent encore, directement ou indirectement, du covid-19, des professionnels de santé mobilisés à leur chevet et de tous les Français également mobilisés, faisant de leur mieux pour apporter leur contribution à la lutte contre cette pandémie. Le moment est particulier car le virus circule toujours. Nous n'en avons donc pas terminé avec cette maladie, qui va s'inscrire dans le temps long de notre histoire.
L'agence a été créée le 1er mai 2016. Elle est issue de la fusion de trois établissements publics administratifs – Institut de veille sanitaire (INVS), Institut national de prévention et d'éducation pour la santé (INPES) et Établissement de préparation et de réponse aux urgences sanitaires (EPRUS). Il s'agissait de réunir au sein d'une même agence sanitaire toute la chaîne d'activités afin de connaître, expliquer, préserver, promouvoir l'état de santé de la population française, mais aussi de la protéger – nous sommes responsables des alertes et de la gestion des situations sanitaires exceptionnelles.
L'agence dispose d'un périmètre d'intervention comparable aux meilleures agences internationales. Il s'agit d'un établissement public administratif, placé sous la tutelle du ministère chargé de la santé. Elle emploie environ six cents agents, répartis sur tout le territoire, sur notre site national à Saint-Maurice et au sein des quinze cellules régionales placées auprès des directeurs généraux des agences régionales de santé.
Un contrat d'objectifs et de performance est signé pour cinq ans avec le ministère des solidarités et de la santé – le dernier date de 2018. Chaque année, le conseil d'administration de Santé publique France vote son programme d'activités et son budget en s'appuyant sur les moyens humains et financiers adoptés en projet de loi de finances (PLF) et en projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS).
Ses principales missions sont l'observation, la veille, la surveillance et l'alerte pour protéger les Français ; la prévention, la promotion, l'éducation en faveur de la santé ; la préparation et la réponse aux situations exceptionnelles et aux crises. François Bourdillon, que vous venez d'auditionner, vous a expliqué comment l'agence avait été construite.
Je profite de cette audition pour transmettre une pensée chaleureuse à tous les personnels de Santé publique France, mobilisés sans relâche au cours des mois les plus intenses de la crise. Je les remercie pour leur conscience professionnelle et leur engagement, qui fait honneur à l'agence. À mon arrivée, on m'a expliqué que les femmes et les hommes qui travaillaient à l'agence n'étaient pas là par hasard. Ils l'ont confirmé au-delà de ce que nous pouvions imaginer : ils ont fait face à cette pandémie avec courage et solidité.
Quelles sont nos missions par rapport à celles des autres acteurs qui interviennent dans la gestion de la pandémie ? Elles recouvrent la surveillance, l'investigation épidémiologique et les actions de prévention. La surveillance passe par la collecte d'informations, leur fiabilisation, l'alerte autant que nécessaire, et l'investigation épidémiologique qui s'est traduite par le traçage des contacts durant la première phase du covid-19. Les données collectées étaient ensuite communiquées lors du point quotidien du directeur général de la santé – elles le sont à présent par communiqué de presse du directeur général de la santé. Elles sont également mises à la disposition du public sur le site internet de Santé publique France, où le tableau de bord épidémiologique est mis à jour quotidiennement. Au 10 juin, l'espace dédié au covid-19 sur notre site avait fait l'objet d'environ 14 millions de visites – correspondant à 28 millions de pages vues.
Nous sommes également chargés de diffuser les recommandations visant à la prévention de la transmission du virus. Nous avons ainsi conçu les spots télévisés, les messages radio, les bannières digitales et les affiches visant notamment à promouvoir les gestes barrières et la distanciation sociale. Les équipes de Santé publique France apportent un soin tout particulier à toucher tous les publics. Ainsi, toutes les vidéos sont traduites en langue des signes. Au 10 juin 2020, plus d'un million de pages de notre site internet dédiées aux mesures de prévention avaient été consultées.
Enfin, il nous revient d'organiser la constitution et la formation de la réserve sanitaire.
Les députés présents connaissant particulièrement bien les missions et l'organisation de Santé publique France, je vous propose de passer aux très nombreuses questions.
Je vous poserai la même question qu'à votre prédécesseur : combien de masques étaient disponibles au début de la crise en janvier 2020 ? Je vous remercie de bien vouloir distinguer les masques dits chirurgicaux des masques de type FFP2. Pour quelle raison a-t-il fallu attendre le 24 mars pour qu'une première commande massive de 790 millions de masques chirurgicaux soit effectuée, puis le 26 mars, 675 millions de masques, après une commande de 4 millions de masques le 26 février et de 200 millions le 9 mars ?
Les commandes n'étaient-elles pas devenues plus complexes et plus coûteuses fin mars ? Ma question étant précise, je souhaiterais que vous me répondiez avec précision.
En janvier 2020, nous disposions d'un stock de 70 millions de masques chirurgicaux pour adultes et 28 millions de masques chirurgicaux pour enfants. 75 millions de masques chirurgicaux étaient arrivés à péremption fin 2019. À cela s'ajoutaient environ 360 millions de masques considérés comme non-conformes, de trois types – les masques ayant une date de péremption au-delà de janvier 2020, ceux ayant une date de péremption à fin 2019, et les masques non conformes issus du stock de masques achetés de 2003 à 2005, dont une partie avait été progressivement détruite ou non remplacée au cours des années précédentes.
La première saisine pour une commande de masques est intervenue le 30 janvier, pour 1,1 million de masques FFP2. Puis trois saisines ont été opérées en février, pour un total de 203 millions de masques, FFP2 et chirurgicaux. En mars, une première saisine intervient le 9, pour 200 millions d'unités, puis deux saisines, les 24 et 26 mars, pour 1,587 milliard de masques. En avril, cinq saisines sont opérées pour 900 millions d'unités, en mai, deux saisines, pour 740 millions d'unités et, en juin, une saisine pour 186 millions d'unités. Ces saisines font ensuite l'objet, avec diligence, des commandes nécessaires. Vous ai-je répondu ?
Votre prédécesseur, François Bourdillon, nous a transmis la lettre qu'il avait adressée au directeur général de la santé le 26 septembre 2018. Dans cette lettre, il faisait état de la dégradation du stock de masques chirurgicaux, en indiquant que 60 % semblaient non conformes. Il évoquait également l'expertise réalisée à la demande de Santé publique France par un comité dirigé par le professeur Jean-Paul Stahl, qui préconisait la mobilisation d'un milliard de masques – soit cinquante masques pour chacun des vingt millions de foyers français. Il sollicitait en conséquence la direction générale de la santé (DGS).
Autre point d'importance, le dernier paragraphe du courrier indiquait que 95 % des stocks de médicaments antiviraux détenus par Santé publique France étaient périmés.
Il sollicitait donc de la part de ses autorités de tutelle une doctrine précise : « il est important qu'une doctrine soit rapidement établie par vos services pour que les éventuelles acquisitions de produits de santé [les médicaments antiviraux et les masques] soient mises en œuvre afin de disposer d'un stock avant le deuxième semestre 2019 ».
Vous êtes entrée en fonction fin 2019. M. Bourdillon nous a indiqué ne pas avoir eu connaissance des suites données à son courrier puisqu'il n'était plus en responsabilité. À votre connaissance, quelles suites lui ont été données ? La doctrine a-t-elle été établie, puis mise en œuvre ? A-t-elle évolué ? Des réunions ou des échanges sont-ils intervenus ? Quelles commandes ont été effectuées entre le 26 septembre 2018 et janvier 2020 ?
Concernant les masques, la doctrine n'a pas changé : les stocks stratégiques d'État comprennent des masques pour la population. Il n'y a pas eu de débat, mais les discussions sont permanentes entre les équipes de Santé publique France et celles de la direction générale de la santé chargées de préparer la saisine annuelle. Une première demande de commande de 50 millions de masques est intervenue en 2019, avant une seconde de 50 millions supplémentaires la même année, dont 30 millions ont été reçus avant fin 2019, puis 70 millions en février 2020.
Vous nous confirmez que l'autorité de tutelle ne vous a pas notifié de changement de doctrine ? François Bourdillon a évoqué les interrogations de la tutelle : fallait-il maintenir la doctrine arrêtée par le secrétaire général de la défense et de la sécurité nationale en 2013, les stocks stratégiques de produits de santé comprenant des masques pour la population ?
La saisine du directeur général de la santé en octobre 2018 conduit donc à une commande de votre part, de cinquante millions de masques en juillet 2019, puis 50 millions de masques supplémentaires. L'inventaire, s'appuyant notamment sur le rapport Stahl, et transmis par François Bourdillon, faisait état d'un besoin d'un milliard et de stocks quasiment inexistants puisque non conformes. Pourtant, on décide de ne pas renouveler le stock. J'imagine donc qu'un changement de doctrine est intervenu. À la page 8 de la note transmise à la mission d'information, vous indiquez qu'il a été décidé de ne pas renforcer à ce jour le stock stratégique en masques, mais de prévoir un lissage de 20 millions de masques par an dès 2021, la durée de péremption des masques achetés en 2019 étant de cinq ans. Vous ajoutez que la cible est de 100 millions de masques – alors que le besoin était auparavant estimé à un milliard.
Qui a décidé de ce nouvel objectif ? S'agit-il des différents ministres ? Nous aimerions comprendre comment nous sommes passés de ce milliard, évalué scientifiquement, à un stock de 100 millions, qui semble résulter d'une décision politique ou administrative. À quel niveau et quand la décision – que vous semblez confirmer – a-t-elle été prise ?
Vous ajoutez : « Priorité de la DGS émanant d'une note du 5 novembre 2019. Pas de référence spécifique de masques. Demande à Santé publique France de détruire les produits de santé détenus en stock, à l'exception des traitements contre la variole et des immunoglobulines diphtériques ».
Vous ne m'avez pas non plus répondu sur les antiviraux. Nous aurions pu en avoir besoin dans le cadre d'une autre crise pandémique. Y a-t-il eu des acquisitions ?
Sur ces deux sujets essentiels, on a l'impression d'une forme d'inertie…
Je vous confirme qu'il n'y a pas eu de commandes de masques au-delà des 100 millions prévus.
S'agissant des antiviraux, je vous prie de bien vouloir m'excuser. J'ai un trou de mémoire. Je vais vérifier et vous communiquerai l'information.
Je vais revenir sur la question de M. Ciotti sur les masques : vous nous dites que la doctrine persiste – le stock de masques chirurgicaux devrait donc toujours être d'un milliard. Mais le directeur général de la santé, M. Salomon, indique quant à lui une évolution en 2018, le stock tampon devenant dynamique pour éviter les stocks dormants.
Pouvez-vous nous confirmer l'absence de changement de doctrine ? Si tel est le cas, pourquoi Santé publique France n'a-t-elle pas élaboré de nouveaux mécanismes d'alerte sur le modèle de l'alerte envoyée fin 2018 à la DGS ? Votre stock de masques est alors en quasi-totalité périmé. Le passage d'un milliard de masques à une cible de 100 millions nous interroge tous…
À partir de 2019, le stock est lissé. Que se passe-t-il à partir de la transmission de l'alerte par le gouvernement chinois à l'Organisation mondiale de la santé (OMS) le 31 décembre ? De notre côté, nous lançons l'alerte après un échange avec la direction générale de la santé dès le début du mois de janvier. Nous publions la première définition de cas le 10 janvier. Nous sollicitons les centres nationaux de référence (CNR) – l'institut Pasteur de Paris et le CNR de Lyon – pour qu'ils mettent au point un test, effectif à mi-janvier. Sous la responsabilité de la direction générale de la santé et du ministère de la santé, ce test est ensuite diffusé à tous les laboratoires pour qu'ils puissent le réaliser.
Le 24 janvier, trois premiers cas sont confirmés en France. À ce moment, la priorité est de les surveiller et de limiter l'importation de nouveaux cas et d'être en mesure de réaliser le diagnostic, le traçage et l'isolement de ces cas et de leurs contacts afin de limiter la diffusion de l'épidémie. Nous devons aussi penser aux premières mesures de prévention et faire en sorte, puisque les premiers cas sont hospitalisés, que les professionnels de santé disposent de matériel et soient munis d'équipements de protection individuelle – en particulier de masques FFP2.
À partir du déclenchement de l'alerte, la doctrine se focalise sur la protection des professionnels de santé. Notre objectif est alors de constituer des stocks de masques FFP2 et chirurgicaux, et de reconstituer les stocks de masques chirurgicaux. À ce moment-là, nous pensons que les stocks de masques dans les établissements de santé sont suffisants pour les professionnels de santé exposés aux premiers patients, car ils sont peu nombreux encore.
Comment saviez-vous qu'il y avait des stocks de masques suffisants dans les établissements de santé ?
Je n'ai pas dit que je savais qu'il y avait des stocks de masques suffisants dans les établissements de santé : je me fiais alors à la doctrine du secrétariat général de la défense et de la sécurité nationale (SGDSN) de 2013, selon laquelle les établissements de santé sont chargés de maintenir leurs stocks de masques.
Qu'est-ce qui explique le retard dans la mise en œuvre des tests PCR en France par rapport à l'Allemagne, qui conduit à ce que, au bout du compte, il y a eu quatre fois plus de morts chez nous qu'outre-Rhin ? Y a-t-il eu une volonté de donner la priorité à l'institut Pasteur, ce qui aurait freiné les autres laboratoires ?
Je ne peux répondre que dans le périmètre de compétence de Santé publique France, qui a pour mission de coordonner les centres nationaux de référence, mais je peux vous dire que le CNR a fait diligence, puisque la question du test y a été évoquée le 9 ou le 10 janvier, et que, sept jours plus tard, ce test était au point.
Le directeur général de la santé nous a laissé entendre hier que Santé publique France n'avait pas reçu la commande politique d'établir, sur la base des constats faits en 2018, une nouvelle doctrine relative à l'utilisation des masques : pouvez-vous nous le confirmer ?
Par ailleurs, pourriez-vous nous rappeler la chronologie des alertes et nous dire quelle était votre appréciation de la gravité de la pandémie au moment où vous avez alerté les autorités publiques ? La prise de conscience par celles-ci de la situation semble assez tardive si l'on se réfère aux déclarations faites par la ministre de la santé le 24 janvier 2020 et par le Président de la République le 6 mars 2020.
Quelle a été la place de Santé publique France dans la définition de la stratégie de lutte contre la pandémie ? Avez-vous pu exprimer votre avis au sujet des masques, des tests et du confinement, et avez-vous le sentiment d'avoir été écoutée ? Que pensez-vous des choix qui ont été faits sur ces différentes questions ? Comment avez-vous perçu l'annonce de la création d'un Conseil scientifique six jours avant le confinement ? Cette création n'était-elle pas trop tardive ? Pensez-vous qu'on puisse y voir une volonté de contourner l'expertise de Santé publique France ?
Enfin, vous avez pris vos fonctions en décembre 2019, c'est-à-dire très peu de temps avant le déclenchement de la pandémie, mais votre prédécesseur était déjà parti depuis cinq mois, ayant prévenu les autorités de nomination qu'il y serait obligé, étant atteint par la limite d'âge. Pensez-vous que la vacance du poste a été préjudiciable à la préparation de la réaction à la pandémie ?
Le 3 janvier 2020, l'alerte fait l'objet d'un premier échange entre Santé publique France et la direction générale de la santé. Le 10 janvier, nous publions la première définition de cas, ce qui permet de commencer le signalement des cas, la réalisation de tests diagnostiques et la prise en charge des patients constituant des cas avérés.
Le 17 janvier, le CNR de l'institut Pasteur met au point le test diagnostique et, le 24 janvier, les trois premiers cas de covid-19 sont confirmés en France – ils seront d'ailleurs les trois premiers cas confirmés sur le sol européen. Cela ne signifie pas qu'aucun Français n'a été atteint avant le 24 janvier, mais qu'à partir de cette date, on est en mesure d'identifier des cas à partir des signalements qui sont faits – je précise que pour ces trois premiers cas, on a pu remonter la chaîne de transmission jusqu'en Chine. Le 26 janvier, à la demande de la direction générale de la santé, et conformément à notre mission, nous produisons une première note d'analyse de risques portant sur des situations liées au coronavirus, auquel nous savons avoir affaire. Si certains des coronavirus tels que le SRAS et le MERS présentent une gravité particulière, d'autres sont assez bénins, puisqu'ils correspondent à de simples rhumes.
Trois scénarios sont donc identifiés, dont un scénario du type SRAS et deux scénarios de type pandémique, l'un avec un impact sanitaire et social significatif, l'autre avec un impact sanitaire et sociétal majeur. Nous indiquons alors tous les éléments qui nous manquent pour préciser nos hypothèses.
Ce même jour, le 26 janvier, je prends l'initiative d'appeler mon collègue des centres chinois pour le contrôle et la prévention des maladies ( Centers for Disease Control and. Prevention, CDC) – je rappelle qu'à l'époque, la grande majorité des cas se trouve en Chine, avec quelques cas isolés en Thaïlande et au Japon – et j'obtiens de lui parler pendant un quart d'heure. Afin que nous puissions avoir une idée plus précise de l'évolution de la pandémie, je souhaite l'interroger sur deux points. Premièrement, y a-t-il des cas asymptomatiques, quelle est leur fréquence, et peuvent-ils donner lieu à une transmission du virus ? Deuxièmement, quelle est la proportion de cas graves ?
Pour ce qui est de la gravité des cas, mon collègue m'indique que les Chinois sont en train d'analyser les premières séries, et me conseille de consulter régulièrement le site internet sur lequel il publie un bulletin quotidien. En ce qui concerne la proportion de cas asymptomatiques, il me dit qu'ils sont rares, et qu'il n'y a aucune certitude sur le fait que ces cas puissent être contaminants ; cette hypothèse, qui peut expliquer la contamination de personnels de santé, est toutefois à l'étude en Chine.
Le 7 février, quand le ministère nous demande de commander 1,1 million de masques FFP2, il y a moins de dix cas confirmés en France : on est encore dans une phase très précoce de l'épidémie, où tous les cas sont hospitalisés. Au même moment, la doctrine relative aux stocks stratégiques de masques change, et il est décidé de constituer des stocks pour les professionnels de santé.
Vous m'avez interrogée sur la place de Santé publique France dans la stratégie de lutte contre le covid-19. Santé publique France est une agence sanitaire, qui a pleinement accompli sa mission en matière de stratégie de surveillance, d'investigation, de collecte des données et de conception des indicateurs. Nous sommes partis du décompte de cas confirmés pour ensuite faire évoluer notre système de surveillance en même temps que l'épidémie. Pour cela, nous avons adapté notre système de surveillance de la grippe, qui mobilise à la fois le réseau Sentinelles des médecins généralistes, SOS Médecins, l'ensemble des indicateurs hospitaliers et des indicateurs pour la mortalité, le tout constituant une surveillance qualifiée de « populationnelle ». À ce stade, on ne compte plus nécessairement tous les cas un par un et, de fait, la stratégie ne consiste plus à diagnostiquer toutes les personnes : on analyse l'ensemble des compartiments de la population pour observer l'évolution de la dynamique de l'épidémie – c'est aussi ce qui nous permet d'analyser cette évolution et, chaque soir, de communiquer sur ce point.
Lors du confinement, nous avons poursuivi cette surveillance épidémiologique, ce qui nous a permis de constater une évolution favorable, jusqu'à ce que le pic de l'épidémie soit passé. Aujourd'hui, les laboratoires nous font remonter l'ensemble des données qu'ils collectent, ce qui suppose une mobilisation extrêmement importante de ces laboratoires, en particulier ceux effectuant les tests de type virologique RT-PCR. Nous disposons donc de nouveaux indicateurs, à savoir le nombre de tests positifs et le taux de nouveaux cas, les chiffres correspondants étant déclinés au niveau des territoires. Ce que nous faisons évoluer dans notre système de surveillance, c'est la capacité à collecter et à analyser l'ensemble des données de surveillance à l'échelon territorial le plus fin – au moins celui du département –, ce qui permet d'identifier et d'isoler les cas et les contacts, mais aussi de prendre toutes les mesures afin de maîtriser l'épidémie de façon prospective.
Nous avons également mobilisé deux autres systèmes de surveillance : d'une part, la collecte de cas et de décès au sein des EHPAD et des établissements médico-sociaux, d'autre part, le décompte du nombre de cas parmi les professionnels de santé en établissement de santé.
Le premier volet de notre mission consiste à collecter ces données, les fiabiliser, construire des indicateurs, les analyser quotidiennement et les mettre à la fois au service des pouvoirs publics, afin d'éclairer leurs prises de décision, et de la population, en publiant nos données sur notre site internet et dans notre bulletin épidémiologique hebdomadaire.
Le deuxième volet de notre mission consiste en la diffusion de recommandations à l'ensemble de la population, en portant une attention particulière aux populations les plus vulnérables, ce qui nous conduit à travailler avec un réseau d'associations comprenant notamment ATD Quart monde, avec lesquelles l'agence a construit des relations de confiance extrêmement précieuses.
Santé publique France anime également la réserve sanitaire, dans le cadre de laquelle elle mobilise des professionnels de santé et des logisticiens auprès des services de santé, à la demande des ARS ; enfin, sur les instructions de l'État, elle veille à constituer et maintenir les stocks stratégiques.
L'agence s'est-elle acquittée de toutes ses missions durant la crise du covid-19 ? Je dirai oui pour ce qui est de la surveillance, des recommandations, de la mise en place des campagnes de prévention – nous avons même créé un baromètre servant à mesurer l'adhésion aux gestes barrières et certains phénomènes de santé résultant de l'impact du covid-19 –, de la réserve sanitaire et du stock stratégique.
Ce que je souhaitais savoir, c'est si Santé publique France a été associée à l'élaboration de la stratégie relative à l'usage des masques, à la généralisation des tests ou au confinement et, le cas échéant, quelle a été sa relation avec le Conseil scientifique, structure ad hoc créée lors de la crise.
Santé publique France a été un correspondant permanent du Conseil scientifique. En particulier, le directeur scientifique de notre agence a assuré un lien permanent avec le Conseil scientifique afin de mettre à disposition notre expertise et les données dont nous disposions, et évidemment contribuer aux débats et aux saisines du Conseil qui, dans son esprit et dans ses missions, est plus proche d'un Haut conseil de la santé publique que d'une agence sanitaire – qui a, elle, les missions d'opérateur de l'État que j'ai décrites.
J'en viens à votre question sur l'intérim. Quand j'ai pris mes fonctions, j'ai trouvé une agence en ordre de marche, avec des agents extrêmement engagés dans leurs missions et dans l'exécution du programme de travail de l'époque – un programme évidemment bouleversé quand il a fallu prendre en charge les missions prioritaires résultant du covid-19. Je précise que le directeur général adjoint de mon prédécesseur a assuré l'intérim durant cinq mois, ce qui fait qu'il n'y a pas eu de vacance à la tête de l'agence. L'agence a été en parfait ordre de marche.
Madame la directrice générale, vous avez dit tout à l'heure que le rôle de votre agence était de protéger et d'alerter. Avez-vous, oui ou non, écrit au ministre de la santé depuis votre entrée en fonction pour lui dire que vous n'aviez pas les moyens d'assurer la protection des Français ? Avez-vous eu l'occasion d'alerter le Gouvernement au cours de réunions interministérielles ? On peut en effet s'étonner de l'écart considérable entre la commande massive de masques faite le 26 mars et le stock dont on disposait auparavant.
Pour ce qui est des tests, vous avez dit fort justement qu'ils avaient été mis au point en une semaine, entre le 10 et le 17 janvier. Pourquoi la direction générale de la santé s'est-elle mise en quête d'écouvillons pendant deux mois, alors que nous avions une capacité de diagnostic extrêmement faible – on nous a expliqué qu'il n'y avait pas assez de laboratoires qualifiés pour accomplir un geste prétendument très technique, alors qu'en réalité tous les biologistes savent l'accomplir ?
De même, pourquoi le CNR a-t-il mis deux mois et demi à valider les tests sérologiques, alors que d'autres tests sérologiques étaient disponibles sur le marché, qu'on a préféré ne pas utiliser ?
Enfin, je voudrais vous poser une dernière question portant sur les pandémies à venir : en tant que responsable de la protection sanitaire des Français, estimez-vous que le port du masque soit indispensable ?
Madame la directrice générale, j'ai une question à vous poser au sujet de la gestion du stock de masques. Le ministre de la santé a convenu que, depuis 2017, notre pays a détruit un stock important de masques – sans doute plus de 600 millions d'unités – qui étaient moisis ou périmés. Comment est-il possible qu'au XXIe siècle, des produits aussi utiles que des masques soient stockés dans des conditions si mauvaises qu'ils en viennent à moisir ? Avez-vous des informations sur ce point, et pensez-vous que l'administration ait fait le bon choix en décidant, par application du principe de précaution, de détruire des masques peut-être périmés, mais qui auraient pu être utiles en deuxième ligne ?
Par ailleurs, même si ce n'est pas tout à fait de votre ressort, pouvez-vous m'indiquer si vous considérez que l'organisation territoriale de la santé en France a fait preuve d'une égale efficacité sur l'ensemble du territoire national, outre-mer compris ? En tant que législateurs, il nous revient de légiférer et d'appliquer, mais aussi de contrôler et éventuellement de corriger : devons-nous nous préparer à revoir l'organisation territoriale de la santé ?
Pour ce qui est de votre responsabilité en matière de veille sanitaire, vous avez dit tout à l'heure que vous aviez contacté par téléphone votre homologue chinois pour évoquer ce qui n'était pas encore une pandémie, mais une épidémie touchant la Chine. Je sais qu'à la même époque, les Allemands ont envoyé des agents sanitaires en Chine pour évaluer la situation de visu. De votre côté, avez-vous cru votre homologue chinois sur parole, ou avez-vous également envoyé quelqu'un en Chine ? Je ne sais pas si vous aviez la capacité de le faire, mais peut-être avez-vous pu au moins contacter notre ambassadeur ou des médecins français travaillant en Chine. En tout état de cause, par quels moyens vous êtes-vous tenue informée au début de l'épidémie ?
À la mi-mars, au début du confinement, nous étions des milliers de volontaires de la réserve sanitaire à attendre de pouvoir apporter notre aide au personnel soignant, mais il aura fallu attendre quinze jours pour que nous soyons enfin mobilisés : comment expliquer un tel retard, et les nombreux bugs informatiques affectant le fonctionnement d'une plateforme aussi essentielle que celle sur laquelle nous devions nous inscrire ? Avez-vous demandé des emplois supplémentaires au ministère afin que l'inscription de ces 32 000 volontaires soit finalisée et que leurs coordonnées ne soient pas définitivement perdues ?
Par ailleurs, pourquoi n'avez-vous pas informé le ministère des risques d'une carence en masques après la destruction d'une grande partie des stocks ?
Selon l'épidémiologiste Anne-Claude Crémieux, Santé publique France aurait dû mener des enquêtes durant l'épidémie afin de comprendre comment les personnes se contaminent : cela aurait permis de mieux cibler les personnes contaminantes et celles risquant d'être contaminées. Pour quelles raisons Santé publique France ne fait-elle pas d'enquêtes de terrain qualitatives ? Selon vous, faut-il envisager une modification du métier de votre agence ?
Comment expliquer les grandes difficultés que vous avez eues à faire remonter des données du terrain et à suivre l'évolution de l'épidémie ? M. Bourdillon, que nous venons d'auditionner, a trouvé que les spots relatifs au covid-19 diffusés dans les médias étaient anxiogènes. Il ignore si ces annonces ont été faites à la demande du ministère : que pouvez-vous nous dire à ce sujet ? Enfin, quand vous avez constaté que les stocks de masques étaient périmés, avez-vous exprimé vos inquiétudes, et le cas échéant auprès de qui, quant au fait que nous pourrions manquer de masques ?
Madame la directrice, parmi les missions de votre agence, il y a la mise en œuvre des programmes de prévention et la réponse aux crises sanitaires. Or, on peut avoir le sentiment que Santé publique France a été écartée du cœur du dispositif, et que nous n'avons donc pas pleinement bénéficié de l'expertise de l'agence et de son savoir-faire. Si personne ne conteste l'engagement exemplaire des personnels de Santé publique France, on peut se demander si leur travail a été exploité comme il méritait de l'être par les pouvoirs publics. Qu'en pensez-vous ?
Pouvez-vous nous expliquer comment l'agence a été associée aux décisions relatives à la gestion de la crise ? Aviez-vous des rapports réguliers avec le ministre et avec le directeur général de la santé ? Où les grandes décisions stratégiques de gestion de la crise se prenaient-elles ? Avez-vous joué un rôle dans la définition des trois phases de gestion de la crise, dans les recommandations concernant l'utilisation des tests et dans la définition de la communication ?
Par ailleurs, quelles missions avez-vous trouvées en souffrance en prenant vos fonctions ? M. Bourdillon a reconnu que, compte tenu des réductions d'effectifs, il avait été obligé de faire des choix. Il y a eu beaucoup d'embauches en contrat à durée déterminée (CDD) ces derniers temps, mais pas assez pour rattraper les 10 % d'effectifs récemment supprimés, et encore moins les 20 % qui ont disparu au cours des dix dernières années. Pouvez-vous nous préciser quelles sont les perspectives pour ces personnels, et à quelles missions ils vont être affectés ?
Enfin, quelle a été la relation entre les cellules régionales et les ARS durant la crise ? Pour ma part, j'ai eu vent de difficultés locales, notamment du point de vue hiérarchique.
Le stock de masques acquis entre 2003 et 2005, non conformes et sans date de péremption, a fait l'objet tout au long des années 2010 de plusieurs échanges entre la DGS et l'EPRUS puis Santé publique France. Ces échanges ont abouti à ce que le directeur général de la santé demande un contrôle de ce stock en 2017, ce qui me semble légitime pour des masques aussi anciens et destinés à un usage sanitaire. Le contrôle, effectué en 2018, a mené à la destruction, sur saisine de la DGS, d'une partie du stock. C'est le vieillissement des masques qui est en cause, non les conditions de stockage ou la plateforme de Marolles elle‑même.
Le lien entre les cellules de Santé publique France et les ARS est essentiel. Dès le début, nous avons constaté que la progression de l'épidémie était plus ou moins intense selon les régions : cela a rendu d'autant plus importante l'analyse, à l'échelon territorial, des tableaux de bord et des indicateurs locaux. Cette synthèse qualitative et quantitative nous a permis de caractériser les territoires en matière de vulnérabilité au virus. Ainsi, nous avons appris progressivement qu'un nombre élevé d'EHPAD ou d'autres structures pour personnes âgées était un indicateur de vulnérabilité, nécessitant une surveillance plus intense.
D'après notre expérience, l'analyse des indicateurs de l'épidémie à l'échelon territorial est très efficiente pour éclairer les décideurs locaux, l'ARS en lien avec les préfets et l'ensemble des élus. L'analyse et le partage des informations sont cruciaux. La veille sanitaire et l'alerte exercées par les cellules régionales de Santé publique France, qui se caractérisent par leur indépendance scientifique, sont essentielles.
En effet, le rôle des cellules régionales est de faire valoir les analyses épidémiologiques et scientifiques auprès des ARS. Il peut exister des divergences d'analyse, mais dans la grande majorité des cas, les relations sont excellentes. Actuellement, l'analyse par les cellules régionales et les équipes des ARS de la situation épidémique ainsi que l'investigation des clusters font l'objet d'une remontée quotidienne.
J'ai pris l'exemple des échanges que j'avais eus fort logiquement avec mon homologue chinois, mais il n'est pas le seul à avoir fourni les éléments scientifiques utiles à notre veille sanitaire… Les 100 à 150 épidémiologistes spécialistes des maladies infectieuses qui travaillent au sein de l'agence ont exercé leur propre veille, en analysant la littérature et les données partagées par les agences sanitaires nationales – notamment allemande – et par le Centre européen de prévention et de contrôle des maladies (ECDC), structure chargée de la diffusion et de la comparaison des données internationales.
Vous m'avez demandé si Santé publique France avait été écartée du cœur du dispositif. L'agence est en lien permanent avec le centre de crise sanitaire (CCS) et le directeur général de la santé. La direction de crise a bénéficié à plein de notre savoir-faire, puisque les données que nous produisons quotidiennement alimentent ses tableaux de bord. Par ailleurs, nos équipes de prévention et de promotion de la santé ont été pleinement mobilisées pour concevoir les différents messages d'information.
Il est vrai que la tonalité des spots a semblé plus sévère – nos messages sont caractérisés d'ordinaire par une certaine bienveillance – mais c'est bien l'esprit dans lequel ils ont été conçus. L'analyse formelle de leur impact est en cours. Deux enquêtes, publiées dans le point épidémiologique hebdomadaire, montrent que l'adoption des gestes barrières et l'observance de la distanciation sociale, même si elles s'érodent, ont été très fortes. L'adhésion de la population a dépassé les 70 %. Il nous appartient d'analyser pourquoi ce taux est bien moindre lors des épidémies de grippe, alors que les campagnes de communication sont formidables.
Je tiens à saluer les professionnels de santé, qui ont été nombreux à se mobiliser pour rejoindre la réserve sanitaire. Il est vrai que l'inscription en ligne a connu quelques difficultés au départ mais le site fonctionne désormais. Sur la base des demandes des ARS, treize régions ont reçu du renfort : 1 400 réservistes ont été mobilisés, ce qui représente 152 rotations et 17 355 journées de mission. Ces personnels ont été affectés à l'accueil sanitaire des personnes en provenance de zones à risque et à l'accompagnement des ressortissants résidant à Wuhan, dans les services de réanimation et à la régulation du SAMU, dans les EHPAD et les soins de suite ainsi que sur les plateformes téléphoniques. Depuis le déconfinement, certains d'entre eux ont été envoyés en mission à Mayotte et en Guyane ou viennent en renfort des personnels des EHPAD. Les réservistes sont mobilisés pour des périodes assez longues et « clés en main », le logement, l'assurance ou le transport étant pris en charge.
Les principales modalités de transmission de ce virus respiratoire sont connues. Mais s'agissant des modes de contamination aux différentes phases de la maladie, nous en sommes encore au stade de la recherche. Des enquêtes sont menées notamment sur les clusters – la contamination des personnels au sein des abattoirs a donné lieu à analyse.
En février, le ministre de la santé, qui vient de prendre ses fonctions, explique au micro de France Inter que la France est prête face au risque pandémique. À la fin du mois, le directeur général de la santé, avec qui vous étiez en lien constant, affirme qu'il n'y a pas de risque de pénurie de masques. Le 13 mars, le Gouvernement infléchit sa position puisque le Premier ministre prend, à la veille du premier tour des municipales, un décret de réquisition des stocks au bénéfice des assesseurs. Dans la région Grand Est, alors que les patients sont déjà nombreux, les soignants ne sont toujours pas protégés. Une telle stratégie questionne. Étiez-vous en phase avec cette stratégie ? Avez-vous pu faire valoir votre position auprès de la DGS ou du ministre ?
Santé publique France est à la pointe en matière de prévention et ses campagnes de communication sont toujours adaptées. Mais n'y avait-il pas lieu, au XXIe siècle, d'adopter une stratégie autre que celle qui consistait à inviter les Français à rester chez eux et à attendre de ne plus pouvoir respirer pour appeler le 15 ?
Le retard pris dans la mobilisation de la réserve sanitaire est-il lié au fait que ce champ d'action de Santé public France aurait été laissé en souffrance durant la période d'intérim à la tête de l'agence ?
Madame Chêne, il vous faut être plus précise et cesser les digressions – je le dis aussi à l'attention de Jérôme Salomon et des personnes qui seront auditionnées. Si Sylvie Auconie évoque des moisissures concernant le stock de masques, c'est qu'elle reprend les termes de M. Bourdillon : ces moisissures ne se développent pas n'importe comment sur du polypropylène, il faut que les taux de température et d'humidité favorisent leur croissance. Quand bien même c'était du temps de l'EPRUS, il a bien dû se passer quelque chose sur ces stocks !
Par ailleurs, la question des données manquantes me pose problème ! Lors de votre précédente audition, vous aviez expliqué que l'absence de données concernant la morbidité et la mortalité dans les EHPAD était liée à une panne informatique. De la même manière, vos statistiques publiées dans le point épidémiologique du 30 avril et concernant la période allant jusqu'au 14 avril n'incluaient pas l'anosmie et l'agueusie. Or ces symptômes étaient connus depuis la mi-mars – il suffit de faire une recherche sur Google – et les spécialistes ORL en parlaient déjà.
Si votre définition de cas possibles avait été différente, le Charles de Gaulle aurait pu être sauvé. Le rapport du service de santé des armées souligne que si l'anosmie et l'agueusie avaient figuré aux côtés des signes cliniques d'infection respiratoire aiguë avec fièvre ou sensation de fièvre, le médecin à bord aurait su, peut-être même avant de repartir de l'escale de Brest, que le bâtiment transportait des cas et nous n'aurions pas perdu la moitié de notre dissuasion nucléaire ! Nous avons perdu un porte-avions et nous avons dû refaire les statistiques concernant les EHPAD. Nous sommes la risée du monde entier. Je suis scandalisé ! On peut certes être bien intentionné, mais faire n'importe quoi. Il faut que vous expliquiez pourquoi ces données ont manqué. Ce n'est pas sérieux de la part d'un service tel que le vôtre !
La doctrine de 2013 a certainement perturbé le fonctionnement de l'EPRUS, ce qui a empêché tout renouvellement des stocks périmés et abouti à leur destruction. Je le dis avec regret, car j'étais rapporteur de la loi créant l'établissement : on a ôté tout son sens à l'EPRUS qui était d'armer la France contre une menace sanitaire d'ampleur. Quelle est la gestion analytique des stocks ? Disposons-nous des données permettant de savoir ce qui a conduit à leur péremption ?
L'agence a-t-elle une responsabilité dans le fait que les professionnels de santé, en particulier les libéraux – médecins, dentistes, pharmaciens, kinésithérapeutes – se sont trouvés sans protection et abandonnés lors de la crise ?
Hier, Jérôme Salomon a expliqué qu'il avait demandé à l'agence de commander 1 million de masques fin janvier, tout en précisant que les besoins hebdomadaires des hôpitaux étaient estimés à 5 millions. Je m'interroge sur ce calcul et je voudrais savoir quelle a été votre réaction.
J'ai lu avec attention le rapport de la mission d'information, qui souligne, concernant Santé publique France, des faiblesses « sur le recensement des moyens de dépistage du virus par les laboratoires, les remontées d'informations s'avérant partielles ». Parmi les questions sur l'organisation du système de santé soulevées par la crise, Richard Ferrand pointe « l'organisation institutionnelle de la gestion des crises sanitaires, et plus spécifiquement les missions confiées à Santé publique France », sans évoquer la DGS. Cela laisse penser que votre agence sera un bouc émissaire facile. Avez-vous comme moi le sentiment que la majorité a déjà choisi celui qui assumera demain les responsabilités ?
C'est votre interprétation, monsieur le député ; la commission d'enquête n'a pas encore livré ses conclusions.
Les stocks de masques, non contrôlés durant quinze ans, ont été détruits et les Français se sont trouvés sans protection en début de crise. Vous avez expliqué que vous aviez pris conscience de la gravité de la situation et que vous aviez engagé des commandes de masques, bien timides au départ puis très importantes : 1 million fin janvier, 300 millions en février, 200 millions le 9 mars, puis 2,1 milliards fin mars.
Le 1er avril, j'ai demandé au Premier ministre, auditionné dans le cadre de la mission d'information, un état des lieux précis des dates et des volumes, ainsi que les bons de commande. Je n'ai pas obtenu de réponse. Mon groupe a réitéré cette demande par écrit le 9 avril, y ajoutant le calendrier des livraisons et une question portant sur les tests. Nous n'avons pas obtenu de réponse. Les médias, notamment Médiapart, vous ont demandé communication de vos contrats avec les fournisseurs chinois. Vous vous êtes retranchée derrière le secret des affaires. Ce refus vous a-t-il été dicté par vos autorités de tutelle ?
Je vous réclame officiellement l'ensemble de ces documents. Je vous rappelle que vous avez prêté serment et que le rapporteur est habilité à se faire communiquer tout document, à l'exception de ceux relatifs à la défense, à la sécurité de l'État et aux affaires étrangères.
J'observe aussi que le gros des commandes est arrivé à la fin du mois de mars. On nous a expliqué que l'organisation était très pyramidale et que vous deviez obtenir l'autorisation de l'État avant de passer commande. Mais ces retards ne sont-ils pas en partie imputables au départ de la ministre de la santé, le 17 février, et de la conseillère santé du Président de la République, Marie Fontanel, le 31 janvier ?
Enfin, la presse a laissé entendre en avril que les respirateurs produits dans l'urgence étaient inadaptés et ne pouvaient servir à soigner les patients gravement atteints. Confirmez-vous ces informations ?
Madame Wonner, je vous rassure : les gens n'ont pas attendu d'appeler le 15 en étouffant, mais sont allés voir leur médecin généraliste.
Madame Chêne, vous avez dit, un peu à contre-courant de l'intervenant précédent, que la population avait adhéré aux gestes barrières, supposant ainsi que la communication n'avait pas été si catastrophique.
La qualité des masques et leur stockage sont‑ils vérifiés en temps réel ? Nous avons appris tout à l'heure qu'il avait fallu une note de la direction générale de la santé pour se rendre compte que plusieurs centaines de millions de masques n'étaient plus efficaces, alors que l'on aurait pu imaginer que la vérification se faisait au fil de l'eau et qu'ils étaient redistribués avant d'être périmés. Quelles sont, à ce propos, les prérogatives de Santé publique France concernant la gestion des équipements de protection des hôpitaux ? Pouvez‑vous vérifier leurs contingents ? Et qu'en est‑il pour les équipements de protection de la médecine de ville ?
Quels ont été vos liens avec M. Bourdillon ? Vous avait‑il fait part d'interrogations voire d'inquiétudes sur la doctrine des masques ?
Enfin, alors que la logistique de distribution des masques a rencontré des problèmes, pouvez‑vous nous dire qui a signé le contrat‑cadre avec Geodis ?
Le changement de doctrine en 2013 concernait davantage, me semble‑t‑il, l'aspect qualitatif que quantitatif, dans la mesure où l'acquisition des masques FFP2 devait revenir aux professionnels de santé. Y a‑t‑il eu des instructions en ce sens ? Est‑ce à Santé publique France de s'assurer que les acquisitions ont bien été réalisées ? Aviez‑vous connaissance des stocks ?
En juin 2019, soit un an après que la faiblesse du stock de masques avait été constatée, un avis d'experts de Santé publique France relatif à la stratégie de constitution d'un stock de contre‑mesures médicales face à une pandémie grippale était publié. On y lisait qu'il n'existait aucun élément nouveau pour modifier les recommandations émises par le passé : en clair, nous avions toujours besoin de 1 milliard de masques. Aviez‑vous connaissance de cette situation, dès votre prise de fonction ? Quelle a été, à cet égard, la position de Santé publique France ?
Madame la directrice générale, je n'ai eu aucune réponse à mes questions. Aviez‑vous écrit à la ministre et au directeur général de la santé, pour leur dire que vous n'aviez pas les moyens de protéger les professionnels de santé et le grand public ? Comment expliquez‑vous que le Centre national de référence ait mis plus de deux mois et demi à valider des tests sérologiques, sachant que d'autres étaient sur le marché et que l'Allemagne ou certains pays asiatiques réalisaient des tests à grande échelle ?
Peut‑être dois‑je revenir sur la définition du périmètre de Santé publique France. Le déploiement des tests et la protection des personnels relèvent du ministère de la santé. En tant qu'opérateur de veille sanitaire, de prévention et de promotion de la santé, nous ne sommes pas chargés de vérifier la qualité des masques dans les hôpitaux, pas plus que de définir la doctrine les concernant ou d'évaluer les besoins. Santé publique France a joué son rôle. Si vous le souhaitez, je pourrai vous donner par écrit le champ précis de nos missions, dont ne relèvent pas les mesures de gestion et d'organisation.
Madame la directrice générale, votre prédécesseur nous a dit qu'il avait milité pour que Santé publique France participe à l'élaboration de la doctrine.
J'allais précisément vous le dire. Je conçois tout à fait cette requête et y souscris complètement. Si la doctrine demeure intégralement de la responsabilité du ministère de la santé, l'expertise de notre agence doit pouvoir être mobilisée et nous devons être partie prenante dans la discussion, qui doit être collective, étant donné que cela concerne des stocks stratégiques de l'État et la protection de la population.
Sur les tests, nous souhaitions diagnostiquer le plus possible et mener une campagne de dépistage à large échelle, puisque c'est en détectant l'ensemble des cas, en prenant toutes les mesures et en retraçant les contacts que l'on peut maîtriser l'épidémie. C'est d'ailleurs bien la stratégie qui a été mise en œuvre à la fin du confinement. Elle faisait partie des propositions de Santé publique France au moment des discussions concernant la sortie du confinement.
La définition des cas possibles, publiée sur le site de Santé publique France, est épidémiologique, ce qui signifie qu'elle ne limite en rien la pratique des cliniciens qui souhaitent prescrire des tests ; elle n'est pas clinique.
Concernant les EHPAD, Santé publique France a identifié très tôt que le système de collecte de données du portail de signalement du ministère ne permettait pas une remontée rapide. De la manière la plus réactive possible, dès lors que nous avons eu des signalements du terrain, nous avons conçu et mis à disposition des pouvoirs publics une nouvelle application permettant de faire le recueil du nombre de cas. Ce nouveau système fonctionne très bien et permet aux ARS de détecter le plus rapidement possible les nouveaux clusters. Quant à nous, il nous permet de réaliser un décompte très précis des cas de contamination, ainsi que des décès à l'hôpital et des décès en EHPAD, au service de la prise de décision publique.
S'agissant de l'absence de protection pour les professionnels de santé, nous agissons sur instruction du ministre. Notre agence s'est énormément mobilisée pour constituer les stocks stratégiques, dans une situation de tension internationale sur l'approvisionnement. Au départ, compte tenu de la doctrine en vigueur en janvier, nous n'avions pas de stocks pour les professionnels de santé. Nous avons constitué des stocks considérables dans des délais records, en mobilisant l'ensemble de nos équipes, sept jours sur sept, pour passer les commandes. La cellule de coordination interministérielle de logistique était chargée du sourcing au ministère de la santé, en identifiant les fournisseurs et les quantités, ce qui permettait au directeur général de la santé de rédiger la saisine. Ensuite, nous passions les commandes.
Pour ce qui est des documents relatifs aux commandes, nous les communiquerons, même si certains d'entre eux relèvent du secret des affaires. Nous sommes à votre disposition pour vous fournir les éléments dont vous avez besoin pour votre enquête.
Enfin, nous étions chargés de commander certains matériels, mais pas les respirateurs.
Je vous ai répondu, en vous expliquant ce qui était de notre responsabilité et ce qui ne l'était pas.
Je n'ai pas eu de réponse sur le décret de réquisition des masques au bénéfice des assesseurs, avant le premier tour des élections municipales, et la stratégie de communication du « restez chez vous et appelez le 15 ».
Le Conseil scientifique a donné un avis sur les élections, qui devaient être organisées dans des conditions sanitaires drastiques. La même doctrine s'appliquait d'ailleurs aux magasins alimentaires.
S'agissant du « restez chez vous », la campagne de communication a été conçue avec le ministère de la santé. N'oublions pas tous les efforts faits pour développer la téléconsultation. Mais je ne suis pas certaine de comprendre votre question. Parliez‑vous du retard pris dans les soins pendant le confinement ?
Dans l'Est, les patients, qui ont confiance en leurs médecins libéraux – contrairement à ce qu'a dit mon confrère, qui répondait à votre place –, allaient consulter leurs médecins traitants. Mais les consignes étaient claires : les médecins les renvoyaient chez eux, en leur disant qu'ils ne pouvaient pas les soigner, puisque deux décrets des 25 et 26 mars interdisaient l'utilisation de certaines molécules. Ils retournaient ainsi chez eux, avec une boîte de doliprane, en attendant que leur état s'aggrave pour appeler le 15.
Je le regrette beaucoup. Mais je ne pense pas que ces instructions concernent le périmètre de Santé publique France. En revanche, nous avons été parmi les premiers à alerter, très formellement, la direction générale de l'offre de soins (DGOS) sur la diminution du recours aux urgences pour certaines pathologies aiguës, comme les accidents vasculaires cérébraux ou les infarctus du myocarde.
Le directeur général de la santé n'a commencé à annoncer chaque soir le nombre de décès dans les EHPAD qu'assez tardivement. Ce retard a été incompris par beaucoup de nos concitoyens, alors que plus d'un tiers de la mortalité concernait ces établissements. Qu'est‑ce qui a empêché la publication de ces informations ? Quelles difficultés avez‑vous rencontrées ?
C'est effectivement un sujet très sensible. Au‑delà du seul décompte, il y va, d'une part, du respect de ces personnes et, d'autre part, de la définition de mesures de gestion appropriées. La remontée d'informations comporte deux enjeux : le décompte des cas en lui‑même et la prise de décision sur la base de ces remontées de cas. L'alerte et la prise de décision ne relèvent pas de notre périmètre. Les mesures de gestion relèvent des EHPAD et des ARS. Dans le système classique de remontée des informations, prévu par exemple pour la grippe, ce n'est qu'au bout de trois ou quatre cas que les EHPAD ouvrent un dossier sur le portail de signalement du ministère de la santé. Par la suite, les informations ne sont pas mises à jour quotidiennement, mais seulement à la disparition du foyer infectieux.
Voyant que nous avions peu d'informations qui remontaient par ce biais, alors que les régions nous demandaient de l'actualiser, nous avons proposé à la DGS de faire évoluer l'application, de sorte qu'un dossier puisse être ouvert dès le premier cas et actualisé chaque jour. Grâce aux personnels des EHPAD, nous avons ainsi pu recueillir des informations qui remontaient au 1er mars. Nous disposons désormais d'une remontée d'informations régulière, qui peut être utilisée par les ARS pour lancer une alerte et prendre des décisions avec les EHPAD. Nous sommes en mesure de continuer la surveillance pour la suite de l'épidémie. En pleine crise, nous avons fait évoluer le système de surveillance, après nous être rendu compte que sa version initiale n'était pas adaptée.
Qui est votre interlocuteur direct ? Êtes‑vous en lien permanent et direct avec le ministre de la santé ? Si ce n'est pas le cas, avez‑vous des interlocuteurs au sein du cabinet ou communiquez‑vous seulement avec le directeur général de la santé ? Comment qualifieriez‑vous votre relation ? Nous avons le sentiment que vous avez été laissée un peu seule pour gérer la crise.
Les équipes se parlent beaucoup entre elles. Les relations avec le ministère sont régulières et très fluides. Sans doute sont‑elles plus régulières avec le directeur général de la santé, qui est le directeur de crise. La relation est également régulière avec le directeur de cabinet, et nous en sommes en contact avec le ministre autant que nécessaire. Aussi avons‑nous partagé un certain nombre d'analyses avec Agnès Buzyn, en particulier sur l'alerte initiale. Avec Olivier Véran, nous échangeons sur l'évolution épidémiologique, ainsi que sur les données et les analyses de Santé publique France.
Pensez‑vous qu'à la suite de vos échanges ait pu se forger chez la ministre l'immense inquiétude face à l'évolution de la crise dont elle a fait part à la presse, le 20 janvier dernier, je crois ?
Je ne peux pas répondre pour la ministre.
J'ai perçu que la ministre était tout à fait attentive à l'évolution et à la gravité potentielle de la situation.
Je ne peux situer précisément le moment de l'échange. Mais je pourrai vérifier et vous fournir cet élément.
J'ai l'impression que la personne qui vous a laissée seule, en réalité, c'est votre prédécesseur. Je me permets de vous redemander quels échanges vous avez eus avec lui. Vous avait‑il laissé des notes, des conclusions ou des interrogations ? Par ailleurs, je n'ai pas eu de réponse non plus sur la signature du contrat‑cadre avec Geodis.
Nous avons fait un large tour d'horizon avec François Bourdillon, avant que je ne prenne mes fonctions. Il a toujours été disponible à chaque fois que j'avais besoin de précisions.
Dans mon souvenir, cela n'a pas été le sujet de notre échange, en octobre 2019. Les circonstances étaient alors bien évidemment différentes. C'était le projet de Santé publique France, en particulier l'impulsion qu'il avait donnée pour la prévention et la promotion de la santé, qui était au cœur de nos échanges.
Nous avons un contrat‑cadre avec Geodis, qui livre les groupements hospitaliers de territoire, dont nous pourrons vous donner les éléments précis et documentés. Nous pourrons également vous transmettre l'ensemble des éventuels incidents survenus dans la distribution massive et sans doute liés à des horaires discordants. Tous ces éléments ont été corrigés. Nous sommes dans un processus d'amélioration de la qualité. La logistique de distribution des masques n'est pas un sujet d'inquiétude à ce jour.
Permettez‑moi de vous reposer ma question. J'évoquais tout à l'heure le rapport réalisé par des experts de Santé publique France en juin 2019, qui faisait état du besoin de 1 milliard de masques. Au moment de votre prise de fonction, aviez‑vous connaissance du rapport et étiez‑vous donc consciente que nous n'avions que 100 millions de masques ?
Au moment de ma prise de fonction, j'ai fait le tour de l'ensemble des activités de l'agence. Ce rapport, j'en ai pris connaissance au mois de janvier. Ma prise de fonction a précédé de très peu, en réalité, la crise sanitaire.
La réunion prend fin à dix-neuf heures cinquante.
Membres présents ou excusés
Mission d'information sur l'impact, la gestion et les conséquences dans toutes ses dimensions de l'épidémie de Coronavirus-Covid 19
Réunion du mercredi 17 juin 2020 à 17 h 30
Présents. - M. Damien Abad, M. Julien Aubert, Mme Sophie Auconie, M. Julien Borowczyk, M. Éric Ciotti, Mme Josiane Corneloup, M. Olivier Damaisin, M. Pierre Dharréville, M. Jean-Pierre Door, Mme Caroline Fiat, M. Jean-Christophe Lagarde, M. David Habib, M. Bertrand Pancher, M. Bruno Questel, M. Joachim Son-Forget, M. Boris Vallaud, M. Philippe Vigier, Mme Martine Wonner