La séance est ouverte.
La séance est ouverte à vingt et une heures trente.
Cet après-midi, l'Assemblée a commencé l'examen des crédits relatifs à l'immigration, à l'asile et à l'intégration (no 1302, annexe 28 ; no 1304, tome VII ; no 1307, tome III), aux sécurités (no 1302, annexes 39 et 40 ; no 1306, tome VIII ; no 1307, tomes VIII et IX) et au compte d'affectation spéciale « Contrôle de la circulation et du stationnement routiers » (no 1302, annexe 39), s'arrêtant à l'amendement no 276 .
Nous poursuivons l'examen des crédits de la mission « Immigration, asile et intégration », inscrits à l'état B.
La parole est à M. David Habib, pour soutenir l'amendement no 276 .
Monsieur le président, monsieur le ministre de l'intérieur, mesdames et messieurs les rapporteurs spéciaux de la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire, mes chers collègues, peut-être ne serai-je pas le meilleur avocat de cet amendement, par lequel le groupe Socialistes et apparentés propose d'abonder les crédits du programme « Intégration et accès à la nationalité française » de 5 millions d'euros.
Quel serait le montant nécessaire ? Je n'en sais rien. Il faut avoir la modestie, l'humilité de reconnaître que vous êtes le seul, monsieur le ministre, à pouvoir répondre à cette question.
Ce que je sais, en revanche, c'est que par cet amendement, nous vous proposons de nous interroger tous sur notre capacité à accompagner ceux qui, pour des raisons diverses, souvent parce qu'ils y sont forcés, ont choisi de venir chez nous.
Notre devoir est en effet de les accompagner. Même si le Gouvernement a abondé le programme « Intégration et accès à la nationalité française », nous considérons qu'il faut envoyer un signal supplémentaire. Financer 1 000 micro-projets n'est pas suffisant. Il faut établir un partenariat avec les collectivités locales, ce qui nécessite un engagement résolu de l'État en faveur de l'accompagnement des réfugiés.
En défendant cet amendement, je cherche moins à vous convaincre de soutenir notre initiative qu'à vous interroger. Je souhaite que le Gouvernement s'exprime sur la nécessité d'accompagner ceux qui se sont réfugiés dans notre pays.
En commission, j'ai rappelé que la porte vers la France – si porte il y a – se situe aujourd'hui à la frontière espagnole, à la lisière du département des Pyrénées-Atlantiques dont je suis élu. Pour avoir vu des raccompagnements à la frontière, entre Hendaye et Fontarrabie, et assisté à certaines scènes, je tiens à saluer le travail des policiers, et leur humanité lorsqu'ils sont confrontés à de telles situations. Je ne suis pas certain qu'à leur place, nous serions plus dignes qu'eux. Ceux que j'ai pu voir font preuve d'une véritable humanité.
Chers collègues, dans nos discours, ne diabolisons pas ce qui est en train de se passer dans le Sud-Ouest. Les Pyrénées-Atlantiques sont un département béni où le Rassemblement national ne recueille pas plus de 8 % des voix, un département béni où la tradition de l'ouverture, de l'accueil, de l'humanité et de l'humanisme a toujours existé.
La parole est à M. Jean-Noël Barrot, rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire, pour donner l'avis de la commission.
L'amendement n'a pas été examiné en commission, mais nous partageons votre intention. Vous proposez d'augmenter de 5 millions d'euros le budget alloué au programme « Intégration et accès à la nationalité française », dont je rappelle qu'il augmente cette année de 40 millions d'euros. Vous relevez d'ailleurs dans l'exposé sommaire que 1 000 micro-projets seront soutenus.
Avant d'augmenter encore ces crédits, mieux vaut mener à bien ces expérimentations et promouvoir ensuite celles qui fonctionnent. Deux d'entre elles sont assez connues. Il s'agit des programmes à visée professionnelle HOPE et ACCELAIR.
Le second est déployé en Auvergne-Rhône-Alpes. Ayant observé qu'il pouvait mener certaines personnes vers l'intégration durable, le Gouvernement a décidé, dans ce projet de loi de finances, de l'étendre à six autres régions. C'est dans cet ordre qu'il faut procéder : examiner si les initiatives fonctionnent sur le territoire, puis les généraliser.
Je vous suggère donc de retirer l'amendement, même si votre intention est louable. À défaut, j'émettrai un avis défavorable.
La parole est à M. le ministre de l'intérieur, pour donner l'avis du Gouvernement.
Par cet amendement, monsieur le député, vous nous invitez à faire un geste. Le rapporteur spécial vient de vous le dire : nous l'avons déjà fait, de manière significative. Le dispositif global augmente de 89 millions d'euros. Quant à la ligne spécifique que vous proposez d'abonder, elle va passer de 8 millions avant 2018 à 31 millions pour 2019.
Notre logique est la même que la vôtre. Nous avions voté ensemble le budget dans lequel cette ligne était fixée à 8 millions. Je vous propose de voter celui qui la porte à 31 millions.
Considérant que nous disposons de marges de manoeuvre suffisantes, je souhaite que vous retiriez l'amendement. À défaut, j'émettrai un avis défavorable.
En répondant à M. Habib, je m'exprimerai aussi par anticipation sur l'amendement no 974 de M. Pajot, qui sera appelé dans un instant.
En matière d'intégration, il est essentiel de rechercher cet équilibre qui est apparu si important lorsque nous avons débattu de la loi pour une immigration maîtrisée, un droit d'asile effectif et une intégration réussie. Si nous avions ajouté le terme d'intégration dans le titre de ce texte, c'est parce qu'Aurélien Taché avait relevé dans son rapport que notre pays souffre d'un déficit d'intégration.
Au reste, il s'agissait non seulement de modifier le titre du texte, mais aussi d'ouvrir aux demandeurs d'asile la possibilité de commencer à travailler six mois après l'introduction de leur demande et de rénover le contrat d'intégration républicaine. On relève dans ce budget une augmentation exceptionnelle, de plus de 46 %, des crédits relatifs à l'intégration.
Je suis sûre que vous y êtes sensible, monsieur Habib. Il faut saluer cette augmentation qui permettra de doubler, voire de tripler les heures d'apprentissage de notre langue, de doubler les heures d'éducation civique et d'accompagner l'insertion professionnelle grâce à des dispositifs de certification.
M. Barrot a mentionné le programme HOPE. La semaine dernière, j'ai assisté au lancement du dispositif Volont'R, qui créera en 2019 2000 services civiques, certains affectés à l'accueil ou à l'accompagnement des réfugiés, d'autres attribués à des réfugiés. D'ici à la fin du quinquennat, 5 000 services civiques seront créés. Ces dispositifs d'accompagnement sont réels, de même que l'engagement de la majorité et du Gouvernement en faveur de l'intégration.
J'indique par anticipation à M. Pajot qu'il ne faut pas rogner sur les crédits de l'intégration, car l'intégration, c'est l'humanité. En outre, lorsqu'on ne permet pas à des étrangers qui se trouvent sur notre territoire de parler correctement notre langue, de travailler ou d'être logés comme il convient, on les contraint à la précarité, à l'inactivité et à la délinquance. Pour la stabilité de notre pays et au nom de l'humanité que nous devons aux étrangers, il faut mettre le paquet – comme nous le faisons – sur l'intégration.
L'amendement no 276 est retiré.
L'amendement no 974 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Les crédits de la mission « Immigration, asile et intégration » sont adoptés.
Il s'agit d'un amendement un peu technique. Deux types de contributions sont mis à la charge des employeurs qui n'auraient pas respecté la réglementation relative au séjour et au travail des étrangers : la contribution forfaitaire et la contribution spéciale.
La loi de finances de 2017 a affecté les sommes précédemment versées à l'Office français de l'immigration et de l'intégration – OFII – au budget général de l'État, mais le directeur général de l'OFII est resté ordonnateur national. De ce fait, c'est lui qui constate, qui liquide et qui émet des titres de perception, ce qui n'est pas son travail.
Une convention entre l'OFII et un service du ministère de l'intérieur a par conséquent prévu que le ministère de l'intérieur se substitue à lui dans cette opération.
Reste un problème juridique : les textes applicables aux conventions de délégation de gestion n'autorisent pas la conclusion d'une telle convention entre l'État ou les administrations de l'État et un établissement public.
Par cet amendement, nous proposons une solution plus simple. Sans créer de nouvelle taxe et en conservant le même système, nous prévoyons de donner à l'État la qualité d'ordonnateur des contributions spéciales et forfaitaires, et de tirer la conséquence de l'affectation de ces contributions au budget général en les considérant comme une recette classique de ce budget.
Il s'agit de réviser un amendement adopté par la commission et de le préciser utilement. J'émets donc un avis favorable.
L'amendement no 1378 est adopté.
J'appelle les crédits de la mission « Sécurités », inscrits à l'état B.
La parole est à Mme Sarah El Haïry, rapporteure spéciale de la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire, pour soutenir l'amendement no 1152 rectifié .
Cet amendement d'alerte tend à matérialiser le risque de la jurisprudence, actuellement européenne, de l'arrêt Matzak, dont l'application nous imposerait de porter 2,5 milliards au budget de l'État.
Je fais bien évidemment l'éloge de la gendarmerie nationale, dont l'honneur fait la fierté de la France. Si je propose de transférer les crédits de l'action 01 « Ordre et sécurité publics » du programme « Gendarmerie nationale » vers le programme « Sécurité civile », c'est pour rappeler qu'en matière de sécurité civile, notre modèle spécifique est basé sur le volontariat. Si l'on venait à imposer les quarante-huit heures hebdomadaires que représentent le temps consacré au volontariat et le temps professionnel, en ménageant entre ces activités onze heures de repos consécutifs, on tuerait le modèle du volontariat français, qui constitue pourtant notre fierté.
C'est parce que nous en sommes fiers qu'il faut le protéger. L'amendement vise à rappeler cette évidence et à nous rendre tous sensibles à une situation délicate.
M. Rémy Rebeyrotte applaudit.
La parole est à M. Romain Grau, rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire, pour donner l'avis de la commission.
Je serai bref, car Mme la rapporteur spéciale s'est exprimée de manière très complète. L'arrêt Matzak du 21 février 2018, en complète opposition avec le modèle de sécurité civile français basé sur le volontariat, pointe un problème structurel de notre budget.
Cela dit, le pire n'est pas sûr. Actuellement, il n'y a pas de recours exprès contre la France. La dette n'est donc pas certaine, ce qui est un principe notable d'action en matière de finances publiques. D'autre part, comme l'a soulignée la rapporteure spéciale, il serait aventureux d'amputer les crédits de la gendarmerie nationale pour compenser une dette inquiétante, mais qui demeure hypothétique.
Je suggère le retrait de l'amendement.
L'amendement témoigne de l'inquiétude suscitée par l'application de la jurisprudence Matzak. Des questions essentielles, sur lesquelles nous nous rejoignons tous, ont été posées. Ayons en tête que près de 69 % des sapeurs-pompiers volontaires sont salariés. L'arrêt Matzak pourrait donc avoir une incidence très lourde pour notre pays.
Dans le département des Alpes de Haute-Provence, dont je suis élu, les sapeurs-pompiers volontaires représentent 1 % de la population. Seul leur engagement permet de maintenir la présence et l'efficacité d'un corps très partiellement professionnel dans ce département.
Nous devons prendre le dossier à bras-le-corps. J'ai commencé à le faire dans le cadre d'un échange avec le commissaire européen qui en est chargé. Deux options sont possibles, que nous allons examiner de front de manière alternative ou simultanée. Peu importe. L'essentiel est d'avancer.
La première consiste à exploiter les dispositions de la directive, qui ouvre diverses possibilités de dérogations. Nous devons les examiner avec précision, en allant le plus loin possible pour préserver notre modèle. Si, dans ce cadre, nous trouvons suffisamment de garanties pour considérer que les interventions des sapeurs-pompiers volontaires ne relèvent pas de la directive, nous serons satisfaits.
Je veux explorer la totalité des pistes offertes par cette première option, car la seconde est plus lourde : elle consiste à engager une démarche auprès des autorités européennes pour obtenir une évolution de la directive de 2003. Il s'agirait de plaider l'exclusion du champ d'application de la directive de l'activité de sapeur-pompier volontaire, parce que cette dernière ne doit pas être considérée comme un travail classique. On ne doit toutefois pas négliger l'apport social de la directive de 2003, qui est un texte important.
On peut plaider cette cause soit de façon technique, en faisant jouer les dérogations possibles, soit en demandant une révision globale de la directive. Cette seconde option préserverait la souplesse de notre organisation actuelle, et aurait des conséquences plus limitées en termes de coût et de qualité du service national. Il faut les combiner l'une et l'autre, les mener de front pour préserver le statut de sapeur-pompier volontaire. Je vous demande donc de bien vouloir retirer l'amendement. À moins que vous ne souhaitiez être détestée par la gendarmerie nationale, ce qui n'est jamais bon –
Sourires
c'est le ministre de l'intérieur qui vous le dit – , une baisse de 2,5 milliards d'euros du budget de la gendarmerie nationale, cela risque de se voir !
L'amendement no 1152 rectifié est retiré.
Ces amendements s'inscrivent dans les choix qui ont été affirmés par le Gouvernement – le ministre de l'intérieur actuel, mais aussi ses prédécesseurs, surtout sous la précédente législature. Ils ont pour objet d'augmenter les moyens humains de la police et de la gendarmerie, qui avaient souffert de décisions dont nous nous souvenons tous, prises entre 2007 et 2012. Ils visent donc à créer, pour le premier, 1 000 emplois supplémentaires dans la police, pour le second, 1 000 emplois supplémentaires dans la gendarmerie. Des plans ont été annoncés, sur la durée du quinquennat, pour la police comme pour la gendarmerie, mais nous considérons qu'ils sont trop lents et que les inscriptions budgétaires pour 2019 ne nous permettront pas d'atteindre les objectifs qui ont été fixés d'ici le terme du quinquennat. Aussi proposons-nous d'augmenter les recrutements.
La parole est à Mme Nadia Hai, rapporteure spéciale de la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire, pour donner l'avis de la commission.
Monsieur le député, vos amendements, qui poursuivent un objet comparable, contiennent des dispositions symétriques : le premier déshabille la gendarmerie pour habiller la police, tandis que le second fait l'inverse.
Ne jouez pas à ça, ce n'est pas vrai ! Nous vous demandons de lever le gage !
Tel est, en tout cas, le sens de vos amendements. Nous partageons naturellement votre objectif, à savoir augmenter les effectifs de la police et de la gendarmerie. Je ne doute donc pas de votre intention de voter le budget que nous vous proposons, puisque nous augmentons significativement ses crédits, notamment sur le titre 2, afin de renforcer les effectifs de police. Toutefois, vos amendements soulèvent des difficultés de fond, quand bien même le Gouvernement accepterait de lever le gage. La mutualisation des deux corps va dans le sens de l'histoire. Nous travaillons avec la police et la gendarmerie – qui oeuvrent toutes deux en ce sens – pour accroître leur coopération et leur mutualisation. Des efforts significatifs ont été accomplis en la matière. Votre amendement no 272 , qui vise à abonder de 64 millions d'euros les crédits de la police nationale, priverait la gendarmerie nationale de ses nouvelles marges d'action. Je pense notamment au programme informatique NEOGEND, salué par les militaires, dont le coût s'élève à 62,6 millions d'euros, mais je pourrais donner d'autres exemples, comme les 64,2 millions d'euros consacrés à la construction d'une nouvelle caserne à Laval – le député de la circonscription doit s'en réjouir – ou les 65 millions d'euros destinés à l'acquisition de 2 800 véhicules légers par la DGGN – direction générale de la gendarmerie nationale. Enfin, je rappelle que la stratégie de recentrage des policiers et des gendarmes sur leur coeur de métier – monsieur Potier, vous devriez m'écouter, car je vous apporte des éléments de réponse – via la réduction des tâches indues, a pour effet de renforcer le caractère opérationnel des postes. Ces amendements n'ont pas été examinés par la commission, mais à titre personnel, Romain Grau et moi-même y donnons un avis défavorable.
Ce sont des amendements qui, à mes yeux, évoquent l'image de « M. plus », et qui montrent que nous partageons la dynamique engagée. C'est d'autant plus légitime de votre part que la démarche de reconstitution des effectifs – qui avaient très fortement baissé entre 2007 et 2012 – avait été engagée dès 2015.
Nous l'avions alors soutenue, parce qu'il était nécessaire de redresser le nombre des recrutements. Cette dynamique doit se poursuivre. C'est pourquoi nous avons engagé un plan de recrutement de 10 000 personnes supplémentaires dans les forces de police et de gendarmerie, sur lequel nous allons nous retrouver. Certes, on pourrait envisager 12 000 ou 14 000 emplois supplémentaires, mais nous nous heurterions à deux difficultés. Premièrement, il faut tenir compte des contraintes budgétaires. Rappelons que la croissance du budget de 3,5 %, comprenant une forte progression de la masse salariale – qui est l'élément prépondérant du budget du ministère de l'intérieur – est loin d'être négligeable. On peut certes considérer que ce domaine pourrait être encore plus prioritaire – c'est ce à quoi je faisais allusion en parlant de « M. plus ». Mais il faut avoir à l'esprit une deuxième limite : compte tenu des départs à la retraite de l'année prochaine, et du volume de recrutements de 1 802 policiers, complétés par un certain nombre de gendarmes, pour arriver au chiffre de 2 500 – je réponds ainsi par anticipation à un autre de vos amendements, monsieur Habib – , ce sont 4 477 élèves qu'il va nous falloir former l'année prochaine. Nous sommes donc limités par la capacité des écoles.
Mais surtout – ce n'est pas la peine de lever les bras au ciel, monsieur Bernalicis – , nous devons veiller à la sélectivité du recrutement. Il nous faut certes offrir des conditions de formation initiale optimales – nous le faisons, et nous devons continuer à le garantir – mais aussi assurer un niveau de sélectivité approprié au concours de gardien de la paix. Quand on a à l'esprit qu'il va falloir recruter, l'année prochaine, près de 4 500 futurs gardiens de la paix, on sait que la question de la sélectivité va se poser. Ce n'est pas une réponse budgétaire que je vous apporte, mais celle que me font les professionnels. Certes, il y a certainement des gens qui sont plus professionnels que les professionnels – cela me rappelle un film auquel, pour ma part, je n'ai jamais rêvé de participer. Si nous partageons un même objectif, nous devons aussi prendre en compte l'enjeu de la formation et de la sélectivité, tout comme la contrainte budgétaire : vos amendements entraîneraient en effet une dépense supplémentaire de 128 millions. Dans un budget qui connaît déjà une forte dynamique, je me dois de vous dire que l'exercice que vous proposez n'est pas simple. C'est la raison pour laquelle nous sommes défavorables à vos amendements.
Il se trouve que j'avais déposé deux amendements similaires à ceux de notre collègue David Habib, qui étaient gagés. Ils n'apparaissent pas dans la liasse – c'est sans doute dû à une erreur de notre part.
On sait que depuis Henri IV, les Palois et les Rochelais savent se retrouver, sauf au rugby, où ils s'affrontent.
Sourires.
Sourires.
En l'occurrence, les deux amendements que j'avais déposés allaient dans le même sens que ceux de M. Habib : ils avaient pour objet, pour le premier, la création de 1 000 emplois dans la police, et, pour le second, la création de 1 000 emplois dans la gendarmerie. Le Gouvernement avait promis – et nous soutenions bien évidemment cet engagement – de créer 10 000 emplois sur la durée du quinquennat. Vous avez évoqué, monsieur le ministre, le chiffre de 1 802 recrutements de policiers. Compte tenu de l'urgence, nous considérons que c'est insuffisant. Nous avions, dans ces deux amendements – qui ne seront malheureusement pas débattus, mais qui sont présentés par M. Habib – , fléché 64 millions d'euros vers le programme 176 « Police nationale », et notamment l'action 02 « Sécurité et paix publiques ». Nous avions compensé cette dépense par un prélèvement d'un montant équivalent sur le programme 252 « Gendarmerie nationale », puisque l'article 40 de la Constitution nous obligeait à le faire, tout en demandant au Gouvernement de lever le gage. Je tenais donc à m'associer aux amendements de M. Habib.
Ces deux amendements de notre collègue David Habib permettent de souligner qu'on n'arrivera pas à recruter 10 000 policiers et gendarmes d'ici la fin du quinquennat, en tout cas pas si on poursuit à ce rythme. Je me suis époumoné à un certain nombre de reprises – parce que le message ne passait pas – pour dire qu'il fallait construire des écoles de police. De fait, vous avez beau retourner le problème dans tous les sens, il n'y a pas assez de places dans les écoles. La formation dans les écoles de police est déjà limitée à neuf mois ; si vous voulez la réduire à six mois, en recrutant à un niveau plus faible, vous allez nous mettre dans une situation impossible. La gendarmerie est confrontée à la même problématique. Il aurait peut-être fallu m'écouter dès le début de la législature ! On peut imputer la responsabilité de cette situation à votre prédécesseur, mais dans la mesure où vous apparteniez déjà au Gouvernement, monsieur le ministre, je me permets de vous adresser aussi la critique.
Vous m'avez fait tout un couplet sur le schéma d'emplois, me disant que je ne comprenais rien aux projets annuels de performances parce que je m'étais concentré sur le plafond d'emplois. Mais non, je reviens à la charge : le plafond d'emplois, soit le nombre d'emplois équivalents temps plein maximum qu'il est possible de recruter au cours d'une année, n'évolue pas à un rythme suffisant pour espérer arriver à 10 000 recrutements à la fin de la législature. Autrement dit, vous êtes en train de mentir à la France entière sur les promesses de recrutement que vous avez faites, quelles qu'elles soient.
Si je partageais l'objectif du recrutement de 10 000 personnes, je n'approuvais pas la ventilation que vous proposiez. Je souhaitais en effet le recrutement de 5 000 personnels administratifs – parce qu'on sait les recruter rapidement, les placer sans tarder sur le terrain et les rendre opérationnels – , 3 000 policiers ou gendarmes, et 2 000 spécialistes de la police technique et scientifique. Telle est la ventilation que nous proposions.
Et le renseignement ? Vous ne pensez pas que ça peut être utile ?
Mais notre collègue David Habib pointe du doigt une réalité : vous n'atteindrez pas vos objectifs de recrutement. Vous feriez mieux de dégager des marges budgétaires pour ouvrir des écoles de police et des centres de formation de la gendarmerie plutôt que de nous raconter de telles sornettes !
Madame la rapporteure spéciale, nous ne sommes pas des perdreaux de l'année – vous non plus, d'ailleurs. Sachant que nous ne pouvons lever le gage nous-mêmes, nous vous invitions à le faire. L'excellent amendement de mon collègue David Habib vous invitait à trouver des solutions budgétaires. Nous n'avons pas eu l'outrecuidance de rappeler les choix budgétaires que vous avez faits en début de mandat, qui vous empêchent de dégager les marges de manoeuvre dont nous avons besoin aujourd'hui.
Monsieur le ministre, je vous fais confiance, mais je suis surpris de votre argument relatif à la difficulté, pour notre jeunesse, de s'engager dans les forces de sécurité. On avait entendu partout qu'après la période tragique des attentats, un mouvement d'engagement civique s'était traduit par des vocations de fonctionnaires, notamment dans la sécurité civile et dans les autres formes de sécurité. Si ce mouvement s'est tari, nous devons le regretter ; pour ma part, cela m'inquiète.
Vous avez également évoqué la mutualisation des corps de la police et de la gendarmerie. Nous sommes tous témoins, dans nos territoires, de ces coopérations. Je crois que le travail a déjà été mené en ce sens et qu'on est arrivé au terme des mutualisations, à moins que vous ayez des formules magiques. Si nous sommes tous d'accord pour reconnaître qu'il faut mutualiser et moderniser, j'aimerais que nous intégrions dans nos débats budgétaires sur les forces de sécurité un nouveau facteur : la présence sur le territoire, sous une forme ou sous une autre, d'un nombre important d'hommes et de femmes qui quadrillent l'espace, préviennent et enquêtent – améliorant ainsi notre qualité de vie et notre sentiment de sécurité, mais, surtout, allégeant le budget de la justice en aval. Nous avons trop peu insisté sur le rôle de prévention de la puissance publique. Y aurait-il un indicateur montrant que la prévention, en amont, la création d'un poste de policier ou de gendarme, contribue à désengorger un peu les prisons et les services de la justice ? J'aimerais que l'on puisse envisager cette approche à l'occasion de projections budgétaires pluriannuelles.
Monsieur le ministre, vous renvoyez aux diminutions d'effectifs des forces de police et de gendarmerie opérées sous le quinquennat Sarkozy, mais la situation n'était pas comparable à celle que nous connaissons aujourd'hui. Nous pouvons légitimement appeler de nos voeux, à présent, des modifications à cette politique, parce qu'elles sont rendues nécessaires par le contexte particulièrement grave que nous connaissons. Madame Hai, il est choquant de vous entendre avancer un argument que vous auriez pu adresser à votre collègue El Haïry à propos de son amendement sur les sapeurs-pompiers ; elle a en effet utilisé le même mécanisme pour permettre qu'une discussion s'engage sur l'application, qui nous effraie quelque peu, de la directive européenne sur les sapeurs-pompiers.
Certes, mais vous n'avez pas employé le même argumentaire que pour l'amendement de M. Habib, ce que je trouve regrettable. Nous souhaitons que la discussion budgétaire soit apaisée et permette l'expression de certaines inquiétudes.
En ce qui concerne les sapeurs-pompiers, je remercie M. le ministre de sa réponse.
Il reste cependant deux points en suspens : tout d'abord, le calendrier nous inquiète – et inquiète surtout tous les services départementaux d'incendie et de secours ; ensuite, je vous demande de nous informer régulièrement de l'état d'avancement de vos investigations. En effet, au-delà de la question du modèle de sécurité civile français, il y a une crainte très forte dans les territoires d'une démobilisation et d'une démoralisation des sapeurs-pompiers volontaires, qui ont besoin d'être rassurés.
Cet amendement est très intéressant, parce qu'il pose une question qui va au-delà des créations de postes. Nous pouvons nous retrouver sur ces dernières, puisque notre projet en prévoyait également 10 000. En revanche, la police de sécurité du quotidien absorbera 75 % de ces nouveaux postes pour assurer des missions bien spécifiques dans certains endroits ou dans certains quartiers. Dans les zones rurales couvertes par la gendarmerie, seuls 2 500 nouveaux postes sont prévus, alors qu'elles représentent plus d'un quart du territoire et de sa population.
Or, les zones rurales connaissent une recrudescence des cambriolages commis par des groupes itinérants d'origine balkanique. Certains territoires ruraux se paupérisent et subissent une hausse de la délinquance. Ainsi, dans certains endroits de mon territoire sont apparus des problèmes d'héroïne, encore inimaginables il y a quelque temps.
La répartition des hausses d'effectifs entre les zones urbaines et rurales est déséquilibrée. L'augmentation de 2 500 postes dans les territoires ruraux est-elle à la hauteur des enjeux sécuritaires que l'on doit y affronter ? Cet amendement permet de répondre à cette question.
Je ne vais pas beaucoup insister sur le premier point, madame la rapporteure. Il me semble être le plus ancien dans cet hémicycle.
Je n'en tire aucune vanité, mais une certaine expérience. Madame la rapporteure, cet argument a déjà été avancé, à gauche comme à droite. Ceux qui l'ont utilisé ont très vite compris qu'il ne fallait pas recommencer, parce que nous n'avons effectivement pas le choix, et il est assez moche de nous en faire grief.
Monsieur le ministre, notre amendement s'inscrit dans vos propositions de cadrage en termes d'emplois.
Nous n'avons rien inventé. Simplement, nous modifions le rythme. Si vous n'êtes pas ambitieux sur le nombre d'emplois créés dans les premières années du quinquennat, vous aurez du mal à atteindre votre objectif à l'issue de celui-ci. Comme je ne suis pas persuadé que vous dirigiez encore le pays après ces cinq ans, ne laissez pas à vos successeurs, qui appartiendront je l'espère à mon camp, le soin de rattraper vos retards.
J'entends vos arguments sur la sélectivité, mais les propos de Dominique Potier doivent vous rassurer : les jeunes Français ont envie de s'engager ! Donnons donc au pays de véritables perspectives et à la jeunesse l'opportunité de s'inscrire dans un service public de sécurité de qualité ! Tant que vous n'aurez pas mis les moyens à la hauteur des objectifs que vous avez fixés, le groupe Socialistes rappellera la nécessité d'augmenter les dotations.
Ces deux amendements touchent aux moyens matériels accordés à nos forces de l'ordre.
Le rapport de la commission d'enquête du Sénat sur l'état des forces de sécurité intérieure en France, publié le 3 juillet 2018, est particulièrement accablant. Le mal-être de nos forces de l'ordre ne cesse de progresser dans notre pays. Le taux de suicide dans la police est supérieur de 36 % à la moyenne nationale. Les conditions de travail de nos forces de l'ordre ne permettent pas à ces hommes et à ces femmes, qui se dépensent sans compter pour nous protéger, de travailler dans de bonnes conditions. En effet, les locaux de la police sont vétustes, indignes de l'accueil du public, et certains commissariats sont même insalubres et envahis de nuisibles.
Alors que nos policiers et gendarmes font face à une menace terroriste importante et à une crise migratoire majeure, ils travaillent dans des conditions inacceptables. De nombreux policiers nous font part de la vétusté de leurs véhicules. Ce manque de moyens met en péril le bon fonctionnement du service public de la sécurité. La République a besoin de ses forces de sécurité intérieure, et il convient donc de prendre davantage en considération la détresse de nos forces de l'ordre. Parce que la sécurité est la première des libertés, nous proposons dans ces amendements d'augmenter les crédits alloués à la réhabilitation des bâtiments et ceux dédiés à l'acquisition de nouveaux véhicules.
L'amendement no 1129 propose d'augmenter l'enveloppe dédiée à l'entretien des casernes de gendarmerie. Nous ne pouvons que partager cette volonté d'améliorer les conditions de travail des hommes et des femmes qui nous protègent. Toutefois, monsieur Pajot, l'ambition de votre amendement nous paraît satisfaite à la lecture du projet de loi de finances pour 2019.
Je m'étonne que vous ne vous intéressiez qu'aux gendarmes, alors que la police est dans le même cas.
L'amendement suivant porte sur les véhicules, mais c'est M. Grau qui vous répondra sur ce point.
En matière d'immobilier, les commissariats de police et les casernes de gendarmerie bénéficieront de la poursuite du plan triennal, que nous vous invitons à consulter. En 2019 sont prévus 357,52 millions d'euros pour le budget d'entretien de la police et 749,9 millions pour la gendarmerie. Cette dernière, sur laquelle porte votre amendement, a conduit un audit de son parc immobilier, dont les conclusions seront utiles pour améliorer la situation dans les prochains mois. En outre, la décentralisation croissante d'une partie des crédits nécessaires aux travaux du quotidien, telles que les cartes-achat, nous semble de bonne administration ; elle reçoit un excellent accueil des forces de police et de gendarmerie, notamment parce qu'elle permet aux commissaires de police et aux commandants de gendarmerie de mener des actions d'entretien rapides et efficaces pour améliorer le quotidien.
Pour finir, je suis assez surprise de votre souhait de réduire le budget du programme « Sécurité et éducation routières ».
Je vous invite à consulter très attentivement le bilan 2017 de l'Observatoire national interministériel de la sécurité routière, particulièrement vous, madame Ménard, parce que vous devez connaître quelques chiffres. On y apprend qu'entre 2016 et 2017, le nombre de tués sur la route a augmenté dans deux départements, dont celui de l'Hérault, dont vous êtes l'élue, madame Ménard, ainsi que d'autres signataires de votre amendement,...
.. contrairement à la moyenne nationale. Dans le Gard, là où est élu M. Collard, on dénombre soixante morts dans des accidents de la route, soit une augmentation de 3 %. La hausse atteint même 36 % dans les Pyrénées-Orientales.
Romain Grau et moi-même donnons un avis défavorable à l'adoption de cet amendement.
L'amendement no 1130 vise à abonder les crédits destinés à l'acquisition de véhicules par la police nationale de 23,95 millions d'euros. Nous partageons votre préoccupation sur le renouvellement du parc de véhicules de la police nationale, mais nous la pensons satisfaite par le projet de loi de finances tel qu'il nous est soumis.
Le budget pour 2019 prévoit l'acquisition de 5 800 véhicules pour la police et la gendarmerie, dont 3 000 pour la seule police. Il s'agit d'un investissement historique, qui ne s'est jamais vu depuis huit ans.
Des expériences nouvelles sont également tentées sur des locations de véhicule avec option d'achat pour la gendarmerie, notamment la Garde républicaine.
Vous mettez l'échelle de l'histoire où bon vous semble : nous la mettons à huit ans, vous la placez sûrement à dix ans, moment où vous avez baissé tous les crédits. Cela vous regarde !
Je vous la donne à dix ans !
Il ne vous a pas échappé que 1 100 véhicules saisis avaient été attribués à la gendarmerie et 378 à la police, ce qui est une excellente nouvelle pour nos forces. Le renouvellement s'effectue sous nos yeux !
Comme j'ai appris à veiller à parler systématiquement de la police et de la gendarmerie, je vais répondre aux deux amendements. Vous avez ciblé l'immobilier dans l'un et les véhicules dans l'autre en distinguant la police et la gendarmerie, mais le problème est réel pour les deux corps dans ces deux domaines. Plutôt qu'une approche ciblée, nous avons une approche ambitieuse et globale.
J'étais ce matin dans le département du Nord, à Aulnoye-Aymeries, où j'ai visité un commissariat dans lequel quarante personnes se partagent 300 mètres carrés dans des conditions inqualifiables et infâmes. J'ai annoncé l'engagement de l'État de lancer un programme immobilier, en lien avec le maire qui propose un terrain, parce qu'il est évident que les conditions de travail ne sont pas satisfaisantes ; cela n'est pas vrai partout, mais elles sont totalement scandaleuses à certains endroits, et il faut donner des moyens.
C'est la raison pour laquelle nous avons porté le budget immobilier à 301 millions d'euros, dont 196 millions pour la police et 105 millions pour la gendarmerie. Je prends l'engagement, si j'exerce ces responsabilités de ministre dans la durée, de maintenir cet effort exceptionnel pendant trois ans.
Nous travaillons aussi sur la question du gros entretien, parce que nous n'avons pas donné à nos services, en particulier au secrétariat général du ministère de l'intérieur, la capacité d'intervention pour l'entretien des bâtiments, ce qui a entraîné le pourrissement de certaines situations obligeant ensuite à reconstruire ou à déménager. Nous consentons un effort sans précédent, puisque nous multiplions par trois le budget du gros entretien, notamment dans le secteur de la police, pour le porter à 48 millions d'euros. Je vous proposerai de le porter à 50 millions d'euros l'année prochaine. Nous pourrions effectivement faire plus, mais notre gestion budgétaire est responsable.
Le budget alloué aux véhicules n'a jamais été aussi élevé depuis dix ans – je remonte à plus loin que huit ans – , et je vous propose dans le budget l'acquisition de 3 000 voitures pour la police pour un coût de 72 millions d'euros et de 2 800 voitures pour la gendarmerie pour 61 millions d'euros. En effet, nous connaissons la situation du parc automobile : plus de 30 000 véhicules avec une moyenne d'âge de sept ans. Il s'agit d'un vrai problème, qui nous oblige à renouveler ce parc. Voilà pourquoi le budget qui vous est proposé dans ce domaine est le plus élevé des dix dernières années.
Il est raisonnable de se doter de ces moyens, et nous sommes défavorables à l'adoption de vos amendements.
Je ne résiste pas à l'opportunité de m'interroger sur les futurs 5 800 véhicules, dont j'ose espérer qu'ils seront tous livrés en 2019, alors que ceux prévus l'année dernière ne l'ont pas encore tous été, comme c'est le cas chaque année.
Je ne résiste pas au plaisir de partager avec vous cette information, issue du monde réel. C'est ainsi, que voulez-vous !
Monsieur le ministre, ces 5 800 véhicules rouleront-ils au diesel ou à l'essence ? Comme vous augmentez la taxe sur le diesel, il serait préférable qu'ils roulent à l'essence. Peut-être même sont-ils, pour certains d'entre eux, électriques, et vous allez nous donner de grandes nouvelles ce soir. J'ose espérer que la transition énergétique, la défense de l'environnement et le maintien de l'écosystème qui permet la vie humaine sont pour vous une boussole, qui oriente vos pas chaque matin dès le réveil. Il faut laisser à nos enfants et à nos petits-enfants une planète vivable, dans laquelle les policiers ne suffoquent pas à cause des gaz d'échappement de leurs véhicules.
Contrairement à vous, monsieur Bernalicis, je n'ai pas la prétention de choisir les modèles des véhicules de la police et de la gendarmerie.
Je fais pleinement confiance aux autorités locales, dans chaque territoire, pour déterminer de quels types de véhicules ils doivent se doter dans le cadre des marchés publics afférents.
Nous savons tous que notre administration doit être politiquement exemplaire. Il va de soi qu'il faut exclure le diesel de notre politique d'acquisition dès lors que les véhicules proposés existent dans plusieurs options. Contrairement à vous, je ne prétends pas choisir et acheter les véhicules qui équiperont nos forces de l'ordre. Je leur fais pleinement confiance.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.
L'amendement no 1129 me fournit l'occasion d'évoquer non pas l'état des gendarmeries, mais celui des logements, souvent vétustes, dans lesquels sont hébergés les gendarmes. Il y a là un véritable problème pour notre pays.
Lorsque je constate les difficultés de l'État à assurer la remise en état de ces logements et à fournir des logements décents à ses gendarmes – qui ne se plaignent pas beaucoup, car ils sont avant tout des serviteurs de l'État, mais n'en vivent pas moins ces situations avec leurs familles – , je me demande s'il ne serait pas opportun de laisser une autonomie accrue aux groupements de gendarmerie départementale afin de mieux optimiser le parc immobilier dont ils sont détenteurs.
Pourquoi ne pas étudier de temps à autre avec les bailleurs sociaux la possibilité de travailler à la rénovation de certains logements occupés par des gendarmes ? Ce dont je suis en tout cas certain, c'est que la situation actuelle ne pourra perdurer longtemps.
La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l'amendement no 958 .
Je commencerai par rassurer Mme la rapporteure spéciale. L'amendement no 958 vise à transférer 10 millions d'euros du programme 207 « Sécurité et éducation routières » vers l'action 04 du programme 176, intitulée « Police des étrangers et sûreté des transports internationaux ».
Évidemment, je ne formule pas cette proposition de gaieté de coeur ; évidemment, prélever cette somme sur le budget consacré à la sécurité et l'éducation routières n'entre pas dans mes intentions ; évidemment, l'article 40 me contraint à procéder ainsi ; évidemment, les mauvais chiffres de la sécurité routière dans le département de l'Hérault ne me font pas plaisir, tant s'en faut.
Néanmoins, le contrôle des personnes aux frontières, la lutte contre l'immigration clandestine et le démantèlement des filières qui l'organisent sont d'une importance cruciale. Il n'y a pas si longtemps, au mois d'avril dernier, quatorze personnes ont été interpellées, parmi lesquelles quatre ont été inculpées pour aide à l'entrée, à la circulation ou au séjour irréguliers d'un étranger en France commis en bande organisée. D'après le procureur de la République auprès du tribunal de grande instance de Chaumont, trois personnes ont été écrouées.
Étaient en cause des bus partant d'Albanie pour rejoindre la France via divers pays européens, tels que l'Italie, l'Allemagne ou la Belgique, où ils déposaient des gens, aux dires du directeur de la police aux frontières pour la zone Est. Grâce à cette filière, semblable à tant d'autres, au moins quatre bus faisaient chaque semaine leur tournée en France pour y déposer des Albanais et des Kosovars.
Sourires sur les bancs du groupe LR.
Comme l'affaire est juteuse, ce genre de réseau refleurit en très peu de temps. C'est compréhensible : pour un tel réseau, ce sont entre 2 500 et 3 000 personnes qui paient leur place au moins 200 euros, soit un pactole de 600 000 euros constitué en exploitant la misère humaine.
Et devinez ce que l'on a trouvé dans les bus, mes chers collègues ? Des documents servant à compléter les demandes d'asile ! J'ai eu l'occasion tout à l'heure d'indiquer les activités auxquelles se livrent certains de ces demandeurs d'asile, si on peut les appeler ainsi.
Dans l'Hérault, au même moment, des Ivoiriens se faisant passer pour des mineurs – moyenne d'âge : entre vingt-cinq et trente ans – ont été arrêtés. L'enquête qui a suivi a démontré que l'activité de cette filière ne se résumait pas à la fourniture de faux documents, mais consistait également à organiser le transit des migrants via la Libye et l'Italie, comme l'a indiqué le magistrat chargé de l'affaire.
Si les chiffres sont encourageants, avec plus de 300 filières démantelées en 2017, il ne faut pas pour autant baisser la garde et renoncer à se donner davantage de moyens pour lutter contre la traite des êtres humains et pour la protection de nos frontières. Tel est le sens de l'amendement.
Chère collègue, votre amendement vise à abonder de 10 millions d'euros l'action 04 du programme 176, intitulée « Police des étrangers et sûreté des transports internationaux ». Tout d'abord, vous évoquez dans l'exposé sommaire de l'amendement la situation de l'Hérault et les courants migratoires en provenance d'Espagne.
Je rappelle que l'équivalent de trente effectifs ont été créés dans la police aux frontières – PAF – des Pyrénées orientales cette année. Les titulaires des postes y ont été affectés dès le mois de septembre dernier. Les budgets que nous votons, en l'espèce celui que nous avons voté l'an passé, ont donc des incidences. Ils prévoient une augmentation des crédits.
Par ailleurs, vous et nous ne faisons pas la même lecture du projet de budget qui nous est soumis. Nous considérons que celui-ci permet de répondre à une préoccupation que vous avez exprimée à de multiples reprises sur ce point.
Je rappelle que le budget alloué à l'action que vous proposez d'abonder s'élève à 913,25 millions d'euros, soit une augmentation de plus de 10,5 millions d'euros par rapport à l'an passé, d'ores et déjà inscrite dans le projet de budget, dans le cadre d'une gestion au plus près du terrain et des plus sérieuses. Cette augmentation nous semble satisfaisante. L'avis de la commission est donc défavorable.
L'amendement no 958 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l'amendement no 961 .
Il porte sur un sujet tout différent. Au mois d'août 2017, l'Union des policiers nationaux indépendants lançait un concours de photographie visant à dénoncer l'état déplorable de certains locaux où travaillent nos policiers. Cette démarche légère, plus ou moins humoristique, soulève un problème bien réel.
Présence de blattes et de cafards, peinture écaillée en raison de fuites d'eau, sanitaires insalubres, installations électriques plus ou moins aux normes, et j'en passe : les nombreuses photographies diffusées en disent long sur les conditions de travail des hommes et des femmes qui pourtant s'engagent afin d'assurer quotidiennement notre sécurité.
Notre ancien ministre de l'intérieur, Gérard Collomb, avait affirmé que ce problème serait traité. Le budget alloué à la sécurité a en effet été augmenté. Concrètement, pourtant, les moyens ne sont toujours pas au rendez-vous. J'étais hier à Marsillargues, dans l'Hérault, où je participais avec plusieurs autres députés du département à une réunion organisée par le syndicat Alliance-Police nationale. Il faut bien constater que les conditions de travail des policiers demeurent indignes de leur engagement quotidien au service des Français.
J'en donnerai quelques exemples. Depuis le début de l'année, le commissariat d'Agde n'a reçu qu'un seul pot de peinture afin de remettre en état ses locaux. Le reste des moyens qui lui ont été fournis a été pris en charge par la mairie. Le parking du commissariat de Montpellier n'est pas équipé d'un système de vidéosurveillance. Des vols y ont été commis à plusieurs reprises – un comble ! Je vous fais grâce de l'état du commissariat de Béziers, où des travaux de rénovation et d'extension devraient en commencer…
Ne nous en faites pas grâce ! Parlons-en, au contraire : 6 millions d'euros !
C'est ce que je disais : des travaux devraient commencer en 2019. Nous les attendions depuis plus de dix ans, mais c'est en effet une bonne chose. Nous nous sommes suffisamment bagarrés pour les obtenir !
Dans ces conditions, on comprend mieux la profonde lassitude des policiers et le sentiment d'impunité des délinquants. Délaisser ainsi les conditions de travail de la police est un signal fort envoyé par l'État aux Français. Si l'État lui-même ne respecte pas ses policiers en leur assurant un cadre de travail décent, pourquoi nos concitoyens les respecteraient-ils ? C'est une question de volonté politique.
Je serai brève, car l'amendement propose l'opération inverse de celle proposée par le précédent, sur lequel nous avons émis un avis défavorable. Il s'agit ici de déshabiller la gendarmerie pour habiller la police, …
… dont je rappelle que nous comptons améliorer les conditions de travail. C'est pourquoi le budget est en hausse. J'en rappellerai les chiffres, notamment pour notre collègue Lurton qui nous a interpellés tout à l'heure. Peut-être n'a-t-il pas entendu ; peut-être n'était-il pas dans l'hémicycle.
S'agissant de la police nationale, en 2019, le budget prévu s'élève à 357, 52 millions d'euros. Sa répartition détaillée est la suivante : 215,53 millions pour l'entretien des locaux existants et 161,99 millions pour la construction de nouveaux bâtiments, par exemple à Béziers.
S'agissant de la gendarmerie, le budget prévu s'élève à 749,9 millions d'euros, dont 641 millions seront consacrés à la remise en état du parc immobilier et 108,9 millions à la construction de nouveaux bâtiments. Vous constatez, chers collègues de l'opposition, qu'un effort considérable est consenti en matière immobilière en vue d'améliorer les conditions de travail des forces de sécurité intérieure.
S'agissant de la fourniture de pots de peinture que vous avez évoquée à propos du commissariat d'Agde, chère collègue, je rappelle que les cartes-achat sont destinées à financer ce genre de dépenses. Au demeurant, les forces de sécurité intérieure leur ont réservé un accueil très favorable. Je vous invite à vous mettre en rapport avec leurs membres – ou avec nous – afin qu'ils vous en expliquent le fonctionnement.
L'avis de la commission sur l'amendement est défavorable, même si elle n'a pas eu l'occasion de l'examiner.
Mêmes arguments que précédemment. Avis défavorable.
L'État ne construit pas si souvent des gendarmeries. J'ai près de chez moi, dans le département du Calvados, notamment à Saint-Pierre-en-Auge – vous irez vérifier, madame la rapporteure spéciale – , des exemples de communautés de communes ayant soutenu la construction de gendarmeries. Notre collègue Gilles Lurton n'a nullement remis en cause les moyens que l'État…
Laissez-moi finir, s'il vous plaît, madame la rapporteure spéciale. Notre collègue Lurton n'a nullement remis en cause les montants que vous avancez. Il a évoqué des pistes permettant de construire plus facilement des gendarmeries. Je l'ai bien entendu évoquer les bailleurs sociaux.
Il s'agit là d'une piste bien réelle. J'ai présidé un office HLM, que j'ai dû quitter lors de mon élection à la députation. Nous avons souvent financé des gendarmeries pour le compte de l'État, auquel nous les louions.
Je profite de cette intervention pour indiquer que l'attribution de logements aux gendarmes contribue à l'attrait de la gendarmerie et à l'acceptation des mutations. Vous imaginez bien, chers collègues, que les conjoints prennent part à la décision des gendarmes – de sexe masculin ou féminin – de demander une mutation. Madame la rapporteure spéciale, lorsque l'on vous oppose des arguments inspirés du terrain, recevez-les avec humilité.
Mme Emmanuelle Ménard applaudit.
Il faut consentir un effort en matière d'immobilier dans la police nationale. Toutefois, celui qui est consenti ici me semble bien insuffisant compte tenu du retard accumulé, dont les exemples ne manquent pas. Même chose pour la gendarmerie nationale.
Madame la rapporteure spéciale, une carte-achat, ce n'est pas un crédit revolving ni un puits sans fond.
Ce n'est pas parce que vous attribuez une carte-achat à un commissariat que celui-ci pourra demain acheter des pots de peinture à volonté. Il existe une contrainte : le budget dont on dispose. En outre, l'usage d'une carte-achat n'est pas aussi aisé que vous semblez l'affirmer. Ce sujet me permet d'en évoquer un autre.
Je m'appuie ici sur la page 4 de la circulaire de budgétisation pour 2019 du ministère de l'intérieur. Monsieur le ministre, je reviens à la charge – vous avez raconté tant de bêtises cet après-midi ! Certes, vous venez d'arriver ; je vous accorde donc le bénéfice du doute.
Protestations sur plusieurs bancs du groupe LaREM.
Évitez de donner des leçons !
Les instructions aux services de police précisent : « À ce stade des prévisions budgétaires pour l'année 2019, chaque BOP – budget opérationnel de programme – doit programmer son budget en prévoyant une baisse de 2 % des crédits de paiement par rapport à ceux de 2018 ». On lit plus loin – monsieur le ministre, je vous tends une perche : « Ce cadrage ne présume en rien de la dotation allouée in fine aux services ».
À combien s'élèvera la « dotation allouée in fine aux services », monsieur le ministre ? Maintenez-vous l'instruction budgétaire obligeant à présenter un budget diminué de 2 % aux responsables de programme ?
Cette baisse n'a rien à voir avec le gel budgétaire, lequel s'élève à 3 % d'après la même circulaire de budgétisation. Arrêtez de raconter n'importe quoi en affirmant que j'aurais confondu les deux !
Ces mesures s'appliquent chaque année dans tous les services de police. Mes anciens collègues tirent la langue, car ils ne savent pas faire avec une baisse de 2 %. Ils ont plus de personnels et moins de moyens pour les équiper. Je ne sais pas comment vous faites, mais moi je ne sais pas faire !
J'ai le sentiment que ce débat est un peu irréel et complètement déconnecté de la réalité que vivent quotidiennement nos policiers et nos gendarmes. Nous portons tous une part de responsabilité.
Je ne m'en exonère pas. Nous avions jadis la majorité parlementaire. La situation actuelle est très préoccupante. Je pense notamment aux violences auxquelles sont confrontés chaque jour les policiers et les gendarmes. Chaque jour, quatorze policiers et gendarmes sont blessés dans le cadre de leur service. Tous vivent des situations de vétusté indignes que plusieurs d'entre nous, sur tous les bancs, dénoncent. On a pourtant l'impression que l'on applique des cautères sur une jambe de bois.
Vous pouvez bien arguer d'une augmentation de 2 ou 3 % : les réserves de précaution l'effaceront. Tout cela, ce sont des mots qui sont détournés pour masquer la réalité.
La vérité, c'est que nous ne sommes pas à la hauteur des enjeux. La violence gagne beaucoup de nos territoires, beaucoup de nos quartiers, et il faut une mobilisation générale et une programmation, réelle, sur un quinquennat. Il faut réarmer l'État ; il faut tenter de faire l'unité nationale autour de l'idée d'une réaffectation des moyens depuis l'État social vers l'État régalien.
En cinquante ans, nous avons baissé la garde : les moyens consacrés aux missions régaliennes, celles qui donnent à l'État sa raison d'être, ont été divisés par deux. Le temps est venu de changer de dimension. Nous avons tous, je le redis, notre part de responsabilité dans la situation actuelle. Mais quels que soient vos artifices de communication, le budget que vous nous présentez n'est pas à la hauteur des enjeux de la protection des Français.
Mme Emmanuelle Ménard applaudit.
Nous avons tous, c'est vrai, notre part de responsabilité en ce qui concerne l'état du parc immobilier de la police et de la gendarmerie. Il y a eu d'incessants allers et retours : un temps cette responsabilité a été confiée aux collectivités locales, puis elle est revenue à l'État ; un temps la SNI, filiale de la Caisse des dépôts, est devenue l'opérateur principal. Je ne vais pas porter un jugement définitif ce soir sur la SNI, mais quand je vois l'état des bâtiments qu'ils ont dans la ville dont j'ai été maire, j'espère que les gendarmes ne sont pas obligés de faire appel à leurs services…
Monsieur le ministre, l'État ne sait pas administrer l'immobilier ; ce n'est pas de Paris que l'on peut gérer les bâtiments des Pyrénées-Atlantiques. Vous n'êtes pas le mieux placé, j'en suis persuadé, pour prendre des décisions au sujet des casernes de gendarmerie d'Arzacq-Arraziguet, de Lembeye, de Lasseube…
Je souhaite donc un processus de décentralisation pour cette question de l'immobilier, tant pour la police que pour la gendarmerie.
Ayons le courage de le dire : les moyens d'action, l'intervention, relèvent de votre responsabilité ; mais ce sont les collectivités – département ou intercommunalité, ce n'est pas à moi de me prononcer ce soir – qui seraient à même d'offrir à nos forces de police et de gendarmerie des bâtiments adaptés à leurs missions. Nous devons en discuter. Je vous propose que nous nous donnions un à deux ans pour aboutir à un consensus sur ce sujet, avec les associations d'élus, et pour arrêter une stratégie – qui pourra d'ailleurs différer d'un département à l'autre.
Nous dépensons beaucoup d'argent, malgré ce qui a été dit par certains – peut-être pas assez, mais beaucoup tout de même. Mais je n'ai pas le sentiment que les objectifs que se fixe la nation soient atteints.
« Très bien ! » sur plusieurs bancs du groupe LR.
L'amendement no 961 n'est pas adopté.
Sur les amendements nos 280 , 283 et 278 , ainsi que sur l'amendement no 282 , qui viendra un peu plus tard, je suis saisi par le groupe Socialistes et apparentés d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
Nous examinons maintenant les trois premiers de ces amendements, nos 280 , 283 et 278 , qui peuvent faire l'objet d'une présentation groupée.
La parole est à M. David Habib, pour les soutenir.
Je présenterai également les amendements nos 282 , 277 et 281 , monsieur le président : ils portent tous sur la question des carburants pour la police et la gendarmerie.
Je serai rapide, car j'ai l'impression que, sur le sujet des carburants, la majorité est irritable en ce moment ; elle s'énerve facilement.
« Pas du tout ! » sur les bancs du groupe LaREM. – Rires sur les bancs du groupe LR.
Chacun peut constater combien vous êtes calmes et sereins, chers collègues de la majorité !
Je voudrais néanmoins appeler l'attention de M. le ministre et de sa majorité – calme et sereine – sur les évolutions des prix des carburants dans notre pays. Certaines sont dues aux décisions fiscales du Gouvernement, qui s'imposent aux consommateurs comme aux administrations consommatrices d'énergie ; d'autres sont dues à l'évolution du prix du baril.
Le Gouvernement a fait ses calculs sur la base d'un baril à 73 dollars ; or le député de Lacq, qui connaît un peu ces questions, peut vous confirmer qu'aujourd'hui, cette estimation est juste : nous en sommes à quelque 72 dollars. Mais je ne suis pas certain qu'à la fin de l'année 2019, notamment du fait de la pression exercée par le président Trump sur l'Iran, le prix du baril n'aura pas bougé !
Nous proposons donc de modifier le projet de loi de finances pour accroître les marges de manoeuvre de la police et de la gendarmerie afin qu'elles puissent faire face à leurs obligations.
Nous avions eu sensiblement le même débat l'an passé, à la même période : vous nous disiez alors, de la même façon, que le prix du baril que nous retenions n'était pas pertinent.
Cette année, nous en sommes à 48,13 millions d'euros dépensés en carburant pour la police nationale, et à 49,4 millions pour la gendarmerie.
Nous faisons le choix d'estimer le prix du baril à 73 dollars. Vous nous dites que le prix va augmenter ; mais d'autres experts disent l'inverse. L'an passé, vous nous aviez fait des prévisions semblables, mais elles ne se sont pas réalisées. Pour cette année, de surcroît, le projet de loi de finances tient compte de l'augmentation du nombre de véhicules : le budget alloué à l'achat de carburant s'élève ainsi pour la gendarmerie à 52,4 millions.
Fixer un prix du baril, c'est bien sûr chaque année un pari ; mais cela n'a rien de nouveau. Ce qui est certain, c'est ce que le Gouvernement nous avait dit l'an passé – et je suis sûr qu'il le répétera cette année : l'essentiel, c'est que les véhicules ne s'arrêtent pas de rouler, qu'il n'y ait pas de rupture d'approvisionnement. Cela nous avait été garanti l'an dernier, et cela a été le cas.
Les partis pris sur le prix des carburants peuvent ne pas être les mêmes pour tout le monde, mais le budget qui nous est soumis est à mon sens sincère sur ce point. Avis défavorable.
Je ne rentrerai pas ce soir dans le débat politique du moment sur la question de l'augmentation du prix des carburants – d'autant que je me souviens qu'en 2012, lors de la campagne que nous avions menée côte à côte, monsieur Habib, Michel Sapin, alors responsable du projet du parti socialiste, avait annoncé le blocage du prix des carburants. Le sujet était déjà sensible… Puis, quand nous avons accédé au pouvoir, nous avons dû revenir sur cette promesse de TIPP flottante.
Pour en revenir à cette année, nous avons prévu des hausses de crédits de 7 et 3 millions pour tenir compte des variations du prix. Notre prévision est peut-être discutable ; mais, comme m'y a invité le rapporteur, je prends un engagement devant vous : en aucun cas, il n'y aura de consigne pour limiter l'usage des véhicules. Ce serait incohérent. Ce n'est pas le cas aujourd'hui, et nous veillerons à ce qu'il en soit de même à l'avenir ; je le redis, je m'y engage.
Monsieur le ministre, soyons clairs : pour les véhicules, il y a un marché national, un plan de déploiement national, des livraisons nationales. Je veux bien qu'il y ait des caractéristiques locales, mais cela ne concerne pas le type de carburant… La décision de passer au diesel avait d'ailleurs été prise par la droite, il y a une bonne dizaine d'années – justement dans l'idée de faire des économies dans les crédits de la police et de la justice. Vous héritez de cette situation ; dont acte.
Mais aujourd'hui, monsieur le ministre, c'est vous qui pouvez prendre une autre décision. Si vous pensez que je suis plus à même que vous d'opérer ce choix, monsieur le ministre, pas de problème ! Donnez-nous les clés, et je vous trouve dès demain des véhicules qui ne roulent pas au diesel ! Je prendrai cette décision à votre place avec grand plaisir, et dans le souci de l'intérêt général.
Ce sont les Français qui choisissent leur gouvernement !
On voit maintenant que ce choix du diesel n'était pas le meilleur. Vous nous assurez qu'il n'y aura pas de restrictions d'usage. Certes ! Mais je sais bien, moi, ce qui va se passer : comme chaque année, les dernières factures de la fin d'année ne seront pas payées ; il y aura un report de charges, et des intérêts moratoires payés aux pétroliers. Comme d'habitude, comme toujours ! Encore, encore et encore, ces dépenses viendront grever le budget de l'année suivante.
Mais vous voulez continuer comme cela : c'est votre choix politique. D'autres décisions seraient à mon sens plus en accord avec l'intérêt général. Et quel message adressez-vous aux Français ? Vous leur dites d'arrêter le diesel, mais au ministère de l'intérieur – celui, peut-être, qui consomme le plus de carburant – on continue comme ça, à la vas-y que je te pousse !
Ce n'est pas acceptable ! Montrez l'exemple, monsieur le ministre de l'intérieur !
Monsieur le ministre, l'actualité est parfois bien cruelle : non seulement les Français sont révoltés par les hausses de fiscalité que votre Gouvernement entend appliquer sur la distribution des carburants, mais en plus nous constatons qu'avec votre budget, les fonctionnaires chargés de nous protéger – police, gendarmerie, SDIS – n'auront pas assez de crédits pour mener à bien leurs missions au cours des 365 jours de l'année 2019. C'est pour le moins paradoxal.
Nous venons de vous dire le contraire ! Nous savons compter, vous savez !
La question du pouvoir d'achat est dans toutes les têtes ; il faut aider nos concitoyens à faire le plein de leurs véhicules. Aidez aussi nos fonctionnaires : ils doivent pouvoir utiliser leurs véhicules de service toute l'année.
Je soutiendrai ces amendements, qui me paraissent tout à fait pertinents. Il y a bien eu, monsieur le ministre, des limitations de déplacements ordonnées dans certaines régions de gendarmerie.
Ces restrictions sont inacceptables, intolérables ! Il est inimaginable que l'on puisse limiter les missions des forces de l'ordre au regard des menaces que je rappelais tout à l'heure.
Je corrige au passage, monsieur le ministre, ce que vous avez dit tout à l'heure à propos des véhicules vétustes, dégradés, à savoir que chaque région pourrait choisir ses véhicules. Mais l'achat de véhicules fait l'objet d'un marché unique et centralisé au niveau national ; il n'est en aucun cas décentralisé.
Il y a plusieurs modèles, vous le savez bien.
Cet amendement, nous l'avions en effet déjà déposé l'an dernier ; votre prédécesseur, Gérard Collomb…
Sourires.
… nous avait alors indiqué que mon département était petit, et que les gendarmes et les policiers trouveraient bien à se débrouiller. Je vous renvoie au Journal officiel de l'an dernier.
Une année s'est écoulée, et que s'est-il passé ? Les crédits pour le carburant étaient insuffisants ; car, vous le savez bien, même dans les petits départements, il y a de longues distances à parcourir. Qu'ont dû faire les gendarmes et les policiers ? En raison de la hausse du prix du carburant, nos forces de l'ordre ont dû puiser dans d'autres lignes budgétaires pour continuer à faire rouler leurs véhicules.
Monsieur le ministre, l'an dernier, on pouvait peut-être ne pas savoir ; mais cette année, on sait ! C'est pourquoi cet amendement tend à intégrer la hausse de la fiscalité pour que ce budget soit sincère.
Ces remarques de mes collègues méritent mieux qu'un haussement d'épaules, monsieur le ministre. Pour apporter de l'eau au moulin des différents intervenants, je vous raconterai que l'on a pu voir certains véhicules des forces de l'ordre ou des pompiers aller faire le plein au Luxembourg pour faire des économies sur le carburant !
Exclamations et rires sur les bancs du groupe LaREM.
Et ils payent de leur poche ? Allons donc !
Vous pouvez rire, chers collègues de la majorité. Mais eux, ça ne les fait pas rigoler !
Exclamations sur les bancs du groupe LaREM.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 92
Nombre de suffrages exprimés 90
Majorité absolue 46
Pour l'adoption 16
Contre 74
L'amendement no 280 n'est pas adopté.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 93
Nombre de suffrages exprimés 92
Majorité absolue 47
Pour l'adoption 17
Contre 75
L'amendement no 283 n'est pas adopté.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 93
Nombre de suffrages exprimés 92
Majorité absolue 47
Pour l'adoption 17
Contre 75
L'amendement no 278 n'est pas adopté.
La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l'amendement no 956 .
Je n'évoquerai pas les problèmes liés au carburant mais le mauvais état des véhicules, du fait du non-renouvellement de la flotte.
Les voitures, trop vieilles, ont 200 000, parfois 300 000 kilomètres au compteur. Quelquefois en panne, ces véhicules peuvent avoir les sièges défoncés, calés par des dossiers administratifs. Les carrosseries et les volants sont réparés avec du ruban adhésif. On croit rêver.
Ces éléments mettent à mal le travail de la police. Comment les policiers pourraient-ils intervenir efficacement dans de telles conditions ?
Comme je le disais, je me suis rendue hier à Marcillac – j'y ai aperçu M. Démoulin, qui pourra confirmer mes propos. Monsieur le ministre, vous avez dit tout à l'heure que vous faisiez une entière confiance aux services qui choisissent les véhicules de la police. Peut-être devraient-ils consulter les policiers qui utiliseront lesdits véhicules, car de nombreuses aberrations ont été constatées.
Dans la ville d'Agde, par exemple, on nous a rapporté que les fenêtres arrière de certains véhicules ne s'ouvraient pas. Une telle option, en l'absence de climatisation, ne peut que nuire au confort des policiers qui circulent.
Si je tiens à insister sur ce point précis, c'est qu'il n'est pas simplement symbolique. Il participe de façon très concrète au sentiment de lassitude qui gagne nos policiers. Naturellement, ceux-ci sont animés d'un souci réel pour la sécurité de leurs concitoyens et la protection des plus faibles, mais le rapport du Sénat sur l'état des forces de sécurité intérieure, paru cet été, montre bien que la dégradation des conditions d'exercice de leur métier est source d'une réelle souffrance.
En témoigne – je ne serai pas la première à le rappeler ici, mais je tiens à le faire encore une fois – le taux de suicide dramatique au sein de la police, qui est de 36 % supérieur à la moyenne nationale.
Dans un contexte où les actes de délinquance augmentent, il est plus que jamais urgent de remédier à cette situation parce qu'il importe que nos policiers soient respectés, par les citoyens comme par les délinquants.
Avis défavorable. Cet amendement est presque identique à celui que vous présentiez précédemment, madame Ménard. Seul le montant transféré varie : il s'agit là de 5 millions d'euros, au lieu de 23, sans que l'on comprenne bien les raisons d'un tel changement.
Je ne répéterai pas la réponse que vous avez reçue tout à l'heure, mais elle est similaire, au fond. Un plan massif de 137 millions d'euros, que nous qualifions d'historique, malgré les remarques de certains, sera consacré à l'achat de nouveaux véhicules : 3 000 pour la police, 2 800 pour la gendarmerie nationale. De nouveaux moyens seront offerts, comme la location avec option d'achat.
Enfin, le nombre de saisies-attributions de véhicules augmentera, pour atteindre 1 100 pour la gendarmerie et 378 pour la police.
Cette préoccupation, vous avez raison de le dire, madame Ménard, est importante, nécessaire pour l'image que l'on donne de nos forces de l'ordre, ainsi que pour le moral des troupes. Nous y sommes sensibles et nous y travaillons.
Rome ne s'est pas construite en un jour. Nous devons rattraper des années d'un retard d'investissement considérable. L'âge moyen des véhicules dans la gendarmerie nationale, en France, est de 6,4 ans, contre 5 ans, en Grande-Bretagne. Vous imaginez bien que nous n'avons pas augmenté cet âge à notre arrivée : nous héritons d'une situation que nous corrigeons, année après année, avec un plan d'acquisition massif.
Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.
Pour appuyer les propos de ma collègue, monsieur le rapporteur spécial, j'appelle votre attention sur les modèles de véhicules. Sur le terrain, les personnels demandent que deux critères soient vérifiés. Il s'agit d'abord de la puissance des véhicules. On conçoit aisément que, pour poursuivre des délinquants, des véhicules suffisamment puissants soient nécessaires.
Deuxièmement, il faut que les modèles choisis soient adaptés aux nouveaux équipements que les policiers et les gendarmes utilisent pour leur protection personnelle. Comme d'autres députés, je suppose, j'ai vu dans certains commissariats des véhicules qui ne sont manifestement pas adaptés à recevoir des gilets ou des boucliers, et qui nécessitent de bouger les sièges ou de déplacer des éléments dans le coffre. Cela n'est pas envisageable.
Au-delà des attributions budgétaires, il convient donc certainement de se pencher sur les modalités de choix des modèles.
Pour confirmer ce que vient de dire Arnaud Viala, je signale que le véhicule d'Agde, dont les fenêtres arrière n'ouvraient pas, a été récemment attribué. Et je passe les exemples de coffres trop petits pour y placer les fusils d'assaut ou les gilets pare-balles. Les personnels sont ravis de disposer ce matériel neuf, mais celui-ci ne sert pas à grand-chose s'ils ne peuvent pas l'utiliser.
L'amendement no 956 n'est pas adopté.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 93
Nombre de suffrages exprimés 92
Majorité absolue 47
Pour l'adoption 20
Contre 72
L'amendement no 282 n'est pas adopté.
L'amendement no 277 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'amendement no 281 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l'amendement no 952 .
Je défendrai cet amendement en même temps que l'amendement no 954 .
Culture et sécurité vont de pair, car c'est bien un devoir régalien pour l'État que de veiller à assurer la sécurité des Français à chaque instant, plus particulièrement lors des grands événements culturels. Pourtant, ce qui semble évident ne va pas forcément de soi.
En mai 2018, Gérard Collomb, alors ministre de l'intérieur, a signé une circulaire, qui porte directement atteinte à ce principe. Désormais, les missions de sécurité inhérentes à de grands événements festifs seront facturées aux organisateurs. C'est un poids pour les grands festivals et une épée de Damoclès pour les plus petits, avec un budget qui a souvent doublé en un an, et dont les participants pâtissent directement.
Pour l'organisation des ferias dans le Sud, ce serait une véritable tragédie. Pour donner l'exemple de ma circonscription, à Béziers, chaque année, depuis cinquante ans, une feria de quatre ou cinq jours selon les années accueille approximativement 700 000 personnes. C'est un événement festif, culturel, familial, traditionnel, dont les retombées économiques profitent non seulement à la ville de Béziers mais aussi à toutes les communes alentour.
Ce rendez-vous annuel, immanquable pour beaucoup, ne peut avoir lieu sans un fort dispositif sécuritaire. Si l'État se retire, les usagers ou les habitants de la ville de Béziers devront payer. Autant dire que cela remettrait gravement en cause cette feria, et tout son dynamisme.
Ce mécanisme, s'il était instauré, conduirait à une double peine pour les Biterrois, qui paieraient leurs impôts, comme tous les Français, puis une seconde fois pour que l'événement festif de leur été bénéficie de la sécurité correcte, normale, que tous les Français sont en droit d'attendre.
Votre amendement, madame la députée, suscite plusieurs questions. Je remarque tout d'abord que vous avez vous-même évoqué un amendement symbolique. Vous faites bien d'en parler ainsi, car je ne vois pas en quoi les 2,5 millions d'euros que vous proposez viendront changer le quotidien des forces de l'ordre qui exercent dans ces conditions.
Votre intervention ne permet pas de déterminer si vous soutenez ou non la circulaire Collomb, bien que vos prises de parole habituelles nous incitent à vous croire favorable à la sécurité de nos concitoyens.
Par ailleurs, madame Ménard, une lecture plus attentive de cette instruction ministérielle du 15 mai 2018 vous aurait permis de constater la différence qu'a prévu le Gouvernement entre les missions non facturables, répondant aux risques de menaces terroristes, et celles inhérentes à l'organisation de tels événements, qui ne sont que potentiellement soumises au remboursement.
C'est pourquoi Romain Grau et moi-même émettons un avis défavorable à cet amendement, qui, encore une fois, n'a pas été examiné en commission.
La discussion ayant déjà eu lieu dans cet hémicycle, je n'en reprendrai que quelques éléments.
D'abord, la circulaire de Gérard Collomb n'a pas force de loi. Elle met en oeuvre une loi qui a été votée dans cet hémicycle le 21 janvier 1995, qui traite notamment des missions de garde et d'escorte accomplies par la police et la gendarmerie au profit des tiers, et donnant lieu à un remboursement de l'État.
Lors du Tour de France, par exemple, la prestation de nos forces de sécurité est facturée. De même, pour la Route du Rhum, qui s'est tenue le week-end dernier, ou la feria de Béziers.
Il faut faire la différence entre des événements particuliers, sur lesquels on demande une prestation particulière aux forces de sécurité, et la mission essentielle de sécurité. Je le réaffirme ici, tout ce qui relève des prestations normales de la puissance publique ne donne évidemment lieu à aucune facturation. Il est essentiel de rappeler ce principe.
En revanche, pour les manifestations à caractère lucratif ou celles sur lesquelles on sollicite l'État en dehors de ses fonctions classiques, les services de sécurité proposent une facturation, généralement largement en dessous des prix du secteur privé.
Dans tous les cas, il semble assez normal de considérer que des organisateurs de spectacle, même lorsqu'ils travaillent pour une collectivité, facturent leurs prestations à des personnes qui paient pour voir ce spectacle. Dans l'exemple de la feria de Béziers, il n'est pas illogique que l'ensemble des contribuables nationaux contribuent au prix moyen de la place de spectacle.
À moins d'imaginer que l'Assemblée nationale et le Sénat adoptent un texte différent, je souhaite continuer à appliquer la loi, qui est celle de 1995.
Votre réponse, monsieur le ministre, me satisfait tout à fait, puisque vous faites une distinction entre les événements à but lucratif et non lucratif. Le Tour de France, événement organisé par un opérateur privé, est en effet à but lucratif.
Ceux qui se déroulent dans le Sud – je vous invite à venir y assister – , ne sont pas des événements à but lucratif, mais des événements organisés par des collectivités, dans lesquels aucun prestataire de services privé ne joue le rôle d'intermédiaire.
Si vous dites que les collectivités mettant en place des événements culturels ne seront pas concernées par cette mesure, cela me convient. Dans le cas contraire, la circulaire ressemblerait fort à une privatisation des services régaliens de l'État, apparemment peu compatible avec l'idée que l'on se fait d'un tel service.
J'ai indiqué qu'il fallait tenir compte du caractère lucratif. Je n'ai pas dit que, dès lors que l'entrée n'était pas payante, il n'y avait pas lieu de facturer.
Je connais un peu le Sud aussi. Personne ne songerait à ne pas payer le producteur de spectacle qui exécute une prestation. Mais il semble parfaitement normal de déplacer en masse des forces de l'ordre, qui peuvent manquer en d'autres endroits, sans se préoccuper du coût pour les finances publiques.
J'ai été maire pendant quelques années, j'ai donc une certaine expérience en la matière : l'organisateur doit prendre en charge la totalité des coûts, peu importe qu'ils soient payés par un tiers. C'est de toute façon de l'argent public. Il faut en tenir compte.
J'ai posé une question écrite sur le sujet en juillet dernier. J'attends toujours la réponse. Je suppose que les propos du ministre valent réponse approximative en attendant une explication plus détaillée le moment venu.
Nombre de responsables de petits festivals ont alerté le député de la circonscription et la presse régionale : la circulaire et le coût qui en découle, bien supérieur à celui des années précédentes – lorsque celui-ci n'était pas inexistant – , mettent en péril économique la tenue de telles manifestations.
Le surcoût lié à la menace terroriste doit-il nécessairement être mis à la charge des organisateurs, et, par conséquent, des spectateurs, dont le billet se trouve renchéri ? Si la réponse est oui, alors seuls quelques festivals seront capables de poursuivre leur activité sans le concours gratuit ou à moindre coût de la force publique, et seuls quelques usagers seront en mesure de payer le billet d'entrée. Je ne suis pas sûr que cela corresponde à votre conception de la diffusion de la culture.
C'est à partir de 2015 et l'irruption de la menace terroriste qu'on décide que les organisateurs et les participants doivent supporter le surcoût en matière de sécurité alors qu'on pourrait considérer qu'il s'agit d'une mission de service public et d'une mission régalienne.
… souffre de trois faiblesses : d'abord, elle contribue au démantèlement de l'État, que l'on observe sur tout le territoire, en particulier dans ses fonctions régaliennes ; ensuite, une fois encore, vous chargez la barque des collectivités locales qui participent déjà, notamment au travers de la police municipale, à la sécurisation de tels événements – elles ne sont pas absentes, elles mettent déjà la main à la poche ; enfin, vous portez un coup supplémentaire à la vie culturelle, sportive et festive de nos communes.
J'ai pourtant le souvenir, après les attentats, des discours enjoignant de ne rien arrêter et de continuer les festivals et les animations. Vous êtes en train de faire tout le contraire. Vous tenez un beau discours, mais, lorsqu'il faut passer aux actes, vous faites l'inverse de ce que vous dites.
Madame la rapporteure spéciale, ce n'est pas parce qu'un amendement n'a pas été examiné par la commission qu'il ne peut pas être discuté ici. Vous avez justifié votre avis défavorable par le fait que l'amendement n'avait pas été présenté en commission. Cela n'a rien à voir.
Il est tout à fait possible de déposer des amendements en séance. Nous soutenons l'amendement de Mme Ménard qui est plein de bon sens.
L'amendement no 952 n'est pas adopté.
L'amendement no 954 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l'amendement no 953 .
Cet amendement reprend pour la gendarmerie celui que j'ai défendu précédemment pour la police.
Les véhicules et les locaux sont des composantes des conditions de travail des gendarmes. La rénovation du parc automobile de la gendarmerie est, comme pour la police, une urgence. Quant aux crédits consacrés au parc immobilier, ils s'avèrent nettement insuffisants pour assurer sa réhabilitation – l'actualité récente en est une triste illustration.
Il convient donc d'augmenter les crédits afin d'offrir aux gendarmes des conditions de travail dignes.
Je crains que Mme Ménard n'ait défendu un autre amendement. Je m'en tiendrai à l'amendement no 953 qui vise à augmenter de 2 millions d'euros les crédits de l'action « Exercice des missions militaires ».
Le PLF pour 2019 prévoit déjà, au bénéfice de cette action, une hausse de 2,7 millions d'euros qui semble suffisante pour répondre aux défis que vous soulignez, madame Ménard, dans l'exposé sommaire de votre amendement, à savoir la lutte contre le terrorisme. De surcroît, comme vous le savez, les crédits des programmes « Gendarmerie nationale » et « Police nationale » augmentent respectivement de 1 % et de 1,7 %.
À titre personnel, j'émets donc un avis défavorable.
L'amendement no 953 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'amendement no 274 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Il s'agit d'un amendement d'appel qui porte sur la gestion de crises. Les crédits qui lui sont consacrés stagnent alors que la multiplication des incidents – en outre-mer ou en France métropolitaine – , qui ne risquent malheureusement pas de diminuer dans les années à venir, devrait nous inciter à faire des efforts dans ce domaine.
Afin de pouvoir organiser des exercices en matière de prévention et de gestion des crises, un effort budgétaire serait salutaire. Les nombreux exercices sur table qu'effectuent les administrations ne vaudront jamais un exercice en conditions réelles. Cela coûte de l'argent, mais il me semble raisonnable d'augmenter les crédits à cet effet.
J'entends votre inquiétude. Nous sommes, comme vous, préoccupés par le réchauffement climatique qui provoquera de plus en plus de feux de forêts et étendra ces derniers aux pays du Nord.
Cependant, en dépit de son intérêt, la création d'une nouvelle ligne budgétaire que propose votre amendement n'est pas pertinente, car ce sont déjà 370 millions d'euros qui sont investis dans la lutte contre les feux de forêt, notamment avec de nouveaux avions.
Je vous engage, monsieur le député, à suivre les travaux sur la sécurité civile européenne qui devraient convaincre nos partenaires européens de coconstruire une réponse commune lorsque la protection civile d'un pays est saturée. Je vous invite à retirer votre amendement.
La ligne budgétaire correspondant à la préparation à la gestion de crises n'évolue pas, car elle n'a pas vocation à le faire, quel que soit le nombre de crises. Dans le cadre du dialogue de gestion avec les autorités responsables, nous n'avons enregistré aucune demande de renfort financier sur ce point.
En revanche, la gestion de crises – je suis d'accord avec Mme la rapporteure et avec vous, monsieur le député – connaît des aléas ; elle est marquée par une grande difficulté de prévisibilité puisqu'il n'est pas possible de l'anticiper. Régulièrement, il faut abonder les crédits, ce que la fongibilité nous permet.
Il ne me semble pas opportun de démembrer les crédits qui sont réunis au sein de la même action. C'est la raison pour laquelle je vous suggère de retirer votre amendement. Sinon, mon avis sera défavorable.
Je vais retirer mon amendement, mais j'ai bien distingué la gestion de crises et la prévention des risques qui ne concernent pas seulement les feux de forêt – l'exposé sommaire mentionne d'autres événements liés au changement climatique.
J'ai eu par le passé à travailler sur la gestion post-accidentelle des risques technologiques majeurs. Les différents acteurs avaient alors souligné la difficulté à faire des exercices en conditions réelles. Pourtant, c'est ce qui fait grandir et avancer. Oui, cela coûte de l'argent. C'est la raison pour laquelle je suis favorable à un renforcement de la ligne budgétaire pour financer de tels exercices. Si la ligne budgétaire que je propose n'est pas appropriée, je vous sais suffisamment sage pour trouver celle qui convient. Vous avez compris le sens de mon interpellation.
L'amendement no 683 est retiré.
Les services départementaux d'incendie et de secours – SDIS – sont confrontés, eux aussi, à l'augmentation de la taxe intérieure sur la consommation des produits énergétiques – TICPE – , et plus généralement à la hausse des prix du carburant.
Dans le même temps, le nombre d'interventions des sapeurs-pompiers a fortement augmenté – 4,6 millions par an. Le coût de ces interventions est aussi plus élevé.
Il paraît choquant et anormal que les SDIS subissent l'augmentation de la taxation que le Gouvernement auquel vous appartenez, monsieur le ministre, a décidée. L'amendement permettrait soit d'exonérer les SDIS de TICPE, soit de les rembourser, dans la mesure où la France n'a pas transposé la directive de 2003 restructurant le cadre communautaire de taxation des produits énergétiques et de l'électricité, notamment son article 5. Il s'agit d'un amendement d'appel destiné à inciter le Gouvernement à faire un geste envers les SDIS, qui subissent l'augmentation du coût des carburants provoquée par une politique fiscale totalement disproportionnée et pénalisante pour les Français.
Je partage l'idée qu'il faut accompagner les SDIS. Mais le sujet mériterait une action européenne. Il n'est pas normal que les pompiers paient les péages et les taxes aéroportuaires. Il faut apporter une réponse à moyen et long terme sur tous ces sujets.
Avant votre présentation, j'avais l'intention d'émettre un avis de sagesse, car il me semble juste que les 60 000 euros de dotation en carburant nécessaires ne déséquilibrent pas le budget des autres programmes. J'attends de connaître les éléments de réponse de M. le ministre. Je préférerais ne pas avoir à prélever les crédits sur le budget de la sécurité et de l'éducation routières. Mais une réponse est nécessaire sur ce sujet.
Je crains que cette mesure ne soit immédiatement censurée si elle devait être soumise au Conseil constitutionnel. En effet, le régime d'exonération de la TICPE est strictement conditionné par le droit communautaire. Il doit faire l'objet de démarches spécifiques d'autorisation en amont auprès des autorités européennes et doit répondre à des finalités environnementales.
Je comprends la logique qui sous-tend cet amendement, mais celle-ci ne résiste pas à l'analyse juridique. Compte tenu des difficultés qu'il soulève, je vous propose de retirer l'amendement.
C'est probablement le fait de mon inexpérience, mais il me semble que cet amendement relève plus de la partie recettes que de la partie dépenses du budget – sans doute M. Ciotti pourra-t-il lever mon interrogation.
Ensuite, la TICPE obéit à un régime d'autorisation de taux réduits, prévu par la directive.
À la commission des finances, Mme Louwagie et moi-même avons travaillé sur le contentieux communautaire. Nous avons constaté que la provision pour risques liés à ce contentieux avait été multipliée par cinq en dix ans. Or, si nous adoptions la mesure proposée, il faudrait indéniablement alimenter la provision. J'émets donc un avis défavorable.
Monsieur le ministre, monsieur le rapporteur spécial, je suis bien conscient des difficultés juridiques que vous avez soulevées : je les ai moi-même exposées en rappelant que la France n'avait pas transposé l'article 5 de la directive de 2003, ce qui a sans doute été une erreur – j'en ignore les raisons ; je ne suis pas entré dans ces détails.
Un travail doit être mené afin d'obtenir une dérogation permettant d'exonérer les SDIS de TICPE ou de diminuer le taux qui leur est appliqué. Il s'agit d'un travail à moyen terme, à tout le moins. Mais, dans l'immédiat, rien ne vous empêche, dans le cadre juridique actuel, de procéder à un remboursement de la TICPE.
Ce n'est pas le sens de l'amendement !
Ce régime est utilisé notamment pour les taxis et pour les agriculteurs. Vous pouvez le faire : c'est une question de volonté. Aucun obstacle juridique ne s'oppose à la mesure que je vous propose.
J'abonde dans le sens de M. Ciotti : même si la directive de 2003 n'a pas été entièrement transposée en droit français, le remboursement est déjà pratiqué pour le transport de personnes. Aussi, ne dites pas qu'il y a une impossibilité totale ou un blocage constitutionnel, monsieur le ministre ! Sachant que les interventions de nos sapeurs-pompiers consistent majoritairement, à l'échelle de la France, à transporter d'urgence des personnes accidentées ou blessées en vue de soins, je ne comprendrais pas que vous vous opposiez à cette mesure.
Je rappelle – cela ne vous plaira peut-être pas de l'entendre – que, si l'État est le premier financeur de la police et de la gendarmerie, ce sont les collectivités territoriales, en particulier les départements, qui financent les SDIS. Vous ne pouvez pas ne pas répondre aux collectivités, alors que vous avez imposé aux plus importantes d'entre elles de limiter la progression de leurs dépenses à 1,2 %, dans le cadre d'une contractualisation. La hausse des taxes sur les carburants aura des répercussions à la fois pour les services propres des collectivités et pour les SDIS. Ainsi, le prix du gazole devrait augmenter de 4,5 % en 2019, ce qui est bien supérieur au plafond de 1,2 % que vous imposez !
M. Ciotti propose une mesure de bon sens. Il ne faudrait pas, une fois de plus, que les collectivités, en l'espèce les départements et les communes, soient mises à contribution et que l'État se dédouane. Il est urgent de répondre au problème soulevé par M. Ciotti.
L'année dernière, M. Ciotti avait présenté un amendement au projet de loi de finances visant à exonérer de péage les véhicules d'intérêt général en intervention, notamment ceux de la police, du SAMU et des pompiers. Cet amendement avait été adopté à l'unanimité. Or il semble que le dispositif ne soit toujours pas appliqué. Nous avons l'impression d'un certain manque de volonté de la part du Gouvernement. Il serait intéressant que vous nous en disiez plus sur ce point, monsieur le ministre. Il y a une attente forte en la matière, et il y va du respect d'une décision votée par l'Assemblée nationale.
S'agissant de l'amendement de M. Ciotti, le problème est moins financier – remettons les choses à leur place : nous parlons de 60 000 euros – que juridique.
Concernant la question de la gratuité des autoroutes pour les pompiers, madame Louwagie, j'ai indiqué en commission des lois que le Conseil d'État avait rendu un avis précisant qu'il était interdit de solliciter des usagers de l'autoroute le financement de la gratuité qui serait accordée à un tiers, quel qu'il soit. Nous savons donc que, si nous prenons un décret pour appliquer la disposition législative telle qu'elle a été votée, il sera immédiatement invalidé. Il y a un problème juridique. J'ai également indiqué en commission des lois que nous étions en train de travailler sur d'autres dispositifs : il s'agirait non pas d'aborder la question de manière frontale – ce terme n'emporte aucun jugement de valeur négatif – comme le suggérait la disposition législative, mais de trouver une solution qui garantisse la gratuité tout en respectant l'avis du Conseil d'État, afin d'éviter l'invalidation du décret. Je préfère être clair et franc à ce sujet.
L'amendement no 326 n'est pas adopté.
Les crédits de la mission « Sécurités » sont adoptés.
J'appelle maintenant quatre amendements portant article additionnel après l'article 81, rattachés à la mission « Sécurités ».
L'amendement no 322 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Comme indiqué précédemment, il vise à demander au Gouvernement d'éclairer la représentation nationale sur les effets de l'instruction ministérielle du 15 mai 2018, sachant que les crédits du fonds d'urgence pour le spectacle vivant, qui avait été mis en place à la suite des attentats, ont été consommés et ne seront pas reconduits. Nous souhaiterions disposer d'un bilan des frais engagés et de leur impact sur les différents festivals.
Si je comprends bien votre amendement, madame Rabault, vous demandez un rapport sur l'application de l'instruction ministérielle du 15 mai 2018.
Premièrement, comme nous l'avons indiqué à de multiples reprises depuis le début de la législature, il convient de limiter les demandes de rapport. En l'espèce, l'instruction ministérielle prévoit elle-même une remontée d'information des préfets vers le ministre. Je pense que le Gouvernement sera en mesure de nous faire un état de lieu de son application dans les mois qui viennent.
Deuxièmement, du point de vue juridique, je ne comprends pas comment une disposition législative pourrait s'appuyer sur une instruction ministérielle dépourvue de portée réglementaire.
Une telle incongruité juridique ne me choquerait qu'à peine, mais nous pouvons contrôler l'action du Gouvernement en faisant appel au bon sens sans demander un énième rapport. J'émets donc un avis défavorable.
J'aurais dû donner la parole d'abord aux orateurs souhaitant défendre les amendements en discussion commune. Je les prie de m'excuser.
La parole est à M. Éric Bothorel, pour soutenir l'amendement no 1167 .
Je pressens le sort qui lui sera réservé.
L'instruction ministérielle du 15 mai 2018 a clarifié la doctrine en matière d'indemnisation des services d'ordre mis à la disposition des organisateurs de spectacles par la puissance publique. Depuis lors, le temps a passé et ses effets se sont fait sentir, même si telle n'était pas, selon moi, l'intention de départ.
Je donne quelques chiffres, qui vous parleront sans doute, monsieur le président. Depuis les attentats, le budget sécurité des Vieilles Charrues, l'un des festivals français les plus importants, a augmenté de 300 000 euros, et celui de La Route du Rock, festival basé à Saint-Malo, de 50 000 euros. Dans certains cas, l'augmentation de la charge financière a dépassé 800 % : le coût du service d'ordre des Eurockéennes est passé de 30 000 à 250 000 euros en 2018. Le président du festival du chant de marin de Paimpol – vous êtes le bienvenu lors de sa prochaine édition, monsieur le ministre – m'a indiqué que le budget gendarmerie d'un festival voisin – Dieu sait que les festivals sont nombreux en Bretagne ! – atteignait désormais 18 000 euros, alors que le budget artistique global était d'environ 16 000 euros.
Ces effets sont appelés pudiquement « externalités négatives ». Il n'est pas dans mes habitudes de demander des rapports, mais il serait utile d'y voir un peu plus clair en la matière. Comme l'a rappelé Mme Rabault, le fonds d'urgence pour le spectacle vivant arrive à expiration, d'où un effet de ciseaux. D'autre part, il y a une certaine urgence, les festivals ayant généralement lieu en été. Il serait bon que, au printemps, ceux qui sont chargés d'élaborer le budget des festivals qui vont égayer nos territoires disposent de visibilité et puissent appréhender au mieux les effets d'un éventuel aménagement de l'instruction ministérielle.
La parole est à M. Jean-Claude Leclabart, pour soutenir l'amendement no 1132 .
L'instruction ministérielle du 15 mai 2018 n'a imposé aucune obligation nouvelle aux organisateurs. Elle visait au contraire, en réponse à des demandes adressées au ministère de l'intérieur, à harmoniser les pratiques des préfets, à faciliter l'anticipation du coût, à clarifier ce qui relevait des obligations normales de la puissance publique et ce qui était susceptible de les excéder. Il faut avoir en tête que le droit applicable est demeuré inchangé : il s'agit de la loi du 21 janvier 1995 et de ses textes d'application.
Lorsque vous étiez rapporteure générale de la commission des finances, madame Rabault, vous n'étiez pas fan de la multiplication des rapports. Par ailleurs, l'amendement pose effectivement un problème d'ordre juridique.
Je vous fais la proposition suivante. Un bilan d'étape de la mise en oeuvre de l'instruction ministérielle du 15 mai 2018 est en cours d'élaboration, précisément pour évaluer les conditions de son application et inventorier les éventuelles difficultés. Je m'engage à le communiquer aux rapporteurs et aux membres des commissions concernées dès qu'il sera disponible. Dès lors, il ne me semble pas nécessaire de prévoir la remise d'un rapport dans la loi. Si jamais ce bilan ne convenait pas, nous aurions l'occasion de préciser les choses. Nous vous devons évidemment la transparence sur ce sujet.
Il convient en effet d'examiner cette question. Il ressort de discussions que j'ai eues aujourd'hui avec plusieurs collègues que la commission des affaires culturelles envisage de créer une mission d'information sur le sujet. Compte tenu de cette information et des indications données par M. le ministre, les amendements ne nous paraissent pas nécessaires. Nous espérons qu'ils seront retirés. Si tel n'était pas le cas, le groupe La République en marche voterait contre.
Je n'étais effectivement pas fan de la multiplication des rapports. Vous avez pris l'engagement de nous fournir un bilan d'étape, monsieur le ministre, et je vous en remercie. Par conséquent, je retire mon amendement.
Je retire moi aussi mon amendement, tout en renouvelant mon invitation à M. le ministre : si son agenda n'est pas trop chargé au mois d'août 2019, il y a quelques bonnes scènes à Paimpol !
Sourires.
Retirez-vous votre amendement, monsieur Leclabart ? Lancez-vous des invitations à un festival ?
Sourires.
J'appelle les crédits du compte d'affectation spéciale « Contrôle de la circulation et du stationnement routiers », inscrits à l'état D.
Sur ces crédits, je suis saisi de deux amendements.
La parole est à M. Sébastien Chenu, pour soutenir l'amendement no 1131 .
Nous constatons que la politique du « tout-radars » a atteint ses limites. En réalité, elle permet à l'État de remplir ses caisses. C'est un énième volet de la stratégie qui consiste à transformer les automobilistes en cash machines. La hausse du prix des carburants, qui anime nos débats, en constitue un autre aspect.
Par cet amendement, nous proposons tout simplement de supprimer la ligne budgétaire dédiée au déploiement de nouveaux dispositifs de contrôle. Pour améliorer la sécurité routière, nous préférerions consacrer davantage de moyens à la rénovation de notre réseau routier. Nous vous invitons donc à voter cet amendement.
Votre amendement, qui vise à supprimer le financement des radars, me paraît infondé. Non seulement votre argument selon lequel le Gouvernement installerait des radars uniquement pour dégager des recettes budgétaires est faux, mais il relève de la démagogie.
Les recettes du compte d'affectation spéciale « Contrôle de la circulation et du stationnement routiers » diminueront d'ailleurs, en 2019, de 3 %, ce qui signifie que nos concitoyens conduisent de façon plus vertueuse : nous ne pouvons – comme vous, cher collègue, j'en suis certaine – que nous en réjouir.
Pas sur les trois derniers mois !
L'objectif des radars est bien de contribuer à la diminution du nombre de morts et d'accidentés sur les axes routiers.
Je profite d'ailleurs de votre amendement, cher collègue, pour saluer la décision du Gouvernement, dont il nous a informé en première partie du projet de loi de finances, de reverser les recettes issues de cette fameuse mesure des 80 kilomètres-heure aux collectivités territoriales, afin d'améliorer la signalisation et l'entretien du réseau routier.
Une part de ces recettes sera également reversée aux associations de victimes des accidentés de la route. Je salue donc cette initiative et note également que l'engagement pris par le Premier ministre au sein même de cette assemblée a été respecté.
Votre amendement n'a pas été soumis à la commission : c'est pourquoi M. Grau et moi-même émettons, à titre personnel, un avis défavorable.
Madame le rapporteur, je n'ai pas bien compris tout ce galimatias qui a mélangé des poires et des carottes. Quoi qu'il en soit, je vous incite, en ce qui concerne les chiffres de la sécurité routière, à être très modeste.
Je me réfère en effet aux derniers chiffres concernant le nombre de victimes et de morts sur les routes depuis la mise en place des 80 kilomètres-heure, qui devraient vous inciter, chère madame, à beaucoup d'humilité et à éviter de donner des leçons à la terre entière. Je crois que ces chiffres sont encore en augmentation, ce qui prouve que votre politique est une erreur.
Sur le dernier trimestre, ils sont en baisse !
Pour le reste, l'argument dont vous avez usé pour rejeter cet amendement – fondé sur le fait qu'il n'a pas été présenté en commission – m'incite à vous inviter à revoir la procédure législative ainsi que la façon dont notre travail de parlementaire doit s'effectuer.
Cet amendement, chère madame, a été déposé et défendu en séance : le fait qu'il n'ait pas été présenté en commission n'est donc pas un argument suffisant pour le rejeter. Je vous invite, là aussi, à faire preuve d'un peu d'humilité.
Sourires.
Il s'agit d'un sujet intéressant s'il en est. Il n'est pas inutile de rétablir certaines vérités dans les propos de la rapporteure spéciale.
Ainsi, par rapport à l'année dernière, la baisse de la mortalité a été plus importante au mois de juin qu'aux cours des mois de juillet et d'août, c'est-à-dire qu'elle a été plus importante avant l'entrée en vigueur des 80 kilomètres-heure qu'après.
Au mois de septembre, on a même assisté à une remontée de la mortalité : c'est bien la preuve que les 80 kilomètres-heure ne sont pas l'alpha et l'oméga de la sécurité routière sur nos petites routes, comme nous l'avions dit bien avant que vous ne preniez cette mesure.
Quant aux radars, dans certains départements, ils flashent deux fois à deux fois et demie de plus qu'avant : là aussi, comme sur le carburant, c'est la pompe à fric qui a été mise en marche.
Si vous voulez les chiffres, en 2019, il est prévu 12 % de recettes supplémentaires par rapport à 2018, et 50 % par rapport à 2016, sans compter les éventuelles majorations.
Par conséquent, sur tous ces sujets, bien entendu, nous voyons les limites de cette politique des 80 kilomètres-heure, sachant que les contrôles sont pratiqués – et donc que les radars sont installés – à des endroits qui ne sont pas toujours les plus accidentogènes.
Carlos Ghosn nous l'avait dit lors de son audition devant la commission des affaires économiques : c'est le progrès technologique qui va permettre de sécuriser les véhicules et les routes. Si 90 % des accidents corporels pourront être évités d'ici vingt à vingt-cinq ans, c'est bien grâce au progrès, et certainement pas grâce à des mesures démagogiques comme les 80 kilomètres-heure ou la multiplication des radars.
Exclamations sur les bancs des groupes LR et LaREM.
Je réagis très brièvement aux propos de M. Fabien Di Filippo sur les résultats de la politique de sécurité routière. Même s'il faut se garder de toute extrapolation en matière de sécurité routière, il faut avoir la prudence et la modestie de regarder les chiffres sur le long terme.
Je ne sais pas, cher collègue, d'où vous tirez vos chiffres, mais visiblement pas de sources très fiables. Si l'on prend le dernier trimestre, les chiffres ne sont en effet pas ceux que vous avez cités. On observe en effet une baisse en juin, en juillet et en août.
Oui, mais juillet et août se situent après juin. Or j'observe une baisse tant en juillet qu'en août.
L'amendement no 1131 n'est pas adopté.
L'amendement no 829 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Les crédits du compte d'affectation spéciale « Contrôle de la circulation et du stationnement routiers » sont adoptés.
Prochaine séance, demain, à seize heures :
Questions au Gouvernement ;
Suite de la discussion de la seconde partie du projet de loi de finances pour 2019 : examen des crédits des missions « Économie » et « Engagements financiers de l'État ».
La séance est levée.
La séance est levée à vingt-trois heures trente-cinq.
Le Directeur du service du compte rendu de la séance
de l'Assemblée nationale
Serge Ezdra