Présidence de
M. Daniel Labaronne,
Vice-président
La commission poursuit l'examen de la seconde partie du projet de loi de finances pour 2020 (n° 2272
Elle examine tout d'abord les crédits de la mission Défense.
Le budget des armées, ne l'oublions pas, est un budget qui conditionne l'engagement de près de 210 000 hommes et femmes des armées qui peuvent aller jusqu'au péril de leur vie dans un monde parcouru de tensions.
C'est en grande partie pour cela que, depuis trois ans, c'est-à-dire dès avant l'adoption de la loi de programmation militaire 2019-2025, les crédits de ce budget sont à nouveau en progression, avec près de 5 milliards d'euros de crédits supplémentaires sur la période.
Pour la deuxième année consécutive, les crédits de la mission Défense sont en parfaite cohérence avec la loi de programmation militaire (LPM), que nous avons adoptée en juin 2018 sur des bases sincères.
L'enseignement que nous tirons de notre évaluation de l'exécution du budget 2018 est celui d'une gestion rigoureuse.
La hausse des crédits de paiement s'est faite sans attendre, conformément à la volonté du Président de la République d'une régénération des forces après plus de 15 ans de restriction de moyens. Ainsi, il est assuré que la nouvelle hausse de 1,7 milliard d'euros inscrite dans le projet de finances pour 2019 sert dans son intégralité la mise en oeuvre de la LPM et non à combler des retards qui auraient été pris lors de l'exécution précédente.
Avec une nouvelle progression de 1,7 milliard d'euros, les crédits de la mission Défense inscrits hors compte d'affectation spéciale (CAS) Pensions s'élèvent à 37,5 milliards d'euros, soit une progression de 4,5 %. En incluant les contributions d'équilibre au CAS Pensions, le total est de 46 milliards d'euros, soit 13,6 % des dépenses nettes du budget général de l'État.
Ce PLF est marqué par une modification importante de périmètre. Les crédits d'infrastructures qui étaient centralisés dans le programme support 212 sont désormais répartis entre plusieurs programmes. Les crédits relatifs aux programmes d'armement et aux infrastructures à caractère opérationnel sont transférés respectivement aux programmes 146 Équipements des forces, à hauteur de 320 millions d'euros, et 178 Préparation et emploi des forces à hauteur de 879 millions d'euros.
Les crédits d'infrastructures restant dans le périmètre du programme 212, soit 487 millions d'euros, financeront principalement les réseaux et bâtiments d'intérêt général, et l'amélioration des conditions de vie et de travail des personnels et des familles. Cette modification est la traduction d'un effort d'amélioration de la gestion de ces infrastructures. Elle contribue aussi à améliorer la lisibilité des crédits budgétaires.
Comme les années précédentes, la question du financement interministériel des surcoûts relatifs aux opérations extérieures (OPEX) et aux missions intérieures (MISSINT) se posera en fin d'exécution 2019. La prévision OPEX avait été portée à 850 millions d'euros en 2019, contre 650 millions en 2018, et 100 millions d'euros avaient été provisionnés pour les MISSINT. La prévision de surcoût étant d'environ 1,4 milliard d'euros, le montant à financer se situera aux alentours de 450 millions d'euros.
En 2020, la provision OPEX atteindra 1,1 milliard d'euros, niveau que la LPM prévoit de maintenir jusqu'en 2023. La provision totale, incluant celle de 100 millions consacrée aux MISSINT, s'élèvera ainsi à 1,2 milliard d'euros. Le processus de sincérisation de ce poste de dépenses arrive donc à son terme.
En matière d'effectifs, nous avions constaté une nette sous-exécution du schéma d'emplois du ministère des armées en 2018, plus forte encore qu'en 2017. Le ministère des armées est toujours confronté à d'importantes difficultés de recrutement et de fidélisation des personnels. Les compétences rares (techniciens, informaticiens, spécialistes cyber, métiers du renseignement) sont particulièrement exposées à la concurrence du privé. Elles font aussi l'objet d'une concurrence entre services de l'État. La stagnation des dépenses du titre 2 en prévision de 2020 est la traduction de la prise en compte de cette sous-exécution, qui ne pourra être rattrapée que progressivement, malgré la création de 300 postes prévue dans le présent PLF.
Le ministère des armées a pris toute la mesure de ces difficultés. La prime de lien au service, créée en mai 2019 en lieu et place de cinq anciennes primes, cible tout particulièrement les métiers en tension. Il est prévu de l'accroître de 12,5 millions d'euros en 2020.
S'agissant du personnel civil, 13 millions d'euros supplémentaires seront dégagés pour renforcer le système indemnitaire fondé sur les compétences et la performance. L'enveloppe consacrée au recrutement de contractuels spécialisés connaîtra une augmentation de 12 millions d'euros.
L'autre grand axe de la politique de recrutement et de fidélisation est l'amélioration des conditions de vie et de travail des militaires. L'amélioration de l'hébergement bénéficiera de 120 millions d'euros en 2020, montant qui devrait être porté à 140 millions d'euros en moyenne annuelle jusqu'en 2025. Cet effort est très important, puisqu'il dépasse largement le budget de 100 millions d'euros par an prévu par la LPM.
Le plan Famille connaît quant à lui une montée en régime avec près de 80 millions d'euros prévus en 2020, contre 57 millions en 2019. Parmi les actions prévues, on peut citer la fin du déploiement en métropole du Wifi gratuit en garnison et son extension dans les outre-mer et à l'étranger, ainsi que l'amélioration de l'offre d'hébergement dans les zones tendues, notamment en Île-de-France et à Toulon, et dans les outre-mer.
Mes chers collègues, dans un contexte stratégique qui se dégrade manifestement sur fond d'une instabilité croissante de l'environnement international, la menace est omniprésente. La politique de défense engagée depuis le début du quinquennat se distingue par sa lucidité, son volontarisme et sa constance. Elle s'accompagne de la vision d'une Europe forte, défendant avec clarté ses intérêts et ses règles. Parce qu'ils sont déterminants pour la protection de notre souveraineté, je vous invite à adopter les crédits de la mission Défense pour 2020.
Je vais compléter les propos d'Olivier Gaillard en parlant des programmes 144 et 146 avec un éclairage un peu différent. Je développerai trois points qui me paraissent positifs, deux points qui me paraissent mériter notre vigilance, sinon notre inquiétude, et terminerai par deux remarques, l'une sur la maquette budgétaire, l'autre, plus général, sur notre effort de défense.
Parmi les points positifs, nous ne pouvons pas nier que l'année budgétaire 2020 est totalement conforme à la prévision de la LPM – nous pourrions chipoter à 100 millions près, mais ce n'est pas le sujet.
Globalement, la trajectoire budgétaire de la LPM est maintenue avec des crédits qui s'élèvent à 37,5 milliards et une hausse de 4,5 %. Pour le programme 144, la hausse est de 4,9 % et porte les crédits à 1,54 milliard d'euros. Pour le programme 146, la hausse est de 15,6 % et porte les crédits à 12,58 milliards. Il s'agit du premier aspect positif.
Second point indéniablement positif, nous poursuivons la sincérisation de la budgétisation des OPEX. Nous allons monter à 1,1 milliard d'euros et nous approcher du budget réel des OPEX qui est de 1,3 ou 1,4 milliard. Tout le monde était d'accord là-dessus.
Autre point que je considère comme intéressant, la maquette budgétaire évolue, notamment s'agissant du programme 146 où sont intégrées les dépenses d'infrastructures qui relèvent des nouveaux équipements, ce qui est parfaitement logique et ce qui donne une meilleure lisibilité du coût de ces équipements.
Enfin, conformément à la volonté ministérielle, le budget distingue une sous-action Maîtrise de l'espace qui correspond à un nouvel objectif du pays. Il est bien de pouvoir le suivre financièrement.
Le premier point de vigilance est la lancinante question de la fin de gestion. Les années passent et se ressemblent. Il est difficile de porter un jugement totalement satisfaisant sur le budget pour 2020 tant que l'on ne connaît pas véritablement la fin de gestion. Pour la défense c'est même un sujet très important et récurrent.
Dans son effort de sincérisation, le Gouvernement pourrait peut-être aller un peu plus loin. La question sera réglée dans quinze jours lorsque sera déposée la loi de finances rectificative (LFR). Il serait donc intéressant que nous puissions disposer des informations sur le dégel des crédits et sur la façon dont sera géré le surcoût des OPEX : y aura-t-il un financement interministériel ou pas ? A-t-on une idée d'un sujet très important, celui du report de charges ? Si la commission des finances était informée, nous aurions un débat certainement plus sincère et certainement aussi plus utile. Il s'agit du premier point de vigilance. J'invite le Gouvernement à avancer en la matière et à ne pas nous faire la surprise de la LFR chaque année ou, à défaut, à livrer quelques informations.
Deuxième point, le niveau préoccupant atteint par les autorisations d'engagement. Fin 2020, nous en serons sans doute à 104 milliards d'euros, dont 65,4 milliards sur le programme 146. Nous sommes donc en train de reconstituer une « bosse ». La version optimiste consiste à dire que cela est conforme à la loi de programmation militaire. En effet, à partir de 2023, les échéances d'augmentation du budget de la défense seront des « marches » de 3 milliards d'euros.
J'attire votre attention sur le fait que ce serait du jamais vu. C'est pourquoi nous devons à nouveau nous poser la question de la crédibilité budgétaire de la ligne qui a été fixée. Je pense qu'un lissage serait plus raisonnable. À défaut, nous nous retrouverons dans quelques années dans une situation extrêmement difficile.
Ce niveau d'engagement signifie aussi que les prochains gouvernements n'auront aucune marge de manoeuvre. Tous les crédits seront déjà en quelque sorte fléchés. Or, l'expérience nous a appris qu'en matière de défense l'apparition de nouvelles menaces peut nous amener à changer quelque peu les orientations. Il y a un problème budgétaire et un problème de réflexion sur notre outil de dépenses qui risque d'être très conditionné.
Bref, nous nous dirigeons vers des budgets totalement rigidifiés. Ce problème budgétaire doit nous amener à réfléchir sur le risque d'avoir un outil de défense très conditionné.
J'en viens à l'évolution de la maquette. Il serait souhaitable que l'on dispose d'un programme où soit clairement identifié l'effort consacré au renseignement. Le renseignement est une priorité qui intéresse tout le monde et les efforts du Gouvernement sont significatifs. Or, ce domaine est aujourd'hui réparti entre quatre programmes. Le débat budgétaire gagnerait en lisibilité avec un programme unique. Il en va de même pour la cyberdéfense, le maintien en condition opérationnelle (MCO), ou l'Agence de l'innovation de défense.
En dernier lieu, j'invite mes collègues à réfléchir sur notre effort de défense. Celui-ci est important : des marges de 1,7 milliard d'euros, ce n'est pas rien, plus de 37 milliards de budget, ce n'est pas rien. Le Gouvernement et la majorité sont fondés à qualifier l'effort de significatif.
Pour autant, nous sommes à 10 milliards d'euros en dessous du budget de la Grande-Bretagne. Nous faisons comme si nous étions devant l'Allemagne. Effectivement, en termes de produit intérieur brut (PIB), l'Allemagne est à 1,2 %. En revanche, en valeur absolue, l'Allemagne est maintenant à 4 milliards au-dessus de notre budget. Je pense qu'il faut réfléchir à cet aspect des choses.
La commission en vient à l'examen des amendements à la mission Défense.
Article 38 et état B.
Elle commence par l'amendement II-CF686 de M. André Chassaigne.
Je souhaite seulement souligner les incohérences de la stratégie dite de dissuasion nucléaire : garantir sa sécurité tout en ayant des armes que l'on interdit aux autres ; encourager leur prolifération, tout en prétendant la combattre ; interdire les armes de destruction massive biologiques et chimiques, et les autoriser lorsqu'elles sont atomiques ; vouloir faire des économies, et gaspiller des milliards dans des engins qui ne nous protègent ni des terroristes, ni des autres États nucléaires et ne font que perpétuer le risque de catastrophe. D'où cet amendement qui consiste à ramener les crédits de la dissuasion nucléaire à leur niveau de l'exercice précédent.
Je commence à bien connaître cet amendement sur la baisse des crédits de la dissuasion. Je comprends bien que votre amendement est surtout là pour marquer votre opposition à la doctrine de dissuasion, laquelle doctrine a été confortée par la LPM et par la Revue stratégique. Mon avis sera le même que les années précédentes, c'est-à-dire défavorable.
La commission rejette l'amendement II-CF686.
Puis elle examine, en discussion commune, les amendements II-CF259 et II-CF260 de M. Joaquim Pueyo.
Nous avions déjà défendu cet amendement les années précédentes afin de tenir compte d'une éventuelle augmentation du coût du carburant, du fait des incertitudes du contexte international qui pourraient affecter le prix du pétrole. Cet amendement propose d'augmenter de 6,5 % la dotation de carburant opérationnel allouée à nos forces armées. L'hypothèse retenue dans le PLF est une stabilité des prix du pétrole par rapport à 2019. Nous sommes sceptiques, d'où cet amendement.
L'amendement II-CF260 est défendu.
Cet amendement a en effet déjà été proposé l'année dernière. Il faut bien entendu être vigilant quant à l'évolution du prix du baril de pétrole. Cela étant, comme la ministre l'avait indiqué l'année dernière, en rendant un avis défavorable à cet amendement, les contrats d'approvisionnement passés par le service des essences et des armées sont de nature à atténuer les effets des variations de cours. Pour cette raison, j'émets un avis défavorable.
L'amendement vise à attirer l'attention sur un problème réel. Pour autant, ces variations se règlent en gestion. Il n'est pas nécessaire d'amender le PLF.
La commission rejette successivement les amendements II-CF259 et II-CF260.
Elle en vient à l'amendement II-CF270 de M. Joaquim Pueyo.
Cet amendement a pour but d'augmenter significativement les ressources mises à disposition de l'Agence de reconversion de la défense, afin d'améliorer l'accompagnement vers un emploi stable des personnels quittant le ministère des armées en dehors d'une période probatoire ou d'une limite d'âge.
La reconversion est essentielle à l'attractivité. Étant donné les difficultés de recrutement des militaires, il faut donner davantage de moyens à la reconversion car c'est une garantie pour les personnels qui s'engagent.
D'après les explications que j'ai pu recueillir lors des auditions que j'ai menées, la baisse des crédits de la sous-action Reconversion s'explique par l'accélération du marché d l'emploi, ainsi que par des sous-consommations constatées en 2018 et prévues en 2019.
La commission rejette l'amendement II-CF270.
Elle examine ensuite l'amendement II-CF261 de M. Joaquim Pueyo.
Tout d'abord, il faut se féliciter du changement de périmètre des crédits relatifs aux infrastructures, tel que nous l'avons décrit dans notre propos introductif.
S'agissant de l'opération budgétaire « Soutenir les familles », les crédits de paiement sont certes en diminution, mais les autorisations d'engagement connaissent au contraire une forte progression. Nous aurons l'occasion d'interroger la ministre sur ce point en séance publique, puisque c'est un dossier qu'elle porte avec beaucoup d'engagement et d'opiniâtreté. C'est pour cela que je vous invite à retirer votre amendement et à le redéposer pour en discuter avec la ministre.
La commission rejette l'amendement II-CF261.
Je suis attentif aux observations que vous avez faites sur nos amendements, même si parfois je les regrette. Quoi qu'il en soit, je tiens à saluer l'augmentation de 1,7 milliard des crédits alloués à la mission Défense, ce qui place notre budget à 1,8 % du PIB. Cet effort va nous permettre d'atteindre dans les meilleurs délais l'objectif des 2 % qui avait été fixé par la LPM.
Des efforts sont à souligner en matière d'innovation, avec l'augmentation des crédits alloués aux études en amont, ou de livraison de matériels attendus par nos soldats, notamment les 128 blindés Griffon qui concrétisent le programme Scorpion, ou les hélicoptères NH 90, car la fonction stratégique de protection pâtit des tensions sur le parc des aéronefs.
La création de 300 emplois pour renforcer les services de renseignement et le cyber va dans le bon sens et le budget est conforme à ce que nous avions décidé dans la LPM.
Cependant, je souhaite rappeler une nouvelle fois certaines de nos inquiétudes. Tout d'abord, la question des restes à payer doit demeurer un point de vigilance : le volume des engagements non couverts par les paiements au 31 décembre 2018 connaît une croissance inédite de 3,8 milliards d'euros.
Autre élément, celui de la fidélisation. Si nous reconnaissons l'effort fait pour améliorer ce point essentiel, avec 40 millions d'euros prévus pour la fidélisation et l'attractivité, c'est bien l'ensemble des militaires qui sont touchés, notamment les militaires du rang. Il est temps à mon sens de réfléchir à étendre les primes ou, plus ambitieusement – je l'ai dit ce matin devant la commission de la défense – à réévaluer le point d'indice.
Enfin, certains matériels font toujours défaut et entament les contrats opérationnels, notamment les MRTT (Multi Role Tanker Transport) ou les nouveaux patrouilleurs outre-mer.
Je voudrais souligner trois contraintes qui conditionnent ce budget. Il y a tout d'abord la perte de souveraineté de nos industries de défense et de nos armements. Année après année, nous perdons notre indépendance dans ce domaine, notamment en achetant des armements sur étagère. Cela a évidemment des conséquences sur notre conception de la défense de notre pays.
Le deuxième point est la question de la dissuasion nucléaire. Elle représente 10 % de notre budget, en augmentation chaque année. Il s'agit d'un mythe qui repose sur des vérités déformées, dissimulées, sous-estimées, fantasmées, et sur des incohérences stratégiques.
Le troisième point est la dépendance à l'OTAN (Organisation du traité de l'Atlantique nord), avec une intégration de plus en plus importante dans le domaine des systèmes de communication et le droit de regard qui peut exister sur nos armements, par exemple dans le cadre de l'Agence de l'innovation de défense. Là encore, cela a des conséquences sur les choix budgétaires.
Comme l'ont dit nos rapporteurs spéciaux, le renforcement des moyens de la défense, dans l'objectif d'atteindre 2 % du PIB à terme, répond bien à l'enjeu stratégique auquel notre pays doit faire face. Il s'agit d'un effort massif qui représentera 1,7 milliard supplémentaire en 2020. Nous devons nous en féliciter, quelle que soit notre appartenance partisane. Nous suivons la LPM et c'est un effort que la nation fait dans une période où par ailleurs nous procédons à des redistributions massives par nos budgets sociaux et par nos mesures fiscales en direction des classes moyennes. Nous devons nous féliciter de maintenir cette trajectoire. J'appelle à un vote à l'unanimité de ce budget de la défense
Je ne parle plus en tant que rapporteur spécial, mais au nom du groupe Les Républicains. Quitte à décevoir madame Cariou, notre vote sera un vote d'abstention. Nous reconnaissons l'effort qui est fait. Il est significatif, il est constant, il est sérieux, il est appréciable. Cela étant, nous pensons qu'il reste des points de vigilance, qui sont même des points d'inquiétude. Il y a une vraie rigidité du budget dans lequel nous nous engageons. Il reste des marches très inquiétantes à franchir et nous ne sommes vraiment pas sûrs d'arriver à le faire.
Vient ensuite la question de la réflexion stratégique. Le chef d'état-major des armées, auditionné par la commission de la Défense, a dit en substance : « Oui, l'effort est significatif, mais en cas de conflit majeur, est-ce que nous avons vraiment l'autonomie stratégique ? Est-ce que nous sommes capables de faire ? » Dans quelle cour voulons-nous jouer ? Cela n'est pas complètement clair : nous continuons à vouloir jouer dans la cour des grands, en nous donnant plus de moyens que les tout petits, mais en ne nous donnant pas les moyens des grands.
Je souscris complètement aux propos de notre rapporteur spécial, François Cornut-Gentille, qui a une longue expérience des questions de défenses et une expertise sur le sujet. Nous pouvons nous satisfaire de l'augmentation des crédits, mais il ne faut pas oublier de rappeler que la première année du quinquennat, lorsque le Président de la République est arrivé, il a enlevé 850 millions sur ce budget-là. Cela n'est pas anodin.
Sur les comparaisons entre pays, si nous parlons en valeur absolue, nous ne sommes plus, aujourd'hui, le fer de lance européen que nous avons pu être à une époque.
Je pose également la question du périmètre des dépenses à prendre en considération. Les chiffres que vous donnez sont des chiffres bruts, mais il est important de savoir que ce que nous prenons en compte dans l'évaluation de l'effort de défense. Pour ces raisons, nous nous abstiendrons.
La commission adopte les crédits de la mission Défense non modifiés.
Après l'article 75
La commission examine l'amendement II-CF970 de la commission de la défense.
Je vous rappelle que la LPM précédente a organisé beaucoup d'opérations de restructuration des sites de défense, qui ont eu des conséquences non négligeables pour un certain nombre de territoires.
Si je prends l'exemple de ma circonscription de la Marne, à Châlons-en-Champagne, les opérations de restructuration représentent 1 200 emplois militaires supprimés pour une ville de 47 000 habitants et 130 hectares de friches militaires laissées par l'État. Pour accompagner les territoires qui ont été particulièrement impactés, la loi de finances pour 2015 prévoit un dispositif permettant la cession à l'euro symbolique de ces friches militaires jusqu'en 2021.
Cet amendement vise à repousser cette date à 2024, afin de permettre aux collectivités territoriales de s'organiser et de trouver des porteurs de projets économiques pour reconquérir ces friches.
Je précise que cet amendement ne représente pas une charge supplémentaire pour l'État. En effet, si ces friches devaient être vendues au prix normal du marché ou au prix fixé par le service des domaines, elles seraient tout simplement invendables et resteraient ad vitam æternam à la charge de l'État, avec l'ensemble des frais de gardiennage, de sécurisation, etc. Tel est l'objet de cet amendement qui a été adopté tout à l'heure à l'unanimité par la commission de la Défense.
J'entends bien votre volonté d'assouplir la condition de cession des immeubles à l'euro symbolique. Il serait cependant nécessaire d'avoir une étude d'impact pour savoir quels seraient les immeubles concernés. En l'état, je vous invite plutôt à retirer l'amendement et à saisir le ministère du sujet. À défaut, j'émets un avis défavorable.
Je n'ai pas tout à fait le même avis. Je suis issu des mêmes territoires que madame Magnier et je sais que les porteurs de projet ne s'y précipitent pas. La cession à l'euro ne représente pas un manque à gagner pour le ministère, il n'y a pas d'effet négatif sur le budget des armées. Les cessions ont pu se faire dans les territoires riches. Dans les territoires moins riches, nous sommes pénalisés par cette règle. Pour moi, il n'y a pas de danger à adopter cet amendement comme l'a fait la commission de la Défense.
Il y a d'autant moins d'impact budgétaire que lorsque l'État cède ces friches militaires à l'euro symbolique, il se défait de ses obligations de dépollution. Si je prends l'exemple de mon territoire, nous avons repris 30 hectares sur les 130 libérés depuis 2015. Si demain l'État devait dépolluer ces terrains, cela lui coûterait énormément d'argent avant de pouvoir les céder dans le cadre d'une vente normale. La disposition est donc source d'économie pour l'État.
Il s'agit aussi de poursuivre l'accompagnement des territoires. Dans un bassin économique du Grand Est, avec une démographie en déclin, vous imaginez bien que ce n'est pas simple de trouver des porteurs de projets économiques. Évidemment, les collectivités territoriales ne reprennent pas des terrains à l'euro symbolique tant qu'elles n'ont pas de porteurs de projets qui sont en capacité de les reprendre.
J'ajoute que la longueur des procédures de reprise de ces friches nous pénalise beaucoup, alors que nous avons des projets importants.
Je n'ai pas expliqué le deuxième aspect de mon amendement. Dans certains territoires, la cession à l'euro symbolique était conditionnée à la cession au profit d'organismes logeurs. L'amendement prévoit de lever cette clause pour les territoires qui sont concernés, parce que l'État se rend compte que dans ces bassins de vie, il n'y a pas tant besoin de logements que cela. De ce fait, les bailleurs n'ont pas repris non plus les friches militaires.
Nous proposons donc de lever cette clause d'obligation de cession à l'euro symbolique au profit de certains organismes, parce qu'il s'agit de bassins où la demande de logement n'est pas en tension. L'amendement a ainsi un double impact qui me semble important pour les territoires concernés par ces dispositifs d'accompagnement.
La commission rejette l'amendement II-CF970.
La commission en vient à l'amendement II-CF256 de M. Joaquim Pueyo.
Cet amendement a pour objectif de demander un rapport d'information qui détaille en quoi le PLF inscrit dans les faits la coopération européenne et en quoi cette dernière participe pleinement à la stratégie française d'autonomie, dans un contexte de montée des risques internationaux. Si la capacité de la France à entraîner ses partenaires européens vers plus de convergence dépend étroitement de l'ampleur et de la qualité de son propre effort de défense, notamment en bouchant ses « trous » capacitaires, la coopération européenne doit désormais être pleinement intégrée dans la stratégie de défense nationale. Nous donnons deux exemples : un dans le secteur de l'industrie et un dans le secteur de la recherche et du développement.
Il s'agit d'un amendement qui avait été déjà déposé pour le PLF 2019. Il avait été rejeté dans la mesure où, aujourd'hui, nous ne manquons pas d'informations sur les projets de coopération en cours. Avis défavorable.
Cet amendement m'étonne. Le Gouvernement nous remettra forcément des rapports qui concluront que tout va très bien. C'est au Parlement d'examiner comment fonctionnent les coopérations européennes. Je crois vraiment que monsieur Pueyo se trompe de destinataire. C'est à nous de faire ce travail. Le Gouvernement ne nous apprendra pas grand-chose. On nous a dit pendant des années que la coopération pour l'A400M se passait très bien, alors que cela se passait très mal. C'est le Parlement qui peut dire si cela se passe mal. Sur les futurs programmes, je pense que cela sera pareil. Nous trouverons dans ces rapports des éléments de langage, mais aucune information.
Il est également important que les parlementaires soient très bien informés, avec beaucoup de précision. Le rôle de contrôle du Parlement consiste également à demander des rapports. Si nous avions la possibilité de les faire nous-mêmes, nous le ferions, mais cela ne va pas de soi.
La commission rejette l'amendement II-CF256.
Elle passe à l'amendement II-CF257 de M. Joaquim Pueyo.
Il s'agit d'un amendement qui tend à évaluer la politique d'équipement de la France, notamment ses coûts, par comparaison avec nos alliés européens au sein de l'OTAN. Il devient indispensable, étant donné l'augmentation substantielle des crédits décidés par la LPM, de contrôler la bonne utilisation des deniers publics et l'efficacité de la dépense en direction des groupes industriels partenaires du ministère.
Il semblerait que des marges de manoeuvre existent. La question est donc de savoir si les contrats d'équipements initiaux ne sont pas surévalués, par rapport aux prix pratiqués pour des matériels de même gamme dans des pays alliés. Je pense que c'est une étude qui peut être très intéressante.
À mon avis, la remise d'un rapport gouvernemental n'est pas la meilleure méthode à adopter. C'est aux députés qu'il appartient de contrôler et d'évaluer. Avis défavorable.
La commission rejette l'amendement II-CF257.
Elle examine ensuite l'amendement II-CF258 de M. Joaquim Pueyo.
Il s'agit d'un amendement qui demande un rapport ayant pour objectif de proposer des améliorations quant à la coordination logistique entre l'emploi des personnels et l'utilisation des matériels, compte tenu des contraintes existantes au sein des armées.
Il établira notamment les causalités entre d'une part, les indisponibilités des matériels liées au maintien en condition opérationnelle et, d'autre part, le taux d'occupation des personnels lié à l'augmentation du nombre de missions réalisées et aux heures de formation programmées.
Ce sujet est au coeur de la LPM. Au travers du suivi d'exécution des programmes, ainsi que des différentes auditions auxquelles nous participons toutes et tous, nous avons déjà accès à beaucoup d'informations. Avis défavorable.
La commission rejette l'amendement II-CF258.
Elle examine enfin l'amendement II-CF680 de M. André Chassaigne.
Je suis très impressionné d'aborder devant des stratèges financiers la question de l'indépendance stratégique. Mais le fait qu'il s'agisse d'un rapport me désinhibe : cela ne vous coûtera pas trop cher, vos finances seront épargnées ! Je ne reprendrai pas l'exposé sommaire, me contentant de quelques observations pour faire un peu votre éducation.
Tout d'abord, il n'y a pas d'autonomie de communication radio sur les avions Rafale français, qui sont directement reliés à l'état-major de l'OTAN, y compris dans la définition des cibles. Ensuite, les catapultes propulsant les avions embarqués sur le Charles-de-Gaulle sont de fabrication américaine. Les États-Unis ont même dit qu'ils n'en assureraient plus la maintenance si nous ne soutenions pas l'intervention en Irak. Je rappelle aussi que le contrat dotant l'armée de fusils allemands en remplacement des Famas est assorti d'une clause de maintenance de 30 ans. Naval Group produit désormais des petites frégates qui n'intéressent pas la marine française, mais qui sont vendables à l'export. Les États-Unis prêtent des drones Reaper, et les techniciens qui vont avec, pour illuminer les cibles de l'aviation française dans ses bombardements au Sahel depuis Niamey…
Cette démonstration fulgurante vous aura certainement convaincus : nous avons besoin d'un rapport pour essayer de définir ce que coûterait le rétablissement de l'indépendance stratégique de la France.
Cet amendement, que nous connaissons déjà, vise surtout à marquer votre désaccord avec un principe fondamental de l'autonomie stratégique de la France. Avis défavorable.
Il faut s'entendre sur ce que l'on appelle « l'autonomie stratégique ». Il n'y aurait pas de sens à vouloir tout produire comme avant, et cela ne serait même pas vraiment de l'autonomie. Dans certains cas, acheter à l'étranger ne pose pas de problème. En revanche, confier le transport stratégique aux Russes et aux Ukrainiens posait quelques problèmes, comme je l'ai montré dans un rapport d'information. Je ne pense pas que nous puissions tout renationaliser. En revanche, un débat sur les externalisations que nous pratiquons peut-être à tort est nécessaire.
Notre intention n'est évidemment pas de rétablir l'Armée rouge en France ou de créer des kolkhozes militaires. Il s'agit tout simplement de regagner en indépendance stratégique. Nous avons les mains liées, notamment par rapport aux Américains. Évitons de parler d'indépendance du pays dans ces conditions !
La commission rejette l'amendement II-CF680.
La commission passe aux crédits de la mission Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation.
La mission Anciens combattants concourt à trois politiques essentielles : le travail de mémoire en direction des jeunes générations ; la reconnaissance de la nation aux militaires qui l'ont servie depuis plus d'un siècle ; la réparation des victimes et des orphelins des persécutions antisémites et d'actes de barbarie.
Les crédits demandés pour cette année s'établissent à 2,16 milliards d'euros, soit une baisse de 6,2 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2019.
Certes, d'autres crédits soutiennent les efforts en faveur du monde combattant. Nous pouvons citer les 139 millions d'euros qui portent sur la mission Défense ou les six dépenses fiscales chiffrées cette année à 745 millions d'euros.
Toutefois, j'ai été frappé de constater la faible ambition de la programmation 2020 en faveur du monde combattant. En effet, la baisse des crédits de la mission pour cette année s'élève à 142 millions d'euros. Elle est justifiée d'après le Gouvernement, par la baisse naturelle du public concerné.
Il n'est pas aisé de se satisfaire d'un tel argument. La diminution du nombre des ayants droit devrait permettre au gouvernement de corriger peu à peu les situations individuelles, hélas souvent ingrates, de ceux qui ont risqué leur vie pour la France.
Or la seule mesure de revalorisation prévue pour cette année porte sur la majoration de la pension militaire d'invalidité (PMI) perçue par les conjoints survivants de grands invalides. Cette mesure était certes attendue. Elle avait été défendue par mon prédécesseur sur ce rapport, Fabien Roussel, mais elle ne mobilise que 600 000 euros pour 2020.
Certaines mesures décidées l'an passé continuent de déployer leurs effets, comme l'extension de la délivrance de la carte du combattant aux personnes justifiant d'une présence en Algérie après les accords d'Évian ou les mesures décidées en faveur des rapatriés.
Cela étant, il est inquiétant de constater qu'au-delà de la baisse des crédits correspondant à l'attrition des effectifs, le gouvernement mobilise la trésorerie de l'Office national des anciens combattants et victimes de guerre (ONACVG) pour effectuer des économies supplémentaires sur certaines actions, comme la politique de mémoire. Il n'est pas illégitime de délester la trésorerie d'un opérateur lorsque celle-ci enfle plus que de raison. Cependant, je regrette que ces 17,5 millions d'euros prélevés sur l'ONACVG, ne servent pas à des mesures de revalorisation.
Je tiens à porter à votre attention que la budgétisation qui en découle brouille la lisibilité des actions menées. C'est le cas pour l'action 7 Actions en faveur des rapatriés. La Cour des comptes relevait déjà, dans sa note d'exécution budgétaire pour 2018, que cette action ne permettait pas d'identifier précisément les différentes mesures conduites en faveur des harkis, ni les sommes qui leur étaient consacrées. Cela sera d'autant plus complexe pour les années à venir, puisque le fonds de soutien en faveur des harkis sera pris en charge, jusqu'en 2022, par la trésorerie de l'ONACVG.
Pour moi, ce budget ne répond pas aux revendications légitimes du monde combattant. La baisse des crédits de la dette viagère s'accentue cette année avec 101 millions d'euros en moins. Je propose donc une revalorisation de la retraite du combattant dont le niveau n'a pas été amélioré depuis 2017.
J'aimerais clore mon propos en évoquant le programme 167 Liens entre la nation et son armée. Bien que ce dernier ne soit pas concerné par une quelconque baisse habituelle des effectifs, ses crédits diminuent de 4 millions d'euros.
Je salue la pérennisation du service militaire volontaire, mais regrette la faible ambition du Gouvernement à son endroit. Il s'agit d'un dispositif de professionnalisation de jeunes sans formation ou sans emploi. Il a démontré de très bons résultats avec des taux d'insertion professionnelle dépassant les 75 %, et permet de faire connaître les métiers de notre armée qui souffre de difficultés de recrutement. Il me semble toutefois largement sous-dimensionné puisqu'il ne s'adresse qu'à 1 000 volontaires stagiaires.
Enfin, les associations plaident de plus en plus vigoureusement pour que davantage de moyens soient consacrés à la politique de mémoire. Cet impératif se fait d'autant plus pressant que les porteurs de cette mémoire s'éteignent. Dans le cadre des commémorations de la Première Guerre mondiale, un effort particulier a été mis en oeuvre, mais l'élan s'essouffle. Je propose donc un amendement pour que cet effort demeure soutenu et pour réaffirmer la propriété du souvenir et de la transmission.
La commission examine les amendements à la mission Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation
Article 38 et état B.
La commission examine l'amendement II-CF936 de M. Jean-Paul Dufrègne, ainsi que l'amendement II-CF265 de M. Joaquim Pueyo qui est identique.
Cet amendement tend à relancer les actions de mémoire, dans une société où l'histoire doit servir de rempart à la montée de la violence et à la résurgence des nationalismes. Dans le cadre des commémorations de la Première Guerre mondiale, un effort particulier a été mis en oeuvre, mais l'élan doit être soutenu.
Malheureusement, force est de constater que la programmation pour 2020 revient à des niveaux de crédits similaires à ceux en vigueur en 2012, alors même que les associations d'anciens combattants réaffirment la priorité du souvenir et de la transmission.
Tous les enfants devraient avoir vu au moins une fois au cours de leur scolarité, un site de mémoire des conflits du vingtième siècle.
Au moment où le Gouvernement souhaite établir un service national universel, pour renforcer les liens au sein de notre nation, l'armée a un rôle à jouer dans la transmission de la mémoire. Cet amendement flèche donc un million d'euros en autorisations d'engagement et en crédits de paiement de l'action 3 Solidarité du programme 169 vers l'action 2 Politiques de mémoire du programme 167.
L'action politique de mémoire est en baisse de plus de 5 millions d'euros et sera en partie compensée par la trésorerie de l'ONACVG. À mon sens, cela ne constitue pas une mesure de financement pérenne. Il est important de maintenir suffisamment de crédits pour renforcer cette politique de mémoire, qui avait été bien appréciée d'ailleurs dans les années précédentes, lorsque nous avons fait des efforts autour de la Première Guerre mondiale. Un effort avait été consenti, mais il n'est pas pérennisé. Je pense qu'il faudrait pérenniser cet effort.
La commission rejette les amendements identiques II-CF936 et II-CF265.
La commission passe à l'examen de l'amendement II-CF681 de M. Fabrice Brun.
Cet amendement a pour objet d'augmenter l'indice de la retraite du combattant de deux points, afin de conforter le cercle vertueux qui avait été mis en place en 2005, en matière de retraite du combattant.
Je propose moi-même de revaloriser la retraite du combattant. Vous proposez de la revaloriser de deux points. Malgré l'extension de la carte du combattant aux 50 000 personnes qui sont intervenues en Algérie entre 1962 et 1964, les crédits de la retraite du combattant baissent de 48 millions d'euros cette année. Une partie de cette baisse devrait faire l'objet d'une redistribution. Nous ne parlons pas de réaffecter l'intégralité de la baisse, mais de profiter de cette baisse naturelle pour en réaffecter une partie aux anciens combattants et aux veuves. C'est donc un avis favorable.
La commission rejette l'amendement II-CF681.
La commission examine l'amendement II-CF266 de M. Joaquim Pueyo.
Cet amendement a pour but d'augmenter les crédits des trois opérateurs de l'État : l'ONACVG, l'Institution nationale des invalides (INI) et le Conseil national des communes « Compagnons de la Libération ». Cet amendement a pour objectif de maintenir les crédits au niveau de 2019. La réforme annoncée de l'ONACVG ne doit pas conduire à mon sens, à une baisse de sa subvention pour charge de service public, alors qu'il conviendrait d'y affecter plus de moyens.
Je donnerai là aussi un avis favorable, parce que je regrette que les fonds de la trésorerie de l'ONACVG financent des dépenses existantes et non des mesures de revalorisation.
Je note que cela répond à une observation de la Cour des comptes de baisser la trésorerie de l'ONACVG. Pour notre part, nous serons donc défavorables à cet amendement.
Je ne crois pas toujours ce que dit la Cour des comptes. Si nous étions toujours en train de nous mettre droit dans nos bottes, quand ils passent, nous aurions parfois des surprises.
La commission rejette l'amendement II-CF266.
La commission examine ensuite l'amendement II-CF916 de M. Jean-Paul Dufrègne.
Je suis toujours un optimiste, c'est comme à la pêche parfois ça ne mord pas au début, et puis ça finit par venir. Je le disais tout à l'heure à propos de l'amendement de monsieur Brun, aucune revalorisation de la retraite du combattant n'avait été consentie depuis le 1er septembre 2017. Les marges de manoeuvre dégagées chaque année, pour une petite partie, pourraient être réaffectées au monde combattant. C'est l'objet de cet amendement qui coûte moins que le vôtre, monsieur Brun. Vous aviez prévu 15 millions d'euros, cela n'a pas été accepté. Je propose 6,4 millions d'euros, c'est beaucoup plus raisonnable et j'espère que cette proposition raisonnable sera votée.
La commission rejette l'amendement II-CF916.
Vous venez de refuser 29 euros par an sur une retraite de 750 euros. J'assiste à de nombreuses assemblées générales d'anciens combattants, quand je les vois discuter pendant deux heures sur un euro par rapport à la cotisation, je pense que c'est un petit peu mesquin. Vous auriez fait presque 20 ans d'augmentation de cotisations.
La commission aborde trois amendements qui peuvent être soumis à une discussion commune : les amendements II-CF264 et II-CF267 de M. Joaquim Pueyo et l'amendement II-CF860 de M. Fabrice Brun.
Cet amendement a pour but d'augmenter les crédits de l'action 7 Actions en faveur des rapatriés, qui comprend l'allocation de reconnaissance de la nation en faveur des Français rapatriés et harkis, ainsi que divers soutiens aux conjoints survivants. En effet, ces crédits baissent de 5 millions d'euros. Le Gouvernement, pour combler les besoins, affirme que les crédits budgétaires seront complétés par une mobilisation de la trésorerie de l'ONACVG qui financera les autres dispositifs en faveur des rapatriés. Cet amendement qui vise à maintenir les crédits à leur niveau de 2019 souligne que le recours à des mesures de trésorerie ne constitue pas, à notre sens, un engagement et un financement pérenne. Il doit donc être comblé par des crédits budgétaires correspondants.
Cet amendement propose un fléchage différent des crédits pour conforter le budget de l'ONACVG, afin d'assurer l'ensemble de ses missions, notamment celles qui lui sont dévolues pour la gestion opérationnelle du plan en faveur de nos amis harkis.
Avec les mêmes arguments que mon collègue, monsieur Brun, je défends l'amendement II-CF264.
Je suis d'accord avec vous : cette façon de procéder n'est pas sincère et brouille la liste d'actions menées en faveur des harkis et rapatriés. Je suis donc favorable à cet amendement.
La commission rejette successivement l'amendement II-CF267 et les amendements identiques II-CF860 et II-CF264.
La commission passe à l'amendement II-CF897 de M. Joël Giraud.
Il s'agit d'un amendement que j'ai déjà déposé et que j'ai fait adopter l'an dernier. Il a pour but une indemnisation forfaitaire des membres rapatriés des forces supplétives de statut civil de droit commun. Il s'agit d'un amendement d'appel pour que la ministre s'explique au banc.
Le ministère de la défense souhaite un règlement de la situation au moyen d'aides sociales. Certains ont accepté ce traitement, d'autres à l'heure actuelle, ne sont toujours pas indemnisés. L'objectif, en adoptant cet amendement, est d'exercer une certaine pression pour que ces personnes, qui étaient l'an dernier au nombre de 26, puissent ne pas passer à la trappe de l'histoire.
La commission adopte l'amendement II-CF897 (II-841
Je rappelle que le nombre de bénéficiaires de la retraite du combattant a diminué de 20 000 entre 2019 et 2020. Compte tenu de cette perte de bénéficiaires du fait du vieillissement de la population, il aurait été juste que vous acceptiez l'idée d'une revalorisation de la valeur du point de la pension militaire d'invalidité (PMI).
En effet, nous ne pouvons pas sans cesse parler de reconnaissance de la nation et, parallèlement, ne pas être capables de faire un geste en direction du monde des anciens combattants. Je trouve que ce serait une juste reconnaissance que de prendre en compte la valeur de l'inflation pour revaloriser leurs pensions.
Madame Dalloz, je serais assez curieuse de regarder la courbe d'augmentation des pensions des anciens combattants lors des précédents gouvernements. Je rappelle que l'année dernière, nous avons voté la carte 62-64 du combattant qui était attendue depuis longtemps. Je pense que nous n'avons pas à rougir de ce que nous avons fait. Cette année, nous traitons la question de la demi-part fiscale des veuves de guerre. Chaque année, nous choisissons de développer des crédits pour la mission Anciens combattants. Nous en avons développé aussi pour l'entretien des tombes et des carrés militaires pour les communes. Faire de la politique sur le dos des anciens combattants est un peu facile.
Il serait intéressant que madame Mauborgne regarde la revalorisation qui a eu lieu entre 2007 et 2012. Nous pourrons ainsi parler de chiffres qu'elle connaîtra.
Par ailleurs, je ne fais pas de la politique sur le sujet. Je dis simplement qu'aujourd'hui, une revalorisation a minima du niveau de l'inflation serait été judicieuse. Compte tenu du nombre de bénéficiaires qui décroît – je rappelle qu'en 2020, nous aurons 20 000 personnes de moins – il n'y aurait même pas de surcoût.
Je pense que la revalorisation des retraites fait partie des discussions qui auront lieu cette année dans le cadre de la commission tripartite qui a été mise en place avec le ministère des armées, le ministère du budget et les associations d'anciens combattants. Madame Dalloz, je réponds d'une manière plus modérée à votre question. Laissons la commission travailler.
Je suis particulièrement déçu que cette proposition, qui était sage et n'engageait que peu de moyens, n'ait pas reçu une suite favorable. Je veux rappeler que la plupart des gens qui reçoivent aujourd'hui cette retraite sont des anciens ouvriers, petits artisans, petits commerçants, qui ont des petites retraites. La seule revalorisation dans ce budget est celle à laquelle nous faisions allusion tout à l'heure pour les aidants des grands invalides, c'est-à-dire 600 000 euros. Il ne faut pas opposer à notre demande le fait qu'il y a eu l'intégration de nouveaux bénéficiaires, engagés entre 1962 et 1964. Cela n'a rien à voir. J'espère que l'année prochaine, nous aurons une ouverture pour donner un signal à ces hommes et ces femmes.
La commission adopte les crédits de la mission Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation ainsi modifiés.
Avant l'article 73.
La commission examine l'amendement II-CF263 de M. Joaquim Pueyo.
Cet amendement vise à réparer une injustice concernant la valorisation des pensions militaires d'invalidité (PMI). Beaucoup de retard a été accumulé sur cette question, et les précédentes revalorisations du point PMI qui ont été faites n'ont pas réussi à effacer les pertes de pouvoir d'achat. Ce rapport permettra donc de mesurer le retard du point PMI et de définir les moyens de le combler, avec l'objectif de préparer une prochaine revalorisation, devant s'opérer par la voie réglementaire.
Je note dans mon rapport la baisse de 53 millions d'euros des crédits consacrés à la PMI, alors qu'aucune mesure de revalorisation n'a été décidée depuis 2018. C'est donc un avis favorable.
La commission rejette l'amendement II-CF263.
Les crédits sur cette mission – et notamment sur le programme 169 – diminuent à la fois en autorisations d'engagement et en crédits de paiement. Je rappelle qu'en crédits de paiement, nous baissons de 5,79 % de l'année 2019 à l'année 2020, et que sur les autorisations d'engagement, nous allons être en 2021 en dessous de la barre des deux milliards. C'est cela, la réalité. Nous avons eu une grande discussion lors de l'examen de la première partie du projet de loi de finances 2020 sur l'absence de demi-part fiscale pour les veuves d'anciens combattants lorsque le mari est décédé sans avoir été bénéficiaire de la retraite du combattant pendant au moins un an. Nous avions l'an dernier abaissé de 75 à 74 ans l'âge à compter duquel la veuve peut en bénéficier, mais il y a cette condition de perception de la retraite d'ancien combattant par le mari décédé.
Reconnaissons que c'est d'une complexité extraordinaire. Lors de la discussion en séance, l'amendement de Régis Juanico a failli être adopté à deux voix près, mais comme le ministre a répondu que nous n'avions pas d'évaluation de son coût budgétaire, cette discussion me permet de demander que le Gouvernement remette un rapport. Nous pouvons faire des calculs, des simulations des cohortes de veuves concernées par le non-bénéfice de cette demi-part. Je pense que le rapport pourrait nous éclairer et nous permettre de discuter de cette mesure.
Madame Dalloz a été très claire et je souscris totalement à sa demande. Ce sera un avis favorable.
La commission rejette l'amendement II-CF576.
Elle examine ensuite les crédits de la mission Culture : création, transmission des savoirs et démocratisation de la culture.
Cela fait exactement 50 ans qu'André Malraux a inauguré la Maison de la Culture d'Amiens ; 50 ans que la politique culturelle de la France a commencé à s'ouvrir à notre territoire ; 50 ans que Malraux a prononcé ces mots qui résument si bien l'enjeu central de notre politique culturelle : « il n'est pas vrai que qui que ce soit au monde ait jamais compris la musique parce qu'on lui a expliqué la Neuvième Symphonie ; que qui que ce soit au monde ait jamais aimé la poésie parce qu'on lui a expliqué Victor Hugo ; aimer la poésie, c'est qu'un garçon, fût-il quasi illettré, mais qui aime une femme, entende un jour ces vers : “lorsque nous dormirons tous deux dans l'attitude que donne aux morts pensifs la forme du tombeau” et qu'alors il sache ce qu'est un poète ».
Vous voyez bien que la culture n'est pas une affaire de verticalité. C'est une rencontre. La fonction même de notre politique culturelle est de favoriser ces rencontres, en particulier dans les territoires qui en sont les plus éloignés.
Mes chers collègues, à la lecture de ce budget, les chiffres – qui manquent cruellement de poésie, sauf quand ils sont en hausse – décrivent parfaitement cette ambition. C'est une bonne nouvelle pour nos concitoyens et pour nos territoires. Cette priorité se manifeste par l'augmentation des crédits alloués à la transmission des savoirs et à la démocratisation de la culture, qui s'établissent à 508 millions d'euros pour 2020.
Ils progressent de 33 millions d'euros cette année. Ces nouveaux moyens vont financer des dispositifs qui sont le fer de lance de notre politique culturelle en faveur des territoires : la montée en puissance du Pass Culture qui reçoit 10 millions d'euros supplémentaires, pour un total de 39 millions d'euros ; 4 millions d'euros qui permettront de financer le volet « offrir plus » du plan bibliothèque ; 3 millions d'euros qui seront consacrés au déploiement des microfolies, avec pour objectif de passer en seulement 2 ans de 300 implantations à plus de 1 000 sur le territoire hexagonal et ultra-marin ; 2 millions d'euros supplémentaires pour le projet Démos porté par la Philharmonie de Paris : un projet exemplaire de démocratisation de la pratique musicale, qui s'adresse à des enfants issus de quartiers relevant de la politique de la ville ou de zone rurale ; l'extension de l'éducation artistique et culturelle à l'ensemble des élèves de primaire et de collège, avec des moyens renforcés. Ce sont, par exemple, de belles initiatives comme « l'orchestre à l'école » ou le « plan chorale ».
Depuis le début de mes travaux sur cette mission budgétaire, deux constats me préoccupent particulièrement : le relatif défaut de pilotage des opérateurs et la concentration des moyens en Île-de-France.
Concernant le pilotage, il faut savoir que 34 % des crédits de la mission financent des opérateurs – par exemple l'Opéra de Paris ou la Comédie Française. Je l'avais souligné lors du Printemps de l'évaluation, ces opérateurs sont encore trop nombreux à n'avoir signé aucun contrat d'objectif et de performance.
Je crois qu'il faut essayer de dépasser la caricature qui consiste à dire que deux mondes – celui des artistes et celui de l'administration – ne pourraient pas se comprendre. C'est pourquoi j'attends avec impatience les conclusions de la mission que le ministère a confiée à Jean-François Hébert, intitulée « Repenser la fonction de tutelle des opérateurs et organismes dans un sens plus stratégique et moins gestionnaire ».
Deuxième constat : les crédits de la mission bénéficient pour une large part à Paris et à l'Île-de-France. D'après les chiffres du ministère, 59 % des crédits de la mission sont exécutés dans la région francilienne. S'agissant des opérateurs, ce taux s'élève à 84 %. Là encore, il y a le poids de l'histoire, et même la volonté de décentralisation, qui a permis de donner un vrai dynamisme à l'échelle locale. Toutefois, la politique culturelle de l'État doit continuer à irriguer les territoires et à résorber la fracture territoriale.
Ce rôle stratégique de l'État est indispensable. Imaginez qu'un jour, certains élus locaux choisissent, pour des raisons politiques et au service d'une ligne plus radicale, de fermer les portes des théâtres, ou de restreindre l'offre culturelle…
C'est pour cela que je salue l'action du ministère qui vise dès janvier 2020 à rapprocher la prise de décision au plus près des citoyens, en déconcentrant dans les DRAC la gestion d'une soixantaine de dispositifs jusque-là gérés par l'administration centrale. Je salue aussi la volonté de renouveler le dialogue avec les collectivités locales en renforçant les partenariats et en intégrant dans la prochaine génération des contrats de plan État-régions un volet culturel.
Démocratisation, déconcentration, partenariat : tout cela va dans le bon sens et je vous demanderai d'encourager cette volonté de rapprocher la culture de nos concitoyens et des territoires en votant le budget 2020 de la mission.
Avec 970 millions d'euros, le budget du programme 175 Patrimoines est satisfaisant. Il est en reconduction par rapport à l'an dernier. Je veux juste appeler l'attention sur un point. C'est en grande partie un budget d'investissement. Il faut donc veiller à mettre en place une programmation pluriannuelle sur une période d'une dizaine d'années, parce que nous avons des investissements très lourds et très longs, par exemple sur le quadrilatère Richelieu, à Versailles, à Fontainebleau, à Villers-Cotterêts et probablement bientôt à Beaubourg. Il n'est pas sûr que ce niveau de crédit puisse tenir à moyen terme.
Je signale par ailleurs que nous avons une progression importante des crédits de paiement, liée à des mouvements internes, puisque de plus en plus d'opérateurs bénéficient des transferts de personnels qui étaient jusqu'à présent gérés par le ministère. Cela a été le cas du Louvre il y a quelques années, cela va être le cas de Versailles, du Centre des monuments nationaux et du musée d'Orsay. C'est une très bonne chose, parce que la mise en place d'établissements publics permet une déconcentration, une responsabilisation. Il faut s'en féliciter. Il suffit de voir la transformation spectaculaire de Chambord, à partir du moment où a été créé l'établissement public, il y a une quinzaine d'années.
Subsistent des services à compétence nationale, c'est-à-dire gérés directement par le ministère, par exemple pour le château de Compiègne ou le musée de Saint-Germain-en-Laye. Il faudrait rattacher à des établissements existants, voire ériger en nouvel établissement ce type de monuments ou de musées extrêmement intéressants.
De plus, le budget des opérateurs est multiple. Outre les crédits budgétaires, il y a également de multiples ressources commerciales comme la billetterie, les partenariats. Le Louvre a établi un partenariat de 300 millions d'euros avec le Louvre Abu Dhabi. Le budget prévu pour 2020 permet un redéploiement à partir du Louvre. Les horaires d'ouverture du Louvre vont être étendus dans le courant 2020 – une négociation un peu compliquée avec les personnels est en cours –, et le musée devrait bénéficier de ressources de billetterie supplémentaires. Cela permet de redéployer dix millions d'euros vers d'autres actions. Ces dix millions d'euros sont au coeur de la problématique du patrimoine, puisqu'il y a deux millions qui financent un diagnostic sur les travaux d'urgence sur nos quatre-vingt-sept cathédrales. Celle de Clermont-Ferrand est en très mauvais état. Ce travail est engagé, grâce à ce redéploiement de crédits. Trois millions vont au Centre des Monuments Nationaux, parce que celui-ci souffre. Il y a eu les dégradations de l'Arc de Triomphe et surtout l'incendie de Notre-Dame, qui empêche la visite des tours et fait perdre des recettes.
Nous arrivons à dégager cinq millions de plus pour le fonds incitatif et partenarial pour les collectivités à faible potentiel financier, qui avait été créé par madame Nyssen. Cela va tout à fait dans le sens de ce que disait madame David : il faut absolument déconcentrer et essayer de rééquilibrer vers la province l'utilisation des crédits. Par ailleurs, nous avons un ministère qui est l'un des rares à avoir encore des services déconcentrés de qualité, avec les DRAC, alors que les services extérieurs des directions départementales de l'équipement se sont effondrés. Dans les DRAC, il y a encore beaucoup d'expertises. Il faut vraiment s'appuyer dessus.
Les ressources budgétaires, c'est bien. Heureusement que dans le domaine patrimonial, il y a d'autres ressources dont il faut tirer un plein effet. Il y a d'abord le levier fiscal. C'est l'occasion pour moi de redire que j'ai été un peu déçu. Nous adoptons un amendement en commission et il n'a pas passé la rampe en séance. Je veux rappeler que le mécénat est important. Je pense que la mesure qui est prise à l'article 50 de la loi devrait pouvoir fonctionner. C'est le résultat du travail que nous avons fait en commission. Il faut bien garder à l'esprit qu'il ne faut en aucun cas tarir le mécénat. Le loto du patrimoine est un succès. Cela nous apporte plus de 20 millions d'euros. Je veux saluer au passage la réactivité et l'efficacité de la Fondation du Patrimoine. C'est un organisme qui fonctionne très bien, et comme nous l'avons vu avec l'incendie de Notre-Dame, dans les 48 heures, il était déjà en action. C'est lui qui a récolté l'essentiel des fonds. Cela me permet de dire qu'il va falloir que nous nous battions comme l'an dernier pour obtenir le dégel complet des crédits de 2019, dans les semaines qui viennent. Ensuite, la réserve de précaution passe de 3 à 4 %. Il y a encore quelques années, nous étions montés jusqu'à 7 ou 8 %. J'espère que nous allons nous arrêter à 4 %.
En ce qui concerne la cathédrale Notre-Dame de Paris, nous avons aujourd'hui 920 millions de promesses de dons, et ont été effectivement perçus plus de 100 millions qui viennent des dons des particuliers. 85 millions ont d'ores et déjà été rattachés au budget par le biais de fonds de concours. Cela permet notamment de financer toutes les opérations d'urgence, mais rien n'est en revanche prévu dans le budget 2020. L'établissement public n'est toujours pas créé. En tant que rapporteur spécial, je vais peut-être être conduit à utiliser les pouvoirs conférés par la loi pour voir un peu ce qui se passe et déterminer si les choses se déroulent convenablement.
Je donne un avis favorable à ce budget, qui me paraît tout à fait convenable.
La mission Culture paraît préservée dans le budget de loi de finances pour 2020. Cependant, les subventions de fonctionnement attribuées aux organismes du secteur subventionné n'ont quasiment pas bougé depuis dix ans, ce qui revient à une baisse de plus de 10 % en valeur réelle. Il est normal que ces organismes participent à l'effort budgétaire. Toutefois, à un moment donné, il faut se poser la question des missions que nous leur assignons.
Par ailleurs, de grands chantiers ont été lancés, comme la rénovation du Grand Palais ou la Cité du théâtre. Or, certains de ces programmes sont insuffisamment dotés dans le PLF par rapport aux échéanciers de travaux. On nous dit que les crédits seront trouvés par ailleurs. Nous sommes en cours d'exercice, cela soulève la question du principe de sincérité budgétaire.
Enfin, il n'est pas possible d'analyser le budget de la culture sans évoquer le mécénat. Au cours des dix dernières années, l'État s'est reposé de façon croissante sur les dons des entreprises et des particuliers pour financer les institutions culturelles, les festivals, la rénovation des monuments, à tel point que les crédits d'acquisition des musées ont quasiment disparu. L'État a même encouragé ces grands opérateurs à attirer plus de mécènes, ce qu'ils ont fait avec succès. Je pense en particulier à Versailles, au château de Fontainebleau, à l'Opéra de Paris, mais aussi à des festivals qui n'équilibreraient pas leurs comptes sans le soutien d'entreprises locales. En 2020, l'État compte plus que jamais sur le mécénat. Le chantier présidentiel de Villers-Cotterêts mise sur un apport de 25 millions d'euros en mécénat, soit près d'un quart du budget total, sans parler de Notre-Dame. La réforme du dispositif fiscal en faveur du mécénat des entreprises, proposé à l'article 50 du PLF, semble donc particulièrement malvenue. Quant à moi, je m'abstiendrai sur ce budget.
La commission en vient à l'examen des amendements à la mission Culture.
Article 38 et état B.
Elle examine l'amendement II-CF431 de Mme Valérie Rabault.
Le Gouvernement propose d'amputer les crédits alloués aux musées, ce qui représenterait une baisse de près de 11 millions depuis 2017. Le patrimoine des musées de France contribue pourtant largement au rayonnement culturel de notre pays, rend la culture plus attractive, en particulier pour les jeunes générations. Nous pensons donc que l'offre culturelle proposée à la jeunesse passe d'abord par un patrimoine en bon état, des structures innovantes et capables de s'adapter aux exigences de notre siècle. C'est pourquoi le groupe Socialistes et apparentés propose de ramener les crédits en faveur du patrimoine des musées de France à leur niveau voté en loi de finances initiale pour 2019.
J'ai indiqué tout à l'heure pourquoi des crédits sur les musées baissent. C'est exclusivement lié au redéploiement de dix millions d'euros que nous enlevons au Louvre parce que le Louvre bénéficie d'autres ressources. Grâce à ces dix millions, par redéploiement, nous finançons les actions que j'ai évoquées tout à l'heure. En revanche, pour les autres musées, l'effort est maintenu. À mon sens, il n'y a pas de problème particulier. Mon avis est défavorable sur cet amendement.
La commission rejette l'amendement II-CF431.
Elle examine ensuite l'amendement II-CF432 de Mme Valérie Rabault.
Comme l'indique l'annexe budgétaire en page 144, la création contemporaine dans le secteur des arts visuels est un vecteur essentiel d'émancipation individuelle et collective, et de cohésion sociale. C'est aussi un secteur économique qui a une forte valeur ajoutée, qui est porteur d'innovation, de créativité, d'emploi et d'attractivité. Pourtant, le Gouvernement propose de diminuer les crédits alloués à la création, à la production et à la diffusion des arts visuels, ce qui représenterait une baisse de plus d'un million depuis 2017. C'est un amendement qui propose de ramener les crédits en faveur du patrimoine des musées. Vous m'avez déjà répondu, mais là, nous sommes davantage sur la création contemporaine.
Vous proposez d'augmenter les crédits en faveur du soutien aux arts visuels de 1 900 463 euros. Je vous avoue que cet amendement m'a un peu surprise venant de vous, parce que je suis allée regarder les crédits de la mission lorsque vous étiez au Gouvernement. J'ai découvert avec surprise que non seulement les crédits ont été très bas durant tout votre mandat, mais que vous ne les aviez vraiment augmentés qu'en 2017. Si je compare, pour cette action, vous étiez à 68,12 millions, alors que depuis que nous sommes au pouvoir, nous sommes à 75,48 millions d'euros. Je crois que c'est plutôt nous qui sommes les amis de la culture. C'est un avis défavorable. Pour cette action, les autorisations d'engagement sont en hausse de 1,6 million d'euros pour le PLF 2020, afin de financer une opération d'investissement pour le Centre national des arts plastiques, mais les crédits de paiement ne baissent que de 285 000 euros.
La commission rejette l'amendement II-CF432.
Elle examine ensuite l'amendement II-CF395 de Mme Anne-Laure Cattelot.
Vous avez démontré à quel point il est important de pouvoir diffuser au maximum les crédits de la culture, et que malheureusement, ils sont encore trop concentrés sur l'Île-de-France, même si j'imagine que cela peut s'expliquer par la densité de la population. Dans le cadre d'une politique culturelle qui se diffuse davantage sur les territoires, une proposition que j'avais établie, qui a été reprise dans l'agenda rural, portée par mon collègue Daniel Labaronne et validée par le Premier ministre, portait sur la création d'un fonds pour les sociétés de musique, à savoir les Harmonies municipales, les fest-noz, les bandas du Sud-Ouest ou les batteries-fanfares. Ces organismes vivaient précédemment d'une subvention municipale, parfois de subventions du département. Cela pouvait aussi être une part de réserve parlementaire qui leur était attribuée ponctuellement.
Ces sociétés de musique nous ont fait part d'un certain désarroi et d'une incapacité à participer à des concours de sociétés de musique suprarégionales. Il est compliqué quand on est à Dunkerque, de participer un concours à Béziers.
Je propose dans cet amendement de créer un fonds qui serait géré par le Centre national de la musique, dédié à ces sociétés musicales, et pourrait concerner le renouvellement ponctuel des instruments, la participation financière aux frais de déplacement pour des concours à un échelon suprarégional. Je crois qu'il est de bon aloi pour une politique culturelle de pouvoir aller toucher directement son bénéficiaire, notamment en matière de musique. Je pense que ce sont des sociétés que vous voyez souvent lors des cérémonies patriotiques, et il faut les soutenir.
Évidemment, je partage vos objectifs. Toutefois, je voudrais vous rappeler que le Centre national de la musique n'est pas financé par cette mission, mais par l'action 2 du programme 334 de la mission Médias, livre et industries culturelles. Ce sera malheureusement un avis défavorable.
Vous avez raison, je pense qu'il faut que je le retravaille pour la séance. Par ailleurs, c'est vrai qu'il est bien compliqué de pouvoir créer quelque chose de nouveau dans ce ministère, qui n'a pas les crédits nécessaires pour pouvoir faire de la nouveauté. Je retire l'amendement.
L'amendement II-CF395 est retiré.
La commission examine l'amendement II-CF433 de Mme Valérie Rabault.
Pour la troisième année consécutive, le Gouvernement propose de diminuer les crédits alloués aux établissements d'enseignement supérieur à l'insertion professionnelle. Depuis 2017, ces crédits ont été amputés de 36 millions d'euros, soit une baisse de 13 % environ. Cette baisse ne nous paraît pas judicieuse et nous estimons au contraire qu'un soutien accru devrait être apporté aux établissements d'enseignement supérieur en matière d'insertion professionnelle. Ce taux d'insertion professionnelle des diplômés de l'enseignement dans le domaine de la culture est en baisse entre 2017 et 2018, et ce dans tous les domaines : architecture et patrimoine, arts plastiques, spectacle vivant et cinéma, comme le montre l'indicateur de la page 186 de l'annexe budgétaire. Cet amendement propose de ramener les crédits en faveur du patrimoine des musées de France à leur niveau voté en loi de finances pour 2019.
Je voudrais juste vous rappeler que les crédits alloués en 2020 aux écoles d'enseignement supérieur culture sont en diminution d'à peine 1 %. Cette légère baisse des crédits s'explique essentiellement par des mouvements de transfert. C'est la conséquence d'un plan de titularisation dans les écoles nationales supérieures d'architecture, et des titularisations dans le cadre de la loi Sauvadet de 2012. Non seulement nous sincérisons le budget, mais nous réduisons aussi la précarité de certains enseignants en les titularisant. Ce sera un avis défavorable.
La commission rejette l'amendement II-CF433.
Elle examine ensuite l'amendement II-CF436 de Mme Valérie Rabault.
C'est un amendement à propos des subventions aux opérateurs du programme 224, qui concerne les conservatoires nationaux de Lyon et de Paris, l'école du Louvre ou les écoles d'architecture. Ces subventions sont en baisse de 1,8 million. L'amendement propose d'annuler cette baisse et de rehausser les crédits de ces opérateurs de1,3 % pour 2020, soit un niveau proche de l'inflation.
Il ne me paraît pas inutile de rappeler que les opérateurs de la mission peuvent participer aux efforts de réduction de la dépense publique. Votre amendement propose une hausse indifférenciée des crédits pour les 99 établissements de l'enseignement supérieur financés par la mission Culture. Le budget pour 2020 a été établi de façon plus rigoureuse avec la hausse de certaines subventions, comme pour les écoles d'art en région. Je rappelle également qu'une réforme importante de l'enseignement supérieur se poursuit pour généraliser le schéma LMD et renforcer le soutien à la recherche. C'est un avis défavorable.
La commission rejette l'amendement II-CF436.
Elle passe ensuite à l'amendement II-CF435.
La commission rejette l'amendement II-CF435.
Elle examine ensuite l'amendement II-CF434 de Mme Valérie Rabault.
C'est un amendement de crédit relatif à l'action culturelle internationale de la France. Ces crédits sont reconduits en 2020 à leur niveau de 2019. Ils avaient connu une baisse de 800 000 euros par rapport à 2018. C'est donc là encore un amendement qui vous demande de revenir sur cette diminution.
Je vous rappelle qu'en 2018, nous avions programmé 8,2 millions d'euros de crédit, mais seuls 6,6 millions d'euros avaient été consommés. Nous sincérisons, nous nous rapprochons des besoins réels. Dans le PLF 2020, nous donnons tout de même une marge de manoeuvre, puisque nous prévoyons 7,4 millions d'euros pour cette action. C'est plus que ce qui avait été consommé en 2018. C'est donc un avis défavorable.
La commission rejette l'amendement II-CF434.
Je note les propos positifs des rapporteurs sur cette mission. Je tiens aussi à souligner les efforts du programme Démos et des Microfolies, pilotés par le ministère, qui irriguent les territoires ruraux – notamment l'orchestre à l'école – et toutes ces mesures que nous avons voulues il y a quelques années, qui sont en train de se déployer, y compris dans les territoires très ruraux. Je pense que nous pouvons nous en féliciter. Bien évidemment, nous voterons pour les crédits de ces missions.
Il faut souligner que dans les documents budgétaires et dans le programme qu'on nous annonce, nous parlons beaucoup d'aides données aux territoires fragiles par équité et pour le développement des pratiques pédagogiques liées aux enseignements artistiques. On note d'une façon globale que les collectivités, les départements – qui ont par exemple des écoles départementales – ont beaucoup de mal à continuer à être aidés par le ministère. C'est un problème qu'il faudra regarder de très près. Globalement, nous ne sommes pas tout à fait d'accord sur les chiffres, mais nous reverrons cela pour en reparler en séance.
La commission adopte les crédits de la mission Culture non modifiés.
La commission passe à l'examen des crédits de la mission Médias, livre et industries culturelles et du compte de concours financier Avances à l'audiovisuel public.
L'ensemble des crédits de la mission Médias, livre et industries culturelles et du compte de concours financier Avances à l'audiovisuel public atteint 4,3 milliards d'euros en 2020, dont 86 % sont alloués au secteur de l'audiovisuel. Concernant la mission Médias, livre et industries culturelles, ces crédits s'établissent à 591 millions d'euros pour 2020, en hausse de 2 % par rapport à 2019.
D'une part, cette augmentation traduit la prise en compte par l'État de la nécessité de renforcer l'accompagnement d'un secteur en difficulté, celui de la presse. En effet, après une augmentation de 2 millions d'euros en 2019 et des avances de trésorerie successives, le Gouvernement a choisi d'accroître de 6 millions d'euros la subvention versée à l'Agence France Presse. Une partie de ces 6 millions d'euros financera le plan de transformation engagé par l'agence.
Il est à souligner que le dispositif des aides à la presse reste stable par rapport à 2019, excepté l'aide au transport postal qui diminue de 8 millions d'euros. Je me réjouis ainsi de l'adoption cet après-midi par notre commission d'un amendement qui encourage justement le rapatriement de cette aide budgétée sur la mission Économie, vers le programme 180 de la mission Médias, afin de garantir un meilleur suivi et une meilleure lisibilité de la politique publique de soutien au secteur de la presse.
D'autre part, l'augmentation des crédits de la mission vient concrétiser la budgétisation nécessaire à la création du Centre national de la musique (le CNM). Ce centre, qui se substituera au Centre national de la chanson, des variétés et du Jazz (le CNV) et agrégera plusieurs autres organismes, a pour objectif de permettre un pilotage ambitieux et stratégique de la politique musicale en France. Le Gouvernement a prévu l'inscription d'une dotation nouvelle de 7,5 millions d'euros en 2020 pour financer le CNM, et aurait pour ambition de porter ce financement à 20 millions d'euros par an, comme le recommandaient nos deux collègues Pascal Bois et Émilie Cariou dans leur rapport de préfiguration, remis en fin d'année 2018. Il me semble important que le Gouvernement s'engage clairement sur ce point, afin de rassurer la filière.
Concernant le Centre national du cinéma et de l'image animée qui est rattaché à cette mission, il est financé uniquement par des taxes affectées. Ce financement fait l'objet d'une réforme à l'article 62 du projet de loi de finances, qui prévoit d'harmoniser le taux de taxation entre les acteurs traditionnels et les nouveaux acteurs du numérique, dans une volonté de rééquilibrage qui me semble tout à fait pertinente.
J'ai eu l'occasion de souligner dans mon rapport du printemps dernier les difficultés de soutenabilité financière du CNC, confronté à une stagnation de ses ressources et au dynamisme des soutiens versés. Il prévoit un déficit de 25 millions d'euros en 2019. Deux plans d'économies ont pour objectif de permettre d'atteindre l'équilibre en 2020 : celui sur le secteur de l'audiovisuel, qui entre dans sa deuxième année de réalisation en 2020, et celui sur le secteur du cinéma, en cours d'élaboration.
Enfin, je tiens à souligner la prise en compte par le CNC de recommandations proposées dans le cadre du Printemps de l'évaluation, concernant notamment l'amélioration de la lisibilité de l'information transmise au Parlement. Cela démontre l'attention portée au travail d'évaluation que nous menons.
Concernant le compte de concours financier Avances à l'audiovisuel public, l'année 2020 est la deuxième année du plan d'économies appliqué aux sociétés de l'audiovisuel public, qui voient leur dotation nette totale diminuer de 70 millions d'euros en 2020, pour s'établir à 3,7 milliards d'euros.
Pour rappel, à horizon 2022, il est prévu que cette dotation ait baissé de 190 millions d'euros par rapport à 2018. Il faut souligner que l'effort net demandé est plutôt proche de 50 millions d'euros, puisque la réforme des taxes affectées au CNC entraîne un « gain » pour les chaînes de l'audiovisuel public estimé à 20 millions d'euros. Si l'on exclut ce gain, l'effort est principalement porté par France Télévisions (– 40 millions d'euros), puis Radio France (-5 millions d'euros) et l'INA (– 1 million d'euros). Afin de conserver une trajectoire à la baisse de la dotation versée aux sociétés de l'audiovisuel public, la contribution à l'audiovisuel public (CAP), qui est le seul vecteur de financement public du secteur depuis 2019, sera diminuée d'un euro en 2020, conformément à l'article 31 du projet de loi de finances.
Dans un contexte de suppression de la taxe d'habitation à laquelle elle est adossée et d'évolution des usages, cette diminution de la CAP démontre la pertinence du débat que nous devons avoir sur sa transformation. Le rapport demandé au Gouvernement par l'article 296 de la loi de finances pour 2019, qui porte sur les pistes de réforme de la CAP, n'a toujours pas été remis au Parlement. Alors qu'une réforme ambitieuse de l'audiovisuel public est prévue pour le premier semestre 2020, il me semble qu'il est indispensable d'engager rapidement une réflexion sur son financement.
Le budget de cette année revêt une importance particulière. 2020 est une année charnière pour presque tous les acteurs concernés par la mission Médias, livre et industries culturelles et le compte de concours financier Avances à l'audiovisuel public. L'activité législative récente a en effet été particulièrement riche pour notre commission des affaires culturelles, comme pour le secteur de la presse. Je pense bien sûr à la loi sur les droits voisins, mais aussi à la loi relative à modernisation de la distribution de la presse. Le PLF 2020 s'inscrit dans la continuité de ces réformes avec un soutien à la presse et aux médias en hausse, notamment avec une attention particulière portée au financement de l'AFP, et la reconduction de l'aide à Presstalis, qui demeure toutefois dans une situation financière difficile. Une priorité a également été donnée aux industries culturelles. Je pense ici au secteur de la musique, avec le CNM qui est doté de 7,5 millions d'euros de moyens nouveaux, mais aussi à la création audiovisuelle et au cinéma. En effet, le projet de loi de finances annonce et pose déjà les bases de la grande réforme de l'audiovisuel en assurant, grâce à la réforme des taxes affectées au CNC, une juste contribution des différents acteurs, dans une optique de pérennité des ressources allouées à la création. Des questions se posent toutefois quant aux acteurs concernés, aux perspectives d'évolution du taux des taxes affectées, ou encore à l'assiette taxable.
Le projet de loi de finances tire aussi les conséquences des économies demandées à l'audiovisuel public dans la trajectoire budgétaire 2018-2022. Les baisses de dotations sont certes importantes – elles représentent 70 millions d'euros – mais elles permettront de diminuer la contribution à l'audiovisuel public pour la première fois depuis sa création. Les entreprises de l'audiovisuel pourront, grâce à la réforme de la TST-E, dégager plusieurs millions d'euros de marge de manoeuvre. Nous serons donc en 2020 à mi-chemin de l'économie de 190 millions d'euros qui devrait être effective en 2022.
La commission en vient à l'examen des amendements à la mission Médias, livre et industries culturelles.
Article 38 et état B
Elle examine l'amendement II-CF528 de Mme Sylvie Tolmont.
Le présent projet de loi prévoit une diminution de près d'un million d'euros par rapport à 2019 des crédits alloués au fonds stratégique pour le développement de la presse, sans qu'aucune justification n'y soit véritablement apportée dans le bleu budgétaire. Ce fonds joue un rôle important permettant de soutenir des projets d'innovation et de développement des entreprises de la presse. C'est pourquoi notre amendement propose de maintenir les crédits du fonds stratégique pour le développement de la presse, au niveau de ceux votés en loi de finances pour 2019.
Les crédits prévus dans le PLF 2020 pour le FSDP sont au même niveau que ceux inscrits en loi de finances pour 2019. Il y a une différence de 900 000 euros qui est due à un amendement du Gouvernement voté en nouvelle lecture. Dans la mesure où l'ensemble du programme connaît déjà une progression de 1,6 %, il est normal que les postes de dépenses qui peuvent faire l'objet d'une rationalisation de la dépense le fassent. Le FSDP est l'un des seuls postes de dépenses qui ne soit pas contraint, puisqu'il verse des subventions à des projets innovants. Nous devons établir nos priorités sur ce programme, et elles se concentrent aujourd'hui plutôt sur le renforcement du soutien à l'AFP et le maintien des aides versées à Presstalis et à la presse d'information politique générale. Ce sera donc un avis défavorable.
La commission rejette l'amendement II-CF528.
La commission examine l'amendement II-CF538 de Mme Sylvie Tolmont.
Afin d'accompagner la création de l'établissement du Centre national de la musique prévue au 1er janvier 2020, et lui permettre d'assurer l'ensemble de ses missions, le projet de loi prévoit de lui allouer 7,5 millions d'euros de moyens budgétaires. Le rapport de la mission de préfiguration du Centre national de la musique remis au Premier ministre en novembre 2018 préconisait pourtant un financement public supplémentaire alloué au CNM de 20 millions d'euros. Notre amendement propose donc de revenir à 20 millions d'euros.
Ce sera un avis défavorable, dans la mesure où ces 20 millions d'euros supplémentaires ne sont pas nécessaires dès 2020, puisque nous sommes dans une phase de lancement du Centre national de la musique. Cependant, je pense qu'il est important d'avoir cette discussion en séance avec le ministre pour avoir l'engagement d'une montée en puissance du financement et connaître le calendrier envisagé. Je vous propose donc de retirer votre amendement pour que nous ayons ce débat en séance en présence du ministre. À défaut, je donnerai un avis défavorable.
L'amendement II-CF538 est retiré
La commission examine l'amendement II-CF540 de Mme Sylvie Tolmont.
Nous sommes sur une diminution de près d'1,5 million euros par rapport à 2019, des crédits alloués pour soutenir le secteur de l'édition et des librairies. Ces crédits sont également essentiels pour favoriser le développement culturel de nos territoires et ne doivent en ce sens subir aucune baisse.
Les crédits de paiement inscrits sur l'action 1 Livre et lecture du programme 334 diminuent d'environ 700 000 euros, principalement en raison d'une baisse de la dotation d'investissement allouée aux travaux du quadrilatère Richelieu, du fait de l'arrivée à terme progressive du chantier. Cette baisse est d'ailleurs largement compensée par l'augmentation des crédits de la BNF. Votre amendement m'apparaît donc sans objet. Ce sera un avis défavorable.
La commission rejette l'amendement II-CF540.
Je note avec satisfaction que le ministère de la culture fait des efforts pour soutenir la presse, et je pense que nous allons encore avoir des groupes de travail qui vont se tenir dans l'année qui vient, sur les aides à la presse. C'est un problème récurrent, la presse manque de financements, avec notamment une baisse des ressources publicitaires. Il faut sans cesse revisiter tout l'écosystème de la presse.
Je note que le ministère continue à soutenir la presse tout en finançant la création du Centre national de la musique. Il a été créé en suivant les recommandations que nous avions faites avec Pascal Bois. Je me satisfais de voir sa concrétisation aujourd'hui dans ce budget. Je suis néanmoins étonnée de voir budgétisée l'aide au théâtre privé par la suppression de la taxe qui était dédiée, dans une période où le ministère doit faire cet effort pour financer le CNM et son lancement. Je ne manquerai pas de questionner le ministre à ce sujet.
La réforme du CNC avec l'harmonisation des taxes était une mesure très attendue depuis longtemps. Elle tend à établir un peu plus d'équité entre les acteurs traditionnels – notamment les diffuseurs – et les nouveaux acteurs que sont les plateformes, comme les plateformes de VOD. Cette réforme va dans le bon sens, avec la mise en place de taxes dédiées, que nous avons vulgairement appelées taxe YouTube et taxe Netflix, et la réforme de la régulation du secteur, avec la réécriture de la directive SMA. La France est, là encore, tête de proue dans les politiques culturelles, notamment dans la manière dont nous traitons les aides aux médias. Nous voterons donc évidemment en faveur de ce budget.
La commission adopte les crédits de la mission Médias, livre et industries culturelles non modifiés.
Elle examine ensuite les amendements au compte de concours financier Avances à l'audiovisuel public.
Article 40 et état D.
La commission examine l'amendement II-CF554 de Mme Sylvie Tolmont.
Notre amendement vise à abonder les crédits bénéficiant à France Télévisions, à hauteur de 61 millions d'euros. Alors que France Télévisions a déjà vu ses crédits chuter de 25 millions d'euros lors de la précédente loi de finances, le Gouvernement prévoit une nouvelle baisse de 61 millions d'euros dans le nouveau projet. Si cette nouvelle diminution s'inscrit dans le cadre de la trajectoire budgétaire arbitrée à l'été 2018 par l'exécutif pour l'audiovisuel public, elle entre en totale contradiction avec les priorités définies par le Gouvernement pour guider ce projet de transformation, qu'il s'agisse de culture et d'éducation, de proximité, d'information et de création française et européenne. Sur fond de mouvement des gilets jaunes et de crise de la confiance des citoyens envers les médias, comment assurer un renforcement de la valeur ajoutée des contenus et leur utilité sociale, tout en privant France Télévisions de 60 millions d'euros à horizon 2022 ?
La diminution de la dotation allouée à France Télévisions de 60 millions d'euros s'inscrit pleinement dans la trajectoire déterminée par le Gouvernement en 2018 d'une diminution de 190 millions d'euros des crédits versés au secteur de l'audiovisuel public à l'horizon 2022, dont 160 millions d'euros pour France Télévisions. J'ajoute que la dotation diminue en réalité de 42 millions d'euros. Les 18 millions d'euros supplémentaires résultent de la réforme du financement du CNC, qui entraîne une baisse de la taxation de France Télévisions. Ces économies se font parallèlement à une réforme importante de l'offre audiovisuelle publique qui aura lieu au premier semestre 2020. La société a mis en place un plan d'économies ambitieux pour se conformer à la trajectoire demandée. Il ne me semble pas aujourd'hui pertinent de remettre en cause la trajectoire qui a été arrêtée en 2018. Ce sera donc un avis défavorable.
La commission rejette l'amendement II-CF554.
Elle examine ensuite l'amendement II-CF574 de Mme Sylvie Tolmont.
Suivant l'avis défavorable de la rapporteure spéciale, la commission rejette l'amendement II-CF574.
Elle examine ensuite l'amendement II-CF555 de Mme Sylvie Tolmont.
Nous proposons par cet amendement d'abonder les crédits bénéficiant à Arte France à hauteur de 2 millions d'euros. Là encore, cette nouvelle diminution pour Arte France entre en contradiction avec la stratégie pluriannuelle de notre chaîne franco-allemande, marquée par l'engagement de produire davantage de programmes inédits, d'accroître la nature européenne des programmes et d'affirmer son caractère d'entreprise responsable et innovante. Symbole audiovisuel de l'union franco-allemande comme moteur d'une Europe de la culture, comment Arte peut-elle assurer convenablement ses missions alors que ses crédits sont réduits chaque année ?
La diminution de 2,2 millions d'euros de la dotation d'Arte France en 2020 correspond au « gain financier » procuré par la réforme du financement du CNC à la chaîne, la baisse de la contribution d'Arte à la TST-E. À périmètre constant, la dotation reste donc stable. Je vous propose de retirer votre amendement. À défaut, ce sera un avis défavorable.
La commission rejette l'amendement II-CF555.
Elle examine ensuite les amendements II-CF572 et II-CF558 de Mme Sylvie Tolmont.
Suivant l'avis défavorable de la rapporteure spéciale, la commission rejette les amendements II-CF572 et II-CF558.
Elle examine ensuite l'amendement II-CF559 de Mme Sylvie Tolmont.
Suivant l'avis défavorable de la rapporteure spéciale, la commission rejette l'amendement II-CF559.
Elle examine ensuite l'amendement II-CF560 de Mme Sylvie Tolmont.
Suivant l'avis défavorable de la rapporteure spéciale, la commission rejette l'amendement II-CF560.
La dotation en faveur de l'ensemble des groupes de l'audiovisuel public va diminuer de 70 millions d'euros en 2020, soit une baisse deux fois plus importante que celle enregistrée en 2019, et ce n'est pas fini. En effet, les groupes publics, dans le cadre de CAP 22, devront faire des économies à hauteur de 190 millions d'euros à l'horizon 2022. C'est énorme. Nous dénonçons la forme et le fond du présent budget, très éloigné de la défense d'un service public de l'audiovisuel émancipateur et créateur, cher aux salariés du secteur, très peu considérés par votre Gouvernement. En réalité, c'est une véritable casse du service public de l'audiovisuel à laquelle nous assistons, et nous le regrettons profondément. Nous pourrions d'ailleurs nous interroger sur la portée politique d'une telle décision et ce qu'elle cache.
La commission adopte les crédits du compte de concours financier Avances à l'audiovisuel public non modifiés.
Avant l'article 73.
Elle examine en discussion commune les amendements II-CF563 et II-CF-561 de Mme Sylvie Tolmont.
Par l'amendement II-CF563, nous demandons au Gouvernement de remettre un rapport d'information au Parlement sur la situation de l'audiovisuel public dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi. Le projet de loi de finances pour 2020 prévoit plus de 70 millions d'euros de coupe budgétaire pour l'audiovisuel public. France Télévisions prend à son compte la quasi-intégralité des efforts demandés, avec 61 millions d'euros. Suivent Radio France avec 5 millions, Arte France avec 2 millions et enfin, France médias monde et l'INA à hauteur d'un million d'euros chacun. Seul TV5 Monde voit son budget inchangé. Voilà pourquoi nous demandons qu'un rapport soit remis pour nous faire part des intentions du Gouvernement en matière d'audiovisuel public français.
L'amendement II-CF561 est défendu.
Ce sera un avis défavorable, dans la mesure où la situation de l'audiovisuel public français va être profondément modifiée par le projet de loi qui arrive au premier semestre 2020, et que ce projet de loi sera accompagné d'une étude d'impact qui nous donnera de la visibilité sur la situation de l'audiovisuel public.
Je comprends vos préoccupations. Nous avons quand même des efforts budgétaires très importants qui sont demandés à l'audiovisuel public. Évidemment, nous sommes demandeurs d'une étude d'impact. Il y a beaucoup de choses qui bougent, notamment ce que vous avez évoqué sur France Télévisions, des chaînes qui deviennent purement numériques, l'INA qui a une direction très technique avec beaucoup de développements informatiques qui sont assez coûteux et qui font référence dans le monde entier.
Je pense que le projet de loi de réforme de l'audiovisuel public sera l'occasion de creuser tout le sujet, d'avoir la vision exacte du ministre de la culture. Je rejoins l'avis de la rapporteure. Je pense qu'il faut attendre la venue de cette loi, mais avec une étude d'impact sérieuse sur le sujet. Nous serons attachés à savoir comment est traité notre audiovisuel public, auquel la France tient.
La commission rejette successivement les amendements II-CF563 et II-CF561.
Membres présents ou excusés
Réunion du mercredi 23 octobre 2019 à 21 heures
Présents. - M. Saïd Ahamada, Mme Émilie Bonnivard, M. Fabrice Brun, Mme Émilie Cariou, M. Gilles Carrez, Mme Anne-Laure Cattelot, M. Philippe Chassaing, M. François Cornut-Gentille, Mme Marie-Christine Dalloz, Mme Dominique David, M. Benjamin Dirx, M. Jean-Paul Dufrègne, Mme Stella Dupont, M. Olivier Gaillard, M. Joël Giraud, Mme Perrine Goulet, M. Alexandre Holroyd, M. Daniel Labaronne, Mme Marie-Ange Magne, Mme Lise Magnier, Mme Catherine Osson, M. Xavier Paluszkiewicz, M. Hervé Pellois, Mme Christine Pires Beaune
Excusés. - M. François André, M. David Habib, M. Marc Le Fur, Mme Marine Le Pen, Mme Valérie Rabault, M. Olivier Serva, M. Éric Woerth
Assistaient également à la réunion. - Mme Valérie Bazin-Malgras, Mme Céline Calvez, M. André Chassaigne, Mme Sereine Mauborgne, M. Joaquim Pueyo, Mme Sylvie Tolmont, Mme Michèle Victory
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